III- UNE ESQUISSE DE COMPARAISON DES FORCES
ARMÉES CAMEROUNAISES ET NIGÉRIANES
Ces forces belligérantes peuvent être
présentées ainsi qu'il suit :
Tableau 4 : Les effectifs des forces
camerounaises et nigérianes en 1994.
Défense
|
Cameroun
|
Nigeria
|
Effectif total
|
28000
|
85000
|
Armée de terre
|
14000
|
62000
|
Armée de l'air
|
1500
|
7300
|
Garde nationale
|
/
|
7000
|
Gendarmerie
|
11000
|
/
|
Marine nationale
|
Effectif total
|
1600
|
9500
|
Frégates
|
/
|
2
|
Corvettes
|
/
|
2
|
Vedettes lance missiles
|
/
|
6
|
Garde côtes
|
2
|
53
|
Navire porteur de mines
|
/
|
2
|
patrouilleurs
|
1
|
/
|
Patrouilleur porte-missiles
|
1
|
/
|
Source : Tableau conçu
à partir des données recueillies de l'article d'Emmanuel
Éla Éla(2000), page 68.
D'après ce tableau, le Nigeria compte au total en 1994,
85000 hommes sous les drapeaux dont 62 000 pour l'armée de terre, 7300
pour l'armée de l'air, 9500 pour la marine et 7000 pour la garde
nationale ; disposant d'un matériel lourd assez impressionnant en
nombre. Le déséquilibre est frappant à l'observation des
forces armées camerounaises qui comptaient un total d'environ 28000
hommes dont 14000 pour l'armée de terre, 1500 pour l'armée de
l'air, 1600 pour la marine et 1100 pour gendarmerie ; disposant de moins en
moins de matériel lourd. Le déséquilibre se fait encore
sentir avec acuité si l'on prend en considération le seul
équipement de la marine. La marine nigériane dispose au total de
65 navires (2 frégates, 2 corvettes, 6 vedettes lance missiles, 53 garde
côtes, 2 navires porteurs de missiles). Celle du Cameroun n'en dispose
que quatre
(2 gardes côtes, 1 patrouilleur, un patrouilleur porte
missiles ainsi que quelques embarcations amphibies).
Potentiellement, sur le plan militaire, le Nigeria
représente une force de frappe indéniable tant sur le plan humain
que matériel devant le Cameroun. De ce fait, on ne saurait penser que l'
« Opération Delta » pouvait assurer la pérennité
de la souveraineté camerounaise sur la presqu'île
querellée. Cette réalité est confirmé par les
données du ci-dessous.
Tableau 5 : Etat des défenses
nigériane et camerounaise en 2006.
Défense
|
Cameroun
|
Nigeria
|
Effectif total
|
14000
|
78500
|
Budget
|
$197 millions
|
$572 millions
|
Dépenses militaires
|
1,63% de PNB
|
1,92% du PNB
|
Evolution du budget de la défense
|
+ 5%
|
+22.58%
|
Dépenses militaires par habitant
|
$12
|
$4
|
Dépenses militaires par militaire
|
$14.071
|
$7.287
|
Armée de terre
|
effectifs
|
12.500
|
62.000
|
Véhicules blindés
|
110
|
250
|
Forces aériennes
|
effectifs
|
300
|
9.500
|
Avions de combat
|
4
|
50
|
Marine nationale
|
Effectifs
|
1.300
|
7000
|
Sous marins
|
2
|
/
|
Corvette
|
/
|
5
|
frégates
|
/
|
1
|
Source : Tableau conçu
à partir des données recueillies dans l'ouvrage de Boniface
(2006), pp. 438 et 364.
D'après ce tableau, la défense nigériane
présente un effectif de 78500 hommes dont 62000 pour l'armée de
terre équipée de 250 véhicules blindés, 9500
pour l'armée de l'air équipée de 50 avions
de combat, 7000 pour la marine équipée de 5 corvettes et d'une
frégate.
La défense camerounaise représente les
1/6ème de la défense nigériane soit un total
de14000 hommes dont 12500 pour l'armée de terre équipée de
110 véhicules blindés, 300 pour l'armée de l'air nantie de
4 avions de combat, 1300 pour la marine nationale équipée de sous
marins.
Cette réalité n'est que le reflet de la valeur
du budget de la défense qui est de 572 millions de Dollars pour le
Nigeria contre 197 millions de dollars pour le Cameroun. Il reflète
également le taux d'évolution du budget de la défense qui
est de 22,58% pour le Nigeria contre 5% pour le Cameroun.
Ce déséquilibre flagrant entre la défense
nigériane et camerounaise ne pouvait que conforter la thèse de
ceux qui pensaient que le Cameroun est un « nain » devant le Nigeria
et par conséquent, ne pouvait résister devant la deuxième
puissance militaire africaine après l'Afrique du sud. Alors, comment
comprendre que le Cameroun ait tenu ses positions jusqu'au bout ? Ou encore,
pourquoi malgré le déséquilibre du rapport de force, le
Cameroun a pu résister à la force de frappe nigériane ?
La résistance camerounaise malgré ce
déséquilibre du rapport de force (basé sur la
supériorité numérique nigériane en hommes et en
armes) a remis en cause « la loi du carré » de Lanchester (loi
qui rend le résultat du combat plus sensible au nombre qu'à la
performance (Caplow et Vennesson 2000 : 172)). L'issue de cette guerre repose
sur l'efficacité politique et stratégique, l'efficacité
opérative, l'efficacité tactique des forces camerounaises et sur
les faiblesses nigérianes.
- L'efficacité politique et stratégique
camerounaise s'est observée par la fermeté des objectifs de
sécurité définis par le gouvernement et l'engagement des
moyens pour les atteindre. Pour mener à bien leurs missions, les forces
camerounaises ont disposé des ressources considérables notamment
du budget, des armements, des ressources
humaines. Ces ressources ont été obtenu par une
franche collaboration entre les chefs des armées et les décideurs
politiques et administratifs.
- L'efficacité opérative des Unités
camerounaises quant à elle s'est observée par l'excellente
planification, conduite et du parfait soutien des opérations
dirigées par l'Opération Delta divisée en trois
Groupements Opérationnels le GOS en poste avancé, le GOC et le
GON. Ce succès a été du aussi à l'excellente
coopération et coordination des actions interarmes et
interarmées, dont la responsabilité incombait au Commandant de
l'Opération Delta, le Capitaine de Vaisseau Oyono Mveng. Aussi, la
sélection et la formation rigoureuses, fondées sur le travail
physique et intellectuel se sont avérées un facteur
déterminant de la victoire camerounaise.
- L'efficacité tactique camerounaise s'est
manifestée par l'excellente préparation, conduite et
exécution des manoeuvres définies par le Capitaine de Vaisseau
Oyono Mveng visant à empêcher l'avancée des forces
nigérianes à l'intérieure du territoire camerounais.
Enfin, la victoire camerounaise a reposé sur les
faiblesses nigérianes à savoir une direction politique
déficiente, un commandement hésitant, une mauvaise planification,
la formation au rabais des forces armées etc. Ces manquements ont
réduit à néant les bénéfices issus de cette
supériorité numérique et technologiques. Cette
défaite nigériane vient conforter l'hypothèse selon
laquelle, la supériorité numérique et technologique
à elle seule n'est pas une garantie de succès à la guerre.
A notre avis, la stratégie vaut son pesant d'or dans l'issue de toute
guerre.
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