Introduction
Depuis quelques années, le monde
médico-social est en pleine mutation. Les EHPAD (Etablissement
d'Hébergement pour Personnes Agées Dépendantes)
n'échappent pas à cette transformation, les textes
réglementaires qui les régissent en sont la preuve.
Mais ce n'est pas la seule modification du visage des
EHPAD. Les personnes accueillies dans ces types d'établissement, sont de
plus en plus âgées, dépendantes. Elles
préfèrent rester chez elles le plus longtemps possible. Ce type
d'hébergement représente à leurs yeux et à ceux de
leur famille, le dernier domicile, celui de la mort.
Cependant les EHPAD sont considérés
comme des lieux de vie. Les professionnels qui y travaillent, sont
sensibilisés à ce fait. La présence du projet de vie en
EHPAD permet de prendre en charge le résident, dans une autre dimension
que celle du soin, une dimension sociale et d'animation. Ce projet, qui se
décline du projet d'établissement, est composé de trois
sous projets : le projet personnalisé ou individualisé, le projet
d'animation et le projet de soins.
Ce projet de vie est lié au temps et à
l'état de santé du résident. Il est en constante
évolution. Dans tout EHPAD, il devrait être donc présent et
vivant. Or, à l'heure actuelle, beaucoup d'établissements ne
l'ont pas formalisé.
Le projet de vie de l'EHPAD où j'ai
travaillé, en tant qu'infirmière, n'a pas non plus fait
l'adhésion du personnel et n'est pas utilisé. En tant que futur
cadre, de santé, je me demande quelles en sont les raisons. Pourquoi le
cadre n'arrive pas à le faire vivre ? Plusieurs interrogations sur le
projet de vie me viennent à l'esprit. Une réflexion sur le projet
de vie s'impose.
Ma première partie traite de mon cheminement,
qui part de l'état des lieux de l'EHPAD où je travaille,
jusqu'à l'objet de ma recherche. Je situe ensuite les EHPAD à
l'heure actuelle.
Des concepts théoriques sur la personne
âgée, sur le travail des professionnels sont évoqués
dans une troisième partie.
L'enquête faite dans des EHPAD, me permet, dans
la partie suivante, de dégager des points particuliers mis en exergue
lors du travail d'analyse. Ceux-ci sont développés dans une
cinquième partie.
Puis s'en suit une réflexion autour du cadre de
santé et du projet de vie, dont la finalité est d'être un
étage de ma construction professionnelle et identitaire.
Je termine par les limites rencontrées au cours de
ce travail et je conclus sur l'avenir de ce projet de vie en EHPAD.
1. Elaboration de l'objet de recherche 1.1. Mon
constat
1.1.1. Connaissance de la personne âgée
> Dans mon entourage familial
Benjamine de ma famille, j'ai été
entourée de personnes âgées dès mon enfance. Mon
grand père paternel est en effet né à la fin du 19
ème siècle, et j'ai des cousins, qui ont l'âge
d'être des oncles ou des tantes. Mon père m'a eu aussi à un
âge avancé. La vieillesse n'est pas un souci pour moi, puisqu'elle
fait partie de ma vie.
> Dans ma vie professionnelle
Le travail en hémodialyse, pendant 18 ans, m'a
fait côtoyer aussi des personnes âgées autonomes, ayant une
histoire de vie souvent peu commune.
Arrivée en EHPAD (Etablissement
d'Hébergement pour Personnes Agées Dépendantes) depuis 4
ans, la rencontre avec des personnes âgées moins autonomes, a
été un moment de questionnements. Je me suis interrogée
sur ma place en EHPAD, sur mes pratiques professionnelles, et sur mon regard
sur une `'autre vieillesse». J'ai noué très vite avec ces
personnes, cependant, des relations d'échanges, des relations
d'écoutes, des relations que je qualifierai de `' tendres `'et qui
peuvent mettre à rudes épreuves notre conception du
métier.
Ces personnes qui vivent en EHPAD sont nommées
résidents. L'EHPAD est généralement leur dernier lieu de
vie. Elles sont soit dépendantes, soit avec des problèmes
cognitifs ou temporo-spatiaux, soit plus ou moins valides, soit atteintes de la
maladie d'Alzheimer. Ce qu'il ne faut pas oublier je crois, même en
position de soignant, c'est que ces personnes ont eu et ont encore une vie, de
la famille, des amis et que la plupart représente une page de notre
histoire.
Elles ont connues d'autres époques et il est
toujours intéressant de s'arrêter, à leur vie
antérieure. Souvent le temps ne compte plus pour elles, sauf quand elles
attendent désespérément le coup de téléphone
ou la visite d'un proche. « Ils arrivent avec le sentiment [...]
attendre la mort1».
Ces personnes âgées résident hors de
leur domicile familial pour maintes raisons :
> Par leur propre volonté, suite au
décès de leur conjoint, elles n'ont plus envie de rester
seules,
> Suite à une hospitalisation, elles sont dans
une incapacité temporaire ou définitive de rentrer chez
elles,
1 REJAULT William, (2009), Maman, est-ce que ta chambre
te plaît ?, Editions Privé, Editions Michel Lafon, Paris, 260
p.
> Elles deviennent incapables de rester seules chez
elles suite à des ma-
ladies ou détériorations de leur
état physique et/ou psychique,
> Les familles (enfants, conjoints) ne peuvent plus
les garder à domicile :
lourdeur de la prise en charge, souffrance induite pour
les aidants.
Durant ce temps en établissement, j'ai eu
connaissance de différents projets concernant l'EHPAD de manière
informelle par la psychologue et le cadre de santé : projet
d'établissement, projet de vie, projet de soins, projet
personnalisé.
Ces notions m'étaient inconnues. Je me suis
informée auprès de mon cadre de santé et auprès de
la direction.
Ces projets sont dans l'ordre du législatif
m'a-t-on répondu : convention tripartite, référentiel de
qualité Angélique. Qu'il y avait il sous ces mots ?
Il me semble qu'il faut aussi connaitre l'institution
dans laquelle nous travaillons : « La particularité des
institutions gérontologiques est qu'elles font coïncider dans un
même espace un lieu de vie et un lieu de travail2
».
|