Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010

DEDICACE
Ce travail est dédié :
A mon Père, ABENA Philippe Marie pour avoir cru au
sacrifice de l'éducation ;
A mes Mères NGAH Léontine et ADIA
Marie-Louise pour l'affection dont elles m'ont comblé ;
A mes frères et soeurs Simon NOAH, Louis Paul
ONGONO, Patrick OLEME, Hermine OLEME, Yolande NGAH, Ernestine MESSINGA et
Léontine ABENA pour toute leur attention et
réconfort.
A ma petite famille Blanche BETEGNE et Philppé
Malik Lauraine de MESSINGA pour son tendre soutien.
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à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
REMERCIEMENTS
Au terme de ces années de recherche, je tiens
à remercier le Professeur Michel KOUNOU, pour sa disponibilité,
ses conseils, ses encouragements, l'attention rigoureuse et
l'intérêt portés à ce travail.
Mes remerciements s'adressent aussi au Ministre de la
Défense, Monsieur Edgard Alain MEBE NGO'O, pour l'autorisation et la
prime de recherche sur les Forces Armées camerounaises à moi
octroyée.
Toute ma reconnaissance au Chef d'Etat-Major des
Armées, le Général des Corps d'Armées
Réné Claude MEKA, au Sous-Chef Etudes Générales
et Relations Internationales, le Colonel ABA YAGANA, au Chef de la
Division Reste du Monde, le Colonel LEKEUFACK Séraphin, au Chef
Secrétariat de la Division Reste du Monde, le Sergent-Chef
KOTTO Lucien pour leurs conseils et accompagnements, aux militaires, gendarmes,
policiers qui se sont prêtés à nos questions.
A mes camarades de promotion, Patrick MBIDA, Emile
Cedar BOKALI, Gaétan OMGBA, Cyprien BASSAMAGNE, Yanick NKWULI, que leur
amicale collaboration trouve ici l'expression de ma gratitude.
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LISTE DES FIGURES
N° de figure Dénomination de la figure
Page
Figure N°1 Représentation du système de
Défense camerounais 15
Figure N°2 Carte de la piraterie maritime dans le
monde 49
Figure N°3 Carte des principales zones à
risque de piraterie 52
Figure N°4 Quelques éléments de la
garde civique de l'Ouest 102
Figure N° 5 Le Chef Supérieur des
Armées, le Chef de l'Etat, son 125
Excellence Paul BIYA
Figure N° 6 Le Chef Supérieur des
Armées et les Officiers 127
Généraux
Figure N°7 La haute hiérarchie du
Ministère de la Défense 128
Figure N°8 Le Chef de l'Etat, Chef suprême des
Armées décorant les majors des promotions « Paix et
Modernité » et
« Armée et Nation » de l'EMIA à leur
sortie 143
Figure N° 9 Les élèves officiers de
l'EMIA au défilé du 20 mai 2009 144
Figure 10 Le positionnement des Groupements
Opérationnels de 171 l'Opération Delta sur le champ des
opérations
Figure N°11 Marche des nouveaux recrus du BIR de
Koutaba à 209 Man A War Bay
Figure N°12 Parade du Bataillon d'Intervention Rapide
210
Figure N°13 Le BIR DELTA dans ses missions
régaliennes 212
215 220
222
223
Figure N°14 Parade de la Marine Nationale au
Boulevard du 20 Mai, le 20 Mai 2010
Figure N°15 patrouille du BIR DELTA aux
côtés de la Marine Nationale
Figure N°16 Les soldats de l'Air prêt à
embarquer dans le Cameroon Air Force
Figure N°17 Entraînement d'une unité des
Forces terrestre de l'air à la base aérienne 101 de
Yaoundé
Figure N°18 Quelques hélicoptères de
la flotte de l'Armée de l'Air 225
Figure N°19 Parade d'unité section de la
Gendarmerie Nationale au 229 Boulevard du 20 Mai
Figure N°20 Quelques manoeuvres du GPIGN 233
Figure N°21
Figure N°22 Figure N°23
|
Opération pratique de l'exercice OBANGAMA EXPRESS 2011
à la base navale de Douala
Opération d'hélicordage pendant l'exercice Golden
Lion Manoeuvre de l'Opération Golden Lion
|
248
282
283
|
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LISTE DES TABLEAUX
N° du tableau Dénomination du tableau
Page
Tableau N°1 Le Cameroun et les
Opérations de Maintien de la 135
Paix (OMP) : Les missions passées
Tableau N°2 Le Cameroun et les OMP :
Les missions en cours 136
Tableau N°3 L'évolution des
attaques de 2001 à 2009 276
Tableau N°4 Statistique des actes de
piraterie aux larges des 281
côtes camerounaises en 2009
Tableau N°5 Coût de matériels
342
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TABLE DES MATIERES
INTRODUCTION GÉNÉRALE 1
I- LE CONTEXTE 2
II-LA PROBLÉMATIQUE 5
III-HYPOTHESES 9
IV-MÉTHODE ET INSTRUMENTS 9
1-MÉTHODE : LE SYSTÉMISME . Erreur
! Signet non défini.
2-LES INSTRUMENTS ET TECHNIQUES 18
a) L'ENQUETE PAR QUESTIONNAIRE 18
b) LES ENTRETIENS 19
c) LES DOCUMENTS 19
V-CHAMP D'OBSERVATION ET NIVEAUX D'EXPLICATION
19
VI-INTERETS ET LIMLITES DE LA RECHERCHE
20
PREMIERE PARTIE :LA CONCEPTUALISATION POLITIQUE,
DOCTRINALE ET STRATÉGIQUE DES NOUVELLES MENACES PAR LES FORCES
ARMÉES CAMEROUNAISES 1
CHAPITRE I : LES BASES CONCEPTUELLES DU DÉBAT
SUR LES FORCES ARMÉES, LA SÉCURITÉ ET LES NOUVELLES
MENACES : ÉTAT DE LA QUESTION 1
I-PRÉCISIONS CONCEPTUELLES ET
THÉORIQUES 24
1)LES FORCES ARMÉES 24
a)LES FORCES ARMÉES COMME INSTRUMENT DE «
PUISSANCE» ET DE «GRANDEUR » 24
b)LES FORCES ARMÉES COMME OUTIL DE PROTECTION DES
INTERETS 25
c)LES FORCES ARMÉES COMME OUTIL DE CONQUETE,
D'ÉMANCIPATION ET D'ADMINSTRATION 26
d)LES FORCES ARMÉES COMME OUTIL DE CONTROLE DE L'ORDRE
PUBLIC 27
e)LES FORCES ARMÉES COMME OUTIL DIPLOMATIQUE
28
f)LES FORCES ARMÉES COMME OUTIL DE L'HUMANITAIRE
29
g)LES DOCTRINES D'EMPLOI DES FORCES ARMÉES
ACTUELLEMENT EN VIGUEUR 30
2)LES NOUVELLES MENACES 33
a)DE LA GUERRE SYMETRIQUE À LA GUERRE ASYMETRIQUE
33
b)CONFLITS SYMETRIQUES ET CONFLITS DISSYMETRIQUES 33
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c)LES CONFLITS ASYMETRIQUES 34
d)DES CONFLITS SYMETRIQUES AUX CONFLITS ASYMETRIQUES
35
e)DE NOUVEAUX ADVERSAIRES 36
f)UNE VISIBILITE CROISSANTE DE LA MENACE ASYMETRIQUE
37
g)LES CARACTERISTIQUES DES MENACES ASYMETRIQUES 37
1-UN PHENOMENE PASSAGER OU DURABLE ? 37
2-L'APPARITION DE ZONES GRISES 388
3-UNE LOGIQUE DE RESEAUX 38
h)TENTATIVE DE « TYPOLOGIE » DES MENACES 38
1-LE TERRORISME 39
a-UNE DÉFINITION OPÉRATOIRE DU TERRORISME
39
b-MENACES ET VULNÉRABILITÉ EN AFRIQUE
43
c-LES CAUSES DU TERRORISME 44
2-LA PIRATERIE MARITIME 46
a-ÉTHYMOLOGIE ET DÉFINITIONS 46
b-HISTOIRE DE LA PIRATERIE MARITIME 48
c-LA PIRATERIE MODERNE 49
d-LES REGIONS SENSIBLES 49
e-LES ATTAQUES 51
3-LA CRIMINALITÉ ORGANISÉE 54
a-LE CRIME ORGANISÉ À TRAVERS LE MONDE
55
b-L'ÉCONOMIE CRIMINELLE : DES ENTREPRISES PRESQUE
COMME
LES AUTRES 56
c- L'INTERPRÉTATION DES DEUX
ÉCONOMIES.................................
|
56
|
d- ACTIVITÉ FINANCIERE
|
58
|
e- LES PRIORITÉS COMMUNES DU CRIME ORGANISÉ
|
59
|
1-CRIME ORGANISÉ ASIATIQUE
|
59
|
2-CRIME ORGANISÉ EURASIEN/EST-EUROPEEN (COE/EE)
|
61
|
3-CRIME ORGANISÉ ITALIEN/LA COSA NOSTRA
|
63
|
4-ENTREPRISES CRIMINELLES DU MOYENS-ORIENT ET D'ASIE
DU
SUD-OUEST...........................................................................
64
5-ENTRPRISES CRIMINELLES AFRICAINES 65
6-ENTRPRISES CRIMINELLES DES BALKANS 66
i) PRODUCTION ET TRAFIC DE DROGUES ILLICITES 66
1-COMMERCE DE LA DROGUE COLOMBIENNE 66
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2-LA MARIJUANA 67
3-LA METHAMPHETAMINE 67
j) LA CRIMINALITÉ FINANCIERE 68
1-LE VOL D'IDENTITÉ 68
2-LE BLANCHIMENT D'ARGENT 69
3-L'INDUSTRIE DU DIAMANT 69
4-LE SYSTEME DE PAYEMENT ÉLECTRONIQUE 69
5-L'ÉCHANGE DE PESOS SUR LE MARCHÉ NOIR
70
6-LE CASINO 71
7-LA FRAUDE PAR TÉLÉMARKETING 71
8-LES GANGS 72
k)TRAITE DE PERSONNES ET PASSAGE CLANDESTIN DE MIGRANTS
73
4-CRIMINALITÉ ORGANISÉE AU CAMEROUN 74
a-LES FIGURES DOMINANTES DE LA CRIMINALITÉ
ORGANISÉE AU CAMEROUN 75
1-LES GANGS (URBAINS) 75
2-LES RESEAUX CRIMINELS TRANSNATIONAUX 76
3-LA VIOLENCE PRIVÉE INDIRECTE 77
4-LES ACTIVITÉS NATIONALITAIRES 78
3)LA SÉCURITÉ 78
a)LE SENS DE LA SÉCURITÉ AUJOURD'HUI 79
b)LE PARADIGME TRADITIONNEL : LA SÉCURITÉ
NATIONALE 83
c)LE NOUVEAU PARADIGME : DU CONCEPT DE SÉCURITÉ
NATIONALE A LA SÉCURITÉ HUMAINE 85
d)DE LA SÉCURITÉ COLLECTIVE A LA
SÉCURITÉ COOPERATIVE 90
II-DÉFINITION DES CONCEPTS 91
1-LA FORCE ARMÉE 91
2-LES NOUVELLES MENACES 92
3-LA SÉCURITÉ 92
CHAPITRE II :LA CONCEPTUALISATION INSTITUTIONNELLE ET
GÉNÉRALE CLASSIQUE DES MENACES : LES FORCES ARMÉES
CAMEROUNAISES EN CINQUANTE ANS 1
I-LA MISE EN PLACE DES FORCES ARMÉES
CAMEROUNAISES 96
1)LA NAISSANCE DES FORCES ARMÉES CAMEROUNAISES
97
a)L'ORDONNANCE N°59/57 97
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b)UNE DIRECTION HOMOLOGUE A LA DYNAMIQUE DU SYSTEME POLITIQUE
CAMEROUNAIS 99
2)LA MONTÉE EN PUISSANCE DES FORCES ARMÉES
CAMEROUNAISES 100
a)L'ARSENAL JURIDIQUE 100
b)LES DIFFÉRENTES PHASES DE LA MONTÉE EN
PUISSANCE 105
1-LA PHASE D'ACCÉLÉRATION : DE JANVIER 1960 A
MARS 1961 106
2-LA PHASE DE RETOUR AU CALME : DE MARS 1961 AUX
ANNÉES 1967-
1970 108
3-LA PHASE PROSPECTIVE : DES 1970 109
4-LA PHASE DE MODERNISATION ET DE PROFESSIONNALISATION : LES
DECRETS DE 2001 ET DE
2002....................................................113
a-L'ARMÉE DE TERRE 114
b-L'ARMÉE DE L'AIR 115
c-LA MARINE NATIONALE 116
d-LA GENDARMERIE NATIONALE 118
II-DÉFINITION DE LA POLITIQUE DE
DÉFENSE DU CAMEROUN 119
1)UNE POLITIQUE DE DÉFENSE BASÉE SUR LA
DÉFENSE POPULAIRE 121
a)LE PRINCIPE 121
b)LE CHOIX STRATÉGIQUE 122
2)LES BASES POLITIQUES ET JURIDIQUES 123
a)LE DISCOURS POLITIQUE 123
b)LES TEXTES JURIDIQUES 126
III-LA MISE EN OEUVRE DE LA POLITIQUE DE
DÉFENSE POPULAIRE DU CAMEROUN 128
1)LES COMPOSANTES DES FORCES ARMÉES CAMEROUNAISES ET
LEURS MISSIONS 130
a)LES COMPOSANTES DES FORCES ARMÉES CAMEROUNAISES
130
b)LEURS MISSIONS 133
2)LA FORMATION ET L'ENTRAINEMENT DES HOMMES 138
a)LA FORMATION 139
b)L'ENTRAINEMENT 148
CHAPITRE III: LA DOCTRINE D'EMPLOI DES FORCES
ARMÉES CAMEROUNAISES ET SON ADAPTATION AUX MENACES
ASYMÉTRIQUES
152
I-L'EMPLOI DES FORCES ARMÉES CAMEROUNAISES A
LA NAISSANCE : LA DÉFENSE FERME SANS IDÉE DE RECUL
154
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1)LA CLASSIFICATION DES FORCES DE DÉFENSE CAMEROUNAISE
RELATIVEMENT AUX HYPOTHESES DE DÉFENSE 156
a)LA CLASSIFICATION DES FORCES 156
1-LES UNITÉS DE RESERVE GÉNÉRALE
156
2-LES UNITÉS D'INTERVENTION 157
3-LES UNITÉS TERRITORIALES 158
b)LES HYPOTHESES DE DÉFENSE 159
2)LA DYNAMIQUE DES RIPOSTES DES FORCES CAMEROUNAISES ET LEURS
EXPERIMENTATIONS.........................................................
161
a)LES RIPOSTES POSSIBLES DES FORCES CAMEROUNAISES 161
b)LES FORCES ARMÉES CAMEROUNAISES A L'ÉPREUVE
DES FAITS 163
1-LA LUTTE CONTRE LA RÉBELLION ARMÉE
163
2-LA RÉDUCTION DU COUP D'ÉTAT DU 06 AVRIL 1984
165
3-LE DIFFÉREND FRONTALIER DE BAKASSI 167
4-LES ATTEINTES A LA SURETÉ DE L'ÉTAT DES
ANNÉES 1990 178
5-LES RÉVENDICATIONS SOCIALES DE FÉVRIER 2008
181
II-L'ADAPTATION DE LA DOCTRINE D'EMPLOI DES FORCES
ARMÉES CAMEROUNAISES AUX MENACES ASYMÉTRIQUES : LE DROIT
D'ATTAQUE ET DE POURSUITE 182
1)LE CADRE GÉNÉRAL DE L'ACTION 182
a)CLASSFICATION GÉNÉRALE DES OPÉRATIONS
ET CADRE JURIDIQUE CORRESPONDANT 182
1- CLASSFICATION GÉNÉRALE DES
OPÉRATIONS........................... 183
a- LA GUERRE 183
b- LES OPÉRATIONS DE GUERRE 183
c- LES OPÉRATIONS DE SÉCURITÉ
183
d- LES OPÉRATIONS DE SOUTIEN DE LA PAIX 183
e- LES OPÉRATIONS DE SECOURS D'URGENCE 1833
2- CLASSIFICATION DES CONFLITS 184
b)LES HYPOTHESES D'EMPLOI DES FORCES DE DÉFENSE
185
1-MENACES ET RISQUES 185
2-LES DIFFÉRENTES MENACES ET LES RISQUES POTENTIELS
186
2)LA STRATÉGIE GÉNÉRALE MILITAIRE
193
a)LA MAITRISE DES QUATRES GRANDES FONCTIONS
STRATÉGIQUES 194
1-LA DISSUASION 194
2-LA PRÉVENTION DES CRISES 194
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3-LA PROTECTION 195
4-LA PROJECTION 195
b)LES PRINCIPES D'EMPLOI DES FORCES 197
1-L'ANTICIPATION 197
2-LA COHÉRENCE DES BUTS RECHERCHÉS 197
3-LA MAITRISE ET L'EMPLOI MESURÉ DE LA FORCE
198
4-LA FORCE MORALE 198
DEUXIEME PARTIE: L'OPÉRATIONNALISATION TECHNIQUE,
INSTRUMENTALE ET TACTIQUE DES RÉPONSES AUX NOUVELLES MENACES PAR LES
FORCES ARMÉES CAMEROUNAISES 200
CHAPITRE IV :.LE DÉPLOIEMENT OPÉRATIONNEL
DES FORCES ARMÉES CAMEROUNAISES FACE AUX NOUVELLES FORMES DE MENACES
200
I-LE DISPOSITIF NATIONAL DE LUTTE CONTRE LES MENACES
ASYMÉTRIQUES 206
1)L'ARMÉE DE TERRE FACE AUX COUPEURS DE ROUTES ET AUX
PIRATES DE MER 206
a)LE BIR FACE AUX COUPEURS DE ROUTES 207
b)LE BIR DELTA FACE AUX PIRATES DE MER 211
2)LA MARINE NATIONALE ET LA SAUVEGARDE DES APPROCHES
MARITIMES NATIONALES : UN DEFI PARTAGÉ 2132
a)ÉTAT DES LIEUX ET ENJEUX ÉCONOMIQUES
213
b)FONDEMENTS ACTUELS DE LA SAUVEGARDE DES APPROCHES MARITIMES
NATIONALES COMME VOLONTÉ NATIONALE: L'ACTION DE L'ÉTAT EN MER
2154
1-LES INSTANCES DE REFLEXION ET D'ORIENTATION 216
2-LES INSTANCES D'ACTION ET DE COORDINATION 2176
c)LES OPÉRATIONS DE LA MARINE NATIONALE 219
3)L'ARMÉE DE L'AIR FACE A LA MENACE ASYMÉTRIQUE
221
a)LA DISSUASION DES VECTEURS DE COMBAT 223
b)DÉPLOIEMENT DES VECTEURS DE PROJECTION 224
4)LA GENDARMERIE NATIONALE ET SA CROISASDE CONTRE
L'INSÉCURITÉ 227
a)SON ORGANISATION 228
b)SES MISSIONS 228
c)LES EFFETS DE LA REFORME 230
d)LA GENDARMERIE FACE AUX MENACES ET VULNERABILITÉS
MAJEURES
232
e)LES DEMEMBREMENTS ACTIFS DE LA GENDARMERIE NATIONALE
233
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5)L'IMPLICATION DES CIVILS DANS LA LUTTE CONTRE LES NOUVELLES
FORMES DE MENACES 235
a)LA DIPLOMATIE DES AUTORITÉS LOCALES 235
b)L'APPORT DES POPULATIONS 240
II-LE DISPOSITIF INTERNATIONAL DE LUTTE CONTRE LES
MENACES ASYMÉTRIQUES 242
1)LES INITIATIATIVES SOUS-RÉGIONALES 242
a)LA COMMISSION DU GOLFE DE GUINÉE 242
b)LA REPRISE EN MAIN DE LA SURETÉ MARITIME DU GOLFE DE
GUINÉE PAR LA CEEAC 244
1-LE ROLE CENTRALE DU COPAX 244
2-LE CRESMAC ET LA MISE OEUVRE DU PROJET COMMUNAUTAIRE
245
c)LA MISE EN COMMUN DES MOYENS DES ÉTATS : LE
REGROUPEMENT EN ZONES A, B ET D 246
d) L'EXERCICE OBANGAME EXPRESS 2011 246
2)LE SOUTIEN INTERNATIONAL 250
a)LES CONVENTIONS DE SUA DE 1988 ET LES PROTOCOLES DE 2005 :
DES MESURES ESSENTIELLEMENT REPRESSIVES. 250
b)LE CODE INTERNATIONAL POUR LA SURETÉ DES NAVIRES ET
DES INSTALLATIONS PORTUAIRES (CODE ISPS) : DES MESURES SURTOUT
PRÉVENTIVES 252
CHAPITRE V : UNE ÉVALUATION OPÉRATIONNELLE
DE LA LUTTE ANTI-MENACES 200
I-LES « COUPEURS DE ROUTE » ET LA
CRIMINALITÉ TRANSFRONTALIERE
..264
1)MODES ET MECANISMES OPÉRATOIRES EN PERPETUELLE MUE
266
a)EMBUSCADES SUR LES AXES ROUTIERS 266
b)PRISES D'OTAGES DANS LES VILLES ET LES LOCALITÉS
RURALES 267
c)RAPTS DU BETAIL 268
d)LES ITINÉRAIRES PREFERÉS DES COUPEURS DE
ROUTE 269
2)LE GRAND MAL ET LES GRANDS REMEDES 270
a)LES COMMISSIONS MIXTES DE SÉCURITÉ
270
b)LE GRAND NORD : L'ÉTAT D'ALERTE 272
c)LES FORCES DE DÉFENSE POUR UN AVENIR PLUS SEREIN ?
274
1-LA SYNERGIE GPIGN ET BIR 274
2-DES MOYENS SUPPLEMENTAIRES POUR LE BIR 275
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II-LE PHÉNOMENE DE LA PIRATERIE MARITIME
276
1)BREF APERÇU DE LA SITUATION DANS LE MONDE
277
a)LE POINT DE SITUATION AUX LARGES DES CÔTES
CAMEROUNAISES 278
1-L'IDENTITÉ DES PIRATES, LEURS CIBLES ET LEURS MODES
D'OPÉRATIONS 279
2-NATURE, AMPLEUR ET VARIATIONS DES ATTAQUES MARITIMES
280
III-LA PROBLÉMATIQUE DE LA SECURITÉ
APRES UNE DÉCENIE DE MODERNISATION ET DE PROFESSIONNALISATION
283
CHAPITRE VI: LA RECONFIGURATION OPÉRATIONNELLE DU
SYSTEME DE DÉFENSE : LA REORIENTATION SÉCURITAIRE
2888
I-LE CONTRE TERRORISME 29191
1)UNE ARMÉE « D'AVANT-GARDE » POUR UNE
« DÉFENSE DE L'AVANT » 29192
a)CONSTRUCTION DE LA PROFONDEUR STRATÉGIQUE NATIONALE
29292
b)UNE DÉFENSE PROACTIVE SOUS PEINE D'ÉCHEC
2933
c)ADAPTER LES MODELES DE FORCES 2944
d)GUERRES PROBABLES : NOUVEAUX METIERS, NOUVEAUX SOLDATS
2966
e)REPONDRE AUX BONNES QUESTIONS 2988
f)LE SYSTEME ANTI-TERRORISTE 300300
1-L'ARSENAL JURIDIQUE 301
2-MECANISMES DE MISE EN OEUVRE 302
3-LES EXIGENCES DE LA MANOEUVRE : LE RENSEIGNEMENT
304
2)LA RÉALISATION D'UNE APPROCHE STRATÉGIQUE
NATIONALE 307
3)CONDUIRE L'ENGAGEMENT POUR GAGNER LA PAIX ET LA
SÉCURITÉ 312
a)L'ACTION INTERARMES AU COEUR DU COMBAT AÉROTERRESTRE
312
b)MAITRISER 313
1-MAITRISER LA FORCE 313
a- UNE FORCE NECESSAIRE, UNE MAITRISE ESSENTIELLE
313
b- S'ATTACHER LA POPULATION, ISOLER L'ADVERSAIRE ET
COMBATTRE L'ENNEMI 314
2-MAITRISER LA TECHNOLOGIE 315
a- LA TECHNOLOGIE, UN MULTIPLICATEUR D'EFFICACITÉ
316
b- LA TECHNOLOGIE AU DÉFI DE L'ASYMÉTRIE
317
3-MAITRISER LE TEMPS : AGIR DANS L'URGENCE ET S'ENGAGER DANS
LA DURÉE 318
4-MAITRISER LA VIOLENCE : UNE VIOLENCE MULTIFORME
DIRIGÉE CONTRE TOUS 319
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à la sécurité : d'une Armée « de garde »
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c)S'ADAPTER FACE À L'ASYMÉTRIE CROISSANTE
320
1-COMPRENDRE L'ASYMÉTRIE 320
2-LE RENSEIGNEMENT, COMPRENDRE TOUT AUTANT QUE SAVOIR
321
3-COMBATTRE PAR L'IMAGE 323
II-LES RELATIONS CIVILO-MILITAIRES
323
1)LA NÉCESSITÉ DE LA RELATION CIVILO-MILITAIRE
324
2)LA NATURE DE LA RELATION CIVILO-MILITAIRE 326
a)LES RELATIONS INSTITUTIONNELLES OU INTER-INSTITUTIONNELLES
CIVILO-MILITAIRES 326
b)LES RELATIONS DE COLLABORATION CIVILO-MILITAIRE 327
3)L'ÉTAT DES RELATIONS CIVILO-MILITAIRES AU CAMEROUN.
329
III-L'ÉCONOMIE DE DÉFENSE ET DE
SÉCURITÉ 332
1)LA DISPONIBILITÉ DES BUDGETS DE DÉFENSE.
333
a)LA RÉFORME BUDGETAIRE EN FRANCE 334
b)LA RÉFORME BUDGETAIRE AU MINISTERE DE LA
DÉFENSE BRITANNIQUE 338
c)LE BUDGET DE LA DÉFENSE DES ÉTATS-UNIS
338
d)RECOMMANDATIONS GÉNÉRALES 339
2)LA CRÉATION DES INDUSTRIES DE DÉFENSE
339
3)LA MODERNISATION DES FORCES DE DÉFENSE, UN
IMPÉRATIF COUTEUX
341
a)LE COUT DES MATÉRIELS TRES ÉLEVÉ
341
b)LES EXIGENCES SOCIALES DANS LE SYSTEME DE MODERNISATION DES
FORCES DE DÉFENSE 342
IV-LA GOUVERNANCE DÉMOCRATIQUE
344
1)LA GOUVERNANCE DÉMOCRATIQUE COMME MODALITÉ DE
RÉPARTITION ÉQUITABLE DES RESSOURCES 344
2)LA GOUVERNANCE DÉMOCRATIQUE COMME REMPART A
L'INSÉCURITÉ NATIONALE ET INTERNATIONALE 346
CONCLUSION GÉNÉRALE
348
REFERENCES 353
ANNEXES 363
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à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010

INTRODUCTION GENERALE
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I- LE CONTEXTE
La période ouverte par les attentats du 11 septembre
2001, par leur violence et le nombre de victimes, a consacré
l'émergence d'un terrorisme de masses. Ces attentats ont ouvert la voie
des conflits d'un type nouveau, sans champ de bataille et sans Armée
clairement identifiée, où l'adversaire, prêt à
utiliser les armes de destruction massive, vise clairement des populations. On
vit désormais dans un monde durablement imprévisible, dans un
environnement stratégique en mutation qui oblige les Etats de rehausser
leur effort de défense. Tel est ainsi le cas des Etats-Unis
d'Amérique (USA), du Canada, de la Suisse, de la France, en Espagne, du
Maroc etc.
Après le 11 septembre 2001, les USA ont annoncé
l'accélération de la transformation de leurs Forces. Il s'agit,
pour eux, face à des menaces moins prévisibles et qui peuvent les
toucher directement, de disposer d'une large gamme de capacité
rapidement projetable, d'accéder aux théâtres en toutes
circonstances et de s'assurer une maîtrise totale de l'information depuis
le territoire national américain, notamment avec l'appui de leurs
réseaux spatiaux. Un des éléments essentiels de cette
nouvelle donne américaine réside dans la volonté de
disposer de moyens d'agir seul, le cas échéant, sans contrainte
liée à des alliances ou des engagements unilatéraux. Cette
stratégie n'exclut cependant pas des actions de coalition (Premier
Ministre Français 2002 : 8). Cela se manifeste par sa
démonstration devant un monde figé de sa volonté d'imposer
désormais unilatéralement ses intérêts. La
coopération internationale s'est réduite à une
coopération des Etats alignés sur les USA. Conçue à
l'origine comme pacte de défense de l'Europe, l'OTAN a été
transformée en un instrument d'intervention sous la conduite des USA, un
instrument capable d'intervenir partout dans le monde. Le nouveau concept
stratégique américain de politique extérieure et de
politique de sécurité repose sur le principe de la
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
prévention1 et constitue un abandon du
principe appliqué pendant de nombreuses années de la dissuasion
et de la réduction des conflits. Cette notion de prévention
renonçant volontairement à exclure la guerre préventive,
est faite des forces d'intervention capable de lancer des frappes
préventives efficaces (UDC 2005 : 4-5)
Le 11 septembre a également exposé les
vulnérabilités du Canada face aux attaques asymétriques.
Le Canada s'est vu accusé tour à tour par les Américains
et les Européens d'être une « passoire pour les terroristes
», au mieux, « une terre d'accueil pour les terroristes islamistes
». L'affaire Ahmed Ressam a révélé la
vulnérabilité du système de sécurité du
Canada (David 2002 : 233). Apprenant de l'histoire que Canadiens et
Américains partagent la même géographie surtout en
matière de défense, les changements que le gouvernement
américain met en place, affectent directement le Canada sur le plan
militaire (David 2002 :35). Pour la défense canadienne, les
évolutions sont nombreuses et la plus importante est la révision
annoncée de la politique de défense ainsi que l'augmentation du
budget militaire (David 2002 : 36).
Concernant la France, l'accroissement des facteurs
d'instabilité (réactions identitaires violentes teintées
de nationalisme ou de fondamentalisme religieux) a favorisé la mise en
exécution de la réforme de l'outil de défense,
décidée en 1996 par le Président de la République,
ayant pour but de rénover les moyens militaires en les adaptant au
nouvel environnement et aux évolutions anticipées à
l'horizon 2015. La loi de programmation 1997-2002 a constitué la
première étape, celle de la professionnalisation des
Armées. La loi de programmation 2003-2008 visait, entre autres, à
restaurer la disponibilité des matériels pour améliorer le
niveau opérationnel des Forces ; doter l'Armée professionnelle
des équipements de nouvelles générations
nécessaires à l'accomplissement de
1 Terme anglais : préemption
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à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
missions correspondant à la nouvelle donne
stratégique ; amplifier l'effort de recherche pour intégrer les
évolutions technologiques qui permettent de faire face efficacement
à la diversité des menaces. C'est ainsi que la France
opère à travers une dissuasion en phase avec l'analyse de la
menace et une politique de réduction de l'armement nucléaire dans
le monde ; une protection fondée sur une politique de
sécurité intérieure qui lie défense militaire et
sécurité intérieure au sein du « Ministère de
la Sécurité Intérieure » ; une prévention au
coeur d'une défense globale ; une action extérieure (projection),
champ d'action privilégiée des Forces Armées (IHEDN 2002 :
5). Cet effort de rehaussement de la défense peut se traduire
également par la tendance à la réduction des formats,
l'abandon du matériel lourd assurant les missions de défense et
l'acquisition du matériel de pointe pour les missions de
sécurité et de renseignement.
Le Gouvernement Suisse à son tour, est conscient du
fait que son territoire se trouve aussi exposé au danger qui peut se
concrétiser brusquement et sans avertissement, il suffit que le
terrorisme international choisisse l'Europe comme champ d'opération.
Pour cet Etat, la coopération irréfléchie de l'Espagne et
de la Grande Bretagne avec les USA (participation à la guerre en
Afghanistan et en Irak) au lieu de garantir leur sécurité, les a
plutôt exposés au terrorisme. C'est la raison pour laquelle ce
pays estime « qu'il est évident aujourd'hui que la meilleure
manière de défendre les intérêts de notre pays et de
sa population est d'axer strictement la politique de sécurité et
la politique extérieure sur le principe de la neutralité
». Ce principe consiste à se tenir à l'écart de
ces engagements (UDC Suisse 2005 : 5). Aussi, face aux nouvelles menaces,
l'Armée doit assumer un nombre croissant de tâches de
sécurité (surveillance). Cependant, l'exécution de mandats
de sécurité exigeant des effectifs important ne peut, à
une époque de difficultés financières être
assurée que par une Armée de milice d'après les
autorités politiques Suisses (UDC Suisse 2005 : 7).
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
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La sécurité se trouve également
renforcée en Espagne et au Maroc. Les gouvernements des susdits pays ont
décidé de renforcer la surveillance du trafic de voyageurs entre
les deux pays, via le détroit de Gibraltar face à la menace
terroriste. Les autorités veulent prendre « toutes les mesures
» pour renforcer la surveillance (Auxile et Laye 2005; 2-3).
Au regard de la redéfinition des politiques de
défense des Etats commandée par nouvelles menaces vivaces dans
les quatre coins du monde, il est opportun pour tout politiste immergé
dans le champ d'étude de la géostratégie des Armées
et de la géopolitique internationale, de questionner le système
de défense, la structuration de la politique de défense, la
réponse de l'Etat du Cameroun aussi vulnérable que la
première puissance mondiale sur cette question.
II- LA PROBLÉMATIQUE
Depuis les attentats terroristes du 11 Septembre 2001 aux
EtatsUnis d'Amérique, aucune partie du monde ne semble être
à l'abri de la menace terroriste. Ceci sera confirmé plus tard
par les attentats de Madrid, de Londres, les attentats manqués en
France, avec pour prémices les attentats contre les
intérêts américains de Dar es Salam en Tanzanie et de
Nairobi au Kenya. Ces éléments caractérisant une crise
internationale, définissent une nouvelle géopolitique
internationale, entretenue par l'émergence des « réseaux
terroristes » en l'occurrence le réseau Al-Qaïda, le groupe
Salafiste pour la Prédication et le Combat (GSPC) devenu AlQaïda au
Maghreb Islamique (AQMI) en 2007, les Groupes Islamistes Armés (GIA)...
A côté de ces attentats, on observe également le
phénomène de la piraterie maritime, devenue une véritable
entreprise criminelle internationale doublée d'un commerce très
lucratif. L'on se souviendra longtemps du Lundi 17 Novembre 2008, ce jour
où la piraterie maritime a franchi un palier qu'on croyait
infranchissable en s'emparant
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d'un superpétrolier le Sirius Star, un énorme
tanker Saoudien contenant deux millions de barils d'or noir d'une valeur de
cent millions de dollars, soit environ deux milliards de francs CFA. Selon le
Bureau Maritime International (BMI), quatre vingt quatorze bateaux ont
été attaqués par des pirates saoudiens sur deux cent
attaques répertoriés dans le monde. De toute évidence, la
côte d'alerte est atteinte avec la multiplication des actes de piraterie
dans le Golfe d'Aden plongeant la Communauté Internationale dans le
désarroi, surprise de la capacité de nuisance des
pirates2. Par ces faits, les Etats font désormais face
à une nouvelle réalité internationale porteuse de menaces
multiformes. Le noyau dur est constitué par le terrorisme (notamment
islamiste), la piraterie maritime, la criminalité
transfrontalière, les trafics illicites (L'IHEDN 2002 : 4-5).
Ces menaces, plus difficiles à prévoir, à
parer, à évaluer, peuvent avoir des conséquences graves
dans la vie des Etats. En réalité, le monde part d'une menace
principale, conventionnelle et identifiée à une
prolifération de menaces diffuses.
Dès lors, les conflits et les violences ne sont plus
seulement militaires. D'autres convulsions ont lieu à l'échelle
de la planète, fruits d'acteurs globaux élargissant le cercle
d'influence. Il s'agit des forces « transverses », «
asymétriques », « nouvelles » qui tirent profit de
l'évolution de la réalité internationale pour
prospérer et exploiter ses vulnérabilités. Chaque partie
du monde, chaque Etat vit sa cohorte de menaces. Tel est le cas de l'Afrique,
du Golfe d'Aden, du Golfe de Guinée et du Cameroun en particulier qui,
après près d'une décennie de conflit armé contre le
Nigéria, fait aujourd'hui face à un ennemi d'une identité
particulière : ce sont « des assaillants non identifiés
» d'après le communiqué de presse de la Présidence de
la République3.
2 Quotidien National Camerounais, Cameroun
Tribune N°9233/5432 2008 du 14 Novembre 2008, page 31.
3 Quotidien National Cameroun Tribune
N°8976/5175 du 14 Novembre 2007, page 3.
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à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
En date du 12 novembre 2007, les Forces Armées
Camerounaises (FAC), assurant leur mission de souveraineté dans la
presqu'île de Bakassi, sont attaquées dans l'une de leur position
située au carrefour de navigation entre le Rio Del Rey et la crique
d'Issanguele, à l'arme collective par des groupes d'individus sans
attributs militaires apparents. Profitant des facilités de navigation
offertes aux opérateurs économiques et habitants de vaquer
librement à leurs occupations, des assaillants navigant à bord de
sept embarcations rapides ont pu approcher le poste baptisé C3, ouvert
le feu, faisant 21 morts et 10 blessés parmi les militaires
camerounais4. Alors que les résultats des enquêtes
étaient encore attendus, un autre drame est encore enregistré
à Bakassi. Le Sous-préfet de la localité de Kombo à
Bedimo, Fonya Félix Morfan, et la délégation qui
l'accompagnait pour une tournée d'inspection (01 officier
supérieur et 07 autres éléments des Forces de
Défense et de sécurité) sont attaqués et
enlevés par des personnes non identifiées le 09 Juin 2008. Leurs
corps seront retrouvés plus tard mutilés5. Plus que
jamais, le danger règne à la frontière Sud-Ouest du
Cameroun. Le Général des corps d'Armées, René
Claude MEKA, Chef d'Etat-Major des Armées en prendra acte à
travers son communiqué publié par la suite, dans lequel il parle
de l'insécurité présente à la côte,
entretenue par les pirates. Le Ministre camerounais
délégué à la Présidence chargé de la
Défense, interpellé par les députés du Social
Democratic Front (SDF) à l'Assemblée Nationale à ce sujet,
déclare que le Cameroun fait face à une nouvelle forme de menace
qui accentue les sillons de la criminalité.
Le 24 Juillet 2008, les matelots de première classe
Jules Mendoe Massa et Edgard Ufeingo tombent sous les coups de balles des
pirates au cours d'une attaque perpétrée contre les positions
camerounaises à Kombo à Jenea dans la péninsule de
Bakassi6. Dans la nuit du 27 au 28 Septembre
4 Quotidien National Cameroun Tribune op cit.
5 Quotidien Privé Camerounais Le Jour
N°215 2008 du 19 Juillet 2008, Page 4.
6 Quotidien National Cameroun Tribune
N°9158/5357 du 11 Aout 2008, Page 6.
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2008, des assaillants armés venant vraisemblablement du
coté des côtes de Limbé, ont pris d'assaut et ont investi
pendant deux heures un certain nombre d'établissements bancaires,
emportant d'importantes sommes d'argent liquide7. En outre, dans la
nuit du Jeudi 30 au vendredi 31 Octobre 2008, un groupe d'hommes armés,
attaque aux larges de la presqu'île de Bakassi, un remorqueur de la
société BOURBON, qui opérait sur la plate-forme TOTAL. Dix
membres de l'équipage seront pris en otage parmi lesquels des
Camerounais, des Français, des Tunisiens et des
Sénégalais8. De même, le 24 Janvier 2009 au
matin, 30 pirates à bord de 03 embarcations attaquent 02 chalutiers en
provenance de pays étrangers à Londji, petit village situé
à 15 Km de la cité balnéaire de Kribi9.
Dans la région du Nord Cameroun, les rebelles tchadiens
sèment la panique. Non loin de la frontière du Cameroun avec le
Tchad, près de 180 enlèvements avec demandes de rançon ont
été enregistrés de Janvier à Juin 2007. Par
ailleurs, la région de l'Est se retrouve être le territoire des
rebelles centrafricains avec le phénomène de coupeurs de route
à la frontière entre le Cameroun et la République
Centrafricaine10. C'est ainsi qu'au cours de la
cérémonie de présentation de voeux du nouvel an le 14
Janvier 2009 dans la cour d'honneur de la Brigade du Quartier
Général (QG) de Yaoundé, le Ministre
délégué à la Présidence chargé de la
Défense déclare : « Comme 2007 et 2008, 2009 ne sera pas
de tout repos pour nos Forces de Défense ». Et pour cause,
explique le Ministre : « La menace persiste, elle augmente
d'intensité, elle devient variée, diversifiée et
pernicieuse »11.
Toutes ces agressions spontanées, perpétrées
sur le territoire Camerounais par des individus non identifiés, «
sans visage », loin d'être
7 Op cit.
8 Idem.
9 Ibi dem ;
10 Quotidien Privé Camerounais Le Jour
N°215 2008 du 19 Juillet 2008, Page 4 à 5.
11 Quotidien National Cameroun Tribune
N°9267/5466 du 15 Janvier 2009, Page 3.
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exhaustives, démontrent à suffisance que le
Cameroun, comme le reste du monde, fait face à de nouvelles menaces.
De ce qui précède, la politique de
défense camerounaise est-elle à mesure de circonscrire avec
pertinence les nouvelles menaces à la sécurité et d'y
réagir efficacement ?
III-HYPOTHESES
Le dispositif camerounais de défense nationale semble
avoir été formulé pour répondre aux menaces
classiques et ne parait pas, en conséquence, suffisamment outillé
pour riposter aux nouvelles menaces en dehors d'une modification de ses cadres
d'action.
Les Forces Armées camerounaises ont été
formulées de nature non seulement à pouvoir neutraliser la
rébellion post indépendance mais aussi et surtout, de garantir
l'intangibilité des frontières, la souveraineté et le
fonctionnement harmonieux des institutions pouvant être menacés de
l'intérieur comme de l'extérieur. Mais leur structuration est
susceptible d'évoluer au gré de la dynamique
sécuritaire.
IV-MÉTHODE ET INSTRUMENTS
Dans la perspective de mieux cerner notre étude
relative à l'évaluation de la politique de défense
camerounaise face à l'émergence des nouvelles menaces criminelles
transnationales, il nous convient de préciser, la méthode et les
instruments qui nous permettrons d'y parvenir.
1- MÉTHODE : LE SYSTÉMISME
Analyser le rapport de force des Armées Africaines en
général et Camerounaises en particulier dans la nouvelle donne
insécuritaire mondiale sera fait à l'aune de la méthode
systémique.
Au premier niveau, il est question de savoir si les Forces
Armées camerounaises disposent d'un cadre doctrinal d'action (doctrine
cognitive
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et normative) définissant leurs engagements. Le
systémisme mettant en phase selon Marcel Merle, un ensemble de relations
entre un certain nombre d'acteurs compris dans un certain type d'environnement
et soumis à un mode de régulation adéquat,
selon David Easton, un ensemble d'interactions par lesquelles les
objets de valeurs sont repartis par voie d'autorité dans une
société (Easton, 1974 : 23) nous permet de définir le
système de défense camerounais. Ce système social est un
agrégat de fonctions diversifiées portant entre autres sur le
maintien du modèle original et spécifique des relations qui
assurent l'identité du groupe, la capacité d'adaptation aux
contraintes émanant de l'environnement extérieure. Il nous permet
de comprendre comment sont élaborées les lois d'une dynamique
sociale, d'identifier les motivations qui poussent les dirigeants politiques
à prendre telle ou telle décision face à une augmentation
de la criminalité exigeant d'être prêt à combattre,
à faire appel à son agressivité pour défendre la
vie et les biens des populations (Elias 1969 :192); de comprendre l'offre
supplémentaire de sécurité qui est déployée
par la communauté internationale face à l'augmentation de la
criminalité transfrontalière tant sur terre, dans les airs que
sur mer.
La méthode systémique à partir des
propriétés communes de tous les systèmes politiques permet
après la détermination des structures du système, les
fonctions des structures et du système de démystifier le
fonctionnement de toute organisation politique. Elle permet ainsi
d'appréhender le fonctionnement du système partant des flux
entrants « inputs » aux flux sortants « outputs
» en passant par la boite noire.
Les acteurs et structures de la défense nationale vont
du niveau suprême de l'Etat au niveau des circonscriptions
administratives en passant par l'échelon gouvernementale (Ela Ela 2000 :
154). L'échelon présidentiel s'articule essentiellement autour
des pouvoirs militaires du Président de la République qui dispose
des organes de décision à savoir : le Conseil Supérieur de
la Défense Nationale, le Comité Technique de la Défense
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Nationale (organes d'élaboration) ; le
Secrétariat permanent à la Défense Nationale, la
Délégation Générale à la Sûreté
Nationale, la Délégation Générale à la
Recherche Extérieure, le Ministère de la Défense (organes
d'exécution) (Ela Ela 2000 : 155-159). A l'échelon gouvernemental
sont responsabilisés les Départements Ministériels sous la
coordination du Premier Ministre (Ela Ela 2000 : 160-165). Les acteurs et
structures à l'échelon régional tiennent des
prérogatives des chefs de circonscriptions administratives,
représentants du pouvoir exécutif dans leurs circonscriptions de
compétence et, de l'organisation du commandement militaire territorial
(Ela Ela 2000 : 166-172).
Dans le cadre de l'élaboration d'une politique de
défense, plusieurs facteurs sont pris en considération : ceux qui
sont d'ordre interne (la force de l'ennemi, sa propre force, le terrain, les
conditions météorologiques, et géographiques) et d'ordre
externe (l'héritage de l'influence des puissances
étrangères, conséquences des flux migratoires, les
relations avec les pays limitrophes et ceux plus lointains, l'action
diplomatique du Cameroun dans le sens de son rayonnement international et son
action en faveur des mouvements militant pour la paix et la
sécurité internationale). L'environnement extérieur du
système est composé des acteurs et structures de la
société civile, les organisations internationales et non
gouvernementales, les autres Etats, les partis politiques, les associations
préoccupées par la sécurité,
l'intégrité et la souveraineté du Cameroun (Ela Ela 2000 :
75-76).
Comme tous les systèmes politiques, le système
de défense camerounais communique avec son environnement au moyen
d'inputs et d'outputs.
· LES INPUTS
Les inputs sont constitués par toutes les
données qui entrent dans le système. Ces valeurs provenant de
l'environnement ou alors du système lui-
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même peuvent être reparties en deux grandes
catégories à savoir les demandes et les soutiens.
Les soutiens sont des valeurs ou actions conférant des
capacités de décision et d'action au système. Il s'agit
concrètement des ressources humaines et matériels
nécessaires au déploiement du système de défense
mis à sa disposition par le peuple, les organisations de la
société civile, les organisations internationales et tous les
acteurs et structures constituant l'environnement extérieur du
système.
Les demandes quant à elles sont l'ensemble des
attentes, des sollicitations et des besoins en matière de
défense, de souveraineté et de sécurité
exprimés par les interlocuteurs des gouvernés. Elles peuvent
aussi être, pour les with-inputs, le fait des gouvernants qui
inscriraient dans leur agenda politique des problèmes non
soulevés par le peuple mais, qu'ils identifient comme suffisamment
préoccupants. Pour l'essentiel, les demandes consistent en des
informations relatives aux actes et faits menaçant
l'intégrité territoriale, la souveraineté de l'Etat et la
sécurité du peuple camerounais. Les chefs de circonscriptions
administratives12 et militaires13 chargés du
recueil, de la centralisation et de la diffusion du renseignement militaire et
du renseignement de défense (Ela Ela 2000 : 167-169) sont des
gate-keeper en ce sens qu'ils filtrent les informations devant
parvenir aux hauts commandements civils et militaires participant à
l'élaboration de la politique de défense.
~ LE TRAITEMENT DANS LA BOITE NOIRE
Une fois collectées par les chefs de circonscriptions
territoriales civiles et militaires14, ces données
parviennent à l'échelon gouvernemental15 et enfin
à l'échelon présidentiel16 qui est le seul
véritable maître de la
12-Régions, Départements,
Arrondissements, districts, villages.
13-Régions militaires, Secteurs, sous-secteurs,
Quartiers, Sous-quartiers militaire. 14-Article 17 de la loi de
1967.
15-Loi n°67/LF/9 du 12 Juin 1967, portant
Organisation de la Défense (Article 10). 16-Article 6 de la
Loi de 1967.
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défense militaire du Cameroun17. Le
Président de la République étant le chef suprême des
Forces Armées transmet ainsi le dossier aux organes d'aide à la
décision présidentielle18, organismes consultatifs
à savoir le Conseil Supérieur de la Défense Nationale et
le Comité Technique de Défense pour étude et avis (Ela Ela
2000 : 158). Ces derniers après études donnent leurs avis chacun
en ce qui le concerne19 au Chef Suprême des Armées qui
décide en dernier ressort. Une fois définie, la politique de
défense est instruite aux organes de mise en oeuvre pour
exécution.
· LES OUTPUTS
D'après David EASTON, les outputs sont constitués
des décisions effectivement prises et les actions par lesquelles elles
sont menées.
Une fois élaborée en fonction des contraintes et
réalités internes et externes, la politique de défense
camerounaise est mise en oeuvre par quatre organismes :
- Le Secrétariat Permanent à la Défense
Nationale, assure la mise en
oeuvre de la politique de défense dans les administrations
civiles.
- La Délégation Générale à la
Sûreté Nationale, assure la mise en
oeuvre de la politique de défense pour les Forces de
sûreté nationale. - La Délégation
Générale de la Recherche Extérieure, assure la
direction de la recherche et l'exploitation du renseignement.
- Le Ministère de la Défense, assure la mise en
oeuvre de la politique
de défense dans les Forces Armées.
17-Chapitre 1er, Article 8 alinéa
2 et 3 de la Constitution camerounaise du 18 Janvier 1996. 18Le
Conseil Supérieur de la Défense qui connaît des aspects
généraux, civils et militaires de la défense et la
coordination de la direction générale de ceux-ci ; le
Comité de Défense qui ne traite que des aspects militaires
c'est-à-dire des buts à atteindre par l'ensemble des Forces, de
l'approbation des plans de défense...
19 Le Conseil Supérieur de la
Défense Nationale connaît des aspects
généraux, civils et militaires de la défense et la
coordination de la direction générale de ceux-ci ; Le
ComitéTechnique de Défense, ne traite
exclusivement que des aspects militaires, c'est-à-dire,
des buts à atteindre par l'ensemble des forces, de
l'approbation des plans de défense, des mesures destinées
à pourvoir aux besoins des forces et des instructions à donner
aux unités ou détachements mis à la disposition des
organismes internationaux.
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
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Ces quatre organismes sont coordonnés par le
Comité technique de la Défense Nationale en ce qui concerne leurs
différentes activités (Ela Ela 2000 : 158-159).
· FEEDBACK ou COURBE DE
RETROACTION
Les décisions et les actions émanant du
système de défense se répercutent sur l'environnement
qu'elles modifient et dont elles suscitent ; soit un maximum de soutien en
termes d'approbation, soit alors l'insatisfaction manifestée par de
nouvelles demandes : c'est le feedback. Ces réponses du gouvernement
affectent et influencent l'environnement dans lequel évolue le
système de défense. La doctrine de défense et les actions
prescrites par cette dernière doivent pouvoir assurer la
sécurité et l'indépendance du Cameroun dans un
environnement international caractérisé par la
multiplicité des menaces et une situation de crise économique
mondiale aggravant les tensions. Si tel est le cas, cela entraînerait une
augmentation du soutien du régime en place. Au cas contraire, on
observerait une diminution du soutien manifesté par des requêtes
de la société civile, des marches de protestation, bref une crise
qui à long terme peut entraîner un renouvellement de la
boîte noire.
Le système de défense Camerounais peut être
schématisé ainsi qu'il
suit :

-Chefs de circonscriptions territoriales civiles
et militaires -Chefs de départements ministériels
- Premier Ministre
-Etats Etrangers
-Organisations Non-Gouvernementales -Société
civile
-Peuple
Conseil Supérieur de la Défense Nationale
Comité Technique de Défense Nationale
Président de la République
-Contraintes et réalités internes et externes -Les
nouvelles menaces à la sécurité : criminalité
transfrontalière, piraterie maritime, terrorisme
-Secrétariat permanent à la Défense
Nationale -Délégation Générale à la
Sûreté Nationale (DGSN) -Délégation
Générale à la Recherche Extérieure (DGRE)
-Ministère de la Défense (MINDEF)
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vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
Au second niveau, il s'agit de s'intéresser à la
démarche opérationnelle, à l'architecture de
sécurité, au dispositif de riposte des Forces Armées
camerounaises enclin aux nouvelles menaces. Il est question pour nous de
déterminer la stratégie appliquée (question de tactique,
d'opératique, de mise en oeuvre logistique d'un certain nombre d'outils)
par les Forces Armées camerounaises. A travers une analyse
stratégique constituant un raisonnement suivant une logique à
priori, selon laquelle l'homme chercherait la meilleure solution à tout
problème (Crozier et Friedberg 1977 : 46), nous appréhendons les
types de rationalité à l'aide desquelles l'Armée
camerounaise formule son référentiel (repère cognitif et
positif) : Intérêt politique en termes de défense et
souveraineté ; Intérêt stratégique en termes de
production d'une capacité de projection, de riposte ;
Intérêt économique en termes de définition d'un
dispositif face aux menaces asymétriques.
Mais dans un contexte de rationalité limitée,
l'Armée camerounaise décide de façon séquentielle
et choisit pour chaque problème qu'il a à résoudre, pour
chaque menace qu'il doit neutraliser, la première solution qui
correspond pour elle à un seuil minimal de satisfaction. Cette
démarche repose sur les observations empiriques suivantes :
1- L'Armée n'a que rarement des objectifs clairs et
encore moins des projets cohérents : ceux-ci sont multiples, plus ou
moins ambigus, plus ou moins explicites, plus ou moins contradictoires. Elle en
changera en cours d'action, en rejettera certains, en redécouvrira
d'autres, chemin faisant, voire après coup, ne serait-ce parce que des
conséquences imprévues et imprévisibles de son action
l'obligent à « reconsidérer sa position » et à
« réajuster son tir ». Ce qui est « moyen » à
un moment sera donc « fin » à un autre et vis versa. Il serait
illusoire et faux de considérer son comportement comme toujours
réfléchi c'est-à-dire médiatisé par un sujet
lucide calculant ses mouvements en fonction d'objectifs fixés au
départ.
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
2- Pourtant son comportement est actif. S'il est toujours
contraint et limité, il n'est jamais directement déterminé
; même la passivité est d'une manière le résultat
d'un choix ;
3- Et c'est un comportement qui a toujours un sens ; le fait
qu'on puisse le rapporter à des objectifs clairs ne signifie pas qu'il
ne puisse être rationnel, tout au contraire. Au lieu d'être
rationnel par rapport à des objectifs, il est rationnel d'une part par
rapport à des opportunités et à travers ces
opportunités au contexte qui les définit et, d'autre part, par
rapport au comportement des autres acteurs, au parti que ceux-ci prennent et au
jeu qui s'est établi entre eux ;
4- C'est enfin un comportement qui a toujours deux aspects :
un aspect offensif traduit par la saisie d'opportunités en vue
d'améliorer sa situation ; et un aspect défensif
c'est-à-dire le maintien et l'élargissement de sa marge de
liberté, donc de sa capacité à agir. Cette opposition se
retrouve sans qu'il y'ait nécessairement équivalence dans une
perspective temporelle, l'important restant la dualité et non pas la
signification des termes ;
5- Il n'ya donc plus, à la limite, de comportement
irrationnel (Crozier et Friedberg 1977 : 47-48).
Une organisation devant nécessairement et toujours
rechercher à optimiser l'ajustement entre sa structure et les exigences
véhiculées par son environnement et sa technologie (Crozier et
Friedberg 1977 : 133), nous comprenons mieux les changements organisationnels
et fonctionnels des Forces Armées camerounaises dans l'accomplissement
de leurs missions. C'est dire dans les termes même de l'analyse
stratégique du système , différents acteurs dans
l'environnement d'une organisation détiennent face à elles des
sources d'incertitudes majeures et inéluctables qu'elle doit à
tout moment chercher à contrôler pour assurer son maintien et son
développement (Crozier et Friedberg 1977 : 140-141).
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Mais à la limite de la démarche de Merle et
d'Easton relevant de l'interdépendance au niveau doctrinale et de
Crozier et Friedberg relevant de l'autonomie au niveau opérationnel,
nous mettons en phase les opportunités d'alternance entre
dépendance et autonomie constatée entre les Forces Armées
et la hiérarchie politique dans le système de défense et
de sécurité. L'Armée en tant que structure du
système de défense accomplit ses missions conformément
à la doctrine définie par la haute hiérarchie politique et
les prescriptions du Chef de département ministériel. Mais dans
le feu de l'action, elle prend parfois des initiatives personnelles
imposées par le dynamisme de l'adversaire, et pouvant aller au
delà de leur cadre d'action. Cette subtile dualité
dépendance et autonomie des structures constitue l'originalité de
notre démarche.
2- LES INSTRUMENTS ET TECHNIQUES
Les instruments qui permettant de mener à bien cette
recherche sont de trois ordres :
- Les enquêtes par questionnaire ;
- Les entretiens ;
- Les documents.
a) L'ENQUETE PAR QUESTIONNAIRE
Elle consiste à poser à un ensemble de
répondants, le plus souvent acteurs directs ou indirects, une
série de questions relatives à leur situation sociale,
professionnelle ou familiale, à leurs opinions, à leur attitude
à l'égard d'option ou d'enjeux humains et sociaux, à leur
attente, à leur niveau de connaissance et de conscience des actions des
Forces Armées camerounaises face aux menaces (Quivy et Van Campenhoudt
1988 : 191).
De ces deux variantes, nous avons choisi le questionnaire dit
« d'administration directe », c'est-à-dire rempli par le
répondant lui-même (Quivy et Van Campenhoudt 1988 : 191).
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Ces questionnaires sont adressés aux Militaires de Rang
(MDR), aux Sous-officiers et Officiers des Forces Armées camerounaises.
La teneur des questions se trouve en annexe.
b) LES ENTRETIENS
Elles se distinguent par la mise en oeuvre des processus
fondamentaux de communication et d'interaction humaine correctement mises en
valeur. Ces processus permettent au chercheur de tirer de ces entretiens des
informations et des éléments de réflexion et d'analyse
(Quivy et Van Campenhoudt 1988 : 194). De toutes ses variantes, l'entretien
centré, mieux connu sous l'appellation de « Focused interview
», nous permet d'avoir la teneur des actions militaires face aux ennemis
« non identifiables ». Ces entretiens s'accompagnent d'une analyse
des éléments recueillis.
c) LES DOCUMENTS
Pour mener à terme cette étude, nous lisons des
ouvrages publics, institutionnels et internationaux relatifs à l'action
des Armées dans le nouveau contexte stratégique mondial.
V- CHAMP D'OBSERVATION ET NIVEAUX D'EXPLICATION
Ce travail de recherche a pour champ d'observation le domaine
politique de sécurité et de défense, les Forces
Armées étant le seul levier activé par le politique dans
son devoir régalien de défense et de sécurité du
territoire camerounais.
Les niveaux d'explication sont de deux ordres à savoir,
politique et militaire. Politique c'est-à-dire partant des
préoccupations, des ambitions, des orientations et des volontés
politiques nationales et internationales du
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chef de l'Etat ; militaire c'est-à-dire partant des choix
stratégiques et tactiques imposés par les réalités
opérationnelles.
VI- INTERETS ET LIMLITES DE LA RECHERCHE
Se situant dans l'optique d'examiner la politique de
défense camerounaise et les instruments de sa mise en oeuvre face
à la montée en puissance des nouveaux acteurs remettant en cause
la puissance de l'Etat par leurs actes imprescriptibles, ce travail est porteur
d'intérêt à plus d'un titre :
1. D'abord heuristique car, notre étude nous permet de
prendre acte des dispositions doctrinales et opérationnelles prises par
les autorités politiques et militaires destinées à
neutraliser toute forme de menace à
la sécurité et à la stabilité des
institutions républicaines, mais aussicomprendre les enjeux
et faire des propositions utiles à la société.
2. Puis politico-stratégique partant de la prise en
compte des enjeux par les autorités politiques et militaires à la
définition d'une politique de défense commandant l'action des
Forces Armées chargées de son exécution, afin de garantir
la défense et la sécurité des intérêts
nationaux.
Mais, du fait du caractère confidentiel de certaines
informations frappées de l'omerta ou de « secret défense
» et du caractère processuel de la démarche
stratégique, il est difficile d'obtenir toutes les informations y
afférentes, encore moins les exposer prima facie sans risque
d'écorner le pilier central du système de défense,
à savoir le secret.
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PREMIERE PARTIE :
LA CONCEPTUALISATION POLITIQUE,
DOCTRINALE ET STRATÉGIQUE DES NOUVELLES MENACES PAR LES FORCES
ARMÉES CAMEROUNAISES
|
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à la sécurité : d'une Armée « de garde »
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Après le conflit armé de Bakassi, les Forces
Armées camerounaises font face à la criminalité
transfrontalière, aux prises d'otages avec demandes de rançons,
aux rapts de bétails perpétrés par les coupeurs de route
dans les régions du Nord, de l'Extrême nord, de l'Adamaoua et de
l'Est ; aux détournements de super tankers, des navires et prises en
otage de l'équipage, à la pêche illicite, au trafic de
toute sorte dans les eaux camerounaises plus précisément dans les
régions du Nord ouest et Sud ouest, traduisant la montée de
l'insécurité au Cameroun. Ce nouveau contexte sécuritaire
n'est rien d'autre que la manifestation des nouvelles menaces responsables de
la mise en place du patriot act aux Etats-Unis, des plans Biotox et Vigipirate
en France. Ayant pour mission d'assurer en tout temps, en toutes circonstances,
et contre toutes formes d'agressions la sécurité et
l'intégrité du territoire national, les Forces Armées
camerounaises devraient s'ajuster pour s'adapter aux fortes évolutions
sociétales et géostratégiques relevant de la
conceptualisation institutionnelle et générale des menaces
(Chapitre II), indispensable pour la définition de la
doctrine d'emploi et son adaptation aux nouvelles menaces (Chapitre
III). Mais avant d'y aller au fond, il est impérieux de
préciser les bases conceptuelles du débat sur les Forces
Armées, la sécurité et les nouvelles menaces dans le monde
(Chapitre I).
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CHAPITRE I :
LES BASES CONCEPTUELLES DU DEBAT SUR DES FORCES
ARMÉES, LA SÉCURITÉ ET
LES NOUVELLES MENACES : ÉTAT DE LA
QUESTION

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Afin de mieux cerner notre objet d'étude relatif
à l'action des Forces Armées camerounaises face aux nouvelles
formes de menaces à la sécurité, il convient de tabler
d'abord sur les dimensions théoriques y relatives (I), avant de
procéder à leur circonscription afin de lever tout
équivoque (II).
I- PRÉCISIONS CONCEPTUELLES ET
THÉORIQUES
Tout exercice scientifique a pour préalable
l'étude théorique des concepts clés de l'objet
d'étude. Les principaux concepts de notre travail sont : les Forces
Armées, les nouvelles menaces et la sécurité.
1) LES FORCES ARMÉES
Tout État indépendant et souverain, à
l'exception de certains au statut particulier (Vatican, suisse etc.), dispose
de Forces Armées de défense. De fait, les Armées sont
restées pendant longtemps le symbole premier de la souveraineté.
Elles sont au service de la Nation. Elles sont le « bras armé
» En France, hormis quelques exceptions notables, les
sociologues n'ont guère estimé que l'Armée
était une institution aussiessentielle que la famille,
l'école, l'entreprise, l'État, la religion ou la
science. Mais l'Armée tient une place essentielle au
coeur de l'État. Elle est un acteur majeur de la politique
extérieure (domaine réservé). Elle peut dimensionner,
déstabiliser ou stabiliser tout État. Ainsi, cette
dernière peut être un instrument de « puissance » et de
« grandeur » ; un outil de protection des intérêts ; un
outil de conquête, d'émancipation et d'administration ; un outil
de contrôle ; un outil diplomatique ; un outil de l'humanitaire (Messinga
2007 : 16).
a) LES FORCES ARMÉES COMME INSTRUMENT DE
« PUISSANCE» ET DE «GRANDEUR »
La puissance et la grandeur américaine et française
se mesure fondamentalement à l'aune de leurs Armées respectives.
L'intervention
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libératrice du Koweit en 1990, la chute du
régime de Sadam en 2006 mises à l'actif des Forces Armées
américaines contribuent à la construction de la puissance
américaine. La gestion d'autres entités autonomes et souveraines
par les Etats-Unis à travers leurs Armées qui font et
défont des régimes politiques, n'est rien d'autre qu'une marque
de la toute puissance américaine. Ils restent les gendarmes du monde,
les garants de «leur ordre international » grâce à cet
outil de répression au service du politique.
De même, le rayonnement de la France sur la scène
internationale est du en grande partie par l'oeuvre de son Armée,
instrument du politique lorsqu'on se rappelle du rôle joué par
cette dernière pendant la colonisation. Pour Jules Ferry, l'expansion
coloniale menée par les Forces Armées est « un instrument
décisif de grandeur et de puissance ». De même, pour
permettre à la France de rester une puissance malgré la faiblesse
de ses moyens, le Général de Gaulle décidera de placer les
anciennes colonies au service de la défense, du développement et
du rayonnement international de la France. Au lendemain des
indépendances, la coopération militaire sera l'ultime
élément du maintien de l'influence française en Afrique
noire. De Gaulle considérait ces militaires français comme
dernier le moyen dont disposait la France pour préserver ses
intérêts et garder son influence lui permettant de rayonner sur le
plan international (Messinga 2007: 17).
b) LES FORCES ARMÉES COMME OUTIL DE PROTECTION
DES INTERETS
A l'observation de la politique d'expansion coloniale du
second empire, les Forces Armées renforçant les installations
françaises de Saint Louis au Sénégal avaient pour mission
de les défendre le plus énergiquement possible contre toute forme
d'attaque. De même, l'histoire des deux grandes guerres mondiales
illustre à suffisance le rôle majeur joué par les
militaires dans la protection des intérêts français,
anglais, allemands, italiens, etc.
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Comme pendant la guerre de 1939-1945 et tout
particulièrement avec l'appel du 18 juin 1940 du Général
de Gaulle à Londres, de septembre 1939 à mai 1940, la France
utilisera les troupes coloniales, la « force noire », pour
défendre ses positions et reconquérir son territoire. Cette
Armée noire permettait de compenser le déficit numérique
de l'Armée face à ses adversaires réels, dont l'Allemagne.
Sur le plan strictement militaire, elle s'impliquait pour la
nécessité de la défense du territoire
métropolitain. C'est dans les « Forces intactes » de l'empire
que dès le 18 juin 1940, le général de Gaulle
déclare puiser la confiance en sa lutte et d'après le colonel
Leclerc, le Cameroun fut le centre de l'initiative de la libération de
la France en 1940. L'on peut aussi évoquer la mobilisation des Forces
Armées camerounaises pour la protection de leur territoire envahi par
les troupes Armées nigérianes en décembre 1993 (Messinga
2007 : 18).
c) LES FORCES ARMÉES COMME OUTIL DE CONQUETE,
D'ÉMANCIPATION ET D'ADMINSTRATION
Elie Mvié Meka nous rappelle l'occupation totale du
territoire algérien en 1869 qui sera placé sous l'autorité
du ministre de la guerre par la légion étrangère
créée le 10 mars 1834 pour servir hors du royaume. Dès
1841, les deux régiments, tour à tour, construisent les routes,
des ponts tout en poursuivant en même temps l'entreprise de pacification
de Kabylie, finalement acquise par le Général Mac Mahon en 1857.
L'officier colonial ici est l'homme à tout faire. Il doit «
concevoir, arbitrer, gérer, rendre justice, ouvrir les routes, fonder
les marchés, créer de nouvelles ressources de richesses »
Encore en 1881, le Colonel Dodds à la tête de
trois milles hommes équipés d'armes modernes et de balles
explosives occupe Abomey. En 1882, les légionnaires s'engagent à
Dahomey contre le roi Behanzin, puis au soudan et à Madagascar. On
assistera alors à l'écrasement de la
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mutinerie des tirailleurs sénégalais au camp de
Thiaroye, les massacres de Sétif en Algérie, la répression
de Madagascar au nom du monopole de la violence légitime au sens
wébérien.
De même en Afrique noire, il nous fait état de
cette mission de la France sur les « terres nouvelles »
assimilées à un acte de délivrance des vielles
oppressions, du sous développement matériel, des
épidémies et des maladies endémiques, des antiques
tyrannies de la traite négrière. Ainsi, le militaire
français aurait aidé le politique à briser « les
fers, dénouer les liens, à promouvoir l'épanouissement
», car dépositaire de certaines valeurs d'humanité,
d'humanisme et de civilisation. Pour ce faire, « les chevaliers de la
civilisation et du progrès » s'employèrent à mater
les grandes figures des résistances africaines telles que Lat-Dyor,
Amadou fils d'El Hadj Omar, roi Toucouleur, Samori, Rabah...
Par ailleurs, l'Armée peut aussi être
considérée comme un instrument de « modernisation » et
du développement. L'instrument militaire est présenté ici
comme un rempart contre les désordres sociaux, un appareil
organisé en vue de la modernisation et la stabilisation de la
société ; une force ultime d'appoint et de réserve
à laquelle on pourrait faire appel ou qui pourrait prendre le pouvoir
pour prévenir la subversion ou un affrontement total de l'ordre
politique ; la seule force organisée pouvant jouer un rôle au
premier plan dans la modernisation et le développement des Etats
indépendants. Tel est le cas du génie militaire au Cameroun qui
a, à son actif plusieurs investissements (routes, ponts etc.) (Messinga
2007 : 19).
d) LES FORCES ARMÉES COMME OUTIL DE CONTROLE DE
L'ORDRE PUBLIC
Ce rôle, est illustré par de nombreuses
interventions militaires enregistrées avant et après les
indépendances africaines. En 1954, vingt milles légionnaires
viennent en appui aux opérations de maintien de l'ordre
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à la suite des troubles déclenchés en
Algérie. Nous avons les interventions des Forces françaises
pré positionnées en Afrique pour maintenir au pouvoir les
présidents Léon MBA et MOBUTU, respectivement au Gabon en
février 1964 et au Zaïre en 1977 et plus tard en 1978. Ce processus
de contrôle pouvait parfois participer de la déstabilisation
d'autres souverains jugés peu contrôlables, peu scrupuleux du
respect des droits de l'homme et gênant pour la coopération
française en Afrique. Ce fut le cas du Maréchal Bokassa en R.C.A.
par l'Opération Barracuda en 1978. La France, par ces interventions,
contrôle la politique de son pré carré afin de maintenir
son influence, car d'après le régime de Vichy, « l'atout
impérial est la dernière chance de la France » (Messinga
2007 : 20).
Aussi, les Forces Armées sont les garants de la loi et
du « maintien de l'ordre », constituent un appareil d'encadrement et
de contrôle du processus d'accumulation du capital. L'instabilité
politique qu'on observe dès le milieu des années 1960 et qui va
s'accentuant au cours de la décennie 1970, oblige la recherche à
se concentrer non plus sur les conditions de la modernisation, mais bien sur
celles de l'ordre et de la stabilité politique. Ainsi, l'Armée
sera appelée à réprimer les troubles sociaux ou l' «
agitation communiste » et bientôt « la menace terroriste
». Pour les théories de la mouvance dialectique historique, les
interventions militaires doivent être comprises comme des tentatives
visant à déstabiliser la situation pour le capital
métropolitain, et dans une certaine mesure pour le capital national ;
sans que cela soit pour autant mécanique dans tous les cas de figure.
Les Armées néocoloniales sont devenues au fil des ans des
complexes organisations dédiées à la production d'un
surplus de force et de sécurité (Messinga 2007 : 20).
e) LES FORCES ARMÉES COMME OUTIL
DIPLOMATIQUE
« Instrument du politique » au sens de Clausewitz,
Elie MVIE MEKA pense que le militaire a toujours joué un rôle
considérable dans la
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gestion des relations internationales au sein des grandes
puissances, à l'instar de l'expédition britannique qui fut
à l'origine des incidents de Fachoda en 1898 ; du partage du Cameroun
par les généraux DOBELL français et AYMERICH anglais qui
fut entériné par leurs Etats respectifs d'après Engelbert
MVENG ; de la mission de ralliement au Cameroun en 1940 du Colonel LECLERC,
signé du général de GAULLE faisant de lui son
représentant dans toute négociation. Sa lettre de mission
signée du Général de Gaulle précisait qu'il devait
« représenter le Général de Gaulle dans toute
négociation qu'il pourrait y avoir lieu, d'engager ou d'accepter, dans
toute déclaration qu'il pourrait y avoir lieu de faire, dans toute
initiative qu'il pourrait y avoir lieu de prendre, en vue d'amener tout ou
partie des colonies à se joindre au Général de Gaulle pour
refuser l'exécution des armistices et continuer la guerre contre les
Allemands et les Italiens ». Aussi, « Établir et maintenir la
liaison avec les autorités britanniques de Gambie, Sierra Léone,
Gold Coast, Nigeria et éventuellement avec d'autres autorités
étrangères dans la protection des intérêts
français » (Messinga 2007 : 24).
f) LES FORCES ARMÉES COMME OUTIL DE
L'HUMANITAIRE
La mission colonisatrice s'est accompagnée du lot de
bienfaits de la science, de la médecine qui ont amélioré
l'état sanitaire, l'espérance de vie et le potentiel de travail
des populations africaines d'après Elie MVIE MEKA. Ce fut l'oeuvre des
médecins militaires français à l'instar d'Eugène
Jamot qui lutta contre toutes les épidémies (maladie du sommeil,
peste, lèpre...). Toujours à l'actif de l'humanitaire, la force
d'assistance humanitaire militaire d'intervention rapide s'est
déployée sur de nombreux fronts en Afrique. A la demande des
Etats, elle fournissait les moyens de transport, des réseaux de
communication, des travaux de génie, des vivres, des tentes du
matériel de couchage, des aides médicales, une main d'oeuvre
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abondante et efficace. Avec la complexification des relations
internationales, cette dimension humanitaire des Forces Armées prend de
plus en plus de l'importance dans leurs différents modules de formation.
C'est sur cette spécialisation que s'est ouvert le RECAMP V au Cameroun,
à la suite d'une longue coopération entre la France et ses
ex-colonies (Messinga 2007 : 24).
g) LES DOCTRINES D'EMPLOI DES FORCES ARMÉES
ACTUELLEMENT EN VIGUEUR
Dans toutes les doctrines d'emploi actuellement en vigueur, on
distingue principalement quatre grands types d'emploi des Forces: la
dissuasion, le combat aéroterrestre, la diplomatie coercitive et les
opérations en faveur de la paix (Caplow et Vennesson 2000 : 164).
· La dissuasion nucléaire et
conventionnelle
Dissuader c'est faire que l'adversaire s'abstienne d'agir car
ses chances de succès sont trop aléatoires et/ou d'un coup
disproportionnelles aux gains escomptés. Il s'agit d'une
stratégie de non emploi des Forces et ce trait est encore plus
marqué avec la dissuasion nucléaire. Ici l'emploi des Forces est
virtuel. Tel est le cas de la doctrine de dissuasion nucléaire
française formulée au cours des années 1960 et qui est
reprise en 1997 et identifiée comme l'une des principales fonctions
stratégiques. (Caplow et Vennesson 2000 : 164-165).
· Le combat
aéroterrestre
C'est une stratégie qui repose sur un emploi
véritable de la force au cours d'un combat aéroterrestre. Il
s'agit de détruire la plus grande part des capacités militaires
de l'adversaire. Ici, les menaces, la diplomatie et les efforts de persuasion
destinés à transformer les préférences et les
politiques de l'adversaire n'ont pas de place. Après une
définition des rôles et des phases, place est laissée
à la bataille. Toutefois, cette conception de l'usage
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de la force ne signifie pas nécessairement la guerre
totale ou la reddition sans condition (Caplow et Vennesson 2000 : 165-167).
· La diplomatie coercitive
La diplomatie coercitive consiste en une menace et/ou un
emploi volontairement limité et gradué de la puissance militaire
afin de persuader un adversaire de mettre un terme à une action en
cours, de revenir au statu quo ante par rapport à une action
déjà accomplie ou d'initier une action qu'il juge
indésirable. Les termes et expressions «coercition»,
«coercition stratégique», «stratégie de persuasion
», « stratégie de chantage », «stratégie de
contrainte », «diplomatie de la canonnière» sont souvent
utilisés de manière interchangeable pour désigner cette
diplomatie de la violence qui se sert de la force Armée pour
«exploiter les peurs et les désirs de l'ennemi». Au total,
«la diplomatie coercitive» ou «la diplomatie de la violence
» cherche à persuader un adversaire par la menace de la violence,
mais également par un usage limité et réversible de
celle-ci. Il s'agit de « [...] mener une action graduée visant
à faire comprendre à l'adversaire, par des interventions de plus
en plus contraignantes, la détermination de la force » (Caplow et
Vennesson 2000 : 167-169).
· Les opérations en faveur de la
paix
A partir de 1995, les officiers français vont
établir une doctrine concernant les opérations de la paix sous
l'égide de l'organisation des Nations Unies. Les français
envisageront trois types d'opérations différentes :
l'opération de maintien de la paix (peace keeping),
l'opération d'imposition de la paix (peace enforcement) et
l'opération de restauration de la paix (peace building).
L'opération de maintien de la paix est inscrite dans le
cadre des dispositions du chapitre VI de la Charte des Nations Unies portant
sur la Sécurité Collective. Il s'agit de maintenir la paix avec
le consentement des
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parties en présence, après cessation des
hostilités. Le déploiement de la force permet de contrôler
le processus des règlements du conflit.
L'opération d'imposition de la paix est fondée
sur l'article VII de la Charte. Il s'agit de s'opposer par la force à un
agresseur identifié. Il s'agit de conduire une guerre, comme ce fut le
cas dans le golfe Arabo persique de 1990-1991, en Somalie en 1993 par
l'Opération américaine « Retore Hope », en
Cote d'Ivoire par l'Opération « Licorne » dirigée par
la France.
L'opération de restauration de la paix consiste
à intervenir dans le cadre du chapitre VII pour favoriser le retour
à la paix dans un pays en état de guerre civile où la
sécurité des populations est gravement menacée, mais
où aucun agresseur n'est désigné (Opération
Turquoise au Rwanda) (Caplow et Vennesson 2000 : 169-170).
En fin de compte, les théoriciens de la militarisation
de la société présentent les Forces Armées
tantôt comme un instrument de grandeur, de protection des
intérêts, des conquêtes et de contrôle de l'ordre, ou
encore comme un instrument diplomatique et de l'humanitaire ; et d'autre part
comme un appareil de dissuasion, de combat, de répression et de maintien
de la paix.
Ces différents cadres théoriques sont apparus
utiles non seulement parce qu'ils précisent le rôle naturel des
Armées dans le monde partant des systèmes autoritaires aux
systèmes démocratiques, mais aussi dans la mesure où ils
conceptualisent les Forces Armées comme un instrument aux mains du
gouvernement ; un gouvernement dirigé par les autorités en
quête de modernité, de développement et de
sécurité. En somme, ces théories posent le bras
armé de l'Etat comme le garant de la grandeur, du respect de la loi, des
institutions républicaines et de l'intégrité nationale.
Malgré leur utilité heuristique, les
théories de la militarisation des sociétés n'ont pas
encore pu éclaircir, complètement, les raisons de la persistance
de ce phénomène dans les systèmes démocratiques,
régime politique à prétention universelle. Comment
expliquer que malgré leur
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omniprésence dans la plupart des Etats, l'ordre public et
l'intégrité territoriale des Etats continuent à être
méprisés ?
2) LES NOUVELLES MENACES
La fin de la guerre froide a modifié les
équilibres stratégiques rendant ainsi improbable la guerre entre
Etats dans l'espace occidental tandis que s'impose la prédominance des
guerres civiles ou intra-étatiques.
Dans ce contexte, de nouvelles formes de menaces apparaissent,
qui contournent les voies de confrontations classiques et accroissent encore
l'incertitude inhérente à la guerre (Coste 2008 : 8).
a) DE LA GUERRE SYMÉTRIQUE À LA GUERRE
ASYMÉTRIQUE
Forme immémoriale de la guerre, le combat du faible
contre le fort prend dorénavant une importante accrue car, durablement
installées dans une posture de supériorité
opérationnelle, les Armées du monde sont de plus en plus
confrontées à des formes nouvelles de conflits, que Clausewitz
qualifiait déjà de « petites guerres » (Colonel Coste
2007 : 14).
b) CONFLITS SYMÉTRIQUES ET CONFLITS
DISSYMÉTRIQUES
Forme traditionnelle des conflits armés, ces conflits
peuvent être qualifiés de conventionnels. Ils mettent en oeuvre
des Armées institutionnelles qui poursuivent des buts de même
nature et utilisent des moyens et des modes d'actions similaires. Leur
différence essentielle réside dans la différence de
puissance entre les belligérants et les conséquences qu'elle peut
entraîner.
Les conflits symétriques opposent des adversaires
comparables et ne sont pas exempts des risques et de défaite. Aussi, mis
à part le développement d'une stratégie de dissuasion qui
interdit la confrontation Armée, l'intérêt de chaque
protagoniste potentiel est de rechercher la supériorité à
son profit, c'est-à-dire créer une dissymétrie qui puisse
lui
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
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assurer la victoire et lui permettre, ainsi d'entrer en conflit
avec toutes les chances de succès.
Les conflits dissymétriques mettent au prise des
adversaires de même nature mais, de capacités inégales sur
le plan militaire. Ils offrent des grandes chances de succès au
belligérant le plus puissant. Cependant, la plupart des conflits ne se
terminant plus de manière officielle par une victoire acceptée
par tous, un tel conflit conduit souvent le plus faible à s'orienter
vers une forme asymétrique qui constitue sa seule chance de l'emporter
dans son combat contre le fort (Coste 2007 : 14-15).
c) LES CONFLITS ASYMÉTRIQUES
Dans un conflit asymétrique, l'un des
belligérants se place délibérément dans un domaine
différent de celui ou son adversaire possède une
supériorité manifeste et met l'accent sur la disparité
totale de nature des moyens et des modes d'action. Dans un tel conflit, dont la
forme se nourrit largement de la suprématie technologique ou
matérielle d'un des protagonistes, l'objectif du belligérant qui
s'y adonne est la transformation de la domination opérationnelle de son
adversaire en impuissance ou en vulnérabilité. Ainsi, il met en
valeur ses propres facteurs de supériorité d'autant plus forts
qu'ils sont matériellement, psychologiquement et moralement
éloignés de ceux de son adversaire. La supériorité
militaire des Armées occidentales devrait susciter des ripostes de plus
en plus asymétriques.
Il parait cependant nécessaire de distinguer deux types
d'asymétrie qui impliquent les Forces Armées de manière
différente :
- Le conflit dans lequel un système subversif
mène une lutte asymétrique globale contre les
intérêts d'un Etat ou d'une alliance et dans laquelle les Forces
Armées ne sont qu'une partie des instruments de réponse à
cette menace.
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- Le conflit dans lequel une force Armée est
confrontée à une asymétrique de combat directement
liée à son engagement et représente la réponse
violente de ses adversaires sur le terrain ; cible principale de ces actions
localisées sur le théâtre d'opérations, les Forces
Armées sont les acteurs essentiels de cette lutte (Coste 2007 :
15-16).
d) DES CONFLITS SYMÉTRIQUES AUX
CONFLITS
ASYMÉTRIQUES
Bien qu'ils aient pris une importance croissante au cours de
ces décennies, les conflits asymétriques ne sont pas nouveaux.
D'une part, ils ont toujours fait partie de la panoplie guerrière de
l'humanité et de toutes les époques, toutes les Armées, y
ont été confrontées. D'autre part, est nommé bien
souvent asymétrie ce qui parait à la fois nouveau, hors du champ
traditionnel du combat militaire et temporairement sans réponses
adaptées.
Héritières de leurs histoires nationales
essentiellement marquées par la guerre sur les continents, les
Armées du monde en l'occurrence africaines et partant celle du Cameroun
a surtout été organisée et équipée en
référence aux conflits de nature symétrique (Bangoura 1992
: 25). Les modèles dissymétriques et, plus encore,
asymétriques sont désormais des conflits de
référence pour toute Armée. Or, les guerres
asymétriques trouvant leur pleine expression dans l'insurrection, la
guérilla, le terrorisme ou la manipulation des populations, certaines
capacités indispensables dans la conduite des guerres symétriques
ou dissymétriques s'avèrent partiellement inadaptées
à l'asymétrie des conflits.
Encore essentiellement organisées dans le cadre de
conflit entre forces de même nature, les Armées du monde sont
aujourd'hui confrontées à la montée d'une asymétrie
qui se nourrit largement de leur suprématie technologique ou
matérielle. Ne pouvant espérer vaincre qu'autrement,
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leurs adversaires mettent l'accent sur la disparité de
la nature, des moyens et des modes d'action qui leur permettent de mettre en
valeur leurs propres facteurs de supériorité (Coste 2007 :
15-18)
e) DE NOUVEAUX ADVERSAIRES
Les confrontations entre Etats au moyen de Forces
Armées régulières cèdent le pas à des
conflits dans lesquels de nouveaux adversaires apparaissent à
côté des Etats adoptant une démarche asymétrique.
Comme par le passé, certains Etats usent de
l'asymétrie, soit comme approche militaire indirecte afin
d'éviter les points forts de l'ennemi et d'exploiter ses
vulnérabilités (cas des guérillas), soit comme
stratégie indirecte en cherchant à vaincre la volonté
adverse par des moyens non militaires ou non conventionnels (terrorisme,
développement des armes de destruction massive, manipulation de
l'information).
Cependant, d'autres acteurs s'affirment et se
développent. Nons étatiques et divers, ils utilisent des modes
d'action fondamentalement asymétriques dont la forme dépend des
buts qu'ils fixent :
- Organisations à but criminelle tournées vers
la recherche du profit, les systèmes prédateurs entrent rarement
dans le champ de compétence des Forces Armées et concernent
surtout les appareils judiciaires et policiers ;
- poursuivant des buts politiques localisés au moyen de
la lutte armée, les systèmes revendicatifs recherchent la
participation au pouvoir local ou à sa conquête et usent de la
lutte armée pour soustraire territoires et populations à
l'autorité de l'Etat qu'ils combattent ;
- de nature révolutionnaire, les systèmes
subversifs emploient une violence sans frein dans un but politique global,
généralement fondé sur l'avènement sans compromis
possible d'une société nouvelle (Coste 2007 : 18-19).
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f) UNE VISIBILITÉ CROISSANTE DE LA
MENACE
ASYMÉTRIQUE
Des menaces asymétriques appelées «
nouvelles menaces » n'ont souvent rien de nouveau, puisque le terrorisme,
la criminalité organisée, etc. sont des phénomènes
anciens. Les Etats sont soumis à de nouvelles
vulnérabilités aux caractéristiques particulières
:
- Ce sont des menaces politiques : autoritarismes, tentatives de
coups d'Etat, rébellion ;
- Ce sont des menaces idéologiques : terrorisme,
sectarisme ;
- Ce sont des menaces stratégico-économiques :
touchant les matières
premières stratégiques d'un pays (pétrole,
or, diamant, cuivre, coltan,
bauxite, fer...) ;
- Ce sont des menaces contre les ressources vitales d'un pays :
eau, espaces naturels, énergie ;
- Ce sont des menaces contre la sécurité
alimentaire des populations ;
- Ce sont des menaces socio-économiques et politiques
liées à la mondialisation ;
- Ce sont des catastrophes naturelles, pandémies
(Bangoura 2002 : 207- 208).
g) LES CARACTERISTIQUES DES MENACES
ASYMÉTRIQUES C'est un phénomène passager
caractérisé par l'apparition de zones grises fonctionnant dans
une logique de réseau.
1- UN PHENOMENE PASSAGER OU DURABLE
?
La question posée consiste à savoir si le
nouveau désordre mondial n'est qu'un épisode de crise ou/et de
déséquilibre limité dans le temps et consécutif
à l'effondrement de l'ordre bipolaire ou si le chaos caractérise
désormais irréversiblement une société humaine
décomposée par le caractère inégal et
asymétrique d'une mondialisation à plusieurs vitesse.
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2- L'APPARITION DE ZONES GRISES
Un évident désintérêt
international peut émerger pour les régions du monde dont le
contrôle ne constitue plus un enjeu économique ou
stratégique, et pour les conflits limités qui ne sont pas
susceptibles de nuire au nouvel ordre international en gestation. Il se dessine
ainsi une nouvelle séparation entre un monde « inutile » et un
monde « utile » sur lequel se concentre l'intérêt des
puissances. L'extension croissante de « zones grises » sur la
planète traduit assez bien l'incertitude qui règne face à
des évolutions encore difficiles à analyser. Ainsi nombre de
crises sans issue politique ou militaire, perdurent dans l'indifférence
de la communauté internationale. Cette face sombre de l'évolution
récente s'avère toute aussi importante que la
réorganisation unipolaire du monde (IHEDN 2002 : 18).
3- UNE LOGIQUE DE RESEAUX
Il s'agit essentiellement des phénomènes
militaires et pour la plupart non étatiques, se caractérisant le
plus souvent par leur transnationalité, leur «
déterritorialisation », leur ampleur planétaire et leur
logique de réseaux. Les menaces sont des Forces plus diffuses et plus
difficiles à appréhender dans leur globalité. Elles ne
présupposent pas d'adversaires désignés ou implicites.
Elles deviennent plurielles et multi-facettes (IHEDN 2002 : 18- 19).
h) TENTATIVE DE « TYPOLOGIE » DES
MENACES
Elle est constituée par le triptyque terrorisme,
piraterie maritime, criminalité organisée. Il s'agit pour
l'essentiel des modes opératoires déstabilisants mis en oeuvre
par les Etats, mais de plus en plus par les acteurs trans-ou
infra-étatiques, dont les activités n'ont cessé de
croître ces dernières décennies sur la scène
internationale (mouvements de lutte armée, mafias et organisations
criminelles transnationales, diasporas, minorité ethniques, secte,
mouvements religieux radicaux...). En maints endroits,
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l'affaiblissement du pouvoir central et l'usure des
institutions apportent de nouveaux éléments de perturbation. Des
bandes organisées, s'arrogent unilatéralement une
légitimité de fait, mettent en coupe réglée
d'immenses territoires. A l'intérieur de nombreux Etats, la paix civile
est compromise par la multiplication et la vigueur de sursauts identitaires qui
témoignent de la revendication de minorités estimant que
l'oppression exercée par la majorité ne peut plus perdurer sous
les effets conjugués de la mondialisation des échanges, de
l'affaiblissement des Etats et de la multiplicité des conflits
limités, les organisations mafieuses et terroristes,
bénéficiant de moyens financiers considérables, tendraient
à s'imposer en tant que nouveaux acteurs politiques, tant à
l'intérieur des Etats qu'au sein des relations internationales. Surtout,
ces différentes catégories d'acteurs trans- ou
infra-étatiques se sont de plus en plus étroitement
imbriqués les unes dans les autres avec le développement de
connexions entremêlant mouvement politico-militaire et organisations du
crime organisé tels que le développement du narcotrafic ou le
terrorisme islamiste (IHEDN 2002 : 20)
1- LE TERRORISME
a- UNE DÉFINITION OPÉRATOIRE DU
TERRORISME
La signification du mot « terrorisme » varie selon
les individus. Deux chercheurs néerlandais de l'Université de
Leyde, Alex Schmid et Albert Jongman, ont adopté une approche
intéressante du problème de la définition du terrorisme.
Ils ont recueilli 109 définitions du terme auprès
d'universitaires et de fonctionnaires et les ont analysées pour trouver
les principales composantes. Ils ont trouvé que la violence figurait
dans 83,5% des définitions, les objectifs politiques dans 65% et que 51%
d'entre elles avaient pour élément central la peur et la terreur.
21% des définitions seulement mentionnaient l'arbitraire et les cibles
prises au hasard, et seulement 17,5% incluaient la victimisation de civils, de
non combattants, de personnes neutres et d'éléments
extérieurs.
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Une analyse plus fine de cet ensemble de définitions
citées par Schmid et Jongman montre que les définitions du
terrorisme données par les fonctionnaires sont vraiment similaires
(Chaliand 1999 : 74-75). Ainsi le Task force du vice président
des Etats Unis (1986) définissait le terrorisme comme «
l'utilisation illégale ou la menace de violence contre des personnes
ou des biens, pour servir des objectifs politiques et sociaux. Le but en est
généralement d'intimider ou de contraindre un gouvernement, des
individus ou des groupes à modifier leur comportement ou leur
politique ». La définition du bureau pour la protection de la
constitution de la République Fédérale d'Allemagne est la
suivante : « Le terrorisme est la lutte menée sur la
durée pour atteindre des objectifs politiques (...) qui utilise des
moyens comme des attentats contre la vie et les biens des gens en
perpétrant tout particulièrement des crimes graves tels que
détaillés dans l'article 129a, Section 1 du Code Pénal
(principalement meurtres, homicides, enlèvement avec demande de
rançon, incendies volontaires, utilisation d'explosifs) ou au moyen
d'autres actes de violence qui servent à préparer de tels actes
criminels. » Une définition officielle britannique contient
les mêmes éléments sous une forme plus succincte : «
pour notre législation, le terrorisme est « l'usage de la
violence à des fins politiques et inclut n'importe quel usage de la
violence dans le but de provoquer la peur dans la public ou une
catégorie et fraction quelconque du public» ». On
retrouve trois éléments communs dans ces définitions :
l'usage de la violence ; les objectifs politiques et l'intention de semer la
peur dans une population cible. Le consensus qui se dégage peu à
peu chez les occidentaux sur l'essence du terrorisme n'est probablement pas
partagé par la majorité des peuples dans le monde en l'occurrence
les Syriens, des Libyens, des Iraniens et les peuples du tiers monde. Bien
plus, les trois caractéristiques de base communément admises en
tant que définition de travail est très large pour être
utilisable ; en effet on y trouve des éléments qui permettraient
de faire une distinction entre le terrorisme et les autres
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formes de conflits violents, telles la guérilla ou
même la guerre conventionnelle (Chaliand 1999 : 75-76)
Définir le terrorisme est un processus semé
d'embûches, processus inévitablement politique. Un des dilemmes
les plus délicats dans les débats de définition concerne
la maxime selon laquelle « pour l'un c'est un terroriste, pour
l'autre, c'est un combattant de la liberté ». Bien qu'à
présent elle soit fortement considérée comme un
cliché, cette déclaration n'en reflète pas moins
précisément la difficulté de parvenir à une
définition universellement acceptée du terrorisme. Et pour
aggraver le problème, il y'a également la possibilité que
certains gouvernements abusent de ce terme pour faire progresser leur propre
programme, ou pour justifier une répression à l'égard
d'opposants politiques et étouffer toute critique nationale
légitime.
Malgré ces importantes difficultés de
définition, on peut de manière réaliste considérer
le terrorisme comme la manifestation d'une violence politique qui se distingue
d'autres types de violences sous-étatiques comme la guérilla, le
crime organisé ou encore les guerres civiles en masse. Le terrorisme est
caractérisé de manière unique par la
préméditation dans le but d'engendrer un climat de peur
extrême, par le fait de cibler un public plus large au-delà des
victimes immédiates, ainsi que le caractère aléatoire et
le symbolisme de ses cibles ; en outre, on recourt généralement
au terrorisme pour influencer un comportement politique au sens large, ou pour
faire avancer un ensemble particulier d'objectifs politiques et sociaux (CESA
2009 : 125-126).
La menace du terrorisme n'est pas une menace statique, elle
continue à évoluer en réponse à la dynamique
politique mondiale ainsi qu'aux stratégies spécifiques en
matière de contre-terrorisme. Au cours de ces dernières
années, nombre de principaux groupes terroristes ont été
constituées de manière profane, tels les Brigade Rouge en Italie,
ou bien se sont concentrés sur des questions nationales
spécifiques, tels les Basques en
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Espagne ou l'Armée républicaine irlandaise en
Irlande du Nord. Depuis les années 1990, nous avons assisté
à l'émergence des groupes comme AlQaïda, et encore plus
récemment, de différents groupes qui y sont affiliés en
Afrique, en Asie du Sud-Est et à travers le monde entier.
La dynamique du terrorisme a continué à se
modifier à un rythme incroyablement rapide. Des actions
coordonnées au niveau international pour renverser Al-Qaïda ont
permis d'évincer le régime Taliban qui abritait le groupe, ont
permis de capturer ou de tuer la majorité de hauts dirigeants du
réseau20, et de saisir plusieurs millions de dollars en
argent utilisé pour financer le terrorisme.
Néanmoins, les attentats terroristes se sont poursuivis
à travers le monde, Bali à Mombasa, en passant par Casablanca,
Sharm El Sheikh et Londres. Un certain nombre de changements dans la
manière dont les terroristes se sont organisés et dans la
manière dont les terroristes se sont organisés et dans la
manière dont ils opèrent, expliquent leur faculté
d'adaptation :
· La transformation d'Al-Qaïda d'une organisation
centralisée dans un nombre restreint d'endroits, en un réseau peu
structuré d'insurgés islamistes et d'agents terroristes
affichés à travers le monde, ou les dirigeants d'Al-Qaïda
jouent le rôle de stratégistes et de propagandistes, et non des
commandants.
· La capacité des réseaux terroristes
mondiaux de s'approprier les griefs locaux et les conflits à travers le
monde, puis de les intégrer dans leurs tactiques politiques et leur
idéologie pour justifier leurs actions et gagner l'appui du public.
· La planification d'attentats terroristes à bas
coût ne nécessitant pas de grandes sommes d'argent devant
être transférés à travers le monde, et l'utilisation
de nouveaux mécanismes, comme par exemple la
20 Oussama Ben Laden et Ayman Al-Zawahiri
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contrebande d'argent et les activités criminelles
locales, pour financer les activités terroristes.
· L'exploitation de l'insurrection en Irak et
d'autres conflits incessants non seulement comme un outil permettant de
recruter une nouvelle génération de terroristes, mais
également comme une occasion de former ces recrues et de les positionner
ensuite à travers le monde (CESA 2009 : 126).
b- MENACES ET VULNERABILITÉ EN
AFRIQUE
Même si l'Afrique ne compte pas un grand nombre
d'agents d'AlQaïda, les mouvements extrémistes et de militants sont
bien présents à travers la région, et cherchent à
exploiter les faiblesses dans les défenses nationales et
sous-régionales pour faire avancer leur cause. Certains ont
manifesté leur sympathie et leur soutien à Al-Qaïda et ont
même établi des liens opérationnels avec ce dernier, alors
que d'autres poursuivent des programmes plus locaux. Cependant, dans chaque
cas, ces groupes représentent une menace d'instabilité et de
violence grandissante.
En Afrique de l'Est, certaines cellules d'Al-Qaïda ont
perpétré les attentats contre les ambassades américaines
au Kenya et en Tanzanie en 1998, et ont frappé à nouveau à
Mombasa en 2002. On pense que certains des agents d'Al-Qaïda responsable
de ces attentats se trouvent en Somalie sous la protection de militants
associés à Al Itihad Al Islami. En Algérie, la
défaite du groupe Islamique Armé (GIA) et le récent
référendum sur l'amnistie, ont contribué à cimenter
la paix dans le pays. Cependant, l'émergence du Groupe Salifiste de
Prédication et de Combat (GSPC) à partir de ce qui restait des
factions du GIA, continue à poser un problème non seulement pour
l'Algérie, mais également pour la région transsaharienne
dans son ensemble. Certains éléments du GSPC se sont
déplacés de l'Algérie vers le Mali, le Niger, le Tchad et
la Mauritanie. Ailleurs, le Groupe Islamique Combattant Marocain (GICM), les
réseaux
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islamiques radicaux en Libye, et la bande des « talibans
» dans le nord du Nigeria, opèrent sans doute à une
échelle géographiquement plus limitée, mais leurs
programmes extrémistes et leurs tentatives visant à rejoindre des
réseaux terroristes mondiaux tels qu'Al-Qaïda, représentent
une menace tout aussi sérieuse.
La pauvreté, l'ampleur des territoires qui doivent
être protégés, les frontières poreuses, les conflits
incessants et la nécessité davantage de coopération
internationale sont tous importants. Les faiblesses institutionnelles, les
difficultés de la gouvernance, et la marginalité
économique, sont autant d'éléments qui ont donné
lieu à un contexte extrêmement propice à la propagation de
l'extrémisme et du terrorisme. S'il est vrai que ces facteurs touchent
les gouvernements et les sociétés à travers le monde, il
faut une action ciblée pour veiller à ce que ces facteurs soient
traités en Afrique.
Il ne fait aucun doute que le terrorisme a d'importantes
répercussions sur la sécurité des pays d'Afrique. Les
terroristes cherchent à exploiter les tensions ethniques et religieuses
et peuvent aggraver celles-ci, engendrant ainsi davantage de tensions sociales
et affaiblissant des structures institutionnelles déjà fragiles.
De manière toute aussi critique, les gouvernants ont parfois
récupéré les discours du contre-terrorisme pour
légitimer certaines mesures en matière de sécurité
interne et ainsi étouffer toute manifestation de l'opposition politique.
Lorsque cela se produit, cela engendre des répercussions
négatives sur les normes démocratiques de gouvernance et de
respect des droits de l'homme, autant de facteurs qui alimentent le cycle des
conflits (CESA 2009 : 127-128).
c- LES CAUSES DU TERRORISME
L'absence d'études empiriques significatives sur les
facteurs transnationaux pertinents fait obstacle à la
caractérisation des circonstances propices au terrorisme. Toute fois,
pur analyser les conditions à réunir
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probablement pour l'émergence du terrorisme, il faut
faire la distinction de plusieurs types de facteurs. Les préalables sont
des facteurs qui plantent le décor pour le terrorisme à longues
échéances tandis que les déclencheurs sont des
évènements précis qui précèdent
immédiatement la survenue d'un acte terroriste. Il se peut que les us,
coutumes et traditions historiques justifient le recours à la violence
contre l'Etat, le justifiant au plan moral et politique, voire même
dictent les formes appropriées de résistance, comme la
manifestation, le coup d'Etat ou le terrorisme. En Irlande par exemple, la
tradition du recours à la force physique remonte au
18ème siècle et la légende de l'Armée de
Libération Irlandaise (IRA) en 1919-1921 continue à inspirer et
à excuser, en partie le terrorisme beaucoup moins sélectif et
moins efficace de l'IRA provisoire contemporaine en Irlande du Nord (Crenshaw
2003 : 93-94).
De plus, les attitudes et les croyances qui justifient le
terrorisme se communiquent d'un pays à l'autre. Les idéologies
révolutionnaires ont toujours traversé les frontières sans
encombre. Au 19ème et 20ème siècle,
ces idées naissent en Europe, dans la foulée de la
révolution française et bolchevique.
S'agissant des causes directes du terrorisme, nous mettons
l'accent sur le contexte qui encourage la résistance envers l'Etat. Ces
circonstances créent un cadre au sein duquel le terrorisme est possible
; elles offrent motivation et orientation au mouvement terroriste.
La 1ère cause directe susceptible
d'engendrer le terrorisme est l'existence de revendications au sein d'un
sous-groupe de la population, une minorité ethnique par exemple objet de
discrimination de la part de la majorité. Un mouvement social se
développe aux fins de remédier à ces griefs et obtenir
l'égalité de droit, soit l'autonomie.
La 2ème condition qui motive les terroristes
est le manque de créneaux de participation politique. Dans ce cas, les
griefs sont surtout
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d'abord politique, sans relents sociaux ou économiques
(Crenshaw 2003 : 94-95)
Le terrorisme n'est l'apanage d'aucune idéologie
particulière. Le terrorisme peut être :
· révolutionnaire (comme l'Organisation de Combat
du parti socialiste-révolutionnaire au 19èm
siècle ou les Tupamaros au 20ème siècle) ;
· des Nationalistes luttant contre une occupation
étrangère (le FLN algérien, l'IRA de 1919 à 1922,
ou l'Irgoun), des minorités séparatistes en lutte contre les
régions autochtones (le Mouvement Corse, Breton ou Basque et l'IRA
provisoire) ;
· des anarchistes ou des millénaires (comme le
RAF en Allemagne de l'Ouest, les Brigades Rouges d'Italie et l'Armée
Rouge japonaise) ou des Réactionnaires qui cherchent à bloquer un
changement de direction (comme l'Organisation de l'Armée secrète
pendant la guerre d'Algérie ou l'Association de l'Ulster contemporaine
en Irlande du Nord (Crenshaw 2003 : 95).
2- LA PIRATERIE MARITIME
Dans le sens le plus connu, la piraterie maritime
désigne une forme de banditisme pratiquée sur mer. Cependant, les
pirates ne se limitent pas seulement aux pillages de bateau mais parfois
attaquent de petites villes côtières.
a- ÉTHYMOLOGIE ET
DEFINITIONS
Le mot pirate provient à la fois du terme grec
iutpa'r1ç (peiratês), lui même dérivé du verbe
iutpâw (peiraô) signifiant « s'efforcer de », «
essayer de », « tenter sa chance à l'aventure » et du
latin pirata : celui qui tente la fortune, qui entreprend.
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Les pirates ne doivent pas être confondus avec les
corsaires qui sont des civils faisant la guerre sur mer avec l'autorisation de
leur gouvernement, selon les lois de la guerre, avec un statut
équivalent aux militaires mais sans être soumis à
l'autorité d'un Etat-Major mais au contraire d'une façon
indépendante. La confusion résulte du fait que les Corsaires
faisaient la guerre aux nations ennemies en s'attaquant à leur commerce.
Cette apparence ne doit pas faire oublier qu'ils respectaient les vies et les
biens personnels ; seul le navire et le fret faisaient l'objet de la prise, une
enquête établissait si la prise avait été
légitime et le bien était rendu si tel n'avait pas
été le cas.
La piraterie connut plusieurs périodes fastes,
à la fin du 1er siècle avant Jésus Christ en
Méditerranée, et au 18ème siècle dans
les Antilles et l'Océan Indien puis, peu à peu disparut de ces
régions, du fait du quadrillage des marines d'État.
Le mot pirate est utilisé aussi dans différents
contextes autres que maritime : le « pirate de la route », que l'on
appelait autrefois « voleur de grand chemin », le pirate informatique
qui est un individu s'adonnant à des détournements de fonds
effectués par Internet, ou des copies d'oeuvres sans respecter le droit
d'auteur ou le copyright. On parle parfois de pirates dans le cas
d'actes politiques et terroristes : c'est le cas des pirates de l'air.
Toutefois, il s'agit ici d'une déformation du sens de pirate car il
s'agit d'actions terroristes, politiques et non de crimes de droit
commun21.
D'après la Convention des Nations Unies sur le droit
de la mer, 1982 (article 101), on entend par piraterie l'un quelconque des
actes suivants :
· a) Tout acte illicite de violence ou de
détention ou toute déprédation commis par
l'équipage ou des passagers d'un navire ou d'un aéronef
privé, agissant à des fins privées, et dirigé :
21
http://fr.wikipedia.org/wiki/fichier:pirate.jpg
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o contre un autre navire ou aéronef, ou contre des
personnes ou des biens à leur bord, en haute mer,
o contre un navire ou aéronef, des personnes ou des
biens, dans un lieu ne relevant de la juridiction d'aucun État ;
· b) Tout acte de participation volontaire à
l'utilisation d'un navire ou d'un aéronef, lorsque son auteur a
connaissance de faits dont il découle que ce navire ou aéronef
est un navire ou aéronef pirate ;
· c) Tout acte ayant pour but d'inciter à
commettre les actes définis aux lettres a) ou b), ou commis dans
l'intention de les faciliter.
Par extension, on parle également de piraterie
lorsqu'il y a acte de braconnage, par exemple lors de pêches
interdites d'espèces protégées (dans les zones
d'exclusivité économique). Ceci concerne tout
particulièrement la légine, poisson très recherché
localisé dans les Zones Economiques Exclusives des Terres Australes.
En droit pénal français, la piraterie est
définie comme « le fait de s'emparer ou de prendre le
contrôle par violence ou menace de violence d'un aéronef, d'un
navire ou de tout autre moyen de transport à bord desquels des personnes
ont pris place, ainsi que d'une plate-forme fixe située sur le plateau
continental »22.
b- HISTOIRE DE LA PIRATERIE MARITIME
La piraterie existait déjà dans
l'antiquité. Toutes les civilisations anciennes ayant
possédé une marine l'ont connue, les Phéniciens comme les
Mycéniens. Jules César dut lui-même affronter la piraterie.
Lors d'un voyage vers l'Orient entre les années 75 avant Jésus
Christ et 74 avant Jésus Christ, il fut capturé par ceux-ci,
à hauteur de l'île de Pharmacuse, à
22 Article 224 al 6 du code pénal
français
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
proximité de la ville de Milet en Asie Mineure.
Dès sa libération contre rançon, il entreprit de se
venger. Après avoir réuni en toute hâte une flottille, il
surprit et captura les pirates qu'il fit exécuter. Pompée se
rendit célèbre en nettoyant la Méditerranée des
pirates ciliciens.
c- LA PIRATERIE MODERNE
Les définitions modernes de la piraterie comprennent
les actions suivantes : l'enlèvement de personnes avec demande de
rançon, le vol, le meurtre, le sabotage.
d- LES REGIONS SENSIBLES
Les pirates d'aujourd'hui sévissent essentiellement
dans les régions d'Asie du Sud et Asie du Sud-Est (en particulier dans
la mer de Chine méridionale), le long des côtes de
l'Amérique du Sud, du Golfe d'Aden, de la mer rouge, mais aussi celles
de la Somalie, dans le Golfe de Guinée et dans la mer des
Caraïbes.
Figure N°2 : Carte de la
piraterie dans le monde

Source :
www.pirates-corsaires.com/une-question-me-taraude-depuis
-peu-ple - monde-a-change-depuis -le-xiiieme-siecle-qr9.htm
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à la sécurité : d'une Armée « de garde »
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Selon le Bureau Maritime International (BMI), plus de 4000
actes de piraterie ont été enregistrés durant les vingt
dernières années, un rapport de la RAND Corporation estime le
nombre d'attaques et de tentatives d'attaques à 209 durant la
période 1994-1999 et à 2 463 entre 2000 et fin 2006, soit une
augmentation exponentielle de ces pratiques depuis le début du
21ème siècle (RAND Corporation 2008 : 3)
Ils utilisent des embarcations plutôt petites et
rapides, et profitent du nombre restreint de membres d'équipage sur les
navires cargos. Ils savent également transformer leurs embarcations en
bateaux de pêche ou de transport, afin d'éviter et de
déjouer les inspections.
Dans la plupart des cas, les pirates ne s'intéressent
pas à la marchandise transportée, mais plutôt aux affaires
personnelles de l'équipage et au contenu du coffre-fort, qui peut
contenir d'importantes quantités de monnaie destinée à
payer le personnel et les taxes portuaires. Il arrive également que les
pirates se débarrassent de l'équipage et conduisent le navire
dans un port afin de vendre la cargaison et dans de très rares cas de
transformer son identité et de le revendre.
La piraterie moderne se développe pour plusieurs raisons
:
· La pauvreté importante de certaines
régions, qui pousse une partie de leurs habitants dans la piraterie ;
· une incapacité de certains pays à
gérer la sûreté de leurs eaux territoriales ;
· les équipages des navires cargos sont peu nombreux
et non armés (une vingtaine d'hommes sur un navire de 150 mètres)
;
· les navires marchands se déplacent à des
vitesses faibles (entre 10 et 20 noeuds en moyenne), sont peu manoeuvrés
et, chargés, ils peuvent être assez bas sur l'eau permettant ainsi
un abordage aisé ;
· les équipages, embarquant pour une durée de
neuf mois en moyenne, proviennent en grande partie des pays en voie de
développement
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à la sécurité : d'une Armée « de garde »
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(Asie - Afrique) et reçoivent la majeure partie de leur
salaire en espèces à bord (Barrault 2007 : 174-175).
e- LES ATTAQUES
Les attaques se produisent généralement de
nuit, entre 01h00 et 03h00, dans des zones dites « à risque »
(Asie du Sud-Est, détroit de Malacca, sud de la mer rouge, Golfe d'Aden,
côtes de Somalie, Golfe de Guinée...) en haute mer ou dans des
zones de mouillage. Seule une veille attentive ainsi qu'une réaction
rapide de l'officier de quart par une manoeuvre ou par le déclenchement
de l'alarme générale peuvent éventuellement dissuader les
pirates de poursuivre leur action. Il existe une hiérarchie des actes de
piraterie :
- Les petits malfrats de la mer agissent en groupes peu
nombreux et leurs actions sont souvent improvisées s'apparentant plus
à de la rapine. Un groupe d'entre eux est responsable de l'assassinat de
Peter Blake dans l'estuaire de l'Amazone en 2001.
- En haut de la hiérarchie, on trouve quelques gangs
internationaux dépendant de puissantes mafias et triades asiatiques
dirigées par de puissants hommes d'affaires.
- Un autre type de pirates est constitué par des
groupes terroristes, comme celui qui en octobre 2000 a attaqué le
bâtiment USS Cole de la marine américaine au mouillage
dans le port yéménite d'Aden en faisant sauter une embarcation
bourrée d'explosifs, faisant 17 morts et 42 blessés.
D'après l'Organisation Maritime Internationale, de
nombreuses attaques sont enregistrées par an :
· 2001 : 252 attaques
· 2002 : 341 attaques
· 2003 : 445 attaques
· 2004 : 329 attaques
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à la sécurité : d'une Armée « de garde »
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· 2005 : 276 attaques
· 2006 : 239 attaques
· 2007 : 263 attaques
· 42 incidents ont été reportés au
Nigéria dont 25 pour la seule zone de Lagos.
· 31 incidents ont été reportés en
Somalie.
· 2008 : 293 attaques. Figure
N°3 : Carte des principales zones à risques
de piraterie maritime

Source :
www.pirates-corsaires.com/une-question-me-taraude-depuis
-peu-le - monde-a-change-depuis -le-xiiieme-siecle-qr9.htm
Le nombre d'attaques pirates a triplé entre 1993 et
2003. Le premier semestre 2003 a été le pire semestre jamais
enregistré, avec 234 attaques pirates, 16 morts, 52 blessés et
193 membres d'équipage pris en otage dans le monde. 182 cas de piraterie
ont été recensés par le Centre de surveillance de la
piraterie du Bureau Maritime International (BMI) pour le premier
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semestre 2004, dont 50 à proximité de
l'Indonésie, la majorité dans le détroit de Malacca. Le
BMI note également qu'en 2004, les tankers (transport de pétrole
et de gaz) et les cargos transportant des matières premières sont
les cibles les plus populaires avec 67 attaques sur des tankers et 52 sur les
cargos.
La piraterie a toujours utilisé les moyens
technologiques les plus avancés disponibles : les pirates modernes ont
recours aux armes à feu évidemment (tel que les fameux AK-47),
à la téléphonie mobile, aux horsbords, etc. On suppose
même que certains pirates écoutent clandestinement les
communications des satellites, afin d'obtenir des informations sur le mouvement
des navires et de déterminer le risque qu'ils présentent en cas
d'attaque.
Une étude conduite par le Bureau Maritime
International montre que le nombre d'attaques de piraterie dans le monde est en
augmentation en 2007 (263 cas) en comparaison de l'année 2006 (239 cas).
Il est également rapporté que le nombre d'attaques à main
armée est en augmentation, avec pour première conséquence
une augmentation du nombre de blessés dans les équipages de
navire (64 blessés en 2007 pour 17 en 2006). Cette évolution en
2007 est directement liée à des actes ayant pris place en Somalie
et au Nigeria.
Certaines attaques ont conduit à l'intervention des
marines militaires luttant contre ce phénomène, comme ce combat
au large de la Somalie en 2006 et l'acte de piraterie contre le Ponant en 2008.
Lors de cette affaire, Jean-David Levitte, un diplomate français, a
déclaré que dans les dix dernières années, 3 200
marins avaient été enlevés par des pirates, 500
blessés et 160 tués. Le détroit de Malacca n'est plus
classé route maritime dangereuse par le Lloyd's Register depuis
fin 200623.
23
http://fr.wikipedia.org/wiki/piraterie_
modern/cite_note-4
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
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Les chiffres de l'année 2008 concernant la piraterie
sont les plus élevés depuis le début du recensement du
Bureau Maritime International en 1991 avec 293 attaques de navires, 49
capturés, 889 marins pris en otage, 11 tués, 21 disparus et
présumés morts24.Lorsqu'il a été
détourné par des pirates somaliens le 15 novembre 2008, le Sirius
Star est devenu le plus grand navire de l'histoire moderne capturé par
des pirates. Le 2 octobre 2009, le thonier espagnol "Alakrana" a
été attaqué par des pirates dans l'océan Indien.
Le nombre d'actes de piraterie maritime a atteint son plus
haut niveau il y'a six ans, en 2009, les attaques étant plus violentes,
notamment au large de la Somalie, d'après le Bureau Maritime
International (BMI) basé à Kuala Lumpur. 406 actes de piraterie
et de vols à main armée en mer ont été
recensés l'an dernier, soit un bond de 39 % par rapport aux 293 de 2008,
a indiqué le BMI dans son rapport annuel. Ce chiffre est toutefois
inférieur aux 445 actes enregistrés en 2003 (Bureau International
Maritime 2009 : 2-3).
3- LA CRIMINALITÉ
ORGANISÉE
L'Union Européenne (UE) définit l'organisation
criminelle comme étant : « l'association structurée, de
plus de deux personnes, établie dans le temps, et agissant de
façon concertée en vue de commettre des infractions punissables
d'une peine privative de liberté, ou d'une mesure de sûreté
privative de liberté d'un maximum d'au moins quatre ans, ou d'une peine
plus grave pour en tirer, directement ou indirectement, un avantage financier
ou un autre avantage matériel ». Les bandes organisées
en sont l'embryon, tandis que les mafias en constituent la forme la plus
aboutie.
A vocation transnationale, la criminalité
organisée couvre tout les grands trafics : drogue, être humains,
armes, véhicules volés. La corruption
24
http://fr.wikipedia.org/wiki/piraterie_
modern/cite_note-5
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et le blanchiment en sont les corollaires. Avec
l'accroissement de la mobilité des personnes, des biens et des capitaux,
cette criminalité a considérablement évolué et
s'appuie sur les nouvelles technologies non seulement à des fins de
blanchiment mais aussi, pour perfectionner ses activités et en
créer de nouvelles25.
La lutte contre la criminalité organisée est
l'un des défis majeurs de la communauté internationale. Elle
représente aujourd'hui avec le terrorisme la menace non militaire la
plus importante contre la sécurité intérieure et la
stabilité économique internationale. Par définition
difficile à chiffrer, le produit global de la criminalité
organisée serait de l'ordre de 1000 milliards d'euros annuels, soit plus
du tiers du Produit Intérieur Brute (PIB) national.
Dans un contexte où la criminalité ignore les
frontières étatiques et la souveraineté nationale, il est
indispensable d'avoir une approche globale de la lutte contre la
criminalité et de renforcer la coopération internationale, en
particulier entre les instances judiciaires et répressives. Aussi, la
France joue-t-elle un rôle actif au sein des enceintes
multilatérales traitant de ces questions, tout en veillant à
assurer la cohérence et l'efficacité de ces différents
forums (Ministère des Affaires Etrangères et Européennes
2009 : 1-2).
a- LE CRIME ORGANISÉ À TRAVERS LE
MONDE
Suivant leur origine, les organisations criminelles portent
différents
noms :
· Le Cartel (Colombie, Mexique)
· La Mafia : la Cosa Nostra, la Camorra, la 'Ndrangheta
(Italie)
· Le Milieu (France)
· L'Organizatsiya (Russie)
· Les Triades (Chine)
25 Cybercriminalité
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· Les Yakuzas (Japon)
La plupart de ces organisations peuvent opérer en
dehors de leur région d'origine. C'est ainsi que la mafia s'est
durablement installée aux États-Unis durant les années
1920 (Pino Arlacchi 1998 : 10).
b- L'ÉCONOMIE CRIMINELLE :
DES
ENTREPRISES PRESQUE COMME LES
AUTRES
Les organisations criminelles fonctionnent désormais
comme des entreprises tournées vers le profit. Il y a là une
nette évolution, puisque, jusqu'à la Seconde Guerre mondiale, la
mafia sicilienne privilégiait le contrôle de la
société et du territoire. Le parrain est désormais un
boss, ce qui va de pair avec une violence accrue (Pino Arlacchi 1998 :
12).
Qu'il s'agisse de trafic de stupéfiants, d'armes, de
fausse monnaie, d'êtres humains (enfants, immigration clandestine,
prostitution, etc.) ou d'espèces protégées, les
organisations criminelles tirent profit de l'illégalité
même de leurs trafics, qui leur permet d'organiser la rareté,
d'asseoir leur monopole par la violence ou d'autres moyens sur un marché
soustrait au droit, tout en laissant de simples sous-fifres assumer les
risques. La majorité des fraudes aux subventions de l'Union
européenne (estimée parfois à plus de 8 milliards d'euros
par an) est également le fait du crime organisé, comme le
détournement de l'aide au développement ou de l'aide humanitaire.
Dans le Mezzogiorno italien, les mafias ont décuplé
leurs profits dans les années 1970 grâce aux détournements
de subventions de l'État italien (Pino Arlacchi 1998 : 14).
c- L'INTERPRETATION DES DEUX
ECONOMIES
Les organisations criminelles ont suivi le mouvement de
mondialisation. Tout en tirant profit des frontières qui ralentissent
encore les enquêtes et protègent des poursuites, l'économie
criminelle prospère grâce à la
déréglementation et au relâchement des contrôles
(libéralisme ;
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absence du contrôle de l'État dans le tiers monde
et l'ex-Union soviétique). L'économie de régions et de
pays entiers se voit contrôlée par des organisations criminelles,
qui se sont substituées à l'État, ou l'ont
pénétré. Des organisations révolutionnaires
glissent de la guérilla à la criminalité organisée.
Les capitaux issus de l'économie illégale circulent sans entrave,
tandis que les banquiers s'abritent derrière le secret bancaire. Elles
mêlent sans difficulté les filières illicites à des
activités légales, en particulier les marchés financiers,
note Jean de Maillard (de Maillard 1998 : 42). Blanchiment et trafics ne
sauraient d'ailleurs se dérouler sans un minimum de complicité,
consciente ou non, de la part des acteurs de l'économie légale.
Il faut bien affréter les navires qui transportent les clandestins ou
encore les avions qui transportent la drogue entre la Colombie et le nord du
Mexique. Les Colombiens, rappelle Jean-François Boyer, ont ainsi
acheté à La Rochelle des dizaines de catamarans (Boyer 2001 :
52). L'industriel, écrit Maillard, l'avocat, le banquier, l'assureur, le
policier, le fonctionnaire qui mettent leur savoir, leur pratique ou leur
pouvoir au service des mafias sont des « criminels à temps
partiel ». C'est au travers de leur exercice professionnel qu'ils
basculent dans la délinquance, et non pas en s'en écartant. Le
chiffre d'affaires du crime rémunère toutes ces prestations
indispensables. Ainsi se développe une culture de corruption qui fait
vaciller toute une société (de Maillard 1998 : 44).
Les organisations criminelles ne se contentent pas de mettre
en oeuvre des activités de façade. Elles intègrent
activités illégales et légales. Comme au Japon, où
vingt-quatre mille affaires seraient sous contrôle yakuza, les membres
des organisations criminelles mettent leurs méthodes au service de leurs
activités légales : Pino Arlacchi explique qu'ils
découragent la concurrence par la violence, compriment les salaires.
Leurs ressources financières occultes leur confèrent
également un avantage décisif sur les concurrents. En Russie, 55
% du capital des entreprises privatisées
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appartiendraient aux membres d'une organisation criminelle (Pino
Arlacchi 1998 : 16).
d- ACTIVITÉ FINANCIERE
Contrairement à la criminalité individuelle ou
aux simples gangs, les réseaux criminels sécrètent une
forte accumulation de capitaux qui ne peuvent plus être absorbées
par la seule économie criminelle. Le blanchiment de l'argent ne sert
d'ailleurs pas tant à le réintégrer dans l'économie
légale qu'à le soustraire aux investigations. Isabelle Sommier
considère que cette nouvelle stratégie se dessine à la
charnière des années 1970 et 1980. Entre 1977 et 1998, ce sont
plus de mille huit cents milliards de dollars qui ont disparu des
comptabilités nationales. L'économie légale dépend
désormais de ces capitaux. Le système financier est en effet en
quête permanente de capitaux nomades : les narco-dollars ont en quelque
sorte pris la place des pétrodollars. Comme le montre le cas des paradis
fiscaux et des zones franches des pays industrialisés, la question
criminelle et la question financière sont désormais
indiscernables (Sommier 1998 : 7). Maillard pointe le cas du Japon. En refusant
toute perte financière et en bloquant le recouvrement des
créances, les yakuzas ont conduit à leur chute la grande maison
de titres Nomura et la banque Dai Ichi (de Maillard 1998 : 48).
Il est difficile d'estimer le chiffre d'affaires d'une
activité criminelle, et donc occulte, ou encore le produit criminel brut
mondial. Le Fond Monétaire International (FMI) propose pour estimer le
chiffre d'affaires annuel des activités criminelles dans le monde une
fourchette de 700 à 1.000 milliards de dollars, soit trois fois le
budget de la France en 1996. Maillard estime le seul chiffre d'affaires de la
drogue à 400 milliards de dollars, dont 180 servent à
rémunérer les trafiquants et les professionnels de la
sphère légale. Restent 220 milliards qui représentent le
profit net des organisations criminelles. L'estimation est plus difficile en ce
qui concerne
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les autres activités criminelles. Il estime
néanmoins que 320 milliards de dollars de profits constitue un chiffre
minimum, auquel il faut encore ajouter 160 milliards encaissés par les
complices de la société légale. En outre, les revenus du
crime organisé provenant de la sphère légale ne font
qu'augmenter. Pino Arlacchi estime à 1 milliard de dollars par jour le
montant des profits criminels injectés dans les marchés
financiers du monde entier (Pino Arlacchi 1998 : 18).
e- LES PRIORITÉS COMMUNES DU CRIME
ORGANISÉ
Omniprésentes et omnipotentes, les entreprises criminelles
écument tous les coins du monde, l'Asie, l'Amérique, l'Europe,
l'Afrique.
1- CRIME ORGANISÉ ASIATIQUE
Les groupes du Crime Organisé Asiatique (COA), aussi
appelés entreprises criminelles asiatiques, sont des organisations
fluides, polyvalentes et diverses. Ils se distinguent par un niveau
élevé d'entrepreneurship criminel. Ils recourent
à la fois à des relations interpersonnelles et à des
compétences spécifiques en affaires et en technologie pour
maximiser leurs profits. Le COA comprend des groupes chinois comme les triades;
des affiliations criminelles peu structurées, des organisations de
passage de migrants; des gangs de rue vietnamiens, des groupes coréens
et enfin, mais à un moindre degré, la mafia japonaise,
baptisée Boryokudan ou Yakuza (Federal Bureau Investigation et la
Gendarmerie Royale du Canada 2006 : 5-6).
Le profil criminel du COA inclut des activités qui vont
d'activités nécessitant un faible niveau de compétences,
comme les rackets d'extorsion et de protection, à des activités
sophistiquées de fraude par carte de crédit, de
contrefaçon et de vol d'articles de haute technologie, comme des puces
d'ordinateur, en passant par des activités qui requièrent un
certain niveau de
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planification comme des invasions de domicile. Le trafic des
drogues continue d'être une importante source de revenu pour le COA. Au
Canada, les groupes criminels de souche chinoise importent d'Asie des produits
chimiques en vue de la production de MDMA (ecstasy), dont une bonne proportion
est passée en contrebande aux États-Unis (Federal Bureau
Investigation et la Gendarmerie Royale du Canada 2006 : 5-6).
Au Canada, les groupes criminels de souche asiatique sont
actifs dans les centres qui comptent traditionnellement une population
asiatique, en Colombie-Britannique, en Alberta, en Ontario et au Québec.
On dispose aussi de preuves indiquant que ces groupes ont des activités
de passage de migrants clandestins et de trafic des drogues dans des centres
moins peuplés, notamment dans la région de l'Atlantique,
essentiellement rurale. Aux États-Unis, le COA est actif à la
grandeur du pays, depuis les grandes zones métropolitaines et leurs
banlieux jusque dans les collectivités rurales isolées (Federal
Bureau Investigation et la Gendarmerie Royale du Canada 2006 : 6).
Les infrastructures criminelles chinoises facilitent le
passage d'un grand nombre de migrants chinois clandestins en Amérique du
Nord. Les groupes criminels basés dans la République populaire de
Chine (RPC) orchestrent, en concertation souvent, des opérations
massives de passage de migrants illégaux chinois. On croit que ces
réseaux criminels mondiaux sont responsables d'un éventail
d'infractions criminelles auxiliaires telles que les fraudes touchant les visas
pour appuyer leur activité lucrative principale (Federal Bureau
Investigation et la Gendarmerie Royale du Canada 2006 : 6).
En plus du passage de migrants clandestins, bon nombre
d'entreprises criminelles asiatiques s'adonnent au trafic de personnes. Les
personnes qu'elles font entrer ainsi au Canada et aux États-Unis sont
contraintes de signer des contrats qui les réduisent à la
servitude pour rembourser l'organisation de passage. Aux États-Unis, les
migrants en
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arrivent souvent à vivre dans un état de quasi
esclavage dans des bordels, des ateliers clandestins ou des restaurants. En
perspective :
· Le milieu criminel asiatique est dominé par les
triades et l'étendue des relations internationales de ces
dernières années les place en bonne position pour devenir une
formidable menace de criminalité organisée au Canada et aux
États-Unis.
· Les organisations fluides et non hiérarchiques du
COA «non traditionnel » deviendront de plus en plus
répandues.
· Les groupes de criminels de souche asiatique vont
continuer de représenter une menace à l'intégrité
de la frontière, en ce qui concerne plus particulièrement le
passage de clandestins et le trafic des drogues (Federal Bureau Investigation
et la Gendarmerie Royale du Canada 2006 : 7).
2- CRIME ORGANISÉ EURASIEN/EST-EUROPEEN
(COE/EE)
Les groupes criminels de souche eurasienne et
Est-européenne sont arrivés sur ce continent déjà
complètement constitués. La majorité des groupes
clés entretiennent des liens inextricables avec les organisations
mères en Russie. Bon nombre d'observateurs occidentaux
considèrent que le COE/EE a une organisation verticale
intégrée, analogue à celle des groupes de type mafieux
traditionnels. Des preuves de plus en plus nombreuses donnent à penser,
toutefois, qu'une structure plus fluide, de type cellulaire est la norme. Les
membres de différentes cellules de COE/EE peuvent s'unir de façon
informelle pour mener à bien une activité criminelle
opportuniste.
Les anciens membres ou les associés des groupes russes
semblent reconnaître et accepter l'hégémonie d'une
avtorityet (autorité criminelle) unique, qui joue un rôle
important dans la résolution des conflits, la prise de décisions
et l'administration des fonds criminels. Une autre figure importante du milieu
criminel russe est le krisha, un « toit », un parrain
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dont l'autorité et l'influence sont gages de
protection et de stabilité. Au Canada, les réseaux de COE/EE
tendent à s'articuler autour de personnes clés (qui ne sont pas
nécessairement une avtorityety au sens premier du mot) qui
agissent en qualité de consultants criminels offrant des conseils, des
relations et des « capitaux de démarrage » en échange
d'une part des profits ultimes (Federal Bureau Investigation et la Gendarmerie
Royale du Canada 2006 : 7-8).
Le foyer traditionnel des activités du COE/EE au
Canada est la région de Toronto. Ces groupes sont aussi présents
à Vancouver et dans d'autres centres urbains. L'activité
criminelle n'est pas le seul fait d'entités russes, mais aussi de
criminels appartenant à diverses souches ethniques d'Europe de l'Est et
d'Europe centrale. Le COE/EE est l'une de plusieurs entités criminelles
attirées par le commerce du diamant dans le Nord canadien. Cette
constatation est importante du fait que le Canada compte parmi les quatre plus
grands producteurs de diamants bruts au monde et qu'il est appelé
à devenir le premier producteur mondial d'ici deux ou trois
décennies.
Aux États-Unis, la ville de New York demeure un
important centre d'activité pour les groupes criminels eurasiens et
est-européens. De plus, des activités criminelles
attribuées à ces groupes ont été signalées
dans les grandes régions métropolitaines où l'on retrouve
une forte concentration de personnes d'origine eurasienne et
est-européenne. Aux États-Unis, les activités portant la
signature du COE/EE vont du blanchiment d'argent au trafic des drogues en
passant par divers types de fraudes. En plus des organisations russes, les
intérêts de souche eurasienne et est-européenne en
activité aux États-Unis incluent des groupes polonais, roumains
et arméniens. En perspective :
· Les organisations russes vont continuer de
dominer, mais l'analyse indique que des formes émergeantes de COE/EE de
la part de groupes des nations d'Europe centrale et d'Europe de l'Est de
l'ancien Bloc soviétique
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notamment des groupes lithuaniens, latviens, polonais,
roumains, arméniens, roma (tsiganes) vont poser un défi aux
autorités d'application de la loi tant au Canada qu'aux
États-Unis.
· Les groupes criminels eurasiens et
Est-européens vont continuer de nouer des alliances de partenariats
transethniques limitées pour maximiser leurs capacités
stratégiques (Federal Bureau Investigation et la Gendarmerie Royale du
Canada 2006 : 8).
3- CRIME ORGANISÉ ITALIEN/LA COSA
NOSTRA
Les organismes canadiens et américains d'application
de la loi recourent à des termes différents pour décrire
le crime organisé de souche italienne. Les groupes criminels italiens
basés aux États-Unis sont désignés par
l'appellation La Cosa Nostra (LCN). Par contre, les groupes criminels
basés en Italie qui ont des activités criminelles aux
États-Unis sont désignés par le terme « Crime
Organisé Italien » (COI). Les groupes de LCN sont les plus
répandus dans les deux catégories de groupes criminels de souche
italienne aux États-Unis. Au Canada, les autorités d'application
de la loi utilisent l'expression « crime organisé traditionnel
» ou « crime organisé italien » pour désigner tous
les groupes criminels de souche italienne.
Au Canada, les principaux regroupements criminels italiens
sont la mafia sicilienne et la Ndrangheta, ou mafia calabraise. La mafia
sicilienne est la plus influente, et elle entretient des liens avec d'autres
groupes siciliens partout au Canada et aux États-Unis, en Italie et au
Vénézuéla. Dans de nombreuses parties du Canada, la mafia
sicilienne exerce une influence puissante sur la Ndrangheta (Federal Bureau
Investigation et la Gendarmerie Royale du Canada 2006 : 8).
Le crime organisé italien ou La Cosa Nostra (COI/LCN)
est la forme la plus achevée du crime organisé tant au Canada
qu'aux États-Unis. Sa capacité de coopter d'autres groupes
criminels et de nouer des alliances
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avec eux lui confère une influence mondiale. La
génération émergeante de leaders du COI/LCN a accès
à d'énormes ressources financières. Aux ÉtatsUnis,
les cérémonies d'initiation de LCN établissent des
distinctions claires entre les membres officiels (ou « établis
») et les associés. Au Canada, des distinctions sont faites entre
les « dirigeants », les « membres » et les «
associés » et aucune donnée ne confirme l'existence de
rituels initiatiques semblables à ceux de LCN. Dans les deux pays, le
COI/LCN se distingue par sa structure stricte, intégrée à
la verticale et hiérarchique. La discipline et l'efficience qui en
résultent lui permettent de faire converger les ressources et de
maximiser les profits. Cette structure est en contraste absolu avec d'autres
types de crime organisé, notamment le crime organisé asiatique et
eurasien/est-européen, qui tendent à fonctionner de façon
plus opportuniste et à rechercher davantage le profit immédiat
plutôt que de travailler au développement à long terme de
leur organisation en tant qu'entreprise criminelle. En perspective :
· Bien que le trafic des drogues continue d'être
la principale source de revenu des groupes du COI/LCN, ces groupes vont
continuer de diversifier leurs opérations lucratives.
· La génération émergeante de
membres du COI/LCN fera de plus en plus appel à la technologie pour
sécuriser ses communications et maximiser ses profits (Federal Bureau
Investigation et la Gendarmerie Royale du Canada 2006 : 9).
4- ENTREPRISES CRIMINELLES DU MOYENS-ORIENT ET
D'ASIE DU SUD-OUEST
Les entreprises criminelles du Moyen-Orient et d'Asie du
Sud-Ouest sont typiquement fondées sur des liens familiaux et
constitués en réseaux de vol ou de fraude financière plus
ou moins organisés. Depuis les années
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1970, ils mènent leurs activités dans les secteurs
où la population originaire du Moyen-Orient et d'Asie du Sud-Ouest est
particulièrement importante.
Les groupes criminels du Moyen-Orient et d'Asie du Sud-Ouest
recourent de plus en plus à de petites entreprises légitimes
privilégiant les transactions en argent comptant pour faciliter leurs
activités. Ces entreprises légitimes peuvent être
utilisées pour déposer à la fois les produits
d'activités licites et illicites et ainsi faciliter le blanchiment
d'argent et d'autres activités illégales (Federal Bureau
Investigation et la Gendarmerie Royale du Canada 2006 : 17-18).
5- ENTRPRISES CRIMINELLES AFRICAINES
Les entreprises criminelles africaines sont impliquées
dans le blanchiment d'argent, les manoeuvres financières touchant
notamment les assurances et la facturation médicale, la fraude par
chèque ou carte de crédit, la fraude par paiement anticipé
de frais pour des loteries, et l'hameçonnage (demandes de renseignements
personnels par courriel).
En 2005, dans le cadre d'une initiative sur les fraudes en
marketing de masse menée conjointement par le FBI, on a examiné
les instruments monétaires contrefaits saisis par les autorités
néerlandaises entre avril 2003 et février 2005. Les
chèques en question devaient être envoyés à des
consommateurs partout dans le monde dans le cadre d'une fraude par paiement
anticipé de frais (frais à payer pour avoir droit à des
soi-disant gains de loterie ou à des marges de crédit)
menée par une entreprise criminelle africaine.
Outre la fraude, les entreprises criminelles africaines sont
impliquées dans le trafic de stupéfiants, la traite de personnes,
la prostitution, le passage clandestin de migrants et les enlèvements
(Federal Bureau Investigation et la Gendarmerie Royale du Canada 2006 : 10).
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6- ENTRPRISES CRIMINELLES DES
BALKANS
Les groupes criminels albanais sont impliqués dans la
contrefaçon de monnaie canadienne et américaine et dans des
manoeuvres frauduleuses touchant les documents de l'immigration. Certains
indices laissent croire qu'ils se sont lancés dans des activités
criminelles à caractère économique comme la fraude
touchant les valeurs mobilières et les services médicaux. Ces
groupes sont également impliqués dans diverses activités
criminelles transfrontalières, dont la contrebande de marijuana et
peut-être d'autres drogues, le passage clandestin de migrants et le
blanchiment d'argent (Federal Bureau Investigation et la Gendarmerie Royale du
Canada 2006 : 10).
i) PRODUCTION ET TRAFIC DE DROGUES
ILLICITES
Il s'agit de la drogue colombienne, de la marijuana et de la
méthamphétamine.
1- COMMERCE DE LA DROGUE COLOMBIENNE
Les courtiers colombiens constituent un maillon de la
chaîne liée au trafic de cocaïne en Amérique du Nord,
formée d'éléments très diversifiés. Ils
servent d'intermédiaires entre les producteurs colombiens et les
organisations trafiquantes canadiennes et américaines. Au Canada, ils
vendent les cargaisons à d'autres groupes criminels, dont les motards
criminalisés et les criminels de souche italienne. Aux États
Unis, les organisations trafiquantes mexicaines et les motards
criminalisés font partie des groupes impliqués dans la
distribution de cocaïne au pays.
Les États-Unis forment un point de transit important
pour les cargaisons de cocaïne produite en Amérique du Sud
destinée au marché canadien. La quantité de cocaïne
saisie à la frontière terrestre de la Colombie-Britannique en
provenance des États-Unis a pratiquement doublé
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
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en 2004 (Federal Bureau Investigation et la Gendarmerie Royale du
Canada 2006 : 11).
2- LA MARIJUANA
Bien des groupes criminels au Canada sont impliqués,
d'une façon ou d'une autre, dans le commerce de la marijuana. Certains
trafiquants ne font que vendre de la marijuana tandis que d'autres font le
trafic de substances variées. Ceux qui se spécialisent dans la
marijuana contrôlent souvent des aspects précis du commerce de
cette drogue comme le courtage, l'expédition et le blanchiment
d'argent.
Le problème des installations de culture de marijuana
et du trafic de cette drogue s'amplifie partout dans le monde. Il touche
particulièrement la Colombie-Britannique, l'Ontario et le Québec,
mais certaines saisies importantes récentes dans les régions
rurales des provinces maritimes indiquent que le problème est loin
d'être un phénomène local.
L'exportation de marijuana canadienne vers les
États-Unis continue de poser un grave problème aux services de
répression des deux côtés de la frontière. Le
Mexique demeure toutefois la principale source de marijuana provenant de
l'étranger destiné au marché intérieur
américain. Pendant que les producteurs locaux de marijuana
approvisionnent les consommateurs canadiens, les trafiquants du pays importent
aussi de la marijuana de la Colombie, de la Jamaïque, du Mexique et
d'autres pays producteurs (Federal Bureau Investigation et la Gendarmerie
Royale du Canada 2006 : 11).
3- LA METHAMPHETAMINE
Sans doute le changement récent le plus marquant dans
l'activité liée aux drogues synthétiques illicites a
été l'augmentation continuelle de l'offre et du trafic de
méthamphétamine. Le gros de la méthamphétamine
offerte au Canada provient de laboratoires clandestins domestiques. Ces
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installations de fabrication relèvent le plus souvent
d'entrepreneurs et d'utilisateurs indépendants, mais aussi de plus en
plus des réseaux du crime organisé de souche asiatique et des
motards criminalisés. Bien souvent, ces groupes gèrent des «
super laboratoires » capables de produire plus de cinq kilogrammes de
méthamphétamine ou d'ecstasy par cycle de production (Federal
Bureau Investigation et la Gendarmerie Royale du Canada 2006 : 12).
j) LA CRIMINALITÉ FINANCIERE
Elle est réalisée via le vol d'identité,
le blanchiment d'argent, le trafic du diamant, le payement électronique,
l'échange de pesos sur le marché noir, le casino, la fraude par
télémarketing et les gangs.
1- LE VOL D'IDENTITÉ
Des entreprises criminelles et des réseaux criminels
plus ou moins organisés commettent des vols d'identité au Canada
et aux USA. Ces groupes pourraient utiliser les produits tirés du vol,
de la vente ou de la manipulation de renseignements de nature délicate
pour financer d'autres visées criminelles et acquérir ainsi une
capacité de nuire considérablement aux gouvernements, aux
citoyens, aux entreprises et aux intérêts du Canada et des USA. Ce
qui est particulièrement préoccupant, c'est que les nouvelles
technologies et Internet fournissent aux voleurs d'identité des moyens
inventifs d'acquérir de vastes quantités de données
personnelles avec un effort minime. L'escroquerie par « hameçonnage
» s'avère l'une des formes de vol d'identité les plus
significatives et lucratives auprès des utilisateurs d'Internet. Bien
souvent, les « hameçonneurs » utilisent des techniques de
« pollupostage » qui permettent aux criminels de rejoindre des
millions de victimes potentielles (Federal Bureau Investigation et la
Gendarmerie Royale du Canada 2006 : 13).
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2- LE BLANCHIMENT D'ARGENT
Le blanchiment de grosses sommes d'argent est requis pour
pratiquement toutes les activités criminelles hormis les crimes de
violence. Plusieurs formes de blanchiment d'argent traditionnelles sont encore
d'usage courant, notamment l'exploitation des systèmes bancaires au
moyen de télévirements, de comptes ouverts dans des banques
étrangères et de sociétés fictives. Les techniques
employées comprennent la contrebande d'espèces, la fraude
bancaire, l'utilisation d'entreprises de transfert de fonds comme les cambistes
et les services de télévirement, les transferts
électroniques de fonds et la mixité des fonds licites et
illicites (Federal Bureau Investigation et la Gendarmerie Royale du Canada 2006
: 13).
3- L'INDUSTRIE DU DIAMANT
Plusieurs problèmes potentiels liés aux
activités criminelles sont rattachés à l'industrie
canadienne du diamant, qui est en pleine croissance. Des problèmes comme
le vol et la fraude demeurent une source de préoccupation. Les
autorités canadiennes sont également conscientes de l'utilisation
possible des diamants comme forme de blanchiment d'argent ou de dissimulation
du produit de la criminalité. Comme les diamants prennent peu de place
et ont une grande valeur, on peut les transporter facilement et efficacement
d'un pays à l'autre (Federal Bureau Investigation et la Gendarmerie
Royale du Canada 2006 : 14).
4- LE SYSTEME DE PAYEMENT
ÉLECTRONIQUE
Les systèmes de paiement électronique rendent
possible le transfert de fonds à des comptes partout dans le monde sans
passer par le système bancaire international. Ces systèmes
permettent en outre aux clients de transférer des fonds au moyen
d'Internet sans égard au type de devises, sans déclaration et
sans restrictions réglementaires. Cet argent virtuel constitue
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la forme de blanchiment d'argent idéale. À
l'étape de la multiplication des niveaux (lorsque les fonds sont
séparés et transférés pour masquer leur origine),
les fonds peuvent être envoyés à différents endroits
partout dans le monde. À l'étape du placement, un système
de paiement électronique peut être utilisé comme moyen de
« recevoir » des fonds dans un compte en particulier.
Les cartes à valeur stockée (cartes-cadeaux ou
cartes de débit prépayées) sont délivrées
par les banques, les sociétés de fiducie et les autres
institutions financières et sont de plus en plus acceptées comme
forme de paiement ayant cours légal au Canada et aux États-Unis.
Bien souvent, les cartes à valeur stockée peuvent être
transférées de personne à personne comme cadeaux puis
« remplies » de nouveau. Ces cartes peuvent contenir des sommes
importantes d'argent virtuel et constituent un moyen pratique de faire passer
illégalement de l'argent d'un pays à un autre (Federal Bureau
Investigation et la Gendarmerie Royale du Canada 2006 : 14-15).
5- L'ÉCHANGE DE PESOS SUR LE MARCHÉ
NOIR
L'échange de pesos sur le marché noir, qui se
fait surtout en Amérique centrale et du Sud et au Mexique, est une forme
de blanchiment d'argent qui se sert du commerce international pour recycler les
produits de la vente de narcotiques. Le but visé est de rapatrier les
produits illicites de la criminalité en échappant aux mesures de
contrôle des changes. Les organisations criminelles peuvent ainsi
recycler les produits de la criminalité entre l'Amérique du Nord
et du Sud sans laisser de trace ou attirer l'attention sur elles (Federal
Bureau Investigation et la Gendarmerie Royale du Canada 2006 : 15).
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6- LE CASINO
Aux États-Unis, les casinos représentent un
moyen de blanchir l'argent du crime organisé depuis les années
1960. Au Canada, les casinos existent depuis la fin des années 1980 et
se trouvent dans un certain nombre de villes d'un océan à
l'autre. La plupart des casinos du Canada et des USA offrent des services
financiers comme l'ouverture de comptes (similaires aux comptes
d'épargne d'une banque), des bureaux de change et des transferts
électroniques de fonds. Tant les casinos canadiens qu'américains
envoient des fonds de l'autre côté de la frontière.
L'argent des casinos est difficile à retracer, car il s'échange
en grande partie sous forme de jetons et de cartes à valeur
stockée. Les casinos virtuels se multiplient. Leurs activités
sont légales dans bon nombre de pays, mais pas au Canada et aux
États-Unis. Les serveurs de ces casinos se trouvent donc à
l'étranger, ce qui rend difficile de les régir en vertu de la
législation fédérale et provinciale ou celle des
États. Cette réalité ouvre la porte à un certain
nombre d'activités reliées au blanchiment d'argent (Federal
Bureau Investigation et la Gendarmerie Royale du Canada 2006 :15).
7- LA FRAUDE PAR
TÉLÉMARKETING
La fraude par télémarketing, le plus souvent des
manoeuvres frauduleuses touchant les cartes de crédit, les prêts
et les investissements, continue de prendre les citoyens canadiens et
américains pour cible. Les pertes annuelles associées à ce
type de fraude seraient de l'ordre de près de un milliard de dollars aux
USA et de plus de 16 millions de dollars canadiens au pays. Cependant, les
analystes de la GRC estiment que seulement 5% des victimes se plaignent aux
autorités, ce qui veut dire que les pertes réelles se
rapprocheraient davantage de 295 millions de dollars canadiens par an (Federal
Bureau Investigation et la Gendarmerie Royale du Canada 2006 : 16).
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8- LES GANGS
Les activités criminelles des gangs continuent de poser
un grave problème aux services de répression des deux
côtés de la frontière. Malgré le peu de liens
concrets entre les gangs canadiens et américains, les autorités
des deux pays constatent des changements et une évolution touchant
certains aspects de leur situation en tant que gangs. Le fait que cette
évolution semble se produire simultanément laisse entendre que
les activités criminelles des gangs, souvent qualifiées de «
crimes mineurs », sont en voie de se transformer en entreprise criminelle
beaucoup plus sérieuse. Des gangs de rue existent dans la plupart des
grands centres urbains canadiens. Certains sont calqués sciemment sur
des modèles américains comme les Crips et les Bloods, tandis que
d'autres, comme les Jamaïcain Posse et les gangs vietnamiens, sont
structurés en fonction de traits ethniques ou nationaux. Cependant,
selon les corps policiers canadiens, c'est dans les provinces des Prairies
(Manitoba, Saskatchewan et Alberta) que les gangs de rue représentent la
plus grande menace, où des gangs formés d'Autochtones comme les
Indian Posse, les Native Syndicate et les Saskatchewan Warriors mènent
leurs activités criminelles dans des villes comme Winnipeg, Saskatoon et
Regina. Les gangs font non seulement miroiter l'accès au pouvoir et au
profit, mais offrent aussi la possibilité de faire partie d'une famille.
C'est un menu très alléchant pour les adolescents les plus
à risque d'être entraînés dans le crime. Aux
ÉtatsUnis, plusieurs gangs de jeunes violents, dont le Mara Salvatrucha
ou MS-13, basé au Salvador, et le 18th Street Gang ou M-18, sont en
pleine expansion à l'échelle de l'hémisphère. Bon
nombre des principaux membres de ces gangs internationaux sont d'anciens
résidents des ÉtatsUnis qui ont été
déportés dans leur pays d'origine en Amérique centrale
après avoir purgé une peine aux États-Unis pour des
délits graves. Ces « méga-gangs » se sont
établis au Salvador, au Guatemala et au Honduras,
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où ils se sont emparés d'une partie importante
du commerce local de cocaïne et de crack. Ils se battent contre les
autorités pour le contrôle de territoires criminels dans
différentes villes et localités partout en Amérique
centrale. Les rivalités entre gangs causent la mort et le
déplacement de personnes innocentes tous les jours. À l'instar
des groupes autochtones au Canada, ces gangs deviennent souvent une famille
d'adoption pour des jeunes dépossédés de leurs droits par
la pauvreté. Ce qui fait la force de ces gangs, c'est leur
capacité grandissante à rediriger leurs activités
criminelles aux États-Unis. Des « coyotes » liés
à ces gangs exigent des sommes exorbitantes pour assurer le passage
clandestin aux États-Unis de migrants de l'Amérique centrale.
D'autres gangs ont établi des relations liées au passage
clandestin et au trafic de drogues avec des organisations de trafiquants de
drogues mexicains.
L'expérience acquise en Amérique centrale a
transformé ces gangs en entités qui sont devenues beaucoup plus
dangereuses qu'elles ne l'étaient aux États Unis. Leur influence
grandit au même rythme que leur degré de perfectionnement. Ils
n'hésitent pas à se servir d'armes puissantes. Ils ne se sont pas
encore constitués en véritables entreprises criminelles, mais
s'adonnent tout de même au trafic de drogues et de documents volés
et commettent des vols à main Armée et des vols d'autos (Federal
Bureau Investigation et la Gendarmerie Royale du Canada 2006 : 16-17).
k) TRAITE DE PERSONNES ET PASSAGE CLANDESTIN DE
MIGRANTS
D'après les Nations Unies, la traite de personnes et le
passage clandestin de migrants sont les activités criminelles
internationales qui connaissent le plus d'essor. À l'échelle
mondiale, ces activités constituent la troisième source de revenu
en importance pour le crime organisé après le trafic de drogues
et d'armes à feu. Les Nations Unies estiment que les victimes de la
traite de personnes impliquées dans le commerce du sexe
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génèrent à elles seules environ cinq
milliards de dollars de revenu par an. Le passage clandestin de migrants permet
à des personnes de franchir illégalement la frontière
entre deux pays. En général, cela se fait avec le consentement de
la personne faisant l'objet d'un tel passage, qui paie souvent une forte somme
à cette fin à des passeurs professionnels. La somme varie selon
la distance parcourue. La relation entre le passeur et le clandestin prend
généralement fin une fois à destination.
La traite de personnes est un crime où des gens sont
utilisés comme une marchandise. Cette forme d'esclavage s'accompagne de
servitude forcée, d'enlèvements, d'extorsion et de crimes
violents. Les victimes de la traite de personnes se retrouvent dans des
ateliers clandestins, dans des maisons comme travailleurs domestiques, dans des
restaurants, dans des fermes comme travailleurs agricoles, dans le milieu de la
prostitution et dans le commerce du sexe. Certains ne se rendent pas compte
qu'ils sont des victimes ou sont obligés de protéger ceux qui les
exploitent. Les femmes et les enfants sont particulièrement
exposés à cette forme d'activité criminelle (Federal
Bureau Investigation et la Gendarmerie Royale du Canada 2006 : 17).
4- CRIMINALITÉ ORGANISÉE AU
CAMEROUN
Au cours de la dernière décennie, le Cameroun,
s'inscrivant en cela dans une dynamique sociétale globale, a connu une
profonde transformation de sa scène criminelle ayant conduit à
l'émergence de nouvelles formes d'expression de
l'insécurité. Deux tendances lourdes ont notamment marqué
cette transformation : la démultiplication des centres d'exercice de la
violence organisée et la professionnalisation progressive du
métier de criminel. Plus précisément, l'heure est à
l'émancipation extra-étatique des groupes d'acteurs sociaux
vivant par et pour le crime ; à l'inscription de l'assistanat, du vol,
du viol, du hold-up dans les répertoires de constitution des patrimoines
privés et d'ascension sociale. Aussi la criminalité et
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l'insécurité qui en est le corollaire se vit aussi
bien plus dans la sphère publique que dans l'espace
domestique/privée (Chouala 2007 : 2)
a- LES FIGURES DOMINANTES DE LA CRIMINALITÉ
ORGANISÉE AU CAMEROUN
Dans le contexte socio-politique camerounais, la
criminalité relève du phénomène global de la
privatisation de la violence organisée. Elle traduit en outre
l'émergence sociale de « nouvelles arènes » du pouvoir
qui s'approprient les instruments d'exercice de la coercition et des
prélèvements des individus autrefois entre les seules mains de
l'Etat. La criminalité prend au Cameroun une pluralité de
formes.
1- LES GANGS (URBAINS)
Les gangs, entendus dans le sens péjoratif
d'associations de malfaiteurs, d'organisations criminelles structurées
chacune autour d'un « patron » et fonctionnant sur la base d'une
division sociale des tâches à l'intérieur, sont les
principaux vecteurs du grand banditisme et de la grande criminalité
urbaine au Cameroun. Il s'agit d'associations de malfrats qui se dotent de
moyens propres d'administration de la violence et qui disposent de
répertoires propres de sanctions des « faux types », la
liquidation physique notamment. La prolifération de gangs est la forme
dominante de la dynamique de la criminalité organisée dans la
société camerounaise. Des rapineries par lesquels lesquelles elle
s'exprimait naguère, le grand banditisme s'est très vite
transformé pour prendre la forme de cartels et/ou de réseaux
solidement structurés sous le modèle de ce que A et H. Toffler
appelle l'« empire du souterrain » (Chouala 2007 : 3). Les gangs
possèdent chacun une Armée, des agences de renseignements, des
relais sociaux et bureaucratico-politiques qui rivalisent parfois les services
d'intelligence étatique. On comprend pourquoi ils attaquent les
édifices publics ainsi que les symboles de la sécurité
étatique : Délégation générale à la
sûreté
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nationale, Ministère de la Défense, de l'Education
nationale, des Finances, de la Culture, de la Communication etc.
2- LES RESEAUX CRIMINELS
TRANSNATIONAUX
Les réseaux criminels désignent les acteurs
malfrats qui coalisent leurs actions et mettent en commun leurs ressources dans
la visée de la défense, de la stabilisation et de la maximisation
de leurs intérêts et profits. A l'instar des gangs urbains, les
réseaux criminels transnationaux se déclinent sous la figure de
« prédateurs collectifs ». Les réseaux de la
criminalité transnationale sont principalement formés au Cameroun
par les « coupeurs de routes » ou « zarguinas ». Les «
coupeurs de routes » désignent dans la terminologie
sécuritaire camerounaise, tchadienne et centrafricaine, des groupes de
bandits armés opérant à la lisière des territoires
frontaliers et spécialisés dans l'attaque des véhicules de
transport public ou privé, des villages, des troupeaux. Leurs cibles
intègrent également les hommes d'affaires, les postes de douane,
de police, et de gendarmerie. Les « coupeurs de routes »
procèdent en quelque sorte à une unification criminelle des
territoires camerounais. Aux bords du Lac Tchad, trois types peuvent
identifiés : les bandes issues d'un village ou de ressortissants d'une
même ethnie ; les bandes hétérogènes faisant
intervenir camerounais, tchadiens, nigérians, nigériens et
centrafricains notamment ; les bandes issues des factions politico-militaires
tchadiennes installées dans la zone du Lac Tchad (Diguio Hassana 2006 :
34). D'après Saibo Issa, il y aurait actuellement plus de professionnels
que d'amateurs dans les manifestations du phénomène de prises
d'otages et de criminalités transfrontalières.
Ces groupes de rebelles ont plusieurs techniques d'attaque :
l'embuscade et le coup de main en bandes importantes sur une route
fréquentée ; le raid sur des campements isolés par des
hommes montés à cheval ou sur des pirogues, la ruse ou la
surprise pour l'attaque des
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troupeaux (Saibou Issa 2000 : 112). Il s'agit d'un
réseau d'action impliquant la participation de plusieurs subversifs
ayant à leur tête certains chefs traditionnels soucieux de
reprendre, voire d'étendre leur pouvoir (Bennafla 2002 : 326). Ce
phénomène de coupeurs de route remet en cause la
souveraineté de l'Etat et la stabilité de la
société (Diguio Hassana 2006 : 42-57).
La porosité des frontières et son
instrumentalisation par les menaces asymétriques contribuent à la
remise en cause de la violence physique légitime de l'Etat qu'il partage
désormais avec les coupeurs de route. La stabilité de la
société camerounaise est également remise en cause par
cette criminalité à dynamique transnationale mettant en
péril la sécurité des personnes26 et des
biens27 et de l'économie. Et si le phénomène de
terrorisme est considéré comme une remise en cause de
l'autorité de l'Etat (Crenshaw 2003 : 93), la nébuleuse que
constitue le phénomène des coupeurs de route n'est rien d'autre
qu'une forme de terrorisme que vit le Cameroun, bien qu'il soit
appréhendé par le gouvernement de Yaoundé comme le grand
banditisme.
3- LA VIOLENCE PRIVÉE
INDIRECTE
S'inspirant d'Achille Mbembe décrivant un
phénomène relativement proche, la violence privée
indirecte pourrait renvoyer au détournement des moyens légitimes
de violence ou des instruments et des moyens de la coercition étatique
à des fins privées. C'est en quelque sorte, la privatisation de
la violence légitime d'Etat ou plutôt la transformation des
positions officielles, des moyens et instruments officiels d'administration de
la
26 Ces coupeurs de routes constituent un danger
pour les droits et libertés fondamentaux reconnus aux être humains
à savoir le droit à la vie et à la liberté d'aller
et venir. L'exemple de l'enlèvement de 16 personnes dans la province de
l'Est et 10 qui seront exécutés à cause du retard de
versement de la rançon s'élevant à des millions de francs
Cfa.
27 Des centaines de millions emportés ; des
milliers de têtes de bétail enlevés
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violence en rentes d'accumulation privée. La violence
privée indirecte est, au Cameroun, le fait de « certains
éléments véreux des Forces de l'ordre » qui
s'associent, lorsqu'ils ne les patronnent pas, les groupes de malfrats. Nombre
de policiers, gendarmes, militaires aussi bien de rang que gradés
patronnent et couvrent des gangs qui, par la médiation de ce patronage
et de cette couverture, s'alimentent à bon compte dans les
poudrières d'Etat (Chouala 2007 : 5).
4- LES ACTIVITÉS
NATIONALITAIRES
La montée en signification des groupes nationalitaires
sur la scène de l'insécurité nationale a été
considérable ces derniers temps. Les activités nationalitaires se
sont auto-construites en mouvement d'émancipation politique par le moyen
de la lutte Armée. Le principal cadre de lutte pour cette
émancipation politique est constitué au Cameroun par la Southern
Cameroon National Council (SCNC). Celle-ci comporte de nombreuses fractions
notamment le Cameroon Anglophone Movement, le Free West Cameroon Movement et
l'Ambazonia Movement. Ces acteurs nationalitaires ont inauguré en 1997
une guérilla procédant par l'attaque armée des symboles de
l'Etat dans la partie anglophone du pays. L'attaque des activistes
nationalitaires et la contre-attaque, mieux la répression
légitime des Forces nationales de sécurité ont
contribué à l'instauration d'une instabilité sociale
lourde de menaces sur la sécurité des individus (Chouala 2007 :
7).
3) LA SECURITÉ
Le terme « sécurité » vient du latin
securitas qui quant à lui, vient de securus,
littéralement « sans souci ». La sécurité est
l'état d'être libre de toute menace (CESA 2009 : 27). La
sécurité, comme d'autres concepts essentiels du domaine des
sciences sociales, ne se réduit pas à une définition
neutre, tous les concepts du terme de « sécurité » et
ce à quoi ils
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
font référence (l'Etat, la
société, ou les individus) proviennent de quelque part et
illustrent une série d'hypothèses sur les politiques
internationales. Il est bien difficile de trouver une définition au
terme « sécurité », qu'elle soit scientifique ou
neutre, puisque sa signification est interprétée en fonction
d'opinions plus larges et souvent contraires, sur le monde social et la
manière dont les éléments vitaux y réfèrent
(CESA 2009 : 13). Ce concept de base a pourtant donné lieu à une
forte polémique au cours des dernières années, et
aujourd'hui, il y a autant de définitions de la sécurité
qu'il y a de personnes écrivant sur le sujet.
Traditionnellement, le terme sécurité signifiait
tout simplement qu'il était associé aux dimensions militaires des
interactions entre Etats. Historiquement, la sécurité d'un pays
équivalait à défendre l'Etat contre les attaques
étrangères, autrement dit à protéger
l'intégrité du territoire national et à maintenir le
gouvernement en place. Les ressources militaires et diplomatiques
étaient les principaux outils utilisés pour réaliser ces
objectifs. De nombreux pays ont largement investi dans le secteur de la
défense, persuadés que plus l'arsenal militaire d'un pays
était puissant, meilleure devait être la sécurité de
ce pays. Cette approche centrée sur ou dominée par l'Etat
reflétait bien la conception prédominante en matière de
sécurité en vigueur presque jusqu'à la fin du
20ème siècle. Cette approche vis-à-vis de la
sécurité était statique puisqu'elle reposait exclusivement
sur des éléments de « hard security » (CESA
2009 : 14).
a) LE SENS DE LA SECURITÉ
AUJOURD'HUI
Nous vivons dans un monde d'insécurité voire,
des « entrepreneurs » ou des « architectes » de
l'insécurité. Une incidence réside sur le fait que la
demande de sécurité augmente du fait de l'émergence de
nouvelles formes de conflits qu'illustrent les attentats du World Trade Center.
Etant donné que la part qui est consacrée à la
sécurité publique dans le monde reste insuffisante, dans ce cas,
la fourniture sécuritaire s'amoindrit davantage.
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à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
L'insécurité transnationale affaiblit ainsi
l'Etat qui ne parvient plus à contrôler son territoire, ni
à inscrire « le monopole de la contrainte légitime »
dans ces espaces de « non droit » (Belomo Essono 2007 : 176). Ce
monopole est de plus en plus partagé aujourd'hui entre l'Etat et les
acteurs transnationaux. Ceux-ci constituent aussi une menace pour les
gouvernements en place car ils sont pourvus d'armes de guerre et formés
au combat, dans des situations parfois de délitement de l'Etat et des
Armées nationales. Avant le 11 septembre, de nombreuses personnes aux
Etats-Unis et dans d'autres parties du monde développé vivaient
dans uns sorte d'utopie. L'effondrement de l'Union Soviétique, une
décennie plus tôt, avait mis fin à la longue période
d'intense insécurité de la guerre froide et inauguré une
courte période au cours de laquelle la principale question de
sécurité du monde développé semblait être de
savoir s'il fallait ou non s'engager pour la protection des populations dans
des pays tels que la Bosnie, la Somalie, le Rwanda, Haïti, le Timor
oriental ou le Kosovo. La plupart des citoyens des démocraties
industrialisées du monde croyaient leur sécurité
garantie.
Les attaques du 11 septembre sur les Etats-Unis, les attentats
à la bombe coordonnés à bord de trains à Madrid, le
11 mars 2004, et les attentats à la bombe dans le métropolitain
et des autobus de Londres, le 7 juillet 2005, ont mis fin à la
complaisance qui s'était développée dans le monde
occidental durant les années 1990 et ont attiré à nouveau
l'attention sur la sécurité d'une façon encore inconnue
même au cours des moments les plus tendus du face à face
soviético-américain. Notre perception de la
sécurité, cependant, avait changé entre temps. La guerre
n'est plus la seule menace de sécurité que les Etats doivent
envisager. La guerre, d'ailleurs, n'est plus ce qu'elle était autrefois.
Dans l'agenda de la sécurité d'aujourd'hui figurent les menaces
que représentent la dégradation de l'environnement, la
propagation des maladies infectieuses et les Etats en échec et leurs
conséquences. Y figurent le réchauffement climatique et
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l'épuisement des ressources pétrolières.
Il met les Etats en alerte contre les révoltes ethniques et les
organisations terroristes transnationales ainsi que, bien sûr, contre un
réseau mondial d'organisations terroristes. Il prévoit les
guerres dans le cyberespace et sur le terrain contre les individus
insaisissables et des organisations mystérieuses plutôt que contre
des Etats. Si la recherche de la sécurité est devenue bien plus
manifeste que durant la période de l'après-guerre froide, elle
est devenue bien plus complexe que durant la guerre froide elle-même.
Le nouvel agenda de la sécurité se base en
partie sur la plupart des six milliards et demi d'habitants du monde
menacés par des problèmes sans rapport avec les armes de
destruction massive et les réseaux terroristes. Il est également
basé sur le constat que beaucoup de ces problèmes devraient
être pris à coeur par ceux qui, dans le monde
développé, ont généralement porté leur
attention uniquement sur les menaces de nature militaire. La portée et
la gravité des menaces figurant sur le nouvel agenda de la
sécurité peuvent être explicitées à l'aide de
quelques exemples.
· Quarante-deux millions de personnes dans le monde sont
infectées par le virus HIV/SIDA. Sans percée médicale
majeure, la plupart mourront au cours de la prochaine décennie.
· Chaque année, plus de onze millions d'enfants
âgés de moins de cinq ans meurent, plus de la moitié
à cause de la famine et de la malnutrition.
· De 600 000 à quatre millions de personnes font
l'objet d'un trafic humain dans le monde chaque année. La plupart dont
des femmes et des enfants trafiqués dans un but de prostitution
forcée ou de travail forcé.
· Les conflits civils et la violence ethnique
constituent peut-être le problème le plus grave de tous. Au
soudan, environ deux millions de personnes ont été tuées
dans la guerre civile depuis 1983. 800 000 personnes ont été
assassinées, principalement à l'aide de
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à la sécurité : d'une Armée « de garde »
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machettes en une centaine de jour de folie génocidaire
au
Rwanda, en 1994. En République Démocratique du
Congo, on
estime à 3,8 millions de personnes sont mortes à
cause de la
guerre civile depuis 1998. Malheureusement, on pourrait
ajouter
de nombreux autres exemples de conflits inter-Etats à
cette liste.
Ces sources d'insécurité dans le monde
soulèvent quelques questions dignes de notre intérêt pour
examiner le sens de la sécurité aujourd'hui. Les attaques
terroristes sur le quartier financier de la City, à New York, sur le
Pentagone, sur une station hôtelière à Bali en
Indonésie, en banlieue de Madrid et à Londres ont prouvé
que, ou que l'on vive et quelque soit la fortune dont on dispose ou la
puissance du pays ou l'on vit, la sécurité absolue est une chose
inexistante. Comme l'a noté Barry Buzan, la nature des Etats et la
nature du système international sont si étroitement
imbriquées qu'il est impossible de s'occuper de sécurité
nationale sans prendre en compte la sécurité internationale et
inversement (Barry Buzan 1998). Cependant, bien que l'insécurité
transcende clairement les limites socio-économiques et
géographiques, les sources d'insécurité varient
considérablement selon qu'on vive en Amérique du Nord ou en
Europe de l'Ouest d'une part ou, d'autre part en Afrique subsaharienne ou en
Asie du Sud-Est. La première question pourrait donc être : de la
sécurité de qui parlons-nous ?
Une autre question qui suit celle qui déplace
l'attention du « qui » vers le « quoi ». Tandis que les
attaques terroristes et les guerres civiles s'intègrent confortablement
à notre notion de ce qu'est (ou de ce que devrait être)
l'étude de la sécurité, quelle est la place des maladies
et des famines ? Si les menaces posées par la famine et le VIH/SIDA sont
des sujets à part entière d'une étude de la
sécurité ?
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à la sécurité : d'une Armée « de garde »
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b) LE PARADIGME TRADITIONNEL : LA SECURITÉ
NATIONALE
Durant la guerre froide, comme l'Etat était la
principale préoccupation, du moins dans la tradition réaliste
dominante, l'attention des chercheurs en relations internationales, pour ce qui
est des sujets de sécurité, se portait principalement sur la
sécurité nationale. En effet, durant la guerre froide,
l'appellation « études de sécurité »
n'évoquait rien de plus ni de moins à la grande partie des
chercheurs que « études de sécurité nationale ».
La « sécurité nationale », en retour, était
communément limitée à des affaires liées à
l'usage de la force militaire. Dans cet usage, « politique de
sécurité nationale » et « politique de défense
» étaient généralement considérés comme
des termes interchangeables. Tandis que certains régimes,
particulièrement les dictatures autoritaires d'Amérique latine,
considéraient que les menaces internes faisaient partie du domaine de la
politique de sécurité nationale, les démocraties
industrielles avancées étaient généralement
l'utilisation de la force militaire pour assurer l'ordre interne,
préférant employer à cette fin des Forces de police civile
(CESA 2009 : 27).
Il existe bien entendu une grande variété de
tâches auxquelles les Forces militaires peuvent être
affectées. Au sein de l'Etat, l'Armée peut être
employée pour faire valoir l'autorité du gouvernement sur des
portions dissidentes de la population. Cette tâche peut recouvrir
l'écrasement de la rébellion, la persécution d'opposants
du régime ou la lutte contre le crime. Ces fonctions, nous l'avons
noté, ne sont pas confiées aux militaires dans la plupart des
démocraties. Vers l'extérieure, l'Armée peut être
utilisée pour défendre l'Etat contre les agressions,
défendre d'autres Etats (ou acteurs non-étatiques) pour la
violation de normes internationales, ou encore attaquer d'autres Etats (CESA
2009 : 28).
L'association traditionnelle de la sécurité
nationale avec l'Armée est due à la nature des
présupposés sous-jacents aussi bien à la définition
de la
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sécurité qu'à la perception des menaces
correspondantes. La sécurité nationale se préoccupe
fondamentalement de la préservation de la souveraineté contre les
menaces externes. Elle recouvre tous les efforts faits par l'Etat pour
contrôler ce qui advient à son territoire, ses citoyens, ses
ressources et son système politique. Elle est dans une large mesure
préoccupée par la défense des frontières, afin que
des acteurs extérieurs ne puissent jouer dans l'Etat un rôle
dépassant la limite de ce que l'Etat est disposé à
accepter. Historiquement, la menace la plus importante à
l'intégrité des frontières d'un Etat et de sa
capacité à déterminer son propre devenir est venue de
militaires ennemis. Seules les Forces Armées, pensaiton du moins,
pouvaient pénétrer les frontières de façon à
menacer sérieusement la souveraineté de l'Etat. Lorsque la menace
à la souveraineté venait de l'intérieur, comme dans le cas
d'insurrections, l'Armée pouvait là encore être le garant
de la sécurité. Les menaces extérieures auxquelles la
solution militaire ne peut apporter de réponse étaient
jusqu'à récemment à peu près d'inconnues (CESA 2009
: 27).
Les acceptions traditionnelles sur le lien entre
sécurité nationale et souveraineté territoriale, avec les
types limités de menaces que subissaient les Etats jusqu'à une
date récente, ont engendré une acception étroite du
concept de sécurité, bien présente encore parmi nous alors
que le paysage a considérablement changé. Sous le paradigme
traditionnel, l'Etat était considéré comme le sujet
premier, sinon unique, des études de sécurité. La
principale menace à la sécurité était la menace
d'invasion (ou dans certains cas, de blocus) par un Etat hostile, et
était donc perçue comme une menace d'ordre militaire. En
conséquence, la préparation à la guerre, que ce soit en
s'armant ou en enrôlant des alliés, était le moyen
principal pour l'Etat d'assurer sa propre sécurité (CESA 2009 :
28).
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c) LE NOUVEAU PARADIGME : DU CONCEPT
DE
SECURITÉ NATIONALE A LA SECURITÉ
HUMAINE
Le concept de sécurité est inhérent
à l'environnement humain. Il se rattache à toute perception qui
susciterait une inquiétude, même de circonstance, à
l'homme. Cette idée générale peut s'appréhender de
manière empirique, pratique et théorique. La notion de
sécurité est subjectivement claire et sa définition
devrait être plus simple. Pourtant, la notion de sécurité
souffre de la soudaine popularité que connaissent les security
studies. A trop étendre le concept, on risque de le diluer dans une
réplique moderne de la notion toute aussi ancienne, peut-être plus
objective, de défense. Celle- ci est davantage liée à la
notion de souveraineté étatique. La notion de
sécurité humaine est officiellement utilisée pour la
première fois en 1994, dans le rapport du Programme des Nations Unies
pour le Développement (PNUD) sur le développement humain. Le
rapport recommandait une transition conceptuelle de la «
sécurité nucléaire », c'est-à-dire militaire,
vers la sécurité humaine. En effet, un sentiment
d'insécurité surgit davantage des craintes engendrées par
la vie quotidienne que par un événement apocalyptique mondial
(Mvié Meka 2007 : 30). La sécurité humaine est à la
fois un concept théorique, polysémique, transversal et
multidimensionnel. Elle est un outil ou un instrument pratique d'analyse
opérationnelle. Les définitions de ce concept diffèrent ou
divergent selon les auteurs.
Globalement, le consensus est établi sur trois
paramètres dans toute approche sérieuse de la définition
de la sécurité. La sécurité implique, pour toute
communauté, la préservation de ses valeurs centrales, l'absence
d'un sentiment de menace contre elle et la formulation par elle des objectifs
politiques. La sécurité est donc conçue ou
décidée par un groupe, une ethnie, un Etat, une organisation
internationale sous-régionale. Le paradigme stato-centré,
néo-réaliste valorise le concept du hard power et du
soft power posés par Joseph Nye Jr. Le hard power fait
de l'État le garant et le tributaire de la sécurité, et
lui reconnaît l'usage légitime de la coercition
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contre ses adversaires et rivaux, pour les incliner à
adopter ses positions dans le cadre du bilatéralisme ou du
multilatéralisme. L'objet devant être
«sécurisé» est l'État (Mvié Meka 2007 :
30). Appréhendé comme « absence de menaces sur les
valeurs centrales que souhaite promouvoir un groupe », le concept,
pris au sens le plus large, transcende l'absence de conflit violent et
intègre les droits de l'homme, la bonne gouvernance, l'accès
à l'éducation, aux soins de santé et l'assurance que
chaque individu à l'opportunité et le choix d'atteindre ses
aspirations quotidiennes (Mvié Meka 2007 : 31). En effet, poursuit Kofi
Annan, chaque pas dans cette direction est aussi un pas vers la
réduction de la pauvreté, la croissance, la prévention de
conflits. Libérée du besoin primaire, de la peur, la
liberté des générations futures s'établira dans
l'héritage d'un environnement sain. L'approche libérale
(soft) privilégie une conception plus holistique de la
sécurité. Elle prend en compte le sujet de la
sécurité (la dimension subjective), la nature de la
sécurité (dimension objective), les enjeux de la
sécurité (Etats, ONG, OIG...), toutes les formes de menaces. Le
concept du soft power trouve ici toute sa place. Il traduit, selon
Joseph Nye l'habileté à persuader par les moyens plutôt
attractifs que coercitifs, à savoir : la diplomatie, l'aide
bilatérale, les investissements (Mvié Meka 2007 : 31).
Pour le gouvernement sud africain, la sécurité
est « ... une situation globale dans laquelle chaque citoyen peut
vivre libre, en paix et à l'abri du danger, participer pleinement
à la gestion des affaires publiques, jouir de ses droits fondamentaux,
avoir accès aux ressources et produits de première
nécessité, et vivre dans un environnement qui ne nuit pas
à sa santé et à son bien-être »
(Mvié Meka 2007 : 31). Les objectifs de la politique de
sécurité comprennent donc : la consolidation de la
démocratie, la justice sociale, le développement
économique et un environnement sûr, ainsi qu'une réduction
importante de la criminalité, de la violence et de l'instabilité
politique. Il est communément admis que stabilité et
développement sont indissociables et se renforcent mutuellement.
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L'objet devant être « sécurisé »
est désormais l'humain plutôt que les intérêts
matériels, le territoire, l'État dont le rôle restera
toujours central. Le concept vise à « sauvegarder l'essence vitale
de toutes les vies humaines des effets pervers des menaces inscrites dans la
durée de la vie humaine (Mvié Meka 2007 : 32) ». La
sécurité humaine, dans une dimension de développement,
devient « la sécurité des peuples » et moins celle du
«territoire et des armes». En réalité, la
sécurité va de pair avec la stabilité sociale et les
meilleures perspectives économiques. Le Programme des Nations Unies pour
le Développement (PNUD) saisit la sécurité humaine comme
un moyen « de préserver les populations à la fois de la
violence et des menaces non violentes. Cette approche du PNUD revêt deux
principaux aspects. Le premier est lié à la sauvegarde contre les
menaces chimiques, la faim, les maladies, la répression. Le
deuxième aspect est lié aux désagréments quotidiens
portant par exemple sur le logement, l'emploi, la cohésion sociale, la
pauvreté comme « absence de choix », de pouvoir, de voix.
Globalement, la sécurité humaine est une condition essentielle
d'un état de bien-être caractérisé par la
liberté, la sûreté, le droit à la vie. Telles sont
les interconnexions qu'il y a entre la sécurité humaine et la
sécurité nationale (Mvié Meka 2007 : 31).
Contrairement à une opinion répandue, l'accent
sur la sécurité des individus ne réduit pas l'importance
de la sécurité nationale. En effet, pour un Etat effectivement
démocratique, assurer la promotion de la prospérité de sa
population est une pré-condition de sa légitimité, de sa
stabilité, de la sécurité de son existence. Aussi la
sécurité de l'Etat n'est pas une fin en soi, mais un moyen de
garantir la sécurité de la population. Comme instrument
opérationnel de développement, la sécurité humaine
permet, en rapport avec la pauvreté, de recenser les problèmes
latents à la sécurité, de saisir les racines, les causes
de plusieurs conflits, de servir potentiellement comme mécanisme
d'alerte précoce lorsqu'il est utilisé pour
évaluer/anticiper les actions politiques. La sécurité
humaine est un « impératif », au regard des
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à la sécurité : d'une Armée « de garde »
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objectifs du millénaire et des quatre priorités
proclamées par la Commission des Nations unies pour la
sécurité humaine à savoir : l'encouragement de la
croissance par le micro crédit, le soutien de la cohésion sociale
et des conditions décentes de travail, la prévention et la
gestion des effets néfastes des crises, socio-économiques,
naturelles, des désastres, des situations post conflits et enfin, de la
protection sociale sous toutes ses formes (Mvié Meka 2007 : 32).
La sécurité humaine est une reconnaissance de la
capacité des hommes à se prendre en charge pour leur
bien-être. Elle est « une entreprise destinée à
bâtir une société mondiale, une société
où la sécurité de l'individu, au centre des
priorités internationales, devient la motivation de l'action
internationale, une société où les normes humanitaires et
la règle de droit progressent et constituent un filet solidement
tissé qui protège les individus ». Cette approche
universaliste est une avancée décisive par rapport au
système westphalien. Dans sa forme élaborée, la
sécurité humaine induit la participation
institutionnalisée, ce processus à travers lequel les acteurs
sociaux, les parties intéressées forment et assurent le
contrôle sur les initiatives de développement, de paix et de
sécurité en formulant, fort de cette base légale,
intégrée, légitime, des choix pertinents. De
manière opérationnelle, la sécurité humaine, dans
une logique participative, interpelle l'Etat, toutes les institutions
spécialisées, les individus qui incorporent les
différentes stratégies de mobilisation, de mutualisation et de
promotion de la sécurité humaine (Mvié Meka 2007 : 32).
L'Etat, en soi, introduit la notion de sécurité
coopérative qui privilégie la solidarité et non la
confrontation dans les rapports entre les Etats, la société et
l'Etat, les communautés. Les termes de «sécurité
commune» et de «sécurité globale» retrouvent tout
leur sens. La sécurité globale énonce l'atténuation
du pouvoir régalien et de la valorisation des libertés
politiques, des droits de la personne, de la pauvreté et autres
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privations économiques de toute nature, comme les
autres indicateurs de sécurité en rapport avec les modes de
violences non structurelles. La nouvelle vision éthique prime sur l'Etat
souverain, souvent coupable de l'insécurité, et justifie dont le
droit d'ingérence de la communauté internationale. La
sécurité humaine est définie aussi comme « la
protection des individus contre les menaces, qu'elles s'accompagnent ou non de
violence ». L'Etat est tenu de prendre soin de ses citoyens (Mvié
Meka 2007 : 33).
S'il ne peut accomplir cette tâche ou refuse de le
faire, il manque alors à son devoir et, de ce fait, représente la
principale menace soit en raison de sa domination sur la population, soit alors
de son incapacité à s'acquitter de ses responsabilités.
L'Etat devient acteur d'une « insécurité sociétale
». Celle-ci est réelle quand les populations font face aux menaces
qui émanent directement ou indirectement de l'Etat, ou quand les
communautés perçoivent son enjeu comme une menace à leur
survie en tant que communauté. Les menaces proviennent de tous les
domaines de l'activité humaine. Ces menaces, risques et
vulnérabilités dans un contexte sociétal
déterminent une redéfinition de la sécurité. Une
nouvelle vision conteste la capacité autonome de l'Etat à
garantir la sécurité humaine, et estime dans beaucoup de cas
qu'il s'avère être la principale cause d'insécurité.
La sécurité sociétale, concept novateur, concerne la
survie identitaire des acteurs étatiques, infra-étatiques qui
modifient l'identité de l'Etat (Mvié Meka 2007 : 34).
La survie identitaire qui fait référence aux
normes et se distingue des autres enjeux permet de comprendre les nouveaux
conflits intra-étatiques d'origine clanique, ethnique, nationalitaire et
religieux dont l'intensité varie selon les Etats et les régions.
La concurrence entre l'Etat et la nation, la diffusion et l'exportation
à l'extérieur des frontières étatiques des enjeux
de « sécurité sociétale » entraînent
l'engagement d'une multitude d'acteurs (Etats, ONG, organisations
inter-gouvernementales). Ceux-ci contribuent à
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la fois à régionaliser, à
internationaliser ou maîtriser ces enjeux. Ces enjeux de paix
démocratique, de paix économique peuvent trouver des solutions
dans la construction d'une paix institutionnelle, sur le modèle de la
Société des Nations (SDN), ou de l'Union européenne (UE),
de la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest
(CEDEAO) que la CEEAC s'attelle à édifier, par le
mécanisme du burden-sharing, c'est-à-dire partage des
charges financières et matérielles, une architecture de
sécurité collective (Mvié Meka 2007 : 34).
d) DE LA SECURITÉ COLLECTIVE A LA
SECURITÉ COOPERATIVE
Depuis le traité de Westphalie (1648), trois
modèles de sécurité sont connus et pratiqués : la
paix par la force - la paix par le droit et la sécurité
collective - la paix par la peur. Les impératifs de
sécurité collective procèdent d'une vision positive de la
paix toujours fragilisée par sa forme négative : absence de
violence. En 1928, le Pacte Briand-Kellog marque la volonté des Etats de
« renoncer à la guerre en tant qu'instrument de politique nationale
dans leurs relations mutuelles ». Grande illusion ! La naissance des
Nations unies coïncide avec la création du nouveau système
de sécurité collective. La stabilité et la
sécurité internationale, en tout état de cause, sont
tributaires de la violence brute, c'est-à-dire du « prix du sang
» que tout Etat doit être prêt à payer pour
éviter l'agression. Refusant d'assurer un bel avenir à la guerre
et l'enjeu de la paix étant la légitimité des Etats, dans
« un monde sans frontière », l'ouverture est faite à la
sécurité coopérative. Elle repose sur trois idées
forces : la sécurité est globale - indivisible -
coopérative et démocratique. Le recours à la force ne
relève que d'ultima ratio. Les Etats démocratiques d'une
région décident de coopérer pour dépasser le
principe de l'équilibre, et créer une communauté
d'intérêts et de destin dans le cadre de la CEEAC (1983)
redynamiser en 1994. L'ordre sous-régional communautaire fonde la paix
et la stabilité non
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plus sur une structure de puissance, de domination
hégémonique, mais sur le principe de la coopération
internationale. Les idées forces sus-relevées doivent combiner
avec d'autres dimensions : politique, humanitaire, économique,
environnementale et juridique. L'indivisibilité est à la fois le
résultat de la globalité et son corollaire. Par son champ
d'application, elle est matérielle au sens juridique du terme. Elle est
aussi géographique parce qu'elle concerne un espace sous-régional
bien précis. En somme, la sécurité des uns, est
conditionnée par celle des autres (Mvié Meka 2007 : 34).
II- DÉFINITION DES CONCEPTS
Notre thème de recherche tourne autour de trois
concepts clés qu'il convient de circonscrire. Il s'agit de la Force
Armée, de nouvelles menaces et de la sécurité.
1- LA FORCE ARMÉE
Dans notre travail relatif à l'évaluation de la
performance des Forces Armées camerounaises dans la nouvelle
géopolitique mondiale animée par des nouvelles formes de menaces,
la notion de force Armée doit être entendue comme le bras
armé d'un gouvernement garant du maintien et du respect de l'ordre, du
respect des institutions de la République, de la sécurité
des intérêts de l'État.
La force Armée peut aussi être
considérée comme un outil de conquête,
d'émancipation, de développement et de sécurité
d'une entité étatique en pleine propension.
C'est dans le cadre de ces deux définitions que nous
pouvons situer les actions des Forces Armées camerounaises. Les Forces
camerounaises, dans leurs représailles et offensives à l'encontre
des assaillants armés remettant en cause la souveraineté du
gouvernement, constituent un outil de
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maintien et du respect de l'ordre, du respect des institutions de
la République et de la sécurité des intérêts
de l'État.
En définitive, la force Armée dans notre analyse
aura deux sens : la force Armée comme outil de conquête et
d'émancipation, de développement et de sécurité
d'une entité étatique en pleine propension ; la force
Armée comme un outil de maintien et du respect de l'ordre, du respect
des institutions de la République et de la sécurité des
intérêts de l'État.
2- LES NOUVELLES MENACES
Les nouvelles menaces ou encore des menaces
asymétriques seront appréhendées tout au long de notre
étude comme des Organisations Nons Etatiques, tournées vers la
recherche du profit, poursuivant des buts politiques localisés au moyen
de la lutte armée ; les systèmes revendicatifs recherchant la
participation au pouvoir local ou à sa conquête et usant de la
lutte armée pour soustraire territoires et populations à
l'autorité de l'Etat qu'ils combattent. Ces nouvelles menaces en
fonction de leurs objectifs, la nature de leurs actions et des résultats
obtenus peuvent épouser plusieurs formes dans le monde. Pour le cas du
Cameroun, il s'agit des gangs urbains (association de malfrats), réseaux
criminels transnationaux (coupeurs de routes), des activistes nationalitaires
(SCNC), des pirates de mer (Bakassi Freedom Fighter) dans le Nord Ouest et Sud
Ouest.
3- LA SECURITÉ
De toutes les appréhensions que nous pouvons avoir du
concept de sécurité, il sera entendu ici dans le sens de la
sécurité nationale qui se préoccupe fondamentalement de la
préservation de la souveraineté contre les menaces externes. Il
s'agit de tous les efforts faits par l'Etat pour contrôler ce qui advient
à son territoire, ses citoyens, ses ressources et son système
politique. Elle est dans une large mesure préoccupée par la
défense
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
des frontières, afin que des acteurs extérieurs
ne puissent jouer dans l'Etat un rôle dépassant la limite de ce
que l'Etat est disposé à accepter. Historiquement, seules les
Forces Armées, pensait-on du moins, pouvaient pénétrer les
frontières de façon à menacer sérieusement la
souveraineté de l'Etat. Aujourd'hui, la menace à la
souveraineté vient de l'intérieur. Tel set le cas des Bakassi
Freedom Figthers qui est un groupe millénariste préoccupés
par un problème spécifique, s'opposer à l'exercice de la
souveraineté du gouvernement sur la presqu'île de Bakassi et qui a
pour méthode la prise d'otage et les détournements
d'aéronefs et navires. La porosité des frontières et son
instrumentalisation par les menaces asymétriques contribuent à la
remise en cause de la violence physique légitime de l'Etat qu'il partage
désormais avec les coupeurs de route. La stabilité de la
société camerounaise est également remise en cause par
cette criminalité à dynamique transnationale mettant en
péril la sécurité des personnes et des biens et de
l'économie.
CONCLUSION
Dans le cadre de ce travail, la notion de force Armée
et partant les Forces Armées camerounaises doivent être
appréhendées comme le bras armé d'un gouvernement garant
du maintien et du respect de l'ordre, du respect des institutions de la
République, de la sécurité des intérêts de
l'État, comme un outil de conquête, d'émancipation, de
développement et de sécurité d'une entité
étatique en pleine propension. Les nouvelles menaces comme des
Organisations non étatiques, tournées vers la recherche du
profit, les systèmes revendicatifs recherchant la participation au
pouvoir local ou à sa conquête poursuivant des buts politiques
localisés au moyen de la lutte armée prennent au Cameroun les
formes des gangs urbains, réseaux criminelles transnationaux (coupeurs
de routes), les activistes nationalitaires (SCNC) et du terrorisme (Bakassi
Freedom Fighter). La
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sécurité enfin relèvera ici de la
sécurité nationale qui se préoccupe fondamentalement de la
préservation de la souveraineté contre les menaces externes.

CHAPITRE II :
LA CONCEPTUALISATION INSTITUTIONNELLE
ET GÉNÉRALE CLASSIQUE DES MENACES : LES
FORCES ARMÉES CAMEROUNAISES EN CINQUANTE ANS
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
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Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
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La création des Forces Armées chargées
d'appliquer une politique de défense relève du domaine
réservé de l'Etat. Cette activité régalienne est un
élément important de tout jeune Etat qui accède à
la souveraineté internationale. Elles constituent le bouclier du pouvoir
central chargé d'assurer la défense de l'intégrité
territoriale, protéger les personnes et les biens contre toute forme de
menaces extérieures ou intérieures, non seulement gage de
crédibilité de l'Etat, mais également un
élément dissuasif contre tout acteur international belliqueux. A
ce titre, « la défense militaire, pour l'entité Etat-Nation,
apparaît ainsi comme un impératif catégorique ; une
nécessité vitale, sans laquelle les institutions étatiques
et les activités économiques et sociales, ne peuvent être
assurées d'un fonctionnement normal » (Ela Ela 2000 : 38). La
première armée significative sera formée par les
autorités allemandes après la signature du traité de
protectorat du 12 Juillet 1884. Face à la résistance farouche des
indigènes de l'intérieur à l'occupation allemande, une
« garde indigène » sera formée afin de venir à
bout de cette opposition armée. Ce sont ces troupes indigènes qui
fourniront les premiers éléments de l'Armée camerounaise
(Ela Ela 2000 : 41).
I- LA MISE EN PLACE DES FORCES ARMÉES
CAMEROUNAISES
La mise en place des Forces Armées camerounaises
obéit à une autre raison. Dés 1955, la situation
socio-politique du pays est très instable. Les Forces de police ne sont
plus en mesure d'assumer, seules, le maintien de l'ordre face à une
rébellion armée. Par ailleurs, les Forces coloniales
françaises ont le sentiment de mener une « intervention gratuite,
une pacification sans âme qui prend l'aspect d'une mauvaise corvée
à assurer dans le pays qu'il faudra en tout état de cause quitter
bientôt » (Chaffard 1962 : 399). Dans ce contexte, les Etats
nouvellement indépendants à l'instar du Cameroun doivent se doter
d'armées nationales (Bangoura 2002)
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indispensables face au péril national. Ahmadou
Ahidjo28 déclarera, dans le cadre des missions
confiées aux Forces Armées, que « L'une de ces missions, en
sommeil dans les Etats qui jouissent de la paix intérieure, est
particulièrement importante dans ceux qui, comme notre pays, connaissent
la subversion. Au Cameroun, les Forces Armées sont et demeurent l'un des
moyens dont disposent les pouvoirs publics pour maintenir l'ordre ou le
rétablir partout ou il est troublé, mieux encore,
préserver la paix » (Ela Ela 2000 : 54). La nécessité
de la création d'une Armée, tout comme son développement
apparaissent dès lors comme une question de principe. Malgré
l'absence notoire de cadres militaires camerounais, avec l'aide de cadres
militaires français, les autorités du Cameroun autonome vont
décider de créer les Forces Armées nationales prêtes
à entrer en lutte contre la rébellion qui menace
l'intégrité territoriale. Néanmoins, cette naissance des
Forces Armées nationales connaîtra une certaine
évolution.
1) LA NAISSANCE DES FORCES ARMÉES CAMEROUNAISES
L'acte fondateur des Forces Armées camerounaises est
l'ordonnance du 11 Novembre 1959 et sa direction connaîtra une dynamique
identique à celle du système politique camerounais.
a) L'ORDONNANCE N°59/57
C'est le 11 Novembre 1959, par ordonnance n°59/57,
portant création de l'Armée camerounaise et organisation
générale de la défense, que naissent la Gendarmerie
Nationale, l'Armée de Terre, l'Armée de l'Air et la Marine
Nationale.
Texte de 24 articles, l'ordonnance stipule en son article premier
qu' « il est crée une Armée camerounaise relevant de
l'autorité du Premier
28 Premier président du Cameroun 1960-1982.
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Ministre, chef du gouvernement camerounais
»29. Son second article fixe la mission de cette Armée
nouvellement créée : « la mission principale de
l'Armée camerounaise est d'assurer en tout temps, en toutes
circonstances et contre toutes les formes d'agression, la
sécurité et l'intégrité du territoire national
ainsi que la vie de la population ». Cette mission est largement
inspirée de la conception moderne de la défense qui, ne faisant
plus de distinction entre l'état de guerre et l'état de paix,
érige les Forces Armées en sentinelles permanentes.
En portant un regard croisé sur l'Ordonnance
n°59/57 et sur celle du 7 janvier 1959 portant organisation
générale de la défense française, nous nous rendons
compte de la similitude qui existe entre les deux textes,
particulièrement en leurs articles 2 et 1er relatifs aux
missions assignées aux Forces Armées nationales respectives.
Cette similitude, voire cette copie certifiée conforme aux textes
français en matière de défense est
révélatrice de la carence de cadres militaires camerounais
capables de définir ou d'adapter ces textes au contexte local. En outre,
cette situation confirme la mainmise des autorités militaires
françaises en matière de défense dans les territoires
outre-mer en général et, au Cameroun en particulier. La naissance
de l'Armée camerounaise est en faite une émanation de
l'Armée française, « une fille de l'Armée coloniale
française ».
Pour atténuer la mainmise des cadres de l'Armée
française et, du fait de la présence des troupes
françaises sur le territoire camerounais, le Ministre des Forces
Armées précise le lexique militaire : au lieu d' «
Armée camerounaise », la circulaire demandait qu'elle soit
désormais appelée « Forces Armées nationale »,
de « Gendarmerie nationale », de « Marine nationale » etc.
Ces Forces Armées nationales sont placées sous la haute
autorité du chef suprême de l'Etat (Ela Ela 2000 : 55-56).
29 Extrait de l'Ordonnance n°59/57 du 11 Novembre
1959.
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b) UNE DIRECTION HOMOLOGUE A LA DYNAMIQUE DU SYSTEME
POLITIQUE CAMEROUNAIS
Comme on peut le constater, l'article 1er de
l'ordonnance n°59/57 n'est plus actuel. Le Cameroun n'étant pas
encore totalement indépendant en 1959, l'autorité en
matière de défense revenait donc au Premier Ministre, chef du
gouvernement.
Le Cameroun étant devenu indépendant le
1er janvier 1960, République fédérale le
1er octobre 1961 et Etat unitaire le 20 mai 1972, le chef de l'Etat
est le chef constitutionnel des Forces Armées nationales. A ce titre, la
constitution camerounaise du 18 janvier 1996 en son chapitre 1er et
en son article 8 alinéa 2, dispose que le Président de la
République est « le chef des Forces Armées » ; au
même article et en son alinéa 3, il est précisé que
le Président de la République « veille à la
sécurité intérieure et extérieure de la
République » ; l'alinéa 10, quant à lui
précise « nomme aux emplois civils et militaires de l'Etat ».
L'article 9 alinéa 1 du même chapitre dispose que « Le
Président de la République peut, lorsque les circonstances
l'exigent, proclamer par décret, l'état d'urgence qui lui
confère des pouvoirs spéciaux dans les conditions fixées
par la loi ». Par ailleurs, « Le Président de la
République peut, en cas de péril grave menaçant
l'intégrité du territoire, la vie de l'indépendance ou les
institutions de la République, proclamer par décret,
l'état d'exception et prendre toutes mesures qu'il juge
nécessaires. Il en informe la nation par voie de message »
(alinéa 2).
De même, la loi n°67/LF/9 du 12 juin 1967, portant
organisation générale de la défense stipule en son article
6 que : « Le Président de la République veille à la
sécurité intérieure et extérieure de l'Etat. Il
définit la politique de défense et pourvoie à sa mise en
oeuvre ». Chef suprême de toutes les Forces de Défense, il
assure la direction supérieure du maintien de l'ordre et décide
de la préparation et de la conduite générale des
opérations militaires. Il formule des directives pour les
négociations
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concernant la défense et en suit le
développement. Il anime et coordonne à l'échelon national
toutes les activités concernant la défense ». En outre,
l'article 2 de la même loi dispose que « ...Le président de
la République peut, outre l'état d'exception,
décréter sur tout ou partie du territoire national, l'une ou
plusieurs des mesures suivantes : la mise en garde, l'Etat d'urgence, la
mobilisation ».
Ces différentes dispositions juridiques
confèrent au Président de la République l'ensemble des
pouvoirs en matière de défense nationale et
particulièrement en matière de défense militaire.
L'acte de naissance des Forces Armées nationales
étant clair, d'autres textes juridiques vont néanmoins être
élaborés dans le sens de la dynamique évolutive de ces
Forces (Ela Ela 2000 : 56-58).
2) LA MONTÉE EN PUISSANCE DES FORCES ARMÉES
CAMEROUNAISES
La montée en puissance des Forces Armées se
réalise sous l'impulsion d'un arsenal juridique (a) en trois phases
principales (b).
a) L'ARSENAL JURIDIQUE
Au texte fondateur des Forces Armées camerounaises va
s'ajouter un arsenal juridique qui s'attellera à organiser,
règlementer les divers domaines de la défense militaire. On peut
ainsi noter :
- L'ordonnance n°59/199 du 12 novembre 1959, fixant les
conditions de recrutement de l'Armée camerounaise. L'article
1er, sur le principe du recrutement de l'Armée camerounaise,
précise que « tout citoyen camerounais peut contracter un
engagement aux conditions suivantes : avoir dix huit ans accomplis, vingt cinq
ans au plus ; jouir de ses droits civiques et politiques ; être pourvu du
consentement de son père, mère ou tuteur pour les jeunes gens
âgés de moins de vingt ans ; avoir obtenu le certificat d'aptitude
physique ; savoir lire et écrire ». Le second article dispose que
les candidats doivent être de nationalité camerounaise. Plus loin,
il est fixé
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la durée de l'engagement à trois ans et, le nombre
de centres de recrutement crée est de trois : Yaoundé, Douala et
Garoua.
- L'arrêté n°3/697 du 12 novembre 1959,
fixant recrutement du premier contingent de l'Armée camerounaise. Pour
l'essentiel, l'article premier dispose que « le premier contingent de
recrues est fixé à trois cent ». Les articles 2 et 3
respectivement fixent les lieux des opérations de recrutement dans
chaque chef lieu de département et, fixe les prérogatives des
détachements préfectoraux de la garde nationale en matière
d'encadrement et d'incorporation des recrues.
- Le décret n°59/6 du 16 janvier 1959 portant
réglementation de la délivrance des brevets et insignes de
l'ordre de la valeur et du mérite camerounais ainsi que la perception
des droits de chancellerie. Il faut dire que le métier des armes
n'intéressait pas les jeunes camerounais après l'accession
à l'indépendance en 1960. Ces derniers sont plus
intéressés à la politique et aux idées
nationalistes très à la mode à l'époque. Par
ailleurs, l'Armée est considérée comme le bras
séculier de l'ancienne puissance tutélaire. Il fallait donc
trouver des moyens pour intéresser ces jeunes indispensables à la
mise sur pied de l'Armée nationale.
- Le décret n°59/93 du 1er juin 1959,
fixant le régime de rémunération applicable aux
camerounais suivant les stages et formations hors de l'Etat du Cameroun. Dans
le même esprit que le décret précédent, des
avantages pécuniaires sont offert aux jeunes camerounais pour les stages
et formations effectués à l'étranger.
- Le décret n°60/198 du 27 octobre 1960, portant
organisation générale du Ministère des Forces
Armées (MINFA). Cette première organisation du Ministère
des Forces Armées est composée de deux grandes structures : une
Direction du cabinet et un Etat Major général des Forces
Armées (article 1er). Elles sont chargées de
l'organisation, de la mise en condition, de la mobilisation et de l'entretien
des Forces Armées, ainsi que de la constitution des approvisionnements
nécessaires à la mise en place des
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Forces (article 5). Il est également crée un
commandement supérieur des Forces terrestre ayant sous son
autorité, les différents bataillons :
- La garde civique Bamiléké ;
- Les corps francs du Mungo ;
- Les guerriers du Noun.
Figure N°4 : Quelques
éléments de la garde civique de l'Ouest

Source : Le Magazine des
Forces Armées camerounaises Honneur et Fidélité,
numéro spécial du 20 Mai 2010, Page 7.
- Le décret n° 61/22 du 16 mars 1961 portant
création et organisation du service de renseignements militaires et de
la sécurité des Forces Armées du Cameroun. Ce
décret donne à ce service deux types de missions. D'une part, une
mission de renseignement militaire à travers une recherche active et
spécialisée. D'autre part, une mission de sécurité
décelant, neutralisant ou éliminant les individus ou
organisations portant atteinte ou susceptible de
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porter atteinte à la sécurité des Forces
Armées ; d'élaborer les mesures de protection du secret, du
moral, du potentiel matériel utiles à garantir la
sécurité des Forces Armées et d'en contrôler
l'exécution.
- Le décret n°252/PR/FA du 6 novembre 1961, fixant
les conditions de mariage militaires. L'objectif recherché à
travers ce texte est la disponibilité des militaires camerounais.
L'idée ici est celle de la loyauté à la nation et non au
ménage. A ce titre, une période de célibat obligatoire a
été fixée : trois (3) ans pour les officiers et cinq (5)
ans pour les personnels non officiers. Par cette contrainte, la
hiérarchie militaire s'assurait de la disponibilité totale des
soldats pour mener à bien les diverses missions des Forces Armées
camerounaises. Parfois jugée inégale par les personnels non
officiers, la durée de célibat a été ramenée
à trois (3) ans, depuis 1994, pour toutes classes de l'Armée
camerounaise.
- Le décret n°64/DF/75 du 21 février 1964,
portant nomination de l'Attaché militaire camerounais en France. Compte
tenu du manque criard des cadres camerounais dans les Forces Armées
camerounaises nouvellement créées, les autorités ont
jugé nécessaire de former de jeunes camerounais dans les
écoles étrangères et particulièrement en France. Il
faut rappeler ici que les autorités militaires françaises, par
nécessité d'une africanisation rapide des cadres, vont
créer à Fréjus, l'école de formation des officiers
du régime transitoire des troupes d'outre-mer (EFORTOM). La plupart des
sous-officiers qui passent officier au lendemain de l'indépendance vont
y effectuer leur formation d'élève-officier. Par contre, les
jeunes camerounais ayant été admis au baccalauréat peuvent
directement rentrer à l'école spéciale militaire de Saint-
cyr.
- Le décret n°66/DF/283 du 18 juin 1966, portant
organisation du commandement de l'Ecole Militaire Interarmes (EMIA). Ce texte
intervient à un moment ou la « camerounisation » des cadres se
fait de plus en plus préoccupante. De faite, les autorités
politiques du Cameroun, ayant décidé d'accélérer le
processus de remplacement des cadres français en service
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dans l'Armée camerounaise, vont décider de la
création de l'EMIA afin de pourvoir les Forces Armées nationales
en cadres nationaux. Néanmoins, cette école va, pendant plusieurs
années, rester sous le commandement des cadres français.
- La loi n°67/LF/9 du 12 juin 1967, portant organisation
générale de la défense camerounaise. C'est le texte
fondamental de la défense camerounaise. Organisé autour de six
(6) titres et de quarante (40) articles, la loi de 1967 définit les
grandes lignes de la défense du Cameroun. Elle prend en compte tous les
aspects de la défense (moyens en matériels et en personnels),
organise le commandement opérationnel du territoire et définit
les prérogatives des autorités politiques et militaires dans le
cadre de la défense du territoire camerounais.
- Le décret n°69/DF/61 21 février 1969,
rendant obligatoire la préparation militaire pour les
élèves de certaines écoles et pour certaines
catégories de personnels entrant dans la fonction publique
fédérale. La préparation militaire obligatoire a
été mise en place compte tenu des préoccupations de la
politique de défense du Cameroun. Celle-ci étant basée sur
un concept stratégique de défense populaire. Les autorités
camerounaises ont jugé nécessaire de donner une formation
militaire aux citoyens camerounais aptes et particulièrement aux futurs
cadres de la République issus des grandes écoles. Dans son
article 2, il est dit que « avant d'être admis à effectuer
leur stage d'admission dans la fonction publique fédérale, les
jeunes gens diplômés d'une faculté ou école donnant
accès à la catégorie A sont tenus, s'ils ne justifient pas
d'un diplôme, brevet ou certificat de préparation militaire,
à effectuer une période de service militaire de quatre mois qui
est pris en compte dans les durées du stage et des services des
intéressés ». Elle participait également au
renforcement du lien Armée/Nation en évitant par là, le
phénomène de cloisonnement entre l'institution militaire et la
société civile. Dans ce sens, Clausewitz évoque les
notions de « moral national » ou de « sentiment national »
indispensable
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au développement cohérent de la Nation. Mais
compte tenu de la conjoncture économique que le Cameroun a connu depuis
la fin des années 1980 et du coût exorbitant de cette formation,
les autorités se sont trouvées obligées d'effectuer des
choix prioritaires au dépend de préparation militaire
obligatoire.
Cette énumération n'est pas exhaustive, mais
assez représentative de la diversité des domaines
réglementés par les autorités camerounaises avant la
définition officielle de la politique de défense du Cameroun en
1970 (Ela Ela 2000 : 60-63).
b) LES DIFFERENTES PHASES DE LA MONTÉE EN
PUISSANCE
Après la création des Forces Armées
camerounaises, l'Armée de l'Air et la Marine Nationale exigeant une
formation technique spécifique dispensable à la lutte
Armée contre la rébellion ne prendront leur envol que dès
le début des années soixante-dix avec l'acquisition de
matériels modernes (avions de chasses, hélicoptères,
vedettes, patrouilleurs, etc.). En revanche, l'Armée de Terre va
connaître un développement considérable. « Fer de
lance » des Forces Armées camerounaises et de la riposte militaire,
ses effectifs vont augmenter très rapidement dans le but de contrer la
rébellion Armée qui menace la paix civile et, suite au
désengagement de l'Armée coloniale française. Pour
être fer de lance du corps de bataille et de l'élément de
décision au profit duquel interviennent les autres Forces, les Forces
terrestres doivent comporter des éléments susceptibles de faire
face à toute forme d'agression terrestre classique. D'où leur
articulation en armes adaptées. Ces armes sont l'infanterie, le
blindé, l'artillerie de campagne sol-sol et sol-air ou
antiaérienne, le génie, le train, le service
général. Aux unités correspondantes sont adaptés
les éléments de commandement et, notamment pour l'ensemble des
Forces terrestres, un bataillon des transmissions.
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à la sécurité : d'une Armée « de garde »
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De nombreuses embûches vont désormais
émailler cette montée en puissance et, principalement, la
situation explosive que connaît le pays avec le mouvement de
rébellion et la médiocrité de l'héritage colonial.
Mais, « ... à ses éléments défavorables, les
premières unités de l'Armée camerounaise ont opposé
la foi, l'enthousiasme, l'esprit d'abnégation, l'effort poussé
jusqu'au sacrifice suprême et le patriotisme... » (Ela Ela 2000 :
64). La montée en puissance se réalise en trois phases.
1- LA PHASE D'ACCÉLÉRATION : DE JANVIER 1960
A
MARS 1961
Elle est marquée par la création des formations
suivantes :
· Le premier bataillon d'infanterie, est composé
des 300 recrues de novembre 1959 et, de la première et la
troisième compagnie en provenance de l'Armée coloniale
française. Le premier bataillon est constitué de quatre
compagnies (1ère, 2è, 3è, 4è). Celles-ci
défileront d'ailleurs le 1er janvier 1960, à
Yaoundé et à Douala, lors de la parade de la fête de
l'indépendance.
· Le deuxième bataillon d'infanterie,
composée de 320 nouvelles recrues et 70 militaires en provenance de
l'Armée coloniale française. Au total, le deuxième
bataillon est composé de trois compagnies (5è, 6è,
7è). Ce bataillon sera aussitôt lancé dans la lutte contre
la guérilla dans le pays Bamiléké dans l'Ouest du pays en
juillet 1960.
· Le troisième bataillon d'infanterie,
composé de 132 militaires en provenance de l'Armée
nigériane en mars 1961. Il faut dire que dans la partie anglophone du
Cameroun, plusieurs officiers ont fait carrière dans les Forces
Armées sous commandement britannique (Ela Ela 2000 : 65). Ceux-ci, au
moment du référendum sanctionnant l'unification des deux
Cameroun, vont être incorporés dans les rangs des Forces
Armées du Cameroun unifié.
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à la sécurité : d'une Armée « de garde »
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· L'escadron blindé en octobre 1960 : c'est la
première unité blindée des Forces Armées
camerounaises
· La compagnie de génie militaire : Dans le cadre
de ses missions extra-militaires, les Forces Armées camerounaises vont
se voir doter une unité spécialisée dans les grands
travaux (construction des garnisons, des routes, des ponts, des
aérodromes, etc.).
· La compagnie d'Etat-major : Celle-ci constitue
l'embryon de l'EtatMajor des Armées camerounaises et qui avait pour
mission de suivre la mise sur pied des Forces Armées camerounaises.
· Les commandements opérationnels de la
Sanaga-Maritime et de l'Ouest du pays. Ces commandements ont été
mis sur pied contre la rébellion Armée qui y sévissait et,
qui menaçait l'intégrité territoriale et l'unité
nationale.
· Le centre d'instruction de Ngaoundéré :
Installé à un moment à Abong-Mbang, celui-ci était
le cadre approprié pour la formation initiale de tous les militaires
camerounais. C'est une région hors des zones touchées par la
rébellion Armée, moins humides que le grand Sud du pays et ainsi
favorable à l'entraînement des jeunes recrues. Les techniques de
combats élémentaires y étaient sous l'encadrement des
militaires français.
Il faut dire que la création de ces formations ne
répondait pas toujours au schéma théorique de mise sur
pied d'une Armée30. Autant certaines unités
élémentaires (compagnie d'Etat-major, escadron blindée,
compagnie des transmissions, etc.) correspondaient au format et moyens du jeune
Etat, autant d'autres ne reflétaient pas la réalité. Alors
qu'un bataillon classique nécessite un effectif de 450 hommes environ
(tous grades
30Les formations d'une Armée classique sont
les suivantes : compagnie, bataillon, régiment, brigade, division, corps
d'Armée (Haenal 1982 : 45).
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
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confondus), le troisième bataillon d'infanterie par
exemple ci-dessus cité n'en a que 132 (Ela Ela 2000 : 65).
2- LA PHASE DE RETOUR AU CALME : DE MARS 1961 AUX
ANNÉES 1967-1970
Cette période est essentiellement
caractérisée par divers aménagement des unités
existantes, la création de quelques unités, la rationalisation et
la reconversion de l'instruction des troupes jusque là tournée
vers la contre-guérilla intensive, la formation des cadres dans les
écoles d'officiers étrangères et plus
particulièrement à l'Ecole Spéciale Militaire de
Saint-Cyr.
Les principaux changements en matière d'Unité
sont les suivantes : - La création du centre d'entraînement et de
perfectionnement de Koutaba en Décembre 1964. Celui-ci est un centre de
recyclage et de perfectionnement des soldats des différentes
unités. On y enseigne particulièrement les techniques de combats
commandos et des sauts en parachute.
- Dans le processus de « camerounisation » des
cadres de l'Armée nationale, le lieutenant-colonel Pierre Semengue est
nommé commandant de l'Armée de Terre camerounaise le
1er avril 1965.
- La transformation de la compagnie d'Etat-Major en bataillon de
commandement et des services en avril 1965.
- La transformation de la compagnie de génie militaire en
bataillon de génie militaire en juillet 1966.
- La création d'un groupe de transport aérien
le 1er juillet 1968. Ce groupe devait servir de transport et
à l'approvisionnement des troupes mais aussi, au déplacement des
autorités camerounaises à l'intérieur du pays très
enclavé à cette époque.
- La création de la compagnie parachutiste le
1er août 1968. C'est l'embryon du bataillon des troupes
aéroportées (BTAP) qui est une unité
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
d'intervention dans le cadre de l'organisation du commandement
opérationnel.
- La création enfin du quatrième bataillon
d'infanterie le 1er juillet 1969.
De fait, ce moment qui marque le début d'une longue
réflexion, les Forces Armées nationales ont 10 ans. Pendant cette
période relativement brève, l'institution militaire camerounaise
a fait un grand bon en avant, malgré les difficultés de parcours.
En effet, nées dans les convulsions de la revendication anti-coloniale,
leurs fonts baptismaux sont les zones troubles, marquées par la
guérilla. Leur baptême est donc de feu et leur adolescence a
été plus que turbulente (Ela Ela 2000 : 68). Mais, le pari semble
gagné dans la mesure où, à partir de 1966, les
opérations de contre-guérilla deviennent progressivement
sporadiques. C'est l'année 1970 qui marque officiellement et
définitivement la fin de la rébellion. L'Armée peut
désormais rentrer dans les casernes, prendre le recul pour
réfléchir sur ses problèmes fondamentaux.
3- LA PHASE PROSPECTIVE : DES 1970
La rébellion ayant été vaincue à
l'intérieur du pays, il s'agit désormais de regarder vers
l'avenir, d'élaborer un concept de défense et une doctrine
d'emploi des Forces, et d'organiser et d'opérer des choix essentiels.
Bref, il s'agit de planifier le futur et de définir une véritable
politique de défense militaire.
Plusieurs textes juridiques caractérisent cette
troisième phase :
· Le décret n°75/700 du 6 juin 1975,
fixant le Règlement de Discipline Générale (RDG) dans les
Forces Armées. Dans son préambule (partie IV - Discipline), il
est dit que, « La discipline est la force principale des Forces
Armées. Les responsabilités exceptionnelles dévolues aux
personnels militaires impliquent qu'elles soient strictes. Dans ce cadre, elle
définit l'obéissance et règle l'exercice de
l'autorité. Elle s'applique à tous, précise à
chacun son devoir et
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à la sécurité : d'une Armée « de garde »
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aide à prévenir les défaillances
à tous les échelons de la hiérarchie. Elle s'exerce dans
la limite des lois que s'est donnée la nation ». Par ailleurs,
l'esprit militaire et de solidarité y est également
affirmé.
· Le décret n°76/289 du 6 juillet 1976, portant
création et organisation du commandement des transmissions et du
chiffre.
· Le décret n°83/389 du 22 août 1983,
portant création d'un EtatMajor des Armées (EMA). L'Etat-Major
des Armées est placé sous l'autorité d'un chef
d'Etat-Major, officier nommé par décret présidentiel.
· Le décret n°83/540 du 05 novembre 1983
portant organisation du Ministère des Forces Armées et du
commandement.
· Le décret n°83/738 du 5 novembre 1983,
portant création et organisation de la Garde Présidentielle (GP).
Après l'avortement de la tentative du coup d'Etat du 06 avril 1984
fomenté par la Garde Républicaine, le Chef de l'Etat avait
créé une nouvelle structure dénommée Garde
Présidentielle (article 1er) avec pour mission :
- La garde, la protection du Palais de la Présidence de
la République et des Résidences Présidentielles ;
- La participation à la protection du Chef de l'Etat, des
membres de sa famille et de ses hôtes ;
- La participation aux escortes et honneurs au Chef de l'Etat et
aux hôtes de marque ;
- La participation aux cérémonies officielles.
· Le décret n°86/057 du 14 Janvier 1986,
portant création du Centre de formation technique des Armées
(CFTA) chargé de la formation, du perfectionnement et du recyclage des
conducteurs de véhicules et autres engins de travaux ou de combats
terrestres, des techniciens et
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spécialistes des matériels, des études
liées à ses missions de formation (article 4).
· Le décret n°86/286 du 05 avril 1986, portant
création et organisation du Corps National des Sapeurs Pompiers.
· Le décret n°92/156 du 17 Juillet 1992,
portant réorganisation du Commandement Militaire Territorial.
· Le décret n°93/212 du 04 août 1993,
portant nouvelle appellation des formations et unités des
Armées.
· Le décret n°93/0940 du 04 septembre 1994,
portant mise sur pied du 1er bataillon de fusiliers marins commandos. Ce
décret met fin à l'existence du Groupement des fusiliers marins
commandos.
· Le décret n°94/183 du 29 septembre 1994,
fixant les conditions de recrutement et d'admission dans les écoles
militaires de formations des officiers. Pour l'essentiel, l'article 2
énumère les différentes filières de recrutement
dans le corps des officiers de l'Armée camerounaise. Il s'agit :
- Du tronc A ou recrutement direct, ouvert aux jeunes
camerounais de moins de 22 ans l'année du concours et titulaires du
baccalauréat de l'enseignement secondaire ou d'un diplôme
équivalent et ayant accompli avec succès une année
d'études supérieures (Bac + 1) ;
- Du tronc B1 ou recrutement interarmées, ouvert aux
anciens sous-officiers titulaires du Baccalauréat ou d'un diplôme
équivalent et âgés de moins de 30 ans l'année du
concours. Ils doivent par ailleurs totaliser au minimum 5 ans de service
effectif sous les drapeaux ;
- Du tronc B2 ou promotion issue du rang, ouvert aux anciens
sous-officiers qui accèdent au corps des officiers par le jeu normal de
l'avancement. Ils doivent avoir au moins 15 ans de
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service, être âgés de moins de 42 ans et
être Adjudant-chef ou Maitre-principal ;
- Du tronc B3 ou recrutement des officiers de réserve
et des diplômés de l'Enseignement Supérieur, ouvert aux
officiers de réserve qui se découvrent une vocation militaire et
demandent à faire carrière dans les Forces Armées ainsi
que, des jeunes Camerounais diplômés de l'Enseignement
Supérieur dans une spécialité utile aux Forces
Armées. Ils doivent être âgés de moins de 25 ans
l'année du concours ;
- Du tronc B4 ou recrutement des médecins,
pharmaciens, vétérinaires et autres spécialistes, ouvert
aux étudiant des facultés de médecine optant pour le
service armé et reconnus aptes pour ce service, dans la limite des
places disponibles. Ils doivent se faire recruter avant l'âge de 22
ans.
· Le décret n°99/015 du 1er
février 1999, portant création du Groupe Polyvalent
d'Intervention de la Gendarmerie Nationale (GPIGN). Semblable au
GIGN31français, le GPIGN est placé sous
l'autorité directe du Secrétaire d'Etat à la
défense chargé de la gendarmerie nationale. Il a pour missions le
maintien et le rétablissement de l'ordre, la lutte contre le grand
banditisme et anti-terroriste. Sa compétence s'étend sur toute
l'étendue du territoire national.
Comme on peut le remarquer, cette phase est celle ou les
autorités civiles et militaires essayent de réglementer divers
domaines militaires (Ela Ela 2000 : 66-71).
31 Groupement d'Intervention de la Gendarmerie
Nationale. C'est une entité du groupement de sécurité et
d'intervention de la gendarmerie nationale française. Il est
organisé et entrainé pour être à même de faire
face aux missions d'arrestation les plus délicates et les plus
périlleuses. Il s'agit en effet d'intervenir dans un milieu difficile
afin de neutraliser les individus dangereux et déterminés et de
préserver la vie des otages dont ils se servent comme bouclier humain.
Voir Dossier Spécial « Les métiers de la Gendarmerie »,
in Armées d'aujourd'hui, n°234, Octobre 1998.
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
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4- LA PHASE DE MODERNISATION ET DE PROFESSIONNALISATION :
LES DECRETS DE 2001 ET DE 2002.
Comme toute institution qui a trouvé sa place, son
rythme et ses normes, les Forces Armées camerounaises ne cessent de
s'ajuster pour s'adapter aux fortes évolutions sociétales et
géostratégiques. En effet, l'histoire prouvant chaque jour qu'une
politique de défense ne saurait être figée parce que le
monde n'étant pas fixe. L'Afrique n'a jamais cessé d'être
soumise à l'engrenage conflictuel dû aux revendications
territoriales, aux crispations identitaires, aux avatars de la
démocratie et à la pauvreté endémique.
Aussi, les progrès technologiques ont-ils un impact
décisif sur l'art de la guerre et l'emploi de l'outil de défense.
L'informatique et ses applications connexes, les nouvelles technologies de
l'information et de la communication révolutionnent sans cesse le
métier militaire et la tactique. La performance des matériels a
atteint un seuil jamais égalé, et le soldat doit être en
mesure de s'en servir efficacement. Il doit apprendre à gagner ses
batailles en même temps qu'il doit penser la guerre, renoncer à la
notion de frontière ou faire abstraction des Etats-Nations actuels pour
défendre des idéaux supranationaux ou des causes humanitaires. En
bref, selon les propos de Jean Guitton, l'homme de guerre du
21ème siècle devra donc être un penseur, capable
de renouveler sa vision des évènements, des êtres, de tout.
Il doit être un guerrier philosophe (Onana Mfégué 2005 :
14). Prenant compte de ces profondes mutations, le Chef de l'Etat a
engagé le 25 Juillet 200132, une vaste réforme de
l'Armée camerounaise pour lui donner une dimension moderne.
32 Voir la liste des décrets en annexes
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
Cette réforme se poursuit par un polissage et
repolissage des textes
réglementaires y relatifs et leur application
graduelle et efficiente. Quatre principes fondamentaux sous-tendent cette
réforme : - La cohérence et la souplesse organisationnelle ;
- La recherche de l'efficacité opérationnelle par
le souci du
contrôle et du renseignement sur le territoire et ses
approches,
ainsi qu'une capacité de réaction rapide en cas de
troubles ; - La professionnalisation et le rajeunissement ;
- La modernisation des équipements.
Ces réformes seront visibles dans les
différents corps de l'Armée camerounaise à savoir
l'Armée de Terre, l'Armée de l'Air, la Marine Nationale, la
Gendarmerie Nationale.
a- L'ARMÉE DE TERRE
Elle a pour mission d'assurer en tout temps, en toutes
circonstances, et contre toutes formes d'agressions : la sécurité
et l'intégrité du territoire national ; le respect des accords
internationaux, des traités et des agréments ; certains services
publics ; la participation aux opérations humanitaires ; le tout sous le
commandement d'un Chef d'Etat-Major. Nous avons comme principales innovations
:
+Trois (03) Régions militaires Interarmées et
dix (10) Secteurs militaires constitués des Unités de combat,
d'intervention, de soutien et spéciales de réserves ;
+Le renforcement structurel de l'Etat-Major de l'Armée de
Terre ; +La création du Bataillon d'Intervention Rapide (BIR) ;
+La combinaison des bataillons d'infanteries motorisés et
le Bataillon d'Intervention Rapide ;
+La mise à jour de l'artillerie des bataillons dans les
Régions ;
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à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
+La présence active des unités spéciales
sur le terrain : le Bataillon
Spécial Amphibie (BSA), le 3ème BIR,
le Bataillon de Troupes
Aéroportées, le 1er BIR, etc. (Nkoa
Atenga 2005 : 20-21).
b- L'ARMÉE DE L'AIR
Elle a pour missions : la surveillance, la protection et la
défense de l'espace aérien ; le soutien et l'appui aux autres
Forces de Défense ; la surveillance et la protection des installations
aéroportuaires en liaison avec le Ministère des transports. En
termes d'innovations liées à la réforme figurent :
+ Le renforcement structurel de l'Etat-Major de
l'Armée de l'Air, la redéfinition des Forces de l'Armée de
l'Air et l'émergence d'une chaîne technique et logistique
cohérente. L'Etat-Major est désormais calqué sur le model
commun aux autres composantes Terre et Mer.
+ Les Forces de l'Armée de l'Air sont aujourd'hui
structurées en trois sous-ensembles qui sont :
- Les Forces Aériennes : composées des
escadrons qui constituent de véritables réserves de feu. Au
total, six escadrons aériens sont crées et
disséminés dans une logique de l'emploi interarmées, sur
le territoire national. A la Première Région Militaire
Interarmées se greffent les 11ème et
12ème escadrons aériens, chargés respectivement
de la chasse et de l'appui, la liaison et l'observation et la reconnaissance.
Les 21ème et 22ème escadrons aériens
spécialisés en transport, assaut et reconnaissance
relèvent de la Deuxième Région Militaire
Interarmées. La Troisième Région Militaire
Interarmées (RMI) regroupe quant à elle, les
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31ème et 32ème escadrons
aériens voués à la chasse, l'appui, la liaison et
l'observation, la reconnaissance ;
- Les Forces terrestre de protection et de combat qui ont
pour missions, entre autres de surveiller et de protéger les
installations aériennes, les points sensibles et de mener des
opérations de type commando. Elles sont articulées autour des
Bataillons des Fusiliers de l'Air implantés sur trois Bases
Aériennes et le Bataillon des Fusiliers Commandos de l'Air
implantés à Bamenda ;
- Les éléments de Soutien et de Formation que
sont les Bases Aériennes, les organismes logistiques et les centres
d'instruction qui contribuent activement aux missions de l'Armée de
l'Air.
· · La troisième innovation majeure
concerne l'émergence d'une chaîne technique dont les Centres de
Révisions et des Visites Techniques chargées de l'entretien et de
la maintenance du 2ème et 3ème
échelon , d'une part, et le Centre de Ravitaillement Technique
chargé de la gestion des matériels aériens (Yakana Guebama
2005 : 22).
c- LA MARINE NATIONALE
Composante des Forces de Défense dont l'emploi
requiert principalement l'utilisation des milieux marins et maritimes, elle a
pour missions fondamentales : La surveillance, la protection et la
défense des espaces maritimes nationaux, fluviaux et lacustres, des
installations essentielles à la vie de la Nation placées à
proximité immédiate du littoral ; la conduite de l'action de
l'Etat en mer en liaison avec les autres administrations ; le soutien des
autres Forces de Défense. Outre ces missions de Défense, la
Marine Nationale est également impliqué dans le service public en
Mer. Elle assure donc à cet effet : l'assistance aux
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populations en difficulté ; la recherche et le
sauvetage des vies en mer ; l'aide humanitaire lors des catastrophes naturelles
; la régulation et le contrôle du trafic maritime ; la police des
pêche dans notre Zone Economique Exclusive (ZEE) ; la lutte contre
l'immigration clandestine et contre tout genre de trafics illicites ; la lutte
contre la piraterie et le terrorisme international.
Ancré dans le Golfe de Guinée, l'espace
maritime camerounais est un lieu de transite par excellence. C'est un lieu
d'activité économique diverse et par conséquence, un lieu
ou la souveraineté du Cameroun doit se manifester par une
présence effective et quotidienne. D'où les innovations parmi
lesquelles :
· · Transfert de l'Etat-Major de la Marine
à Yaoundé ;
· · Activation de la notion de « l'action
de l'Etat en mer » ;
· · Mise sur pied à la Marine de deux
Forces représentant les composantes maritimes et terrestres de la taille
d'une brigade d'infanterie : les Forces de Surface composées de
plusieurs Flottilles remplaçant la seule Flottille de combat et de
surveillance initiale, les Forces de Fusiliers Marins et Palmeurs de Combat
rassemblant la composante terrestre (trois bataillons de Fusiliers Marins) et
la composante Commando : la Compagnie des Palmeurs et Nageurs de Combat
(COPALCO) ;
+ La création et l'extension des éléments
de soutien et de formation ;
· · Extension des domaines de
compétence des Bases Navales par des
éléments opérationnels avancés qui
peuvent être déployés en tant
que de besoin ;
· · Création d'un chantier naval
à Douala ;
· · Activation d'un Atelier Naval dans chaque
Base Navale ;
· · Création de l'Ecole d'Application
des Officiers de la Marine à Douala et de l'Ecole des Plongée
à Issongo ;
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· . Création des Centres d'Industrie Navale de
Spécialité de Douala et de Perfectionnement des Fusiliers Marins
de Man O War BAY. Ces Centres existaient déjà, mais sans acte de
création ;
· . Création du Centre Opérationnel de
Surveillance Côtière pour la Détection de tous les navires
et aéronefs longeant nos côtes (Ngouah N'gally 2005 : 24-25).
d- LA GENDARMERIE NATIONALE
Elle remplit des missions spécifiques. En temps de
paix, elle participe à l'élaboration du cadre de Défense
Opérationnelle du Territoire (DOT). En temps de guerre, elle assure
l'engagement de ses unités mobiles et territoriales, l'exécution
des missions de Défense du territoire national et la protection des
points sensibles, le maintien de l'ordre dans les agglomérations par le
biais de ses unités prévôtales. En sommes, la Gendarmerie
Nationale assure le maintien de l'ordre et le rétablissement de l'ordre
en temps de paix. En temps de guerre, la Gendarmerie Territoriale reste sur
place pour assurer le fonctionnement normal des institutions, sans esprit de
trahison, tandis que la Gendarmerie Mobile rejoint les Forces de 3ème
catégorie au champ de bataille. Les réformes engagées ont
profondément modifié la Gendarmerie aussi bien sur le plan
organisationnel que sur celui de la doctrine d'emploi. Les nouvelles
dispositions ont consacré la naissance des structures adaptées
aux exigences de la mondialisation et permettant au personnel de mieux
évoluer dans son environnement tout en gérant avec
efficacité la sécurité des personnes et des biens. On note
:
· .Dans les services centraux, la mise en place d'une
Division des Affaires Générales, d'une Direction Centrale de
l'Administration et de la logistique, d'un Poste de Commandement
Opérationnel de la Gendarmerie et d'un laboratoire scientifique ;
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+Dans les services extérieurs, les Régions de
Gendarmerie structurées de manière à assurer une
omniprésence territoriale, préservant la caractéristique
majeure de la Gendarmerie ;
+Les Centres Opérationnels de la Gendarmerie (COG)
placés sous les ordres de chaque commandant de Légion. Le COG est
chargé de la gestion des appels de détresse des populations qui
relèvent de sa compétence territoriale ;
+Dans le domaine de la formation, une école à
vocation régionale, spécialisée dans le maintien de
l'ordre a vu le jour à Awae dans la province du Centre, fruit de la
coopération entre la France et le Cameroun ;
+Le niveau de recrutement a été
élevé, avec pour minimum requis est le BEPC pour les
élèves Gendarmes et le Probatoire pour les élèves
sous-officiers ;
+Au niveau de la gestion des personnels, on assiste à un
rajeunissement des effectifs (Mambou Deffo 2005 : 18).
Les activités de cette Armée camerounaise sont
définies par les autorités politiques. Instrument aux mains du
politique, les Forces Armées réalisent la politique
définie par le Chef suprême des Armées33: C'est
la politique de défense.
II- DEFINITION DE LA POLITIQUE DE DEFENSE DU
CAMEROUN
La politique de défense d'un Etat se traduit en Afrique
comme étant l'expression de sa volonté d'être souverain,
s'affirmer, d'agir et de réagir, de vivre et survivre. Elle
définit les objectifs et la ligne de conduite des gouvernants en toutes
circonstances. Ainsi, dans le Livre Blanc sur la défense de la France,
il est noté que « L'objectif premier - Des principes de
33 Le Chef de l'Etat, article 8 alinéas 2 de la
loi constitutionnelle du 18 Janvier 1996.
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la politique de défense - est d'assurer
l'indépendance du pays et la défense des intérêts
vitaux de la Nation (...). A cette fin, il convient de disposer de
capacités autonomes, qui nous permettent à tout moment de nous
joindre à nos alliés, et de préparer activement une
capacité future (...) ».
Dans un environnement international caractérisé
par la multiplicité des menaces, dans une situation de crise mondiale
aggravant des tensions, le Cameroun doit disposer une politique de
défense lui permettant d'assurer sa sécurité, de conserver
son indépendance dans la liberté et de respecter ses engagements
internationaux.
Le Cameroun semble avoir opté, à ce titre, pour
un certain type de comportement (style national) face aux agressions
conventionnelles. Ces comportements reposent sur les doctrines de
sécurité prenant en compte des réactions circonstancielles
aux diverses menaces tant intérieures qu'extérieures (Owona 1985
: 3). Les options fondamentales du pays, une lecture géopolitique de son
environnement avec les vulnérabilités conséquentes,
permettent de saisir la dynamique de la pensée stratégique des
dirigeants du Cameroun.
Le concept de défense du Cameroun résulte de
l'analyse comparée de ces divers paramètres. C'est l'expression
de l'évolution politique sousrégionale et mondiale. Ainsi, parce
qu'aujourd'hui la guerre est totale, c'està-dire, militaire, humaine,
économique, etc. ; parce qu'il nécessaire de sensibiliser et de
motiver l'ensemble de la nation qui, en formant un bloc, doit constituer un
bastion de résistance, à cause d'une incidence financière
lourde, les autorités politiques camerounaises ont opté pour le
concept dit de « Défense populaire ». La politique de
défense est avant tout nationale dans ce sens qu'elle prend appui sur
les contraintes et les réalités propres au Cameroun et refuse, en
principe, tout mimétisme aveugle avec l'étranger. La
défense populaire est un concept à buts et principes globalisant
qui fait appel à toutes les forces vives de la nation (Ela Ela 2000 :
146).
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à la sécurité : d'une Armée « de garde »
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1) UNE POLITIQUE DE DEFENSE BASÉE SUR LA DEFENSE
POPULAIRE
Le concept de « Défense populaire » renvoie
à l'énonciation d'un principe et se traduit par un choix
stratégique spécifique.
a) LE PRINCIPE
Le principe est celui de la République en armes, dont
toutes les Forces vives, ressources et énergies sont engagées
dans la défense. En reprenant Jean Jaurès dans Armée
Nouvelle (1910), le peuple organisé constitue la nation
armée, c'est-à-dire, une véritable Armée populaire
face au péril national. La nation armée signifie
nécessairement la nation juste, elle assure la défense et, en
même temps oeuvre pour la paix et le désarmement. Cependant,
l'esprit corporatif de l'Armée conduit au militarisme ; l'Armée
permanente est une Armée de caste et de caserne, une
société « à part ». Il faut donc rapprocher la
Nation et l'Armée, arracher cette dernière à la
réaction, ne pas en faire un instrument de maintien de l'ordre ni
d'expédition. La démocratie doit transformer l'Armée en
réalisant l'amalgame des troupes de ligne et des milices urbaines. Le
régime républicain implique également que les questions
militaires ne soient pas « top secret », et que l'opinion soit
informée.
Sans verser dans le « tout militaire », il
apparaît que la défense populaire vue du Cameroun est l'expression
de la « capacité de la nation à mobiliser toutes les
énergies susceptibles d'assurer la sécurité du pays et la
sauvegarde de nos conquêtes dans la voie du progrès » (Biya
1983 : 177- 178). Elle est la combinaison des efforts et des actions
menées concurremment par les Forces régulières et la
population, armée ou non. C'est également la participation de
tout un peuple à l'effort de défense en
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vue de s'opposer par tous les moyens à l'invasion du
sanctuaire national comme le prévoit le préambule de la loi
constitutionnelle de 199634 .
Plus prosaïquement et de manière
schématique, la défense populaire est la réaction du
paysan, de l'ingénieur, de l'instituteur, du commerçant, du
marabout ou du pasteur qui, sans trop maugréer, donne sa vie ou celle
des ses enfants pour défendre son champ, son laboratoire, son
école, son négoce, son minaret ou son clocher. C'est la
réaction du citoyen qui, en y mettant toute son ardeur, est prêt
à se faire tuer pour défendre, contre tout agresseur ou un
envahisseur, sa patrie en danger (Ela Ela 2000 : 146-147).
b) LE CHOIX STRATEGIQUE
La défense populaire, pour être en accord avec
l'idée démocratique, doit être défensive et
dissuasive. Une politique de paix impose d'avoir un appareil
défensif si efficace que toute pensée d'agression soit
découragée chez les plus insolents et les plus rapaces. Ahmadou
Ahidjo précise à ce propos que « la défense
populaire peut être d'un grand secours, en agissant au-delà de nos
frontières avant tout déclenchement, si l'adversaire a la
latitude de trouver en face de lui une volonté sans faille, ardente et
décidée à ne pas céder, une défense
populaire capable de lui imposer de telles épreuves qu'elle l'obligerait
à constater qu'aucun succès immédiat ne justifie de sa
part la réalisation de sa menace ». (Ela Ela 2000 : 147).
Suscitées par la haine de l'envahisseur, les forces morales
confèrent à la défensive sa force décisive.
L'Armée ici joue un rôle d'avant-garde, encadrant les masses
populaires contre l'ennemi et, l'expérience atteste aujourd'hui, suivant
les enseignements passés, qu'on ne vient jamais à bout d'une
nation debout. Dans ce cas, Mao Zedong déclare « Quelle est la
muraille vraiment indestructible ? Ce sont les masses, les millions et les
millions d'hommes, qui de tout leur coeur, de toutes leurs pensées,
soutiennent la révolution » (Moreau Defarges 1992 : 46).
34 Tous les citoyens contribuent à la
défense de la patrie
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Puissance militaire incontestable, la défense populaire
est un concept composé de deux éléments : le pays et les
troupes. Le pays constituant la puissance absolue, l'Armée la puissance
relative. Dans ce concept, dont le premier besoin réside dans l'amour de
la patrie, la puissance militaire de l'Etat ne réside pas dans la seule
Armée ni dans le pays pris isolément, mais dans la réunion
des deux (Ela Ela 2000 : 147).
2) LES BASES POLITIQUES ET JURIDIQUES
Le concept de défense populaire est l'émanation
de la politique déclaratoire des autorités politiques
camerounaises et fait également l'objet de textes juridiques.
a) LE DISCOURS POLITIQUE
L'accession à l'indépendance du Cameroun s'est
faite de manière chaotique et plus particulièrement pendant la
première moitié des années 1960. La lutte contre la
guérilla empêchait toute réflexion stratégique de
défense de l'unité nationale et la préservation de la paix
civile intérieure.
Une fois que la rébellion a été
réduite, et que les Forces ont regagné les casernes, les
autorités politiques pouvaient désormais réfléchir
à la défense globale du pays. Il fallait prioritairement axer son
effort sur la construction de l'unité nationale et la
préservation de la paix civile intérieure.
Il faut également noter que la guerre du Biafra a
favorisé le développement de cette pensée
stratégique dans la mesure où, pour la première fois,
l'intégrité du territoire national était en danger ; les
troupes du Colonel Ojukwu, chef de la sécession biafraise,
mèneront des incursions au Cameroun à la recherche d'une base
arrière.
Bien qu'énoncé de façon différente
depuis l'indépendance du pays, le concept camerounais de défense
a véritablement été défini lors de
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
l'important discours prononcé le 15 août 1970
devant les élèves officiers de la promotion du
10ème anniversaire de l'indépendance par le
Président Ahmadou Ahidjo (Owono 1985 : 9). Il déclare, en effet,
que : « Notre défense doit être nationale,
c'est-à-dire, l'affaire de tous, l'affaire du peuple tout entier. Les
menaces auxquelles nous pouvons être emmenés à faire face
exigent des moyens que seule la défense populaire peut fournir. Les
Armées ne suffisent pas pour sauver une nation, tandis que qu'une nation
de défense par le peuple est invincible ». Cette conception
traduit bien un choix, même si elle n'est pas originale en soi puisque
d'autres, parmi lesquels les idéologues et les stratèges chinois,
l'avaient déjà énoncé auparavant : le choix est
celui d'une défense de l'Etat assurée par l'ensemble des
citoyens, à quelque niveau qu'ils se trouvent. Il s'agit de «
créer pour l'envahisseur, un éventuel guêpier,
inévitable, inexorable, le mettant ici et là en état
d'infériorité à exploiter par nos Forces Armées,
relativement critique par le nombre, mais de la meilleure qualité, pour
l'attaque, mobiles, agressives et déterminées » (Ela
Ela 2000 :148). Une telle manoeuvre aurait l'avantage d'empêcher toute
conquête territoriale décisive ou permettre un gage territorial
sans égal avec les dommages subis par l'ennemi.
Sadou Daoudou, alors Ministre des Forces Armées,
déclarait : « le Cameroun entend maintenir les relations de
paix avec toutes les nations du monde, et de bon voisinage avec tous les pays
qui l'entourent... Mais comme... il ne suffit pas de vouloir la paix pour
l'obtenir, il est du devoir de tout Etat de se doter des Forces Armées
bien équipées et bien entrainées... Toutefois, en raison
de ses faibles ressources, le Cameroun ne disposera pas avant longtemps des
Forces capables d'être dissuasives par leurs effectifs et leurs
équipements. Ses Forces régulières ne pourront jamais,
d'ailleurs, dépasser un seuil au-delà duquel leur poids sur les
ressources du pays constituerait une gêne ou un frein à son
développement. C'est pourquoi sa défense ne doit pas être
l'apanage des seuls militaires, mais
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à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
l'affaire de tous... Elle doit être populaire... Il
est nécessaire que tous les citoyens, hommes et femmes, comprennent que
la défense du pays est leur affaire et qu'ils doivent y participer
activement » (Ela Ela 2000 :149).
Cette vision stratégique est observée de
manière continue par le successeur d'Ahidjo, Monsieur Paul Biya.
Celui-ci déclare, en effet, que la défense populaire est
« la symbiose entre les Forces Armées et la Nation, (...) et
représente la résistance morale et civique de la nation
»35. Par ailleurs, lors de la célébration du
40ème anniversaire des Forces Armées camerounaises,
les 29, 30 et 31 mars 2000, le Président Paul BIYA déclarait que
« En effet, notre Armée, véritable ciment de notre
unité nationale, a toujours été, et demeure le rempart de
nos institutions et de notre souveraineté » (Ela Ela 2000 :
149).
Figure N° 5: Le
Chef Supérieur des Armées, le Chef de l'Etat, son
Excellence Paul BIYA couronné par les
élèves officier de l'EMIA à leur sortie.
35 Paul BIYA, Messages du Renouveau, Tome I, «
Triomphe de la promotion Vigilance de l'EMIA », in Frères d'armes
n°69, Juillet-Août 1974, p.24.
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010

Sources : Magazine des
Forces Armées camerounaises, Honneur et Fidélité,
Numéro Spécial du 20 Mai 2010, Page 1.
Propos qui consacrent le caractère populaire de la
défense camerounaise et qui place l'Armée comme entité
fédératrice de la République.
b) LES TEXTES JURIDIQUES
Une fois la politique de défense formalisée et
en tenant compte des enjeux internes et externes, il fallait qu'elle soit
matérialisée dans des textes qui servent de canevas, de guide de
toute action.
Les textes juridiques viennent asseoir la politique
déclaratoire des autorités politiques camerounaises. Il s'agit
:
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à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
-De la constitution camerounaise du 18 Janvier 1996 qui
stipule in fine dans son préambule que « tous les citoyens
contribuent à la défense de la patrie » ;
-Les articles 3, 5, 17 et 19 de l'ordonnance n°59/57 du
11 novembre 1959 portant création des Forces Armées camerounaises
et organisation générale de la défense à travers
les notions de « mobilisation générales », de «
réquisition des personnes », de « service national » etc.
;
-La loi n°67/LF/9 du 12 Juin 1967 portant organisation
générale de la défense, dans ses articles 2, 5, 12,
consacrant le caractère national et populaire de la défense de la
patrie ;
-L'article 10 de la loi n°73/12 du 7 décembre 1973
portant organisation générale de protection civile disposant que
« les populations peuvent être astreintes par réquisition
à des travaux de protection civile » ;
-Le préambule (partie II - Défense) du
décret n°75/700 du 6 novembre 1975 portant règlement de
discipline générale dans les Forces Armées dispose que
« la nation toute entière participe à effort de
défense en vue de : dissuader tout agresseur éventuel, s'opposer
par tous les moyens, soit à l'invasion du territoire national, soit aux
manoeuvres subversives menées de l'intérieur ou de
l'extérieur » ;
-La loi n°78/22 du 29 décembre 1978 portant
création d'u corps d'officiers de réserve des Forces
Armées. L'article 4 dispose que « Lors de leur présence sous
les drapeaux, les officiers de réserve assurent avec les officiers
d'active le commandement, l'encadrement ou le fonctionnement des unités
et formations des Forces Armées et des services rattachés »
(Ela Ela 2000 : 149-150).
Figure N° 6: Le
Chef Supérieur des Armées et Officiers
Généraux
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
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vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010

Source : Magazine
L'Année du Président 2010, Nouvelle Espérance, Page
8.
Une fois définie par le Chef Suprême des
Armées, la politique de défense est mise en oeuvre par le
Secrétariat permanent à la Défense Nationale, la
Délégation Générale à la Sûreté
Nationale (DGSN), la Délégation Générale à
la Recherche Extérieure (DGRE) et par le Ministère de la
Défense (MINDEF).
III- LA MISE EN OEUVRE DE LA POLITIQUE DE DEFENSE
POPULAIRE DU CAMEROUN
La politique de défense populaire est mise en oeuvre
par le Ministère de la Défense avec pour figure de proue le
Ministre de la Défense, le Secrétaire d'Etat auprès du
Ministre de la Défense, chargé de la Gendarmerie, le Chef
d'Etat-Major des Armées et le Secrétaire Général du
Ministère de la Défense.
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à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
Figure N°7 : La haute
hiérarchie du Ministère de la Défense


Source : Magazine des Forces
Armées camerounaises, Honneur et Fidélité, Numéro
Spécial du 20 Mai 2010, Page 4.
La défense populaire s'est imposée au Cameroun en
raison d'une part, de la situation trouble d'après indépendance
qui menaçait l'unité
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nationale, d'autre part, des moyens financiers limités
dont dispose le pays pour l'effort de défense nationale. Impliquer
toutes les Forces vives de la nation devenait donc un impératif absolu
pour la défense de l'intégrité territoriale, des
populations et des biens. Par ailleurs, la diversité
géographique, la diversité humaine du Cameroun ont fortement
pesé dans ce sens.
S'il est vrai que le concept stratégique du Cameroun
doit être revu et adapté aux nouvelles évolutions de la
société mondiale, il n'en demeure pas moins que, dans ce domaine
comme ailleurs, aucune vérité n'est définitive. Il est
indispensable de se remettre perpétuellement en question et continuer
inlassablement des recherches devant conduire à l'adaptation de la
politique de défense camerounaise au nouveau contexte
insécuritaire relatif aux nouvelles formes de menaces, ayant
évolué des guerres classiques aux guerres asymétriques.
D'où le dynamisme des composantes des Forces Armées camerounaises
et leurs missions.
1) LES COMPOSANTES DES FORCES ARMÉES
CAMEROUNAISES ET LEURS MISSIONS
Contrairement à ce que le regard spontané
pourrait laisser croire, les structures de mise en oeuvre de la politique de
défense du Cameroun sont extrêmement diverses et ont
évolué par la forces des choses de mêmes que leurs
missions.
a) LES COMPOSANTES DES FORCES ARMÉES
CAMEROUNAISES
Le titre V - Définition des moyens de défense -
de la loi n°67/LF/9 du 12 juin 1967 portant organisation
générale de la défense stipule que les moyens de la
défense comprennent :
1. Les Forces régulières, qui sont des
éléments régulièrement engagés, ayant un
statut analogue à celui de la fonction publique. Ce sont en fait des
fonctionnaires en armes ;
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2. Les Forces supplétives, sont des
éléments civils armés, organisé en unités et
employés à plein temps pour les missions de défense.
Cependant, les Forces supplétives sont temporaires, mises sur pied pour
les besoins d'une cause et leur durée dépend de celle-ci. Elles
sont normalement rattachées pour encadrement, instruction et
administration à une force régulière ;
3. Les Forces auxiliaires, qui sont des éléments
civils armés qui ne sont pas employés en plein temps pour les
missions de défense. D'après l'article 22 de cette loi, «
...Les conditions de recrutement, les missions, l'organisation,
l'administration, la tutelle, les modalités d'emploi des Forces
supplétives et auxiliaires, sont fixées par décret
». L'occasion ne s'étant jamais présentée, le
décret d'application indiqué in fine dans cet article
n'existe donc pas. Pour ce qui est des Forces régulières,
l'article 21 de la loi de
n°67/LF/9 du 12 juin 1967 portant organisation
générale de la défense
dispose que les Forces régulières comprennent :
· · La Gendarmerie Nationale ;
· · L'Armée de Terre ;
· · La Marine Nationale ;
· · L'Armée de l'Air ;
· · Les Polices des Etats
Fédérés devenues aujourd'hui la Police Nationale.
Il convient d'y ajouter le Corps National des Sapeurs
Pompiers, créé le 5 avril 1986 par le décret
n°86/286, portant création et organisation de cette force.
Ainsi énumérées, les Forces
régulières se subdivisent en trois catégories :
- Les Forces de première catégorie sont
formées par la Gendarmerie territoriale, la Police et, les Forces
supplétives et auxiliaires. Ces Forces, placées sous
l'autorité des chefs d'unités administratives,
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mènent une action dissuasive dans le cadre du maintien de
l'ordre et de la défense civile ;
- Les Forces de deuxième catégorie sont
constituées par les unités de la Gendarmerie mobile et des
Groupements mobiles d'intervention de la police qui agissent sur
réquisition des autorités pour le maintien de l'ordre
renforcé ;
- Les Forces de troisième catégorie sont
formées de l'ensemble des formations militaires opérationnelles
:
· Armée de Terre ;
· Marine Nationale ;
· Armée de l'Air ;
· Gendarmerie Nationale ;
· Corps Nationale des Sapeurs Pompiers.
Ces formations ne sont sollicitées
qu'exceptionnellement et principalement en cas de débordement des Forces
de première et deuxième catégories. Les formations
militaires sont mises en mouvement sur réquisition des autorités
compétentes.
D'après le décret n°2001/178 du 25 juillet
2001 portant organisation générale de la défense et des
Etats-Majors centraux en son article 1er, les Forces de
Défense placées sous l'autorité du Ministère
chargé de la Défense comprennent :
- Les Forces de la Gendarmerie Nationale ;
- Les Forces de l'Armée de Terre ;
- Les Forces de l'Armée de l'Air ;
- Les Forces de la Marine Nationale.
La volonté de modernisation et de professionnalisation
de cette réforme a fait de la Police Nationale une force civile sous
l'autorité de la Délégation Générale de la
Sûreté Nationale (DGSN) et du Corps National des Sapeurs Pompiers
une formation militaire interarmées spécifique de
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protection civile placée sous l'autorité directe
du Ministre de la Défense et mis pour emploi auprès du Ministre
chargé de l'administration territoriale et de la
décentralisation.
b) LEURS MISSIONS
Garantes de la sécurité du pays, les Forces
Armées, par leur existence, par leur nature et leur posture,
témoignent de la volonté de défense de la nation. Elles
contribuent par leur action à la mise en oeuvre de la politique de
défense militaire du Cameroun.
Organisées, équipés,
entraînées pour faire face à toutes les menaces directes et
indirectes, elles doivent acquérir les capacités
opérationnelles et logistiques nécessaires à
l'exécution de leurs missions.
Aux termes de l'article premier de la loi n°67/LF/9 du 12
juin 1967 portant organisation générale de la défense, la
défense du Cameroun a pour objet d'assurer en tout temps, en toutes
circonstances et contre toutes les formes d'agression, la
sécurité et l'intégrité de l'Etat. Elle pourvoie au
respect des alliances, traités et accords internationaux. Lesdites
missions ont un caractère permanent, dissuasif et global (Jacquet 1995 :
53). La défense nationale revêt donc un aspect interne et un
aspect externe.
Comme missions internes, on peut évoquer :
1. Le maintien et le rétablissement de l'ordre
public et les opérations de guerres : Les Forces de première
et de deuxième catégorie ont pour mission prioritaire la
défense des institutions que le peuple camerounais s'est librement
donné, en vue de réaliser non seulement son unité
nationale, mais aussi sa prospérité, son rayonnement. Elles
doivent permettre au gouvernement de disposer en permanence de la
maîtrise de ses décisions. Certes, le Cameroun dispose des Forces
spécialisées dans le maintien de l'ordre en l'occurrence, la
Gendarmerie Nationale et la Police Nationale, mais il n'exclut pas la
possibilité de faire appel aux Forces de troisième
catégorie pour cette
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mission. De même, les Forces de première et de
deuxième catégorie sont équipées et
organisées pour participer aux opérations de guerre. Les
autorités du pays peuvent donc faire donc appel à l'ensemble de
ses Forces soit pour le maintien et le rétablissement de l'ordre public,
soit pour les opérations de guerre.
2. La cohésion nationale : la
diversité linguistique, ethnique et culturelle de la population
camerounaise est à la fois, une grande richesse et une source
potentielle de désunion et de désintégration de l'Etat
nouvellement crée. Il importe donc que la cohésion nationale soit
sans cesse consolidée et, au besoin, défendue par tous les
moyens. Cette cohésion se manifeste par le rassemblement en leur sein
des éléments de toutes les tribus grâce à un
système de recrutement par département et en proportion de
chiffre de sa population, ce qui a fait dire au Président Paul Biya lors
du 40ème anniversaire des Forces Armées, les 29, 30 et
31 mars 2000, que « ...notre Armée, véritable ciment de
notre unité nationale... »36 ; par le comportement
des « hommes en tenue » à l'endroit des populations
à travers la formation civique et morale de qualité qu'ils
offrent aux citoyens, à travers la sensibilisation des autorités
civiles et les populations aux problèmes de Défense.
3. La participation à l'encadrement de l'office
national de participation au développement : les Forces
Armées participent à l'encadrement de jeunes et à leur
formation aux techniques agropastorales à même de permettre leur
insertion dans le circuit de production notamment dans l'agriculture,
l'élevage, l'artisanat, l'industrie, les mines et énergies, les
activités culturelles et artistiques.
36« 40ans des Forces Armées camerounaises dans
l'honneur et la fidélité » in Cameroun Tribune,
n°7071/3360, vendredi 31 mars 2000.
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
4. La participation au développement
économique et social : forte d'un potentiel intellectuel, les
Forces Armées camerounaises réalisent des infrastructures
d'intérêts généraux (routes, ponts, terrains
d'avions, constructions diverses, etc.) à l'instar du génie
militaire ; les transports aériens et navals pour desservir les
régions enclavées ; la santé et plus
particulièrement l'hygiène, la prophylaxie et les soins aux
malades dans les zones dépourvues d'infrastructures civiles, les
évacuations sanitaires ; l'éducation notamment la prise en charge
des écoles primaires francophones dans les provinces anglophones ; la
production agropastorale, qui, pour le moment est encore au stade
expérimental (Ela Ela 2000 : 199-201).
Comme missions à caractère externes, elles
assurent : la défense de l'intégrité du territoire
national et le maintien de la paix internationale. Autant la République
du Cameroun prône une politique de paix, de non ingérence, de non
agression, de relations de bon voisinage avec les Etats limitrophes et de
dialogue avec tous les pays de la communauté internationale, autant elle
est jalouse de son indépendance et de l'intégrité de son
territoire. D'une manière générale, les missions
dévolues aux Forces Armées visent à assurer en tout temps,
la sécurité et l'indépendance de l'Etat camerounais en
veillant au maintien et, le cas échéant, au rétablissement
de l'ordre public, en participant activement au développement
économique, social et culturel du pays, ainsi qu'à l'encadrement
de l'office national de participation au développement. Aussi, le
Cameroun fournit des contingents lors des opérations de maintien de la
paix à l'instar du Cambodge.
Tableau 1: Le Cameroun et
les Opérations de Maintien de la Paix (OMP) : Les missions
passées
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
Année de la mission
|
Désignation de la Mission
|
Nombre de
participants
|
Fonctions occupées
|
Observations
|
1961
|
ONUC : organisation des Nations Unies
au Zaïre
|
Quelques militaires
|
|
|
Juin 1992- Juillet 1994
|
Mission des Nations Unies au Cambodge
|
28
|
observateur militaire
|
01 mort en
mission (NDI NCHO Abraham)
|
2004-2008
MONUC : mission des Nations Unies au Congo (RD Congo)
|
12
|
observateur militaire
|
06 officiers féminins
|
03
|
Officier d'opérations aériennes
|
|
2005-2009
|
MINUAD,
former MUA
Soudan, Darfour
|
90
|
observateur militaire
|
01 officier
féminin (NGA OWONA Philomène)
|
2005-2009
|
ONUCI-Côte d'ivoire
|
01
|
conseiller
militaire du Président de la Commission de l'UA
|
|
Sources : archives du
Ministère de la Défense, 2010.
Tableau 2: Le Cameroun et
les OMP : les missions en cours
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
Année de la mission
|
Désignation de la mission
|
Nombre de
participants
|
Fonctions occupées
|
Observations
|
2009-2010
|
MONUC : mission des Nations Unies au Congo (RD Congo)
|
05
|
observateur militaire
|
02 officiers féminins (BINDELE Isabelle
Sylvie,
ABOUI Véronique)
|
2009-2010 MINUAD- Soudan, Darfour
|
05
|
observateur militaire
|
|
03
|
Officiers d'EtatMajor
|
01
|
Geomatic Analysis Officer
|
2007-2010
|
ONUCI-Côte d'ivoire
|
01
|
conseiller militaire du Président de la Commission
de l'UA
|
|
TOTAL
|
03 missions
|
14
|
04
|
02
|
Source : Archives du
Ministère de la Défense, 2010.
En 2007, le Cameroun avait été
présélectionné par le Conseil de Paix et de
Sécurité de l'Union Africain pour déployer un bataillon
d'infanterie au Darfour. Une mission dite HROTAT avait été
envoyée en mission au Cameroun pour mesurer le niveau de
préparation de ce bataillon et d'apprécier la conformité
des matériels à déployer par rapport aux standards
onusiens. La mission avait alors conclu que le Cameroun n'était pas apte
à la qualité de pays contributeur de troupes parce qu'il ne
répondait à aucune norme en vigueur et n'avait pas grande
connaissance des procédures de location et/ou d'acquisition de
matériels. Depuis lors, avec le concours des Etats-Unis
d'Amérique, le pays a commencé, dans le cadre du programme ACOTA,
un programme de formation de soldats de la paix. Le premier bataillon a
été formé l'année dernière.
Il y a donc lieu de :
· Continuer la formation des personnels ;
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· Acquérir du matériel adapté aux
usages du maintien de la paix ;
· S'informer des procédures et standards en vigueur
;
· Déployer des troupes entraînées et
motivées.
2) LA FORMATION ET L'ENTRAINEMENT DES HOMMES
L'efficacité et la pérennité d'un
système de défense passe par la formation et l'entraînement
de son « système d'homme ». Cette hypothèse d'ordre
générale se vérifie davantage dans le cas d'une jeune
Armée, dont la valeur et le rayonnement dépendent essentiellement
de la discipline et de l'efficacité. L'organisation doit être
adaptée aux réalités, les objectifs doivent être
clairement définis, la volonté des autorités politiques et
militaires clairement démontrée, de même que la
préservation du moral des hommes et le culte de la compétence
technique. Cet enseignement est traduit en réalité au Cameroun
à travers la création des différentes écoles
militaires avec la dernière née qui est l'école de
formation des Sousofficiers et dont les résultats du premier concours
restent attendus. Ces écoles ont été regroupées
dès Juillet 1976, au sein du Commandement des Ecoles et Centres
d'Instructions (COMECI), devenu depuis les réformes de 2001 le
Commandement des Ecoles et Centres d'Instructions Interarmées (COMECIIA)
placé sous l'autorité d'un officier, nommé par
décret du Président de la République. Le COMECIIA relevant
de l'autorité directe du Chef d'Etat-Major des Armées, il assure
:
- La formation initiale et la formation continue du personnel
militaire ; - La spécialisation et le perfectionnement des officiers
;
- L'enseignement militaire supérieur
préparatoire, du premier et deuxième degré (article 24 du
décret n°2001/178 du 25 Juillet portant organisation
générale de la défense et des Etats-Majors Centraux).
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à la sécurité : d'une Armée « de garde »
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a) LA FORMATION
Le COMECIIA chargé de la formation comprend :
- Le secrétariat du commandement des écoles ;
- Le bureau de la traduction ;
- L'Etat-Major ;
- L'école de la logistique ;
- Les centres d'instruction des recrues ;
- Le centre d'instruction des élèves
Sous-Officiers ;
- L'école Militaire Interarmées.
Le COMECIIA dispose, pour mener à bien ses missions de
plusieurs écoles et centres d'instructions à savoir :
· Le Centre d'Instruction des Forces Armées
Nationales de Ngaoundéré (CIFAN) pour la formation de base des
soldats en milieu sahélien ;
· Le Centre de Perfectionnement et d'Entraînement des
Forces Armées de Ngaoundal (CPEFAN) ;
· Le Centre d'Instruction Spécial des
Armées de Yaoundé (CISA) pour les spécialités non
combattantes (électricité, maçonnerie, plomberie, soudure,
infirmerie, cuisine, etc.) ;
· Le Centre de Recyclage des Forces Armées de
Koutaba pour l'entraînement des parachutistes ;
· Le Centre de Formation Technique des Armées de
Yaoundé (CFTA) pour les spécialités combattantes ;
· Le Centre d'Instruction des Forces Armées de Djoum
pour la formation de base des soldats en milieu équatorial ;
· La Compagnie d'Instruction des Transmissions ;
· L'Ecole Militaire Interarmes (EMIA) pour la formation des
officiers ;
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
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· L'Ecole des Sous-Officiers d'Active de Sangmelima (ENSOA)
;
· L'Ecole de Gendarmerie d'Awae formant les gendarmes
d'intervention et de protection de la sous-région ;
· L'Ecole de Pilotage de Garoua formant les cadres
africains de l'Armée de l'Air ;
· Le Cours Supérieur Interarmées de
Défense (CSID) formant les Officiers Supérieurs.
La formation des militaires camerounais se déroule sur
plusieurs phases. Une formation commune de base à tous les soldats et
celle plus spécifique des différentes spécialités
techniques des différentes Armées. La formation des officiers se
fait à l'Ecole Militaire Interarmées, à l'Ecole
d'Etat-Major et au Cours Supérieur Interarmées de
Défense.
Pour la formation commune de base, elle est assurée
dès le mois de novembre 1959, année de mise en place des premiers
éléments d'infanterie de l'Armée camerounais par un Centre
d'Instruction sis à Koutaba, implanté aujourd'hui à
Ngaoundéré. Il s'agit d'une filière unique qui doit
assurer l'homogénéité et l'uniformité de la
formation de base en même temps que consolider un esprit de corps au sein
de la troupe, par l'appartenance aux mêmes classes d'incorporation et
d'instruction.
La durée de la formation des recrues est d'environ
neuf mois. Cette période est celle ou les jeunes soldats doivent
s'aguerrir, entretenir et affermir leurs qualités. Une formation
militaire efficace exige avant tout des hommes possédant, au plus haut
niveau, les qualités morales et intellectuelles correspondant aux nobles
vertus militaires : le sens de la discipline, le courage d'entreprendre, la
volonté hardie de vaincre, le sens des responsabilités,
l'obéissance et l'abnégation pouvant aller jusqu'au sacrifice
suprême (Ela Ela 2000 : 211).
Dans la communauté nationale, le militaire est un
citoyen à part entière. A ce titre, il est, en tant qu'agent de
l'Etat, un rouage indispensable au fonctionnement du grand service public
qu'est l'institution militaire. Il
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
convient, dès lors, de lui donner la formation civique
qui s'impose, afin de lui fournir des informations qui lui seront
nécessaires pour participer activement et spontanément à
l'oeuvre commune de construction nationale. Ce n'est qu'après avoir
reçu cette instruction solide de base que les recrues rejoignent leurs
unités pour s'imprégner de leurs missions spécifiques.
Pour la formation des sous-officiers, sera crée en
1961 une école des gradés de Buéa chargée de former
les caporaux et caporaux-chefs. Elle sera tranférée le
1er janvier 1965 à Ngaoundal pour devenir le Centre de
Perfectionnement et d'entraînement des Forces Armées Nationales
(CPEFAN) chargé :
- Du recyclage et du perfectionnement des unités
élémentaires sur le plan tactique et sportif ;
- De la formation des gradés au service
général ;
- De la formation des sous-officiers au service
général jusqu'au Brevet d'Armes de second degré (BA2) ;
- Du « dégraissage » des élèves
officiers avant leur intégration à l'EMIA.
Tandis que le CPEFAN organise les Certificats d'Aptitudes de
premier, second et troisième degrés (CAT1, CAT2, CAT3) et, les
Brevets d'Armes de premier et second degré (BA1, BA2) du service
général et, notamment des fantassins, le CISA, le CIT et le CFTA
organisent les CAT et les Brevets de spécialités de premier et
second degré (BS1, BS2) dans les spécialités
spécifiques de chaque arme (transmissions, blindés, artillerie,
etc.) et autres activités non combattantes : comptables deniers et
matières, mécaniciens auto-engins blindés, informatique,
etc.
La création de l'ENSOA va permettre d'ouvrir la «
maison mère des sous-officiers » à l'instar de
l'école des sous-officiers de Saint-Maixent en France. La mise sur pied
progressive de cette école est d'une grande importance dans la mesure
où, ce sont les sous-officiers qui forment la « cheville
ouvrière » des Forces Armées camerounaises. Il faut
néanmoins
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
noter que la formation de certains sous-officiers camerounais
dans les spécialités très techniques est effectuée
à l'étranger et particulièrement dans les écoles
françaises (Transmissions, Génie militaire, Musique etc.) (Ela
Ela 2000 : 212).
La formation des officiers enfin est assurée par
l'EMIA. Créée en 1959 et inaugurée le 18 Janvier 1961 sous
l'appellation d'Ecole Militaire Interarmées du Cameroun (EMIAC),
l'histoire de l'école interarmées est intimement liée
à l'histoire militaire du Cameroun. Sa mission est de mettre à la
disposition de la Nation, les officiers qu'exige son service. Elle a pour coeur
de métier, « la formation au commandement ».
Ecole de discipline, d'énergie et de caractère,
l'EMIA forge des officiers, c'est-à-dire des cadres de haut niveau
chargés de former, d'encadrer et capables de commander et de conduire
leurs unités au combat, quelque soit sa nature. Grande école du
commandement, elle met en oeuvre une formation de haut niveau dans tous les
domaines, académique, militaire et humain.
L'enseignement dispensé à l'EMIA,
finalisé sur le métier de chef militaire couvre la période
de recrutement au premier poste en unité, généralement
comme chef de section de combat. Elle dure trois ans. Après une
année probatoire dans les centres d'instruction à
l'extérieur de Yaoundé notamment à
Ngaoundéré, Djoum, Ngaoundal et Koutaba ou les
élèves officiers reçoivent une instruction physique et
morale, tactique et technique jusqu'au niveau de chef de groupe, la formation
du chef de section de combat débute à l'EMIA, couvrant une
durée de deux années.
Cette année probatoire permet aux futurs officiers
d'acquérir tous les réflexes et techniques militaires de base et
de s'endurcir physiquement en acquérant rusticité,
résistance et endurance. Elle sert aussi de constat initial et permet la
découverte concrète des conditions de vie de base,
c'est-à-dire celle du soldat. Cette formation est
complétée par l'acquisition du Brevet
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
de parachutiste et du permis de conduire pour véhicule
léger et pour poids lourd.
Ainsi formée et conditionnée, l'Elève
Officier d'Active (EOA) sera amené, à l'EMIA, à
acquérir la technique et la pratique nécessaire au commandement
d'une section d'infanterie. Il y découvrira aussi les grandeurs et les
servitudes du métier, l'éthique de l'officier et du militaire
tout court : force morale, discipline, esprit de sacrifice,
disponibilité et désintéressement au service de la
nation.
L'enseignement dispensé aux élèves
officiers, mis en oeuvre par un corps professoral de haut niveau, vise à
leur donner les connaissances nécessaires à l'exercice de leur
métier et une ouverture sur le monde, avec le souci constant de
maintenir l'équilibre entre la pensée et l'action. Cet
enseignement porte essentiellement sur l'environnement dans lequel s'exerceront
leurs actions futures, mais aussi, sur les règles du métier
militaire. Il leur apporte un bagage de base et ébauche une
spécialisation ultérieure.
L'instruction militaire de base très solide et
pratique, s'appuie sur les qualités morales et intellectuelles
indispensables aux jeunes officiers appelés à être des
véritables éducateurs et entraîneurs d'hommes, capable de
maîtriser les techniques de leurs armes. Les élèves
officiers reçoivent leurs galons d'Aspirant au sommet des 4090
mètres du Mont Cameroun, et leurs galons de sous-lieutenant ou de
lieutenant à la sortie de l'école. Cette cérémonie
de sortie, présidée par le Chef de l'Etat, est l'occasion, pour
lui, de délivrer un message aux Forces Armées camerounaises dans
lequel des précisions et éléments d'inflexion de la
politique de défense peuvent être formulés.
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
Figure N°8:
Le Chef de l'Etat, Chef suprême des Armées décorant les
majors des promotions « Paix et Modernité » et «
Armée et Nation » de l'EMIA à leur sortie.

Sources : Le
Magazine des Forces de Défense camerounaise Honneur et
Fidélité, Numéro spéciale 20 mai 2010, Page
50.
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
Figure N° 9 : Les
élèves officiers de l'EMIA au défilé du 20 mai
2009

Sources : Magazine des
Forces de Défense camerounaise Honneur et Fidélité,
Numéro spéciale 20 mai 2009, Page 43.
La formation de base terminée, les jeunes
sous-lieutenants et lieutenants sont ensuite affectés dans les
Armées et formations de leur choix ou ils effectuent en quelques sorte
leur application. Certains sont envoyés dans les écoles
d'application à l'étranger (France, Maroc, Etats-Unis,
Sénégal, etc.). Quelques années plutard, ces officiers se
retrouvent à
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
nouveau sur les bancs de l'EMIA pour suivre, pendant six
mois, le stage de commandements d'unité sous la direction du bureau
perfectionnement. Ils y apprennent la pédagogie et les techniques de
commandement d'une unité élémentaire tant au plan
administratif que tactique. Le bureau perfectionnement est également
responsable du recyclage de tous les officiers qui préparent
l'accès à l'enseignement supérieur.
Après leur temps de commandement, les capitaines sont
sélectionnés sur dossier pour participer au cours de Certificat
d'Etat-Major (CEM), formation qui leur donnera accès aux
états-majors de Bataillon ou Région militaires. Pendant six mois,
le bureau enseignement supérieur forme les officiers stagiaires au
commandement d'un bataillon renforcé, par des exercices tactiques en
salle et sur le terrain. Ces exercices tactiques sont complétés
par un enseignement qui vise à approfondir et élargir la culture
générale des officiers stagiaires, à leur faire
acquérir une méthode de travail tout en améliorant leurs
connaissances militaires générales. Ils étudient ainsi le
développement économique et social de leur pays par le biais des
conférences, couronnées en fin de cycle, par un voyage
d'étude.
Enfin, les officiers et capitaines anciens peuvent se
présenter au concours d'entrée au cours de Diplôme d'Etat
Major (DEM), après avoir suivi des cours par correspondance pendant six
mois. Ce cours de Diplôme d'Etat-Major a pour but, non seulement de
consolider les connaissances acquises aux cours précédents, mais
aussi et surtout, d'élever le niveau de compréhension pour une
meilleure approche synthétique des problèmes intéressant
la défense et les Forces Armées camerounaises. Des travaux de
réflexions, des commissions d'études, des conférences
débats aident à atteindre ce but. Un voyage d'étude
à l'étranger permet aux officiers stagiaires de s'ouvrir au monde
extérieur et d'enrichir leur personnalité. Le monde étant
caractérisé par un changement accéléré des
techniques et des mentalités, ou l'évolution des hommes et le
poids des réalités deviennent, chaque jour, plus exigeants, les
Forces Armées camerounaises envoient des
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
stagiaires de tout grade dans différentes
écoles étrangères (France, Allemagne, Belgique,
Etats-Unis, Chine, Maroc, Grande Bretagne, Grèce, etc.).
Après le DEM, les officiers camerounais peuvent
accéder à l'enseignement militaire supérieur de second
degré : le Cours Supérieur Interarmées de Défense
(CSID). La création du CSID en 2005 répond au souci du Chef de
l'Etat, Chef des Forces de Défense de parfaire la réforme de
2001, en disposant de tous les échelons de formation du personnel
militaire sur place au Cameroun. En acquérant cette dernière
capacité, les Forces de Défense camerounaises disposent à
présent de tout le spectre de formation des officiers, de la formation
initiale des élèves officiers, à celle des futurs hauts
responsables de la Défense Nationale (EMIA, EEM et CSID). Aujourd'hui,
le Cameroun peut être considéré comme un pionnier africain
dans le domaine de la formation des officiers (NGambou 2007 : 28).
La formation dispensée pendant une année au CSID a
pour objectifs de rendre les officiers aptes à :
- Participer à la conception, à la
planification et à la conduite des opérations en particulier
interarmées dans un cadre national, multinational ou interallié
;
- Exercer des responsabilités au sein des Etats-Majors et
de l'administration centrale ;
- Exercer des responsabilités au sein d'organismes
nationaux ou
internationaux ou le ministère de la défense est
représenté ;
- Exercer à plus long terme des commandements ou des
fonctions de
direction.
Pour atteindre ces objectifs, le CSID vise à :
- Développer l'esprit et la compétence
interarmées des officiers stagiaires en mettant en commun et en
valorisant le professionnalisme et l'expérience de chacun d'entre eux
;
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
- Promouvoir chez ces officiers l'ouverture et la vision
prospective sur le monde, la réflexion stratégique et tactique,
le souci de l'interopérabilité interarmées et
interallié, dans la perspective d'une défense sous
régionale et même continentale.
b) L'ENTRAINEMENT
Les Forces Armées camerounaises
bénéficient des équipements souvent très
coûteux, des crédits élevés pour l'entretien de
ceux-ci. Ces matériels sophistiqués nécessitent une
formation poussée des cadres et des techniciens devant les mettre en
oeuvre.
En ce qui concerne l'entraînement des Forces, les
crédits nécessaires n'ont pas toujours suivi. La crise
économique que connaît le pays reste la principale cause et a
entraîné une dégradation très avancée des
investissements consentis. Néanmoins, les Forces Armées
camerounaises, depuis leur création, organisent des manoeuvres au niveau
national et multinationales lorsque le budget du département de la
défense le permet. Les manoeuvres d'envergure nationale sont
menées pour atteindre un certain nombre d'objectifs et
représentent un nombre assez limité.
L'un des objectifs majeurs des manoeuvres d'envergure
nationale est, en effet, d'étudier la participation des autorités
civiles et de la population aux côtés des Forces nationales dans
une situation de défense opérationnelle du territoire. Il s'agit
également d'améliorer cette participation à la
défense commune, plus particulièrement en ce qui concerne
l'organisation et le fonctionnement des « Etats-Majors territoriaux
», nom que prennent les comités de coordination lorsqu'il y'a
création d'un Commandement Opérationnel. L'aspect purement
militaire n'est pas toute fois négligé. Ces manoeuvres ont aussi
pour but de faire progresser l'instruction et l'entraînement des
élèves officiers et, de l'ensemble des Forces Armées tout
en étudiant la coopération interarmes et interarmées.
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
Après la période précédant la
lutte contre la rébellion et le retour des Forces Armées dans les
casernes (dès 1970), il s'est posé le problème de
l'entraînement des Forces en temps de paix. Il a été
décidé de mener des exercices non seulement au niveau des
unités élémentaires, mais également à
l'échelon de chaque Armée et au niveau interarmées.
D'où les grands exercices tels que BARRACUDA (1972), BUFFLE NOIR (1973),
SAWA 2006 etc.
L'exercice BARRACUDA s'est déroulé du 05 au 19
Janvier 1972 dans la région méridionale du pays
(département du Ntem et de Kribi), au nord du fleuve Ntem à
proximité de la frontière de la Guinée Equatoriale. Cette
zone, à cheval sur la plaine côtière et les plateaux
cristallins est caractérisée par un climat de type
guinéen, une végétation de forêt dense et une
population relativement abondante de Fang. Le thème
général de l'exercice était « la défense
opérationnelle d'une zone frontalière dans le cadre d'une action
subversive appuyée de l'extérieur par les commandos ennemis
infiltrés, débarqués ou parachutés ». Il
s'agit d'un exercice de « défense globale » impliquant la
participation, aux côtés des Forces nationales : Gendarmerie,
Armée de Terre, Sûreté, formation prémilitaire,
appuyée par la Marine et l'Aviation, des autorités civiles et
surtout des populations. Les exercices futurs se déroulent dans cet
esprit général.
L'exercice BUFFLE NOIR quant à lui s'est
déroulé du 17 avril au 19 avril 1973, en ambiance de
défense opérationnelle du territoire, dans le département
de la haute Sanaga aux environ de Nanga Eboko à proximité de la
voie ferrée Douala-Yaoundé-Ngaoundéré. La situation
imaginée fut la suivante : « Dans le courant du mois d'avril
1973, des menaces très précises de la part
d'éléments, soutenus de l'extérieur étaient
décelées par les services de renseignement au nord du massive de
l'Adamaoua à la hauteur d'une ligne Tcholliré-Poli
».
Il faut également noter que l'année 1977 a vu les
Forces Armées camerounaises manoeuvrer dans le cadre de l'exercice
MEMOUMOUNGO
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
dans le département du Mungo. Ce dernier s'est
également déroulé dans le même esprit de
défense opérationnelle du territoire.
Le 03 février 2000, au journal national de 13 heures,
le Ministre de la Défense du Cameroun a annoncé que les Forces
Armées feront un exercice interarmées dans la province du
Sud-ouest. Cet exercice dénommé ALIGATOR 2000, aura pour
thème général « Repousser un ennemi venant de la
mer » (Ela Ela 2000 : 218-219).
L'exercice SAWA 2006 du RECAMP (Renforcement des
Capacités Africaines de Maintien de la Paix) multinational s'est
déroulé dans la capitale économique du Cameroun du 12 au
23 Novembre 2006. Il a donné l'occasion aux responsables militaires, aux
officiers planificateurs et participants de tester les procédures
sous-régionales en matière de maintien de la paix. Pour nombre
d'observateurs, cette rencontre a été un succès
éclatant. Le dispositif militaire mis en place comporte la DIREX
(Direction de l'Exercice) sous la supervision conjointe du
Général de division aérienne Roger Renard et du
Général de Brigade Hector Marie Tchemo, respectivement
co-directeur français et camerounais. La DIREX assure, en collaborant
avec le représentant du Secrétariat Général de la
CEEAC, la conduite stratégique : évolution du mandat, emploi des
réserves stratégiques, moyens, soutien, finances.
Le niveau tactique de la force comprend 4 composantes :
· Une composante Terre installée au camp Bassa et
articulée en 9 PC Bataillon, donc 2 du Cameroun, 1 de l'Angola, 1 de la
République Démocratique du Congo, 1 du Burundi et du Rwanda, 1 de
la République Centrafricaine et Guinée Equatoriale, 1 de la
République du Congo, 1 du Tchad, 1 du Gabon ;
· Une composante Air implantée à la base
aérienne 201 et disposant de 3 avions Hercule C130 (Cameroun et Gabon),
1 A310 belge et 2 ULM Tétras camerounais ;
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
· Une composante mère installée à
la base navale et disposant de 2 patrouilleurs gabonais, 2 patrouilleurs
camerounais et d'une frégate française, le germinal ;
· Une composante Gendarmerie installée
également à la base navale.
Il s'agissait d'un exercice d'appropriation des
procédures sous régionales, exercice pendant lequel deux semaines
durant, un millier d'officiers originaire des 11 Etats membres de la CEEAC
étaient à pieds d'oeuvre dans les différents PC pour
décortiquer le scénario de l'exercice qui consiste à
engager une force multinationale dans un Etat fictif appelé WENAMEL, en
proie aux remous. Le conflit, initialement interne, s'internationalise dans la
mesure où la stabilité des pays limitrophes est menacée.
Il convient de gérer la crise conformément à un des six
scénarios retenus par l'Union Africaine dans son document
intitulé Version 2010 de la Force Africaine en Attente (FAA). Ceci
implique le déploiement d'un élément militaire de
sécurisation appuyé par une composante police qu'il lance au plus
tôt les opérations de stabilisation en coordination avec les
humanitaires et les acteurs de la reconstruction (SSR/DDR : Security Sector
Reform ou Reforme du Secteur de Sécurité / Désarmement,
Démobilisation & Réintégration ou Désarmement,
Démobilisation et Réinsertion). La mission exige, d'une part, une
bonne maîtrise de l'outil informatique, car les ordres sont
données et reçus par le biais d'un réseau
interconnecté, et d'autre part, des moyens SIC fiables, notamment des
réseaux téléphoniques, informatiques et internet
sécurisés. En somme, cet aspect militaire a mis en exergue des
éléments stratégiques de planification (PLANELM) de
l'Union Africaine et de la CEEAC conçus dans un processus global de
planification, ainsi les niveaux opératif (force de
théâtre) et tactique (bataillons).
En marge de l'exercice, un certain nombre de stages ont
été organisés à Douala et à Yaoundé
dans le but de préparer les officiers aux procédures de maintien
de la paix. Ainsi, 130 officiers de la CEEAC dont 14 camerounais ont suivi le
cours de perfectionnement aux opérations de
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
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maintien de la paix à l'EMIA de Yaoundé. Un
cours de perfectionnement aux techniques de maintien de l'ordre s'est
déroulé au CPTMO (Centre de Perfectionnement aux Technique de
Maintien de l'Ordre) d'Awaé au profit de 20 officiers de la CEEAC, dont
10 camerounais sur l'encadrement des instructeurs Français, Italiens,
Suédois et Camerounais. Un stage de perfectionnement aux
opérations de maintien de la paix des personnels de la santé a
réuni à Douala 25 médecins de la CEEAC donc 5 du Cameroun
sous l'encadrement des instructeurs hollandais et camerounais. 21 autres
officiers ont suivi le stage CIMIC (Civil-Military Cooperation) à
Yaoundé sous l'encadrement des instructeurs Danois et Camerounais. Un
stage de pilotes observateurs se tient à la base aérienne 201 au
profit de six officiers du Cameroun, du Gabon, de la République du Congo
et de la RDC. Enfin, un stage d'action de l'Etat en mer a été
organisé au profit des équipages des navires engagés dans
l'exercice et encadrés par les instructeurs Camerounais et
Français. Ce fut plus qu'un exercice d'Etat-Major (Onana
Mfégé 2007 : 26-27).
CONCLUSION
« Il y aura toujours des guerres » et
« Si tu veux la paix prépare la guerre » restent
encore aujourd'hui les adages fondamentaux de toute réflexion des
politiques militaires qui s'efforcent de répondre à des menaces,
clairement identifiées ou non. C'est en fonction de ce
résumé simplifié de la « sagesse des nations »
que les politiques de défense continuent d'être conçues ;
que les budgets militaires consomment une bonne partie du produit national
brut, que la conception de nouvelles représente une part énorme
de la recherche scientifique et technique, que l'on maintient, de part le
monde, des alliances de défense ou de sécurité collective,
et que certains Etats continuent de fabriquer les armes de destruction massive.
L'opinion couramment acceptée est qu'il subsiste des
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
risques de guerre au surplus imprévisible, qu'il reste
indispensable d'y faire face en entretenant et en développant des
appareils militaires capables de répondre « à toute
menace d'où qu'elle vienne, prévisible ou
imprévisible » et que l'effort de défense nationale
reste un devoir pour les citoyens de chaque pays. Cette opinion reste
compatible avec la constatation d'un changement social et politique
accéléré. Tout changerait sans doute autour de nous, mais
la guerre resterait un phénomène éternel lié
à la nature humaine et à la structure de la
société. En réalité, la guerre effectue une sorte
de mue aujourd'hui évoluant des guerres symétriques ou
dissymétriques aux guerres asymétriques. Ce qui justifierait
l'élaboration de nouvelles doctrines d'emploi des Forces de
Défense à l'instar de celle du Cameroun.
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010

CHAPITRE III
LA DOCTRINE D'EMPLOI DES FORCES
ARMÉES CAMEROUNAISES ET SON ADAPTATION AUX MENACES
ASYMÉTRIQUES

Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
La politique d'emploi des Forces de Défense du
Cameroun peut être considérée comme l'ensemble
d'idées directrices dont il faudra s'inspirer non seulement dans la
conduite de l'action, mais aussi pour l'organisation et l'équipement des
Forces ainsi que pour l'élaboration des règlements d'emploi. Elle
est guidée par le souci de préserver la paix et de respecter les
règles du droit international contenues dans les chartes de
l'Organisation des Nations Unies (ONU) et de l'Organisation de l'Unité
Africaine (OUA) devenu l'Union Africaine (UA).
Ces organisations condamnent universellement l'emploi de la
menace et Forces Armées comme moyens de règlement des conflits
d'une part, et reconnaissent, d'autre part, le droit à la
légitime défense. Ainsi, l'article 1er de la Charte
des Nations Unies dispose que « Les buts des Nations Unies sont les
suivants :
1- Maintenir la paix et la sécurité
internationale et à cette fin, prendre des mesures collectives efficaces
en vue de prévenir et d'écarter les menaces à la paix et
à réprimer tout acte d'agression ou autre rupture de la paix, et
réaliser, par des moyens pacifiques, conformément aux principes
de la justice et du droit international, l'ajustement ou le règlement
des différends ou de situations, de caractère international,
susceptible de mener à une rupture de la paix ; ». De même,
l'article 3 alinéa 4 de la Charte de l'OUA precise que «The member
states, in pursuit of the purposes stated in article 2, solemnly affirm and
declare their adherence to the following principles: 4 Peaceful settlement of
disputes by negociation, mediation, conciliation or arbitration» (Ela Ela
2000: 222).
La politique de paix doit réduire ou désamorcer
les crises ; son but est d'instaurer la paix au service de la liberté,
du développement, du respect des droits de l'homme et de
l'indépendance de tous les pays du monde. Une telle politique à
pour fondement la renonciation à la force et à l'usage de la
force, la reconnaissance des besoins légitimes de sécurité
de tous les pays et de leur égalité, la préservation de la
paix dans l'intérêt de tous.
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
Mais aussi longtemps qu'il existera des différences
fondamentales entre les Etats, il y'aura toujours des intérêts
divergents et inconciliables, sources de méfiance, de convoitises et de
risques, causes de tensions. En outre, la fin de la guerre froide a
multiplié les risques d'affrontement avec la mondialisation des
problèmes d'origines diverses à l'instar du conflit de
civilisation à l'origine des attentats du 11 septembre 2001, point de
départ des nouvelles formes de menaces observées à
l'échelle planétaire. Dans ce contexte, il faut garantir le
territoire national contre toute tentative d'agression, préserver
l'unité nationale, la liberté d'action du gouvernement, assurer
la stabilité, l'ordre et la sécurité publics. C'est le
rôle des Forces Armées nationales à l'instar des Forces
camerounaises dont le principal caractère est d'être
défensif et dissuasif à l'origine (I), mais aujourd'hui offensif
et dissuasif avec l'émergence des menaces asymétriques (II).
I- L'EMPLOI DES FORCES ARMÉES CAMEROUNAISES A
LA NAISSANCE : LA DEFENSE FERME SANS IDÉE DE RECUL
La politique d'emploi des Forces se doit de répondre,
au préalable, à quelques questions essentielles : à quel
ennemi aura-t-on à faire dans une guerre éventuelle ? Quel
caractère présenterait la guerre à la quelle l'Etat et ses
Forces auraient à participer ? Quelles sont les Forces Armées
nécessaires pour résoudre les problèmes posés et
dans quelle direction mener l'organisation militaire ? Comment réaliser
la préparation de la guerre ? Avec quels moyens mener la guerre ? De ce
fait, le pouvoir exécutif, dans l'exercice de ses attributions
constitutionnelles, peut prendre des mesures nécessaires pour assurer la
défense du Cameroun. En cas de danger menaçant la
sécurité ou l'intégrité du territoire, la
sécurité des institutions ou celle des populations, le
Président de la République peut décréter pour tout
ou partie du territoire nationale, l'une ou plusieurs des mesures suivantes
:
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
- La mise en garde, entraînant l'exécution des
dispositions préparatoires ;
- L'état d'urgence, permettant de faire face à des
menaces sérieuses ;
- La mobilisation, donnant les moyens de s'opposer à des
menaces très graves ;
- L'état d'exception, prévu pour maîtriser
les situations les plus critiques.
La défense est une notion complexe qui
intéresse l'ensemble des activités d'un Etat moderne. Trois
aspects ont été définis par les autorités
camerounaises dans le cadre de la défense militaire :
· La défense civile, concerne essentiellement le
maintien de l'ordre, la protection civile, la défense passive et la
défense psychologique ;
· La Défense Opérationnelle du Territoire
(DOT), qui a pour objet de s'opposer à des Forces ennemies
organisées militairement, étrangères ou non. La
défense opérationnelle peut aussi concerner le maintien de
l'ordre renforcé (situation de défense civile) lorsque les
mesures résultant de l'état d'urgence s'avèrent
insuffisantes. Elle est conduite par des commandements spécialement
constitués et nécessite généralement les mesures de
mobilisation et l'institution de l'état d'exception. Elle peut
être menée tant à l'intérieur qu'à
l'extérieur du territoire national.
· La résistance intérieure, qui s'exerce
dans les parties du territoire national occupées par les Forces
ennemies. Elle vise la libération du territoire et le
rétablissement des autorités nationales légales dans la
plénitude de leurs attributions.
Pour atteindre ces objectifs, les Forces Armées
camerounaises ont été classées en fonction des
hypothèses de défense élaborées par la haute
hiérarchie politique et militaire, classement ayant fait ses preuves
face à toutes les épreuves de guerre dont le Cameroun a fait face
partant de la lutte
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
contre la rébellion au conflit armé de Bakassi en
passant par la tentative du coup d'Etat du 6 Avril 1984.
1) LA CLASSIFICATION DES FORCES DE DEFENSE CAMEROUNAISE
RELATIVEMENT AUX HYPOTHESES DE DEFENSE
Du point de vue de la défense militaire, les Forces
défense sont classées en trois grands groupes. Il s'agit :
- Des unités de réserve générale
;
- Des unités d'intervention ;
- Des unités territoriales
Leur utilisation est fonction des hypothèses de
défense.
a) LA CLASSIFICATION DES FORCES
Il s'agit des unités de réserve
générale, les unités d'intervention et les unités
territoriales.
1- LES UNITÉS DE RÉSERVE
GÉNÉRALE
Elles sont composées des Forces qui ne peuvent
être employées que sur ordre ou autorisation du Président
de la République. Il s'agit de la Garde Présidentielle (GP) et le
Régiment du Quartier Général (RQG).
La Garde Présidentielle a été
créée à la faveur du décret n°85/738 du 21 Mai
1985. Elle est formée par des éléments d'élite
provenant des Forces Armées. Son entraînement est assuré
par les personnels de l'Armée israélienne. Placée sous
l'autorité directe du Président de la République et
commandé par un officier nommé par décret, assisté
d'un commandant en second et d'un Chef d'Etat-Major nommés par
arrêté présidentiel, la Garde Présidentielle
comprend :
- L'Etat-Major de la Garde Présidentiel ;
- Le groupement de commandement et de soutien ;
- Le groupement d'intervention ;
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
- Le groupement d'honneur ;
- Le groupement de reconnaissance et d'appui ;
- Le centre d'instruction de la Garde Présidentielle.
Cette organisation répond aux besoins d'une
unité spéciale. En effet, certaines critiques qualifient la Garde
Présidentielle d' « Armée dans une Armée » (Ela
Ela 2000 : 226).
Quant au Régiment du Quartier Général,
il est crée par le décret n°85/631 du 3 Mai 1985. Son
article 1er dispose que « Le Régiment du Quartier
Général est une formation spéciale de réserve
placée sous l'autorité directe du Président de la
République pour emploi ; le Ministre chargé des Forces
Armées en assure l'administration et le soutien logistique ». Le
Quartier Général dont le poste de commandement est fixé
à Yaoundé comprend :
- L'Etat-Major du Quartier Général ;
- Le groupement de Commandement et des Services ;
- Le groupement d'intervention et de protection ;
- Le groupement de reconnaissance et d'appui (Ela Ela 2000 :
225- 227).
2- LES UNITÉS D'INTERVENTION
Il a été crée, par décret
n°76/286 du 06 Juillet 1976, un commandement spécialisé
d'intervention et de réserve générale
dénommée Commandement des Forces d'Intervention placées
sous l'autorité d'un officier nommé par décret
présidentiel. Il reçoit ses missions du Ministre de la
défense ou du Délégué Général
à la Sureté Nationale après approbation du
Président de la République. Ce commandement comprend :
- Un Etat-Major ;
- Des unités de formation de combat (Unités ou
formations interarmes autonomes ou regroupées dans des commandements
subordonnés ; des unités ou détachements adaptés
interarmées autonomes).
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
Ces unités sont caractérisées par leur
disponibilité opérationnelle, leur technicité
éprouvée, leur haute valeur, leur autonomie logistique. Ceci
exige pour ces Forces une multi spécialité se
caractérisant par une structuration à plusieurs composantes en
l'occurrence :
· La composante « Aéroportée » :
elle est le fer de lance des Forces d'intervention marquée par sa
détermination à réagir rapidement en tout point du
territoire national et dans certains cas particuliers hors des
frontières camerounaises. A base d'infanterie parachutiste, elle dispose
organiquement ou en renforcement d'appuis (artillerie, génie), de moyens
de commandement (transmission), de moyens de transport routier, d'un soutien
logistique adapté.
· La composante « Terre » :
caractérisée par la mobilité obtenue par une motorisation
complète des unités, elle dispose des moyens d'artillerie Sol-
Sol et Sol-Air, des moyens antichars, des moyens du génie ceci en
fonction de la zone d'action.
· La composante « Air » : elle agit au
bénéfice des autres composantes, des Forces d'intervention sous
forme d'appui-feu, d'appui transport, d'appui renseignement, d'aide
au commandement.
· La composante «Mer » : comme la composante
Air, elle agit essentiellement au bénéfice des autres composantes
des Forces d'intervention pour en assurer le débarquement à
partir des bâtiments appropriés, l'appui-feu, le soutien tactique
et logistique (Ela Ela 2000 : 227-230).
3- LES UNITÉS TERRITORIALES
Il s'agit de l'ensemble des Forces affectées dans chaque
Région Militaire, les éléments de la Gendarmerie, la
Sûreté nationale et des sapeurs
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
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pompiers dans chaque province37. Ces Forces
constituent les moyens normaux de maintien et de rétablissement de
l'ordre. En cas d'agression, avec la mobilisation des réserves
armées, elles permettent d'engluer l'adversaire en constituant devant et
derrière lui une zone d'insécurité totale et, de lui
enlever toute velléité d'atteindre ses objectifs rapidement.
L'agresseur trouve face à lui :
- Les formations de combat de l'Armée de Terre faites
des unités de divers types (sahel, forêt, savane)
regroupées en huit Régions Militaire couvrant les dix
régions ;
- Les formations de combat de l'Armée de l'Air
regroupées essentiellement dans les différentes bases
aériennes du pays (Yaoundé, Douala et Garoua)38, qui
sont des structures de soutien, d'accueil et de protection des aéronefs
tactiques et stratégiques ;
- Les formations de la Marine Nationale regroupées au
sein des Bataillons Fusiliers Marins Commandos qui sont regroupées en
deux Régions militaires et trois bases navales de soutien
(Limbé), d'accueil (Kribi) et de protection (la Lobé).
En outre, dans les cas urgents, les commandants
d'unités de Gendarmerie peuvent requérir directement l'assistance
de la troupe militaire en l'absence ou l'éloignement de
l'autorité civile. Les plans de protection et le plan
général de défense ont codifié toute une panoplie
de réactions instantanées et graduées face aux
différentes hypothèses (Ela Ela 2000 : 230- 234).
b) LES HYPOTHESES DE DEFENSE
La prise en compte des hypothèses de défense dans
la politique d'emploi des Forces tient prioritairement à la
définition et la considération
37 Région.
38 Première, deuxième et
troisième Région Aérienne.
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des menaces et des risques dont le Cameroun pourrait faire face,
aux manoeuvres ennemies retenues, et à la riposte possible de ses
Forces.
La géopolitique de la sous-région Afrique
Centrale étant caractérisée par une conflictualité
endémique « géopolitique du chaos » (Ela Ela
2000 : 235), le Cameroun peut avoir à faire face à des menaces de
diverses forme dont la gravité est fonction de l'objectif politique, des
visées stratégiques et des capacités militaires ennemies.
Il peut s'agir :
> La contestation des frontières
L'importance des frontières communes et
perméable avec les Etats limitrophes peut faire l'objet d'une remise en
cause du tracé hérité de la colonisation. Cette violation
du sacro-saint principe de l'intangibilité des frontières
héritées de la colonisation peut, tout d'abord, être
menée par une politique déclaratoire dénotant les
intentions de cette remise en cause et, ensuite déboucher sur des
manoeuvres militaires visant à prendre des gages territoriaux au
Cameroun39.
> Les visées hégémoniques des
Etats voisins
Le caractère stable et relativement prospère du
Cameroun peut éveiller des convoitises des Etats voisins. L'importance
des infrastructures économiques sensibles d'intérêt
multilatéral, les richesses potentielles du Cameroun, notamment, son
sous-sol, peuvent être des cibles pour une tentative de mainmise
extérieure.
> Les visées hégémoniques de la
sous-région
La sous région Afrique Centrale a souvent
été l'objet des visées hégémoniques, non
seulement de ses pays constitutifs mais également des pays
extra-régionaux. Le Cameroun reste au centre de cette convoitise
39Le cas du différend frontalier entre la
Cameroun et le Nigéria sur la Presqu'île de Bakassi est
révélateur.
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compte tenu de sa situation géostratégique, de
sa politique d'indépendance nationale ou, pour des motifs
d'expansionnisme religieux ou culturel. Ces menaces et risques peuvent
déboucher sur diverses formes d'actions ennemies, d'où les
hypothèses d'actions suivantes :

Hypothèse 1
Après de longs préparatifs, l'ennemi pourrait
déclencher une attaque massive sur plusieurs fronts avec des actions en
profondeur sur toute l'étendue du territoire national camerounais. Cette
attaque pourrait survenir à la suite d'une rupture de pourparlers sur un
litige frontalier ou sur l'exploitation des richesses du sous-sol.

Hypothèse 2
Une attaque par surprise pour s'emparer d'un objectif
préalablement identifié sur terre ou sur mer ; dans ce cas,
l'ennemi, voulant jouer sur l'effet de surprise, mettrait en oeuvre les Forces
immédiatement disponibles.

Hypothèse 3
Une attaque en force survenant après une courte
période de préparation, tout en menant des actions sur des
objectifs sélectionnés sur les arrières des lignes
camerounaises.
2) LA DYNAMIQUE DES RIPOSTES DES FORCES
CAMEROUNAISES ET LEURS EXPERIMENTATIONS
Face aux différentes hypothèses d'attaques, les
Forces Armées camerounaises ont défini les réponses
possibles (a) observées lors conflits nationaux (b).
a) LES RIPOSTES POSSIBLES DES FORCES CAMEROUNAISES
Compte tenu des hypothèses formulées sur
l'agresseur potentiel, la doctrine d'emploi des Forces repose sur le concept
d'une « défense ferme
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du sanctuaire national ». Elle suppose une «
riposte immédiate » aux frontières. Elle exclut
toute idée d'« attaque préventive ».
En vue d'affaiblir et de disloquer le dispositif ennemi, la
manoeuvre à mener consiste à détruire immédiatement
le 1er échelon et à traiter simultanément en
profondeur, y compris en territoire, le deuxième échelon et les
objectifs stratégiques adverses. L'exécution de cette manoeuvre
implique :
- La mise en place d'un système de renseignements
performant ;
- L'organisation d'un système efficace de surveillance
permanente et de défense des frontières et du territoire ;
- L'inviolabilité des points sensibles prioritaires
camerounais ;
- La rationalisation des capacités des Forces de
Défense militaire camerounaises qui doivent être :
· Suffisantes pour être crédibles ;
· Mobiles pour diminuer le temps de réaction ;
· Bien équipées et bien
entraînées pour être en mesure de remplir efficacement leurs
missions.
Ce concept d'emploi des Forces inclut en outre :
- Des opérations pour reconquérir
immédiatement le terrain perdu ; - Le contrôle des espaces
maritimes vitaux ;
- La neutralisation de l'ennemi infiltré ou
parachuté.
Il requiert la capacité à réagir
rapidement et fait appel aux efforts de toute la nation pour éviter une
pénétration de l'agresseur en territoire camerounais. «
Une défense totale, résolue, menée avec foi et
appuyée sur une résistance populaire vise à refuser tout
fait accompli, remet en cause l'espoir d'une victoire facile de l'agresseur et
donne au gouvernement la liberté d'action dont il a besoin pour mettre
un terme à la guerre » (Ela Ela 2000 : 237-238).
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b) LES FORCES ARMÉES CAMEROUNAISES A
L'EPREUVE DES FAITS
Les Forces Armées camerounaises ont, très
tôt, fait face aux épreuves de la guerre. A leur création,
le 11 Septembre 1959, elles héritent d'une rébellion armée
dans le pays Bassa (Sanaga-Maritime) ou son leader, Um Nyobe, s'est
réfugié après le décret d'interdiction de son
mouvement politique l'Union des Populations Camerounaises (UPC) le 13 Juillet
1955. Les autres épreuves majeures de force dont ont fait face les
Forces Armées camerounaises sont la tentative du coup d'Etat du 06 Avril
1984, des différents incidents frontaliers de 1981 et 1996 entre le
Cameroun et le Nigéria sur la presqu'île de Bakassi, les
revendications sociales de février 2008.
1- LA LUTTE CONTRE LA RÉBELLION ARMÉE
D'abord principalement menée par les Forces coloniales
de l'Afrique Equatoriale Française (AEF), la lutte contre la
rébellion sera l'objectif principal des Forces Armées
camerounaises après l'accession à l'indépendance politique
du pays et, surtout avec la « camerounisation » des cadres de
l'Armée camerounaise. Avec le mouvement de rébellion auquel fait
face le Cameroun, les questions qui ont trait au département au
département de la défense reste « secret » voire «
très secret » (Ela Ela 1995 : 12). Le 13 Septembre 1958, une
patrouille des hommes du Capitaine français Agostino abat Um Nyobe, chef
charismatique de l'UPC disposant d'un véritable soutien populaire et
développant des positions plus radicales que le Rassemblement
Démocratique Africain (RDA) (Granvaud 2009 : 32). La rébellion en
pays Bassa va ainsi perdre son âme et va vigueur. Celle-ci va se
réorganiser un an plus tard autour de Félix Moumié qui va
prendre les reines du mouvement, assisté d'Abel Nkingue et Ernest
Ouandje. Originaire de l'Ouest Cameroun, Moumié en exil au Caire
déclare que « la révolution continuera au Cameroun tant
que l'indépendance réelle
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
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ne sera pas atteinte ». Au côté
des méthodes administratives40 de lutte contre la
rébellion essentiellement passive, les autorités camerounaises
vont également engager les Forces Armées nouvellement
créées sur les fronts Ouest et Sud. Alors que la lutte contre la
rébellion bat son plein à l'Ouest du pays, Félix
Moumié est empoissonné à Genève le 15 Octobre 1960,
Monseigneur Ndogmo et Ernest Ouandjie sont jugés par le tribunal
militaire de Yaoundé. Ouandjie est exécuté publiquement le
15 Janvier 1971 à Bafoussam, marquant ainsi symboliquement la
disparition de la direction de la rébellion dans la région de
l'Ouest Cameroun. Osendé Afana et ses amis vont réorganiser les
forces rebelles au Sud dès 1963. Ces derniers seront rapidement
dénoncés aux autorités camerounaises. Le 15 mars 1966,
après plusieurs échappées, ils tombent sous les balles des
Forces de l'ordre, entraînant ainsi la fin de la rébellion dans la
région du Sud-est du Cameroun.
Le dernier front de résistance sis dans la
région de Djoum dirigé par Woungly Massaga, Ndoh Michel et
Zé Zé Samuel mobilise les populations contre le régime
établi et, créé une organisation politique clandestine
à travers les villages et animées par les cadres moyens. Face
à la montée de la popularité des rebelles dans la
région, le Commandant en chef de l'Armée de Terre va monter une
opération d'envergure qui permettra de repousser les rebelles vers les
territoires congolais. Une compagnie d'infanterie sera d'ailleurs
installée à Mbalam près de la frontière congolaise
pour faire face aux éventuels assauts des rebelles. Coupés de
leur soutien congolais et harcelés par les Forces Armées
camerounaises, les rebelles se sont essoufflés et le front de DJOUM
démantelé en 1971.
40Les ministres des Forces Armées et de
l'Administration Territoriale vont dès 1960, effectuer les multiples
visites dans les régions ou sévit la rébellion afin
d'exposer la politique du nouveau gouvernement. Deux méthodes sont
adoptées par les autorités camerounaises : L'action psychologique
« L'opération du cadi et du chien noir » et l'encadrement
administratif (le redécoupage administratif de l'Ouest et l'isolement
des zones contaminées). (ELA Ela 2000 : 240-241)
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Cette lutte pour l'Unité Nationale va poursuivre son
chemin sans grande distorsion, jusqu'à la démission du
Président Ahamadou Ahidjo, le 04 novembre 1982, au profit de son
successeur constitutionnel, Paul Biya. Deux ans après cet
événement important, la Cameroun va connaître une tentative
de coup d'état rapidement maîtrisé par les Forces
Armées camerounaises.
2- LA RÉDUCTION DU COUP D'ETAT DU 06 AVRIL 1984
Le 06 Avril 1984, au petit matin, les soldats de la Garde
Républicaine investissent la capitale et tente de prendre le pouvoir par
la force des armes. Ce putsch manqué suscitera nombre d'interrogations
et de commentaires tant à l'intérieure qu'à
l'extérieure du Cameroun. Dans son message à la nation le 17 mai
1984, le Chef de l'Etat, Paul BIYA désignera les coupables41.
La réaction contre cette tentative de coup d'Etat par les Forces
Armées restées fidèles aux institutions de la
République est instantanée. Après avoir investi les
différents points stratégique de la capitale (Palais
Présidentiel, Radio Nationale, aéroport, poste et
télécommunication, axes routiers, etc.), les putschistes
tentaient d'appréhender plusieurs autorités civiles et
militaires, mais la Direction de la Sécurité
Présidentielle (DSP) les tenait hors du Palais de l'Unité.
La conduite des opérations est assurée par le Chef
d'Etat-Major des Armées (CEMA), le Général Pierre
Semengue. Entré en contact radio avec
41 « Oubliant tout devoir tout devoir envers leur
pays, quelques centaines de soldats perdus ont enté de renverser la
République et de prendre le pouvoir. Cette révolte contre
l'autorité légitime, chacun d'entre vous l'a ressentie comme une
offense faite à l'unité du Cameroun et comme un crime contre le
Président que vous élu démocratiquement... Aux pays amis
du Cameroun, je rappelle que nous n'admettons jamais la moindre
ingérence dans nos affaires intérieures et que nous ne
permettrons pas qu'un seul camerounais futil un vivant témoignage du
passé - soit opposé ou préféré ses milliers
de compatriotes qui oeuvrent pour le développement et l'harmonie du pays
». Ainsi, dans cette menace contre la sécurité
intérieure du Cameroun, le Président de la République
avait établi une relation entre la mutinerie dans les Forces
Armées camerounaises ourdie par les éléments de la Garde
Républicaine d'une part, et des complicités extérieures
provenant des pays traditionnellement « amis du Cameroun » d'autre
part, le tout au service d'un homme, Monsieur AHMADOU AHIDJO, ancien
Président de la République.
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les différentes formations militaires, il ordonne au
11ème bataillon d'infanterie d'Ebolowa commandé par le
Chef de bataillon Ebogo Titus de faire mouvement sur Yaoundé. De Douala,
les transporteurs type C130 de l'Armée de l'Air camerounaise
décolle avec quelques éléments parachutistes des Forces
aériennes et de la Marine pour le Centre de Koutaba, base du Bataillon
des Troupes Aéroportées, Unité d'élite des Forces
d'intervention rapide. A partir de son poste de commandement du Palais de
l'Unité, le Président de la République ordonne au Chef
d'EtatMajor des Armées d'organiser, sous l'autorité du Ministre
d'Etat chargé des Forces Armées, la contre offensive. Le Chef
d'Etat-Major Général des Armées (CEMGA)42,
chargé de la coordination militaire, réuni les officiers
généraux Nganso Sundji et Tataw James, respectivement Chef
d'Etat-Major de l'Armée de l'Air et Chef d'Etat-Major de l'Armée
de Terre et d'autres officiers supérieurs de la garnison de
Yaoundé. Cet Etat-Major de crise va jouer un rôle fondamental dans
l'organisation et la conduite de la contre offensive qui aboutira plus tard
à la réduction des putschistes.
Le combat urbain s'articule sur trois grands axes :
- Réduire la résistance de la Garde
Républicaine de son camp d'Obili, considéré comme leur
base arrière ;
- Limiter au maximum le déplacement des blindés et
autres engins mobiles de la Garde Républicaine ;
- Déloger les mutins des abords du palais
Présidentiel.
Cette action est menée concurremment par les Forces
Armées restées loyales dans la capitale et les
éléments de renfort des provinces. Le 07 avril, la plupart des
mutins s'étant rendu compte de leur débâcle, commencent
à déposer leurs armes. A 20 heures, le Président,
s'adressant à la nation déclare : « Hier, en effet,
(...), des éléments de la Garde Républicaine ont
42Le Chef d'Etat-Major des Armées (CEMA),
le Général Pierre SEMENGUE est nommé Chef d'Etat-Major
Général des Armées (CEMGA) par le décret
présidentiel du 06 Avril 1984.
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entrepris la réalisation d'un coup d'état
(...), avec pour finalité la mainmise par la violence sur le pouvoir
politique. Des unités régulières de notre Armée
Nationale, demeurées fidèles aux institutions et qui avaient
reçu les ordres pour enrayer le coup de force, conduisirent le combat
avec méthode et détermination et, aboutirent en fin de
matinée de ce jour à une victoire complète ».
La tentative de coup d'état de la Garde
Républicaine ayant été vaincue par les Forces
Armées camerounaises, cette dernière sera dissoute et
remplacée par la Garde Présidentielle (Ela Ela 2000 :
246-248).
3- LE DIFFEREND FRONTALIER DE BAKASSI
Pendant longtemps, le Nigeria a côtoyé les
côtes camerounaises avant de manifester son désir d'appropriation.
Cette volonté expansionniste s'est d'abord manifestée par une
double contestation : la contestation des accords de 1913 au motif qu'ils n'ont
pas été ratifiés du fait de la Première Guerre
mondiale alors qu'ils ont bel et bien été ratifiés le 6
juillet 1914 ; la contestation de la Déclaration de Maroua du
1er juin 1975 sous le prétexte qu'elle n'a pas
été ratifiée par le Conseil militaire supérieur.
Or, la ratification par le Conseil militaire supérieur des actes des
chefs d'Etat nigérians a été instituée le 15
octobre 1975 par la « Constitution (Basic provision) Décret 1975
n°32, section 8 et section 11 ». Ce décret avait un effet
rétroactif pour compter du 29 juillet 1975 (article 21). Or la
déclaration de Maroua date du 1er juin 1975, donc bien avant
la sortie de ce décret et bien avant la période
rétroactive (Messinga 2008 : 106). En réalité, le
Nigéria est un pays en proie à l'insécurité,
à l'instabilité politique, à la
désobéissance civile, l'ordre n'étant rétabli que
grace aux interventions militaires (Mvié Meka 1992 : 50).
Après cette phase diplomatique, viendra la phase
stratégique.
Cette phase stratégique sera impulsée par deux
groupes d'experts commis à cet effet par le gouvernement. Le premier
groupe de travail commis sous
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l'égide du Ministère des Affaires
Etrangères et du Ministère de l'Intérieur ou « Task
Force » sous la direction de M. K. D. Olukolu, a déposé son
rapport le 06 juin 1985. Le second groupe d'experts commis par le Nigeria en
1988 dirigé par M. Bassey E. Ate déposa un rapport dans lequel il
situe ainsi le problème:
Thesis one: «The National Interest
of Nigeria in the maritime area commonly shared with the Republic of Cameroon
can only secured through effective control of the Cross River estuary and
Bakassi peninsula. Such effective control, potentially, can be ensured either
unilaterally by Nigeria or through collaborative action with Cameroon. For
Nigeria, the strategic (maximum) purpose of any new negotiations with Cameroon
should be to review the entire border question from the beginning, with the aim
of arriving at a final solution that will ensured the attainment of the above
objective...»
Thesis two: «The vital
considerations involved in the maritime dispute with Cameroon, for Nigeria, are
strategic and political more so than LEGAL...».
D'où les recommandations et les options suivantes
soumises au gouvernement:
« One choice is to accept the « fait accompli
» inherent in the Maroua Declaration, which means, in effect, a denial of
Nigeria's exclusive Jurisdiction over the entirety of the cross river estuary
and the Calabar channel. To the Cameroonians, this would be the optimal
objective, amount to a ratification of 1913 agreements. In the framework of
this choice, Nigeria might at best be able to persuade Cameroon to respect the
neutrality of the 2 kilometres corridor which AHIDJO has conceded to Gowon in
1975 or make other minor adjustments. The consequences of this choice, in terms
of Nigeria's Strategies and political interests and sub-regional position would
be highly detrimental.
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
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The second choice is for Nigeria to insist on effective
control of the cross river estuary and the Calabar channel which involves
pressing claim to Bakassi peninsula, as a better guarantee for the protection
of its interests and growth potential in the area. In this choice, the
preferred boundary would be at the Rio Del Rey...
In the nature of things, there appear to these three basic
options:
As option one, Nigeria could unilaterally occupy Bakassi
peninsula. In deciding to do so, of course, the military, logistic, political,
financial and other factors bearing in the calculations of the out-come of such
operation should be considered. Assuming the level of this action, Nigeria
might then force the Cameroonians to enter into serious negotiations aimed at
establishing acceptable boundary...
A second option would be to offer to buy the Bakassi
peninsula from Cameroon
A third option is that Nigeria and Cameroon could seek to
institute a «collaborative regime» that will administer the
trans-border area in contention in the direct interest of the peoples residing
there and for the mutual advantage of the two
countries»43(Messinga 2006 : 63-64).
43 Traduction française
Première thèse : «
L'intérêt national du Nigeria dans la zone maritime qu'elle
partage avec le Cameroun ne peut être préservé qu'à
travers le contrôle effectif de l'estuaire de la Cross River et de la
péninsule de Bakassi. Un tel contrôle peut être
assuré soit unilatéralement par le Nigeria, soit à travers
la collaboration avec le Cameroun. Pour le Nigeria, l'objectif
stratégique de toute nouvelle négociation avec le Cameroun serait
de revoir la question de toute la frontière avec pour but d'aboutir
à une solution finale qui assurera l'atteinte de l'objectif
sus-cité. »
Deuxième thèse : « Pour le Nigeria,
les considérations vitales impliquées dans la dispute
frontalière avec le Cameroun sont plutôt stratégiques et
politiques que légales... »
D'où les recommandations et les options suivantes
soumises au gouvernement.
« Un choix est d'accepter le fait accompli contenu
dans la déclaration de Maroua qui signifie en effet une
négociation de la compétence exclusive du Nigeria sur l'ensemble
de l'estuaire de la Cross River et du chenal de Calabar. Pour les camerounais,
ce serait un objectif capital, équivalent à la ratification des
accords de 1913. Sur la base de ce choix, le Nigeria pourrait au mieux
persuader le Cameroun à respecter la neutralité des
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
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Comme on le voit, le Nigeria a décidé de
choisir les recommandations du rapport Bassey E. Ate, et notamment l'occupation
unilatérale de la péninsule de Bakassi par la force (option
n°1), ce qui va justifier la posture agressive permanente du Nigeria.
Cette posture va se traduire par les offensives nigérianes et ripostes
camerounaises, qui se sont soldés par un bilan non
négligeables.
Le 21 décembre 1993, les troupes nigérianes
prennent l'initiative de franchir la frontière camerounaise sous le
prétexte de protéger leurs ressortissants qu'elles estiment
menacés dans la péninsule de Bakassi par les « gendarmes
» camerounais (Messinga 2006 : 66).
Ces Forces Armées nigérianes faites de 2000
à 3000 hommes trouvent sur le territoire escompté une esquarre
camerounaise faite d'environ 40 hommes (30 éléments de la marine
nationale, quelques gendarme et policiers) qui assuraient la mission
d'intégrité territoriale en poste avancé et dont le PC se
situait à Idabato I en décembre 1993. Ces
deux kilomètres de couloir que le président
Ahidjo avait concédé à Gowon en 1975, ou faire d'autres
ajustements mineurs. Les conséquences de ce choix en terme de
stratégies et d'intérêts politiques ainsi que sur la
position sous régionale du Nigeria seraient hautement
catastrophiques.
Le second choix pour le Nigeria est d'insister sur le
contrôle effectif de l'estuaire de la Cross River et sur le chenal de
Calabar, ce qui implique des réclamations pressantes sur la
péninsule de Bakassi comme meilleure garantie pour la protection de ses
intérêts et du développement potentiel de cette zone. Dans
ce choix, la frontière préférentielle se situerait au Rio
Del Rey. Par la nature des choses, ces trois options sont retenues :
Premièrement, le Nigeria pourrait occuper
unilatéralement la péninsule de Bakassi. En décidant de le
faire, les facteurs militaires, logistiques, financiers et les autres facteurs
liés à la réussite d'une telle opération doivent
être considérés. Pour assumer la gravité d'une telle
action, le Nigeria devait alors forcer les camerounais à entrer dans des
négociations sérieuses ayant pour but d'établir une
frontière mutuellement acceptable...
Deuxièmement, le Nigeria pourrait proposer d'acheter
la péninsule de Bakassi au Cameroun...
La troisième option est que le Nigeria et le
Cameroun pourraient chercher à instituer un « régime
collaboratif » qui administrera la frontière en accord avec les
intérêts directs des populations y résidant et pour
l'intérêt mutuel des deux pays.
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
Forces camerounaises, face à cette attaque surprise et
le surnombre des troupes nigérianes, vont tout de même essayer de
repousser les assaillants. Déjà à l'intérieur du
territoire camerounais, les Forces nigérianes vont occuper au 21 janvier
1994 les localités de :
- Kombo A Bedimo et Inokoi (Bakassi Point)
- Jabane I et II (Sandy point)
- Diamond (MINDEF 1996 : 1).
Décidées de rallier le territoire
nigérian à la rive sud du Rio Del Rey, elles vont multiplier les
offensives et vont s'emparer en février 1994 de la localité
d'Akwa (Archibong). Pendant ce temps, les Forces camerounaises essayent de se
mobiliser (Opération Delta) en GOS, GOC, GON. Et au cours de leur
attaque sur la localité de Kombo A Janea, elles seront repoussées
par le GOS en poste avancé (MINDEF 1996 : 2). Cette riposte camerounaise
sera considérée par le gouvernement nigérian comme «
une déclaration de guerre », ce qui entraînera plus tard une
intensification des hostilités.
Figure 10: Le
positionnement des Groupements Opérationnels de l'Opération Delta
sur le champ des opérations

Source :
L'Etat du Cameroun 2008, Page 108.
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
Du 2 au 7 février 1996, les troupes nigérianes
investissent plus en profondeur en territoire camerounais (15 Km vers l'est).
C'était une attaque en force sur toute l'étendue de la
presqu'île, des tirs à armes lourdes qui pilonnaient au sol les
Forces camerounaises. Cette offensive leur a permis d'occuper les
localités telles que :
- Sous-préfecture d'Idabato I ;
- Idabato II ;
- Kombo Awase ;
- Kombo A Munja I et II ;
- Guidi-Guidi ;
- Uzama (Messinga 2008 : 109).
Au cours de cette attaque, le Cameroun va perdre environ une
centaine d'hommes et près de 120 seront faits « prisonniers de
guerre », malgré la non déclaration officielle de guerre du
gouvernement nigérian comme du gouvernement camerounais. Cette attaque
massive nigériane de 1996 (artillerie à bloc) va leur permettre
d'occuper les 3/5e de la presqu'île querellée.
Cette escalade périlleuse va amener les Forces
camerounaises à se réinventer d'autant plus qu'il ne leur restait
plus que les 2/3 du territoire sauvegardé par leur courage. A cet effet,
les autorités camerounaises vont armer leurs Forces de 30 vedettes
appelées « Sweep Ship ». C'était des petits bateaux
américains pouvant contenir 10 à 12 personnes à bord et
équipés de 4 mitrailleuses (2 lourdes et 2 légères)
(Messinga 2008 : 109). Ces vedettes étaient le matériel
indiqué pour le combat dans la mangrove qui recouvrait la
presqu'île.
Nanties de ce matériel d'appoint, les Forces
camerounaises dirigées par le Capitaine de vaisseau Oyono Mveng,
commandant de l'Opération Delta, vont organiser une contre-attaque en
mars 1996. Cette contre-attaque surprise va leur permettre de
récupérer certaines localités à la suite de lourdes
pertes nigérianes, environ 2000 hommes tués, des bâtiments
de
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guerre détruits (Jonathan). Au-delà de ces
pertes en vies humaines, près de 150 soldats nigérians seront
faits prisonniers de guerre par le Cameroun, parmi lesquels 4 officiers
d'après le Général d'Armée Pierre
SEMENGUE44. Cet équipement spécifique va permettre aux
Forces camerounaises de maintenir les Forces nigérianes dans leurs
retranchements. Les positions occupées par les deux camps resteront
comme telles jusqu'au dénouement diplomatique d'octobre 2002 au
mépris des mesures conservatoires indiquées à l'attention
des deux gouvernements par l'ordonnance du 15 mars 1996 de la CIJ à la
Haye et de la demande adressée par les membres du Conseil de
Sécurité des Nations Unies le 29 février 1996, pour le
cessez-le-feu et le retour des troupes des deux parties à leurs
positions initiales (Messinga 2008 : 109-110).
Cette lourde perte nigériane (une semaine à
repêcher les corps) a semé le doute dans leurs rangs, raison pour
laquelle elles n'ont plus organisé d'offensives de grande envergure,
même après l'arrêt du 10 octobre 2002 de la CIJ. On
n'observera sur le champ des opérations que quelques actions
isolées perpétrées même le plus souvent par les
militaires camerounais (actions individuelles) ayant le contrôle de la
situation.
De 2002 à 2006, le champ des opérations sera
sous le contrôle camerounais. Mais, l'arrêt de la CIJ
rétablissant la souveraineté camerounaise sur la presqu'île
de Bakassi sera boudée par le Nigeria malgré l'engagement
solennel des deux chefs d'Etats le 5 septembre 2002 à Saint-Cloud, en
présence du Président français Jacques Chirac et du
Secrétaire général de l'ONU, Koffi Annan. Ainsi, le
retrait des troupes nigérianes imposé par l'arrêt de la CIJ
ne sera pas effectif d'après la déclaration officielle de son
intention de rejeter le verdict de la CIJ le 23 octobre 2002. Le Nigeria
justifie ce rejet par deux raisons : d'abord l'impartialité du
Président français de cette juridiction Gilbert Guillaume et des
juges
44 Révélation au cours d'un entretien
dans son Hôtel sis au Quartier Général.
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à la sécurité : d'une Armée « de garde »
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allemands et anglais, dont le travail s'est réduit
à la confirmation des accords conçus par leurs aînés
; ensuite le refus d'abandonner ses intérêts et surtout son peuple
vivant à Bakassi. Le communiqué commis à cet effet
mentionne : « En tant que Nation régie par la loi, nous devons
continuer à exercer notre juridiction sur ces zones en accord avec la
constitution. A aucun prix, le Nigeria n'abandonnera son peuple et ses
intérêts. Pour le Nigeria, ce n'est pas une question de
pétrole ou de ressources naturelles sur les terres ou eaux
territoriales. Il s'agit du bien être et de la santé de son peuple
sur ses terres ». En marge de cette version officielle, le Nigeria
considère cette décision comme une atteinte à son statut
de puissance sous régionale, un déshonneur pour lui qui devrait
inspirer respect et crainte aux autres Etats (Messinga 2008 : 110).
Cet état d'esprit va se matérialiser sur le
terrain par le maintien de l'Opération « Harmony IV» sur les
positions occupées. Il était question pour les Forces
nigérianes d'entretenir la souveraineté nigériane sur les
localités qu'elles occupaient à défaut d'une occupation
totale de la presqu'île. Aussi, les Forces camerounaises avaient pour
mission de maintenir les Forces nigérianes dans leurs retranchements.
Cette mission était dirigée par le Commandant B2/B3 GOS
relativement aux consignes particulières :
- Le B3 (3è bataillon) était chargé des
opérations défensives et offensives ;
- Le B2 (2è bataillon) s'occupait des renseignements.
Le chef B2/B3 GOS exécutait les tâches suivantes
au quotidien :
· Suivi de l'instruction
· Faire des TD (travaux dirigés) de relève
et d'arrivée sur la zone des personnels suivants : COM GOS, CES/GOS,
B1/B4, B2/B3, armuriers, détachement Milan. Il faisait aussi les TD de
préparation de relève 01 mois avant et 02 semaines avant.
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· Faire le programme hebdomadaire d'instructions dont la
copie doit être adressée à COM DELTA tous les jeudis et
comptant pour les semaines à venir.
· Tenir le registre des mouvements et activités du
groupement appelé « journal de marche des opérations
».
· Mettre à jour le tableau des relèves.
· Visiter les postes de combat du groupement (01
fois/semaine).
· Effectuer la relève des unités.
· Effectuer les patrouilles.
· Chasser les pêcheurs nigérians.
· Insécuriser en permanence la zone de
responsabilité camerounaise.
· Récupérer les pirogues ou embarcations
avec personnels et contenu et les mettre à la disposition de la
prévôté pour besoin d'enquête.
· Avoir le souci de la bonne utilisation des
embarcations.
· Faire respecter les consignes de COM DELTA sur la
navigation sur zone et en particulier la navigation de nuit est interdite sauf
cas de force majeure.
· Tout mouvement d'embarcation doit être
ordonné par le COM GOS.
· Faire garder une attitude militaire (port de la
tenue).
· Respecter scrupuleusement les degrés d'alerte
(1-2-3)
· Respecter l'envoi des pièces
périodiques.
· Veiller à la bonne conservation des cartes et
autres documents officiels.
· Pouvoir faire un compte rendu instantané,
précis et détaillé sur la Nature, le Volume et
l'Armement (NVA) des Forces nigérianes.
· Entretenir le moral des hommes.
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· Riposter efficacement à toute attaque par des tirs
à tuer
· Le B2/B3 est conseiller maritime du COM GOS
· Le B3 établit pour le groupement des ordres de
conduite et d'opération (Messinga 2006 : 70-72).
C'est grâce au respect de toutes ces consignes que les
Forces camerounaises ont pu retenir les Forces nigérianes jusqu'à
leur retrait au lendemain des accords de Greentree avec comme bilan :
~ Sur le plan humain, le Cameroun a perdu environ 200
à 300 hommes sans compter les disparus à l'instar du
médecin porté disparu à la suite d'un accident
d'hélicoptère. Le Nigeria quant à lui a perdu environ 2000
à 3000 hommes dans cette guerre. Le bilan nigérian le plus lourd
a été enregistré lors de la riposte camerounaise en mars
1996 à Kombo A Janea (2000 morts environ). A coté de ces pertes
en vie humaine, on peut ajouter les prisonniers de guerre qui ont
été libérés à la suite de l'échange
organisé à Yaoundé en juin 2006 par les deux gouvernements
sous l'égide de la Croix Rouge Internationale. Le Cameroun a
libéré environ 150 prisonniers nigérians parmi lesquels le
corps du Capitaine Foutoumbe, mort en captivité à Yaoundé.
Le Nigeria à son tour en a libéré environ 120 parmi
lesquels deux corps des sous officiers rapatriés.
~ Sur le plan matériel, le Cameroun a perdu trois (03)
hélicoptères (deux sont tombés en mer, un a
été emporté par un tourbillon marin et est allé
tomber à 500 mètres de la côte et à 300
mètres de profondeur de la mer) ; un sweep Ship ; beaucoup d'armes et de
munitions lors de la prise d'Idabato I et II par les Forces nigérianes
en février 1996. Le Nigeria quant à lui a perdu trois
bâtiments de guerre parmi lesquels le « JONATHAN »
détruit par les fusiliers marins commandos camerounais encore
appelés « hommes
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grenouilles » ; beaucoup d'armes et de munitions
abandonnées lors de la riposte camerounaise de mars 1996.
D'après des sources militaires nigérianes
officieuses, le Nigeria a perdu environ 1 millier d'hommes ; quelques disparus
; une centaine de prisonniers de guerre. Le Cameroun en a perdu des centaines
d'hommes ; une centaine de prisonniers également. Sur le plan
matériel, quelques frégates, beaucoup d'armes et de munitions ont
été perdues par le Nigeria contre des hélicoptères,
des corvettes, des embarcations légères, des armes et des
munitions en grand nombre du coté camerounais.
En faisant la moyenne de ces deux versions de bilan, il
apparaît que le Nigeria paye le tribut le plus lourd dans cette guerre.
Non seulement il n'a pas pu s'approprier la presqu'île par la force des
armes, mais aussi il a connu des pertes insoupçonnées devant le
Cameroun. Une telle situation ne correspond pas aux prévisions d'avant
la guerre, lorsqu'on se réfère au potentiel militaire du Nigeria
considéré comme première puissance de la sous
région (Messinga 2008 : 111-112).
A la question de savoir qu'est ce qui a fait le mérite
des Forces camerounaises dans cette guerre, le Général
d'Armée Pierre SEMENGUE évoque la qualité des hommes et la
spécificité de l'armement :
· Le Nigeria a mobilisé pour cette guerre environ
10000 hommes de formation au rabais (45 jours environ de formation) et beaucoup
de moyens mal organisés. Le Cameroun de son coté a
présenté 2000 hommes environ, nantis d'une formation de haute
facture (deux ans) et des moyens limités, mais spécifiques,
c'est-à-dire adaptés pour le combat dans la mangrove. Le Nigeria
était assez équipé pour la parade, mais manquait
d'équipement de combat dans la mangrove au début de la guerre
;
· La qualité de l'organisation des Forces
camerounaises a primé également, c'est-à-dire leur sens de
la discipline et leur cohésion devant une Armée nigériane
indisciplinée et politisée par des
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hommes d'affaires. L'Armée nigériane n'est pas
comme l'Armée camerounaise le creuset de l'unité nationale
(Messinga 2008 : 111- 112).
Mais, l'évolution géopolitique et
géostratégique du contexte de défense et de
sécurité nationale et internationale marqué par
l'émergence des nouvelles menaces imposera une redéfinition de la
doctrine d'emploi des Forces Armées camerounaises. Cette
redéfinition sera imposée par les attaques multiples avec
succès des pirates de mer sur la presqu'île de Bakassi dans le
Sud-Ouest Cameroun, les prises d'otages permanentes et demandes de
rançons des coupeurs de routes dans le Grand Nord, la criminalité
transfrontalière et le trafic des stupéfiants et êtres
humains de l'Est Cameroun sous l'impuissance des Forces Armées jadis
parées à toutes épreuves.
4- LES ATTEINTES A LA SURETÉ DE L'ÉTAT DES
ANNÉES 1990
Au Cameroun, le processus de démocratisation, entendu
comme le cheminement de l'autoritarisme vers la démocratie
multipartisane en tant qu'idéal de gestion de l'Etat s'est
déroulé en plusieurs étapes. D'abord, une
métamorphose du parti unique le Rassemblement Démocratique du
Peuple Camerounais (RDPC), ensuite la mise en place d'un cadre juridique avec
la session des libertés de décembre 199045 et le
renouvellement de la classe politique nationale par l'organisation de
consultations électorales à divers niveaux.
Cette mutation socio-politique ne s'est pas passée sans
heurts comme dans d'autres pays, au point de menacer substantiellement
l'existence même de l'Etat. Mais les Forces Armées vont s'employer
pour restaurer l'autorité
45 Il s'agit notamment des lois 90/055 relatives au
régime des réunions et manifestations et 90/056 relative aux
partis politiques.
Thèse de Doctorat/Ph.D en Sce Po, UY2, 2011
Ernest Claude MESSINGA 178
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de l'Etat bafoué par des revendications qui portaient
atteinte à la sûreté de l'Etat.
Face à la « méthode du pas à
pas » (Essissima 1998 : 21) adoptée par le gouvernement et le
refus du Chef de l'Etat d'organiser une « conférence nationale
souveraine »46 principale revendication des partis
politiques, l'opposition camerounaise regroupée autour d'une
superstructure dénommée « collectif des partis de
l'Opposition » puis « coordination nationale des partis
d'opposition et des associations » va mener une insurrection et une
véritable guérilla urbaine dans certaines grandes villes du
pays.
Les méthodes choisies par les leaders de l'opposition
sont tout d'abord les « villes mortes - pays mort
»47 qui visent sous l'effet conjugué de la crise
économique et des programmes d'ajustements structurels, à
essouffler l'économie camerounaise et, ainsi faire plier la politique du
parti au pouvoir. Ensuite, le corollaire de ces dernières était
de susciter l'incivisme fiscal à travers le non payement d'impôts,
des quittances d'électricité, d'eau, de téléphone,
etc. ; la destruction du tissu économique à travers les actes de
vandalisme48. Seule la capitale du Cameroun ne sera pas atteinte par
cette vague de désobéissance civile, Douala la capitale
économique étant à feu et à sang. Enfin, la
violence va monter d'un cran avec l'attaque du patrimoine national et les
symboles même de l'Etat. Des assassinats des représentants de
l'Etat ont lieu. Des velléités sécessionnistes
46 Le 27 juin 1991, le Président Paul Biya,
devant l'Assemblée nationale, déclare que la conférence
nationale au Cameroun est « sans objet » pour le Cameroun.
47 « Il y'a cinq ans ...les villes mortes », Mutations,
Dossier spécial n°016 du 22 octobre 1996.
48 Incendie de l'usine des brasseries du Cameroun
à Limbé, le 12 avril 1991 ; le blocage des lieux de marché
ou d'écoulement des produits de consommation ; des voies de
communication et l'intimidation des commerçants ; le non respect de la
réglementation avec l'importation frauduleuse des produits
pétroliers et autres produits de consommation, etc.
Thèse de Doctorat/Ph.D en Sce Po, UY2, 2011
Ernest Claude MESSINGA 179
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apparaissent dans les provinces anglophones du pays
orchestrées par la SCNC en vue de créer un Etat
indépendant dénommé « Ambazonie ».
Prenant acte de cette montée de la violence, Paul Biya
affirme en juin 1991 que « (...) violence, vengeance, haine,
vandalisme, terrorisme risquent de devenir des valeurs en hausse (...).
Intimidation, menaces, grèves illégales, tout est bon pour
déstabiliser notre pays »49. Il va donc à
cet effet prendre des mesures exceptionnelles en impliquant les Forces
Armées camerounaises dans les missions de maintien de l'ordre public.
Pour mettre fin à la déliquescence de l'Etat,
les Commandements Opérationnels seront crées sur l'ensemble du
territoire camerounais conformément à l'article 26 de la loi
n°67/LF/9 du 12 juin 1967 portant organisation générale de
la Défense. Le territoire national est dès lors
réorganisé en huit régions militaires, ou sont
respectivement nommés les commandants opérationnels avec pour
mission « rétablir l'ordre dans les plus brefs délais
dans les provinces prises dans l'engrenage du vandalisme ». Ces
commandements opérationnels disposent de toutes les Forces de Police, de
Gendarmerie et des Armées de Terre, Air et Mer. Le commandant agit sur
instruction du gouverneur, représentant du Chef de l'Etat dans la
région et responsable du maintien de l'ordre dont il est
conseillé militaire.
Sans verser dans l'excès, nous pouvons affirmer que les
Forces Armées camerounaises ont, malgré quelques incidents de
parcours au début du processus démocratique, maintenu et
assuré la stabilité des institutions républicaines et,
favorisant par là un développement réfléchi de la
« démocratie camerounaise » (Ela Ela 2000 :
268-269).
49 Le quotidien national Cameroon Tribune,
n°4916 du 21 juin 1991, pages 12-13 Thèse de
Doctorat/Ph.D en Sce Po, UY2, 2011 Ernest Claude MESSINGA 180
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
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5- LES RÉVENDICATIONS SOCIALES DE FEVRIER 2008
Après les années de braise de la fin de la
décennie 80, l'on a connu la vie chère, les manifestations, les
casses, les incendies, les violences et répressions, la mort et
désolation dans les différentes villes camerounaises. Tout est
parti d'un mot d'ordre de grève de syndicats nationaux de transporteurs
urbains et interurbains. Ils se plaignaient des difficultés relatives
aux conditions de l'exercice de la profession de conducteur de taxi, de moto et
autres ; notamment l'augmentation des prix des carburants à la pompe.
Une pratique conforme à la loi, dont l'objectif est d'essayer d'arracher
des concessions au gouvernement qui n'avait pas fermé les voies du
dialogue. Prenant prétexte de ces négociations qui savent
s'accommoder de longueurs voire de rebuffades, des jeunes «
manipulés » ont pris le contrôle de certains arrondissements
de Douala aux premières heures du 25 février. Ils ont
continué à tisser la toile de la violence à travers le
pays, touchant 31 villes tuant 40 personnes dont 30 dans le littoral.
Même Yaoundé la capitale, inattaquable pendant les années
de braise n'a pas été épargnée. Ses habitants
surpris et choqués ont assisté impuissants à la furie de
casseurs et pilleurs. Les Forces de sécurité policiers et
gendarmes interviennent avec des camions à eau, gaz lacrymogènes
et tirs de sommation pour disperser les manifestants, les jeunes
répliquant avec des cailloux et gourdins. Un grave acte de provocation
qui a amené le chef de l'Etat à sortir de sa réserve et
à avertir que le désordre ne passera pas à travers une
déclaration forte le 27 février, « Tous les moyens
légaux seront mis en oeuvre pour que force reste à la loi
».
La fermeté du chef de l'Etat couplée à la
descente sur le terrain de renforts des Forces Armées en l'occurrence le
Bataillon d'Intervention Rapide (BIR) a permis d'interpeller et de mettre
à la disposition de la
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justice de nombreux fauteurs de troubles et, ce faisant, de
restaurer la paix sur l'ensemble du territoire national50.
II- L'ADAPTATION DE LA DOCTRINE D'EMPLOI DES FORCES
ARMÉES CAMEROUNAISES AUX MENACES ASYMÉTRIQUES : LE DROIT
D'ATTAQUE ET DE POURSUITE
Le besoin de plus en plus accru de sécurité et
de protection manifesté par les populations et l'émergence tout
aussi avérée de menaces nouvelles susceptibles de porter
dangereusement atteinte à la paix et à la stabilité tant
du Cameroun que dans la sous région, impliquent pour les Forces de
Défense, de savoir et pouvoir maîtriser au mieux, en cas de
survivance, les menaces et risques planant potentiellement sur cette partie du
continent africain. Ceci, soit en engagement opérationnel
interarmées sur le territoire national, soit dans le cadre d'une
opération multinationale sous la bannière de l'Union Africaine ou
de l'Organisation des Nations Unies.
C'est dire qu'il devient impérieux non seulement de
définir les modalités de participation des Forces Armées
à ces différentes types d'opérations, mais aussi et
parallèlement de bien cerner la typologie même des
opérations et conflits possibles, d'appréhender avec justesse les
menaces et risques pesant sur le Cameroun pour finalement s'assurer la
maîtrise permanente des fondements de la stratégie militaire
générale, garante au mieux de la défense des
intérêts nationaux.
1) LE CADRE GÉNÉRAL DE L'ACTION
a) CLASSFICATION GÉNÉRALE DES
OPÉRATIONS ET
CADRE JURIDIQUE CORRESPONDANT
Il s'agit de la classification générale des
opérations et de la classification des conflits
50 Le quotidien national Cameroon Tribune
N°9292/5491 du 20 février 2009
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
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1- CLASSFICATION GÉNÉRALE DES
OPÉRATIONS
Les Forces de Défense camerounaises peuvent
principalement être engagées dans cinq différents types
d'actions ou opérations en présence ou non des
belligérants.
a- LA GUERRE
C'est le stade extrême d'engagement des Forces de
Défense. Les opérations sont généralement
précédées d'une déclaration officielle de
guerre.
b- LES OPÉRATIONS DE GUERRE
Dans ce cas, la procédure de déclaration de
guerre n'est pas formellement utilisée ; le conflit se déroule
dans un cadre juridique à définir pour chaque
opération.
c- LES OPÉRATIONS DE
SECURITÉElles ont pour but d'assurer la
sécurité de la population ou la préservation de zones
sensibles dans un environnement trouble ou menaçant. Les Forces de
Défense, quand elles sont requises par l'autorité
gouvernementale, apporte leur concours dans les domaines du renseignement, du
contrôle des points sensibles, du maintien de l'ordre et de la protection
des populations.
d- LES OPÉRATIONS DE SOUTIEN DE LA
PAIX
Elles se déroulent généralement sous
mandant international, dans le cadre d'une résolution précise et
visent à empêcher des belligérants de poursuivre et
reprendre les hostilités.
e- LES OPÉRATIONS DE SECOURS
D'URGENCE
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Ce sont des opérations déclenchées
à la suite de catastrophes naturelles ou d'accidents technologiques.
Elles se caractérisent, dans un premier temps, par une urgence des
besoins, une nécessité de réactions immédiates, le
recours à des moyens de mobilité, à du personnel et des
matériels que seules les Armées sont le plus souvent aptes
à fournir à temps. Dans un deuxième temps, les structures
civiles et les Organisations Non Gouvernementales (ONG) prennent
progressivement le relais des Forces de Défense dans la gestion des
opérations de secours d'urgence. L'autorité civile est, en
défense civile, l'autorité légitime. A ce titre, elle est
la seule à pouvoir assumer la responsabilité totale de
l'opération (EtatMajor des Armées 2010 : 6).
2- CLASSIFICATION DES CONFLITS
On a coutume de différencier les conflits à l'aide
de certains paramètres :
- Les buts recherchés par les Forces adverses :
conquête d'intérêts mineurs, territoriaux ou nons, prises de
gages économiques, déstabilisation... ;
- Les moyens disponibles : les types de Forces, leur volume,
leur degré technologique, leur capacité opérationnelle et
éventuellement les soutiens susceptibles de provenir de
l'extérieur ;
- Les voies recherchées pour atteindre les buts
poursuivis : affrontements direct, harcèlement politique,
économique, médiatique ou militaire
Dès lors que les paramètres sont clairement
identifiés, on distingue trois types de conflits :
· Les conflits symétriques : qui opposent les
Forces Armées de nature, de volume et d'équipement technologiques
équivalents. Ce type de
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conflit, le plus souvent violent, a pour objectif final la
victoire militaire ;
· Les conflits dissymétriques : qui mettent en
opposition les Forces Armées conventionnelles ou non, de structures, de
volume d'équipements et doctrine différents. La partie la plus
faible mènera une lutte totale prolongée, mais de faible ampleur
avec des actions non conventionnelles ;
· Les conflits asymétriques : se
caractérisent par la grande difficulté voire
l'impossibilité pour une partie à identifier les contours et la
nature exacte de l'adversaire (cas du terrorisme, piraterie maritime,
criminalité transfrontalière des coupeurs de routes). Cette
difficulté rend très complexe toute forme d'engagement
(Etat-Major des Armées 2010 : 7-8).
b) LES HYPOTHESES D'EMPLOI DES FORCES DE
DEFENSE
A tout moment, avec ou sans préavis, le Cameroun peut
se trouver en difficulté de façon intentionnelle (action
militaire conventionnelle ou classique, organisation terroriste, crime
organisé, action occultes d'organisations ou de sectes, mercenariat...)
ou de manière accidentelle (catastrophe naturelle ou accident majeur).
Dans ces situations, les Forces terrestre, aux côtés des autres
Armées ou de manière isolée, peuvent être
sollicitées pour rétablir la souveraineté du territoire et
aider les populations.
1- MENACES ET RISQUES
Un risque se rapporte généralement à un
danger, plus ou moins prévisibles, susceptible de causer des dommages
physiques aux personnes et aux biens ou d'affecter le fonctionnement du pays.
Le risque découle donc d'une potentialité naturelle ou
accidentelle.
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
Les menaces résultent de la conjonction d'une
intention hostile, plus ou moins clairement exprimée, et de l'existence
de moyens pour la concrétiser.
2- LES DIFFERENTES MENACES ET LES RISQUES POTENTIELS
Le concept d'emploi des Forces de Défense
répertorie quatre types de menaces et une série de risques
susceptibles de porter atteinte à l'intégrité du
territoire, menacer les institutions ou la sécurité de la
population. Pour chaque type de menaces ou de risques correspond une
hypothèse d'engagement des Forces de Défense. Ces sont ces
hypothèses d'engagement qui servent de base à
l'élaboration de la doctrine d'emploi des Forces Armées
camerounaises.
En l'absence d'adversaires désignés et de
menace aisément mesurable, ces hypothèses permettent de
visualiser l'ensemble des crises possibles ou des situations nouvelles pouvant
affecter le Cameroun et conduire à l'engagement des Forces de
Défense.
Ces différentes hypothèses ne sont pas
exclusives ni indépendantes les unes des autres et pourraient
très bien se combiner entres elles en entraînant le haut
commandement à la décision d'engagement simultanée des
Forces de première, deuxième et troisième catégorie
dans des zones différentes.
HYPOTHESE 1 : Conflit régional pouvant
mettre indirectement en cause l'intégrité du
territoire
NATURE DE LA MENACE.
Le Cameroun, pays stable et prospère, possède
une frontière terrestre commune avec six autres pays ainsi qu'une vaste
façade maritime sur l'océan atlantique. Les pays voisins du
Cameroun constituent des
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
ensembles dont les objectifs, les moyens et les situations
intérieures sont extrêmement hétérogènes.
Cette hétérogénéité porte en elle le risque
d'émergence de risques diffus. Ces risques tiennent notamment à
la présence de zones troublées, aux voisinages de nos
frontières, pouvant ainsi constituer des foyers potentiels de crises.
Au sein de l'Etat voisin fragilisé, des tensions infra
ou intra étatiques peuvent se cristalliser autour des clivages à
caractère ethnique, religieux, civilisationnel, ou économique
avec possibilité de conséquences ou de prolongement indirect
à l'intérieur du territoire national (incursion de bandes
armées, exactions de coupeurs de routes ou de rebelles
pourchassés, afflux des réfugiés etc.).
Ce type de menace se matérialiserait par des
incursions terrestres ou maritimes de bandes armées de faible volume,
plus ou moins structurées, à l'intérieur de l'espace
national ou par un afflux massif de populations fuyant les zones de combat d'un
pays voisin. Quelque soit la forme que prendrait cette menace, la
sécurité des populations camerounaises habitant les zones
frontalières ainsi celles de leurs activités traditionnelles
pourraient être menacées.
LOCALISATION
Ce scénario concerne essentiellement les zones
frontalières et la façade maritime du Cameroun.
OBJECTIFS POLITICO-MARITIMES
- Mettre fin aux agissements des bandes infiltrées et
rétablir l'intégrité territoriale ;
- Rétablir et garantir la liberté de circulation
; - Protéger les populations locales ;
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
- En liaison avec les organisations internationales non
gouvernementales, contrôler le flux des populations
déplacées et assurer la protection des réfugiés.
MOYENS ENGAGES
L'ensemble des moyens de défense local de la
région concernée (moyens de la marine en cas d'incursion par la
façade maritime, moyens de la sûreté nationale et du Corps
National des Sapeurs Pompiers en cas de gestion des réfugiés).
Tous moyens permettant de recueillir des renseignements dans la zone
concernée (mission prioritaire de la Gendarmerie Territoriale).
La riposte des Forces de Défense locales camerounaises
doit être ciblée sur les agresseurs dument repérés
et identifiés. Cette riposte sera limitée strictement au
périmètre des territoires concernés.
· Un renfort de moyens militaires interarmées
en provenance d'autres régions pourrait être décidé
en fonction de l'évolution de la situation (Etat-Major des Armées
2010 : 9).
HYPOTHESE 2 : Atteinte directe aux
intérêts vitaux ou à l'intégrité du
territoire national
NATURE DE LA MENACE :
Cette hypothèse prend en compte une menace par
agression directe sur le sol camerounais dans un but territorial ou
économique. Cette menace serait constituée par des Forces
conventionnelles équivalentes ou supérieures aux Forces de
Défense camerounaises. Dans cette hypothèse, les risques pesant
sur les intérêts économiques vitaux, les richesses
potentielles, les voies d'approvisionnement et les populations nationales sont
très important.
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
Le Cameroun doit pouvoir, en toute indépendance,
régler ce genre de conflit. De mesures particulières devront
être prises pour renforcer la protection du territoire contre les
menées subversives terroristes susceptibles d'accompagner ce type
d'agressions conventionnelles.
LOCALISATION
Ce scénario concerne l'ensemble du territoire camerounais
ainsi que sa façade maritime.
OBJECTIFS POLITICO-MILITAIRES
- Eviter une évolution incontrôlée de la
situation et une montée aux extrêmes en délivrant à
l'agresseur un signal militaire fort pour le contraindre à renoncer
à ses ambitions et rétablir la souveraineté de l'Etat.
MOYENS ENGAGES
Intervenant dans un cadre national, en synergie avec
l'ensemble des ministères, les Forces de Défense engagent les
moyens des trois Armées relevant de la posture permanente de
sûreté incluant la chaîne de commandement
opérationnel, des moyens d'acquisition et d'exploitation du
renseignement.
· Les Forces de Gendarmerie sont directement
concernées par la recherche du renseignement, la protection des
personnes et des biens, le maintien de l'ordre public et la lutte contre les
menées subversives (Etat-Major des Armées 2010 : 10).
HYPOTHESE 3 : Opération en faveur de la
paix et du droit international
NATURE DE L'ENGAGEMENT
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
La contribution camerounaise à ce type
d'opération n'est envisagée que dans un cadre politique
international (Organisation des Nations Unies, Union Africaine...) et dans un
contexte militaire multinational (ONU, FOMUC...). La participation des Forces
de Défense camerounaises pourrait prendre alors des formes diverses
comme l'interposition entre belligérants, le contrôle des
frontières terrestres, la surveillance de l'application d'un cessez le
feu, la conduite d'actions strictement humanitaires.
LOCALISATION
Sous-région ou Afrique Subsaharienne. OBJECTIFS
POLITICO-MILITAIRES
Agissant exclusivement sous mandat d'une Organisation
Internationale ou d'une coalition mise sur pieds pour la circonstance, les
Forces de Défense camerounaises seraient engagées pour atteindre
un des objectifs suivants :
- Participer au contrôle du règlement d'un
conflit avec le consentement des parties en présence et après
cessation des hostilités (Opération de maintien de la paix) ;
- Favoriser le retour à la paix dans un pays en
état de guerre ou de guerre civile et ou la sécurité des
populations est gravement menacée (opération de restauration de
la paix).
MOYENS ENGAGES
· Renfort interarmées de commandement en personnel
d'Etat-Major ;
· Un bataillon type « Maintien de la paix »
à forte représentation terrestre (Infanterie blindé) ainsi
que des moyens de la Gendarmerie pour le maintien de l'ordre (un à deux
escadrons) ;
· Moyens aériens de projection ;
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
· Un dispositif de soutien des Forces (Etat-Major des
Armées 2010 : 11).
HYPOTHESE 4 : Catastrophe naturelle ou accident
d'envergure.
En cas de catastrophe naturelle (inondation, tremblement de
terre, irruption volcanique, sécheresse...) ou accident d'envergure
(pollution,
explosion, incendie, crash d'avion...). Ce sont les
autorités civiles quinormalement prennent en charge tous les
aspects de la défense civile pour
mener à bien les opérations de secours
d'urgence.
Les Forces de Défense peuvent être
sollicitées pour des missions de protection des populations faisant
appel à des capacités d'intervention immédiatement
disponible, à des effectifs importants et à des moyens
spécialisés dont ne disposent pas les services civils de l'Etat
pour la zone sinistrée également.
LOCALISATION
Territoire national
OBJECTIFS POLITICO-MILITAIRES
- Assurer l'évacuation et le traitement des victimes des
catastrophes ;
- Protéger et secourir les populations rescapées
;
- Eviter les pillages et les exactions dans les zones
sinistrées. MOYENS ENGAGES
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à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
· La priorité sera donnée à
l'engagement du personnel et des moyens militaires en place dans la
région touchée par la catastrophe ou l'accident. Le renforcement
en moyens lourds d'évacuation et de déblaiement en provenance de
l'ensemble du territoire n'est pas à exclure (Etat-Major des
Armées 2010 : 12)..
HYPOTHESE 5 : Menace contre l'ordre public et la
continuité du fonctionnement des institutions.
Des actes terroristes, des manifestations dures ou des
violences urbaines initiées par des groupuscules activistes mais qui
peuvent être relayées par une part plus ou moins importante de la
population peuvent troubler l'ordre public et mettre en péril le
fonctionnement normal de nos institutions.
LOCALISATION
L'ensemble du territoire national et plus particulièrement
les agglomérations importantes
OBJECTIFS POLITICO-MILITAIRES
- Maintenir ou rétablir l'ordre public et la
continuité du fonctionnement des institutions.
MOYENS ENGAGES
Les Forces de première (Police) et de deuxième
catégorie (Gendarmerie) sont normalement en charge du maintien de
l'ordre public et de la liberté de fonctionnement des institutions comme
de la sécurité des personnes et des biens.
Les Forces de Défense, dites Forces de troisième
catégorie, peuvent être réquisitionnées pour
renforcer les Forces de première et deuxième
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
catégorie dans la protection des personnes et des biens,
mais également dans la défense des points sensibles et des
administrations.
· Les volumes des Forces engagées
dépendent de l'étendue et de la gravité des incidents
observés (Etat-Major des Armées 2010 : 13).
2) LA STRATÉGIE GÉNÉRALE MILITAIRE
Pour conduire sa politique de sécurité et de
défense et faire face aux différentes hypothèses de
défense évoquée dans les paragraphes
précédents, le Cameroun met en oeuvre une stratégie
globale qui fédère les différentes stratégies
correspondant aux domaines militaire, civil, économique, social et
culturel de la défense.
Le concept d'emploi des Forces définit les principes
d'engagement des Forces en tenant compte du cadre politique et militaire
actuel. Il souligne que la crédibilité de ces Forces tient
à leur capacité :
- De dissuader tout adversaire à s'attaquer aux
intérêts du Cameroun (dissuasion) ;
- D'anticiper l'action opérationnelle qui serait
éventuellement à conduire en fonction de la menace ou du risque
observé (Prévention) ;
- D'agir dans les zones de crises éloignées du
centre de gravité des Forces (Projection intérieure) ou
dans un pays étranger dans le cadre des accords internationaux
(Projection extérieure) ;
- De satisfaire aux exigences de liberté d'action du
gouvernement et de sauvegarde des intérêts nationaux
(Protection) (Etat-Major des Armées 2010 : 15).
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a) LA MAITRISE DES QUATRES GRANDES FONCTIONS
STRATEGIQUES
Elles sont au nombre de quatre à savoir : la dissuasion,
la prévention des crises, la protection et la projection.
1- LA DISSUASION
La dissuasion vise à détourner un ennemi
éventuel de ses intentions agressives en lui faisant imaginer les
représailles qu'il court. Elle s'appuie sur une organisation permanente
du commandement et sur des Forces opérationnelles dont la posture,
adaptable aux diverses situations, est de garantir en permanence une
capacité de riposte quelque soit les circonstances. Elle repose sur la
détermination, le professionnalisme et la réputation des
Unités des trois Armées et de la Gendarmerie.
Elle doit également se manifester au quotidien par le
souci de se perfectionner lors des exercices et des entraînements et par
une rigueur permanente dans le comportement comme dans l'application des
consignes de sécurité qui garantissent la défense des
installations et plus généralement du territoire nationale. Cette
dissuasion est l'affaire de tous les acteurs de la défense (Etat-Major
des Armées 2010 : 7-8).
2- LA PRÉVENTION DES CRISES
La prévention a pour but, en premier lieu, de
protéger le pays contre les menaces pouvant peser sur ses
intérêts fondamentaux. Aussi, elle doit permettre d'anticiper et,
si possible d'empêcher l'émergence des situations susceptibles de
devenir conflictuelles. Au sein des Armées, ce principe se traduit par
la recherche constante d'indices d'alerte d'une menace, le suivi d'indicateurs
de conflit ou de crises potentielles, par une présence militaire
permanente dans les zones identifiées comme risquées (zones
frontalières, façades maritimes). Les outils d'information,
d'analyse (renseignement), de
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veille et d'alerte stratégique sont également
indispensables dans l'anticipation puis la gestion des crises.
La prévention s'appuie également sur des
capacités de réaction immédiate, sur l'activation
progressive de moyens positionnés dans les régions à
risque ainsi que le déploiement préventif de moyens terrestre,
naval et aérien. L'ensemble du dispositif mis en oeuvre dans le cadre de
la prévention donne au Cameroun une faculté de prévision
et de compréhension des situations qui constituent l'une des clés
de son autonomie de décision (Etat-Major des Armées 2010 :
16).
3- LA PROTECTION
La notion de protection concerne exclusivement le territoire
national et la population. En l'absence de menace militaire directe à
proximité des frontières, elle s'apparente, la plupart du temps
à des missions de sécurité intérieure, cas des
missions de défense strictement militaires.
Impliquant en toute circonstance de satisfaire les exigences
de sécurité et d'intégrité du territoire, de
liberté d'action du gouvernement et de sauvegarde la population, la
protection répond aux menaces de désordre, de chantage, de
déstabilisation, de terrorisme et d'agression limitées.
La défense aérienne, la défense maritime
du territoire, la défense terrestre du territoire et la défense
civile concourent à la protection. Les trois premières,
permanentes, relèvent principalement des Armées. Placée
sous l'autorité civile, la défense civile peut nécessiter
le concours des Armées, la Gendarmerie y participant de façon
permanente. Les mesures de Défense Opérationnelle du Territoire
(DOT) sont mises en oeuvre sur décision du gouvernement et leur
exécution incombe à l'autorité militaire (Etat-Major des
Armées 2010 : 17).
4- LA PROJECTION
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La notion de projection recouvre l'ensemble des interventions
conduites hors des frontières nationales. Pour le Cameroun, pays
à vocation strictement défensive, cette notion ne se
conçoit que dans le cadre d'une mission de maintien de la paix ou
à caractère humanitaire dans un des pays de la sous région
et sous l'égide d'une organisation ou coalition internationale
reconnue.
La notion de « projection intérieur » sera en
revanche utilisée pour décrire le déploiement des Forces
à l'intérieure des frontières. Dans un pays étendu,
géographiquement et climatiquement aussi varié que le Cameroun,
une « projection intérieure » possède de nombreuses
similitudes avec une projection dite « extérieure ».
Elle constitue alors une des modalités de la
protection. La projection intérieure suppose, comme pour une projection
extérieure, de disposer d'une part de Forces entraînées et
complémentaires aptes à intervenir loin de leur lieu habituel de
stationnement, d'autre part de moyens de transport à moyens rayon
d'action. Elle requiert une organisation adéquate de la chaîne de
commandement et de la capacité de soutenir les unités
engagées.
En cas de troubles majeurs ou d'agressions à
l'intérieure des frontières, la protection devient prioritaire
sur la prévention et sur la projection. La fonction de protection
s'affirme alors comme une mission essentielle et une exigence permanente pour
les Forces Armées et devient, de fait, la plus dimensionnante pour les
Forces de Défense et notamment pour les Forces terrestre.
Toutes les Forces disponibles, complétées le cas
échéant par les Forces de réserve, sont alors susceptibles
d'y participer. Contrairement à la projection qui, tout en exigeant des
capacités permanentes, ne prend corps qu'au moment de l'intervention,
les trois autres grandes fonctions stratégiques sont permanentes. On
désigne sous l'appellation de posture permanente de sûreté
l'ensemble de dispositions prises pour mettre en toute
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circonstance le pays à l'abri d'une agression, même
limitée (Etat-Major des Armées 2010 : 18).
b) LES PRINCIPES D'EMPLOI DES FORCES
L'engagement des Forces sur le territoire national ou à
l'extérieure des frontières requiert l'application de
procédures qui permettent au Chef de l'Etat et au Chef de l'Etat-Major
des Armées de contrôler les conditions d'emploi des Forces, sous
responsabilité civile pour la défense civile, sous
responsabilité militaire pour la défense opérationnelle du
territoire ou pour une mission extérieure sous mandat international.
Quatre grands principes guident l'emploi des Forces dans les
différents types d'actions qu'elles peuvent mener à savoir
l'anticipation, la cohérence des buts recherchés, la
maîtrise et l'emploi mesuré de la force, la force morale
(Etat-Major des Armées 2010 : 18-20).
1- L'ANTICIPATION
Elle doit permettre de détecter, d'évaluer et,
si nécessaire, de traiter au plutôt, et donc au plus haut niveau
des crises, toute situation de nature à présenter un risque ou
une menace. Elle repose avant tout sur une capacité d'analyse qui
combine une chaîne d'acquisition et de diffusion du renseignement, un
éventail de Forces et de moyens positionnés si possible au plus
près des zones potentielles de crise.
Elle est confortée par un haut degré de
préparation et de disponibilité des ensembles de Forces
constituées au sein de chaque Armée.
2- LA COHÉRENCE DES BUTS
RECHERCHÉS
Tout engagement doit respecter le principe de parfaite
adéquation entre les buts politiques, fixés dans un cadre
national ou international et les objectifs militaires assignés. Le
mandat que le Chef de l'Etat donne aux Forces et par lequel il précise
le but recherché en engageant les moyens
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
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militaires permet de formaliser cette adéquation. Ce
but final recherché est déterminé en cohérence avec
les actions diplomatiques, économiques, humanitaires et
médiatiques menées simultanément. Au plan militaire, il se
traduit par les objectifs à atteindre et par les règles
d'engagement et de comportement à observer.
Lorsque les Armées participent, dans le cadre de la
protection, à la défense sur le territoire soit en contribuant
à la défense civile, soit en conduisant le cas
échéant les opérations militaires, les structures mises en
place et l'existence des procédures particulières doivent
favoriser la coopération et le dialogue permanent entre civils et
militaires.
3- LA MAITRISE ET L'EMPLOI MESURÉ DE LA
FORCE
Les moyens militaires engagés dans une opération
doivent être dimensionnés de manière à emporter la
décision tout en évitant l'escalade de la violence entre les
parties prenantes.
La formation militaire et l'entraînement au combat sont
la meilleure école pour préparer le combattant à un usage
maîtrisé de la force dans un environnement de violence. Par
ailleurs, les unités doivent acquérir ou entretenir la
faculté d'adaptation nécessaire pour faire face à tout
développement de la crise et faire évoluer l'organisation de
leurs moyens et leurs modes d'action en fonction des finalités nouvelles
de l'intervention.
4- LA FORCE MORALE
L'ascendant moral sur l'adversaire constitue dans tout conflit
un des facteurs clés du succès. Il dépend principalement
de la légitimité politique, juridique et morale de l'action
militaire, du respect qu'elle inspire et, dans certaines missions
internationales (interposition), de son impartialité. Cet ascendant est
grandement conforté par le soutien que manifeste l'opinion
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publique nationale et même international, mais il repose
surtout sur la valeur et la force morale des combattants eux-mêmes.
CONCLUSION
Les Forces Armées camerounaises ont toujours su faire
face à toutes les situations. Elles se sont montrées aptes,
depuis dix ans, comme par le passé, à remplir les missions qui
leur étaient confiées :
- La lutte contre la rébellion armée des
années d'indépendance ;
- La maîtrise des putschistes en avril 1984 ;
- Le maintien de l'ordre pendant la période de transition
vers le multipartisme public en 1991-1992;
- Le maintien de la souveraineté camerounaise sur la
presqu'île de
Bakassi et de l'intégrité du territoire national
depuis 1994;
- Le maintien de l'autorité de l'Etat pendant les
révoltes sociales de
février 2008 ;
- Aujourd'hui, elles font face aux menaces transnationales
« sans visage », grâce non seulement à la mutation de
leurs cadres d'actions, mais aussi et surtout grace à l'accompagnement
opérationnel et tactique.
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
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DEUXIEME PARTIE
L'OPÉRATIONNALISATION TECHNIQUE,
INSTRUMENTALE ET TACTIQUE DES RÉPONSES AUX NOUVELLES MENACES PAR
LES FORCES ARMÉES CAMEROUNAISES
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La mission de sécurité et de défense de
la souveraineté nationale face aux coupeurs de routes, pirates de mer,
« architectes » et « entrepreneurs » de
l'insécurité au Cameroun ne pouvait être assurée
qu'avec l'élaboration d'une nouvelle doctrine d'emploi des Forces
Armées. Matérialisée par une redynamisation des
systèmes d'hommes et d'armes, la sécurité sera
assurée par un déploiement opérationnel (Chapitre
IV) qui, évalué une décennie plutard
(Chapitre V), nécessiterait une reconfiguration pour
plus de sécurité (Chapitre VI).
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CHAPITRE IV :
LE DÉPLOIEMENT OPÉRATIONNEL DES FORCES ARMÉES
CAMEROUNAISES FACE AUX NOUVELLES FORMES DE MENACES
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Comme le montrent l'histoire et l'anthropologie militaires, la
création et la permanence des Armées traduisent la conscience que
les peuples et les Etats ont des menaces qui pèsent sur eux, ainsi que
la volonté et la détermination de les éradiquer. La
création de l'Armée camerounaise le 11 Novembre 1959 signale
outre la rupture de la supplétivité coloniale et l'annonce de la
souveraineté à venir, toute la détermination de l'Etat et
de son gouvernement à rétablir l'ordre et la paix
nécessaire au développement. Au cours de la décennie 1960,
la doctrine militaire camerounaise privilégie l'efficacité et la
victoire militaire sur les théâtres des opérations, en vue
de la réalisation des objectifs politiques que sont la paix, la
sécurité, l'unité nationale et le développement. La
recherche de la supériorité opérationnelle, face à
un adversaire pratiquant la guerre révolutionnaire et fort de ses appuis
intérieurs et extérieurs, tend à expliquer la
concentration des ressources dans la structuration, la densification et la
spécialisation progressive des Forces nationales. Le concept de «
Forces Armées », que porte à l'époque le
département ministériel en charge de la défense, ne
saurait être l'expression d'un militarisme triomphant. Il rend compte en
revanche, d'une part, de l'affirmation par le Cameroun de sa
souveraineté nationale et d'autre part, de sa détermination
à peser sur le rapport de force international par sa capacité
propre, que multiplie son dispositif diplomatico-stratégique. La
doctrine d'emploi de forces de cette période peut donc se résumer
ici à l'efficacité opérationnelle au profit de l'ordre
républicain. La réalisation de l'unification le 20 Mai 1972,
après la réunification du 1er Octobre 1961, est la
conclusion politique de la guerre contre la rébellion. Les
décennies 1970-1980 ont été quant à elles, celles
du renforcement des capacités opérationnelles. Ce recadrage
visant l'optimisation des capacités opérationnelles de
l'Armée, s'enclenche le 12 Juin 1967. Cette orientation prend
progressivement corps notamment avec la création le 06 Juillet 1976,
d'un Centre de Coordination Interarmées (CCI) et de nouvelles
unités opérationnelles, remplacées plus tard, le 22
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Août 1983 par l'Etat-Major des Armées (EMA). Ces
dispositions visent un meilleur maillage opérationnel du territoire
national ainsi qu'une grande cohésion stratégique. Tirant
leçon de la guerre révolutionnaire imposée par la
rébellion, la pensée stratégique camerounaise s'enrichie
du concept de « défense populaire », en réponse aux
menaces internes et externes de l'époque. Des dizaines de camerounais,
élèves du secondaire, étudiant du supérieur et
fonctionnaires, reçurent ainsi la formation militaire, inférieure
pour les uns et supérieure pour les autres, comme réservistes des
Forces Armées. Cette belle et enrichissante expérience,
interrompue du fait de la crise économique aigue qui a frappé le
Cameroun depuis la fin des années 80, se remet progressivement en place,
avec la relance de la préparation militaire supérieure au profit
des élèves de l'Ecole Nationale d'Administration et de
Magistrature (ENAM) et des fonctionnaires de l'administration des eaux et
forêts, etc. A cette fonction politique de défense et
d'intégration nationale s'est ajoutée une fonction
économique et sociale. La participation au développement devient
un impératif dans le contexte post guerre des années 1970,
marqué par les exigences du redressement de l'appareil de production et
de la construction des infrastructures nécessaires au
développement économique et social. La doctrine, au cours de
cette période, correspond bien à la formule célèbre
de Jefferson : « En chaque citoyen un soldat, en chaque soldat un
citoyen », préconisant une identification nécessaire de
l'Armée et du peuple. Ces différentes orientations seront autant
de prédispositions déterminantes pour l'adaptation de
l'Armée au contexte post guerre froide, avec ses exigences de
modernité et de sécurité globale (Mvomo Ela 2008 :
16-17).
Depuis le début des années 1990, le contexte
international est marqué par l'effondrement du communisme, la fin de la
guerre froide et la poussée de la démocratie libérale. Ce
bouleversement de la géostratégie mondiale s'accompagne d'une
mutation du paradigme sécuritaire, notamment par l'atténuation
des risques de guerre totale et la montée des
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menaces asymétriques et non conventionnelles. Dans le
même temps, le bilan géopolitique du Cameroun s'illustre à
l'interne par les soubresauts inhérents à l'apprentissage
démocratique, à l'externe par l'occupation de la presqu'île
de Bakassi. Dans cet environnement mouvant et incertain, la doctrine militaire
camerounaise resta ancrée à ses fondements premiers : la paix et
le développement, comme en témoigne le concept de défense
que porte le Ministère aujourd'hui. Paix à l'intérieur par
une adaptation intelligente à la démocratie, paix avec les
voisins, notamment avec le Nigeria, dans la résolution de conflit avec
lequel, le Cameroun, fidèle au droit international mit en oeuvre une
stratégie permettant à la fois de circonscrire l'occupation et de
maintenir la dynamique opérationnelle à un niveau lui permettant
de peser sur le rapport de force bilatéral et multilatéral. La
décision du 10 Octobre 2002 de la Cour Internationale de Justice (CIJ),
en faveur du Cameroun et l'accord de rétrocession de Greentree du 12
Juin 2006, montrent toute la pertinence de cette approche choisie par le Chef
de l'Etat, chef des Forces Armées. Paix enfin dans le monde, en Afrique
et en Afrique Centrale avec la participation de plus en plus marquée de
l'Armée aux missions de paix de l'ONU, de l'Union Africaine, de la
Communauté Economique et Monétaire de l'Afrique Centrale (CEMAC)
et de la Communauté Economique des Etats de l'Afrique Centrale
(CEEAC).
Le dernier chantier des Forces Armées camerounaises est
celui de la modernité lancé par le Chef de l'Etat à
travers les reformes du 21 Juillet 2001, un ensemble de mesures recherchant
à la fois la cohérence et la souplesse organisationnelle,
l'efficacité opérationnelle, la professionnalisation et le
rajeunissement des effectifs. A cela s'ajoute le souci de modernisation des
équipements le tout imposé par la montée en puissance de
l'insécurité au niveau national et international. Doctrine
dynamique dont les concepts varient selon l'évolution du contexte
interne et externe se traduisant par une mise à niveau
opérationnel. Le niveau
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
opérationnel d'une Armée prend en compte ce qui
est effectivement mise en oeuvre de la politique militaire, des plans
stratégiques, de l'entraînement et de l'acquisition des moyens
tant au niveau national (I) qu'international (II).
I- LE DISPOSITIF NATIONAL DE LUTTE CONTRE LES MENACES
ASYMÉTRIQUES
Le Cameroun comme le reste du monde connaît sa cohorte
de menaces. Après une décennie de conflit armé contre le
Nigeria, il fait aujourd'hui face à un ennemi d'une identité
particulière : ce sont des « assaillants disparates » dans les
régions du Sud Ouest, Nord Ouest et Littorale responsables de la
piraterie maritime avec pour corollaire la prise d'otages; les « coupeurs
de route » dans les régions du Nord, Extrême Nord, de
l'Adamaoua et de l'Est responsable de la criminalité
transfrontalière et les enlèvements d'enfants contre
rançons. Conformément à la nouvelle doctrine d'emploi, les
Forces Armées camerounaises vont se mobiliser pour y faire face.
1) L'ARMÉE DE TERRE FACE AUX COUPEURS DE ROUTES ET
AUX PIRATES DE MER.
Après un développement considérable (Ela
Ela 1994) la portant à près de 16000 hommes, l'Armée de
Terre représente près de la moitié du total des effectifs
voire le « Fer de lance » des Forces Armées camerounaises.
Implantées sur l'ensemble du territoire, les unités
professionnelles de l'Armée de Terre constituent, avec celle de la
Gendarmerie, l'outil incontournable de la sauvegarde et du maintien de la
sûreté nationale.
L'Armée de Terre s'articule autour :
· D'un Etat-Major implanté à Yaoundé
;
· Des formations de combat en trois composantes :
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
- La force de manoeuvre comprenant 5 Brigades d'infanterie
motorisées et 06 Bataillons d'Intervention Rapide (BIR) répartis
au sein de trois Régiments Militaires Interarmées (RMIA) et de
dix Secteurs militaires terrestres ;
- La Force d'Intervention constituée d'une Brigade
d'Intervention Rapide. Les unités de cette brigade sont toutes
localisées dans la 2ème RMIA et sont, pour emploi
placées directement aux ordres du Chef d'Etat-Major des Armées.
Cette brigade comprend 3 bataillons d'intervention : le Bataillon
Spécial Amphibie, le Bataillon des Troupes Aéroportées et
le Bataillon Blindé de Reconnaissance ;
- Des régiments de soutien et d'appui des Forces de
manoeuvre ou d'intervention : Ces régiments constituent les Forces
d'appui à la manoeuvre : le Régiment du Génie, le
Régiment d'Artillerie Sol-sol et le Régiment d'Artillerie
Sol-air. Ils sont rattachés à la 2ème
Région Militaire Interarmées (RMIA 2) ;
· Des organismes adaptés à l'Armée de
Terre, rattachés à chaque direction de l'administration centrale
;
· D'une Brigade dite Brigade du Quartier
Général (BQG), implantée à Yaoundé, et en
charge de la protection de la capitale et du soutien des organismes
institutionnels.
a) LE BIR FACE AUX COUPEURS DE ROUTES.
La composante essentielle de l'Armée de Terre
constituant la réponse aux nouvelles menaces est le Bataillon
d'Intervention Rapide (BIR). Les années 90 sont marquées au
Cameroun par l'émergence des activités crapuleuses
transfrontalières dans le Grand Nord, notamment le
phénomène de coupeurs de route. Face à cette menace
asymétrique, le Bataillon Léger d'Intervention (BLI) sera
crée le 1er février 1999.
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
Le 25 Juillet 2001, le BLI devient le Bataillon
d'Intervention Rapide (BIR). Il est crée un BIR par Région
Militaire Interarmées (RMIA) ; le 3ème BIR ayant son poste de
commandement à Maroua Salack dans l'Extrême Nord, couvre le
3ème RMIA. Plus tard, le 1er BIR sera
activé à Letta (Région administrative de l'Est) dans la
1ère RMIA.
Le haut commandement, suite aux récents
événements de Février 2008, à la montée de
la piraterie le long du territorial camerounais et la recrudescence du grand
banditisme a procédé à la réorganisation des
Bataillons d'Intervention Rapide sur l'ensemble du territoire national en
fonction des spécificités des régions et du type de
menaces. C'est ainsi que neuf formations ont récemment été
crées (cinq BIR, le BIR Delta, le Centre d'Instruction des BIR, le
Centre Antiterroriste et la Base logistique des BIR).
Le mode de recrutement dans les BIR est sélectif. Sur
la base d'une batterie de tests physiques et psychotechniques effectués
dans le 10 régions administratives, les meilleurs sont retenus et
immatriculés à l'issue d'une longue marche de 400 Km après
une formation initiale qui dure trois mois.
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
Figure N°11 : Marche
des nouveaux recrus du BIR de Koutaba à Man A War Bay.

Source : Magazine des
Forces de Défense, Honneur et Fidélité, Numéro
spécial du 20 mai 2009, Page 38.
Ensuite commence la formation de para commando, suivi de la
phase de spécialisation et de l'instruction nautique. Cette
dernière étape vise à préparer le commando au
combat, à la vie dans les mangroves en mer et dans d'autres
régions inhospitalières. C'est un corps d'élite
formé à la lutte contre ces menaces ; c'est un bataillon dont la
rapidité d'exécution, l'adaptabilité aux zones complexes
et diverses, la mobilité... viennent succéder aux traditionnelles
troupes qui lourdement armées, s'avèrent inadaptées aux
nouvelles formes de guerre (Mouelle Kombi 2010 : 12).
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
Figure N°12 : Parade
du Bataillon d'Intervention Rapide

Source : Magazine
L'ANNÉE DU PRESIDENT 2010, Nouvelle Espérance, Page 29.
Les BIR sont destinés à effectuer des missions
spécifiques de type commando dans un environnement terrestre,
aéroporté et amphibie :
· Missions classiques dévolues à
l'Armée de Terre ;
· Destructions d'objectifs en profondeur ;
· Libération d'otages ;
· Lutte contre le grand banditisme (coupeurs de routes,
pirates...) ;
· La protection des personnalités ;
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à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
· Escorte de convois sur terre et d'embarcations sur mer
;
· Missions de tireurs d'élites (encadrés au
sein d'un groupe ou en isolé) ;
Recherche préventive, prévisionnelle et
active du renseignement. b) LE BIR DELTA FACE AUX PIRATES DE MER.
Le BIR DELTA qui préfigure le corps des gardes
côtes s'est définitivement installé le 1er Avril
2009 et a commencé à remplir ses missions. Des travaux
d'aménagement, d'ensablement pour la construction de certaines casernes
et l'acquisition sur zone des équipements et matériels sont en
cours.
Pour exécuter sa mission, la formation s'attelle à
faire :
> Restaurer l'autorité de l'Etat dans la
péninsule ;
> Faciliter le retour progressif des services publics, des
autres formes de maintien de l'ordre et même des populations ;
> Faire respecter les accords de « Greentree » ;
> Créer un climat de sécurité et
l'harmonie avec les populations de la péninsule ;
> Rechercher et détruire les bandes armées dans
la péninsule et sur le plan d'eau (PELENE 2009: 30-32).
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
Figure N°13 : Le BIR
DELTA dans ses missions régaliennes

Source : Magazine des
Forces de Défense Honneur et Fidélité, Numéro
spécial du 20 mai 2009, Page 32.
Face à l'émergence de nouvelles formes de
criminalités et le banditisme transfrontalier, les BIR s'imposent comme
la réponse proportionnée et décisive de l'Etat.
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à la sécurité : d'une Armée « de garde »
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2) LA MARINE NATIONALE ET LA SAUVEGARDE DES APPROCHES
MARITIMES NATIONALES : UN DEFI PARTAGÉ
Les approches maritimes mondiales font depuis plus d'une
décennie le lit d'une insécurité grandissante affectant
diversement les tissus socioéconomiques des Etats côtiers
adjacents. Du Golfe d'Aden au détroit de Malacca, en passant par la mer
des caraïbes, ces aires océaniques connaissent un accroissement des
abordages criminels fortement préjudiciables à l'activité
offshore de ces nations. Le Cameroun, pays ouvert sur la mer par le coude en
quadrature du Golfe de Guinée, n'est pas épargné par ce
péril sécuritaire contemporain. Cette insécurité
croissante, indirectement charriée par les enjeux économiques en
forte expansion dans cette zone économique maritime a imposé des
d'actions nationales au vue des enjeux économiques.
a) ÉTAT DES LIEUX ET ENJEUX
ÉCONOMIQUES
L'Etat du Cameroun dispose d'un débouché
stratégique à la mer, grâce à sa façade
maritime longue d'environ 370 km selon la loi n°2000/02 du 17 avril 2000,
s'étalant de la localité de Jabane dans la région du
Sudouest, à campo dans la région du Sud. Sa Zone Economique
Exclusive (ZEE) est constituée d'une aire liquide adjacente de
près de 25.000 kilomètres carré (km2) riche en
ressources halieutiques et dont le plateau continental sous-jacent regorge de
ressources minières considérables (Belinga Ela 2008 : 28). Cette
configuration géographique privilégiée lui permet
d'exercer, une importante activité économique dans l'espace
maritime attenant.
L'accès du pays à la mer est avant tout un
élément facilitateur pour ses échanges avec le reste du
monde, 90% de ceux-ci s'effectuant par fret maritime. A fortiori, plusieurs
pays de la zone CEMAC empruntent la bande littorale nationale pour le transport
des matières premières ou des
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produits manufacturés. Le pipeline Doba-Kribi, avec
son terminal pétrolier situé au large du chef-lieu du
département de l'Océan, illustre parfaitement cette situation.
L'exploitation pétrolière offshore, traduite
par la présence de plusieurs plates-formes et de nombreux tankers dans
la zone économique exclusive nationale, est par ailleurs
révélatrice du potentiel énergétique fortement
promoteur du plateau continental sous-jacent. Quant aux ressources
halieutiques, leur abondance remarquable justifie la forte implication des
intervenants du secteur pêches dans le chalutage maritime. 100.000 tonnes
de poissons sont ainsi pêchés en moyenne chaque année dans
les eaux camerounaises.
Cependant, la permanence des activités
génératrices de revenus dans ce vivier économique
extrêmement fécond est mise à mal par des « loups de
la mer ».
La piraterie maritime a ainsi pris de l'élan dans les
eaux territoriales camerounaises ces derniers temps, se caractérisant
par des attaques répétées de bâtiment hauturiers,
chalutiers et tankers notamment. La probabilité d'attaques contre des
installations situées sur le littoral à partir de la mer, est par
ailleurs à considérer. Le bilan humain et matériel de ces
activités criminelles est suffisamment évocateur :
dégâts matériel sur les ouvrages maritimes, objet de valeur
et argent emportés, prises d'otages et dans les cas extrêmes,
pertes en vie humaines...
L'actualité sous-régionale relaie
également plusieurs faits liés à la commission d'attaques
similaires dans les eaux maritimes des pays voisins par ces brigands de mers.
L'on ne saurait oublier d'évoquer les dangers liés aux trafics
illicites empruntant la mer (drogue, contrebande...), les risques induits par
une pollution éventuelle des eaux camerounaises ou encore les
dégâts d'une pêche anarchique dans
l'écosystème marin. Les menaces sont donc réelles et de
surcroît transnationales. Elles imposent par conséquent des
réponses appropriées.
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
b) FONDEMENTS ACTUELS DE LA SAUVEGARDE DES APPROCHES
MARITIMES NATIONALES COMME VOLONTÉ NATIONALE: L'ACTION DE L'ÉTAT
EN MER
Le décret 2002/036 du 04 février 2002 portant
création et organisation des Forces de la Marine Nationale confie
à cette Armée la responsabilité de la conduite de l'action
de l'Etat en mer en liaison avec les autres administrations.
Figure N°14 : Parade
de la Marine Nationale au Boulevard du 20 Mai, le 20 Mai 2010.

Source : Le Magazine des
Forces de Défense camerounaises, Honneur et Fidélité,
Numéro spécial du 20 Mai 2008, Page37.
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
Les contours de cette nouvelle mission dévolue
à ces Forces, ont été précisés par le
décret n°2007/290 du 01 novembre 2007 du 01 novembre 2007 portant
organisation et conduite de l'action de l'Etat en mer et sur les voies
navigables, qui jette les bases d'une « gouvernance maritime à
la camerounaise » en impliquant tous les acteurs civils et militaires
dans la prise en charge de tous les aspects de la sécurité
maritime. Le Président de la République, clé de
voûte de ce système, nomme le Président du Comité
National de la mer au sein duquel siègent les membres du gouvernement et
d'autres personnalités concernés par les divers aspects de
l'action de l'Etat en mer et sur les voies navigables, ainsi que le
Délégué Général à la mer, «
dépositaire de l'autorité de l'Etat en mer et sur les voies
navigables »... Que ce soit à l'échelon national ou
à l'échelon local, « la chaîne de l'action de
l'Etat » comporte deux types d'instances : les instances de
réflexion et d'orientation et les instances d'action et de direction
(Belinga Ela 2008 : 28-29).
1- LES INSTANCES DE REFLEXION ET D'ORIENTATION
Il s'agit du Comité National de la Mer et de la
Conférence Maritime Nationale. Au niveau local, il s'agit du
Comité Local de Concertation, de conduite et de coordination dont la
composition varie selon qu'il s'agit de l'action en mer ou de l'action sur les
fleuves et les lacs.
En ce qui concerne la mer, le comité local comprend,
outre le commandant des Forces de surface de la Marine, l'autorité
maritime compétente de la Marine marchande, le responsable de
l'administration des douanes de l'échelon considéré, le
responsable de pêche de l'échelon considéré et la
conférence maritime locale.
Pour les fleuves et les lacs, le comité local est
composé des Préfets des départements concernés, du
responsable de l'administration des douanes de l'échelon
considéré et de la conférence fluviale ou lacustre
départementale (Belinga Ela 2008 : 29).
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2- LES INSTANCES D'ACTION ET DE COORDINATION
La conduite et la coordination de l'action de l'Etat en mer
s'exercent, sous l'autorité du Président de la République,
par le Délégué Général à la Mer. A ce
titre, il a autorité à la fois, sur le Commandant des Forces de
surface de la Marine Nationale dans la conduite de l'action de l'Etat en mer et
sur les responsables civils et militaires de l'échelon local
chargés de l'action de l'Etat sur les fleuves et les lacs.
En ce qui concerne la mer, le Commandant des Forces de
surface de la Marine Nationale (COMFORSUR) exerce ses attributions sous la
double autorité du Ministre de la Défense (à travers le
Chef d'Etat-Major des Armées) et du Délégué
Général à la Mer. Il dispose, de ce fait, d'un Bureau
Action de l'Etat en Mer et d'un Centre des Opération Maritimes (COM)
composé, non seulement de personnel de la Marine Nationale, mais aussi,
des autres administrations en tant que de besoins (Ministère des
transports, Douanes, Pêches, Gendarmerie, Police, Environnement etc.). Le
COMFORSUR peut notamment réquisitionner tout moyen public ou
privé nécessaire à l'exécution de ses missions, et
donner des directives aux autres administrations intervenant en mer et leur
réclamer des comptes rendus. En outre, dans le cadre de ses
attributions, il préside la conférence maritime locale qui se
regroupe trimestriellement et qui comprend les représentants des
gouverneurs des régions du Littoral, du Sud et du Sud-ouest, les
Préfets des départements côtiers ou leurs
représentants, l'autorité maritime locale compétente de la
Marine marchande, le représentant de l'administration des douanes de
l'échelon considéré, les commandants des bases navales, le
commandant de la base aérienne de Douala, les commandants de
légion de Gendarmerie du Littoral et du Sud-ouest ou leurs
représentants, les commandants de groupement des sapeurs pompiers
implantés dans les ressorts territoriaux des départements
côtiers et les représentants des autres
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administrations et organismes exerçant des actions en mer
ou situés dans les ressorts territoriaux des départements
côtiers.
S'agissant de l'action dans les fleuves et les lacs, le
Délégué Général à la Mer s'appuie sur
les Préfets et, le cas échéant sur les Gouverneurs. A ce
niveau, la conduite de l'action de l'Etat dans son volet opérationnel
est dévolue au responsable local des Forces de la Marine Nationale ou
à défaut, au responsable de la Gendarmerie Nationale du ressort
territorial du fleuve ou du lac considéré. Il est prévu
ici une Conférence Fluviale ou Lacustre départementale
présidée par le Préfet et regroupant tous les responsables
départementaux concernés par les actions sur les plans d'eaux sus
cités. Toutefois, au cas ou la zone d'activité sur le lac ou le
fleuve couvre le ressort territorial de plusieurs départements, une
conférence fluviale ou lacustre interdépartementale sous la
présidence du Gouverneur de la région du ressort territorial
desdits départements peut être envisagée (Belinga Ela 2008
: 29).
La conduite de l'action de l'Etat en mer par la Marine
Nationale est aujourd'hui traduite dans les eaux camerounaises par des
opérations quotidiennes de sécurisation, des opérations et
installations pétrolières, escorte de tankers, de patrouilles
maritimes régulières exécutées par les
bâtiments des Forces de Surface en l'occurrence les
éléments du BIR DELTA.
Elles disposent à cet effet :
· D'un Bureau Action de l'Etat en Mer ;
· D'un Centre Opérationnel de la Marine (COM)
pouvant être sollicité pour toute détresse en mer et
armé 24h/24 par du personnel de la Marine et des représentants
des administrations intervenant en mer ;
· De patrouilleurs et de vedettes de surveillance (Njonou
Akoutou 2009 : 29).
A titre d'illustration, en 2007, les unités navigantes des
Forces de surface de la Marine ont totalisé 856 jours de mer avec une
moyenne de 86
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
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jours par navire. Au premier trimestre de l'année 2008,
elles totalisaient déjà 433 jours de mer avec une moyenne
mensuelle de 15 jours de mer par navire.
c) LES OPÉRATIONS DE LA MARINE
NATIONALE
Dans les années 1980, le moyen mis en place par le
gouvernement camerounais pour juguler les cambriolages et la pêche
à la dynamite dans le champ pétrolifère a
été la création de l'opération « Dynamite
» confiée à la Marine Nationale. Cette opération
consistait à avoir en permanence au moins une vedette dans le champ et
à repartir tous les soirs les trinômes de fusiliers marins sur
quelques plates-formes choisies de manière aléatoire. A
l'époque, la piraterie sur les côtes camerounaises et dans ses
eaux se réduisait pratiquement à ces deux
phénomènes et la Marine avait des moyens opérationnels.
Les résultats ont été probants mais l'opération a
pris fin en 1994.
A compter de cette date en effet, tous les moyens
opérationnels de la Marine ont été mis à
contribution dans le différend frontalier avec le Nigeria.
Parallèlement à la Marine chargée d'assurer le
contrôle, la protection et l'assistance à l'industrielle
halieutique. Au terme de cette première phase, le gouvernement a
réagi à la recrudescence de la piraterie en lançant
l'opération Galilée, qui n'est rien d'autre qu'un pendant de la
première opération, mais avec moins de moyens.
L'opération Galilée a donc été
doublée par la création et le déploiement à Bakassi
du BIR DELTA.
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
Figure N°15 : Une
patrouille du BIR DELTA aux côtés de la Marine Nationale

Source : Le Magazine des
Forces de Défense camerounaises, Honneur et Fidélité,
Numéro spécial du 20 Mai 2009, Page 20.
Cette unité, embryon des gardes côtes, avait un
personnel bien formé et disposant des matériels conformes et
adaptés, lui permettant de mener à bien ses missions.
Parallèlement, le gouvernement a pensé à un train de
mesures préventives et dans cette optique, d'énormes
investissements ont
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
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été réalisés pour viabiliser la zone,
éduquer les populations autochtones, améliorer leur couverture
sanitaire et y réduire la pauvreté.
Mais, conscient qu'une solution pérenne reste la
maîtrise en tout temps de la situation en tout point des eaux
territoriales, le Cameroun a engagé des études pour couvrir la
frange côtière et les eaux territoriales par un système
intégré de surveillance par radar et radio avec un centre
décisionnel à Douala et éventuellement à
Yaoundé ; les mêmes études visaient à doter la
Marine Nationale de moyens nautiques adaptés ; réalisations
très coûteuses qui ne peuvent se concevoir
qu'étalées sur plusieurs années budgétaires.
Sur le plan normatif, le gouvernement s'est entouré
d'une législation pour la mise en oeuvre de ses initiatives en mer.
D'où les décrets de novembre 2007 sur l'action de l'Etat en mer,
de Juin 2008 portant création d'un Comité National de la
Sécurité Maritime et, de Novembre 2009 relatif à la
pollution en mer (Ntuda Ebodé 2010 : 15-16).
3) L'ARMÉE DE L'AIR FACE A LA MENACE
ASYMÉTRIQUE
Au 21ème siècle
caractérisé selon les géostratèges par des «
technoguérillas », « guerre de la 4ème
génération », « guerres hybrides », « guerres
bâtardes », face à un ennemi qui n'offre aucun front, aucun
Poste de Commandement (PC), aucun objectif, la guerre asymétrique
n'obéissant à aucun modèle classique (de La Grange et
Balancie 2007 : 42), l'Armée de l'Air aura toujours un rôle
déterminant à jouer dans la montée en puissance des
conflits, grâce à sa projection, sa capacité à
fournir une importante base de données par le renseignement, et sa
flexibilité à pouvoir porter le combat de manière
réactive. Une nouvelle culture de la combinaison aéroterrestre
semble nécessaire. Les cibles justiciables de tirs dans les combats de
cités sont plus efficaces lorsque ces tirs sont effectués par des
aéronefs de type hélicoptère. Cette combinaison a
été incisive dans certaines guerres
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
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récentes. Les combinaisons air-sol pourraient
être modulées, en fonction de l'effet majeur défini, mais
toujours est-il que l'association des troupes au sol et des
hélicoptères intègrent mieux le combat aérien dans
les cités, zones de prédilection des combats asymétriques.
Toutefois, on aurait tort de croire que ces nouvelles réalités de
la guerre motiveraient alors les constructeurs à freiner leur programme
de développement, notamment au niveau des autres moyens de combat
tactiques et stratégiques. Nous faisons allusion aux avions furtifs de
5ème génération qui trouvent toujours un champ
de bataille toujours taillé à leur mesure. Quant à la
projection, elle a de beaux jours devant elle, et jouera toujours un rôle
primordial, dans la mesure où la logistique précède
l'action (Badjeck 2009 : 40-41).
Figure
N°16: Les soldats de l'Air
prêt à embarquer dans le Cameroon Air Force

Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
Source : Le Magazine des
Forces de Défense camerounaises, Honneur et Fidélité,
Numéro spécial du 20 Mai 2005, Page 20.
C'est ainsi que l'Armée de l'Air d'aujourd'hui, fait
face à des missions variées, et est sollicitée sur tous
les fronts, tant au niveau de l'espace aérien que terrestre. Pour
exécuter ces missions, elle a le souci de rendre disponible le
matériel volant. La politique rationnelle de maintenance menée
dans un contexte conjoncturel difficile, et la formation des cadres, sont
assurément les corollaires de la réussite dans l'exécution
de ses missions. Ce challenge se cristallise par le déploiement de
vecteurs de combat et des vecteurs de projection.
a) LA DISSUASION DES VECTEURS DE COMBAT
Le premier jalon de la paix est la posture dissuasive, «
Qui veut la paix prépare la guerre ». Les missions d'interdiction,
de défense et de surveillance de l'espace aérien camerounais avec
une incidence terrestre, sont une garantie majeure de la préservation de
l'intégrité nationale et de la sécurité
transfrontalière.
Figure N°17 :
Entraînement d'une unité des Forces terrestre de l'air
à la base aérienne 101 de Yaoundé.
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010

Source : Le Magazine des
Forces de Défense camerounaises, Honneur et Fidélité,
Numéro spécial du 20 Mai 2009, Page 40
La parade dissuasive de la menace aérienne,
préventive des actes d'agression de tout genre, conduit à la
sérénité, la confiance et la paix. Les Forces terrestre de
l'Armée de l'Air, mieux organisées après les derniers
textes spécifiques à la défense, contribuent
également à leur manière, à la préservation
de la paix. Leur vocation est d'assurer la surveillance, la
sécurité, la protection des bases aériennes et des points
sensibles, ainsi que de mener des actions de type commando. Elles
s'intègrent dans l'interarmées et agissent quand elles sont
sollicitées au même titre que les Forces de 3ème
catégorie (BADJECK 2008 : 26).
b) DEPLOIEMENT DES VECTEURS DE PROJECTION
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
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Les voies de communication sont indispensables au
développement. Le Cameroun est un pays étiré en latitude
qui offre des espaces géographiques divers, parsemés cependant de
zones inhospitalières. Cet environnement ne facilite pas le transport
par les moyens classiques. Certaines zones sont systématiquement
inaccessibles à des périodes de l'année, du fait du
climat. La flotte de l'Armée de l'Air allant des
hélicoptères aux avions lourds de transport, permet de rallier en
tout temps les zones les plus enclavées.
Figure N°18 : Quelques
hélicoptères de la flotte de l'Armée de l'Air
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010

Source : Le Magazine des
Forces de Défense camerounaises, Honneur et Fidélité,
Numéro spécial du 20 Mai 2008, Page 34.
Ainsi les populations sinistrées peuvent
bénéficier des services aériens quand la
nécessité s'impose.
Le transport aérien civil a connu des perturbations sur
l'exploitation des vols domestiques. Ceci a entraîné une
diminution de passager entre le septentrion et le reste du pays. Les avions de
transport de type C130 ont pallié la carence, surtout à des
moments importants de la vie nationale, et ce, sans velléités
concurrentielles ou commerciales. On peut évoquer par exemple la
contribution de l'Armée de l'Air au bon déroulement des
élections, particulièrement au Nord du pays à travers le
transport des matériels et des hommes. Ces avions ont ainsi
effectués plusieurs rotations facilitant l'action de
l'administration.
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
La composante Air des Forces de Défense, reflète
ainsi de manière singulière l'union entre l'Armée et la
nation, sur les plans socioéconomiques et de la souveraineté.
L'Armée de l'Air a en outre effectué avec succès le
ravitaillement des lions indomptables lors de la coupe d'Afrique des Nations,
le rapatriement des compatriotes, le transport des jeunes athlètes dans
le cadre des jeux scolaires, et a offert des moyens de projection aux pays amis
de la sous région. Par ailleurs, l'Armée de l'Air contribue aux
opérations de recherche, de sauvetage, et apporte son expertise aux
autres organismes de transport aérien (BADJECK 2008 : 27).
Les perspectives sont nombreuses et se situent dans les
objectifs de la modernité. L'acquisition future de moyens de
contrôles aériens efficients, permettra d'imposer une meilleure
sécurisation du territoire conjugué avec le format supersonique.
Par le soutien aux autres composantes des Forces de Défense,
l'Armée de l'Air s'investira de plus en plus dans les opérations
interarmées, régionales et sous régionales, de maintien de
la paix. Elle a résolument mis le cap sur le 3ème
millénaire.
4) LA GENDARMERIE NATIONALE ET SA CROISASDE
CONTRE L'INSÉCURITÉ
Par son organisation, ses missions et son statut, la
Gendarmerie Nationale est une force militaire à caractère civil.
Partie intégrante des Forces Armées, son action s'exerce sur
l'ensemble du territoire national. Née le 22 février 1960 de la
fusion des auxiliaires camerounais de la Gendarmerie française et des
Forces locales de la Garde camerounaise, la Gendarmerie est actuellement
placée sous l'autorité d'un Ministre Délégué
à la Présidence chargée de la Défense et
dirigée par le Secrétaire d'Etat à la Défense
spécialement chargé de la Gendarmerie Nationale. Cette
dernière appellation souligne un développement structurel et
qualificatif progressif et valorisant dans la mesure où le commandement
de l'Armée a été successivement assuré par un
officier commandant supérieur en 1960, des
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Délégués Généraux et
Secrétaires d'Etats ensuite (Mambou Deffo 2005 : 18).
a) SON ORGANISATION
Suites aux mutations successives, ce corps est aujourd'hui
articulé autour d'une administration centrale, de commandement
territoriaux et de formations spécialisées. A sa création,
la Gendarmerie Nationale était composée de 4 légions, 8
compagnies et 14 escadrons. En 2005, elle compte 3 régions, 10
légions, 5 groupements de Gendarmerie territoriale, 3 groupes
d'escadrons et 3 groupements de circulation routière. A ces formations,
il convient d'ajouter le Groupement Polyvalent d'Intervention de la Gendarmerie
Nationale (GPIGN), le centre médicale et de l'action sociale, le
Groupement d'Escadron d'Intervention (GEI) des Services Centraux et la musique
de la Gendarmerie. Ces institutions sont complétées par le
Commandement des Ecoles et des Centres d'Instruction de Gendarmerie. Celui-ci
coordonne le Stage d'Application des Officiers de la Gendarmerie Nationale
(SAOGN), l'Ecole des sous-officiers (ESO), l'Ecole de perfectionnement en
police judiciaire (CPPJ), le Centre d'Instruction de Yaoundé (CIY) et le
Centre de perfectionnement aux techniques de maintien de l'ordre (CPTMO), une
école à vocation régionale (Mambou Deffo 2005 : 18).
b) SES MISSIONS
Selon les contextes, la Gendarmerie remplit des missions
spécifiques.
En temps de paix, elle participe à l'élaboration du
cadre de défense opérationnel du territoire :
- plan de défense et de protection ;
- plan de surveillance et de protection des ponts sensibles, -
formation et recyclage des fonctionnaires de défense ;
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à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
- plan d'organisation de la défense populaire ;
- actions psychologiques ;
- tenue et mise à jour des dossiers territoriaux et
registre des personnes mobilisables et de réserves.
En temps de guerre, elle assure :
- l'engagement de ses unités mobiles et territoriales ;
- l'exécution des missions de défense du territoire
national et de protection des points sensibles ;
- le maintien de l'ordre dans les agglomérations et au
sein des
troupes combattantes par le biais de ses unités
prévôtales.
En sommes, la Gendarmerie Nationale assure le maintien de
l'ordre et le rétablissement de l'ordre en temps de paix. En temps de
guerre, la Gendarmerie reste sur place pour assurer le fonctionnement normal
des institutions, sans esprit de trahison tandis que la Gendarmerie mobile
rejoint les Forces de troisième catégorie au champ de bataille
(Mambou Deffo 2005 : 18).
Figure N°19 : Parade
d'unité section de la Gendarmerie Nationale au Boulevard du 20 Mai,
Yaoundé.
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à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010

Source : Le Magazine THE
PRESIDENT'S YEAR 2010, New Hope, Page 25.
c) LES EFFETS DE LA REFORME
La modernisation des Forces de Défense engagée
depuis Juillet 2001 par le Président de la République Chef des
Armées a profondément modifiée la Gendarmerie aussi bien
sur le plan organisationnel que sur celui de la doctrine d'emploi. Les
nouvelles dispositions ont consacré la naissance des structures
adaptées aux exigences de la mondialisation et permettant au personnel
de mieux évoluer dans son environnement tout en gérant avec
efficacité la sécurité des personnes et des biens. Dans
les services centraux, on note la mise en place d'une direction des affaires
générales, d'une direction centrale de l'administration et de la
logistique, d'un poste de commandement opérationnel de la Gendarmerie et
d'un laboratoire scientifique.
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à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
Au niveau des services extérieurs, les innovations
portent sur les régions de gendarmerie. Elles sont structurées de
manière à assurer une omniprésence territoriale
préservant la caractéristique majeure de la Gendarmerie. Chaque
région rassemble en son sein des groupements et services permettant son
fonctionnement. La réforme a cependant maintenu les légions dans
les chefs lieux de province tout en créant des Centres
Opérationnels de Gendarmerie (COG), des structures placées sous
les ordres de chaque commandant de légion, le centre opérationnel
de gendarmerie est chargé de la gestion des appels de détresse de
la population qui relèvent de sa compétence territoriale. Il
reçoit des appels téléphoniques et les répercute
instantanément vers les unités positionnées sur le terrain
24h/24. Ce rôle est aujourd'hui fort apprécié des
populations au vue de l'efficacité et de la rapidité des actions
menées par les unités de Gendarmerie dans la lutte contre le
grand banditisme.
Dans le domaine de la formation, une école à
vocation régionale spécialisée dans le maintien de l'ordre
a vu le jour à Awae dans la région du Centre. Cette institution
est le fruit de la coopération entre la France et le Cameroun.
Par ailleurs, afin de faire face aux délicates missions
qui exigent une bonne connaissance du droit et une culture
générale, le niveau de recrutement a été
relevé. Désormais, le diplôme minimum requis est le BEPC
pour les élèves gendarmes et le probatoire pour les
élèves sousofficiers. Ces innovations au niveau de la gestion des
personnels sont complétées par le rajeunissement des
effectifs.
La décentralisation des tâches permet
également d'axer les efforts sur la conception des stratégies de
lutte contre l'insécurité. La gestion des appels de
détresse des populations se fait de manière instantanée.
Le traitement des renseignements grâce aux nouvelles technologies de
transmissions des données garde toute son efficacité et permet
des réactions en temps réel et une conduite efficiente des
opérations. Cette méthode
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
consacre une orientation définie de l'action
quotidienne de la Gendarmerie vers une stratégie de proximité
avec les populations qui restaure la confiance et assure des contacts
permanents et réciproques (Mambou Deffo 2005 : 18).
d) LA GENDARMERIE FACE AUX MENACES ET
VULNERABILITÉS MAJEURES
Tout en respectant les formes légales et
règlementaires, la Gendarmerie Nationale est apte à faire face
à ces menaces et aux vulnérabilités majeures que sont
l'insécurité, les infractions à la loi pénale, les
troubles à l'ordre public, les atteintes à la sûreté
de l'Etat, les extrémismes religieux, les trafics de drogue, la
prostitution, la corruption etc. Les menaces et les
vulnérabilités majeures, d'origine interne ou externe sont prises
en compte par la Gendarmerie qui a pour vocation de lutter contre la petite
délinquance et de combattre la grande criminalité.
La Gendarmerie Nationale, force militaire aux attributions
civiles, est chargée de l'application des lois et règlements,
ainsi que du maintien de l'ordre, surtout en milieu rural. Elle participe, en
outre, à la protection civile, à la défense passive et
à la défense militaire.
Il s'agit au quotidien, pour cette arme, de protéger
l'individu citoyen, l'Etat Nation, puis contrôler et protéger les
espaces. La proximité nécessite une connaissance mutuelle entre
la population et les gendarmes résidant dans les localités dont
ils ont la charge. Figures familières à leurs concitoyens, ils
sont bien intégrés au sein de la population qu'ils
protègent. La protection de l'individu citoyen réside dans la
préservation de ses droits fondamentaux, notamment
l'intégrité physique et les biens ainsi que le libre exercice des
libertés publiques.
Protéger l'Etat Nation consiste à renseigner les
autorités gouvernementales et territoriales, assurer la
sécurité des organes
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gouvernementaux et des autorités civiles et militaires,
préserver l'ordre public, sauvegarder la vie économique et la
pérennité de l'esprit de défense.
Le contrôle et la protection des espaces permettent de
garantir l'intégrité du territoire national et le contrôle
des frontières, la libre disposition des voies de communication, la
protection des zones à risque et la sécurité des points
sensibles (Kouakap 2007 : 21).
e) LES DEMEMBREMENTS ACTIFS DE LA GENDARMERIE
NATIONALE
D'une manière générale, la Gendarmerie,
à travers les branches qui la composent, est impliquée dans
chacune des quatre grandes fonctions de défense : dissuasion,
prévention, protection, projection. Le maintien de l'ordre public
constitue désormais une fonction centrale dans la stabilité des
démocraties.
La Gendarmerie mobile est un outil particulièrement
adapté à la gestion des troubles à l'ordre public en
situation très dégradée. Elle est un outil du quotidien
permettant de garantir le primat du respect de la personne en lui garantissant
l'exercice de ses droits fondamentaux, dans le cadre du contrat social et dans
une logique d'intérêt général, participant ainsi
à la cohésion nationale. Elle est au contact régulier de
la population avec laquelle elle entretient des rapports
privilégiés. Chaque brigade est chargée de la surveillance
jour et nuit de sa circonscription ainsi que de l'accueil du public. Les
Gendarmes y reçoivent les plaintes, effectuent des enquêtes
administratives et judiciaires et de manière générale
répondent aux appels d'urgence. Ses capacités d'action sont
renforcées par des unités spécialisées de
Gendarmerie et des unités hautement qualifiées à l'instar
du Groupement Polyvalent d'Intervention de la Gendarmerie Nationale (GPIGN)
à l'oeuvre dans le Grand Nord face aux coupeurs de routes.
Figure N°20 : Quelques
manoeuvres du GPIGN
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à la sécurité : d'une Armée « de garde »
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Source : Le Magazine des
Forces de Défense camerounaises, Honneur et Fidélité,
Numéro spécial du 20 Mai 2008, Page 49.
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à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
La Gendarmerie Nationale est une force humaine en
perpétuelle adaptation, constitutive de l'identité nationale, qui
puise sa légitimité dans l'histoire du Cameroun. Force de
sécurité intérieure, elle inscrit, pour l'essentiel son
action dans le cadre de la fonction de protection telle qu'elle est
définie par les textes. La sécurité intérieure est
une mission très noble. Elle ne concerne pas seulement la défense
militaire et les Forces Armées, mais toutes les administrations
responsables de grandes catégories de fonctions ou de ressources
essentielles à la vie du pays. La Gendarmerie nationale, de par ses
capacités spécifiques qui lui confèrent une
notoriété certaine en est un acteur incontournable
Forte d'une organisation rationnelle, d'une ressource humaine
compétente, des équipements correspondant aux besoins
opérationnels, la Gendarmerie Nationale exerce sa compétence
générale de sécurité intérieure et s'adapte
à la diversité de toutes les missions du spectre paix - crise
-guerre (Kouakap 2007 : 21).
5) L'IMPLICATION DES CIVILS DANS LA LUTTE CONTRE LES
NOUVELLES FORMES DE MENACES
Il s'agit des autorités civiles et des populations locales
vivant les exactions des ennemis inconnus, mais à la présence
remarquable.
a) LA DIPLOMATIE DES AUTORITÉS LOCALES
La dynamique transfrontalière est également
insufflée par les nombreux contacts noués par les
autorités civiles, politiques ou traditionnelles avec leurs homologues
des pays voisins. Cette diplomatie formelle contribue à sa
manière et parfois avec des résultats probants, à
rapprocher les autorités centrales, surtout en temps de crise.
Onana Mfegue reconnaissait ainsi l'importance de cette
diplomatie informelle en relevant que du fait de la multiplication des
incidents entre populations riveraines de certains segments frontaliers, d'une
part, et de
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l'éloignement de ces zones par rapport aux centres de
décisions, d'autre part, les gouvernements ont
délégué le pouvoir de règlement des conflits
mineurs aux autorités administratives et traditionnelles locales. Ceci a
l'avantage d'accélérer les procédures en gagnant en
coût et en efficacité, dans la mesure où ces responsables
locaux se côtoient au quotidien. Quatre dimensions vont nous permettre
ici de l'illustrer (Ntuda Ebode 2010 : 72- 73).
Dans l'espace frontalier méridional d'abord,
l'intensification des flux frontaliers dans la région aux trois
frontières (Cameroun, Gabon et Guinée Equatoriale) multiplie des
occasions d'affrontement et de conflit entre acteurs nationaux et
étrangers. On se souvient par exemple que les frontières entre le
Cameroun et le Gabon d'une part, et le Guinée Equatoriale, d'autre part,
ont fait l'objet de plusieurs fermetures unilatérales en guise de
protestations.
Si dans certains cas, ces fermetures résultaient des
accrochages à l'intérieur du pays, dans d'autre, elles en
étaient la conséquence des différends qui se sont produits
dans la zone frontalière. La résistance du facteur
irrédentiste peut ainsi animer les autorités traditionnelles de
part et d'autre de la frontière, à rechercher des voies et moyens
pour maintenir le calme dans les espaces frontaliers. Leur rôle est
essentiel, car dans certains cas, les populations en conflit sont issues du
même groupe clanique, les Fang, en l'occurrence.
En dehors des occasions de friction qui aboutissent à
la tenue des assises de réconciliation, on peut mentionner des
initiatives locales visant à rapprocher les peuples de part et d'autre
des frontières. Il serait intéressant de voir comment se
déploie cette nouvelle forme de coopération, de dialogue et
d'échange qui a abouti, en mai 2006, à la signature de la
convention entre les différentes parties qui ont en partage la zone
frontalière de la vallée du Ntem (Ntuda Ebode 2010 : 73).
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
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En effet, les maires en charge des collectivités
locales de la zone transfrontalière du Cameroun, du Gabon et de la
Guinée Equatoriale, motivés par SNV, organisme
néerlandais, sont convenus de la signature d'un protocole d'accord, en
vue d'une meilleure fluidité dans leurs échanges commerciaux et
du renforcement de l'intégration régionale. Ils ont aussi
marqué leur détermination à mettre un terme sur les
dérives douanières et policières, mais surtout sur les
tracasseries qui constituent des blocages à l'épanouissement de
leurs populations. Du fait de la proximité que ces collectivités
locales ont en commun, eu égard au patrimoine et à
l'héritage qu'ils sont condamnés à partager, le protocole
d'accord semble être une heureuse opportunité pour ouvrir les
frontières afin d'éviter un isolement, voire un suicide
collectif.
A côté des initiatives locales visant à
promouvoir une coopération transfrontalière, on peut donc aussi
mentionner le rôle essentiel joué par des partenaires d'appui au
développement comme la SNV, qui travaille en partenariat avec les
autorités locales (communes et services décentralisés de
l'Etat). Sa principale activité est de renforcer les capacités
des organisations intermédiaires pour qu'elles deviennent des agents de
développement. C'est ainsi qu'elle développe une stratégie
participative intégrée par la consultation, la formation, la
mobilisation et la diffusion de l'information et des connaissances aux
organisations intermédiaires et collectivités. Les aspects «
genre », « minorités », « environnement » et
« durabilité » sont systématiquement
intégrés dans cette dynamique d'appui-conseil (Ntuda Ebode 2010 :
73-74).
La première expérience de l'approche
intercommunale avec la SNV avait déjà obtenus des
résultats probants dans le cadre d'aménagement pour la bande
côtière Kribi-Campo. Avec les quatre municipalités
camerounaises (Olamze, Ambam, Campo et Ma'an, le conseil départemental
de Bitam, et les trois municipalités de la Guinée
équatoriale ; les objectifs généraux du plan
d'aménagement transfrontalier, vont s'établir autour de la
planification
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transfrontalière, la mobilisation des ressources
propres de la commune pour la mise en oeuvre du plan frontalier et la recherche
conjointe et individuelle des fonds extérieurs pour la mise oeuvre du
plan frontalier.
Dans l'espace frontalier oriental ensuite, l'espace
transfrontalier Cameroun République Centrafricaine est plus
polémogène que celui de la partie méridionale du Cameroun.
En effet, il est écumé par des gangs de bandits et des mouvements
politico-militaires qui tentent de transformer en une zone échappant
à tout contrôle des Etats. L'insécurité prend
plusieurs visages et se décline de plus en plus sous la forme des actes
des coupeurs de route, du trafic et de la circulation illicite des Armes
Légères et de Petits Calibre (ALPC), du vol de bétail,
voire de la prise d'otages avec demande de rançon. Cette
insécurité qui résulte des soubresauts et des hoquets de
la réforme du secteur de la sécurité au Tchad et en
Centrafrique, est en fait entretenue par d'ex-combattants, de militaires
démobilisés et de bandits de grand chemin (Ntuda Ebode 2010 :
74-75).
Pour juguler cette insécurité, des contacts ont
été noués par des autorités locales du Cameroun et
de la République Centrafricaine dans le but de mutualiser leurs moyens
et leurs méthodes. C'est ainsi que le vendredi 08 juillet 2005, les
éléments de l'Armée centrafricaine se sont joints à
ceux de l'Armée camerounaise pour un défilé militaire dans
les rues de Toktoyo, une ville située à la frontière des
deux pays.
D'autre part, les difficultés auxquelles étaient
confrontés les ressortissants centrafricains dans le village de Kombo
ont été résolues grâce à la
coopération entre le Préfet de Bouar et le Sous-préfet de
GarouaBoulai.
Dans l'espace frontalier occidental, pendant le conflit de
Bakassi, de rencontres, parfois discrètes, ont été
organisées par les autorités locales. Ces rencontres officieuses
ont eu lieu entre des officiels camerounais et nigérians. En effet, une
délégation conduite par le Président de l'Assemblée
Nationale l'Honorable Cavaye Yeguié Djibril (originaire de
l'Extrême Nord
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à la sécurité : d'une Armée « de garde »
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du Cameroun) était venue présenter ses
condoléances au nouveau Président nigérian Aboubakar. Par
le choix de cette haute personnalité de la République,
au-delà de son statut de n°2 de l'Etat, les autorités de
Yaoundé entendaient donner un accent moins protocolaire, mais plus
familial à la rencontre (Ntuda Ebode 2010 : 75).
Au niveau local, un petit groupe de chefs traditionnels peuls
du Nord-Cameroun avait dans la foulée rendu une visite discrète
à l'émir de Kano, à l'occasion du 40ème
jour du décès de Sani Abacha. Toutes ces actions visaient
à mettre en place des mesures de confiance et de jeter les bases d'une
véritable coopération décentralisée. L'appartenance
à une sphère culturelle explique sans doute le maintien de cette
forme de diplomatie au moment où le Cameroun et le Nigeria avaient
presque déjà rompu les fils tenus du dialogue.
Dans la région frontière septentrionale enfin,
la zone frontalière du Lac Tchad apparaît de loin comme un espace
conflictogène. La forte concentration des populations dans cet espace
lacustre est source de conflits entre les différentes
communautés. La Commission du Bassin du Lac Tchad (CBLT) a ainsi
été créée pour tenter de résorber cette
menace, puisque ses principales missions étaient entre autres, de
réguler et de contrôler l'utilisation de l'eau et des autres
ressources naturelles du bassin, d'examiner les plaintes et de promouvoir la
prévention et la régulation des conflits à travers la
dynamisation de la coopération régionale (Ntuda Ebode 2010 :
76).
La plupart des conflits qui ont aux prises les
différentes communautés ont trouvé leur résolution
en dehors du cadre de la diplomatie classique que promeut la CBLT. En effet,
comme le notait fort opportunément Elie Mvié Meka, la CBLT,
à sa création, accorde une mince disposition à la
prévention et à la résolution des conflits. Son action
reste très discrète dans le processus de prévention ou de
gestion des conflits survenus dans le bassin du Lac Tchad. C'est ainsi que le
Lac Iro (Lac
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Tchad), pour éviter l'escalade des 600
cavaliers-éleveurs armés, venus venger leurs frères
tués par les agriculteurs, le 2 décembre 2004, le Conseil des
sages a privilégié une indemnisation de 100 boeufs. Ce cas
illustre bien les arrangements à l'amiable qui ont cours dans cet espace
frontalier et qui visent à maintenir la paix entre les
différentes communautés.
En somme, le Cameroun s'est engagé dans une dynamique
bilatérale d'intégration sous-régionale dans le cadre
formel des commissions mixtes bilatérales ou à travers les
rencontres officieuses entre autorités locales. Toutes choses qui
semblent rappeler la palabre africaine. En tout cas, ces différents
moyens ont contribué, à leur niveau à bâtir des
ponts de coopération et de concertation entre le Cameroun et ses
différents voisins.
Toutefois, si comme nous venons de le voir, la
frontière barrière de la période bipolaire, a
cédé sa place dans la zone francophone à la
frontière, lieux d'échanges, matérialisés par la
promotion de marchés frontaliers et d'une diplomatie
périphérique (Ntuda Ebode 2010 : 76-77).
b) L'APPORT DES POPULATIONS
Dans l'espace transfrontalier Cameroun République
Centrafricaine polémogène ou l'insécurité se
décline sous la forme des actes des coupeurs de route, du trafic et de
la circulation illicite des Armes Légères et de Petits calibre
(ALPC), du vol de bétail, voire de la prise d'otages avec demande de
rançon, les stratégies communes adoptées par les
différents Etats frontaliers ont porté des fruits grâce au
concours des populations locales n'hésitant plus à collaborer
avec des Forces de sécurité et de défense (Ntuda Ebode
2010 : 75). Celles-ci ont été suffisamment sensibilisées
sur le phénomène des coupeurs de routes, dont ils sont soit
victimes, soit complices. Jusqu'ici, leur apport a été
considérable. Au demeurant, la communication du Ministère de la
Défense ne cesse de leur rappeler, par les numéros d'urgence de
la Gendarmerie et de la Police, de ne pas hésiter à faire
état d'un quelconque soupçon sur la position ou le comportement
de
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certaines personnes de leurs régions, susceptibles de
nuire à leurs intérêts (Nkoa Atenga 2007 : 19).
Une synergie de toutes les Forces de Défense et de
Police appuyées par toutes les Forces vives de la Nation s'impose. Il
leur appartient de continuer à tout mettre en oeuvre pour plus de
sécurité.
A l'épreuve des faits, tout est mis à
contribution par l'Armée et la Nation pour annihiler toutes menaces
d'insécurité. Toutes ces opérations civilo-militaires ne
porteront de fruits que grâce à la discipline qui est la force
principale des Armées et la gestion des renseignements.
Face aux actes contre la discipline, l'honneur, le devoir
militaire et la probité allant jusqu'à l'implication de certains
personnels des Forces de Défense dans les faits de criminalité et
de grand banditisme, actes constituant des manquements aux consignes, des
négligences graves et des fautes professionnelles dans
l'exécution des missions de défense et de sécurité,
affectant dangereusement la capacité opérationnelle des Forces de
Défense et handicapant de manière notable le socle du lien
Armée et Nation sur lequel repose la politique de défense
camerounaise, le Ministre Délégué à la
Présidence chargée de la défense a pris des directives le
18 décembre 2009. Il a prescrit aux chefs militaires, à tous les
niveaux :
- De marquer un changement solennel de comportement par une
vigoureuse reprise en main des hommes, car leur responsabilité sera
désormais engagée dans les dérives des personnels
placés sous leurs ordres ;
- De mettre en oeuvre un plan méthodique de lutte contre
l'indiscipline au sein des forces ;
- D'intensifier les actions pédagogiques
préventives visant la sensibilisation des personnels ;
- De systématiser les sanctions contre les personnels
indisciplinés et d'attribuer des récompenses aux personnels
méritants et exemplaires.
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à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
Il a attiré l'attention des chefs militaires sur leur
rôle et sur les vertus de l'exemple, tout en les invitant à faire
à la fois preuve d'autorité et d'équité. A tous, il
a prescrit l'impérieuse nécessité de la notion du sens des
responsabilités qui implique :
1. L'obligation permanente d'efficacité ;
2. Les résultats dans l'exécution des missions
avec les moyens disponibles ;
3. Les comptes-rendus dignes d'intérêt au
commandement (Mebe Ngo'o 2010 : 56).
S'agissant de la gestion du renseignement, des
séminaires de recyclage et de renforcement des capacités des
sous-officiers et des officiers sont organisés avec pour modules la
valeur du renseignement dans la lutte contre les menaces asymétrique et
le caractère secret défense du renseignement.
II- LE DISPOSITIF INTERNATIONAL DE LUTTE CONTRE LES
MENACES ASYMÉTRIQUES
Il s'agit des initiatives sous-régionales qu'accompagne un
soutien international.
1) LES INITIATIVES SOUS-RÉGIONALES
Il s'agit de la Commission du Golfe de Guinée et la
reprise en main de la sûreté maritime du Golfe de Guinée
par la CEEAC.
a) LA COMMISSION DU GOLFE DE GUINÉE
Le traité instituant la Commission du Golfe de
Guinée a été signé à Libreville le 03
Juillet 2001. La Commission du Golfe de Guinée dont le siège se
trouve à Luanda regroupe l'Angola, la RDC, le Congo, le Nigeria, Sao
Tome et Principe, le Gabon, le Cameroun, la Guinée Equatoriale. Elle
vise l'harmonisation des politiques des Etats membres en matière de
sécurité et de paix, de gestion de pétrole et de
ressources naturelles, de
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
transport et de libre circulation des hommes et des biens au
large du Golfe de Guinée. Cette commission a aussi pour objectif de
renforcer les liens de coopération et de solidarité qui existent
entre les Etats membres, de créer les conditions de confiance mutuelles,
de paix et sécurité propices au développement harmonieux
des Etats membres.
Le traité sur la Commission du Golfe de Guinée
met l'accent sur le phénomène des conflits ouverts ou latents et
les ressources naturelles et la méfiance d'autrui, souvent à
l'origine des conflits. Ce qui pousse sans doute Jean Ping à affirmer
que « la commission du Golfe de Guinée est donc une
opportunité incontestable qui rentre dans l'ère du temps non pas
comme un simple effet de style mais, comme une nécessité
politique au sens propre du terme. L'espace régionale est de mieux en
mieux saisie comme référentiel de la coopération
internationale ». Mais, ce volontarisme affiché du
traité sera désillusionné par les souverainetés
constituant un obstacle à sa véritable mise en oeuvre (Atonfack
Guemo 2010 : 139).
Force est cependant à ce jour de constater que depuis
sa création, la Commission n'a pas fait véritablement fonctionner
ses institutions. Alors même que dans l'esprit de ses concepteurs, la
Commission du Golfe de Guinée était censée être un
cadre de concertation entre les pays de cette région. En effet, les
négociations préalables avaient été largement
dominées par les violences et l'insécurité grandissantes
dans les eaux régionales malgré le volontarisme des uns et des
autres. La mise en place de la Commission du Golfe de Guinée
procédait précisément à la lucidité des
dirigeants régionaux face à cette triste réalité.
La réalité des conflits territoriaux sous régionaux et les
excès de cramponnement au pseudo souverainetés de façade
auront eu finalement raison de cet accord qui, quoi que sous réanimation
n'est pas encore enterré. Alors même que l'article 4, relatif au
principe de fonctionnement de ce traité renvoyait expressément et
sans équivoque les parties contractantes à respecter les
principes contenus
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à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
dans la charte des Nations Unies et dans le Charte de
l'Organisation de l'Unité Africaine notamment :
- L'égalité souveraine de tous les Etats membres
;
- La non-ingérence dans les affaires intérieures
des Etats membres ;
- Le règlement pacifique des différends ;
- L'intangibilité des frontières
héritées de la colonisation ; - La non-agression ;
- La non utilisation de son territoire au fin
d'activités dirigées contre la souveraineté et
l'intégrité territoriale d'un autre Etat membre (Atonfack Guemo
2010 : 139-140).
b) LA REPRISE EN MAIN DE LA SURETÉ MARITIME DU
GOLFE DE GUINÉE PAR LA CEEAC
Il s'agit en l'occurrence du rôle central joué par
le COPAX et le CRESMAC.
1- LE ROLE CENTRALE DU COPAX
Prenant en compte l'insécurité grandissante dans
les eaux côtières du Golfe de Guinée, et les
éventuelles conséquences pour les économies et la
stabilité des zones côtières des Etats concernés, la
deuxième réunion du Conseil des Ministres du COPAX (Conseil de
Paix et de Sécurité en Afrique Centrale) tenue le 26
Février 2008 à Libreville instruit le Secrétariat
Général de la CEEAC à diligenter une étude visant
à proposer une « stratégie de sécurisation des
intérêts vitaux en mer des Etats de la CEEAC du Golfe de
Guinée, articulée autour du COPAX et favorisant une synergie avec
la Commission du Golfe de Guinée et la CEDEAO ». Les termes de
référence de la dite étude seront validés lors de
la huitième réunion de la Commission de Défense et de
Sécurité (CDS) du COPAX tenue le 02 Mai 2008 à
Yaoundé, et la stratégie qui en ressort positivement
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censurée le 05 Décembre 2008 à Kinshasa
à l'occasion de la neuvième réunion de la Commission de
Défense et de Sécurité.
C'est donc en toute logique que la troisième
réunion du Conseil des Ministres du COPAX tenue à Brazzaville le
27 Février 2009 valide la stratégie communautaire proposée
et adopte le projet de protocole d'accord y relatif (Atonfack Guemo 2010 :
140).
2- LE CRESMAC ET LA MISE OEUVRE DU PROJET
COMMUNAUTAIRE
La stratégie de sécurisation des
intérêts en mer des Etats riverains du Golfe de Guinée et
membre de la CEEAC est prévue pour être mise en oeuvre par un
organisme dédié tout spécialement à la tâche
: le CRESMAC (Centre de Coordination Régionale pour la
Sécurité Maritime de l'Afrique Centrale). Rattaché au
secrétariat de la CEEAC, cet organisme aura la particularité de
mettre en commun les compétences civiles et militaires. Les axes de
cette stratégie sont les suivants :
- Gestion communautaire de l'information par la mise en place
des mécanismes de recherche et d'échange des informations entre
les Etats ;
- Surveillance communautaire par la mise en place de
procédures opérationnelles conjointes et des moyens
interopérables de surveillance et d'intervention ;
- Harmonisation de l'action des Etats en mer au plan juridique et
institutionnel ;
- Institution d'une taxe communautaire sur la base des
mécanismes existants ;
- Acquisition et entretien des équipements majeurs
dédiés à la stratégie pour garantir une
capacité opérationnelle minimale à chaque Etat
concerné ;
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- Institutionnalisation d'une conférence Maritime au
niveau de la CDS afin de maintenir la mobilisation de tous les
opérateurs du milieu marin.
La 14ème session ordinaire de la
Conférence des Chefs d'Etats et de Gouvernement de la CEEAC (Kinshasa,
le 24 Octobre 2009) a diligenté l'implantation du Centre Régional
de Sécurisation Maritime de l'Afrique Centrale (CRESMAC), à
Pointe Noire en République de Congo et la mise en place du
mécanisme de financement de la stratégie globale de
sécurisation, ainsi que l'organisation d'une Conférence Maritime
Internationale dès le début de l'année 2010 (Atonfack
Guemo 2010 : 141).
c) LA MISE EN COMMUN DES MOYENS DES ÉTATS :
LE
REGROUPEMENT EN ZONES A, B ET D
Une fois la stratégie adoptée et prenant en
compte l'immensité de la zone maritime à protéger, les
stratèges de la CEEAC vont diversifier l'espace maritime en 4 zones
géographiques (3 zones actuellement : A, B, et D) allant de la
frontière angolaise au Sud aux limites nord de la zone avec le Nigeria.
La réalité qui sort de ce découpage est que la zone «
D » relative aux Etats du Gabon, du Cameroun, de la Guinée
Equatoriale, de Sao Tome et Principe est la plus en proie à
l'insécurité maritime.
Compte tenu de l'urgence d'une réaction imposée
par la situation de cette zone, le Conseil des Ministres du COPAX du 27
Février 2009 à Brazzaville recommandera aux ministres des Etats
CEEAC de la zone D de se retrouver à Yaoundé pour signer un
accord technique et lancer les premières opérations du plan de
surveillance de ladite zone sous l'égide du Secrétariat
Général de la CEEAC. La suite des actes posés auront
obéit au chronogramme suivant :
· Signature de l'accord technique relatif à la
surveillance maritime de la Zone D : 06 Mai 2009 à Yaoundé ;
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· Démarrage symbolique des patrouilles conjointes le
07 Mai 2009 à Douala ;
· Signature du premier plan de surveillance
dénommé SECMAR1 par les Chefs d'Etat Majors
généraux de la Zone D : le 11 Août 2009 à Malabo
;
· Regroupement des patrouilleurs du Cameroun, du Gabon
et de la Guinée Equatoriale, pour une mise en oeuvre
opérationnelle du Plan SECMAR 1 : le 16 Septembre 2009 à Malabo
;
· Signature du Protocole d'Accord relatif à la
sécurisation des intérêts vitaux des Etats de la CEEAC en
mer : 24 Octobre 2009 à Kinshasa ;
· Le Protocole d'Accord global est en fait l'instrument
général qui se devait d'être mis en oeuvre par un accord
technique relatif aux aspects pratiques de la sécurisation des
intérêts vitaux des Etats de la CEEAC en mer. Contrairement
à l'Accord technique « Zone D » qui a été
signé et mis en oeuvre suivant des procédés d'urgence, le
protocole d'Accord concerne tous les Etats de la CEEAC, de l'Angola le plus au
sud du Cameroun, limitrophe du Nigeria dans le Nord du Golfe de
Guinée.
Après la signature du Protocole d'Accord le 24 Octobre
2009 à Kinshasa, les Etats ont tenu à souligner que la mise en
oeuvre de la stratégie de sécurisation des intérêts
vitaux en mer des Etats de la CEEAC, du Golfe de Guinée devait rester
impérativement une prérogative régalienne des Etats et de
la communauté (Atonfack Guemo 2010 : 142-143).
d) L'EXERCICE OBANGAME EXPRESS 2011
L'exercice « OBANGAMA EXPRESS 2O11 » qui s'est
déroulé à la base navale de Douala du 21 au 23 avril 2011
est une application de la volonté des Etats de l'Afrique de l'Afrique
Centrale d'unir leurs efforts pour combattre la piraterie maritime dans le
Golfe de Guinée, partant d'un
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accord technique sur la sécurité maritime de
cette zone d'influence géostratégique signé à
Yaoundé le 6 mai 2009 par les pays qui le partagent. « OBANGAME
» l'équivalent de « tous pour un, un pour tous »
en langue Fang, parlée au Cameroun, au Gabon et en Guinée
Equatoriale est un exercice de surveillance maritime visant au renforcement des
capacités procédurales et opérationnelles des Etats de la
zone D du Golfe de Guinée. Il avait pour but d'après le
communiqué de presse du Ministre Délégué à
la Présidence chargée de la Défense, Edgard Alain MEBE
NGO'O de « contribuer au renforcement du dispositif de
sécurité au sein du Golfe de Guinée ». Le Ministre de
la Défense a rappelé à cette occasion la
nécessité d'une mutualisation continue des moyens des Etats
concernés par la sécurité maritime dans la
sous-région.
La simulation était conduite par une dizaine de pays
dont ceux de la Communauté Economique des Etats de l'Afrique Centrale
(CEEAC) constituant la zone D en partenariat avec le Commandement des Forces
Navales américaines pour l'Afrique (Africom) et des pays de l'Union
Européenne (UE). Elle s'est déroulée en deux phases :
- La première, entièrement théorique,
était consacrée à l'élaboration d'une
procédure de travail commune aux parties prenantes. Les parties se sont
par exemple accordé sur l'impérative
interopérabilité des matériels de communication, et
l'anglais aurait été retenu comme langue de communication. Il
était aussi question d'harmoniser les chronogrammes d'activités
du Centre multinational de coordination, avec des Etats riverains de la zone
maritime D.
- Les opérations pratiques quant à elles, ont
enregistré la participation des navires du Cameroun, du Gabon, de la
Guinée Equatoriale, du Nigeria, des Etats-Unis d'Amérique, de
l'Espagne, de la France et de la Belgique. Les deux groupes de manoeuvre
constitués à cet effet ont simulé les diverses techniques
d'un contrôle de zone.
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Au menu de cette phase, le repérage, l'identification,
l'interprétation et la fouille de navires ou d'embarcations
suspects51.
Figure N°21 :
opérations pratiques de l'exercice OBANGAME EXPRESS 2O11 à la
base navale de Douala.

Source : Magazine des
Forces de Défense Honneur et Fidélité, Numéro
spécial du 20 mai 2011, Page 28.
51 Magazine des Forces de Défense Honneur et
Fidélité, Numéro spécial du 20 mai 2011, Page
27-28.
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2) LE SOUTIEN INTERNATIONAL
Il repose sur la Convention de SUA de 1988 et les protocoles
de 2005, le code international pour la sûreté des navires et des
installations portuaires (CODE ISPS).
a) LES CONVENTIONS DE SUA DE 1988 ET LES PROTOCOLES
DE 2005 : DES MESURES ESSENTIELLEMENT
REPRESSIVES.
La Convention pour la répression d'actes illicites
contre la sécurité de la navigation maritime de 1988, dite
Convention SUA (Suppression of Unlawful Acts), et son protocole pour la
répression d'actes illicites contre la sécurité des
plates-formes fixes situées sur le plateau continental a le double
mérite de requalifier les différentes atteintes à la
sécurité et la sûreté maritime, en y incluant des
actes qui jusque-là échappaient au contrôle juridique des
Etats, du fait de leur exclusion automatique du champ de compétence de
la Convention de Montego Bay. La Convention de SUA est cependant loin
d'être satisfaisante, car comportant des lacunes non négligeables.
D'où l'urgence de protocoles adoptés à Londres en 2005.
S'agissant de la requalification des actes illicites contre la
sécurité de la navigation, l'article 3 de la Convention de SUA
énumère les infractions qui rentrent dans le champ de
compétence de cette Convention. Selon cet article, commet une infraction
pénale toute personne qui :
· s'empare d'un navire où en exerce le
contrôle par violence ou menace de violence ;
· accomplit un acte de violence à l'encontre
d'une personne se trouvant à bord d'un navire si cet acte est de nature
à compromettre la sécurité de la navigation du navire ;
· détruit un navire ou cause à un navire
ou à sa cargaison des dommages qui sont de nature à compromettre
la sécurité de la navigation du navire ;
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· place sur un navire un dispositif propre à
détruire le navire ou à causer au navire des dommages qui
compromettent la sécurité de la navigation du navire (Atonfack
Guemo 2010 : 125).
L'article 3 de la Convention SUA interdit aussi de
détruire ou d'endommager gravement des installations ou services de
navigation maritime, de communiquer intentionnellement de fausses informations
susceptibles de compromettre la sécurité de la navigation du
navire, de blesser ou tuer toute personne lorsque ces faits présentent
un lien de connexité avec l'une des infractions
susmentionnées.
La Convention de Rome pour la répression des actes
illicites contre la navigation maritime oblige les Etats contractants à
prendre des mesures pour garantir que les terroristes soient
appréhendés et jugés dans n'importe quelle région
du monde où ils tenteraient de se cacher. Elle permet donc à tout
Etat de réprimer par des peines appropriées les actes illicites
(article 5), et d'assurer la détention de leurs auteurs.
Mais, la Convention de SUA et son protocole ne donne pas le
droit aux Etats parties d'arrêter et d'inspecter un navire, même
s'ils le soupçonnent d'être impliqué dans des
activités terroristes ou pirates commises dans les eaux territoriales.
De plus, elle ne procure pas une vraie compétence universelle sur les
infractions car les Etats parties doivent avoir un lien direct avec celles-ci
afin de pouvoir établir leur compétence. Dans les faits, elle
n'autorise notamment pas les navires de guerre à intervenir en haute mer
sur un navire ne battant pas le même pavillon et qui aurait à son
bord des terroristes. Il s'agit du maintien des privilèges de l'Etat du
pavillon. Ce qui dans ce cas ne laisse aux Etats, que les possibilités
d'arraisonnement couvertes soit par l'article 110 de la Convention de Montego
Bay s'agissant des navires à la nationalité douteuse, soit par
extension de l'application de certaines Résolutions de l'ONU, telles les
résolutions 1267, 1368 et 1390 du Conseil de Sécurité. La
résolution 1390 ouvre la possibilité d'intervention sur des
navires suspectés d'entretenir un
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lien avec des « personnes, groupes, entreprises ou
entités associées à Oussama Ben Laden, Al-Qaida ou
Talibans », bien que l'accord de l'Etat du pavillon reste à
obtenir (Atonfack Guemo 2010 : 126-127).
b) LE CODE INTERNATIONAL POUR LA SURETÉ
DES NAVIRES ET DES INSTALLATIONS PORTUAIRES (CODE ISPS) : DES MESURES SURTOUT
PRÉVENTIVES
Le code International pour la Sûreté des navires
et des Installations Portuaires (Code ISPS) a pour objectif de fournir un cadre
cohérent et normalisé pour l'évaluation des risques,
permettant aux gouvernements de compenser l'aggravation des menaces en rendant
moins vulnérables les navires et les installations portuaires. A la
base, il part de l'idée que garantir la sûreté des navires
et des installations portuaires est essentiellement une activité de
gestion des risques et que pour déterminer les mesures de
sûreté appropriées, il convient d'évaluer les
risques dans chaque cas particulier.
Le code ISPS ne s'applique qu'à un certain type de
navires effectuant des voyages internationaux et aux compagnies maritimes
propriétaires ou exploitation de ces navires. Sont ainsi
concernés les navires à passagers, y compris les engins à
grande vitesse à passagers, les navires de charge, y compris les engins
à grande vitesse à cargaison, d'une jauge brute égale ou
supérieure à 500 tonneaux, les unités de forage mobiles au
large, et les installations portuaires fournissant des services à de
tels navires qui effectuent des voyages internationaux.
La mise en oeuvre du code comporte ainsi un certain nombre de
mesures spéciales et d'obligations pour les Etats contractants
s'agissant de la définition des niveaux de sûreté ; la
vérification des navires et la délivrance des certificats de
sûreté et désignation des organismes de sûreté
reconnus. Elle comporte aussi des obligations pour les armateurs et
affréteurs exigeant de disposer à bord de chaque navire d'un plan
de sûreté du navire. Enfin, il incombe aux gestionnaires
d'installations portuaires de désigner un agent de sûreté
de l'installation portuaire, d'élaborer un plan de
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sûreté de l'installation portuaire, et de
prévoir un protocole de mise en application échelonnée des
mesures de sûreté, en cas de nécessité (Atonfack
Guemo 2010 : 129-130).
Pour José Yumba, Directeur de l'Autorité
Portuaire du Cameroun, le Code ISPS permet d'identifier à temps toute
menace terroriste et de prévenir les autorités52. Le
Cameroun face à sa position géographique doit jouer un rôle
important pour la sécurité sous-régionale
indépendamment de quelques pratiques régionales en l'occurrence
l'Opération ATALANTA53, la TASK FORCE 15054,
l'Africa Partnership55 Station et la mission CORYMBE56.
Ces actions multiformes fondent l'architecture sécuritaire nationale
contre la menace maritime. Leur efficacité avérée est
appelée à se renforcer avec le déploiement progressif de
ses différents segments, afin que la mer reste et demeure cette aire
essentielle au développement et à la
52 Déclaration au cours d'un entretien
à nous accordé.
53 La mission EUNAVFOR Atalanta est une mission
militaire et diplomatique mise en oeuvre par l'Union Européenne, dans le
but de lutter contre l'insécurité dans le Golfe d'Aden et
l'Océan indien, une zone maritime mise à sac par des pirates qui
lancent leurs attaques depuis les côtes somaliennes. La mission s'est
déployée à partir du 8 décembre 2008. Elle a
à sa disposition, selon les moments, entre quatre à treize
bâtiments appuyés par des avions de patrouilles maritime et
commandos embarqués à bord des navires du Programme Alimentaire
Mondial ravitaillant la Somalie ou navires de commerce traversant la zone.
54 La Combined Task Force 150 est une force
opérationnelle navale basée sur une coalition multinationale
opérationnelle depuis Novembre 2002. Elle est basée à
Djibouti. Elle est coordonnée par l'opération Enduring Freedom et
intègre une partie des navires de la cinquième flotte
américaine. Cette force opérationnelle a été
créée afin de surveiller, d'inspecter et d'arrêter les
entités suspectées de terrorisme. Elle réalise des
opérations dans le nord de la mer d'Arabie et dans l'océan indien
dans le cadre de la guerre informelle contre le terrorisme.
55 Mise en place par la Marine des Etats-Unis en
partenariat avec plusieurs nations européennes et les pays du Golfe de
Guinée, l'APS est un instrument dédié à la lutte
contre l'insécurité maritime en Afrique Centrale et de l'Ouest.
Il se traduit en mer, par la présence dans la Golfe de Guinée
d'un Bâtiment américain servant d'Etat-Major multinational et de
base d'entrainement flottante pour les personnels des marines riveraines.
56CORYMBE est une mission française de
présence maritime dans le Golfe de Guinée. Au cours de celle-ci,
des exercices conjoints et un entraînement des équipages sont
conduits en vue de renforcer les capacités des marines de cette
région.
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paix sociale. Pour toute détresse en mer, ce centre
répond aux numéros suivants :
Canal VHF 16 Marine
- 33-01-25-77
- 33-43-82-35 (Njonou Akoutou 2009 : 29).
CONCLUSION
Face à la montée en puissance et à la
permanence de l'insécurité dans le monde, en Afrique en
général, dans le Golfe de Guinée et au Cameroun en
particulier, les Forces Armées camerounaises comme les Forces
Armées du monde, soumises à une redoutable épreuve, sont
mises en branle. C'est la « guerre contre le terrorisme
»57 ou « guerre contre la terreur »58
développée par l'administration américaine de George W.
Bush après les attentats du 11 septembre 2001. Mais, ce terme n'est plus
employé dans l'administration américaine depuis l'entrée
en fonction de l'administration Obama en 200959. La notion
émerge en réalité dès la présidence de Bill
Clinton confrontée à la montée du « terrorisme
international »602et sous forme de recommandations alarmantes
émises dès le mois de juin 2000 qui évoquent
déjà les menaces et le scénario qui devaient se
concrétiser l'année suivante.
Comme première mesure américaine après
le fameux 11 Septembre, le USA Patriot Act, une loi d'exception, limitée
dans le temps et votée par le Congrès à la
quasi-unanimité le 26 octobre 2001. Elle est destinée à
renforcer le pouvoir des agences gouvernementales des États-Unis. Les
adversaires du Patriot Act (notamment les associations de protection des
libertés individuelles) considèrent cette loi comme liberticide.
Le Patriot Act a été prolongé le 21 juillet 2005 (à
la chambre des représentants) et le 29 juillet 2005 (au Sénat
américain) de façon permanente pour 14 des 16
57 «War on Terrorism », «
War on Terror»
58 «Global War on Terror
»»
59L'expression "guerre contre le terrorisme"
abandonnée, France 24, 31 mars 2009 60
http://fr.wikipedia.org/wiki/guerre
contre le terrorisme.
Thèse de Doctorat/Ph.D en Sce Po, UY2, 2011
Ernest Claude MESSINGA 254
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dispositions du Patriot Act et de 10 ans pour les deux autres
(sur les écoutes téléphoniques et l'accès au
fichier personnel).61
En France, dans le cadre des dispositifs prévus par
les plans Vigipirate, Biotox ou Piratox et des missions de la gendarmerie
nationale, les Forces Armées protègent la population et les
intérêts nationaux. Plus loin de leurs frontières, elle
lutte contre le terrorisme par l'engagement des Forces spéciales en
Afghanistan et participe à la force navale TF 150 dans l'océan
Indien. A l'extérieur du territoire, les Forces françaises sont
engagées sur de nombreux théâtres de crises
régionales : en Côte d'Ivoire, en Afghanistan, dans les Balkans.
Cette implication permanente des Armées est la partie la plus visible de
l'action de la France au service de sa sécurité nationale et de
la stabilité internationale. Mais, leur réponse aux défis
du moment va bien au-delà du seul engagement militaire : elle combine
des préoccupations stratégiques, économiques, sociales,
diplomatiques. Les menaces actuelles exigeant une réponse forte, globale
et surtout durable, elle va le concrétiser en conjuguant des moyens
renforcés et une coopération politique relancée.
Des moyens seront renforcés avec des
équipements à la pointe de la technologie, des nouveaux Rafale,
des hélicoptères NH90, du Tigre, de nouveaux bâtiments de
projection et de commandement, des systèmes Félin, la phase de
conception du deuxième porte-avions sera lancée, la modernisation
de la dissuasion nucléaire avec la mise en place du M51, deux programmes
majeurs pour la Marine ont franchi des jalons importants et
déterminants. Grâce à la loi de programmation 2003-2008 et
à son application rigoureuse, avec le soutien constant du
Président de la République, les Forces Armées
françaises sont de mieux en mieux
61
http://fr.wikipedia.org/wiki/guerre
contre le terrorisme_cite-note-0-cite-note-0 Thèse de
Doctorat/Ph.D en Sce Po, UY2, 2011 Ernest Claude MESSINGA 255
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préparées aux exigences du contexte
stratégique. Dès lors, la Défense est redevenue une
priorité nationale.62
L'Organisation de coopération de Shanghai (OCS),
regroupant la Russie, la Chine et les nations d'Asie centrale, va
déclarer la guerre contre les « trois Forces du mal » : le
terrorisme, le séparatisme et l'extrémisme. Il s'agit de diverses
actions policières, politiques et militaires que réalise le
gouvernement des États-Unis (appuyé par différents
alliés dont l'OTAN) contre différentes organisations liées
au terrorisme islamiste appuyés par une coordination au niveau de
l'Organisation des Nations unies63de divers comités
crée par le Conseil de sécurité des Nations unies. Elle se
démarque de la lutte antiterroriste traditionnelle par des actions
militaires de grande ampleur à l'étranger et un interventionnisme
actif. Elle débouche sur le déclenchement de « guerres
préventives » contre les États suspectés d'abriter
des groupes terroristes et/ou susceptibles de leur fournir des armes de
destruction massive. Cette guerre combine la lutte directe, c'est-à-dire
le démantèlement des cellules terroristes, la destruction des
camps d'entraînement, et la lutte indirecte. Cette dernière
comprend les enquêtes et les pressions sur les gouvernements,
organisations et personnes soutenant les organisations terroristes, et le gel
des avoirs soupçonnés d'appartenir ou de servir à des
groupes terroristes. C'est aussi les aides financières aux pays
participant à la lutte contre le terrorisme, l'accroissement de la
coopération internationale au niveau du renseignement, de la police et
de la justice, la réorganisation politique du Moyen-Orient
décidée par l'administration Bush (projet du « Grand
Moyen-Orient » porté par les néoconservateurs). Des
unités militaires des États-Unis apportent un soutien logistique,
aide à la formation des Forces locales et offre des renseignements
à plusieurs pays d'Afrique du Nord et l'Ouest (Algérie, Tchad,
Tunisie, Mauritanie, Maroc,
62Alloction du Ministre de la Défense,
Mme Michele Alliot-marie, Nouvelles menaces, nouvelles
réponses, 12ème rencontres parlementaires "Paix et
Défense", Lundi 31 Janvier 2005.
63
http://fr.wikipedia.org/wiki/guerre
contre le terrorisme_cite-note-0-cite-note-0
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Mali entre autre) pour lutter contre divers groupes
Armées (terrorisme et grand banditisme) qui se trouve dans le Sahel dans
le cadre de la Trans Sahara counter Terrorism Initiative (TSCT) (anciennement
Initiative Pan-Sahel lancé en 2002). 1400 soldats américains sont
installés dans la corne de l'Afrique dans le cadre de la Force mixte
dans la corne de l'Afrique du Commandement Central (Combined Joint Task
Force-Horn of Africa). Leur mission consiste à mener des
opérations et à organiser des entraînements visant à
« combattre le terrorisme, à sécuriser la zone et à
établir la stabilité régionale ». Afin de s'acquitter
de cette mission, il organise des opérations civilo-militaires, des
opérations relevant des affaires civiles, et des cycles de formation en
collaboration avec l'Union africaine. La zone d'opération de cette force
combinée comprend les Comores, Djibouti, l'Érythrée,
l'Éthiopie, le Kenya, la Somalie, le Soudan, la Tanzanie, l'Ouganda et
le Yémen. Un ensemble de mesures visant à lutter contre le
terrorisme de manière active ont été prise en l'occurrence
l'infiltration des mouvements, guerre de chasse, éliminations
préventives, etc.64
La " guerre de chasse " est l'une des méthodes du
contre-terrorisme. En ambiance de guérilla, il s'agit de traquer les
groupes terroristes afin d'empêcher leur implantation dans un secteur
déterminé. On crée ainsi une sorte de " guérilla de
contre guérilla ". Elle est pratiquée par des Forces
spéciales ou " irrégulières ". En ambiance de terrorisme
politique, marginal ou de guérilla urbaine, cette méthode a
souvent dérivé vers la constitution d'escadrons de la mort ".
L'Israël a créé en 1995 l'unité "
Egoz ". Egoz est une unité militaire clandestine, qui
opère exclusivement au Sud-Liban, dans la zone opérationnelle du
Hezbollah. Elle opère par raids aéroportés ou
terrestres contre des objectifs terroristes. Une autre unité
secrète, " Mista'aravim " issue de la fusion de l'unité " Shimson
" (qui opérait dans la bande de Gaza)
64
http://fr.wikipedia.org/wiki/guerre
contre le terrorisme
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à la sécurité : d'une Armée « de garde »
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et l'unité " Duvdevan " (Cisjordanie) opère
dans les territoires occupés. Ses membres sont vêtus comme des
arabes et évoluent au sein de la population palestinienne pour
assassiner leurs " cibles ".
En ex-Rhodésie, des opérations de combat
clandestines dans les zones occupées par la Zimbabwe African
National Liberation Army (ZANLA) - surnommées " Pseudo Ops " -
étaient pratiquées par les Selous Scouts. Une variante de la
guerre de chasse, menée par des spécialistes, est de mettre sur
pied des organisations autochtones de résistance contre les terroristes.
Les Français, puis les Américains ont mis sur pied de tels
mouvements de résistance au Vietnam. Toutefois, ceci n'est possible que
lorsque la guérilla ou le mouvement terroriste ne
bénéficie pas d'un large appui populaire.
La Coopération internationale va s'accentuer avec le
Conseil de sécurité des Nations unies qui va renforcer la
coordination entre les trois Comités créés pour lutter
contre le terrorisme et chargés de surveiller l'application de ses
résolutions par les États membres. Les trois Comités
concernés sont : le Comité des sanctions contre Al-Qaïda et
les Talibans (créé par la résolution 1267 en 1999
appelé aussi Comité 1267)65, le Comité contre
le terrorisme (créé par la résolution 1373 en 2001), et le
Comité sur la non-prolifération des armes de destruction massive
(créé par la résolution 1540 en 2004). La
résolution 1624 en 2005 ouvre la voie à l'adoption de mesures
anti-terroristes au niveau mondial. Plusieurs accords ont lieu entre
États pour lutter contre le terrorisme et renforcer les textes existants
tel la convention interaméricaine contre le terrorisme signé par
les 34 États de l'Organisation des États américains le 3
juin 200266 et la Convention européenne pour la
prévention du terrorisme du Conseil de l'Europe signé en
65
http://www.cicte.oas.org/Rev/en/Documents/Conventions/AG%20RES%201840%2020
02%20francais.pdf.
66Texte intégral de la convention
interaméricaine contre le terrorisme
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2005 et entré en vigueur le 1er juin
200767. En 2005, Interpol créé la Notice
spéciale Interpol - Conseil de sécurité des Nations Unies
concernant des personnes associées à Al-Qaïda et aux
Talibans qui figurent sur la liste du Comité 1267 du Conseil de
sécurité des Nations-Unis et font l'objet de sanctions telles que
le gel de leurs avoirs, une interdiction de voyager et un embargo sur les
armes. Les services de sécurité américains multiplient les
contacts et les centres de coordination de lutte antiterroriste avec leurs
homologues à travers le monde tel l'Alliance Base à Paris. Quel
serait donc le bilan de cette croisière contre cette menace « sans
visage » ?
672005 : Convention européenne pour la
prévention du terrorisme
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CHAPITRE V :
UNE ÉVALUATION OPÉRATIONNELLE DE LA LUTTE ANTI-MENACES
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Conduite sous le leadership des Etats-Unis après la
tragédie du « mardi noir », « la guerre contre le
terrorisme » a été un échec cuisant ; en
témoigne la prolifération des attentats meurtriers à
l'échelle planétaire, notamment à Bali, Djakarta, Madrid,
Istanbul, Islamabad, Bombay, en Afghanistan et en Irak, mais également
à Djerba, Casablanca, Mombasa et Charm el cheikh, pour ne citer que ces
exemples. C'est la preuve irréfutable que l'Afrique n'est pas
véritablement en marge de ce phénomène de propagation de
la terreur. Dans ce sens, il est loisible de relever que tant certains de ces
actes sont perpétrés par des africains eux-mêmes,
expression d'un ras-le-bol incoercible et d'un tissu social en
déliquescence, que d'autres, en fait, sont facilités par la
fragilité des systèmes sécuritaires, poreux aux incursions
extérieures déstabilisatrices.
Le phénomène est en effet très largement
répandu en Afrique sous une forme interne aux Etats. Il y est
pratiqué par des mouvements rebelles (Union Nationale pour
l'Indépendance Totale de l'Angola UNITA en Angola, Résistance
Nationale Mozambicaine RENAMO au Mozambique, Lord's Resistance Army LRA en
Ouganda, Patriotes résistants Maï Maï Parema en
République démocratique du Congo, Libériens Unis pour la
Réconciliation et la Démocratie LURD et Mouvement pour la
démocratie au Liberia Model au Liberia, etc.)(Ahouanye M.L 2009 :
26-27). Mais aussi des Forces gouvernementales (Liberia, Zimbabwe, notamment
durant la répression dans le Matabeleland des années 1980,
Angola, Soudan, etc.), les uns comme les autres recourant largement aux moyens
de la terreur et de l'effroi.
Le terrorisme apparaît aujourd'hui comme le
symptôme d'une société internationale malade ; malade de
ses injustices, de ses disparités et de ses exclusions. Dans des
sociétés africaines marquées par des systèmes
démocratiques dont la construction reste déficitaire, une
inégale répartition des richesses économiques disponibles,
l'existence de bidonvilles géants, cimetières vivants de tant
d'espoirs déçus, réceptacles de
générations
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entières frustrées et en mal d'être, en
mal de devenir, bref, en défaut d'avenir, et en fin de compte, creuset
idéal pour les sergents recruteurs de l'internationale terroriste, le
terrorisme ne peut que y faire son lit. C'est d'ailleurs l'argument majeur qui
a été mis en avant lors des attentats de Casablanca au Maroc le
16 mai 2003 où les 14 terroristes étaient marocains, tous issus
du bidonville de Sidi Moumen où la police ne pénétrait
plus ; ou encore de la prise d'otages au Nigeria le 31 juillet 2004 de 165
travailleurs de la société américaine Mallard Bay, qui
opère en sous-traitance avec SHELL, par une trentaine de ravisseurs
autochtones qui réclamaient des emplois et une meilleure
répartition des revenus issus du pétrole local (Ahouanye M.L.
2009 : 30). L'aspect technologique de la mondialisation reste un facteur
important de diffusion de ce terrorisme international : Internet, les
téléphones portables et les moyens de transport modernes ont
fourni à ce dernier un environnement favorable.
L'URSS retirée d'Afghanistan, la contagion
apportée par les anciens combattants afghans se répandit
très rapidement en Afrique du Nord (Algérie, Egypte, Soudan).
Pour l'Algérie seule, de 600 à 1000 anciens combattants
islamistes aguerris regagnèrent le pays entre 1986 et 1989, constituant
dès cette époque la base d'une expansion terroriste sur une
assise de fondamentaliste islamique. Quant au financement de celle-ci, il fut
d'abord assuré par l'Arabie Saoudite, puis par Oussama Ben Laden et
d'autres contributeurs privés. C'est ainsi que fut revivifié un
extrémisme local prônant la violence, mais en se tournant
désormais plus vers l'extérieur. A la fin de la décennie,
l'on en verra les effets jusqu'en Afrique du Sud avec l'organisation People
Against Gangsterism and Drugs (PAGD) ou dans la partie orientale du continent
par une série d'attentats. Mais le détonateur fut bien
l'annulation des élections législatives de 1992 en
Algérie. Des milliers de personnes furent tuées ou
blessées dans l'espèce de guerre civile qui s'ensuivit,
dérivant d'une radicalisation favorisée par la stagnation
économique et le chômage massif dans les banlieues et les
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bidonvilles. 412 hommes, femmes et enfants furent
horriblement taillés en pièces dans trois villages de la
région d'Elizane pendant la nuit du 29 décembre 1997 (Ahouanye
M.L. 2009 : 32).
En Tunisie, en Libye, en Egypte et dans certains Etats
subsahariens, seules des mesures de sécurité rapides et efficaces
colmatèrent la situation. Malgré cela, 58 touristes
étrangers furent massacrés à Louxor en novembre 1997 et
les deux ambassades américaines de Nairobi et de Dar es-Salaam furent
détruites simultanément le 7 août 1998 (sans parler d'une
tentative avortée à Kampala et d'autres à Bangkok et
Tirana). Le caractère international du phénomène
était souligné, dès le 20 août 1998, par une attaque
de représailles américaine près de Khartoum contre une
usine chimique incriminée. Précédemment, la tentative
d'assassinat de l'été 1995, contre le président
égyptien Hosni Moubarak à Addis-Abeba, avait déjà
fait monter la tension entre l'Egypte, le Soudan et l'Ethiopie (Ahouanye M.L.
2009 : 33).
Rétrospectivement, les attaques terroristes dans cette
région du monde apparaissent comme une esquisse des
événements du 11 septembre 2001. Les attentats
anti-américains du Kenya et de Tanzanie avaient surpris, et pourtant des
signes inquiétants apparaissaient bien dès la guerre du Golfe :
le 25 janvier 1991, par exemple, le département d'Etat américain
invitait les familles de ses diplomates et les personnels non indispensables
à quitter la Tanzanie en raison de menaces terroristes liées
à ce conflit. Parallèlement au recours local ou régional
à la terreur, une vague mondiale de terrorisme prenait corps, en fait,
depuis plusieurs décennies, et ce, bien avant les attaques dont le World
Trade Center fut par deux fois l'objet, en 1993 puis en 2001, pour incarner les
nouveaux dangers de l'après-guerre froide. Ces derniers
événements ne font, en réalité, que refléter
l'aggravation d'un problème mondial de sécurité, qui exige
une réaction également de portée mondiale, dans laquelle
devront s'inscrire l'Afrique et les différents Etats qui la
composent.
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Comme le reste du monde, le Cameroun connaît son lot de
menaces de divers ordres, entre autre le phénomène des coupeurs
de route responsable de la criminalité transfrontalière et les
« loups de mers » responsables des risques et pratiques illicites en
mer : piraterie, terrorisme, trafic divers, pêche illicite, immigration
illégale et pollution.
I- LES « COUPEURS DE ROUTE » ET LA
CRIMINALITÉ TRANSFRONTALIERE
Dans les régions septentrionales, le
phénomène a trouvé un terrain particulièrement
fertile dans certaines parties du territoire national notamment là
où les populations estiment se trouver dans quelque obligation morale de
participer au rayonnement de l'administration traditionnelle locale par le
paiement d'une dîme reconnue de fait et estimée indispensable au
fonctionnement des structures de la cour. Des comportements qui mettent parfois
en complicité plus ou moins ouverte les populations et les coupeurs de
routes.
Le phénomène devient très complexe quand
il peut éclater à l'intérieur d'un territoire donné
et avoir des répercussions regrettables sur un ou plusieurs autres,
rendant ainsi difficile l'identification des assaillants. Ses manifestions sont
variées. Ici, certains chefs traditionnels se croient investis de
l'obligation d'organiser des razzias pour devoir assurer leur autorité
et leur droit à la dîme... Ailleurs, des groupes de bandits
s'organisent plus ou moins professionnellement et opèrent aussi bien
à l'intérieur qu'à l'extérieur d'un territoire. Le
pire est constitué des bandes de milices, voire de rebelles qui
opèrent occasionnellement pour chercher des subsides là où
elles croient pouvoir les trouver pour vivre et parfois survivre. Les attitudes
ainsi affichées ont partout entraîné la mise en oeuvre et
l'usage sans foi ni loi d'une vaste panoplie d'armes, allant des armes blanches
(couteaux, machettes, lances, flèches, arbalètes...), aux armes
de
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guerre (AK47, PA, MP5) ainsi qu'un éventail notable
des moyens de communication modernes et puissants, causant çà et
là au patrimoine humain et matériel des Etats des
préjudices très importants et souvent inestimables (Nkoa Atenga
2007 : 18).
La période allant de novembre à décembre
est généralement considérée comme la haute saison
pour les « coupeurs de route ». La fête du mouton, principale
célébration religieuse dispendieuse, suivie de la fête de
Noël et du Nouvel An fait monter la menace. 15 morts, 20 attaques pour le
seul mois de novembre 2009. L'attaque la plus meurtrière aura
été celle du campement de Mbororo de Bloho, dans le parc national
de Waza ou les assaillants ont froidement abattu 5 bergers, le 21 novembre
2009. L'accalmie observée, ces dernières semaines a
été heureusement imposé par le déploiement
impressionnant des Forces de Défense sur le terrain. Selon diverses
sources, plus de 5 milliards de francs de rançon ont été
versé, ces dernières années, aux « coupeurs de route
». Près de 300 personnes ont été tuées et plus
de 50.000 têtes de bovins ont disparus. Ce triste bilan des attaques des
« coupeurs de route » ne concerne que les régions du
septentrion.
Cagoulés et armés à point et toujours
promptes à tuer, les « coupeurs de route » ont semé la
terreur ces dernières années le long des frontières qui
lient le Cameroun à la République Centrafricaine, au Nigeria et
au Tchad. En une dizaine d'année, ces bandits de grand chemin ont
délesté de leurs biens, des populations déjà
écrasées par le poids des difficultés de la vie
quotidienne. Dans la région septentrionale frontalière aux trois
pays voisins, ces attaques plombent les activités économiques,
aggravant la misère des populations. Elles hypothèquent
l'éclosion de l'activité touristique alors que le septentrion
possède d'énormes potentialités.
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1) MODES ET MECANISMES OPÉRATOIRES EN PERPETUELLE
MUE
La porosité des frontières et surtout la
prolifération des armes de guerre et de petits calibres provenant des
pays en instabilité récurrente, ont dopé l'activité
de ces criminels qui écument les zones frontalières. En quelques
années, leur modus operandi a énormément
évolué, les moyens d'attaque aussi. Au Cameroun, le
phénomène des coupeurs de route se manifeste principalement
à travers trois modes :
· Des embuscades classiques sur les axes routiers contre
des convois, même si ceux-ci sont escortés ne faisant plus
recette;
· Les bouclages des villages, des prises d'otages avec
demande de rançon dans les villes ou les localités rurales sont
dans l'air du temps;
· Des rapts de bétail avec détournement
d'itinéraire des troupeaux ;
Toujours à base des renseignements et des
reconnaissances préalables sur le terrain retenu, le mécanisme
des coupeurs de route s'articule en six phases :
> Se regrouper ;
> Frapper par surprise ;
> Arracher ou rapter (tuer éventuellement) ;
> Eclater ;
> Se regrouper à un endroit fixé à
l'avance (en vue du partage du butin et de la cache des armes utilisées
éventuellement) ;
> S'évanouir dans la nature ambiante après
avoir planifié une nouvelle action (Nkoa Atenga 2007 : 19).
a) EMBUSCADES SUR LES AXES ROUTIERS
Il s'agit d'attaques perpétrées sur les
convois, même escortés. Le phénomène bancaire
n'étant pas encré dans les mentalités locales, le jour du
marché, les malfrats tentent des embuscades pour s'approvisionner de
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l'argent des commerçants et autres agriculteurs avant
de s'évanouir dans la nature à l'intérieur ou à
l'extérieur du territoire. Toute résistance ou tentatives de
reconnaître un assaillant est synonyme de suicide instantané. Ces
attaques, souvent sur renseignement et de très courtes durées
dans leur déroulement, sont plutôt rares sur les grands axes,
fréquentes par contre sur les pistes rurales et axes secondaires.
Signalons cependant ici que les véhicules de transport
des fonds et même des transports publics ne sont pas toujours
épargnés (Nkoa Atenga 2007 : 18).
b) PRISES D'OTAGES DANS LES VILLES ET LES
LOCALITÉS RURALES.
Au commencement, les coupeurs de route ont utilisé la
route comme premier mode opératoire. Les axes prioritaires tels que la
route (BertouaGaroua - Boulai - Meiganga - Ngaoundéré - Garoua -
Maroua - Kousserie) et surtout les routes secondaires qui aux grands
marchés à bétail étaient particulièrement
ciblés. A l'époque, de simples brigands organisés par
groupe de trois ou de cinq tendaient des embuscades au détour d'un
village et faisaient immobiliser tous les véhicules de transport. Les
passagers pour la plupart des commerçants étaient sommés
de se débarrasser de leurs pièces, des bijoux et autres objets
précieux. Les récalcitrants payaient immédiatement de leur
vie. Cette méthode a fait long feu. Traqués par les Forces de
Défense, ces assaillants ont fini par quitter la route,
privilégiant des assauts sporadiques. Dans l'Adamaoua, les axes
NgaoundéréMeiganga, Meiganga-Ngnoui,
Ngaoundéré-Tibati, dans la Nord, GarouaTcholliré,
Garoua-Ngaoundéré, Garoua-Poli, Tcholliré-Touboro,
TouboroMbaiboum, dans l'Extrême-Nord, Maroua-Kousseri,
Magada-Kaélé étaient devenus de véritables mouroirs
pour les usagers.
Ces malfaiteurs s'attaquent de préférence aux
bergers et aux éleveurs, les dépouillent, prennent des otages et
s'emparent de leurs troupeaux. La
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libération des otages est conditionnée par le
paiement d'une rançon à verser souvent loin, très loin du
lieu où s'est déroulée la prise d'otage dans les seules
conditions exigées par les délinquants. Quant aux troupeaux
emportés, ceux-ci sont définitivement perdus (Nkoa Atenga 2007 :
18). Ce fut le cas le 08 Septembre 2009 ou 07 personnes sont prises en otage
à Amayere, village situé dans l'arrondissement de Petté,
département du Diamaré. Les victimes sortaient de la
mosquée après la prière du soir. Au lendemain de cette
prise d'otage, 04 autres personnes sont enlevées dans la localité
de Badadaï situé à environ cinq kilomètres du lieu
où s'est déroulée la première opération. Les
ravisseurs réclamaient une rançon de 12 millions de
FCFA68. Du côté du Diamaré, 04 autres otages
dont 03 fils d'un même père et un berger sont toujours entre les
mains de leurs ravisseurs, la première tentative de leur
libération s'étant soldé par la mort d'un gendarme le
nommé Julius ARREY, atteint d'une balle à la tête.
c) RAPTS DU BETAIL
Une nouvelle génération de « coupeurs de
route » a ainsi vu le jour depuis la fin de quelques années. Ce
sont les bandes armées bien organisées et dont les membres pour
la plupart, des déserteurs des Armées régulières
des pays voisins ou des ex-rebelles pourchassés. Dans la partie
septentrionale du Cameroun, la richesse principale a quatre pattes et se
déplace en troupeau. Les éleveurs et les commerçants de
bétail souvent nomades, vivant à l'écart des autres
populations locales à la recherche des pâturages pour leurs
bêtes sont dans leur collimateur. Lors des rapts, les troupeaux sont
dispersés grâce à une stratégie d'action que seuls
maîtrisent parfaitement leurs acteurs. Si le butin est maigre, ils
s'emparent des femmes et enfants qu'ils ne libèreront qu'en
échange des espèces sonnantes et trébuchantes provenant de
la vente de quelques têtes de bétail. Le bétail
68 Le Quotidien National Cameroon Tribune N°9434/5635 du 15
Septembre 2009, Page 12.
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volé est définitivement sorti d'un territoire
national pour être exploité dans un autre (Nkoa Atenga 2007 :
18).
d) LES ITINÉRAIRES PREFERÉS DES
COUPEURS DE ROUTE
Au départ, les attaques des coupeurs de route
s'effectuaient sur la route bitumée. Des sources bien introduites au
Bataillon d'Intervention Rapide de l'Extrême Nord à Maroua
révèlent que la criminalité dans cette région
était de 80% enregistrée le long de la route nationale N°1
qui relie Mora à Kousseri. La zone de Zigue Zigague située entre
Waza et Maltam dans le Logone et Chari était notoirement reconnue comme
étant le repaire de ces bandits. Et l'usager de la route qui traversait
cet endroit avait la chair de poule tant qu'il n'avait pas encore
entièrement quitté la zone. C'est vrai que cette zone difficile
d'accès constitue un refuge certain pour ces personnes sans foi ni lois.
Afin de les empêcher de régner en maître, les pouvoirs
publics ont pris des dispositions spéciales pour sécuriser les
voyageurs qui vont ou qui sortent de Kousseri.
Se sentant constamment traqués le long de cet axe, les
brigands ont évolué dans leurs stratégies. C'est ainsi
qu'ils ont expérimenté les attaques sur les routes secondaires.
C'est le cas de l'axe qui va du carrefour Madaga à Yagoua ; c'est aussi
le cas du tronçon carrefour Gaklé-Mokolo et de nombreuses pistes
de desserte qui lie les localités. Une fois de plus, les Forces de
maintien de l'ordre se sont mises à leurs trousses.
Ces malfrats de plus en plus gênés par la
présence des Forces de maintien de l'ordre se scindent en groupes dans
tous les départements de la région. Des zones dangereuses se sont
alors inventoriées. On parle alors des arrondissements de Mindif, de
Moulvoudaye, de Moutourwa dans le département du Mayo-kani, des
arrondissements de Bogo et Petté dans le département du
Diamaré...Traqués ici, ils se retrouvent quelques jours
après à l'autre bout ; et pour dire vrai, ces malfaiteurs sans
résidence fixe
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sont dans la tourmente étant donné que le
dispositif mis au point par les Forces de l'ordre se resserre sur eux comme un
étau.
Mais dans tous les cas, les bases des coupeurs de route sont
bien connues. Elles sont logées soit à une faible distance d'une
frontière, soit dans des lieux d'accès très difficile
à l'instar du « bec de canard » et de l'immense parc de Waza.
Il s'agit en réalité des terrains qu'ils maîtrisent
très bien. Et dès qu'ils s'estiment dans
l'insécurité, ils se réfugient de l'autre
côté de la frontière. En réalité, l'incursion
des malfrats dans une zone est souvent favorisée par le silence complice
des populations qui ne dénoncent pas à temps des présences
suspectes dans leurs localités69.
2) LE GRAND MAL ET LES GRANDS REMEDES
Aux grands maux, les grands remèdes, l'Etat
Camerounais de concert avec les républiques voisines est
déterminé à en finir avec ce fléau qui plombe son
économie et installe des régions entières dans la peur et
la désolation. C'est le sens des récentes rencontres au sommet
entre chefs d'Etats de la sous-région. Il est question d'organiser une
riposte contre ce phénomène dont les acteurs affinent de plus en
plus leurs modes opératoires. Déterminé à jouer un
rôle majeur dans cette synergie, le Cameroun a déjà
évalué l'ampleur du phénomène en procédant
au renforcement des moyens logistiques et humains des Forces de Défense
affectées à cette grande bataille, le BIR et le GPIGN. Ces
derniers ont reçu des moyens adéquats pour mettre en
déroute cette guérilla rurale.
a) LES COMMISSIONS MIXTES DE SECURITÉ
Les régions septentrionales du Cameroun partagent des
frontières avec les Républiques du Tchad, de la Centrafrique et
du Nigeria. Les populations de ces zones frontalières subissent
presqu'au quotidien les
69 Le quotidien National Cameroon Tribune
n°9515/5716 du 12 janvier 2010, page 16.
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exactions des coupeurs de route, des bandes armées
d'ex-combattant, militaires et bandits de grands chemins pas toujours faciles
à cerner. Le forfait accompli, ils traversent la frontière ou ils
se retrouvent presqu'en toute quiétude. Entre le Tchad et le Cameroun,
la frontière s'étend sur plus de 900 km. Jusqu'ici, il
était difficile malgré les efforts louables des gouvernements
respectifs pour les Forces de Défense, postées de part et d'autre
de riposter énergiquement contre ces ennemis du développement.
Dépourvu du droit de poursuite au-delà de la ligne de
démarcation, les militaires camerounais ou tchadiens voient leurs
actions limitées. C'est donc fort de ces exactions devenues
insupportables pour leurs populations respectives que les trois chefs d'Etat
ont décidé de se concerter pour conjurer ce
phénomène. Le 28 octobre 2009, lors d'un tête à
tête à Yaoundé entre les Présidents Paul BIYA du
Cameroun, Idriss DEBY du Tchad, l'épineuse question de la
sécurité a été évoquée par les deux
Chefs d'Etat dont on connaît l'attachement pour la paix. Malgré
l'accalmie observée ces derniers mois, les deux pays ont
décidé d'unir leurs Forces pour réduire ce
phénomène à sa plus simple expression. C'est dans cette
optique que se sont tenus à Maroua, les travaux de la commission mixte
permanente de sécurité Cameroun- Tchad. A l'issue de ces assises,
les deux pays ont convenu d'engager des actions conjointes pour venir à
bout des coupeurs de route. Un chronogramme d'activité avec des acteurs
bien identifiés a été conçu. Désormais, les
Forces de Défense des deux côtés vont procéder
à des échanges d'informations ainsi que des coordonnées
téléphoniques afin de neutraliser l'ennemi.
Sur le terrain, les bons résultats de ces
retrouvailles sont palpables. Depuis deux mois, l'on note une accalmie au
niveau de la frontière entre les deux pays. Preuve que l'ennemi est bien
conscient de la riposte des Forces de Défense des deux pays.
Des actions similaires sont engagées avec le voisin
centrafricain. De ce côté, les choses étaient sur les rails
depuis décembre 2005 lors de la
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tenue à Bertoua de la première commission mixte
ad hoc de sécurité Cameroun-RCA. Mais les effets de ces
travaux ont été plombés par la crise politique qui a
secoué Bangui et qui a amplifié le phénomène
d'insécurité au niveau de la frontière entre les deux
pays. C'est donc, entre autres, pour redynamiser cette lutte commune que le
Président centrafricain François BOZIZE a effectué une
visite officielle à Yaoundé à l'invitation de son
homologue camerounais. Paul BIYA et son hôte ont parlé du
renforcement de la sécurité transfrontalière entre le
Cameroun et la République Centrafricaine ainsi que l'intégration
et la coopération sous régionale70.
b) LE GRAND NORD : L'ÉTAT D'ALERTE
La dernière actualité dans la région du
Nord a été riche en actes odieux imputable aux tristement
célèbres coupeurs de route. Sur l'axe
Ngaoundéré-Garoua au mois d'octobre dernier, des militaires ont
été pris pour cible. Le Cameroun perdra le sous-lieutenant NKOMBA
au cours de cette embuscade. Aussitôt la salle besogne accomplie, les
assaillants armés de kalachnikov, trouveront refuge dans la nature. Mais
les rescapés ont eu le temps de détecter, à travers leur
langue, l'arabe, que ces malfrats venaient d'un pays voisin. Toujours au mois
de novembre, c'est le commandant de compagnie de Gendarmerie de Guider qui
acculait à leur dernier retranchement, les coupeurs de route
décidés à en découdre avec six otages. Les
malfaiteurs ont pris la poudre d'escampette en direction de la région de
l'Extrême Nord et du Tchad, sans avoir perçu les 15 millions
exigés aux familles des otages.
Ce tableau lugubre, digne des affrontements du Far West, ne
signifie en aucun cas que les pouvoirs publics ont perdu du terrain. Mais il
est indéniable, de l'avis des observateurs avertis, que les efforts du
Cameroun
70 Le Quotidien National Cameroon Tribune
n°9515/5716 du 12 janvier 2010, page 15. Thèse de
Doctorat/Ph.D en Sce Po, UY2, 2011 Ernest Claude MESSINGA 272
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à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
resteront vains si de part et d'autre de la frontière,
rien n'est fait pour réduire ces criminels sans foi ni loi au
silence.
Reste que pour ce qui est de la région du Nord, le
gouvernement prend toutes les dispositions pour assurer la
sécurité des personnes et des biens. Du fait de sa position
médiane, la région du Nord sert de théâtre
d'opérations à des bandes de malfrats en provenance des
régions voisines, voire des pays voisins. Pour faire face à cette
insécurité transfrontalière, le gouvernement a
déployé sur le terrain le Groupement Polyvalent d'Intervention de
la Gendarmerie Nationale (GPIGN). L'escadron régional d'intervention
numéro trois de cette unité est basée à Garoua avec
compétence sur les régions de l'Adamaoua et de l'Extrême
Nord. La centaine d'hommes spécialement formés dispose des moyens
logistiques adéquats pour traquer les coupeurs de routes. Des
véhicules d'assaut existent pour ce faire, et les efforts vont se
poursuivre pour équiper davantage ces soldats. Il convient de relever
que dans la région du Nord, le GPIGN a compétence aussi bien en
milieu urbain qu'en milieu rural. Ce qui n'est pas le cas du Bataillon
d'Intervention Rapide (BIR). Cette unité spéciale de
l'Armée de Terre traque au quotidien les coupeurs de route dans les
confins des quatre départements de la région du Nord. Les
véhicules d'assaut de cette force spéciale sont en eux
même, un élément rassurant au sein des populations.
Depuis son arrivée sur le terrain, les prises
d'otages, des enlèvements, des embuscades des coupeurs de route ont de
la peine à prospérer. Le quatrième BIR basé
à Garoua multiplie au quotidien les stratégies pour rassurer les
populations à travers une présence dissuasive sur le terrain.
Cent cinquante éléments bien formés aux techniques de
combat viennent par ailleurs d'enrichir les rangs de cette unité
d'élite dans la région du Nord71.
71 Le quotidien National Cameroon Tribune
n°9515/5716 du 12 janvier 2010, page 17. Thèse de
Doctorat/Ph.D en Sce Po, UY2, 2011 Ernest Claude MESSINGA 273
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à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
c) LES FORCES DE DÉFENSE POUR UN AVENIR PLUS
SEREIN ?
C'est une hypothèse soutenable au vue de la mobilisation
quasi toute azimute des hommes en armes et des hommes politiques.
1- LA SYNERGIE GPIGN ET BIR
La présence des éléments du Bataillon
d'Intervention Rapide (BIR). Voilà ce qui frappe le visiteur qui
parcoure la nationale N°1 notamment le tronçon Mora-Kousseri. Des
éléments qui, à chaque moment, se meuvent d'un point
à l'autre. Une présence qui, observée au premier fait
écran au rôle des éléments de la Gendarmerie dans
cette bataille contre les malfrats qui écument la région de
l'Extrême Nord. Mais sur le terrain, les 2 Forces sont
complémentaires. Les éléments de la Gendarmerie jouent le
rôle d'aiguillon. Leurs stratégies de collecte des renseignements
sont mises en oeuvre pour circonscrire l'abri des bandits. Et quand arrivent
les éléments du BIR, c'est le dispositif «
araignée » qui se referme ainsi sur les malfrats. Cette
synergie d'action entre les deux Forces est plus papable en cas d'intervention.
Aussitôt l'alerte donnée, le dispositif est en place. Chacun sait
ce à quoi s'en tenir. Le commandant de la légion de Gendarmerie
de l'Extrême Nord Joseph MBU ATANG, et Elie BONDOL BAKOLOK le commandant
du premier BIR à Maroua ne déploient jamais leurs
éléments sur le terrain sans que l'expédition en question
soit précédé d'une concertation préalable entre les
deux corps. Le plan d'intervention est toujours concocté par les deux
chefs de groupe. Cette synergie d'action part de la discipline dans les
troupes. En effet, dans une équipe, si le plus haut gradé est un
élément du BIR, son adjoint est systématiquement un
élément de la Gendarmerie et vice versa. Une harmonie des Forces
qui a été saluée par les hautes autorités
étatiques lors de la visite de travail qui eut lieu en
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à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
Janvier 2009 entre les autorités camerounaises et
tchadiennes en charge du maintien de l'ordre. Ces Forces qui, de jour et de
nuit veillent sur la sécurité des personnes et des biens,
malgré la limitation des moyens logistiques pour un déploiement
constant sur le terrain. Heureusement, la hiérarchie s'est saisie de ce
problème en affectant dans la région de l'Extrême Nord, un
important contingent des Forces de maintien de l'ordre. Une affectation suivie
quelques jours plutard par l'acheminement de deux autres véhicules et
d'un bon nombre de moto tout terrain qui sillonnent les artères de la
ville de Maroua. Le souhait de tous est que d'autres moyens logistiques suivent
car le BIR tout comme la légion de Gendarmerie en ont besoin pour
assurer avec aise la sécurité des personnes et des biens dans la
région de l'extrême Nord.
2- DES MOYENS SUPPLEMENTAIRES POUR LE BIR
« A bas les coupeurs de route ! », c'est à
l'unisson que les éléments du contingent du premier BIR
basé à Salak ont repris cette phrase inspirée par le
gouverneur de la région de l'Extrême Nord. C'était le 07
Janvier 2010 au cours d'une visite du Poste de Commandement (PC) de cette
unité basée à Salak, à une quinzaine de
kilomètre sur la pénétrante sud de la ville de Maroua. Une
descente qui a permis au gouverneur qu'accompagnaient tous les autres chefs des
Forces de sécurité de la région, de se faire une
idée sur le matériel et les infrastructures dont dispose cette
unité d'élite affectée à la lutte contre
l'insécurité interurbaine et rurale dans la région de
l'Extrême Nord. Le patron des lieux, le lieutenant-colonel Elie Mbondock
Bacolock, commandant du premier BIR a reçu : 15 motos tout terrain, 02
pick-up tout terrain de marque Land Cruiser et 02 Prado.
Ces moyens logistiques sont arrivés au même
moment que le nouveau contingent d'une centaine de commandos. Des jeunes
militaires franchement sortis du centre de formation anti-terroriste
basé au camp militaire de Man O' War Bay, à une dizaine de
kilomètre de Limbé et prêt à
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à la sécurité : d'une Armée « de garde »
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découdre avec les coupeurs de route. Avec cet arsenal,
le BIR de Salack va certainement marquer les points dans la lutte contre le
grand banditisme. Le déploiement de ce nouveau contingent sur le terrain
a déjà commencé à produire des résultats.
Deux mois durant, la région n'a pas connu d'attaques
de coupeurs de route. Mis à part quelques cas d'agressions
enregistrés dans les agglomérations urbaines. Bien avant cette
visite des infrastructures et du matériel, le commandant du
1er BIR a présenté son unité ainsi que le bilan
des activités menées en 2009. L'assistance apprendra qu'en 2009,
les éléments de cette unité spéciale ont à
leur actif :
· Neutralisé 04 coupeurs de route ;
· Libéré 28 otages ;
· Récupéré et remis à leurs
propriétaires 207 boeufs ;
· Saisi 04 armes de guerre, 26 armes blanches ;
· Procédé à l'arrestation de 43
malfrats.
Ce bilan plus ou moins satisfaisant est à mettre
à l'actif de la Gendarmerie, de l'Armée de Terre et de la Police
en poste dans le Grand Nord.
II- LE PHÉNOMENE DE LA PIRATERIE MARITIME
Dans les temps anciens, la piraterie maritime désignait
tout acte de crime ou de pillage perpétré contre un navire de
commerce en haute mer pour s'emparer de sa cargaison. Le pirate de mer
était alors dépeint de manière romanesque comme un
vaillant et intrépide personnage qui ne reculait devant rien, même
pas devant la furie des eaux des mers et des océans, et qui tuait avec
plaisir pour s'accaparer du présumé trésor qu'il convoite
dans la cargaison, soit pour son propre compte soit pour le compte de son
commanditaire qui pouvait être un gouvernement, auquel cas il devenait un
corsaire.
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à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
Aujourd'hui, on entend par piraterie maritime, tout acte
criminel, de vol, de pillage ou de cambriolage sciemment perpétré
contre un navire, son équipage ou sa cargaison, ou tout acte similaire
mené contre une installation offshore ou son personnel, ou contre une
ressource sur terre depuis la mer ou par voie maritime. Par extension, la
piraterie maritime devient tout acte de braconnage en milieu marin, dans le cas
de pêches interdites, d'espèces protégées, de
pêches dans les zones interdites ou de pêches en utilisant des
pratiques interdites (Ntuda Ebodé 2010 : 77).
1) BREF APERÇU DE LA SITUATION DANS LE MONDE
Selon l'International Maritime Bureau, plus de 4000 actes de
piraterie ont été enregistrés durant les 20
dernières années, un rapport de la RAND Corporation estime le
nombre d'attaques et de tentatives d'attaques à 209 durant la
période 1994-1999 et à 2453 entre 2000 et fin 2006, soit une
augmentation exponentielle de ces pratiques depuis le début du XXIe
siècle.
Tableau N°3 :
L'évolution des attaques de 2001 à 2009
Années
|
Nombre d'attaques des pirates
|
2001
|
252
|
2002
|
341
|
2003
|
445
|
2004
|
329
|
2005
|
276
|
2006
|
239
|
2007
|
263
|
2008
|
293
|
2009
|
409
|
Source : Bureau
International Maritime, 2010.
Ces chiffres, comme on peut s'en douter sont
sous-estimés ; nombre d'armateurs ne déclarant pas les attaques,
afin d'éviter d'inquiéter leurs clients et de voir leurs navires
immobilisés longuement par les services de police.
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Les côtes indonésiennes, chinoises orientales,
somaliennes, nigérianes ainsi que la mer de Chine méridionale
comptent parmi les zones les plus dangereuses. Ces zones sont
stratégiques en matière de trafic maritime et sont parmi les plus
fréquentées au monde.
Le Golfe d'Aden est ainsi considéré comme le
carrefour du trafic maritime mondial entre l'Asie, l'Afrique de l'Est et
l'Europe. Il est le point d'entrée et de sortie pour tous les cargos
transitant par le canal de Suez et le détroit de Malacca, qui les points
de passage essentiels pour 50 000 à 70 000 navires par an accostent
à Hong Kong ou Singapour. Mais les pirates sévissent
également le long des côtes de l'Amérique du Sud et dans la
mer des Caraïbes.
Quatre raisons justifient les attaques des pirates :
1. La paupérisation importante de certaines
régions qui ne laissent pas d'autres choix à leur population
affamée ;
2. L'incapacité de certains pays à gérer la
sûreté de leurs eaux territoriales ;
3. La facilité offerte par certains pays en
développement très ouverts à la corruption, pour
l'écoulement des produits de la contrebande et les actions
d'éclat de certains groupes terroristes ;
4. Les coups de force de groupes rebelles se prévalent
d'une certaine idéologie, dans le but de collecter de l'argent pour
s'équiper en armes et d'autres matériels de guerre (Ntuda
Ebodé 2010 : 78-79).
a) LE POINT DE SITUATION AUX LARGES DES CÔTES
CAMEROUNAISES
Comme le reste des côtes du monde, les côtes
camerounaises connaissent également une permanence des attaques
maritimes.
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1- L'IDENTITÉ DES PIRATES, LEURS CIBLES ET LEURS
MODES D'OPÉRATIONS
En fonction des motifs qui les poussent à agir, on
distingue quatre principales catégories :
- La première catégorie vole sur les navires au
port. Ces vols sont très souvent l'oeuvre de petits malfrats qui rodent
dans le port ; ils agissent souvent seuls ou par petits groupes plus ou moins
organisés. Leurs actions sont parfois fortuites et n'incluent en
général aucune agression physique. Parfois, ils sont de
connivence avec un membre de l'équipage ;
- La deuxième catégorie opère des
cambriolages sur des plates-formes. Dans la plupart des cas, ces cambriolages
sont menés par des pêcheurs riverains qui viennent nuitamment par
pirogue pour commettre leurs forfaits. Les matériels volés sont
généralement des matériels électriques et des
outils ;
- La troisième catégorie cible des bateaux au
mouillage ou en mer. Ces attaques sont toujours perpétrées en
groupes constitués et hiérarchisés. Les pirates
exécutent leurs opérations avec minutie, laissant ainsi
comprendre qu'ils les ont bien préparées. Ils sont armés
de fusils de guerre (AK47) et d'armes blanches. Tous ceux qu'on a réussi
à arrêter pour l'instant se réclament d'une branche de BFF,
mais il reste possible qu'il en existe dont le seul but est de se faire de
l'argent par la piraterie. Il se dit que certains sont commandités par
des richissimes hommes d'affaires véreux nigériens qui leur
fournissent armes et embarcations et les payent en fonction du butin. Le mode
opératoire est presque toujours le même. Répartis dans 2 ou
3 embarcations rapides généralement des flying boats de
type Yamaha équipés de 2 moteurs de 75 CV, ils approchent
discrètement, puis ouvrent le feu en direction de la passerelle. Les
membres d'équipage prennent peur et se cachent. Un groupe monte alors
rapidement à bord à l'aide de grappins pendant qu'un autre reste
en veille dans les embarcations. Ceux qui sont sur le navire tiennent
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l'équipage en respect, détériorent tous
les moyens de communication à l'aide de leurs armes, dépouillent
l'équipage, réclament de l'argent au capitaine en exigeant
l'ouverture du coffre, pillent les matériels et repartent avec ou sans
otages.
- La dernière catégorie enfin pratique la
pêche illicite. Celle-ci est pratiquée par des chalutiers qui
viennent chaluter dans les sites interdits, lesquels, du fait même qu'ils
sont interdits à toute autre activité, sont probablement
poissonneux que d'autres. Des chalutiers se livrent également à
la pratique du chalut boeuf, un mode de chalut particulièrement
dévastateur pour les richesses halieutiques. Enfin, il n'y a aucune
certitude que les pêcheurs artisanaux qui viennent pêcher avec leur
pirogue dans les sites interdits à la pêche n'y soient que pour la
pêche (Ntuda Ebodé 2010 : 82-83).
2- NATURE, AMPLEUR ET VARIATIONS DES ATTAQUES
MARITIMES
La piraterie démarre effectivement le long des
côtes camerounaises dans la 2ème moitié des
années 1980. Elle reste cependant concentrée presqu'exclusivement
dans la zone d'exploitation pétrolière au large de la
presqu'île de Bakassi. Pendant les années 1990 et pratiquement
jusqu'en 2008, cette forme de piraterie est purement matérielle et se
manifeste par des cambriolages sur des plates formes de forage ; des
pêches à la dynamite dans les zones d'exploitation
pétrolière truffées de câbles électriques de
haute tension sous-marins véhiculant des gaz et des liquides (dont du
pétrole) sous forte pression ; des pêches artisanales et
industrielles pratiquées par des piroguiers riverains et des chalutiers
peu soucieux du respect de l'interdiction de toute autre activité dans
des zones parfaitement délimitées et strictement
réservées aux activités pétrolières ; des
vols sur des navires de commerce au mouillage à la zone d'attente et au
port de Douala et des attaques des chalutiers de nuit au cours desquelles
les
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équipages sont délestés de leurs biens
personnels des sommes d'argent et caisses de poissons sont
récupérées (Ntuda Ebodé 2010 : 79-80).
De janvier 1994, date de déclenchement du
différend qui a opposé le Cameroun au Nigeria de Bakassi sur la
paternité de la presqu'île de Bakassi, jusqu'en juin 2006 date de
la signature des accords de Green Tree, la zone est sous contrôle et de
l'Armée camerounaise et de l'Armée nigériane. Seuls
quelques actes de la nature de ceux énumérés plus haut
sont enregistrés du côté camerounais. Mais des attaques de
navires et des installations pétrolières offshores sont
déjà légion côté Nigeria ; avec
enlèvement de matériels, sabotage et prises d'otages souvent
libérés contre fortes rançons.
Ainsi les menaces d'actes de piraterie purs et durs ne sont
survenues du côté camerounais, qu'après la signature des
accords de Green Tree, lesquels comme nous le savons, définissent le
processus de rétrocession de la presqu'île de Bakassi au Cameroun,
conformément à l'arrêt de la Cour Internationale de Justice
(CIJ).
Ces pirates viennent principalement de groupes de dissidents
membres du Bakassi Freedom Fighter (BFF) opposé à cette
rétrocession. C'est ainsi qu'en Octobre 2008 et plus
précisément le 31, des pirates identifiés plus tard comme
des rebelles venant du Nigeria frappe leur premier grand coup, en attaquant un
Supply boa (SS SAGITTA) en manoeuvre de sécurisation d'un tanker en
chargement, et font 10 otages dont 7 français, 2 camerounais et 1
tunisien. On attribue aussi à ces rebelles deux attaques des postes de
l'Armée camerounaise à Bakassi le 12 novembre 2007 et 09 juin
2008, avec à la solde plusieurs militaires camerounais tués
(respectivement 21 et 5), 01 sous-préfet et des matériels
sensibles emportés (Ntuda Ebodé 2010 : 80).
L'attaque du SS SAGITTA sonne comme le début d'une
série d'actes de piraterie qui vont être perpétrés
autant sur les navires marchands que sur supplices travaillant pour des
compagnies pétrolières et sur des
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chalutiers. La ville de Limbé connaîtra une
attaque de trois banques dans la nuit du 28 septembre 2008, avec mort d'homme.
De manière condensée, les statistiques des attaques
classées actes de piraterie le long des côtes sont classées
comme sérieuses. Mais un coup d'oeil sur les statistiques de 2009
indique 39 cas, 3 tués, 8 blessés et 4 otages, comme il en
ressort dans le tableau ci-après :
Tableau N°4 :
Statistique des actes de piraterie aux larges des côtes camerounaises
en 2009
2009
|
NB ATTACK
|
KILLED
|
INJURED
|
HOSTAGES
|
JANV
|
6
|
1
|
1
|
0
|
FEB
|
0
|
0
|
0
|
0
|
MAR
|
1
|
0
|
0
|
4
|
APR
|
1
|
0
|
0
|
0
|
MAY
|
1
|
0
|
0
|
0
|
JUN
|
4
|
0
|
0
|
0
|
JULY
|
5
|
0
|
0
|
0
|
AUG
|
4
|
0
|
1
|
0
|
SEP
|
14
|
0
|
6
|
0
|
OCT
|
3
|
2
|
0
|
0
|
NOV
|
0
|
0
|
0
|
0
|
DEC
|
0
|
0
|
0
|
0
|
TOTAL
|
39
|
3
|
8
|
4
|
Source : Ntuda Ebodé
2010, La nouvelle posture géopolitique du Cameroun et la lutte contre la
piraterie dans le Golfe de Guinée, p.81.
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à la sécurité : d'une Armée « de garde »
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III- LA PROBLEMATIQUE DE LA SECURITÉ APRES UNE
DÉCENIE DE MODERNISATION ET DE PROFESSIONNALISATION
Même si les défis auxquels doivent faire face les
Forces Armées camerounaises sont immenses, les signes récents de
progrès aussi modestes soient-ils sont encourageants. La modernisation
et la professionnalisation des Forces Armées camerounaises
engagée par les reformes de 2001 fait son bonhomme de chemin non sans
conséquence à l'encontre des « ennemis » de la
République. La dernière démonstration est
l'opérationnalisation d'une stratégie de riposte contre les
coupeurs de route, les pirates de mer dénommée « GOLDEN
LION » présentée au Chef Suprême des
Armées lors des festivités des cinquante ans des Forces
Armées camerounaises le 07 et 08 Décembre 2010 à Bamenda.
Il s'agissait de la mise en scène d'une opération de
délivrance des otages menée par un groupe interarmées
Terre-Air-Mer.
Figure N°22 :
Opération d'hélicordage pendant l'exercice Golden
Lion

Source : Magazine des Forces
de Défense Honneur et Fidélité, Numéro
spécial du 20 mai 2011, Page 35.
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Figure N°23 :
Manoeuvres de l'Opération GOLDEN LION



Source : Magazine L'ANNEE DU
PRESIDENT 2010, Nouvelle Espérance, Page 38.
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Cette opération aujourd'hui au point a commencé
à porter des fruits durant sa gestation. Elle a permis la
libération des otages, la mise en déroute de nombreuses attaques,
l'arrestation de nombreux coupeurs de routes et bandits de mer, et la
récupération de nombreuses armes de guerre et munitions. Nous
pouvons évoquer entre autres bien qu'étant soumis à
l'obligation de réserve et limité par le secret défense
:
* 01 attaque de deux chalutiers repoussée à
Douala par la brigade de gendarmerie maritime de Douala et les
éléments de la Brigade d'Intervention Rapide (BIR)72
;
* 11 personnes sont libérées de leurs ravisseurs
non identifiés à
l'Extrême Nord dans l'arrondissement de Petté,
département du Diamaré le 10 septembre 200973 ;
* 7 ressortissants chinois, pris en otage dans les eaux
territoriales
camerounaises dans la nuit du 12 au 13 mars 2010 à 2
heures du
72 Six blessés dont trois dans un
état grave, 287 000 Fcfa et 17 téléphones emportés,
sans oublier les dégâts matériels avec une cabine de bord
endommagée. Tel est le bilan de l'attaque perpétrée par
les assaillants non identifiés aux larges des côtes camerounaises
dans la nuit de vendredi à samedi dernier. Vendredi 4 septembre, vers
20h, au niveau de la bouée de sauvetage, deux chalutiers (bateau de
pêche) « Stemar and Elisabeth » et « Irakis » ont
été attaqués par une vingtaine de pirates armés de
kalachnikovs. Après leur forfait, les bandits de mer ont tenté de
s'en prendre à deux bateaux pétroliers, le LpgcLoex qui
transportait 20 personnes et le Symirna avec ses 23 passagers à bord. Le
premier bateau venait de Cotonou et transportait du gaz pour une
société de la place à Bonabérie, tandis que le
deuxième partait de Douala pour le Nigeria. Alertées, les
autorités ont réagi promptement. La brigade de gendarmerie
maritime de Douala et les éléments du BIR vont mettre en
déroute les assaillants qui rebroussent chemin à bord de deux
embarcations. Les Forces de Défense camerounaises vont ensuite
sécuriser les deux autres bateaux pétroliers menacés par
les assaillants, en les ramenant au port autonome de Douala. Un
périmètre de sécurité sera ensuite
déployé, pour parer à d'autres éventuelles
attaques. Le quotidien national Cameroon Tribune N°9428/5630 du 07
septembre 2009, page 8.
73Pris en otage le 8 septembre 2009 à
Amayere, village situé dans l'arrondissement de Petté, leurs
ravisseurs réclamaient une rançon de 12 millions de FCFA. Le BIR
et la Gendarmerie après 45 minutes de combats vont parvenir à
libérer les otages sains et saufs sans paiement d'une moindre
rançon. Le quotidien national Cameroon Tribune N°9434/5635 du 15
septembre 2009, pages 12.
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vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
matin par des individus non encore identifiés
d'après le communiqué
de presse de la Présidence de la République du 19
mars 201074 ;
* 01 otage libéré dans la localité de Gadjia
et un gang de 10 coupeurs de route démantelés dans
l'arrondissement de Mindif75 ;
* 7 otages libérés et 8 preneurs d'otages
capturés par « l'opération
araignée » menée par le comandant de
compagnie de Guider76 ;
74En exécution des très hautes
directives de Son Excellence Monsieur le Président de la
République, chef des Armées, les Forces de Défense et de
sécurité ont procédé, le 17 mars 2010, à la
libération de sept (7) ressortissants chinois, pris en otage dans les
eaux territoriales camerounaises dans la nuit du 12 au 13 mars 2010, à 2
heures du matin par des individus non encore identifiés. Il s'agit de
Messieurs :
1. Fang Guoxing
2. Fan Guogang
3. Wu Longxiang
4. Zhu Xianmin
5. Liang Kejun
6. Wang Quingming
7. Wang Xinfeng
Le gouvernement de la République du Cameroun saisit
cette occasion pour remercier les autorités chinoises pour la
compréhension et la confiance qu'elles ont témoigné au
Cameroun ainsi que pour toute la coopération qu'elles ont apporté
pour l'heureux aboutissement de cette délicate opération. Le
gouvernement invite enfin tous les opérateurs économiques
opérant dans les eaux territoriales camerounaises à se conformer
strictement aux mesures prises par les Forces de Défense pour assurer
leur sécurité. Le quotidien national Cameroon Tribune
N°9563/5764 du 22 mars 2010, page 4.
75Le 15 juillet 2010, ce gang a
perpétré l'enlèvement de trois bergers dans la
localité de Gadjia ; il exigeait une rançon de 3 millions de F
pour la libération de ces otages. A mettre aussi dans leur actif, le
meurtre à l'arme automatique du nommé Abdoulaye Djouldé,
froidement abattu le 29 juillet 2010 parce qu'il tentait de les empêcher
de prendre des otages dans la localité de Kobo. Le 25 juillet dernier,
ces malfrats enlevaient également deux fils de bergers à Ngouma
près de Mindif. En plus de nombreux viols, rackets de petits
bétails, vols des denrées alimentaires dans plusieurs
localités dont ils se rendaient alors coupable. Suite à ces actes
d'insécurité, les éléments du BIR ont mis en place
un dispositif visant à les mettre hors d'état de nuire. C'est
ainsi que le 30 juillet dernier, un accrochage avec les brigands a permis de
désorienter ces derniers et de libérer un otage. Passés
aux aveux complets, ils sont allé montrer la cachette de leur arsenal
constitué entre autres de 4 fusils kalachnikovs, 318 munitions, 17
boites chargeurs, un couteau, 8 housses à munitions, 3 bâches, du
matériel de couchage, des ustensiles de cuisine et une sommes de 343 000
F. Le quotidien national Cameroon Tribune N°9654/5855 du 03 Aout 2010,
pages 17-18.
76 Dans certains villages de l'arrondissement de
Mayo-Oulo, 13 malfrats font une invasion violente dans la nuit du 11au 12 juin
2010 dans les villages Dafa, Poka-Dafa
Thèse de Doctorat/Ph.D en Sce Po, UY2, 2011
Ernest Claude MESSINGA 286
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
* 01 gang de 4 coupeurs de routes démantelé par
les éléments du BIR et du matériel de guerre et des
munitions entre les mains de ces malfrats77 .
* 18 pirates de mer abattus en mer quelques heures après
leur attaque
de l'agence d'Ecobank en pleine capitale économique du
Cameroun.
CONCLUSION
Ces actions répressives des Forces de Défense
camerounaises loin d'être exhaustives font montre de leur dynamisme
assuré par une professionnalisation progressive. Les enjeux
sécuritaires étant énormes, la qualité de leur
formation et le respect de la discipline sont les priorités des
autorités civiles et militaires. C'est ce qui justifie la nomination de
trois nouveaux responsables militaires le 09 juin 2010 dans la capitale du Nord
avec pour prescription de faire de la lutte contre l'insécurité
transfrontalière
et Dala et prennent en otage 10 personnes dont un enfant de 10
ans. Après moult négociations sans succès avec les
familles des victimes, les preneurs d'otages vont faire appel à l'
« expertise » de certains pays voisins. C'est ainsi que trois
mercenaires tchadiens sont arrivés dans la région quelque temps
après. Ils vont attacher les otages contre les troncs d'arbres sur la
montagne Kouboutou, et vont les torturer à longueur de journée.
Trois otages vont succomber à la souffrance, notamment Bouba Toumbala
(57 ans), Halidou Baraya (36 ans) et Dokeye Haman. Entre temps, le gendarmerie
se met à leurs trousses et fini par mettre la main sur 8 personnes. Il
s'agit notamment de Youssoufa, Madi Lea, Kari Bouba (commanditaire du coup),
Harouna Dodji (propriétaire arme à feu), Harouna Adama
(chargé du ravitaillement des malfrats), Boubakari Zroumba (relais entre
les malfrats et familles des victimes), Sandi Djoumane (contact des mercenaires
tchadiens), et Moussa (membre du gang). Le quotidien national Cameroon
Tribune N°9632/5833 du 02 juillet 2010, page 12.
77L'intervention du 1er Bataillon
d'Intervention va permettre de mettre fin aux exactions des malfrats qui
écumaient l'arrondissement de Gobo dans le Mayo-Danay. Il s'agit de
Goulama, le chef de gang, Nganchi Bahatoussou, alias Job et Hussein Ahmid. Si
les éléments du BIR n'ont pas pu mettre immédiatement la
main sur les deux premiers cités, ils ont maîtrisé Hussein
Ahmid. Ce dernier, retrouvé dans en pleine brousse non loin de la
localité de Tolgut, portait une arme de guerre,
précisément un « Pm Mat 49 » et beaucoup de munitions.
L'homme n'a pas nié être un coupeur de route. Bien au contraire,
il a déclaré effectuer sa sale besogne avec les nommés
Nganchi Bahatoussou, Goulama, le chef de village qui leur a fourni les armes
qui leur permettaient de dépouiller leurs victimes. A leurs actifs, de
nombreux vols de bétail dans l'arrondissement Moulvoudaye,
écoulés au Tchad voisin à vil prix. Le quotidien
national Cameroon Tribune N°9635/5836 du 07 juillet 2010, page 11.
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
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leur priorité. Il s'agit du Colonel Eyong Tambong Ebot,
le commandant du secteur militaire terrestre numéro trois (Comsecteur 3)
couvrant la région du Nord, le Colonel David Demanou, commandant le
41e Bataillon d'Infanterie Motorisé (BIM), le Lieutenant
Colonel Ngoa Abdoulaye à la tête du troisième Bataillon de
soutien78. La lutte contre l'insécurité reste la
préoccupation du Chef supérieur des Armées qui ne cesse
d'agir, la dernière action étant la nomination le 31 aout du
Secrétaire Permanent du Conseil National de Sécurité
Monsieur Paul Atangan Nji79. Mais les récentes prises
d'otages dans le Grand Nord, les dernières attaques des chalutiers dans
les eaux territoriales camerounaises, les pertes en vie humaine
enregistrées dans les rangs des Forces Armées camerounaises
démontrent à suffisance la vulnérabilité du
système de défense camerounais en termes d'hommes et
d'équipements, exigeant ainsi une mise à jour permanente au vue
du dynamisme des nouvelles formes de menaces.
78 Le quotidien national Cameroon Tribune
N°9625/5826 du 23 juin 2010, page 3.
79 Décret N°2010/266 du 31 août 2010
; Le quotidien national Cameroon Tribune N°9672/5873 du
1er septembre 2010, page 2.
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
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CHAPITRE VI
LA RECONFIGURATION OPÉRATIONNELLE DU SYSTEME DE DÉFENSE : LA
REORIENTATION SÉCURITAIRE
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Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
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Depuis les attentats terroristes du 11 Septembre 2001 aux
Etats-Unis d'Amérique, aucune partie du monde ne semble être
à l'abri de la menace terroriste. Ceci sera confirmé plus tard
par les attentats de Madrid, de Londres, les attentats manqués en
France. Ces éléments caractérisant une crise
internationale définissent une nouvelle géopolitique
internationale entretenue par l'émergence des « réseaux
terroristes » en l'occurrence AlQaida, le Groupe Salafiste pour la
Prédication et le Combat (GSPC), les Groupes Islamistes Armés
(GIA)... A coté de ces attentats, on observe également le
phénomène de Piraterie maritime devenue une véritable
entreprise criminelle internationale doublée d'un commerce très
lucratif. L'on se souviendra longtemps du Lundi 17 Novembre 2008, ce jour ou la
piraterie maritime a franchi un palier qu'on croyait infranchissable en
s'emparant d'un superpétrolier le Sirius Star, un énorme tanker
Saoudien contenant deux millions de barils d'or noir d'une valeur de cent
millions de dollars soit environ deux milliards de francs CFA. Selon le Bureau
Maritime International (BMI), quatre vingt quatorze bateaux ont
été attaqués par des pirates saoudiens sur deux cents
attaques répertoriées dans le monde. De toute évidence, la
cote d'alerte est atteinte avec la multiplication des actes de piraterie dans
le Golfe d'Aden plongeant la Communauté Internationale dans le
désarroi, surprise de la capacité de nuisance des
pirates80. Par ces faits, les Etats font désormais face
à une nouvelle réalité internationale porteuse de menaces
multiformes. Le noyau dur est constitué par le terrorisme (notamment
islamiste), la piraterie maritime, la criminalité
transfrontalière, les trafics illicites81. Ces menaces, plus
difficiles à prévoir, à parer, à évaluer,
peuvent avoir des conséquences graves dans la vie des Etats. En
réalité, le monde part d'une menace principale, conventionnelle
et identifiée à une prolifération de menaces diffuses.
Dès lors, les conflits et les violences ne sont plus seulement
80 Cameroun Tribune N°9255/5432 2008, page 31.
81 IHEDN, 2002, Défense globale et politique
militaire de défense, Rapport première phase de la
54ème session nationale.
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
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militaires. D'autres convulsions ont lieu à
l'échelle de la planète, fruits d'acteurs globaux
élargissant le cercle d'influence. Il s'agit des Forces «
transverses », « asymétriques », « nouvelles »
qui tirent profit de l'évolution de la réalité
internationale pour prospérer et exploiter ses
vulnérabilités. Chaque partie du monde, chaque Etat vit sa
cohorte de menaces. Tel est le cas de l'Afrique et ses cinq sous
régions. Ces attentats ont ouvert la voie à des conflits d'un
type nouveau, sans champ de bataille et sans Armée clairement
identifiée, ou l'adversaire, prêt à utiliser les armes de
destruction massive, vise clairement des populations. On vit désormais
dans un monde durablement imprévisible, dans un environnement
stratégique en mutation qui oblige les Etats à rehausser leur
effort de défense. La nième attaque des assaillants non
identifiés dans la presqu'île de Bakassi et revendiquée
plutard par les combattants d'Africa Marine Commando (AMC), une excroissance
des Bakassi Freedom Fighters avec pour bilan 2 morts et 12 otages82
confirme cette hypothèse.
Ce vent d'insécurité mettant à mal les
Etats désormais incapables d'assurer leurs missions régaliennes
parmi lesquelles la sécurité de ses citoyens est l'objet d'une
problématique commune à de nombreux gouvernements. La nature de
la menace, ses origines et son évolution permanente exige une action
immédiate passant par : le contre-terrorisme, les relations
civilo-militaires, l'économie de défense et la gouvernance
démocratique.
82 L'embarcation transportant la
délégation camerounaise composée de 12 personnes et
conduite par le sous-préfet de Kombo A Bédimo a été
attaqué de retour de la Commission mixte Cameroun-Nigeria. Alors que
l'embarcation de la délégation camerounaise naviguait sur le
chemin retour, elle a été attaquée par deux navires ultra
rapides (fly boat) remplis de rebelles solidement armés. Bilan, 12
personnes portées disparues et retenues en otage. Il s'agit du : du
sous-préfet de l'arrondissement de Kombo à Bédimo, son
adjoint, le commissaire spécial, l'officier de 2ème
grade Zé Crépin, le commissaire de sécurité
publique, l'officier de police de 3ème grade Mbelibi, le
Maire et son adjoint, le commandant de brigade de gendarmerie de la
localité et quatre de ses éléments, et une
infirmière. Après avoir maîtrisé l'embarcation, les
rebelles ont mené un raid à la brigade maritime de Mbonjo aux
environs de 3 heures du matin avec une arme lourde. A l'issue de cette
offensive, les assaillants ont abattus le commandant, l'adjudant chef Essaga
André. Le quotidien national AURORE PLUS n°1292 du Mardi 08
Février 2011, page 5.
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
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I- LE CONTRE TERRORISME
D'après les Nations Unies, le terrorisme est toute
action qui a pour intention de causer la mort ou de graves blessures
corporelles à des civils ou à des non-combattants, lorsque le but
d'un tel acte est, de par sa nature ou son contexte, d'intimider une
population, ou de forcer un gouvernement ou une organisation internationale
à prendre une quelconque mesure ou à s'en abstenir (Ahouanye M.L.
2008).
Pour l'Union Africaine (UA), l'acte terroriste est : «
(a) tout acte ou menace d'acte en violation des lois pénales de
l'Etat partie susceptible de mettre en danger la vie, l'intégrité
physique, d'une personne ou d'un groupe de personne... et commis dans
l'intention : (i) d'intimider, provoquer une situation de terreur, forcer,
exercer des pressions ou amener tout gouvernement, organisme, institution,
population ou groupe de celleci, d'engager toute initiative ou de s'en
abstenir, d'adopter, de renoncer à une position particulière ou
d'agir selon certains principes; ... » (Article 1er section 3 de sa
convention sur la prévention et la lutte contre le terrorisme).
(Ahouanye M.L. 2008). Les prises d'otages des coupeurs de routes dans le Grand
Nord, les attaques armées du MEND, des Bakassi Freedom Fighter et
l'Africa Marine Commando destinées à intimider, provoquer une
situation de terreur, forcer, exercer des pressions ou amener le gouvernement
sur la table de négociation peuvent être assimilées au
terrorisme. Combattre efficacement le terrorisme passe par la mise sur pied
d'une « Armée de l'avant » et d'une approche
stratégique nationale.
1) UNE ARMÉE « D'AVANT-GARDE » POUR
UNE
« DEFENSE DE L'AVANT »
Contre les Armées classiques, la défense pouvait
encore hier s'ériger aux frontières et attendre, pour s'exprimer,
la matérialisation de la menace. Maîtrisée par les Etats,
la violence était contenue dans leurs limites ; elle
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ressemble désormais davantage à un cancer qui se
répand s'il n'est pas traité à temps, les cellules saines
se trouvant d'entrée menacée quel que soit leur
éloignement initial des cellules malignes. Les nouvelles formes de
violence, conjuguées aux effets de la mondialisation et de la
porosité des frontières, rendent ainsi l'attentisme dangereux et
demandent au contraire, à l'extérieur des territoires nationaux,
la construction active d'un environnement stable. Les reformes de 2001 sont
claires sur ce point lorsqu'elles statuent que « le Cameroun
entretiendra en permanence la capacité d'action extérieure
nécessaire à la défense de ses intérêts de
sécurité et à ses responsabilités.».
a) CONSTRUCTION DE LA PROFONDEUR STRATÉGIQUE
NATIONALE
Le stratège nous dit l'ardente nécessité,
pour l'emporter, est de bâtir sa propre profondeur stratégique ;
à défaut, vous êtes vite submergé. Il faut donc
défendre et stabiliser « à l'avant », sur les cercles
extérieurs, conduire si nécessaire l'attrition rétrograde
sur les cercles intermédiaires, pour enfin défendre ferme, si
hélas cela s'avérait nécessaire sur les derniers cercles
intérieurs. La sécurité, par la défense, doit se
construire d'abord à l'« avant », la première ligne
pro-action s'établissant souvent loin des frontières nationales,
à proximité immédiate des « trous noirs »
à contenir puis résorber. La prévention, sous ses
différentes formes, prend ici une place essentielle. C'est par
l'intervention en amont, hors des frontières qu'il faut aller au plus
tôt tarir les sources de violence, réduire les tensions et
instabilités génératrices de crises, maîtriser les
logiques de prolifération nucléaires ou conventionnelles : aucune
Maginot moderne, juridique ou sécuritaire, ne saurait en effet
protéger longtemps de la violence extérieure et de ses avatars
moderne, terrorisme, criminalité organisée, etc. Le
réalisme, autant que l'idéalisme, impose l'action : il n'y aura
pas de sécurité définitive au Cameroun au coeur d'une
Afrique centrale instable, privée de
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sécurité. Dès à présent, la
continuité entre sécurité et défense condamne les
attitudes attentistes. Devant la violence collective qui se répand,
céder à la tentation de retranchement serait un dangereux
aveuglement. « Si nous n'allons pas à son contact, cette violence
viendra à nous » (Desportes 2008 : 6). Les Forces Armées
n'ont pas d'autre choix que de s'engager de manière résolue au
contact du monde en ébullition et de prendre acte leur engagement
permanent dans les opérations longues et douloureuses.
N'en doutons pas, le Cameroun a besoin d'une Armée «
d'avantgarde » pour une « défense de l'avant ».
b) UNE DÉFENSE PROACTIVE SOUS PEINE D'ECHEC
La défense doit être proactive sous peine
d'échec :
· La protection, fonction stratégique essentielle,
à la fois première et ultime finalité de l'appareil de
défense ;
· La prévention, fonction aux multiples
composantes, dissuasion nucléaire, dissuasion conventionnelle (à
conforter d'ailleurs, puisque sa crédibilité est fortement
malmenée dans les opérations actuelles),
prépositionnement, etc. Pour autant, l'exacerbation de la seule
défense sur le territoire pourrait finir par menacer ce qu'elle
prétend défendre en portant progressivement atteinte aux
libertés communes, comme le montre l'ambiguïté de certaines
mesures antiterroristes prises ailleurs ;
· La stabilisation des zones exportatrices de violence
est la troisième fonction essentielle. Il s'agit de déployer
régulièrement les Forces à l'extérieur, en autonome
ou en coalition, dans la résolution des crises intra-étatiques et
l'assainissement de leur terreau.
La pertinence des outils d'action militaire, la promotion
sociale de la paix et la prévention du terrorisme, seront à cet
égard déterminantes grâce à la capacité
qu'elles conféreront d'affronter les véritables enjeux. Dans
la
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guerre probable, les Forces terrestres sont la force de la
nation et l'homme est la force des Forces terrestre.
c) ADAPTER LES MODELES DE FORCES
Même s'il serait irresponsable de se départir
des moyens de répondre à la résurgence d'une menace
militaire majeur au cas où l'on n'aurait pas su la prévenir, il
n'y aura pas, au cours du quart de siècle à venir,
d'Armées classiques capables de rivaliser avec les coalitions sous
régionales. Il faut pourtant conserver les capacités d'action
conventionnelle. Elles sont en effet nécessaires pour prévenir la
remontée de ce type de menace en dissuadant l'adversaire éventuel
d'une course à la puissance, mais aussi pour conforter l'indispensable
diplomatie coercitive en crédibilisant la dissuasion par la
complétude du spectre des menaces et permettre, autant que de besoin,
d'imposer la force contraignante dans les opérations
extérieures.
Cependant, l'effet pervers de cette surpuissance est
d'engendrer à la fois, le rejet des modèles sociétaux qui
l'ont produite et l'improbabilité des guerres dont le mode lui est
naturel ; diminuant d'elle-même l'éventualité des vastes
actions anti-forces, elle trouve paradoxalement dans le
déséquilibre des arsenaux la limite même de son
utilité. A force de dissuader, elle décourage. L'adversaire,
toujours prompt à contourner la violence classique, cherche dans de
nouveaux espaces d'affrontement la capacité à faire valoir ses
objectifs politiques. La guerre, passée d'une logique capacitaire
à une logique finalitaire, ne fonde plus ses succès sur les
rapports de forces traditionnelles. Elle suppose, pour le règlement des
crises, la mise oeuvre d'instruments militaires puissants, mais aussi
politiques, diplomatiques, sociaux, à travers l'existence de Forces
capables de jouer, dans la guerre probable, de ces différents
registres.
De fait, les nouveaux contextes modifient l'activité
stratégique et nivellent les avantages nés de la haute
technologie. L'influence remplace la
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puissance. Il s'agit souvent moins de conquérir
l'espace que de pacifier les coeurs, de gagner l'adhésion des
populations au projet qu'on leur propose. L'essentiel n'est plus l'aptitude
à la destruction, mais la capacité d'assurer le contrôle
politique de l'espace et d'établir, grâce à la violence
maîtrisée d'une action perçue comme légitime, les
conditions d'émergence d'un nouveau contrat social. Il s'agit aussi de
montrer une indispensable détermination dans la volonté de
résolution d'une crise ; en ce sens, l'engagement des Forces terrestre,
qui met en jeu très directement la vie des soldats de la nation
intervenante, est significatif.
Depuis 1945, la plupart des guerres se sont
déroulées à l'intérieur des Etats et le mouvement
s'amplifie. Ce constat remet en cause les concepts et modèles qui
valaient pour les guerres interétatiques et diminue l'apport de la haute
technologie aux nouvelles applications de la diplomatie. Le nouveau paysage
conflictuel estompe ainsi progressivement les certitudes quantitatives,
rationnelles et classiques du 20ème siècle : la
dérégulation de la guerre a donné naissance à des
formes de crises qui replacent l'homme au coeur des systèmes de
défense (Desportes 2008 : 7). Pour les Armées, le principe
d'adaptation doit dominer en imposant les arbitrages internes et externes
nécessaires, afin de construire des systèmes de Forces capables
de coercition, mais également de produire sur le terrain de
l'efficacité politique.
L'interdépendance des Etats, la
perméabilité des sociétés, la globalité des
enjeux comme des menaces, ne laissent pas d'autres choix que d'assurer la
sécurité du lointain au proche, en participant au
règlement des crises, moins avec les armes de la destruction qu'avec
celles de la capacité de persuasion par la puissance
maîtrisée. Cependant, les circonstances et conflictualités
évoluent très vite. Poursuivant sa métamorphose, la menace
adopte toujours des formes nouvelles auxquelles nous ne sommes pas
préparés. Donc, quel que soit le type d'engagement, nous ne
saurons faire produire de l'efficacité à nos systèmes de
force que nous sommes dans une
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
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vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
attitude permanente d'écoute et d'évolution.
Encore plus qu'avant, mais probablement moins que demain, la capacité
d'adaptation rapide s'affirme comme la qualité essentielle des
systèmes militaires (Desportes 2008 : 8). L'expérience montre que
les Armées qui gagnent sont les Armées qui apprennent, celles qui
tirent du réel leur efficacité pour l'avenir. « Learn
and adapt » disent les anglo-saxons : c'est un impératif. Les
Forces Armées doivent aller plus loin que là ou elles sont
aujourd'hui ; elles ne doivent pas se contenter d'écrire les
leçons qu'elles ont apprises, elles doivent surtout apprendre les
leçons qu'elles ont écrites et en tirer toutes les
conséquences pour leurs modèles de Forces, leur équilibre,
l'entraînement des unités, la formation des hommes, etc.
d) GUERRES PROBABLES : NOUVEAUX METIERS,
NOUVEAUX SOLDATS
La société camerounaise manifeste une exigence
croissante pour une sécurité individuelle et collective qu'elle
attend de la puissance publique. Ce besoin de sécurité, parfois
du seul ordre du sentiment, s'applique aux Armées et influence leurs
actions dans deux domaines essentiels : la sécurité qu'elles
fournissent au pays et celle que ses membres sont en droit d'attendre. L'aire
des conflits asymétriques élargit les menaces possibles qui ne
demeurent plus circonscrites à la seule action militaire et accentuent
les vulnérabilités de la société (Coste 2007 : 27).
Le siècle naissant laisse émerger un model nouveau. Les
opérations sont désormais marquées par l'importance des
actions autres que le combat, avec des bascules rapides entre différents
types d'action et de comportement. Le soldat de la guerre froide, rodé
dans un seul métier, cède la place à son successeur
beaucoup plus polyvalent, apte à pratiquer des actions fondées
sur des savoirs-faire et des comportements presque opposés, capable
d'action de coercition, de sécurité, d'humanitaire, etc. Le chef
militaire demeure un meneur d'hommes, mais il devient un administrateur, un
négociateur et un
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
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médiateur ; il doit disposer des moyens intellectuels et
matériels de ces nouveaux rôles.
Le nouveau soldat doit comprendre sa place, cruciale mais non
unique dans le règlement des nouveaux conflits. Il doit avoir saisi
toute l'importance de l'action globale et du rôle fondamental des
différents acteurs non militaires, ceux du monde diplomatique, du monde
sécuritaire, du monde humanitaire, du monde économique et des
entreprises. Pour le livre blanc 2008, « la complexité des
crises internationales oblige à définir des stratégies
réunissant l'ensemble des instruments, diplomatiques, financiers,
civils, culturels et militaires, aussi bien dans les phases de
prévention et de gestion des crises proprement dite, que dans les
séquences de stabilisation et de reconstruction après un
conflit » (Desportes 2008 : 8).
Le nouveau soldat doit donc apprendre à préparer
avec les acteurs civils, en amont, cette phase décisive des
opérations qui est la phase de stabilisation. Il doit donc apprendre
à mieux passer du militaire au sécuritaire, de l'urgence
humanitaire au politique de reconstruction et de développement. Il doit
apprendre à passer progressivement le relais dans la marche commune vers
la normalisation, à conjuguer au mieux, pour le règlement de la
crise, l'efficacité militaire et l'efficacité civile. Ces
nouveaux métiers, il ne les apprendra pas dans le seul apprentissage de
la coercition. Il est désormais établit pour certain que, tant en
termes d'équipements que de formation d'hommes, la règle du
« qui peut le plus peut le moins » ne peut s'appliquer car,
il ne s'agit pas de faire un peu moins, mais autrement avec autre chose. Ce
n'est pas une différence de gradation, c'est une différence de
nature. Il s'agit d'une diversification du spectre des actions qui
complexifient encore le métier de soldat, car ce dernier doit demeurer
expert dans ses rôles d'hier tout en excellant, en outre, dans ceux de la
guerre probable. Nous constatons ainsi un vaste élargissement du
métier militaire. Il n'est d'ailleurs que le retour à la
réalité d'hier, le reflet du retour de l'histoire.
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e) REPONDRE AUX BONNES QUESTIONS
Nous savons que les institutions militaires sont
particulièrement aptes à développer des solutions
impressionnantes aux problèmes qu'elles aiment résoudre
plutôt qu'aux problèmes que vont poser leurs futurs adversaires.
Les défis actuels demandent de contenir leur dérive et de
résister à la tentation de s'appuyer seulement, comme
naguère sur sa supériorité dans le domaine technologique
et ses capacités de destruction pour faire face à des adversaires
bien différents de ceux d'hier.
Il n'y a pas d'autres choix que de prendre en compte
l'évolution du monde et celle des acteurs potentiels. Il n'y a pas
d'autres choix que de comprendre la guerre probable. A trop parler de
techniques et de capacités, dans un espace de mimétisme
explicable, nous amène à oublier de nous poser certaines
questions fondamentales sur la finalité de l'engagement
militaire. Permettant de faire encore mieux la guerre
d'hier, nous avons cru que les prouesses technologiques étaient
naturellement adaptées à l'évolution de la guerre, n'ayant
pas compris que son visage subissait une véritable mutation. Le
débat sur la « transformation » est un débat
plus que légitime ; il ne doit pas porter essentiellement sur la
technologie et les organisations, mais plutôt sur la finalité de
la guerre, les meilleures voies pour y parvenir aux objectifs
recherchés. Faut-il aller jusqu'à l'instauration d'une «
contre révolution dans les affaires militaires » suivant
la formule de Ralph Peters ? Peut être pas, mais le livre blanc 2008
constate que « les évolutions attendues dans les années
1980 et 1990, fondées sur une haute sophistication technologique, n'ont
pas apporté les garanties de succès espérées ; le
facteur humain demeure et demeurera déterminant »
(Desportes 2008 : 8). Il faut donc
sûrement s'orienter aujourd'hui fermement vers une «
transformation de la transformation », vers une vraie
capacité à comprendre et défaire les nouvelles menaces,
parfois radicales, qui sortent du cadre de l'action militaire traditionnelle.
Les Forces Armées
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doivent se préparer à la guerre qu'elles auront
à conduire, non à celle qu'elles préféreront parce
qu'elles savent le faire. Ils doivent donc modifier profondément leurs
schémas de pensées. Or, par un mouvement normal de balancier vers
les réalités pérennes, la guerre montre bien aujourd'hui
qu'elle n'est pas un problème de système d'armes mais, un
problème politique, social et humain, infiniment plus complexe et
incertain : ils doivent donc maîtriser les excès de la culture
« digitale » et ne pas laisser la technologie conduire l'analyse
stratégique. Il faut réintroduire la dimension politique dans la
réflexion technique et opérationnelle.
C'est peut être parce qu'ils ont éludé
ces réflexions que les éléments du Bataillon
d'Intervention Rapide (BIR) et du Groupement Polyvalent d'Intervention de la
Gendarmerie Nationale (GPIGN) continuent de côtoyer les coupeurs de
routes dans le Grand Nord au grand désarroi des populations, le BIR
DELTA et les pirates de mer dans la presqu'île de Bakassi, que le
gouvernement américain n'a pas cesser de compter ses victimes marins
traduisant sa débâcle en Irak et en Afghanistan, que les Forces
spéciales françaises restent impuissantes face la recrudescence
des menaces terroristes, que les israéliens sont intervenus au Liban de
manière décalée par rapport à la
réalité. Ils n'ont pas perdu, bien sûr, mais face à
un adversaire asymétrique, une puissance militaire qui ne gagne pas
subit un revers dont les conséquences la dépassent largement.
Quelques soit l'avis qui est porté sur leurs succès dans leurs
engagements respectifs, ils font partie des victimes collatérales de
toutes les difficultés militaires ce qui, dans chaque cas, peut
altérer la perception chez l'autre de la puissance militaire classique,
et partant, l'utilité de leurs modèles de Forces.
Au cours de ces dernières années, chacun a pu
observer que la puissance militaire conventionnelle pouvait être
contournée. Nous sommes donc devant l'ardente nécessité de
restaurer la crédibilité et l'efficacité des Forces
Armées. A nous de réfléchir aux évolutions
souhaitables, aux nouveaux équilibres, en évitant d'apporter des
réponses toujours plus
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perfectionnées à des questions qui ne se posent
plus. A nous de penser autrement, de préparer la guerre probable
à travers un système antiterroriste.
f) LE SYSTEME ANTI-TERRORISTE
Le 05 avril 2008, dans une déclaration à
l'ouverture du séminaire sur le contre-terrorisme en Afrique du Nord, le
Ministre Délégué Chargé des Affaires
Maghrébines et Africaines, M. Abdelkader Messahel a souligné que
l'Afrique a identifié la menace terroriste parmi les plus graves qui
constituent pour elle des défis majeurs d'où l'urgence de la mise
en place d'un système anti-terroriste efficient sur le continent. C'est
dans ce sens que l'Union Africaine a, et à juste titre,
intégré la lutte anti-terroriste dans l'architecture africaine de
paix et de sécurité.
La lutte contre le terrorisme en Afrique fait donc intervenir
un ensemble de mesures destinées à combattre de front les actes
de terrorisme tels qu'ils se manifestent dans l'espace africain. Celles-ci
consisteront concrètement à renforcer les mesures de
sécurité et de contrôle aux frontières des Etats
africains, à développer les moyens d'appropriation des
mécanismes juridiques et institutionnels de lutte contre le terrorisme
établis sur le continent, à assurer l'effectivité de la
coopération policière et judiciaire, la lutte contre le
financement du terrorisme, le trafic illicite des armes et matériels
explosifs, mais également et surtout l'acquisition d'une technologie de
pointe de nature à détecter les engins nocifs les plus discrets,
notamment dans les lieux de transport en commun comme les aéroports.
1- L'ARSENAL JURIDIQUE
Les Etats membres de l'IGAD (Autorité
Intergouvernementale pour le Gouvernement) ont depuis longtemps
préconisé la nécessité de lutter contre le
terrorisme tant individuellement que collectivement. Sur l'initiative du
gouvernement du Soudan, cette question a été examinée
par
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le 9ème sommet de l'IGAD qui s'est tenu
à Khartoum en janvier 2002. A l'issue de cet examen, le sommet a
décidé que cette question devrait être approfondie. A
l'échelle continentale, Il s'agit précisément des normes
de portée juridique telles que la convention de l'OUA sur la
prévention et la lutte contre le terrorisme adoptée en juillet
1999 et son protocole de juillet 2004 dont l'objectif principal est de
renforcer la mise en oeuvre de la convention et de donner effet à
l'article 3(d) du protocole relatif à la création du conseil de
paix et de sécurité de l'Union Africaine, sur la
nécessité de coordonner et d'harmoniser les efforts du continent
dans la prévention et la lutte contre le terrorisme dans tout ses
aspects ainsi que sur la mise en oeuvre des autres instruments internationaux
pertinents. Il s'agit également de la déclaration de Dakar contre
le terrorisme d'octobre 2001, du plan d'action pour la prévention et la
lutte contre le terrorisme de septembre 2002, mais également des organes
d'action comme le Centre Africain d'Etudes et de Recherche sur le Terrorisme
(CAERT), et le Conseil de paix et de sécurité de l'Union
Africaine dont le mandat concerne tout aussi bien des aspects liés
à la lutte contre le terrorisme.
En Afrique centrale, le Groupe d'Action contre le Blanchiment
en Afrique Centrale (GABAC) s'est chargé d'élaborer les
politiques sous- régionales de lutte contre le blanchiment des capitaux.
Ce GABAC est le résultat de la combinaison de deux principaux facteurs :
la Déclaration de politique et le Plan d'action contre le blanchiment
des capitaux, adoptés par l'Assemblée Générale de
l'ONU, en Juin 1998 et la publication des quarante Recommandations du Groupe
d'Action Financière sur le Blanchiment des Capitaux (GAFI) du 31 Octobre
2001. Outre ces facteurs, la mise sur pied de la GABAC répondait
à un besoin d'harmonisation des législations nationales en
matière de lutte contre le blanchiment en Afrique Centrale adopté
à Yaoundé lors du Conseil des Ministres de la CEMAC tenu le 14
Avril 2002 (Fogué Tédom 2007).
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Toutefois, parce que le risque zéro n'existe pas, il
est nécessaire de réprimer avec la plus grande fermeté les
actes terroristes perpétrés, en identifiant non seulement les
auteurs mais aussi les commanditaires. C'est ce qui est demandé aux
Etats parties à la convention de l'OUA sur la prévention et la
lutte contre le terrorisme dans son article 1er, section 3.
2- MECANISMES DE MISE EN OEUVRE
Pour réussir à contrôler un tant soit peu
ce fléau, la mise en place d'un arsenal juridique ne suffit pas. Il faut
mener des actions concrètes sur le terrain pour influencer les acteurs
du phénomène et atténuer son impact sur la
société. C'est dans cette optique que 19 pays, dont
l'Algérie et les Etats-Unis, ont élaboré une
stratégie commune de lutte contre le terrorisme et la criminalité
en Afrique qui leur permet, désormais, d'engager des actions conjointes
contre les organisations terroristes là où elles sévissent
dans le continent. Cette stratégie, qui repose également sur les
échanges d'informations, a été mise en place lors d'un
colloque tenu dans la capitale mauritanienne Nouakchott par des experts en
matière de lutte contre le terrorisme venus d'Algérie, des
Etats-Unis, de France, du Royaume-Uni, du Maroc, de l'Egypte, de Turquie, du
Sénégal, du Burkina Faso, du Tchad, du Soudan, de Côte
d'Ivoire, du Lesotho, du Zimbabwe, du Cambodge, du Bénin, du Burundi, du
Togo et de Mauritanie (Ahouanye M. L. 2008). Ces experts sont affiliés
au groupe multidisciplinaire international «Fusion task
force», réunissant des policiers de plusieurs pays,
créé par Interpol et chargé de la lutte contre le
terrorisme. Ils ont décidé de mener des « opérations
conjointes transfrontalières pour lutter plus efficacement contre les
menaces terroristes et criminelles » dans le continent.
Si l'Algérie est et reste sans doute le pays d'Afrique
le plus évidemment associé au terrorisme international, ce n'est
pas une surprise qu'il soit aujourd'hui considéré comme la
capitale de la lutte contre le terrorisme sur le continent. C'est ainsi qu'elle
a décidé d'accueillir le
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Centre Africain d'Etudes et de Recherche sur le Terrorisme
(CAERT). Ce Centre, basé à Alger, aura pour mission notamment
d'assister les Etats membres de l'Union Africaine dans l'organisation de la
lutte contre le terrorisme a travers l'élaboration d'expertises sur le
terrorisme et des ripostes à envisager contre la menace terroriste, et,
également, de concourir à la mise en oeuvre du plan d'action
visant à priver le terrorisme de ses sources de financement.
En effet la lutte contre le terrorisme passe également
par la répression de son financement. La création par ailleurs du
Groupe Intergouvernemental d'Action contre le Blanchiment d'argent et le
financement du terrorisme (GIABI) et du Groupe d'action financière du
Moyen-Orient et d'Afrique du Nord (GAFIMOAN), témoigne aussi de la
volonté des Etats membres de ces institutions de contribuer à
l'harmonisation des normes relatives à l'action multinationale contre le
financement du terrorisme.
Les manoeuvres stratégiques de lutte contre le
terrorisme ne peuvent véritablement se réaliser et être
efficaces que si elles sont inscrites dans une démarche qui
dépasse le traitement symptomatique du phénomène pour
appréhender les causes profondes qui l'animent. En ce sens, lors de son
intervention à l'occasion de la réunion intergouvernementale de
l'Union Africaine sur la prévention et la lutte contre le terrorisme
à Alger du 11 au 14 septembre 2002, le Président de la
République algérienne Abdel Aziz Bouteflika affirmait ceci :
« le combat contre la pauvreté est peut-être
l'élément premier indispensable de la lutte contre le terrorisme,
car si la pauvreté est humainement et moralement inacceptable, elle est
un facteur destructeur des vertus humaines et des bases de la solidarité
sociale ». Il ressort de ces propos hautement significatifs que plus
de justice sociale (accès à l'eau potable, à
l'alimentation de base, l'éducation élémentaire et aux
soins primaires) contribuerait, à n'en point douter, à
bâtir des piliers de stabilité pour tout le continent et, ipso
facto, à réduire la sensibilité au
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discours terroriste. Il s'agit donc là d'une
interpellation sans équivoque à l'endroit de tous les leaders
africains, mais également de la communauté internationale, qui
doivent se hisser à la hauteur de leurs responsabilités et de
leurs engagements pour faire prévaloir le droit à la justice des
plus faibles et des plus démunis (Ahounyane M. L. 2008).
Comme réponse efficace à ce vent
d'insécurité, le gouvernement camerounais au-delà de
l'institution des Forces contre terroristes depuis 1998 à savoir le
Bataillon d'Intervention Rapide (BIR), le Groupement Polyvalent d'Intervention
de la Gendarmerie Nationale (GPIGN), tout récemment le BIR DELTA doit
mettre l'accent sur le renseignement militaire qui demeure le parent pauvre de
son système de défense.
3- LES EXIGENCES DE LA MANOEUVRE : LE RENSEIGNEMENT
L'acquisition du renseignement est le préliminaire
obligatoire et déterminant pour l'efficacité de l'action
ultérieure et sur lequel se fonde la décision du chef. Celui-ci
doit donc exprimer des besoins à partir desquels sera construit le plan
de renseignement et de recherche. Ils seront ensuite essentiels à la
conduite de la manoeuvre.
Au delà de la description d'un dispositif et de sa
localisation, la finalité du renseignement est de comprendre la
structure et l'intention de l'adversaire et de maîtriser l'environnement,
puis d'évaluer le rapport de force initial et d'estimer le potentiel
adverse. Un tel objectif implique qu'au renseignement militaire de toute
origine, doit être combiné selon les circonstances et le contexte,
celui fourni par les forces locales, les forces de police ou par l'action
diplomatique ou les populations. C'est la diversité des sources
d'information puis leur analyse et leur exploitation qui permettent
d'appréhender l'environnement physique, politique et culturelle de
l'action. Cette analyse doit en outre contribuer à la
compréhension des lacunes adverses afin de saisir les
opportunités, de créer la surprise, voire de les
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provoquer. Même si dans tous les cas la
complémentarité des capteurs de la recherche du renseignement est
fondamentale, le renseignement d'origine humaine est prééminent
dans les conflits actuels (Coste 2008 : 55-56).
Au Cameroun, le statut « secret défense »
fortement appliqué et respecté dans le service militaire certes
indispensable, n'est pas de nature à favoriser la circulation de
l'information structurant le système anti- terroriste. En effet, la
conservation stricte du secret exclut dans sa pratique les civils de la
structure de défense qui est de nature populaire. Or, les «
architectes de l'insécurité » cohabitant avec le peuple
peuvent mieux être identifiés par les civils suffisamment
imprégnés des recherches militaires en cours et de la psychologie
des terroristes. Cette force d'élite assistée des unités
spéciales de Gendarmerie et alimentées par un important service
de renseignement civilo-militaire peut limiter l'action des coupeurs de route
et sécuriser les frontières et les façades maritimes.
La nature transnationale des nouvelles menaces exige des
réponses multilatérales comme celles relatives à la
signature aux cotés des Ministres de la Défense du Gabon, de la
Guinée Equatoriale et de Sao Tome et Principe, de l'Accord Technique
portant sur la mise en place d'un plan de surveillance pour la
sécurisation maritime du Golfe de Guinée « Zone D »
à Yaoundé le 06 Mai 2009 conformément à une
résolution du Conseil de Paix et de sécurité de l'Afrique
Centrale (COPAX). Mais, subsistait, la problématique du voisinage du
Nigeria avec la zone « D ». A l'extrême nord du domaine
maritime des Etats de la CEEAC se trouve le Nigeria qui fait plutôt
partir de la Communauté Economique des Etats de l'Afrique de l'Ouest
(CEDEAO). Or, il se trouve que voisin de la zone D, ce pays connaît les
mêmes impératifs sinon plus de la lutte contre la piraterie et le
terrorisme maritime.
Les rigueurs du respect scrupuleux des frontières
maritimes en dehors des accords spécifiques des Etats concernés
rendent du même coup très difficile l'harmonisation de la lutte
contre les actes illicites dans la zone
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« D », dans l'hypothèse ou les auteurs de
ces actes trouvent refuge dans les eaux sous la juridiction nigériane.
Et c'est là que l'on observe toutes les limites du Droit International
spécifique à la lutte contre les actes illicites en mer.
Le bilatéral entre le Cameroun Nigeria étant
suffisamment lesté par le passage des deux Etats à la Cour
International de Justice (CIJ), il est difficile que les deux Etats trouvent
facilement un accord qui faciliterait tout en autorisant le suivi des criminels
dans leurs eaux respectives par celui des Etats qui mènent la
poursuite.
La parade juridique et opérationnelle
opérée par les stratèges de la CEEAC est appelée
à reposer sur un dispositif associant non pas les Etats de la Zone D
avec leur voisin nigérian, mais plutôt les deux ensembles
régionaux voisins : CEEAC-CEDEAO. L'avantage d'une telle
procédure serait de rendre immédiatement applicable l'accord
régional conclut entre les Etats composant les deux entités avec
ceci d'opportun que l'armada CEEAC-Zone D pourrait dans le stricte respect des
procédures convenues, poursuivre les criminels au-delà des
frontières maritimes du voisin si le cas de figure se présentait.
Car, il faut le souligner, les eaux du Golfe de Guinée version CEEAC ne
peuvent être durablement calme si les Etats voisins, surtout le Nigeria
ne sont fortement pris en compte et associés aux instruments juridiques
développés et aux stratégies militaires mise en oeuvre
(Ntuda Ebodé 2009 : 144-145). Analyse et recommandation pertinente du
Pr. Ntuda Ebodé, directeur du Centre de Recherches d'Etudes Politiques
et Stratégiques (CREPS) de l'Université de Yaoundé II SOA,
prise en compte avec la signature le 7 avril 2011 d'un Accord entre le Cameroun
et le Nigeria sur la sécurité de leurs frontières
communes. Cet Accord est le fruit d'un brainstorming entre experts camerounais
et nigérians en charge des affaires de sécurité. Il
témoigne l'engagement des deux pays à réprimer la
piraterie maritime. C'est un instrument de coopération approprié
notifiant les actions à entreprendre et le chronogramme des
activités.
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2) LA RÉALISATION D'UNE APPROCHE
STRATÉGIQUE NATIONALE
La capacité des sociétés africaines et
de ses dirigeants à faire face aux défis relatifs à la
sécurité dépend grandement de la qualité de leur
planification stratégique. Plus les problèmes de
sécurité d'une nation sont difficiles et complexes, plus grande
est la nécessité d'une approche stratégique. La
stratégie est l'utilisation organisée et
délibérée des ressources du pouvoir pour atteindre,
protéger, ou promouvoir des objectifs, avec un minimum de gaspillage et
un maximum de chances de réussite. Dans le domaine de la
sécurité, toutes les nations définissent des objectifs et
utilisent les instruments du pouvoir national pour les atteindre. Mais toutes
les nations ne le font pas à l'aide d'une stratégie
cohérente. Si un État choisit une approche stratégique,
les actions appropriées du pouvoir national laissent la place aux
actions méthodiques. Il en résulte une plus grande
efficacité. Avant que les États africains puissent commencer
à développer des stratégies nationales cohérentes,
ils doivent renforcer le fondement de la sécurité, entendue dans
le sens le plus large du terme. La prospérité, la bonne
gouvernance (notamment, le fait de répondre à la volonté
populaire), le consensus national et le développement du capital humain
peuvent constituer le fondement de la sécurité. Celui-ci
permettra aux dirigeants africains de bâtir la sécurité de
manière stratégique. Ce processus comporte plusieurs
étapes.
· Premièrement, toutes les stratégies
requièrent la définition d'une vision nationale. C'est
tout simplement une notion large de la situation recherchée par les
dirigeants. En développant une vision et en obtenant le consentement de
la société vis-à-vis des objectifs, les dirigeants peuvent
entamer le processus de développement des plans et des programmes
stratégiques. Dans le cas de l'Afrique, une vision stratégique
impliquerait :
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- Des méthodes efficaces pour favoriser l'essor
économique et l'introduction dans le système politique de tous
les groupes nationaux, évitant ainsi les conflits et les violences
internes ;
- Un fort sentiment d'identité nationale et un consensus
sur les objectifs nationaux et les procédures de mise en oeuvre ;
- La dissuasion vis-à-vis des ennemis extérieurs
par une association de moyens politiques et militaires ;
- Si la dissuasion échoue ou si un conflit interne se
produit, des effectifs de sécurité capables de défendre la
nation de manière humaine et morale, soit seuls ou avec l'aide
d'alliés ;
- La mise à disposition de ressources appropriées
(mais non excessives) à la sécurité nationale ;
- Des organes de sécurité professionnels et
efficaces Armée, police et services de renseignements qui jouent un
rôle dans l'élaboration de la stratégie nationale, mais
sous contrôle civil ;
- Une norme de coopération régionale et
sous-régionale pour les problèmes communs ; et
- Des procédures régulières et
officielles pour le développement de la stratégie nationale, son
amélioration, et sa coordination avec les autres États de la
région.
· Une fois la vision nationale développée,
la prochaine étape consiste à identifier les
intérêts et les objectifs nationaux. Il est important que
l'évaluation des intérêts soit menée avec
méthode, parce qu'elle permet de faire correspondre de manière
logique les ressources avec les intérêts.
· Après avoir défini les
intérêts, les planificateurs de la stratégie doivent
entreprendre une évaluation honnête et complète de la
menace. Elle permet d'identifier les groupes, les États, les
organisations, ou les pratiques qui pourraient entraver la
réalisation
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de la vision et menacer les intérêts nationaux.
Dans l'environnement de la sécurité actuel, les menaces incluent
les menaces traditionnelles, comme une invasion étrangère et une
insurrection nationale, ainsi que les menaces non traditionnelles, comme les
réfugiés, les maladies, la dégradation de l'environnement
et le crime international. Cette évaluation de la menace ne doit pas
seulement être une liste des menaces vis-à-vis de la
sécurité auxquelles doit faire face une nation, mais elle doit
également leur donner un ordre de priorité selon le degré
de risque et de probabilité. Chaque société doit
décider de la manière d'équilibrer ses efforts entre les
menaces à haut risque et celles à haute probabilité.
· Une fois établies la vision nationale et
l'évaluation de la menace, la planification stratégique
entraîne la mobilisation et la coordination des ressources
stratégiques, et une décision quant à la façon de
les appliquer pour dissuader, améliorer ou résoudre les menaces.
Il est important de garder à l'esprit, à ce stade, que la
stratégie possède une dimension horizontale et une
dimension verticale. La dimension horizontale coordonne les
instruments du pouvoir national instruments économiques, politiques,
militaires et psychologiques. Cela implique une coopération
étroite entre les différentes branches et organisations au sein
du gouvernement. La dimension verticale implique la planification sur le long
terme, ainsi que sur le court terme. Les stratèges doivent
décider comment mobiliser et coordonner au mieux le pouvoir national sur
des décennies, ainsi que pour l'année à venir. Le «
produit » final de ce processus est constitué des politiques et des
programmes qui appliquent les ressources du pouvoir, afin de poursuivre les
intérêts et les objectifs avec des moyens approuvés par la
société dans sa majorité.
La planification stratégique requiert un processus
officiel et rationnel
pour développer la vision nationale, identifier les
intérêts nationaux, évaluer
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la menace et exercer le pouvoir dans les dimensions
horizontales et verticales. Un plan stratégique efficace doit subir des
examens et des révisions régulières. Plus la communication
avec le public et sa consultation sont importantes afin de représenter
des éléments intégrés dans ce processus, plus
grandes seront les chances de voir la stratégie émergente
soutenue par un consensus national (le processus de développement de la
stratégie et le processus de consultation doivent inclure tous les
secteurs de la société). L'Armée et l'exécutif
doivent travailler main dans la main avec les parlementaires, le secteur
privé, les institutions financières, les organisations sociales
et religieuses, les chefs locaux, les partis politiques, les médias, et
les autres secteurs importants de la société. La volonté
des citoyens doit être identifiée et prise en
considération.
Il est évident qu'il existe des éléments
de la stratégie nationale qui doivent être gardés secrets.
Il est cependant utile qu'un gouvernement diffuse un document public qui
explique les intérêts de la nation, les menaces et, en termes
généraux, les programmes et les politiques avec lesquels le
pouvoir national protège et promeut ces intérêts. Les
États-Unis ont trouvé utile de publier un document annuel public
sur la stratégie de sécurité nationale. Ce document permet
un dialogue sur la sécurité nationale, ce qui constitue pour le
gouvernement un moyen de comprendre la façon dont le public la
perçoit. Le gouvernement peut ainsi ajuster la stratégie en
conséquence. Même si un tel document est publié, les
dirigeants nationaux doivent continuellement expliquer la stratégie au
public et écouter ses préoccupations et ses points de vue. Les
médias peuvent jouer un rôle essentiel dans l'éducation du
public au niveau de la sécurité. Ils peuvent également
contribuer à l'information des dirigeants nationaux. Plus les
médias comprennent la stratégie, plus le processus fonctionne de
manière fluide.
Bien que cela soit souvent négligé, une approche
stratégique de la sécurité implique aussi de concevoir des
programmes pour l'identification,
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la formation et la rémunération des
stratèges. La stratégie est un art complexe. Tout le monde n'est
pas capable d'élaborer une stratégie. Pour produire des
stratèges, une nation doit avoir, dans ses universités et ses
organisations non gouvernementales, des programmes sur les questions de
défense et de sécurité, un programme complet
d'enseignement militaire professionnel, et une méthode d'identification
et d'enseignement des civils qui ont un don pour la stratégie. Cette
composante finale ne peut pas être surestimée : le contrôle
efficace du secteur de la sécurité par les civils requiert que
les fonctionnaires élus (les politiques) et les fonctionnaires de
carrière (les bureaucrates) comprennent les questions relatives à
la défense, à la sécurité et à
l'Armée. Ainsi, ils sauront quand il convient de travailler de concert
avec l'Armée, et quand il importe de déléguer des
responsabilités aux militaires. Pour assurer cette finalité, les
États africains doivent envisager d'envoyer des fonctionnaires
qualifiés suivre des programmes d'études supérieures en
Afrique et à l'étranger, ce qui aidera au développement de
ces programmes dans leurs propres universités, et permettra de tirer le
meilleur profit de programmes comme celui du Centre d'études
stratégiques de l'Afrique (CESA)83 et celui du Centre de
recherches et d'Etudes politiques et Stratégiques
(CREPS)84.
83 Le Centre d'Etudes Stratégiques de
l'Afrique appuie la politique africaine des Etats Unis en travaillant avec les
pays africains en vue d'accroître la sécurité et de
promouvoir la démocratie en Afrique. Le CESA poursuit sa mission en
encourageant davantage de professionnalisme ainsi que des principes
démocratiques dans le secteur de la sécurité en Afrique au
travers de programmes axés sur l'harmonisation des points de vue sur les
difficultés communes en matière de sécurité, sur la
sensibilisation au rôle de la sécurité dans les
sociétés civiles et sur le rejet du soutien idéologique au
terrorisme et à l'extrémisme. Les programmes du CESA favorisent
également une interaction dynamique entre hauts responsables militaires
et civils et la mise en place de réseaux professionnels viables.
84 Centre de Recherches d'Etudes politiques et
stratégiques de l'Université de Yaoundé II Soa
dirigé par le Pr NTUDA EBODE J. V. est spécialisé dans
l'analyse stratégique et géopolitique. Il occupe une place
importante dans la recherche d'une définition géopolitique des
politiques de sécurité en général et de
sécurité maritime en particulier. Les nombreux partenariats
développés avec d'autres centres de la sous-région tels
que le CERGEP de l'Université d'OMAR BONGO au Gabon, le partenariat avec
le Cours Supérieur Interarmées de Défense (CSID) dans le
cadre d'un échange de compétences et
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3) CONDUIRE L'ENGAGEMENT POUR GAGNER LA PAIX ET LA
SÉCURITÉ
L'évolution de la forme des conflits renforce la
nécessité d'agir au travers d'un combat interarmes consubstantiel
à l'action terrestre ; de maîtriser la force, la technologie, le
temps, la violence ; de s'adapter face à l'asymétrie croissante ;
d'accompagner la restauration de l'Etat (Coste 2007 : 36-78).
a) L'ACTION INTERARMES AU COEUR DU COMBAT
AÉROTERRESTRE
Le combat aéroterrestre est interarmes par nature. Les
caractéristiques d'un milieu extrêmement varié et
segmenté interdisent de concentrer sur une unité ou plate-forme
toutes les fonctions nécessaires à un combat donné. Le
combat interarmes combine au sein de structures tactiques les effets de
fonctions opérationnelles les « armes » habituellement
réparties dans les unités distinctes. Clé de
l'intégration interarmées, sa maîtrise permet au commandant
d'une opération de disposer d'une force aéroterrestre agissant de
manière cohérente au sol et près du sol tout en assurant
la complémentarité nécessaire avec les autres
Armées.
Le combat interarmes répond parfaitement à
l'importante croissante de l'action dans des zones urbanisées qui rend
encore plus nécessaire la coordination des effets. Dans ce milieu
cloisonné aux espaces restreints, le succès ne peut se concevoir
sans une combinaison et une intégration temporaire des diverses
capacités. En cours de conflit, la diversité des situations et
l'évolution des conditions d'emploi de la force renforcent la
nécessité de l'action interarmes.
Longtemps limitée vers le bas au niveau des brigades puis
à celui des groupements tactiques, c'est-à-dire aux structures de
type bataillonnaire ou
de savoirs ne peut que s'inscrire dans la dynamique
d'instauration d'un nouvel essor sécuritaire sous-régional.
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régimentaire, l'action interarmes s'avère
maintenant nécessaire aux échelons subordonnés. Les
compagnies d'infanterie et les escadrons blindés doivent pouvoir former
l'ossature de sous groupements tactiques interarmes sur lesquels
s'agrègent les fonctions de contact ou d'appui nécessaires pour
une mission donnée. Par ailleurs, particulièrement en milieu
cloisonné, il s'avère souvent utile de constituer des
détachements interarmes de volume réduit, de la valeur d'une
section voire d'un groupe.
Enfin, en passant de l'intervention initiale ou sont
impliquées les fonctions opérationnelles optimisées dans
ce but, à une phase de stabilisation visant à établir les
conditions de la paix, les Forces terrestre voient leurs besoins capacitaires
évoluer par une forte croissance des fonctions de contrôle du
milieu de sécurité et de mobilité au dépend de
celle de destruction et d'agression. Cependant, si elles doivent pouvoir passer
au second plan, les armes de destruction doivent pouvoir être
immédiatement disponibles, car elles restent nécessaires pour
dissuader un adversaire ou le contraindre en cas de reprise des violences.
Aussi toutes les unités doivent être en mesure d'exécuter
des formes d'actions interarmes adaptées à la stabilisation puis
à la normalisation et posséder un socle commun de formation qui
renforce la capacité d'adaptation et de réversibilité des
Forces terrestre sur les théâtres d'opération.
b) MAITRISER
Faire face aux menaces commande de maîtriser la force, la
technologie et la violence
1- MAITRISER LA FORCE
a- UNE FORCE NECESSAIRE, UNE MAITRISE ESSENTIELLE
Dans un contexte de conflit asymétrique, l'usage de la
force demeure intimement lié aux objectifs politiques et militaires. Il
doit pouvoir être
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vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
ajusté à tout moment et être
adapté à la phase du conflit, à la violence qui y
règne et à l'environnement des troupes. En intervenant par la
force, les Forces terrestre doivent dominer les forces adverses en les
contraignant à cesser les attaques.
Mais la maîtrise de la force n'est pas de la
pusillanimité dans l'action. Engager une Force terrestre impose de
disposer des moyens suffisants pour atteindre l'objectif fixé.
Intervenir par la force par exemple la libération des otages, c'est
pouvoir supplanter l'adversaire par la supériorité tactique, la
qualité des acteurs, leur endurance, leur entraînement, leur
détermination, la performance des équipements et la
maîtrise de l'information comme de l'environnement.
b- S'ATTACHER LA POPULATION, ISOLER L'ADVERSAIRE ET
COMBATTRE L'ENNEMI
La population est le centre de gravité de la plupart
des opérations ou, au moins, un des points clé du succès.
Aussi, doit-elle toujours être au centre de la conception et de la
conduite des opérations. Il est essentiel de la dissocier de
l'adversaire, de la rallier pour le déterminer. De même en
coordination progressive avec elle, il est nécessaire de pouvoir
répondre rapidement qui ne demande bien souvent qu'à vivre
dignement et en sécurité suivant sa propre normalité.
Isoler l'adversaire tout autant que le vaincre et le
défaire au cour de la phase d'intervention ou des missions de combat en
phase de stabilisation, l'un des objectifs des unités terrestres est
d'amener la population à ne pas soutenir celui-ci, voire à le
rejeter. Résistant au piège de l'ennemi, à l'engrenage de
la violence qu'il cherche à alimenter, il faut convaincre la population
de leur succès en frappant l'adversaire avec détermination chaque
fois que nécessaire. Il faut aussi épargner à celle-ci les
souffrances du combat pour qu'elle trouve son intérêt dans leur
réussite et, ainsi, la pousser à prendre partie en leur
faveur.
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
Produire de la sécurité pour ceux qui, sur un
théâtre d'opération, vivent dans la crainte de la violence,
des exactions, des massacres parfois, des soldats qui veillent aux cons de la
rue, la patrouille qui sillonne la zone ou la section est installée dans
le poste dominant le quartier sont vus comme les garants de leur
sécurité. Plongé dans l'insécurité et le
malheur, les populations réclament l'ordre et la justice qui, pour elle,
se traduisent d'abord par la sécurité des biens et des personnes.
La sécurité des populations peut être une mission explicite
des troupes ou n'être qu'une conséquence de leur présence.
Aussi, s'agit-il pour les unités et en premier lieu pour le commandement
d'en évaluer correctement le besoin et de définir tout autant les
modes d'actions applicables que les limites de l'action. Tout échec,
même ponctuel, intrusion dans une enclave protégée,
agression d'un membre d'une minorité, attaque d'un village, tuerie, est
portée au débit de la force dans son ensemble et peut remettre en
cause la légitimité de sa mission.
Préoccupation majeure des populations, en particulier
après les combats initiaux de la phase d'intervention, la
sécurité est le plus grand défi qui se pose aux Forces
terrestre. Elle est la condition première de toute reconstruction
politique et socio-économique. En faite, au-delà d'une
sécurité des personnes, souhaitable mais toujours relatives et ne
relevant pas de la seule force militaire, la population a besoin d'un sentiment
général de la sécurité. Il relève de
l'action conjointe des Forces Armées et des Forces de Police (locale ou
internationale) tout autant que de celle des autorités
légitimes.
2- MAITRISER LA TECHNOLOGIE
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vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
a- LA TECHNOLOGIE, UN MULTIPLICATEUR
D'EFFICACITÉ
La technologie est un multiplicateur d'efficacité pour
les Forces terrestre et leur permet de conserver l'ascendance sur l'adversaire.
Elle procure les avantages les plus significatifs dans la lutte
dissymétrique et favorise la victoire militaire grâce au
surcroît de puissance et à la supériorité qu'elle
offre.
La maîtrise des technologies de l'information en est
l'aspect le plus fondamental et le plus prometteur. Elle permet
l'intégration de systèmes, la mise en réseau des moyens
d'acquisition, de traitement et d'agression et d'une capacité sans cesse
accrue dans le partage d'informations. La réduction significative des
délais de réaction et de frappe et de capacité d'emploi de
systèmes pouvant alors agir non plus de manière
séquentielle mais simultanée, permettant aux Forces terrestre de
bénéficier d'une intégration interarmées
croissante. Elle leur donne la faculté de réduire voire,
d'annihiler les capacités d'action des acteurs de
l'insécurité. L'usage des nouvelles technologies de l'information
optimise la manoeuvre et facilite la désagrégation des forces
adverses.
Au service de la protection, la technologie peut très
fortement réduire la vulnérabilité des troupes. Elle
renforce la performance des équipements de protection et des blindages
et assure, ainsi, une meilleure survie des individus et des équipages
d'engins ou d'aéronefs face à tous les types de menaces.
Cependant, le haut niveau technologique d'une Force terrestre
se traduit parfois par des problèmes d'interopérabilité au
sein de coalition dans lesquelles les alliés peuvent avoir des standards
différents. Ceci limite les capacités d'actions communes et les
contraint à se tenir en deçà des possibilités des
équipements des unités technologiquement les plus
avancées.
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à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
b- LA TECHNOLOGIE AU DÉFI DE
L'ASYMÉTRIE
La forme asymétrique des conflits actuellement
prépondérante et la place primordiale prise par les phases de
stabilisation ne permettent plus de mesurer la capacité des Forces
terrestre à la seule sophistication de leurs Armées.
Confrontée à la supériorité parfois
écrasante d'une Force militaire, l'adversaire bascule
généralement dans un combat d'une autre nature qui tend à
rendre vaine la suprématie technologique qui lui est opposée. Se
disséminant dans le milieu, refuse de tenir le terrain et de servir
d'objectif, il oppose l'absence de cibles aux capacités croissantes
d'acquisition et de traitement détenues par les Forces Armées et
contraint souvent celles-ci à demeurer en deçà du seuil
d'utilisation des équipements les plus performants. Il développe
la lutte dans d'autres domaines que ceux sur lesquels la Force terrestre
s'efforce d'agir. Aussi, sans renier les avantages incontestables qu'elles
apportent, doit-on, tout à la fois, bien mesurer l'apport de nouvelles
technologies, en orienter l'utilisation au service de la lutte dans le contexte
asymétrique.
L'adversaire potentiel et l'ennemi déclaré
bénéficient eux aussi, du progrès technique, y compris
dans le domaine militaire, dont la large diffusion modifie la physionomie de
certains engagements. La banalisation et la circulation d'armes modernes sur
tous les théâtres d'opération accentuent les menaces
directes ou indirectes sur les Forces engagées. De plus, à
l'image de la lutte permanente de la lance et du bouclier, ceux qui s'opposent
aux Forces militaires exploitent les technologies à l'usage civil qu'ils
parviennent à détourner à leur avantage.
Laissant, pour un temps, les forces sans parades, ils
réussissent à conquérir certaines formes de
suprématie locale et contraignent celles-ci à une adaptation
coûteuse et difficile comme l'illustre l'emploi de plus en plus
général des engins explosifs commandés à
distance.
Cependant, en fournissant des ripostes aux menaces nouvelles, le
progrès technologique permet aux Forces de lutter dans les mêmes
champs
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que l'adversaire et ainsi, de réduire
l'asymétrie. Le retour d'expérience renforce cette aptitude, il
s'appuie sur un cycle dont la maîtrise, la continuité et la
rapidité contribuent à développer une capacité
d'adaptation relative orientée sur la satisfaction des besoins
opérationnels des Forces terrestre et, en particulier des troupes qui
luttent sur le terrain. Parfois contradictoire avec des modes d'acquisition
d'armes et d'équipement fortement encadrés, cette capacité
est une nécessité pour conserver l'ascendant sur un adversaire en
évolution constante.
3- MAITRISER LE TEMPS : AGIR DANS L'URGENCE ET S'ENGAGER
DANS LA DURÉE
Indépendamment du temps de la décision
politique, celui de l'engagement est généralement marqué
par l'urgence, au moins pour une partie des forces. Celles-ci se fondent sur
des qualités acquises sur une longue période et maintenues par un
effort quotidien. La réactivité des Forces terrestres est la
première d'entre elles. Elle est une composante de la
réactivité générale interarmées avec
laquelle elle doit demeurer cohérente et reste étroitement
liée à celle des autres Armées. Un dispositif d'alerte sur
le territoire national, la présence d'unité à
proximité de régions en crise en sont les aspects essentiels.
L'anticipation permet à la réactivité des Forces
terrestres de trouver sa pleine expression. Elle doit se fonder sur une
capacité de planification « froide » et une organisation de
l'Armée de Terre qui permette d'engager une partie des forces sans
déstructurer l'ensemble.
Agissant dans l'urgence et usant de toute la puissance
disponible, l'Armée de Terre doit s'apprêter à y demeurer.
Elle doit donc posséder la capacité de faire évoluer le
volume et les équilibres capacitaires d'un contingent présent sur
un théâtre en fonction de la situation du moment.
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vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
4- MAITRISER LA VIOLENCE : UNE VIOLENCE MULTIFORME
DIRIGÉE CONTRE TOUS
En dehors de la phase des combats, la violence peut viser
directement les Forces terrestres ou prendre pour cible les autres acteurs du
conflit. Souvent atomisée et sporadique, sa rationalité est
parfois difficilement perceptible par les forces.
Fondée sur l'utilisation du terrorisme comme mode
d'action principal, la guérilla urbaine représente la
réponse la plus facile et la plus efficace, dont la plus probable, dans
le combat du faible contre le fort. C'est celle à laquelle les Forces
terrestres sont confrontées chaque fois qu'un ennemi s'oppose à
leur action. L'objectif de l'adversaire est de les défaire en pesant sur
la volonté du Cameroun faute de pouvoir en vaincre les forces.
L'opposition de la population, ou d'une partie de celle-ci,
peut être manipulée ou résulter d'incidents mettant en
cause les Forces engagées. Elle se manifeste alors par des obstructions
aux missions des Forces terrestres ou des explosions de haine et de violence de
foules plus ou moins nombreuses contre tout ce qui symbolise l'intervention
étrangère. Ces actions peuvent être spontanées. Plus
souvent, elles visent à décrédibiliser les forces ou les
pousser à l'erreur en cherchant à provoquer une réaction
démesurée pouvant être exploitée.
La lutte d'un groupe contre un autre sur des critères
ethniques, politiques ou religieux se traduit par des assassinats, des
attentats, des attaques contre la population, des massacres, des
enlèvements qui peuvent avoir lieu sur toute l'étendue du
théâtre d'opération. La barbarie caractérise nombre
de ces actions qui visent à faire le maximum de victimes. Leur
permanence et la difficulté de les prévenir présentent un
redoutable défi. Ici aussi, on peut chercher à atteindre la
crédibilité de la force ou la légitimité de sa
présence. On peut aussi vouloir peser sur la sortie de crise, mettre
à mal une évolution positive ou pousser certaines troupes
à l'exode. Le refus,
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l'ignorance pour certains, du droit de la guerre, du droit
dans la guerre, caractérisent l'usage habituelle d'une violence parfois
aggravée par le fanatisme et le déni des valeurs occidentales de
la part d'adversaires agissant en dehors de tout cadre étatique. Le
rejet absolu d'une telle logique et d'une grande vigilance en la matière
s'impose aux Forces.
c) S'ADAPTER FACE À L'ASYMÉTRIE
CROISSANTE
La lutte contre l'asymétrie ne peut se limiter
à éliminer les menaces dont l'évolution permanente
contrecarre l'efficacité d'un combat sans fin. Elle passe par une
compréhension de sa nature, un renseignement approprié et une
bonne gestion de l'information.
1- COMPRENDRE L'ASYMÉTRIE
Comprendre l'asymétrie, c'est d'abord comprendre les
acteurs du conflit et les conséquences de leur combat. Hostile à
la force, un ennemi peut se fixer comme but de lui faire échec et lutter
directement contre elle. Parfois, tel acteur n'agira qu'en fonction d'objectifs
ou d'intérêts qui sont propres sans considérer les Forces
militaires comme les objectifs de son combat. Certains privilégieront
les aspects politiques, des oppositions ethniques, les relations de foule, la
violence déclarée pour mettre les forces en difficulté.
Ils se situent souvent au confluent du politique et du militaire et, sans
hiérarchie formelle, font habituellement partie d'organisations
horizontales douées d'une grande capacité d'adaptation. Les
actions d'ordre technique, attentats, assassinats, prises d'otages, attaques
d'un village ou d'une unité, émeutes ou manifestations influent
directement sur le niveau stratégique. Face à cela, leurs armes
paraissent souvent peu adaptées et, si elles se retrouvent souvent dans
leur seuil d'utilité, il arrive aussi que le risque soit grand d'en
faire un usage inapproprié et contre-productif mis directement à
profit par l'adversaire dans sa démarche de « propagande par les
actes ».
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La lutte contre les menaces asymétriques suppose une
grande agilité des chefs et des systèmes de commandement dans la
planification comme dans la conduite. La faculté d'adaptation, la force
sur le théâtre, comme de l'Armée de Terre en
général est une des clés du succès, car
l'adversaire est un être vivant et réfléchi qui s'adapte.
Il s'agit de le devancer ou d'être condamné à n'agir qu'en
réaction.
Les unités terrestres doivent développer les
capacités d'innovation très rapide. Le rôle des petits
échelons, cellules de base, celles qui, confrontées
quotidiennement aux problèmes ne cessent d'imaginer des solutions les
plus appropriées, est primordial. L'initiative doit être
encouragée de manière à favoriser l'émergence des
parades aux menaces asymétriques. Cette action en provenance du terrain
doit être soutenue par un dispositif central qui, tout à la fois
discipline le foisonnement des idées, oriente le recueil des
expériences et offre la réactivité nécessaire pour
apporter des réponses immédiates quand l'urgence le commande.
2- LE RENSEIGNEMENT, COMPRENDRE TOUT AUTANT QUE
SAVOIR
La compréhension de l'adversaire et de l'environnement
impose de mettre l'accent sur le renseignement qui est, le plus que jamais, une
fonction essentielle de l'engagement opérationnel et une condition du
succès. Cependant, la recherche même du renseignement est complexe
quand il s'agit d'établir les conditions d'un retour à la paix,
de lutter contre des menaces asymétriques ou de rétablir la
confiance.
En passant de la symétrie à l'asymétrie
et au sein d'un même conflit d'une phase à une autre, les Forces
terrestre doivent passer d'un renseignement ou la recherche d'indices
matériels permet de déterminer les dispositifs et d'imaginer les
intensions à un renseignement plus subjectif ou l'analyse
systémique trouve sa place. Les équipements souvent
indécelables et confondus au milieu ne sont plus des signes suffisants
pour pénétrer les
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intentions de l'adversaire. C'est bien l'état d'esprit
et la volonté des autres qu'il s'agit de comprendre et la recherche d'un
tel renseignement est confrontée au choix des informations utiles. Elles
rencontrent, en outre, une difficulté particulière lorsqu'il
s'agit de comprendre un environnement foncièrement différent.
Cette caractéristique fait du problème de la langue un des plus
critiques pour le renseignement en phase de stabilisation, comme pour toutes
les opérations au contact du milieu.
La technologie revêt dans le renseignement une part
fondamentale, les moyens techniques qui sont consacrés à la
recherche permettent de développer les instruments d'analyse et de
synthèse nécessaire et accroissent la capacité des forces
à lutter contre les formes variées de menaces. Mais les outils
techniques permettent surtout de savoir là ou il s'agit désormais
principalement de comprendre. La recherche humaine doit disposer de
spécialistes qui, à une solide formation militaire, adjoignent
des connaissances approfondies du théâtre, des
sociétés et des cultures des groupes qui s'affrontent, de tout ce
qui permet au chef de comprendre, de « sentir ».
En outre, par nature, les conflits asymétriques
s'aventurent dans des domaines non militaires qu'il s'agit pourtant
d'appréhender dans le cadre de l'opération et de la manoeuvre en
cours ou en préparation. La recherche du renseignement s'y appuie sur
d'autres acteurs, sur d'autres réseaux, sur d'autres ministères.
Elle participe aussi, à une lutte élargie, les informations
recueillies alimentant d'autres bases que celle de la force engagée.
Le renseignement n'est pas seulement nécessaire aux
phases d'affrontement armé. Il appuie la manoeuvre dans toutes ses
dimensions parmi la population. La recherche du renseignement doit permettre au
chef de confronter les modes d'action, d'anticiper les fronts, d'identifier les
difficultés quand il lui faut de soutenir un processus électoral,
désarmer les combattants, aider à la liberté de
circulation...
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
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3- COMBATTRE PAR L'IMAGE
La lutte pour l'information est un impératif constant
qui se pose aux Forces terrestres avec d'autant plus d'acuité dans un
conflit asymétrique qu'une part des actions adverses reposent
elles-mêmes sur l'exploitation des moyens d'information et la
manipulation des actions publiques. Ce qui est cru est plus important que ce
qui est vrai. Les emballements et les distorsions médiatiques peuvent
influencer les décisions opérationnelles et agir sur le cours des
choses en contradiction avec l'action des troupes sur le terrain. Par exemple,
bien souvent, les agressions de jeunes gens armés de leur seule fronde
contre des soldats lourdement équipés n'ont pour but de
présenter au monde une lutte inégale et de données
à croire que leur combat est juste, puisqu'il est celui de
l'opprimé, celui de David contre Goliath.
Le combat par l'image est caractéristique de la lutte
asymétrique. Aussi doit-il être celui des Forces terrestres tout
autant que celui de leurs adversaires. Lutter contre une information partiale
et biaisée, présenter sa propre vision, diffuser son propre film
des évènements qui occupent la « une » du moment sont
nécessaires au succès. Ils peuvent aussi parfois éviter
que des réussites tactiques ne se transforment en échec
stratégique. Les Forces terrestres doivent être aptes à
conduire des manoeuvres offensives tout autant que défensives dans le
domaine de l'information et de la communication.
II- LES RELATIONS CIVILO-MILITAIRES
La question des relations entre « civiles et militaires
» n'est pas récente. Pourtant, elle se trouve posée de
manière radicalement nouvelle depuis la fin de la guerre froide, et plus
peut-être depuis les attentats du 11 Septembre 2001. Suivant en cela les
mutations de la scène internationale, le rapport entre civile et
militaire se révèle beaucoup plus complexe que ne le laisse
accroire un chemin binaire tenant le civil et le militaire comme deux
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champs totalement hermétiques l'un à l'autre.
Qu'on le déplore ou que l'on s'en réjouisse, ce schéma ne
résiste pas à une rigoureuse analyse des conditions pratiques et
symboliques dans lesquelles ces acteurs sont amenés à agir.
La relation civilo-militaire se définit, en effet au
contact des nouvelles réalités internationales comme celle qui se
caractérise à la fois par l'irruption de nouveaux acteurs dans le
champ international (Organisations Internationales, Organisations Non
Gouvernementales, acteurs économiques, Mafias etc.) et par de nouvelles
formes de conflictualités.
L'enjeu majeur d'une telle hypothèse « civil et
militaire », ne se réduit pas, dès lors, à sa
dimension normative, c'est-à-dire à une interrogation sur la
nécessité ou non de développer des relations entre ces
différents acteurs. Cette question garde bien évidemment toute sa
légitimité, et ce d'autant plus qu'elle se repose à chaque
fois de manière singulière pour les acteurs impliqués dans
la sécurité. Il s'agira également d'interroger la nature
des relations et les dispositifs qui se développent en pratique sur le
terrain entre les différents acteurs partis à des interventions
dont l'objectif vise la sécurité, la paix sociale,
préalable du développement.
1) LA NECESSITÉ DE LA RELATION
CIVILO-MILITAIRE
Lors des guerres conventionnelles ou les Forces de
Défense avaient comme belligérants une Armée clairement
identifiée, les civiles ne faisaient pas partir de l'effort de guerre.
Au service d'un gouvernement défensif ou offensif, la question de la
relation civilo-militaire pouvait sembler négligeable dans l'atteinte
des objectifs de l'Etat. Mais depuis le 11 Septembre 2001, le monde fait face
à une nouvelle dynamique mettant à mal la souveraineté des
Etats. Il s'agit de « l'ennemi inconnu » qui ne se fait remarquer que
par l'ampleur de ses dégâts. Du fait de son habilité
à fondre dans la nature parmi les populations, il opère dans
l'ombre sous l'impuissance des Forces de Défense à l'attente d'un
ennemi. Les attentats
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du World Trade Center constituent une parfaite illustration
de l'habilité des Forces dites « transverses » et de
l'impuissance de l'hyperpuissance américaine face aux « soldats
civils ». Cela va sans dire que les redoutables Marins américaines
du haut de leurs armements up to day n'ont pas pu détecter les
artisans du réseau Al-Qaïda jusqu'au jour fatidique. Pourtant, il
existe aux Etats-Unis d'Amérique (USA) un important service secret
assuré par le Fédéral Bureau Investigations (FBI) qui
d'après des sources sures, avait eu vent de la préparation d'un
attentat savamment orchestré pendant des années sur leur
territoire. Mais n'étant pas en étroite collaboration avec le
Pentagone, leur information n'a pas fait tache d'huile, car devant au
préalable être vérifiée et approuvée par
d'autres instances avant qu'elle ne parvienne à la haute
hiérarchie militaire et politique seule habilitée à
prendre des décisions.
Il apparaît ici que l'absence d'une véritable
relation civilo-militaire a coûté cher aux USA car, la multitude
d'instances entre les acteurs civils et le commandement militaire n'a pas
été au service de la spontanéité requise face
à cette nébuleuse. Or, une symbiose entre les deux parties l'une,
apportant des informations, l'autre, puissance agissante aurait permis
d'étouffer le mal dans l'oeuf. A l'épreuve des faits, la nature
des soldats civils (Al-Qaida, le Groupe Salafiste pour la Prédication et
le Combat (GSPC), les Groupes Islamistes Armés (GIA), les coupeurs de
route, le MEND, les Bakassi Freedom Figthers...) responsable des nouvelles
formes de menaces impose comme mesure stratégique une relation
civilo-militaire, les civils à même détecter l'ennemi qui
se frotte à eux en toute sécurité à la quête
des zones d'affluence, les militaires capables d'annihiler tout foyer
d'insécurité. Tout gage de sécurité passe par la
mise à contribution de cette relation à trait d'union. Il est
question pour les instances politiques de sensibiliser et d'informer la «
partie civile » de la nouvelle réalité internationale
porteuse de nouvelles menaces avec pour cible privilégiée les
populations, de la relative capacité de la « partie militaire
» à assurer leur
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à la sécurité : d'une Armée « de garde »
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sécurité sans leur véritable
participation. Ces derniers peuvent alors coopérer au sein des
institutions à l'instar du département de la
sécurité intérieure américain employant 180.000
fonctionnaires parmi lesquels les militaires, les policiers et des simples
citoyens85 ; des agences de renseignement comme le FBI ou cohabitent
les unités civiles et militaires au service de la sécurité
américaine ; des bureaux d'enquêtes et de renseignements comme
Interpol...
2) LA NATURE DE LA RELATION CIVILO-MILITAIRE
Parlant des relations civilo-militaires, il peut s'agir des
relations institutionnelles ou inter-institutionnelles et des relations de
partenariat ou de collaboration.
a) LES RELATIONS INSTITUTIONNELLES OU
INTERINSTITUTIONNELLES CIVILO-MILITAIRES.
On peut entendre par relation institutionnelle
civilo-militaire, cette affinité que peuvent entretenir les civils et
militaires au sein d'une institution étatique régionale,
nationale ou internationale ou affinité entre deux institutions, une
civile et l'autre, militaire. Il s'agit des relations que militaires, policiers
et individus peuvent entretenir au sein d'un ministère à l'instar
de celui de la sécurité intérieure chargée des
missions de sécurité et de défense. La mission de
sécurité préventive assurée par les Forces civiles,
n'étant pas à la hauteur de la menace, il faut
impérativement associer l'action réservée aux Forces
régulières d'où la coopération
sécurité-défense qui s'impose et se retrouve aujourd'hui
comme option de rehaussement de l'effort de défense des Nations unies,
des Organisations régionales et des
85
http://fr.wikipedia.org/wiki/guerre
contre le terrorisme_cite-note-0-cite-note-0 Thèse de
Doctorat/Ph.D en Sce Po, UY2, 2011 Ernest Claude MESSINGA 326
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Etats. Chaque organisation, chaque Etat développe
effectivement ses propres mécanismes permettant se régler les
relations sécurité-défense.86
S'agissant des relations inter-institutionnelles, allusion
est faite à la coopération entre deux institutions l'une, civile,
l'autre, militaire. Tel est le cas aux USA par exemple, ou l'accent à
été particulièrement porté ces dernières
années sur la coopération croissante et l'intégration des
relations inter agences entre le département d'Etat, les Commandements
militaires dépendant du Pentagone et les agences d'aide à la
coopération : c'est la coopération inter-institutionnelle ; au
Royaume Uni, ou ce mouvement est également largement amorcé ; au
Canada, ou l'approche 3 D (Diplomatie, Défense, Développement)
vise définir les relations des différents ministères en
les encrant dans la coopération toujours plus étroite. En France
aujourd'hui, la Direction de la Coopération de Sécurité et
de Défense (DCSD) est une composante incontournable de l'action
diplomatique de la France. Sa naissance le 16 Mars 2009 traduit la
volonté énoncée dans le Livre Blanc Affaires
Etrangères et celui de Sécurité et Défense d'un
traitement global de ces problématiques. Composée de Diplomates,
de militaires et de Policiers, la DCSD travaille en étroite
concentration avec le Ministère de la Défense et celui de
l'Intérieur. Elle propose une coopération structurelle,
complémentaire d'une coopération opérationnelle
menée par l'Etat-Major des Armées, les différentes armes
et la Gendarmerie d'une part, et par le Service de Coopération Technique
Internationale de Police (SCTIP) d'autre part.87
b) LES RELATIONS DE COLLABORATION
CIVILO-MILITAIRE
Il s'agit ici des relations pouvant exister entre le
Ministère de la Défense et un centre de recherche technologique
civil ou un centre d'études politiques et stratégiques par
exemple. Les centres de recherche peuvent de
86
http://www.operationspaix.net/-Relations-civiles-militaires-
87
http://www.operationspaix.net/-Relations-civiles-militaires-
Thèse de Doctorat/Ph.D en Sce Po, UY2, 2011
Ernest Claude MESSINGA 327
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vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
par leurs avoirs scientifiques participer à l'effort
de défense nécessitant aujourd'hui les ferveurs de tous les
citoyens. C'est d'ailleurs ce que traduit en 2006 Mme Michèle
Alliot-Marie, Ministre français de la Défense lorsqu'elle
souhaite un dépassement des frontières entre militaire et
civil pour mutualiser expériences et savoir-faire.
Elle souligne que le ministère de la défense
s'intéresse, autant aux questions militaires, à la santé,
la recherche, l'industrie ou les nouvelles technologies gage du
développement et de la maîtrise des technologies de pointe
nécessaires à la sécurité de demain. Elle va ainsi
se charger d'appuyer les recherches civiles et militaires, qui sont de plus en
plus imbriquées.88 C'est une attitude fort louable car, nous
devons dès aujourd'hui évaluer précisément les
besoins, mettre en place des structures, développer les outils, les
équipements et les technologies qui nous permettront de faire face aux
risques de demain.
Il existe une communauté technologique
avérée entre les missions de sécurité et celles de
défense. De nombreux programmes de recherche menés aujourd'hui
par la Défense contribuent donc à la sécurité.
Depuis longtemps, les recherches initialisées par la défense pour
répondre à ses besoins ont de nombreuses retombées dans le
domaine civil. Elles profitent aux principaux secteurs de l'industrie nationale
: l'énergie, l'aéronautique et spatial, l'automobile, les
communications, la sécurité.
· Les domaines « duaux » de
coopération sont aujourd'hui de plus en plus nombreux :
- biotechnologies et technologies pour la santé,
- micro- et nano-technologies,
- technologies de l'information et de la communication,
- technologies spatiales,
- robotique,
88
http://www.defense.gouv.fr/sites/defense/decouverte/leministère/ministre_de_la.defense
/declarartion/2006/mars/minatec-grenoble le_24_mars_2006
Thèse de Doctorat/Ph.D en Sce Po, UY2, 2011
Ernest Claude MESSINGA 328
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
- aéronautique et propulsion, etc.89
Face à cette imbrication croissante des technologies
civiles et de celles de la défense, face aussi au coût des
programmes, nous ne pouvons plus nous permettre les duplications,
déclare le Ministre de la défense français qui souhaite
que la Défense s'ouvre le plus possible vers la recherche civile. A
l'image des pôles de compétitivité, cette ambition doit
mobiliser tous les acteurs, qu'ils soient militaires ou civils, publics ou
privés. C'est ainsi que nous viendrons à bout des nouvelles
formes de menaces
3) L'ÉTAT DES RELATIONS CIVILO-MILITAIRES AU
CAMEROUN.
Pour le gouvernement camerounais, la réponse à
la crise de sécurité passe par la relation civilo-militaire, ce
que révèle à bien des égards le thème de la
37ème Fête de l'Unité le 20 Mai 2009 à
savoir « Forces de Défense et Nation, ensemble pour la
consolidation de la paix sociale et du développement ».
La relation civilo-militaire loin d'être à son
zénith au Cameroun fait son bonhomme de chemin à travers la
sécurité des frontières, le maintien de l'ordre public, la
lutte contre le grand banditisme et la contrebande, la sécurité
des hommes et de leurs biens, constituant les missions des Forces de
Défense et de Sécurité plus ou moins en collaboration avec
la société civile. Elle s'illustre par ailleurs dans la
réalisation d'importants projets de développement tels la
construction des routes et autres édifices par le Génie
Militaire, ainsi que des oeuvres sociales tels que la santé
(hôpitaux militaires), l'éducation (les écoles militaires).
Un vaste programme qui ne peut être réalisé que s'il existe
une véritable synergie dans l'action entre Forces de Défense et
la Nation.
89 Op cit
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
Partant de la Gendarmerie Nationale à la
Sûreté Nationale en passant par le corps national des sapeurs
pompiers et l'Administration des Douanes, la mission principale se trouve
être la sécurisation, la protection des biens, préalable de
tout développement.
Dans l'Administration des Douanes par exemple, on retrouve
deux corps depuis 1975 : un corps actif (en uniforme) et un corps
sédentaire (civil) ayant une mission unique à savoir la
sécurisation des intérêts de l'Etat, le recouvrement des
droits et taxes de douane et la protection des industries camerounaises.
La Gendarmerie Nationale également s'illustre par sa
double mission de sécurité et de Défense à savoir :
la protection des personnes et des biens avec l'épineux
phénomène des coupeurs de route qui tend à se nationaliser
; le maintien de l'ordre à visage humain face à la
résurgence des manifestations de rue ; la sécurisation des
frontières et notamment la façade maritime avec le montée
du phénomène des preneurs d'otages sur les eaux territoriales ;
concourt à la défense nationale en liaison avec les Forces
spécialisées relevant du Ministère de la Défense
(Armée de Terre, de l'Air et la Marine Nationale) en temps de paix comme
en temps de guerre ; remplies les missions de police judiciaire, de police
administrative ; la sécurité des hommes et des biens face aux
assaillants et pirates qui ont pignon sur mer. Forces de protection,
d'assistance et de secours des populations par excellence, les hommes et femmes
qui servent sous le béret rouge sont au service de tous avec la
nécessaire collaboration des populations de par leurs renseignements :
c'est une Gendarmerie de proximité gage de la maîtrise du
renseignement et de l'action.
La Sûreté Nationale en tant que composante
à part entière des Forces de sécurité se trouve
être également une force régulière au même
titre que l'Armée et la Gendarmerie Nationale avec bien entendu des
missions spécifiques. Et conformément aux dispositions des
articles 3 et 4 du décret N°2002/2003 du 04 Janvier 2002 portant
organisation de la Délégation
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Générale à la Sûreté
Nationale, ce corps d'élite a pour mission fondamentale d'assurer le
respect et la protection des institutions, des libertés publiques, des
personnes et des biens. En outre, elle assure le respect de l'exécution
des lois et règlements, concourt à l'exécution de la
police administrative et de la police judiciaire ainsi qu'à la
défense nationale, c'est-à-dire qu'elle peut intervenir aux
cotés des autres Forces régulières lorsque les
circonstances l'exigent, et dans les domaines des compétences qui sont
les siennes.
Enfin la dernière née en 1998 des Forces de
Défense camerounaise le Bataillon d'Intervention Rapide (BIR) assurant
les missions de sécurité et de défense. En effet, en
dehors des missions générales dévolues à
l'Armée de Terre, le BIR est chargé de la lutte contre le grand
banditisme, de mener des actions de contre-guerilla, la lutte antiterroriste,
la libération des otages, mener des actions commandos.
Mais, la relation civilo-militaire reste plombée par
l'exclusion larvée des civils tenus à distance par la
confidentialité des informations relatives à leur
sécurité, justifiée par le « secret
défense ». Cet état de chose n'est pas de nature
à favoriser l'implication quasi indispensable des populations dans la
recherche des renseignements, gage de l'efficacité des hommes en armes
face à la défiance et à la disparité des «
architectes » de l'insécurité.
De ce précède, l'état des relations
civilo-militaire au Cameroun pourrait être amélioré par la
création d'un Ministère de la Sécurité
Intérieure ou vont collaborer militaires, gendarmes, policiers et
civiles et par la promotion de la collaboration institutionnelle
Ministère de la Défense et Universités via les centres de
recherches en d'études stratégiques ; l'implication d'une franche
de la jeunesse camerounaise en l'occurrence les jeunes bacheliers dans le
système homme après l'offre de la Formation Commune de Base (FCB)
à tous. Une telle collaboration franche sera de nature à
renforcer et solidifier la relation civilo-militaire sans toutefois
aliéner le secret défense.
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
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III- L'ÉCONOMIE DE DEFENSE ET DE
SÉCURITÉ
Les menaces actuelles exigent une réponse forte,
globale et surtout durable. Une réponse efficace passe par des Forces
bien équipées. Cela suppose du matériel moderne, mais
aussi une véritable politique industrielle et de recherche. Pour
traduire cela en réalité, il faut mobiliser d'énormes
moyens financiers, ce qui implique une économie de défense. Elle
peut être définie comme l'ensemble des moyens investis par un
gouvernement pour assurer sa politique de défense. Il s'agit des budgets
d'ensemble, des industries militaires sans lesquelles il n'y a ni
défense, ni sécurité remplissant leur mission, celle d'une
assurance au profit des citoyens. C'est ainsi que tout Etat, pour faire face au
défit de l'heure se doit d'élaborer une économie de
défense à l'instar de celle de la France élaborée
et publiée chaque année par le Conseil économique de la
défense. Pour les éditions 2005 et 2006, plusieurs
améliorations de méthode et développements sont à
chercher, et en particulier :
· Les analyses concernant l'équipement
opérationnel des Forces en distinguant les budgets d'acquisition des
matériels et systèmes et les budgets de maintien en condition
opérationnel ;
· L'analyse des industries concourant à
l'économie de la défense autour de quelques grands secteurs,
c'est-à-dire à coté des groupes systémiers, le
domaine de la propulsion, les industries spatiales, les industries navales et
les industries terrestres, et si possible (en 2006), les secteurs « non
partie » à la production de l'armement mais, concourant à la
technologie et l'économie de la défense et de la
sécurité90.
90 http ://
www.defense.
gouv.fr/ced/layout/set/print/content/view/full/100875
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
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vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
Il demeure utile et important de progresser dans
l'élaboration d'un chiffre objectif crédible et convainquant de
budgets pour l'ensemble des économies de la défense prenant en
compte la politique de défense, l'état de leurs moyens, leurs
objectifs. De ce fait, les Etats africains soucieux de moderniser leurs Forces
de Défense se doivent de bâtir une économie de
défense et sécurité reposant sur la disponibilité
des budgets et la création des industries de défense.
1) LA DISPONIBILITÉ DES BUDGETS DE
DÉFENSE.
L'inopération des Forces de Défense est pour la
plus part des cas souvent due à l'indisponibilité du budget de
défense consécutive soit aux lenteurs administratives, soit au
manque de financement. Il s'agit donc de mettre en oeuvre des réformes
budgétaires, des financements innovants et l'efficacité
économique et opérationnelle des dépenses de
défense. Pour ce fait, une question s'impose : comment mettre en oeuvre
les réformes budgétaires en améliorant l'efficacité
économique et opérationnelle des dépenses de
défense ?
Dans la plupart des pays conscients de l'importance de la
défense, les ministères de la défense constituent les
premiers investisseurs et acheteurs publics. Ils présentent une
spécificité au sein de l'Etat, se traduisant par un format
défini d'Armée et une planification des équipements
militaires. Face à des dépenses publiques déjà
difficiles à rationaliser, la réussite des réformes
budgétaires est un objectif important pour la défense, qui
consent des efforts significatifs pour la mener à bien. Ces
réformes concernent les administrations d'Etat dans leur ensemble. Elles
visent à améliorer la gestion des actifs publics et à
faciliter la décision publique en l'appuyant sur des données
comptables fiables et comparables avec celles du secteur marchand. Elles
marquent le passage d'une logique budgétaire de caisse à une
approche économique et patrimoniale (valorisation des actifs). Elles
introduisent une responsabilisation accrue des
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gestionnaires. Ces nouveaux instruments devraient contribuer
à l'efficacité des dépenses et à la
réactivité de l'outil de Défense91. La
réforme du cadre comptable et financier doit aussi permettre de
renforcer l'efficacité à long terme des dépenses de
défense, en les inscrivant dans une optique pluriannuelle. La
connaissance du coût des politiques publiques doit s'accompagner d'une
évaluation de leurs conséquences financières à long
terme. En recourant à des comparaisons internationales, l'on pourra
dresser un bilan des processus les plus avancés et proposer des
évolutions dans le cadre des réformes en cours. Les
réformes entreprises aux USA, en France, au Royaume-Uni et dans d'autres
pays de l'Union européenne suscitent des questions quant à
l'architecture budgétaire la mieux adaptée et les pratiques les
plus efficaces, qu'il s'agisse de la planification des budgets, du
contrôle des dépenses ou de la mesure de la performance.
Pour la France, la nouvelle constitution financière,
définie par la Loi organique relative aux lois de finances (Lolf) vient
d'être mise en place. Son architecture a fait l'objet d'un dialogue
approfondi entre le Parlement, le ministère des Finances et le
ministère de la Défense. Le projet de loi de finances 2006 a
inauguré cette nouvelle structure, dont la pertinence a
été éprouvée en fonction de l'exécution
budgétaire et vis-à-vis des objectifs des missions et programmes
de la Défense.
a) LA REFORME BUDGETAIRE EN FRANCE
Peu de parlementaires ont réalisé les
conséquences du vote de l'article 7 de la Lolf (définition et
principes des missions et des programmes) sur l'organisation des
ministères. Le pilotage par objectifs constitue une réelle
nouveauté, qu'aucun pays n'a expérimenté à ce jour.
Entre 2001 et 2005, le Parlement s'est concentré sur les indicateurs de
performance, qui paraissaient être au coeur de la réforme.
Parallèlement, les
91Conseil économique de la Défense
français, L'ÉCONOMIE DE LA DÉFENSE 2006
Thèse de Doctorat/Ph.D en Sce Po, UY2, 2011 Ernest
Claude MESSINGA 334
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
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ministères ont décliné leurs programmes
en Budgets Opérationnels de Programme (BOP), une subdivision qui
n'était pas prévue et définie dans la loi organique. Le
Parlement a découvert tardivement ces budgets opérationnels de
programme, dont le nombre et la taille variaient considérablement d'un
ministère à l'autre. La mise en oeuvre de la Lolf à la
défense a du prendre en compte les spécificités propres
à ce ministère :
· Il s'agit, et de loin, du premier budget
d'investissement de l'Etat, les autres ministères investisseurs
(Equipement et Education nationale par exemple) ayant vu leurs crédits
transférés aux collectivités territoriales ;
· Hiérarchie militaire et hiérarchie
budgétaire doivent coïncider, pour des raisons évidentes de
cohérence ;
· L'existence d'un outil particulier, la loi de
programmation militaire (Lpm)92.
L'année précédente a été
consacrée à la mise en place d'une architecture
budgétaire, cette année a été marquée par la
mise en oeuvre de l'exécution budgétaire. A l'origine, le
Parlement avait recherché une interarmisation étendue. Cette
logique achoppait sur les difficultés organisationnelles et pouvait
à terme opacifier le contrôle parlementaire. L'architecture
budgétaire retenue, fondée sur une analyse fonctionnelle, a
cherché à limiter les recoupements. Elle repose sur la notion de
mission (35 pour l'ensemble de l'Etat) qui constitue l'unité de vote. La
mission se décline en programmes, qui constituent l'unité de
spécialité budgétaire. La définition des programmes
a fait l'objet d'intenses discussions entre ce qu'il était convenu
d'appeler « l'approche bleue » et « l'approche blanche ».
Ces deux termes faisaient allusion à la couleur des documents
budgétaires : l'approche bleue, couleur des projets de lois de finance,
consistait à reprendre l'organisation existante, avec notamment un
programme par Armée. L'approche blanche (couleur des anciens budgets de
programme)
92Op cit.
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
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visait au contraire à réorganiser la structure
du ministère autour des objectifs. Par la suite, un débat s'est
fait jour sur le découpage des programmes. Le cas le plus frappant
étant celui du programme «gendarmerie», inclus dans une
mission interministérielle «sécurité
intérieure». Initialement conservés au sein de la mission
« Défense », les crédits d'infrastructure et
d'informatique de la gendarmerie ont fini par rejoindre la mission «
sécurité intérieure ».93 Le
découpage actuel des programmes ne devrait pas évoluer. Le
ministère de la Défense est partie prenante dans quatre missions,
deux à caractère interministériel et deux à
caractère ministériel. Les missions Sécurité
(partagée avec le ministère de l'intérieur) et Recherche
duale (partagée avec le Ministère de la recherche)
relèvent de la première catégorie. Parmi les deux missions
à caractère ministériel, la mission Défense
représente près de 80% des crédits de la Défense,
aux cotés d'une mission «renforcement des liens entre la nation et
son Armée».94
Dans le cas du chef d'état-major des Armées,
elles passent par des contrats opérationnels avec les Armées,
exprimés en termes de performances. Le programme «
équipement des Forces » est soumis aux mêmes règles
que les autres en dépit de ses particularités. On pouvait
attendre de la Lolf qu'elle améliore l'efficacité
économique de la conduite des programmes, or rien n'a été
prévu. On aurait pu, par exemple considérer que les
investissements publics, civils et militaires devaient être
financés par l'emprunt public. Cette solution aurait pu résoudre
le problème des financements innovants. La crainte de l'endettement
hors-bilan a conduit dans un premier temps à comptabiliser en
autorisations d'engagement l'ensemble des flux des partenariats
public-privé. L'application d'une telle règle aurait
condamné le nouveau mode de commande publique récemment
lancé, le contrat de partenariat. Aussi la Lolf a été
modifiée afin que seuls
93 Idem.
94 Ibi dem
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
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les coûts d'investissement et de financement d'un tel
contrat soient comptabilisés, le fonctionnement étant pris en
compte sur une base annuelle, au fur et à mesure.
L'autre problématique propre à
l'équipement des Forces est celle des reports de crédit. Ces
derniers sont limités à 3% des crédits initiaux du
même titre du programme concerné. Cette règle est
facilement applicable aux dépenses de fonctionnement, mais difficile
à respecter lorsqu'il s'agit d'investissement. Il faut en effet prendre
en compte l'héritage de la précédente loi de programmation
militaire, la fameuse «bosse des programmes», dont les reports de
crédits s'ajoutent à l'actuelle programmation. Le vote de la loi
de finances rectificative permet de rétablir les crédits, mais
dans les faits, il survient trop tard pour que ces derniers puissent être
consommés. Un article dérogatoire a été voté
pour la Défense, l'affranchissant du respect du plafond des 3% sur ses
crédits d'équipement..
En conclusion, le ministère de la Défense a
réalisé un travail considérable d'adaptation, même
si certains aspects, comme les indicateurs de performance, restent à
finaliser. Cet effort doit se poursuivre par le franchissement d'une
étape encore plus complexe, la mise en place d'une comptabilité
analytique. Il ne faut également pas perdre de vue le rôle de la
Lolf dans la modernisation du ministère, qui permet d'associer les
instruments budgétaires et financiers. Cette dernière repose sur
trois axes : la clarification des responsabilités, l'interarmisation et
le recentrage des fonctions militaires.
La pluriannualité reste une problématique
particulière à la Défense : elle est nécessaire non
seulement pour assurer l'équipement des Forces, mais aussi dans le cadre
des réformes de structure. Elle inscrit dans le temps une
stratégie. Cette prise en compte du long terme peut se heurter aux
limites des instruments existants. La Lpm, et les lois de programmation et
d'orientation (sécurité intérieure, Justice,
hôpitaux...) posent une question de cohérence budgétaire
d'ensemble. Il existe pourtant un programme de
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stabilité, qui doit tracer des perspectives sur
l'évolution des finances publiques et pourrait constituer cet instrument
de cohérence.
b) LA RÉFORME BUDGETAIRE AU MINISTERE DE LA
DÉFENSE BRITANNIQUE
La décision officielle d'introduire la réforme
budgétaire a été prise en 1995. Elle impliquait notamment
la mise en place d'une comptabilité patrimoniale. Les premiers comptes
ont été produits en 1998-1999, les comptes des années
précédentes ont été audités par la cour des
comptes britanniques (National Audit Office - Nao). Les comptes 2003-2004 ont
été les premiers certifiés sans réserve par le Nao.
La mise en place de la construction budgétaire patrimoniale s'est
effectuée en deux temps. A partir de 2001-2002, elle a porté sur
les seules charges encaissées et décaissées. C'est
à partir de 2003-2004 que l'ensemble des dépenses a
été concerné. Enfin, l'introduction des pratiques du
secteur privé (partenariats public privé, commercialisation des
innovations financées par la Défense, etc.) devrait permettre de
généraliser la mesure de l'efficacité.
Par comparaison avec la réforme budgétaire
française, le Resource Accounting and Budgeting donne au
ministère britannique de la Défense une visibilité
financière accrue, avec une disponibilité des crédits sur
trois années glissantes. Ce système n'est pas incompatible avec
les objectifs de maîtrise des finances publiques du Trésor.
c) LE BUDGET DE LA DÉFENSE DES
ÉTATS-UNIS
La situation américaine est particulière compte
tenu du rôle du Congrès, dont les pouvoirs de contrôle,
d'enquête et de décision sont plus importants que les parlements
européens. Il s'appuie à cette fin sur des organismes qui lui
sont rattachés, comme le congressional budget office, chargé
d'évaluer l'impact budgétaire des propositions de loi et surtout
le government accountability office, une cour des comptes doté de
4000
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agents. De plus, l'Etat américain s'est doté
depuis le milieu des années 1960 d'outils d'évaluation des
politiques publiques. Le planning, programming and budgeting system mis en
oeuvre à cette période a été conçu par la
Rand Corporation, et appliqué pour la première fois dans le
domaine de la Défense.
d) RECOMMANDATIONS GÉNÉRALES
Au regard de ce qui précède, les gouvernements
africains en général, et camerounais en particulier enclin aux
problèmes de disponibilité des budgets et de financement
militaire doivent se mettre à l'école soit française, soit
anglo-saxonne conformément à leur environnement sociopolitique,
car un effort financier s'impose pour la sécurité nationale.
Malgré la situation très difficile des finances publiques due
à la crise économique et financière non sans
conséquence en matière de Sécurité et de
Défense, les ressources de la défense devront être
autorisées à déroger aux disciplines d'ensemble
imposées aux dépenses de l'Etat, à savoir la non
compensation de l'inflation pour les dépenses hors charge de la dette et
des pensions ; les ressources annuellement disponibles pour l'équipement
devront nettement être majorées. Bref, les dépenses de la
Défense devrait être la priorité des gouvernements à
l'image de la France qui avait prévu une masse de 377 milliards d'euros
comme fonds publics affectés à la mission de Défense
durant les douze années à venir à partir de
200895, financée par les industries de défense
nationales.
2) LA CRÉATION DES INDUSTRIES DE
DÉFENSE.
A l'observation du paysage industriel de Défense,
s'impose les EtatsUnis avec prés de 50%, suivi de la France, des
puissances économiques montantes (Chine et Inde), ou établies
(Russie, Afrique du Sud, Israël), ou
95 Ministère de la Défense
français, le livre blanc de la Défense.
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en (re)devenir (Japon), mais aucun de ces pays ne
considère sa position de puissance comme compatible avec une absence
d'effort de défense et un désintérêt pour
l'économie de la défense à fortiori les Etats africains.
De ce qui précède, l'Afrique n'est représentée ici
que par l'Afrique du Sud, ce qui est synonyme d'une forte dépendance de
l'Afrique des complexes industriels des armements Occidentaux source
d'importants financements. Les Armées ayant besoin des
équipements pour remplir leur mission première, celle d'assurer
la sécurité des citoyens, il faut pouvoir monter des industries
d'armement qui leur permettront d'anticiper sur les défis de demain, et
de rompre avec l'attentisme. Pourtant, l'autonomie est indispensable et devrait
être l'objectif de tout Etat en ce qui concerne l'économie de la
défense. La réalisation de cet objectif passe par le
développement de la recherche. Par ces efforts de recherche et de
développement, la Défense veille à la pertinence et
à l'efficacité des futurs équipements des Forces
Armées. Mener une politique industrielle de Défense, c'est bien
sûr, avant tout, assurer la protection du territoire et de la population,
c'est aussi mener une politique économique dont les répercussions
dépassent les frontières et le seul domaine de la Défense.
C'est d'ailleurs par ces industries de défense que les puissances
perpétuent leur domination sur le reste du monde de part leur fort
potentiel de production. Tel est le cas des USA, de la France avec MINALOGIC
qui regroupe des entreprises stratégiques pour la Défense. Les
entreprises SOFRADIR et ULIS développent, avec le CEA, la plupart des
détecteurs infrarouge qui sont ou seront utilisés dans les
systèmes militaires français. D'autres entreprises comme Atmel,
ST Microelectronics, Radiall, Soitec, ont aussi un potentiel important pour les
futurs équipements des Forces françaises.
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
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3) LA MODERNISATION DES FORCES DE DÉFENSE, UN
IMPÉRATIF COUTEUX
La modernisation de l'Armée se présente comme
une réévaluation qualitative de ses axes fonctionnels pour la
rendre plus professionnelle dans un souci de cohérence, de
rationalité, d'équité, d'opérationnalité,
d'efficience en rapport avec l'environnement. Aucune Armée
désireuse de jouer positivement son rôle de défense sur la
scène nationale et internationale ne peut échapper à ce
concept de modernisation. La complexité du champ de modernisation au
Cameroun comme dans les pays en voie de développement diffère de
celle qui s'impose dans les pays du Nord. Tandis que dans le Nord, la
modernisation a le sens de l'évolution régulière des
structures solidement établies, dans le Sud, elle est une refonte
intégrale du système qui se heurte à des écueils
parmi lesquels les exigences sociales et le coût prohibitif du
matériel semblant la confiner à moins de panache (Meloupou 2010 :
22).
a) LE COUT DES MATÉRIELS TRES
ÉLEVÉ
Le caractère prohibitif des coûts des
matériels est palpable à deux niveaux : l'achat et la maintenance
qui demandent en amont une planification stratégique et
opérationnelle en vue de l'acquisition de matériels dont la
fabrication dès la commande peut prendre deux à cinq ans. Voici
quelques chiffres qui illustrent l'ampleur du phénomène de
modernisation si un pays veut acquérir un certain type de
matériels de niveau opérationnel appréciable :
Tableau N°5 :
Coût de matériels
ARMEMENT
|
COUT (Millions d'euros)
|
COUT (Milliards de FCFA)
|
ARMEE DE TERRE
|
|
|
Char Leclerc
|
17
|
11
|
Véhicule blindé de combat
|
4,5
|
3
|
Missile Roland
|
0,27
|
0,2
|
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ARMEE DE L'AIR Avion
Rafale Hélicoptère
|
90 30 à 60
|
60 20 à 40
|
MARINE NATIONALE
|
|
|
Frégate anti-aérienne
|
650,0
|
426
|
Frégate légère de surveillance maritime
et de combat
|
140,0
|
92
|
Patrouilleur lance-missile (surveillance maritime
et combat)
|
100 à 130
|
65 à 85
|
Source : Magazine Honneur et
Fidélité, Mai 2010, page 22
A la contrainte d'équipement militaire due au
coût d'acquisition se greffe l'obstacle de l'entretien et de la
maintenance car il ne sert à rein d'acquérir sans maintenir pour
garantir l'opérationnalité et l'efficacité des Forces de
Défense. Et sans les moyens (Meloupou 1995 : 30) de sa politique, aucune
action n'est possible.
b) LES EXIGENCES SOCIALES DANS LE SYSTEME DE
MODERNISATION DES FORCES DE DÉFENSE
Le déploiement au quotidien d'une Armée
professionnelle moderne a un coût. En France par exemple, la
défense nationale a le deuxième budget de la nation
derrière l'éducation. Il y représente pratiquement 10% de
budget national.
Le Cameroun tout comme d'autres pays en voie de
développement doit éprouver des difficultés à
déployer d'un coup de lourds investissements au titre de la
modernisation de son Armée et ceci pour au moins deux raisons :
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
- D'une part, le coût exorbitant d'un matériel
que les Forces de Défense pourraient acquérir nécessite le
financement par prêt des institutions financières internationales
; ce qui n'est pas aisé compte tenu des contraintes de ces institutions
aux prises à une difficile conjoncture financière mondiale ;
- D'autre part, lorsque les équipements sont
directement financés de l'intérieur, il devient nécessaire
au gouvernement de pondérer le budget de la défense pour
préserver le lien Armée et Nation (Meloupou 2010 : 22).
La prégnance de cette notion apparaît manifeste
dans la mesure oüil faut réserver plus de subsides
à d'autres secteurs sociaux nécessiteux (éducation,
santé...). En dépit de l'ampleur des chiffres, les défis
restent évidents, bien qu'il ne soit ni simple, ni aisé d'une
part de convaincre les citoyens ou leurs représentants dans les
Assemblées parlementaires, de l'interdépendance
Armée-Développement, d'autre part de leur montrer que les
équipements militaires quoique très chers sont un enjeu
incontournable pour la modernisation et la professionnalisation des Forces de
Défense. Ils permettent de maintenir un niveau de
crédibilité dans la dissuasion, et le cas échéant,
défendre les intérêts économiques et la population
contre tous ceux qui voudraient annihiler les efforts de développement
et le potentiel économique et sécuritaire national.
Pour une disponibilité budgétaire, pour un
financement prompt des investissements militaires à la limite de la
nécessité, le gouvernement camerounais, le Ministère de la
Défense doit avoir des sources de financement propre pouvant relever de
ses industries à l'instar d'une menuiserie industrielle, des ateliers de
couture industrielle. Le gouvernement camerounais au-delà de
procéder aux réformes budgétaires se doit de favoriser la
réalisation des moyennes et grandes industries à même de
garantir la disponibilité des fonds.
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à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
IV- LA GOUVERNANCE DÉMOCRATIQUE
Parler de gouvernance démocratique dans les
problèmes de sécurité nous conduit au dépassement
de la « vision classique » de la notion de Sécurité.
Elle ne se résume plus uniquement à la sanctuarisation des
frontières, elle ne relève plus de la seule compétence des
Forces de Défense, il faut désormais intégrer la notion de
« sécurité humaine » en ceci que l'être humain
devient le centre de toutes les préoccupations d'après John
BURTON dans son ouvrage The theory of needs.
Pour lui, l'homme a des besoins fondamentaux pour lesquels il
recherche satisfaction. Ils sont de plusieurs ordres : biologique,
matériel, affectif. L'insatisfaction de ces besoins entraîne une
rupture de l'équilibre chez l'homme et par conséquent devient
source de frustration qui alimentera plus tard des soulèvements, des
révoltes, des actes de violence,
voire terroristes traduisant la nouvelle réalité
internationale d'oül'invocation de la gouvernance
démocratique qui à partir de sa définition se
présente comme un rempart à l'insécurité nationale
et internationale.
1) LA GOUVERNANCE DÉMOCRATIQUE COMME
MODALITÉ
DE RÉPARTITION ÉQUITABLE DES RESSOURCES
Selon l'approche française, la gouvernance
démocratique est entendue comme un « art de gouverner, en
articulant la gestion des affaires publiques à différentes
échelles de territoires, en régulant les relations au sein de la
société et en coordonnant l'intervention des multiples acteurs
». La gouvernance s'impose à la fin des années quatre-vingt
par le biais de sa déclinaison gestionnaire : la « bonne
gouvernance » ou « bonne gestion des affaires publiques ». Son
objectif est de conduire des réformes économiques dans des
conditions de stabilité politique et de lutter contre la corruption.
L'acception de la « bonne gouvernance » se développe ensuite,
prenant en compte le mode d'élaboration et de mise en oeuvre des
politiques avec la participation des acteurs.
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
D'après une approche intégrée, l'objectif
est de prendre en compte la complexité des enjeux attachés
à l'action publique afin de lutter plus efficacement contre la
pauvreté, dans une perspective de développement humain durable.
C'est pourquoi la France promeut dans sa stratégie
interministérielle adoptée en décembre 2006, une
conception extensive et dynamique de la gouvernance :

Elle dépasse la question des institutions ou des formes
du gouvernement ; Elle renvoie au processus décisionnel au sein de tous
les groupements sociaux ;

Elle inclut non seulement tous les acteurs (institutions,
secteur privé, société civile, etc.), tous les
échelons (du local au global), tous les champs (politique,
économique, social, culturel, etc.) et la question de la
sécurité mais, qui plus est, leurs interactions dans sa
définition même.
La gouvernance peut également être un
processus. Il s'agit donc d'aider une société
à repenser son propre mode de gestion et les modalités de
gouvernance les plus adaptées aux défis qu'elle rencontre
:

En favorisant la participation des acteurs à leur
définition, mise en oeuvre et évaluation, garante de la
légitimité et de l'efficacité des politiques de
gouvernement ;

Dans le respect des valeurs universelles et fondatrices de
l'idéal démocratique reconnues par les conventions et accords
internationaux.
Cependant, comme le souligne fort opportunément
Monsieur KOFI ANAN « Il n'existe pas de modèle unique de
gouvernance démocratique. Ce qui marche pour la Norvège ne marche
pas nécessairement pour la Namibie ou le Népal. La ligne de
départ n'est pas non plus la même pour tous. Certaines nations
parties d'un régime totalitaire ou d'une économie à
planification centrale sont en pleine transition. D'autres se relèvent
d'un conflit. D'autres encore ont une économie prospère, voire un
gouvernement
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
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compétent, mais sans avoir nécessairement
trouvé le chemin de la démocratie. »96
2) LA GOUVERNANCE DÉMOCRATIQUE COMME REMPART
A L'INSÉCURITÉ NATIONALE ET
INTERNATIONALE
Partant de la définition de la notion de gouvernance
démocratique et des origines des actes terroristes, il apparait que la
gouvernance démocratique serait une réponse efficace à la
situation d'insécurité que vie le monde du fait de ses vertues.
Elle participera à la satisfaction des besoins de l'homme, bref à
la matérialisation de la sécurité humaine à travers
une égale répartition des richesses, une participation active des
citoyens aux affaires, à une reconnaissance et à une mise en
valeur de leurs aptitudes. C'est d'ailleurs ce que laisse entendre le
Président de la République algérienne Abdel Aziz
Bouteflika lors de son intervention à l'occasion de la réunion
intergouvernementale de l'Union Africaine sur la prévention et la lutte
contre le terrorisme à Alger du 11 au 14 septembre 2002, lorsqu'il
affirmait ceci : « le combat contre la pauvreté est
peut-être l'élément premier indispensable de la lutte
contre le terrorisme, car si la pauvreté est humainement et moralement
inacceptable, elle est un facteur destructeur des vertus humaines et des bases
de la solidarité sociale ». D'après eux, la
véritable cause de l'insécurité est la pauvreté et
qu'il serait vain de combattre le terrorisme tant certaines tranche de la
population côtoient la pauvreté voire, la misère. Les faits
lui donnent certainement raison à la lecture des motivations des
activistes qui affirment se battrent pour les populations misérables.
C'est d'ailleurs ce qui justifie l'acte des rebelles du Mouvement pour
l'Emancipation du Delta du Niger (MEND)
96 Discours à la conférence sur «
Les défis de la gouvernance démocratique sur fond de
mondialisation », à l'Université d'Oslo, le 20 août
2001.
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
qui ont affirmé avoir détruit plusieurs
importants oléoducs dans le Sud pétrolifère du Nigeria en
guise de manifestation contre la misère du peuple97. Des
exemples de revendication sont légion.
De ce fait, mobiliser toutes les politiques de défense,
toutes les stratégies anti-terroristes, toutes les armes ne suffiraient
pas à éradiquer les tous les foyers d'insécurité.
Cette démarche stratégique ne ferait qu'étouffer voire
retarder l'action des rebelles sans toute fois l'annihiler. Il faudra donc
associer à la coercition, une politique passive qu'est la gouvernance
démocratique comme action préventive.
CONCLUSION
Les problèmes de sécurité relatif au
nouveau contexte géopolitique constituent la préoccupation
principale de tous les gouvernements du monde en général,
africain et camerounais en particulier à côté de ceux du
développement. La première réponse est sans doute
répressive et curative à travers le contre terrorisme
animé par la mise en place d'un système antiterroriste entretenu
par la collaboration civilo-militaire et soutenue par une économie de
défense. La deuxième réponse devrait être
préventive c'est-àdire commencer par prêter une oreille
attentive aux différentes revendications et y apporter des solutions,
fruits de la gouvernance démocratique.
97 Cameroun Tribune N°9955/5556 du 26 Mai 2009

CONCLUSION GÉNÉRALE
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
Dans un contexte international marqué par
l'évolution des guerres classiques aux guerres asymétriques, une
question s'imposait celle de savoir si les Forces Armées camerounaises
conçues pour les menaces classiques sont à même de
continuer à assurer la sécurité nationale ? Partant de
l'hypothèse selon laquelle les Forces de Défense camerounaises ne
sont pas assez outillées pour venir à bout de cette menace en
dehors d'une modification de leur cadre d'action, cette étude
menée à l'aune de l'analyse systémique nous nous a permis
de confirmer cette hypothèse.
Traditionnellement conçues pour neutraliser la
rébellion des indépendances, les Forces Armées
camerounaises à l'image de celles du reste du monde sont
constituées des unités classiques telles la Gendarmerie
Nationale, l'Armée de Terre, l'Armée de l'air, la Marine et la
Police Nationale chargées des missions de défense et de
sécurité sous une politique purement défensive et
dissuasive reposant sur la défense populaire définie par HAMADOU
AHIDJO et poursuivie par son successeur Paul BIYA, chefs suprêmes des
Armées et Chefs de l'Etat. C'est ainsi qu'elles ont pu venir à
bout de la rébellion, des putschistes du 06 avril 1984, des Forces
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Armées nigérianes désireuses de remettre
en cause la souveraineté camerounaise sur la presqu'île de
Bakassi, souveraineté rétablie de juré par la CIJ.
La manifestation des nouvelles menaces à travers les
exactions des coupeurs de routes dans le « Grand Nord » et des
pirates de mer dans le Nord Ouest et Sud Ouest Cameroun et la volonté de
la haute hiérarchie d'y faire face va provoquer le lancement du grand
chantier de modernisation en 2001 initié à travers la
création des unités spéciales le Bataillon d'Intervention
Rapide (BIR), le Groupement Polyvalent d'Intervention de la Gendarmerie
Nationale (GPIGN), des unités anti-terroristes, et tout récemment
le BIR DELTA chargé de mettre hors d'état de nuire les «
architectes de l'insécurité ». La disparité de
l'ennemi va commander une redéfinition du cadre d'action des Forces
Armées qui mutera de la défense ferme sans idée de recul
à l'offensive c'est dire le droit d'attaque et de poursuite.
Désormais, les hommes en armes ont le droit de poursuite, le droit de
mener des actions offensives, des actions préventives nourries par un
important service de renseignement pouvant être amélioré
à travers la création d'un Ministère de
l'Intérieur, l'offre de la Formation commune de base à tous les
bacheliers.
Mais, ces réformes des systèmes de
défense observées à l'échiquier international
n'épargne aucune partie du monde du vent de l'insécurité,
aucun Etat, même pas la première puissance militaire mondiale
encore moins le Cameroun limité dans son élan de modernisation
par la crise économique. Nous en voulons pour preuve la nième
attaque des banques98
98Dans la nuit du Vendredi 18 Mars à 23
heures, les ravisseurs une vingtaine embarquée dans une demi-dizaine de
pirogues à moteur accostent sur le Wouri. Puis, engagent une progression
à pied sur leur cible Ecobank de Bonaberie située au lieu dit
« Quatre étages ». Une fois sur les lieux, ils vont ouvrir le
feu sur les vigiles, exploser le mur du coffre fort à l'aide d'une
grenade. Bilan : 5 morts sur le carreau et une importante somme d'argent
emporté. Mais, ces derniers seront suivi jusqu'à leurs
embarcations par les Forces camerounaises, et rattrapés plutard par le
BIR DELTA sur les eaux camerounaises.
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
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par des pirates de mer donnant l'impression que le
problème d'insécurité reste intact au Cameroun. Face aux
insuffisances du contre terrorisme, une action curative assurée par une
économie de défense, nous pensons qu'il faut associer une action
préventive à savoir la gouvernance démocratique. Nous
pouvons ainsi dire sans risque de nous tromper que la mise à mal de
l'insécurité passe par une action couplée
c'est-à-dire préventive et curative ou
politico-stratégique. L'action préventive ou politique
étant la gouvernance démocratique c'est à dire la
satisfaction des besoins humains catalyseurs des actes terroristes à
travers une meilleure considération socioculturelle, et l'action
curative ou stratégique c'est à dire une réponse militaire
menée par des Forces anti-terroristes. Ces Forces anti-terroristes de
préférence de nature civilo-militaires soutenues par une
économie de défense garante de la sécurité
budgétaire et par ricochet de la sécurité nationale.
REFERENCES
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
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Internationale Security.
DISCOURS
- BIYA, P., 1983, Messages du Renouveau, Tome 2,
« Triomphe des promotions Rudolph Douala Manga Bell et Martin Paul Samba
de l'EMIA », Yaoundé.
COURS
- Delcourt, B., 2006-2007, THEORIES DE LA SECURITE,
Obligatoire en 2ème cycle en sciences politiques, orientation relations
internationales.
JOURNAUX.
- Cameroon Tribune, N°4916 du 21 juin 1991.
- Mutations, Dossier spécial n°016 du 22 octobre
1996.
- Cameroon Tribune N°8976/5175 du 14 Novembre 2007. -
Cameroom Tribune N°9233/5432 du 14 Novembre 2008. - Le Jour N°215 du
19 Juillet 2008
- Cameroon Tribune N°9217/5416 du 03 Novembre 2008. -
Cameroon Tribune N°9158/5357 du 11 Août 2008.
- Cameroon Tribune N°9275/5474 du 27 Janvier 2009. -
Cameroon Tribune N°9158/5357 du 11 Août 2008.
- Cameroon tribune N°9267/5466 du 15 Janvier 2009.
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
- Cameroon Tribune n°9515/5716 du 12 janvier 2010
- Cameroon Tribune N°9654/5855 du 03 Aout 2010
- Cameroon Tribune N°9434/5635 du 15 septembre 2009 -
Cameroon Tribune N°9563/5764 du 22 mars 2010
- Cameroon Tribune N°9632/5833 du 02 juillet 2010 - Cameroon
Tribune N°9635/5836 du 07 juillet 2010
- Cameroon Tribune N°9428/5630 du 07 septembre 2009 -
Cameroon Tribune N°9625/5826 du 23 juin 2010
- Cameroon Tribune N°9672/5873 du 1er septembre
2010 - Cameroon Tribune N°9292/5491 du 20 février 2009
- Aurore plus N°1292 du Mardi 08 Février 2011
Sites internet
-
http://fr.wikipedia.org/wiki/fichier:pirate.jpg
-
http://fr.wikipedia.org/wiki/piraterie_
modern/cite_note-4. -
http://fr.wikipedia.org/wiki/piraterie_
modern/cite_note-5 -
www.pirates-corsaires.com/une-question-me-taraude-depuis
-peu-
ple -monde-a-change-depuis -le-xiiieme-siecle-qr9.htm
-
http://fr.wikipedia.org/wiki/guerre
contre le terrorisme.
-
http://fr.wikipedia.org/wiki/guerre
contre le terrorisme_cite-note-0- cite-note-0

ANNEXES
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
QUESTIONNAIRE DE L'ENQUETE DE TERRAIN
1) Les Forces Armées camerounaises sont elles à
mesure d'assurer la sécurité des personnes et des biens face aux
exactions des coupeurs de route et des pirates de mer que nous vivons
aujourd'hui ?
2) Quels sont les objectifs de la réforme de 2001 ?
Les F.A.C. face aux nouvelles formes de menaces
à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
3) Ces réformes constituent-elles une adaptation des
Forces Armées camerounaises au nouveau contexte insécuritaire
animé par les nouvelles formes de menaces ?
4) Quelles sont les particularités de cette
réforme ?
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à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
5) Ces mesures vous paraissent-elles efficaces ?
6) Quelle est votre contribution dans l'impératif de
redéfinition des cadres d'actions des Forces Armées camerounaises
?
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à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
7) Le peuple participe t-il à l'effort de défense
conformément à la politique de défense dite populaire ?
8) Que pensez-vous du secret défense au Cameroun ?
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à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
9) Quels sont les origines et les motivations de cette nouvelle
de criminalité ? .
10) Comment mettre fin à ce climat
d'insécurité nationale, sousrégional, continental et
même mondial ? .
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à la sécurité : d'une Armée « de garde »
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Loi n° 67/LF 9 DU 12 JUIN 1967 Portant
organisation générale de la défense,
L'ASSEMBLEE NATIONALE FEDERALE a
délibérée et
adoptée ;
LE PRESIDENT DE LA REUBLIQUE FEDERALE
promulgue la loi dont la teneur suit :
TITRE I DEFINITION ET DISPOSITION GENERALE
ARTICLE 1ER : La
défense a pour objet d'assurer en tout temps, en toutes circonstances et
contre toutes les formes d'agression, la sécurité et
l'intégrité de l'Etat, dans le cadre de la souveraineté
nationale.
Elle pourvoit aux respects des alliances, traités et
accords internationaux.
ARTICLE 2 : Le pouvoir
exécutif dans l'exercice de ses attributions constitutionnelles, prend
les mesures nécessaires pour assurer la défense. En cas de danger
menaçant la sécurité ou l'intégrité du
territoire, la sécurité des institutions ou celle des
populations. Le président de la République peut outre
l'état d'exception, décrété pour tout ou partie du
territoire national l'une ou plusieurs des mesures suivantes :
- la mise en garde
- l'état d'urgence
- la mobilisation
ARTICLE 3 : La mise en garde consiste
en certaines mesures décidées par le président de la
république et ayant pour objet d'assurer le fonctionnement
régulier et la sécurité des institutions légales,
de diminuer la vulnérabilité des populations ou des
équipements vitaux, de garantir la sécurité des
opérations de mobilisation ou d'action des forces de défense.
La mise en garde confère au chef de l'Etat qui peut en
donner délégation :
- le droit de requérir les personnes, les biens et les
services ;
- le droit de restreindre la liberté de circulation, de
réunion, d'expression, de limiter les ressources d'informations
- le droit de soumettre à contrôle et à
répartition, les ressources en énergies, matières
premières, produits industriels et produit nécessaires au
ravitaillement des populations et des Forces Armées d'imposer aux
personnes, en ce qui concerne la disposition de leurs biens, les
sujétions indispensables.
- le droit de prendre des dispositions en ce qui concerne le
contrôle et la stabilité des prix y compris ceux des services ;
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- le droit de consentir, sur les ressources de la
trésorerie, aux organisations publiques ou privées
intéressant la Défense, les avances qui leurs seraient
indispensables pour remplir immédiatement le rôle qui leur est
dévolu ;
ARTICLE 4 : En plus des pouvoirs reconnu
par la loi relative à l'état d'urgence
1° les droits énumérés à
l'article précédent pour la mise en garde ;
2° le droit de placer sous l'autorité du gouvernement
fédéral - les administrations municipales et les
collectivités locales ;
- les polices des Etats fédérés ;
Sont conférés au président de la
république ou à ses délégués lorsque ledit
état a été décrété.
ARTICLE 5 : la mobilisation peut
être partielle ou générale
La mobilisation générale rend applicable l'ensemble
de ces mesures dans toute l'étendue du territoire.
La mobilisation partielle rend applicable dans tout ou partie du
territoire, certaines mesures de défenses préparées
à l'avance.
La mobilisation partielle ou générale
entraîne l'état d'urgence pour les parties du territoire
concernées.
TITRE II DE LA DIRECTION GENRALE ET DE LA
DIRECTION
MILITAIRE DE LA DEFENSE
ARTICLE 6 : le président de la
république veille à la sécurité intérieure
et extérieure de l'Etat. Il définit la politique de
défense et pourvoit à sa mise en oeuvre.
Chef suprême de toutes les forces de défenses, il
assure la direction suprême de maintien de l'ordre et décide de la
préparation et de la conduite générale des
opérations militaires.
Il formule des directives pour les négociations concernant
la défense et en suit le développement.
Il anime et coordonne à l'échelon national toutes
les activités intéressant de la défense.
ARTICLE 7 : Pour l'étude des
questions de la défense et pour la coordination de la direction
générale de celle-ci, le président de la république
est assisté d'un conseil supérieur de la défense
nationale, d'un comité technique de la défense nationale et
dispose d'un secrétaire permanent à la défense nationale
nommé et ayant attributions définis par textes particuliers.
Le secrétaire permanent à la défense est
représenté dans les comités techniques
spécialisés ayant à connaître des questions de
défenses et constitués par différents départements
ministériels et différentes directions.
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ARTICLE 8 : En ce qui concerne la
direction militaire de la défense, le président de la
république dispose d'un comité de défense dont il assume
la présidence.
Le ministre des Forces Armées est vice- président
du comité
de défense.
Les autres membres du comité sont désignés
par le président de la république.
ARTICLE 9 : Les décisions en
matière de direction militaire de la défense visent en
particulier :
- l'approbation des plans de défense ;
- les mesures destinées à pourvoir aux besoins des
forces ;
- les instructions à donner aux unités ou
détachements mis à la disposition des organismes
internationaux.
ARTICLE 11 : le ministre
chargé de l'administration territoriale Fédérale
prépare, met en oeuvre et coordonne les mesures de protection civile.
Celles ci concernent les risques courus par les populations
civiles du fait des calamités tels que les incendies, inondations,
cyclones, tremblements de terre.
ARTICLE 12 : Le ministre des Forces
Armées est responsable de :
1/ - L'exécution de la politique militaire de
Défense et en particulier de l'organisation, de la gestion, de la mise
en condition de l'emploi et de mobilisation des forces
régulières, supplétives ou auxiliaires ainsi que de
l'infrastructure qui leur est nécessaire ;
2/- La formation appropriée des fonctionnaires et des
catégories des citoyens qui ont un rôle à jouer dans la
défense.
ARTICLE 13 : Le ministre
chargé des affaires économiques organise et coordonne aux fins de
la Défense l'action des ministres et secrétaires d'Etats
responsables de diverses catégories de ressources matérielles du
pays.
Il tient compte dans le plan d'aménagement et
d'équipement du territoire, des nécessités
découlant de la politique de défense.
ARTICLE 14 : Le ministre des
transports, des postes et télécommunications et les
secrétaires d'Etat aux travaux publics sont responsables des mesures
à prendre pour assurer la satisfaction des besoins de la défense
en transport de toutes natures en grands travaux en transmissions. Leur action
ne s'étend pas aux moyens et à l'infrastructure militaire.
ARTICLE 15 : Le commissaire
général à la santé publique est responsable de la
mobilisation des moyens sanitaires en vue des besoins de la Défense. Il
a en matière de protection civile, la responsabilité de la
formation des secouristes ainsi celle de l'instruction de la population en
ce
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qui concerne la parade contre certains dangers résultant
de la guerre bactériologique, chimique ou atomique.
ARTICLE 16 : Les responsables des
services de sécurités rattachés à la
présidence exécutent dans des conditions fixées par des
textes particuliers, certaines missions intéressant de la
Défense.
TITRE IV De l'organisation territoriale et
opérationnelle de la Défense
ARTICLE 17 : La Défense est
préparée conduite et coordonnée par les autorités
civiles et militaires, dans le cadre des circonscriptions territoriales
militaires définies par décret et ayant en principe les
mêmes limites.
ARTICLE 18 : Dans les circonscriptions
visées à l'article 17
1- Les chefs de circonscriptions administratives
détiennent seuls les pouvoirs nécessaires pour engager toutes les
ressources de la Nation dans l'effort de défense et coordonner leur
emploi.
Ils sont responsables de la sauvegarde des installations
d'intérêt général. Ils veillent à la
protection des populations contre les sinistres résultats des actions de
guerre (Défense passive)
Ils disposent dans des conditions fixées par des textes
particuliers, Force de Police, de fractions déterminées de la
Gendarmerie et de l'Armée et les utilisent pour l'exécution des
missions défensives, dans le cadre de leurs règlements.
2- Les autorités militaires assurent le commandement des
Forces Armées pour leur mise en condition et leur emploi local.
ARTICLE 19 : Le Président de
la République, chef des Forces Armées peut constituer par
décret des commandements opérationnels dont il fixe les moyens et
les relations avec l'organisation territoriale civile et militaire.
TITRE V Définition des moyens de
défense
ARTICLE 20 : Les moyens de
défense comprennent : - les forces régulières,
- les forces supplétives,
- les forces auxiliaires,
L'ensemble des Forces est constitué pour
défendre la Nation contre les ennemies du dehors et assurer au-dedans le
maintien de l'ordre et l'exécution des lois.
ARTICLE 21 : Les forces
régulières comprennent : - La gendarmerie National,
- L'Armée de terre,
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- La Marine Nationale,
- L'Armée de l'Air,
- Les polices des Etats Fédérés.
ARTICLE 22 : Les forces auxiliaires sont
éléments civils armés qui ne sont pas employés
à plein temps à des missions de Défense
Les forces supplétives sont des éléments
civils armés, organisés en unité, employés à
plein temps à des missions de Défense.
Les conditions de recrutement, les missions, l'organisation,
l'administration, la tutelle, les modalités d'emploi des forces
supplétives et auxiliaires sont fixées par décret.
ARTICLE 23 : Pour la Défense, les
formations des forces régulières sont reparties en :
- unités de réserve générale,
- unité d'intervention,
- unité territoriale,
Les formations des forces supplétives et les forces
auxiliaires sont des unités territoriales.
ARTICLE 24 : Les unités de
réserve générales ne peuvent être employées
que sur ordre ou autorisation du Président de la République.
ARTICLE 25 : Les unités
d'intervention reçoivent normalement leurs missions du Ministre des
Forces Armées après approbation du Président de la
République.
Elles peuvent être mises temporairement à la
disposition d'un commandement territorial.
ARTICLE 26 : Pour l'emploi des
unités territoriales, il faut distinguer :
- la Gendarmerie départementale et les Polices,
- la Gendarmerie mobile,
- l'Armée de terre, la Marine Nationale et l'Armée
de l'Air.
L'autorité civile dispose normalement pour le maintien de
l'ordre de la Gendarmerie départementale et des Polices.
L'emploi des missions normales de maintien de l'ordre de la
Gendarmerie Mobile et des Forces terrestre, aériennes et maritimes est
subordonné à leur réquisition préalable et fait
l'objet des textes particuliers. L'emploi des Forces terrestre,
Aériennes et Maritimes pour le maintien de l'ordre n'est justifié
qu'en cas d'insuffisance des moyens de la Gendarmerie et des Polices.
La conduite des opérations intérieures sortant
du cadre traditionnel de maintien de l'ordre est assurée par le
commandement militaire territorial ou par les Commandements
opérationnelles spécialement constitués qui prennent
toutes les mesures nécessaires pour l'exécution des missions qui
leurs sont fixées.
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ARTICLE 27 : l'organisation
générale et les missions de la Gendarmerie Nationale, de chacune
des Armées et de la Polices sont fixées par décret.
L'organisation des unités fait l'objet, suivant le cas de
décisions ministérielles ou présidentielles.
TITRE VI De l'emploi des personnes et des
ressources
ARTICLE 28 : Il est institué un
« Service National » comprenant : - le service Armée
destiné à répondre aux besoins des Forces
régulières supplétives ou auxiliaires ;
- le service de Défense destiné à pourvoir
aux besoins de Défense civile ;
Le service de Défense concerne les personnels
destinés à la protection civile, aux fonctionnements des
organisations, installations et entreprises vitales pour la défense et
survie du pays, aux concours de maind'oeuvre demandé par les forces
Armées ou aux travaux de Défense prescrit par les
autorités militaires et civiles.
ARTICLE 29 : Les besoins en personnels
du service national sont couverts par :
- la mobilisation des réserves du service armé ;
- le rappel des anciens fonctionnaires ou employés divers
de l'Etat et des administrations publiques,
- l'appel au volontariat,
- la réquisition.
La préparation et l'exécution de ces mesures font
l'objet de textes particuliers
ARTICLE 30 : Sont assujettis au
service national les citoyens masculins âgés de 18 à 55
ans, s'ils possèdent la capacité physique nécessaire.
Les personnels de sexe féminin, physiquement aptes peuvent
être volontaires ou requises pour certaines branches du service de
Défense.
ARTICLE 31 : Il sera institué
une formation préliminaire masculine et féminine dont
l'organisation sera réglée par des textes particuliers.
La préparation militaire pourra, par décret,
être rendu obligatoire pour les élèves de certaines
écoles, les candidats à certaines fonctions, certaines
catégories de citoyens.
ARTICLE 32 : Il sera crée un
fichier national de Défense pour suivre la situation de toutes les
personnes admises à recevoir ou ayant reçu une formation
prémilitaire et celle de tous les hommes âgés de 18
à 55 ans susceptibles de participer au service national.
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Un décret précisera les conditions de
fonctionnement du fichier national et les modalités selon lesquelles les
citoyens seront tenus de fournir les renseignements les concernant.
ARTICLE 33 : La durée du service
national est établie sur 37 années soit de 18 à 55 ans.
- les sept premières années constituent la
disponibilité,
- les quinze années suivantes constituent la
réserve,
- les quinze dernières années constituent la
deuxième réserve. Toutefois, les personnels :
- libérés des forces régulières font
parties soit leur âge de la disponibilité durant cinq ans
après la date de leur libération,
- pourvus d'un grand Officier ou de Sous-officier de
réserve font partie de la disponibilité jusqu'à la limite
d'âge statuaire de leur grade augmenté de 5 ans.
Les personnels nécessaires au service armé sont
pris en priorité parmi ceux de la disponibilité.
Les personnels de la disponibilité et de la
première réserve peuvent être tenus d'effectuer des
périodes d'instruction militaire.
Les personnels assujettis au Service National et qui n'ont pas
effectué une période d'instruction militaire peuvent être
tenus d'effectuer des périodes d'instruction ou de travaux de
Défense.
ARTICLE 34 : Les assujettis au
Service National lorsqu'ils ne sont pas appelés dans les forces
régulières supplétives ou auxiliaires peuvent être
:
- organisés en corps de Défense régionaux
chargés d'assurer certains service ou travaux utiles à la
Défense ;
- organisés en milice de Défense locale ou
d'entreprise ;
- maintenus sans affectation.
Dans les deux premières éventualités
ci-dessus, les assujettis du Service National relève de la discipline
générale et des juridictions militaires dans les mêmes
conditions que les personnels des Forces Armées.
ARTICLE 35 : Le régime de la
rémunération des assujettis au Service National est :
- celui des forces supplétives lorsqu'il est
employé en corps de Défense ;
- fixé par décret lorsqu'ils sont employés
dans le cadre des milices de défense locale ou d'entreprise
ARTICLE 36 : Le régime des
pensions d'invalidité des assujettis au Service National est celui :
- des forces supplétives lorsque, appartenant à un
corps de Défense ou à une milice locale, ils ont
été pourvus d'armes par les autorités
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civiles ou militaires et sont blessés dans
l'exécution ou à l'occasion de leur mission ;
- des salariés relevant du code du travail dans tous les
autres cas où ils sont blessés en service de Défense.
ARTICLE 37 : Les modalités de
l'exercice et de la délégation du droit de réquisition des
personnels et des biens ouverts en vertu de l'article 3 de la présente
loi seront fixées par décret.
ARTICLE 38 : Dans le cadre du Service
National :
- les fonctionnaires sont chargés de suivre les
questions de Défense dans les différents ministères,
secrétariat d'Etat et services ou dans les circonscriptions
territoriales,
- certaines personnalités de secteurs publics ou
privés peuvent être astreints à effectuer des stages de
formation ou d'information sur les questions de Défense.
ARTICLE 39 : Des décrets fixeront
en tant que de besoin les, modalités d'application de la présente
loi.
ARTICLE 40 : La présente loi
sera enregistrée publiée en français et en anglais au
journal officiel et exécutée comme loi de la République
Fédérale du Cameroun.
Fait à Yaoundé, le 12 juin 1967 LE
PRESIDENT DE L REPUBLIQUE FEDERALE (é) EL HADJ AHMADOU AHIDJO
Pour ampliation : LE SECRETAIRE GENERAL ; (é) Z. MONGO SOO
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REPUBLIQUE DU CAMEROUN
PAIX- TRAVAIL- PATRIE
DECRET N° 68/DF/33 du 29 janvier 1968
-=--ooOoo=-=-
Fixant les missions de défense des Forces
Régulières Supplétives et auxiliaires
LE PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE,
Vu la constitution du 1er septembre 1961
;
Vu la loi n° 67/LF/9 du 12 Juin 1967 portant
organisation générale de la Défense et notamment l'article
27 ;
Vu le décret 61/DF/11 du 20 octobre 1961 relatif
à la Sûreté intérieure de l'Etat
Fédéral ;
Vu le décret 67/DF/184 du 26 Avril 1967 fixant les
attributions de chef de circonscriptions administratives ;
DECRETE :
ARTICLE 1 : GENERALITES
1°) - Le maintien de l'ordre à pour objet de
prévenir les troubles afin de n'avoir pas à les réprimer.
Il comporte également si
l'ordre vient à être troublé, des mesures
destinées à le rétablir. On distingue le Maintien de
l'Ordre :
- PREVENTIF, à base de renseignements et pouvant
entraîner des Forces territoriales avec ou sans réquisition ;
- ACTIF, en cas de menaces, de troubles justifiant la mise en
application des plans de protection ;
- RENFORCE, en cas de troubles graves et
généralisés justifiant la proclamation de l'état
D'URGENCE.
2°) - La Défense Opérationnelle a pour objet
de s'opposer à des Forces généralisées
militairement, étrangères ou non.
Elle peut aussi faire suite au maintien de l'ORDRE RENFORCE,
lorsque les mesures résultant de l'état D'URGENCE avèrent
insuffisantes.
La Défense Opérationnelle est conduite par de
commandement spécialement constitués. Elle nécessite
généralement des mesures de mobilisation. Elle peut être
menée tant à l'intérieur qu'à l'extérieur du
territoire.
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3°) - La résistance intérieure s'exerce
dans les parties du Territoire National occupées par des Forces
ennemies. Elle vise la libération du territoire et le
rétablissement des Autorités nationales légales dans la
plénitude de leurs attributions.
ARTICLE 2 : PRINCIPES
1. La direction Supérieure du Renforcement du Maintien
de l'ordre de la défense opérationnelle et éventuellement
celle de la résistance intérieure est assurée par le chef
de l'Etat.
2. Les autorités administratives sont responsables du
maintient de l'ordre dans leur circonscription.
3. les commandements constitués conformément
aux dispositions des articles 19 et 26 de la loi 67/LF/9 du 12 Juin 1967 ont la
responsabilité de la défense opérationnelle.
4. La résistance intérieure organisée
dans la clandestinité est dirigée par les personnalités
civiles, militaires ou de police ayant pu conserver leur liberté
d'action ou par toute autre personne en ayant reçu mandat du chef de
l'Etat.
5. Dans les situations de maintient de l'ordre, de
défense opérationnelle, de résistance intérieure,
le renseignement revêt une importance capitale. Sa recherche au
bénéfice des autorités responsables est une mission
permanente pour les Forces.
ARTICLE 3 : MISSION DES FORCES
1. Du point de vue de leurs missions pour le maintien de
l'ordre, les Forces régulières sont divisées en trois
catégories qui sont :
1ère catégorie : Gendarme et Police
2ème catégorie : Gendarme mobile et
unité mobile de police
3ème catégorie : Armée de terre,
Marine nationale, Armée de
l'air
Les Forces supplétives et auxiliaires appartiennent
à la deuxième catégorie
2. Emploi des Forces pour l maintient de l'ordre :
a) - Les Forces de premières catégories sont
à la disposition des
autorités administratives pour le maintient de l'ordre
préventif ;
Elles agissent dans les conditions prévues par leurs
règlements, soit à leur initiative, soit en exécution de
l'ordre de leurs chefs ou sur réquisition des autorités
administratives.
b) - Les Forces de deuxième catégorie sont
spécialisées dans le maintien de l'ordre. Elles agissent à
la demande et eu besoin sur réquisition des autorités
habilitées.
- c) - Les Forces de troisième catégorie ne
doivent être utilisées au maintient de l'ordre
qu'exceptionnellement et seulement en cas
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d'insuffisance des Forces de première et de
deuxième catégorie. Elles sont mises en oeuvre sur
réquisition.
- d) - Des textes particuliers à la Sûreté
intérieure de l'Etat fédéral, précise les
autorités habilitées à requérir des Forces
Armées, les règles de commandement et les conditions d'emploi de
l'armement.
- 3. En situation de défense opérationnelle
à l'intérieure du territoire
- a) - Les Forces territoriales de gendarmerie et de police
conservent leurs missions normales de renseignements, de maintien de l'ordre,
de police judiciaire, administrative et militaire.
- b) - Les unités territoriales des Armées, les
unités de Forces supplétives et auxiliaires agissent dans le
cadre de leur circonscription territoriale comme moyen de première
intervention, de combat retardateur de protection des objectifs importants, de
protection des unités du corps de bataille. Elles préparent
l'entrée en action des Forces d'intervention et de réserve
générale.
- c) - Les unités d'intervention et de réserve
générale de la gendarmerie et de la police peuvent être
appelées à participer aux actions de combat avec les
unités du corps de bataille. Elles sont plus particulièrement
consacrées à celles de ces actions comportant des contacts avec
les populations.
- d) - Les unités d'intervention et de réserve
générale des Armées mènent le combat ayant pour but
la mise hors d'état d'agir par capture ou anéantissement des
Forces ennemies étrangères et des nationaux qui les appuient.
- 4. Lorsque les Forces sont appelées à agir
hors du territoire national, soit en cas de conflit direct, soit dans le cadre
d'accords internationaux, des instructions particulières du chef de
l'Etat définissent leurs missions et les conditions
d'exécution.
- 5. En cas d'occupation partielle ou totale du territoire
national par des Forces ennemies.
- a) - La gendarmerie et la force territoriale conservent
leurs missions normales de maintien de l'ordre. Elles s'efforcent avec celles
des autorités nationales demeurées en place de protéger au
mieux les populations contre les services ou l'emprise de l'occupation.
- b) - Toutes les Forces en mesure d'agir poursuivent le
combat, les unités territoriales des Armées, les Forces
supplétives et auxiliaires organisent et mènent une
résistance intérieure locale. Les unités d'intervention et
de réserve générale rejoignent les zones de regroupement
prévues à partir desquelles elles harcèlent l'ennemi et
soutiennent les organisations locales de résistance.
- 6. La préparation de l'exécution des mesures de
maintien de l'ordre constitue.
- a) - La mission principale de la gendarmerie, de la police, des
formations supplétives et auxiliaires.
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- b) - Une mise éventuelle pour l'Armée de Terre,
la marine nationale, l'Armée de l'air.
- 7. La préparation et l'exécution des actions de
défenses opérationnelles constituent :
- a) - La mission principale de l'Armée de Terre, de la
marine nationale, de l'Armée de l'air.
- b) - Une mission importante pour la gendarmerie mobile, les
unités de polices, les gardes civiques, les formations auxiliaires
d'aide.
- c) - Une mission éventuelle pour la gendarmerie
territoriale, la garde républicaine, la police territoriale, les
formations auxiliaires de garde.
- 8. La résistance intérieure en cas d'occupation
du territoire national est un devoir pour toute es Forces qui peuvent y
participer.
- 9. La force républicaine est chargée d'assurer
par priorité la sécurité du président de la
république fédérale et de l'assemblée nationale
fédérale. Cette mission peut revêtir toutes les formes de
maintien de l'ordre, de la défense opérationnelle de la
résistance intérieure.
- 10) Dans les situations de défenses
opérationnelles, la gendarmerie nationale assure le service de la
prévôté des Armées. Les polices prêtent leur
concours aux commandements opérationnels.
- ARTICLE 4 :
- Des instructions présidentielles prisent sur
proposition du Ministre des Forces Armées ou des autorités dont
dépendent les polices, développent en tant que besoin des
modalités d'exécution des missions de maintien de l'ordre et de
défense de chacune des Forces.
- ARTICLE 5 :
- Le présent décret sera enregistré et
publié au journal officiel de la république fédéral
du Cameroun en français et en anglais.
-
- Yaoundé, le 26 janvier 1958
-
- Le président de la république
-
- EL HADJ AHMADOU AHIDJO
-
- Pour ampliation
-
- Le Secrétaire Général
- P. BIYA
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à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
LISTE DES DECRETS RELATIFS A LA REORGANISATION DE LA
DEFENSE NATIONALE SIGNE PAR MONSIEUR LE PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE
(Cf Cameroon Tribune n°7398/3687 du 26 Juillet
2001)
1-Décret n°2001/177 du 25 Juillet 2001,
portant organisation générale de la Défense ;
2- Décret n°2001/178 du 25 Juillet 2001,
portant organisation générale de la Défense et des
Etats-majors centraux ;
3-Décret n°2001/179 du 25 Juillet 2001,
portant définition du Commandement organique et opérationnel ;
4- Décret n°2001/180 du 25 Juillet 2001,
portant réorganisation du Commandement militaire territorial ;
5- Décret n°2001/181 du 25 Juillet 2001,
portant organisation de la Gendarmerie Nationale ;
6- Décret n°2001/182 du 25 Juillet 2001,
fixant les attributions des Chefs d'Etat-Major ;
7- Décret n°2001/183 du 25 Juillet 2001,
portant réorganisation des formations de combat de l'Armée de
Terre ;
8- Décret n°2001/184 du 25 Juillet 2001,
portant réorganisation du Corps National des Sapeurs Pompiers ;
9- Décret n°2001/185 du 25 Juillet 2001,
portant organisation des services extérieurs de la Santé
militaire ;
10- Décret n°2001/186 du 25 Juillet 2001,
portant organisation de la Division de la Sécurité militaire ;
11- Décret n°2001/187 du 25 Juillet 2001,
fixant les conditions de recrutement et d'admission dans les écoles
militaires de formation des officiers ;
12- Décret n°2001/188 du 25 Juillet 2001,
portant statut particulier du corps des officiers d'active des Forces de
Défense ;
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13- Décret n°2001/189 du 25 Juillet 2001,
portant organisation du cadre des officiers généraux des Forces
de Défense ;
14- Décret n°2001/190 du 25 Juillet 2001,
portantstatut particulier des personnels militaires non officiers des Forces de
Défense ;
15- Décret n°2001/191 du 25 Juillet 2001,
modifiant et complétant les dispositions du Décret n°84/010
du 13 Juillet 1984, fixant les avantages attachés au Commandement
militaire ;
16- Décret n°2001/192 du 25 Juillet 2001,
déterminant le taux de l'indemnité pour charges militaires des
officiers d'active des Forces Armées ;
17- Décret n°2001/193 du 25 Juillet 2001,
déterminant le taux de l'indemnité pour charges militaires de
personnels non-officiers des Forces de Défense ;
18- Décret n°2001/194 du 25 Juillet 2001,
modifiant et complétant certaines dispositions du Décret
n°091/133 du 22 Février 1991, réglementant les
modalités de prise en charge sur le budget de l'Etat des frais de
missions et de transport des personnels militaires en cas d'affectation
administrative, bourse, stage, mission, tournée, visite des chantiers,
permission, retraite et décès ;
19- Décret n°2001/195 du 25 Juillet 2001,
portant création de l'Office National des Anciens Combattants, anciens
militaires et victimes de guerre du Cameroun ;
20- Décret n°2001/196 du 25 Juillet 2001,
portant création du Comité de pilotage pour la mise en place des
textes réorganisant et modernisant les Forces de Défense ;
21- Décret n°2001/197 du 25 Juillet 2001,
portant réorganisation de l'EtatMajor Particulier du Président de
la République ;
22- Décret n°2002/036 du 04 Février
2002, portant création et organisation des Forces de la Marine
Nationale ;
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23- Décret n°2002/091 du 04 Février
2002, portant création et organisation des Forces
24- Décret n°2002/037 du 04 Février
2002, portant création et organisation de Défense.
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LA STRATÉGIE DE SÉCURITÉ NATIONALE
DES ÉTATS-UNIS D'AMÉRIQUE

MAISON BLANCHE
WASHINGTON
Mes chers compatriotes,
L'Amérique est en guerre. Il s'agit là d'une
stratégie de sécurité nationale de temps de guerre
commandée par le terrible défi qui nous est posé : celui
de la montée en puissance d'un terrorisme nourri par une
idéologie agressive de haine et de meurtre, révélée
aux Américains en ce 11 septembre 2001. Cette stratégie
reflète notre obligation la plus solennelle : protéger la
sécurité du peuple américain. L'Amérique se voit
également offrir une opportunité sans précédent de
jeter les fondements d'une paix future. Les idéaux qui ont
inspiré notre histoire, à savoir la liberté, la
démocratie et la dignité humaine, enthousiasment de plus en plus
d'individus et de nations à travers le monde. Et parce que les nations
libres ont une propension naturelle à la paix, la progression de la
liberté ne fera que rendre l'Amérique plus sûre. Ces
priorités indissociables - lutter et remporter la guerre contre le
terrorisme et promouvoir la liberté comme une alternative à la
tyrannie et au désespoir - orientent la politique américaine
depuis bientôt plus de 4 ans. Nous avons maintenu l'offensive contre les
réseaux terroristes, laissant notre ennemi affaibli mais hélas
pas encore vaincu. Nous nous sommes unis au peuple afghan pour faire chanceler
le régime Taliban - ces protecteurs du réseau Al-Qaida - et les
avons aidé à le remplacer par un nouveau gouvernement
démocratique. Nous avons attiré l'attention du monde sur la
prolifération des armes dangereuses bien que ce
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domaine présente encore d'énormes défis.
Nous nous sommes battus pour la démocratisation du Moyen-Orient,
relevant des défis et réalisant des avancées que peu
auraient pu prédire ou espérer. Nous avons entretenu des
relations stables et de coopération avec toutes les grandes puissances
de ce monde.
Nous avons décuplé nos efforts pour encourager
le développement économique et l'espoir qu'il fait naître,
et avons concentré ces efforts sur la promotion de la réforme et
l'obtention de résultats. Nous avons dirigé une coalition
internationale chargée de destituer le dictateur irakien, un dictateur
coupable d'avoir brutalisé son propre peuple, terrorisé sa
région, défié la communauté internationale, et de
s'être procuré et d'avoir utilisé des armes de destruction
massive. Et nous nous battons aux côtés des Irakiens pour garantir
un Irak uni, stable et démocratique, un nouvel allié dans cette
guerre contre le terrorisme au coeur même du Moyen Orient. Nous avons
réalisé de grandes choses, relevé de nouveaux défis
et peaufiné notre approche au gré des conditions changeantes.
Nous avons découvert également que la défense de la
liberté amène perte et chagrin, parce que la liberté a ses
ennemis. Nous avons toujours su que la guerre contre le terrorisme exigerait de
gros sacrifices, et au cours de cette guerre, nous avons dit adieu à des
hommes et des femmes d'exception. Les terroristes ont eu recours à des
actes extrêmement meurtriers depuis les rues de Fallujah jusqu'au
métro de Londres. Tous ces actes étant destinés à
mettre notre volonté à rude épreuve. La lutte contre cet
ennemi, un ennemi qui vise les innocents sans conscience ni hésitation -
a été difficile. Et notre travail est loin d'être
terminé.
L'Amérique doit aujourd'hui choisir entre la voie de la
peur et la voie de la confiance. La voie de la peur, celle de l'isolationnisme
et du protectionnisme, de la fuite et du retranchement, est tentante pour ceux
qui estiment nos défis trop ambitieux et qui restent aveugles à
nos opportunités. L'histoire est cependant là pour nous rappeler
qu'à chaque fois que les
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dirigeants américains ont emprunté ce chemin,
les défis n'en sont devenus que plus grands et les occasions
manquées ont nuit à la sécurité des
générations suivantes. Cette Administration a choisi la voie de
la confiance. Nous préférons le commandement à
l'isolationnisme et la poursuite du libre échange et de l'ouverture des
marchés au protectionnisme.
Nous choisissons de relever les défis qui se posent
à notre pays maintenant, plutôt que les laisser aux mains des
générations futures. Nous allons combattre nos ennemis à
l'étranger plutôt qu'attendre de les voir venir frapper à
nos portes. Nous souhaitons façonner le monde et pas simplement
épouser la forme qu'il souhaitera nous donner ; nous voulons influencer
les événements dans un sens favorable plutôt que les subir.
La voie que nous avons choisie est dans la droite ligne de la grande tradition
de politique étrangère américaine. À l'instar des
politiques d'Harry Truman et de Ronald Reagan, notre approche est
idéaliste en ce qui concerne nos objectifs nationaux et réalistes
pour ce qui est des moyens d'y parvenir.
Pour suivre cette voie, nous devons conserver et
étendre notre force nationale afin de pouvoir saisir ces menaces et
défis à bras le corps, avant qu'ils ne nuisent
irrémédiablement à notre peuple ou à nos
intérêts. Nous devons conserver une force militaire sans pareil
malgré que notre force ne repose pas que sur la seule puissance des
armes. Elle se nourrit également de la prospérité
économique et de valeurs démocratiques dynamiques. Et elle repose
sur des alliances solides, sur des amitiés et des institutions
internationales qui nous aident à promouvoir ensemble la liberté,
la prospérité et la paix.
Notre stratégie de sécurité nationale repose
sur deux piliers :
· Le premier consiste à promouvoir la
liberté, la justice et la dignité humaine en oeuvrant pour mettre
fin à la tyrannie, promouvoir des démocraties efficaces et
étendre la prospérité au travers d'échanges
commerciaux libres et équitables et de politiques de
développement bien senties. Les gouvernements libres sont responsables
de leurs
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actes devant leur population, ils gouvernent leur territoire
efficacement et poursuivent des politiques économiques
bénéficiant à leurs citoyens. Les gouvernements libres
n'oppriment pas leur peuple ou n'attaquent pas d'autres nations libres. La paix
et la stabilité internationales s'affermissent davantage lorsqu'elles se
fondent sur la liberté.
· Le second pilier de notre stratégie consiste
à relever les défis de notre époque en dirigeant une
communauté croissante de démocraties. Bon nombre des
problèmes qui nous rongent aujourd'hui, depuis les pandémies, en
passant par la prolifération des armes de destruction massive, le
terrorisme, le trafic des êtres humains, jusqu'aux catastrophes
naturelles, ne s'arrêtent pas à nos frontières. Des efforts
multilatéraux efficaces sont absolument indispensables pour
résoudre ces problèmes. Et l'histoire nous a montré que ce
n'est que lorsque nous remplissons notre part du contrat que le monde suit.
L'Amérique doit continuer à diriger le monde.

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