2 Les syst~mes nationaux et internationaux
d'épargne et de crédit.
De nombreuses caisses locales d'épargne et de
crédit se sont organisées en Afrique pour obtenir davantage de
crédit que les possibilités créées par leur
épargne et répondre ainsi à la demande locale ou pour
placer l'épargne non prêtée. Elles ont donc
constitué des unions et fédérations, quelquefois
puissantes comme l'Association Africaine de crédit agricole. Au niveau
national, prenons l'exemple de l'Afrique de l'Ouest où des organisations
telles que Nyesigiso et Kafo Jiginew au Mali, l'ACEP au Sénégal,
la FECECAM au Bénin rassemblent des dizaines de milliers de membres
épargnants et/ou emprunteurs. Ce sont de plus des partenaires efficaces
et incontournables de l'attribution du crédit au monde paysan ou aux
artisans du secteur
non formel urbain. Ces unions et fédérations
sont bien organisées, les taux d'intérêt utilisés
pour rétribuer l'épargne ou prêter aux paysans, aux
commerçantes ou aux femmes entrepreneurs varient selon les cas mais sont
souvent en-dessous des prix du marché. Il n'est pas rare de constater
que ces caisses ne s'autofinancent pas, principalement à cause des frais
engendrés par leurs efforts de formation.
3 Les fondations et ONG, gestionnaires de
microcrédits.
Depuis une vingtaine d'années, de très
nombreuses fondations ou ONG se sont créées pour distribuer et
gérer le microcrédit en Afrique. Ces organisations agissent comme
des intermédiaires entre les « financeurs » (agences de
coopération, ONG du Nord, banques, etc.) et les demandeurs de
crédit, isolés ou organisés en petits groupes
professionnels. C'est ainsi que dans l'optique de répondre aux besoins
exprimés par les producteurs locaux, se sont créés l'APEM
à Madagascar, Start Up Fund en Afrique du Sud... Des millions de petits
producteurs ou commerçants dépendent de leur action. Le
problème de ces organisations est que leur coût d'intervention
étant élevé, elles doivent facturer leurs services au prix
coütant, ce qui entraîne une forte augmentation des taux
d'intérêt.
4 Les Banques de microcrédit.
Depuis quelques années, entraînées par
l'expérience de la Grameen Bank du Bangladesh, de grandes Fondations et
ONG du microcrédit de plusieurs pays d'Afrique sub-saharienne ont leur
propre banque. Limitées dans leur financement et souvent par des
règles administratives nationales, ces organisations, face à la
demande considérable de crédit émanant des petits
producteurs et commerçants du milieu informel mais aussi des petites et
moyennes entreprises naissantes ou en développement, ont instauré
des instruments financiers qui ont évolué vers la création
d'institutions financières formelles et de banques,
spécialisées dans le financement du microcrédit. A titre
d'exemple la Banque K-REP et la JAMII BORA du Kenya qui gèrent chacun un
portefeuille de microcrédit supérieur à 10 millions de
dollars américains et qui figurent sur la liste des institutions
financières de proximité, avant-gardistes et
résolument engagées dans la lutte contre la
pauvreté(1) . Par ailleurs, les professionnels du
microcrédit se sont dotés des instruments financiers et des
banques nécessaires pour bénéficier des lignes de
crédit accordées par les Banques internationales de
développement ou les Agences bilatérales de
coopération.
Une étude menée dans 17 pays d'Afrique
subsahariens par le PNUD et la Banque mondiale a permis d'identifier 98
établissements de micro financement et de financement rural. La
moitié des entités ainsi recensées sont des organisations
non gouvernementales qui fournissent des services financiers de petite
échelle, un tiers sont des associations d'épargne et de
crédit, le reste se compose de banques et autres institutions
financières qui octroient de petits prêts. Par ailleurs,
d'après un document d'information sur les associations de crédit
africaines récemment publié par Afrique Relance, le nombre
officiel de membres des mutuelles affiliées à l'Association des
coopératives d'épargne et de crédit d'Afrique ( ACECA )
est passé de 1,6 million en 1984 à 5,6 en 1994. Le Kenya en
compte à lui seul 1,3 million, dont l'épargne atteint au total
presque 338 millions de dollars.
Mais pour favoriser l'essor du microcrédit en Afrique,
il est nécessaire de mieux encadrer ce système. En effet suite au
sommet du microcrédit de Washington de 1997, les représentants
africains ont déploré que ce dernier se soit surtout
intéressé au succès du Microcrédit en Asie et en
Amérique Latine. La représentante de la « Women`s world
Banking du Ghana » avait alors déclaré : « On n'a pas
du tout prêté attention à l'Afrique ». Dans le but par
conséquent de pallier à ce manque d'intérêt de la
communauté internationale et d'améliorer la gestion de la
microfinance sur le continent africain, divers forums se sont mis en place et
aujourd'hui le système de microcrédit africain semble susciter un
intérêt certain de la part de l'Occident. Ainsi, le rapport 2006
sur la campagne du microcrédit fait état des résultats
atteints par la communauté internationale. En date du 31 décembre
2005, 31333 institutions de microcrédit ont par exemple affirmé
desservir 113 261 390 clients ayant un prêt en cours, dont 81 949 036
(1) Lambert MIMPIYA Akan, « la microfinance
éradique- t- elle la pauvreté ? » In Congo Afrique
n°428 octobre 2008, p 666
étaient considérés comme faisant partie
des plus pauvres lorsqu'ils ont contracté leur premier emprunt. Selon ce
rapport, depuis 1997 le microcrédit a connu une évolution
indéniable, et cela est notamment valable pour l'Afrique sub-saharienne.
En effet, étant donné que l'Afrique est la seule région du
monde où l'on prévoit une aggravation de la pauvreté, il y
a là une solide raison d'accorder une attention particulière aux
familles les plus démunies de ce continent. Cependant dans ce contexte
il est aussi essentiel d'analyser le rôle des gouvernements africains
dans le développement du microcrédit.
C'est à titre d'exemple dans cette optique que le 8
avril 2005 les dirigeants de 20 pays africains se sont rassemblés
à Cotonou pour discuter des défis posés par le
microcrédit en Afrique. Ministres des finances et gouverneurs de Banques
centrales ont donc examiné avec les responsables des institutions de
microfinance, partenaires au développement et investisseurs
privés, les conditions qui permettront au continent africain, à
travers son secteur de la microfinance, de réaliser les objectifs
assignés par les Nations-Unies pour l'édification d'ici 2015 d'un
secteur financier accessible au plus grand nombre. Les gouvernements africains
commencent donc à s'intéresser aux opportunités de
développement qu'offre le microcrédit. Prenons l'exemple du
gouvernement burkinabé qui à Ouagadougou a décidé
de mettre en place une stratégie avec les partenaires techniques et
financiers permettant de généraliser l'accès des
burkinabés (surtout les plus démunis) à un système
financier ouvert. Ce plan d'action de la stratégie nationale de
microfinance est à hauteur de 12, 555 milliards de nos francs et
s'articule autour de cinq axes principaux : il s'agit d'aménager le
cadre légal, réglementaire et fiscal ; renforcer les
capacités de gestion des institutions de microfinance ;
développer et diversifier les services financiers ; et enfin
professionnaliser les institutions et améliorer leur système
d'information et de communication en vue de favoriser l'intégration du
secteur au système global. Il y a ainsi une réelle volonté
de ce gouvernement de faire de la microfinance « un puissant
système alternatif d'intermédiation financière capable de
toucher les plus défavorisés ». Selon le Directeur
Général du Trésor Public et de la Comptabilité,
Lucien Marie Noël Bembamba, le plan d'action vise à lever les
contraintes auxquelles fait face le secteur. Il s'agit de pallier au faible
taux de couverture et de gouvernance au sein de ces institutions et ce, pour
permettre à la microfinance de jouer pleinement son
rôle d'outil de lutte contre la pauvreté.
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