Résumé
Le Niger, pays pauvre tres endetté est confronté
a une situation économique et financiére tres critique qui le
maintient dans une position de précarité permanente. Placé
sous ajustement structurel depuis 1982 suite a la chute du prix de son
principal produit d'exportation qui est l'uranium et d'un endettement massif,
il peine a sortir de la spirale d'un déficit budgétaire devenu
chronique et structurel. 1l n'arrive plus a s'en sortir par lui-même sans
les subventions et les aides de ses partenaires bilatéraux et
multilatéraux et compte aujourd'hui sur l'initiative en faveur des pays
pauvres tres endettés(PPTE) pour bénéficier d'un
allégement voire un effacement de sa dette en vue de réduire la
pauvreté. La situation économique déjà
précaire est davantage fragilisée par des cycles de
sécheresse qui secouent d'une décennie a une autre ce pays
sahélien, exposant une grande partie de sa population a une
insécurité alimentaire permanente.
Le redressement de cette situation étant devenu
impératif, des réformes tant économiques que
financiéres sont absolument nécessaires sur fond de changement de
mentalité dans la conduite des affaires de l'Etat afin de permettre a ce
pays de se hisser au rang des nations qui prospérent. A cet
égard, l'un des préalables est avant tout de compter d'abord sur
ses propres forces en exploitant et mettant en valeur toutes les sources
potentielles de richesse et en se dotant d'un mécanisme approprié
de gestion démocratique et transparente de la chose publique. L'une des
principales stratégies consisterait a accroitre les recettes fiscales
jusque la tres faiblement mobilisées comme en témoigne le taux de
pression fiscale qui tourne autour de 11% en 2004 pour une norme communautaire
(U.E.M.O.A) fixée a 17%. S'il est vrai que le Niger est un pays tres
pauvre, que sa performance économique est des plus faibles, il n'est pas
par contre justifié que les recettes fiscales soient un simple reflet de
cette réalité. Parmi les raisons qui peuvent être
avancées pour expliquer cet état de fait, il y a d'abord les
faiblesses inhérentes a l'administration fiscale elle-même, a la
délivrance tous azimuts des exonérations, a l'étroitesse
de l'assiette fiscale, aux difficultés de recouvrement, aux
informalités économiques généralisées,
etc.
Pourtant, face aux besoins importants du pays en
matiére de financement du développement, force est de reconnaitre
que les ressources fiscales constituent sans aucun doute un des piliers les
plus importants pour tout Etat qui se veut jaloux de sa souveraineté. En
effet, la fiscalité reste et demeure o l'instrument qui doit
permettre aux Etats de renforcer leur indépendance vis-à-vis de
l'aide extérieure et de se réapproprier pleinement leurs
politiques de développement»1.
Le recours récurrent a l'endettement ou a l'aide publique au
développement (APD) dans des conditions souvent trts peu avantageuses
pour le pays en moyen et long terme, est un cercle vicieux qui ne ferait
qu'accroitre la dépendance du pays sans pour autant garantir les
résultats escomptés. Cela est d'autant plus vrai que
malgré les centaines de milliards de F CFA de dettes contractées,
le Niger comme la quasi-totalité des pays africains, n'est toujours pas
parvenu a se frayer un chemin dans la voie du développement tant
rêvé. Pire, il s'est davantage enfoncé dans la
pauvreté au point de se retrouver dans une situation oil il
n'était plus capable d'assumer certaines charges de souveraineté
tel que le paiement régulier des salaires des agents de l'Etat.
Pour financer son développement sur une base durable,
le Niger se doit de se doter d'un systeme fiscal efficient et efficace devant
toucher l'essentiel des activités économiques dont une part
importante échappe a la comptabilité nationale. A titre
d'exemple, plus de 90% des hydrocarbures consommées tout le long des
1500kms que le Niger partage avec le Nigeria ne passent pas par le circuit
formel d'importation et de redistribution. Il se trouve alors dans ces
conditions, que ce ne sont pas forcément les activités
économiques qui doivent se conformer nécessairement a la
politique fiscale, mais c'est plutot a celle-ci de s'adapter a l'environnement
économique auquel elle s'applique. La fraude étant dans une
certaine mesure fortement ancrée dans les pratiques économiques
de certaines régions du pays, des douaniers sont souvent physiquement
agressés voire mis a mort dans leur tentative d'arrêter des
fraudeurs. Cette situation pose dans une certaine mesure le probléme de
la perception que les citoyens auraient de l'Etat et de certains de ses agents
qui sont plus vus comme des racketteurs et des spoliateurs des biens des
pauvres surtout lorsqu'au vu et au su de tous, ils « privatisent ainsi
a leur avantage, tout ou partie de la taxation publique. »2
Dans le cadre de ce mémoire, nous avons tenté de
relever les difficultés auxquelles est confronté le systeme
fiscal nigérien dans un contexte marqué par une forte
informalisation des activités économiques a tous les niveaux et
qui limite considérablement la collecte d'impOts. Pour remédier a
ces carences, les pouvoirs publics ont initié un certain nombre de
mesures qui se sont traduites par l'institution de l'imp,t synthétique
pour imposer les facteurs de production, la mise en application d'un systeme
d'identification des contribuables, l'instauration de la TVA et son
élargissement a certains produits alimentaires. Nonobstant ces
1Xavier DARCOS, « Préface »,
Afrique au Sud du Sahara : Mobiliser des ressources fiscales pour le
developpement, CHAMBAS Gérard(dir.), Economica, Paris,
2005, p.V.
2 Jean-Michel SERVET, « Réseaux financiers
au Niger et dans la Corne de l'Afrique », Cote jardin, Cote cour.
Anthropologie de la maison africaine, Nouveaux Cahiers de l'IUED
N°15, Paris, PUF, 2004, pp.227-237.
mesures, la situation financiére du Niger reste
toujours préoccupante et est loin de connaitre une amélioration
significative a cause non seulement de la lenteur dans la mise en oeuvre des
réformes, mais aussi de la difficile réceptivité par les
agents économiques des mesures fiscales envisagées. La
flambée exagérée des prix de certains produits
alimentaires ayant fait l'objet d'un rehaussement de la TVA ainsi que les
manifestations populaires ayant conduit a la révision de la loi des
finances 2005 sont la pour le témoigner.
La fiscalité étant un domaine complexe surtout
pour un pays en voie de développement comme le Niger, nous devons faire
un survol théorique de sa relation avec la construction de l'Etat-Nation
ainsi qu'avec l'évolution et la croissance économique. En outre,
nous avions procédé a une mise en paralléle de
l'évolution de la fiscalité en France et au Niger en raison des
liens coloniaux ayant caractérisé les rapports entre les deux
pays. Enfin, nous avions procédé a une mise en relief des
contraintes auxquelles est confronté le systeme fiscal nigérien
ainsi que les mesures et stratégies visant a rehausser le niveau des
recettes fiscales. Pour parvenir a des résultats tangibles, une
réelle volonté politique doit se manifester pour non seulement
mettre en oeuvre les directives et recommandations de l'UEMOA, mais aussi
trouver des solutions plus locales pouvant s'appliquer a un domaine comme celui
de l'agriculture dans une vision globale de développement
économique et social.
Par ailleurs, nous devons de signaler que ce travail a
été effectué essentiellement a partir d'une documentation
assez modeste sur les données quantitatives de la situation fiscale au
Niger, particuliérement en ce qui concerne les périodes d'avant
1990. Dans l'impossibilité de nous rendre sur le terrain, nous avions
engagé un documentaliste3 sur place pour effectuer la
collecte des données de base dont nous avions besoin pour rédiger
ce mémoire. Mais, les recherches sur Internet ont été des
plus déterminantes dans la rédaction de ce travail avec quelque
fois le défaut de ne pas trouver les références exactes
sur les textes et les données que nous trouvons. Aussi, en terme de
contraintes dans la réalisation de ce travail, c'est surtout certaines
contradictions dans les données que nous trouvons, en ce sens qu'il est
souvent difficile de trouver les mêmes informations d'une source a une
autre.
3 Nous tenons a remercier ici Monsieur Laoualy Boukari
pour son précieux concours.
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