CHAPITRE II : NECESSITE DE MAINTIEN DE LA PAIX ET
DE LA SECURITE INTERNATIONALES
Au cours du XXème siècle, la communauté
internationale a fait l'expérience que la paix ne se postulait ni ne se
décrétait, mais qu'elle dépendait de l'instauration d'une
« société des nations » englobant les Etats.
L'expérience a également montré que les institutions de la
communauté internationale se devaient d'être effectives, la S.D.N.
a ainsi cédé la place à l'O.N.U. et celle-ci a dû
adapter ses missions et ses modes d'action. Tout comme le règlement
pacifique des différends, le maintien de la paix et de la
sécurité internationales est un des principes fondamentaux des
relations internationales.
Le maintien de la paix et de la sécurité
internationales repose plus sur le fait de maintenir les relations
internationales entre Etats dans un espace plus pacifié que conflictuel.
La condamnation du recours à la force armée n'a pas éteint
les nombreux foyers de tension de par le monde. Dans la pratique, on ne
constate qu'une diminution des conflits armés internationaux et une
recrudescence des conflits armés non internationaux c'est-à-dire
des conflits internes aux Etats.
A cette fin, le droit international comporte un certain nombre
de règles tendant à réglementer le recours à la
force (Section 1). Quand aux N.U., elles se voient à reconnaître
le rôle principal à travers le C.S. dans les maintiens de la paix
et de la sécurité internationales (Section 2) afin que les
rapports des Etats soient le plus pacifié.
SECTION 1 : LA REGLEMENTATION DU RECOURS A LA FORCE
Le droit de la guerre est la mère du droit
international. C'est en donnant une expression théorique à la
guerre que les précurseurs du jus cogens ont posé les
jalons du droit international public.
A l'origine, les Etats avaient droit ou toute
compétence pour recourir ou non à la guerre, d'utiliser la force
au nom de leur souveraineté et dans certains cas la guerre est
jugée juste comme l'a théorisé l'avocat et philosophe
hollandais Grotius49 en 1625.
L'emploi de la force au fil des années a
été progressivement limité avant d'être purement et
simplement mis hors la loi par le Pacte Briand-Kellog du 26 Août 1928 et
au-delà par la Charte des Nations Unies du 26 juin 1945.
Néanmoins, le droit international a progressivement
interdit le recours à la force (parag. 1) dans les relations
internationales et limité son usage concernant son emploi sur le droit
de légitime défense (parag. 2).
PARAGRAPHE 1 : L'INTERDICTION PROGRESSIVE DU RECOURS A
LA
FORCE
Progressivement, au cours de l'évolution de
l'humanité la guerre a été déclarée nuisible
et inutile sauf que de tout temps, les Etats ont conclu des traités de
commerce, d'amitié, d'alliance ou de non agression dans lesquelles ils
s'engageaient à ne pas utiliser la force l'un contre l'autre. Même
si ce phénomène historique qu'est la guerre a dominé le
comportement des hommes depuis la préhistoire jusqu'à nos jours,
il n'en demeure pas moins
49 Juriste des Provinces Unies (aujourd'hui Pays-Bas)
qui posa les fondations du droit international, fondé sur le droit
naturel. Il se situe au tout premier rang des penseurs de la science juridique
et de la philosophie de l'État.
que la communauté internationale a posé les
jalons d'une première réglementation de la force avant que
celle-ci ne débouche au lendemain de la première guerre mondiale
avec le Pacte de la Société des Nations à une restriction
(1) avant sa prohibition totale (2).
1- Les restrictions à l'usage de la force
:
. En défendant les agissements de Milon lors d'un conflit
armé interne à Rome, Cicéron
plaida << silent enim leges inter ab arma ».
Même aujourd'hui, nombreux sont celles et ceux qui mettent en doute
et qui nient que le droit puisse réglementer le comportement dans des
situations exceptionnelles, anarchiques et violentes tels que les conflits
armés. De se fait peuton espérer que lorsque la survie du groupe
et de chacun est en jeu que des considérations juridiques puissent poser
des limites au comportement des hommes ?
La réponse à cette question résulte du
fait qu'en légiférant ou en mettant en place des instruments qui
servent à restreindre l'usage de la force, le droit tente ainsi de
répondre aux exigences de la communauté des hommes à
savoir faire en sorte que la guerre soit déclarée
illégale, illicite afin de sauvegarder la société
internationale et lui permettre de vivre dans un cadre pacifique. En effet,
cela a été le fait des deux Conventions de La Haye de 1899 et de
1907. Seulement, c'est la deuxième Convention de La Haye du 18 octobre
1907 dite aussi Convention Drago-Porter qui sera le plus à l'origine des
restrictions de l'usage de la force sans pour autant oublier que cette
tentative de restriction de l'emploi de la force a été
initiée depuis l'antiquité avec Cicéron prenant la
défense de Milon. Ensuite, à la suite de celle-ci, le Pacte de la
S.D.N. signé le 28 juin 1919, au lendemain de la Première guerre
(1914-1918), est venu complètement limiter l'usage de la guerre. Ainsi,
pourrons-nous considérer plus ou moins que le Pacte est le premier
traité à caractère universel à venir restreindre
l'emploi de la force dans les relations internationales.
L'art. 10 du texte annexé au Traité de
Versailles à savoir le Pacte de la S.D.N. stipule que << les
membres de la société s'engagent à respecter et maintenir
contre toute agression extérieure l'intégrité territoriale
et l'indépendance politique présente de tous les membres de la
société ». Cet article peut être qualifié
d'un véritable traité de non agression générale
mais il n'empêche pas totalement l'usage de la force. C'est ainsi que
nous pouvons affirmer de concert avec Philippe CHRESTIA que cet article
<< ne protège, en effet, que les membres de la S.D.N. contre
une agression extérieure c'est-à-dire contre une utilisation
unilatérale de la force. En 1919, les Etats peuvent donc utiliser la
force dès lors que c'est en conformité avec le Pacte. Ils peuvent
notamment se faire la guerre ce qui implique une relation bilatérale et
une parité de situation entre les
belligérants50».
Toutefois, << le Pacte de la S.D.N. connaîtra
des difficultés pour sa mise en oeuvre car il ne sera pas ratifié
par les Etats Unis d'Amérique et l'entrée tardive de l'U.R.S.S.
en 1934 mais aussi il y a eu les retraits successifs du Japon et de l'Allemagne
hitlérienne en 1933 et de l'Italie de Mussolini en 1937. Cette dimension
universelle qu'on a voulu lui (S.D.N.) conférer lui a fait défaut
car étant essentiellement basée sur les Etats
européens » mais aussi il faut reconnaître qu'en ce
temps la plupart des Etats surtout africains étaient sous domination
coloniale anglaise, portugaise ou française.
Malgré cette disposition de l'art. 10 du Pacte, la
S.D.N. n'a pas pu empêcher le déclenchement de la Seconde guerre
à cause de son inefficacité à prévenir le recours
à la guerre, l'absence totale de tout organe d'intervention armée
ou non armée, son pouvoir de recommandation et surtout son
incapacité à s'opposer aux nombreuses violations de la paix.
Seulement de 1919 au déclenchement de la seconde
guerre, la communauté internationale a tenté d'intervenir,
à tout faire pour assainir les relations internationales et les
maintenir pacifier. C'est ainsi que dès 1928, elle a tenté de
prohiber l'emploi de la force avant de complètement bannir ce dernier au
lendemain de la seconde guerre à travers la Charte des N.U.
signée à San Francisco le 26 juin 1945 par des
représentants de 50 pays.
2- La prohibition de l'usage de la force
:
D'après Philippe CHRESTIA, la prohibition de l'usage de
la force s'est faite en deux étapes. En effet, il y eut le Pacte
Briand-Kellog du 26 août 1928 qui tenta de limiter le recours à la
force dans les relations internationales avant que celui ne soit
définitivement mis hors-laloi par la Charte des N.U.
Le Pacte Briand-Kellog, comme il faut déclarer la
guerre hors-la-loi, est signé entre la France et le Royaume Uni, Pacte
à travers lequel ces deux puissances déclarent solennellement
condamner le recours à la guerre pour régler leurs
différends internationaux en y renonçant en tant qu'instrument de
politique nationale dans leurs relations mutuelles. << Bien qu'il
s'agisse d'un traité bilatéral, ce texte est
considéré comme le point de départ de la mise hors-la-loi
de la guerre. En effet, il a fait passer la question de l'interdiction de la
guerre à la légitimité à travers la
réintroduction de la guerre jusque dans le Pacte de la S.D.N. à
la légalité51 ».
En hissant la prohibition de la guerre dans les relations
internationales au niveau d'une norme impérative de valeur très
large, les rédacteurs de la Charte ont ainsi trouvé un moyen de
pouvoir condamner tout Etat contrevenant à ce principe. En effet, c'est
dès l'art. 2 parag. 4 que ceux-ci ont annoncé la couleur à
travers le chapitre I intitulé << buts et principes
». Cet article ne stipule-t-il pas que << les membres de
l'organisation s'abstiennent dans leurs relations internationales de recourir
à la menace ou à l'emploi de la force, soit contre
l'intégrité territoriale ou l'indépendance politique de
tout Etat, soit de toute autre manière incompatible avec les buts des
Nations Unies ». A la lecture de cet article, on se rend
compte que l'interdiction qu'il pose est beaucoup plus étendue que celle
de l'art. 10 du Pacte de la S.D.N. C'est ainsi que Philippe CHRESTIA
écrivait << d'abord, ce n'est plus le seul usage de la force
qui est prohibé mais aussi la menace. Ensuite, l'article protège
les Etats non membres des Nations unies. Enfin, la prohibition de
manière assez large s'applique à tout usage incompatible avec les
buts des Nations unies. Bien que les Etats aient quand même recours
à la force en violation de la Charte, on peut considérer que
cette règle reprise d'ailleurs par les résolutions de
l'Assemblée générale et très souvent visée
par le Conseil de sécurité est l'expression du droit
international coutumier. La charte, en revanche, admet des dérogations
à cette interdiction et le droit de légitime défense en
fait partie52 ».
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