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Transports routiers et intégration des états de l'UEMOA

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par Tchoou Adong NOYOULEWA
Ecole Nationale d'Administration du Togo - Diplôme du Cycle III de l'ENA 2009
  

Disponible en mode multipage

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    PRESIDENCE DE LA REPUBLIQUE REPUBLIQUE TOGOLAISE

    Travail - Liberté - Patrie

    MINISTERE DE LA FONCTION PUBLIQUE ET DE LA REFORME ADMINISTRATIVE

    ECOLE NATIONALE D'ADMINISTRATION BP : 64, Tél. : 00 (228) 221 70 46

    e-mail : enatogo@ids.tg

    Lomé - TOGO

    MEMOIRE POUR L'OBTENTION DU DIPLOME DU CYCLE III
    DE L'ENA

    Option : DIPLOMATIE

    TRANSPORTS

    INTEGRATION

    ET

    ROUTIERS

    DES ETATS

    DE

    FUEMOA

    Présenté et soutenu par : NOYOULEWA Tchoou Adong

    :

    Sous la direction de

    M. KEREZOUE Badabadi

    Docteur en Science Politique,

    Directeur des Affaires Politiques au Ministère des Affaires Etrangères et de l'Intégration Régionale.

    Promotion 2007-2009

    AVERTISSEMENT

    4 L~ENA N~ENTEND DONNER AUCUNE APPROBATION
    NI IMPROBATION AUX OPINIONS EMISES DANS CE
    MEMOIRE. ELLES DOIVENT ETRE CONSIDEREES
    COMME PROPRES A LEUR AUTEUR. >>

    LA DIRECTION

    NOYOULEWA T. Adong (2009) | Transports routiers et intégration des Etats de l'UEMOA

    2

    A Majuitiivê, mon fits lien-aima

    REMERCIEMENTS

    Au terme de ce travail, je tiens à remercier certaines personnes pour le rôle qu'elles y ont joué. Il s'agit de :

    - mon Directeur de mémoire qui, en dépit de ses occupations, a su trouver du temps pour orienter ce travail ;

    - mes parents qui ont dû se lasser de ma volonté de faire toujours plus ;

    - tous mes enseignants à l'ENA ainsi que l'administration de cette école pour la disponibilité et la rigueur dans le travail de tous les jours ;

    - mes collègues de promotion. Je souhaite à tous une très belle carrière dans la diplomatie togolaise et internationale ;

    - tous les miens, qu'ils le soient par naissance ou devenus par affection. Un merci particulier et intime à eux ;

    - tous ceux dont le nom ne figure pas dans ce document par ignorance ou par pudeur ;

    - M. OLADOKOUN David qui pour nous est devenu au fil du temps et des évènements plus qu'un enseignant mais un parent et un guide dans la vie de tous les jours.

    RESUME

     
     
     

    NOYOULEWA T. Adong (2009) | Transports routiers et intégration des Etats de l'UEMOA

    4

    L'analyse des différentes théories d'intégration révèle que l'UEMOA vise la réalisation d'une union économique et monétaire ayant pour fondement l'union douanière et la libre circulation des personnes, des biens et des services. Dans cette marche vers le développement et plus encore vers l'intégration, les transports routiers apparaissent comme le support physique, mieux le facteur déterminant aux yeux des populations qui les utilisent à 95% pour y assurer leur mobilité et celle des autres facteurs de production. Or, l'espace est soit faiblement, soit inégalement doté en infrastructures de transports routiers. Là où elles existent, les transports subissent le coup de leur mauvais état ou des pratiques anormales qui s'identifient aux barrières non tarifaires.

    C'est pourquoi une nouvelle approche peut être définie dans la gestion de la route en mettant un accent particulier sur tous les usagers, notamment les acteurs privés et les entités décentralisées. Cette approche participative vise à faire en sorte que les populations s'approprient la gestion des infrastructures de transports. Pour y arriver, il y a lieu d'harmoniser les politiques sectorielles, notamment le volet aménagement du territoire.

    Mots-clés: Transports routiers, réseau routier, intégration, frontière, développement.

    ABSTRACT

    The analysis of integration theories reveal that UEMOA aims to realize monetary and economic union which should take place on costums union and services, goods and persons circulation. On the way to its development and integration, trucking appears like the physic support, better, the main factor which is using by among 95% of the population to assure their mobility and the movement of their production facts. But this space is either weakly or unequally equip of roads. When roads exist, trucking involve their poor quality and some abnormal practices.

    Therefore, a new approach should be developing so that giving an important place to the other actors of the road like private actors and local collectivities. This approach aims to make so that population will appropriate themselves the question of road management. In view of attending this goal, sectorial politics have to be harmonize such us spatial area developing.

    Key words: Trucking, road network, integration, border, development.

    LISTE DES SIGLES, ACRONYMES ET ABREVIATIONS

    BCEAO : Banque Centrale des Etats de l'Afrique de l'Ouest BOAD : Banque Ouest-Africaine de Développement

    CEA : Commission Economique des Nations Unies pour l'Afrique CEAO : Communauté Economique de l'Afrique de l'Ouest

    CEDEAO : Communauté Economique des Etats de l'Afrique de l'Ouest CEEAC : Communauté Economique des Etats de l'Afrique Centrale CEMAC : Communauté Economique et Monétaire de l'Afrique Centrale CER : Communauté Economique Régionale

    CFA : Communauté Financière Africaine

    DATC : Département de l'Aménagement du Territoire Communautaire et des Télécommunications DGTP : Direction Générale des Travaux Publics

    FER : Fonds d'Entretien Routier

    GARI : Fonds de Garantie des Investissements Privés en Afrique de l'Ouest

    IDH : Indice de Développement Humain

    NEPAD : Nouveau Partenariat pour le Développement de l'Afrique OPA : Observatoire des Pratiques Anormales

    OUA : Organisation de l'Unité Africaine

    PACITR : Programme d'Actions Communautaires d'Infrastructures et des Transports Routiers PER : Politique Economique Régionale

    PIB : Produit Intérieur Brut

    PNB : Produit National Brut

    PRC : Pistes Rurales Classées

    PRNC : Pistes Rurales Non Classées

    PUFS : Projet d'Utilisation des Fonds Suisses

    RI : Routes d'Interconnexion

    RIE : Routes Inter-Etats

    RNNR : Routes Nationales Non Revêtues

    RNR : Routes Nationales Revêtues

    SIG : Système d'Information Géographique

    SYSCOA : Système Comptable Ouest-Africain

    TEC : Tarif Extérieur Commun

    UDEAC : Union Douanière et Economique de l'Afrique Centrale UE : Union Européenne

    UEMOA : Union Economique et Monétaire Ouest-Africaine UMOA : Union Monétaire Ouest-Africaine

    VU : Voirie Urbaine

    SOMMAIRE

    INTRODUCTION GENERALE . . 01

    1ière Partie : LA CONSTRUCTION DE L'ESPACE COMMUNAUTAIRE ET LES DIFFICULTES INHERENTES AUX TRANSPORTS ROUTIERS 05

    Chapitre 1 : Historique et objectifs de l'intégration sous-régionale dans l'espace

    UEMOA 07

    Section 1 : Historique de l'intégration sous-régionale en Afrique de l'ouest 07

    Section 2 : Le cadre institutionnel de l'intégration sous-régionale dans l'UEMOA 12

    Chapitre 2 : Etat des lieux des transports et du réseau routiers dans l'espace

    UEMOA 19

    Section 1 : Eléments d'analyse du réseau routier au sein de l'UEMOA ... 19

    Section 2 : Eléments d'analyse des transports routiers communautaires .. 23

    2ième Partie : ROLE DES TRANSPORTS ET DU RESEAU ROUTIERS DANS LE
    PROCESSUS DE L'INTEGRATION DES ETATS DE L'UEMOA 32

    Chapitre 1 : Transports et réseau routiers : véritables outils d'intégration et de développement dans l'espace UEMOA 34 Section 1 : Rôle des transports et du réseau routiers dans la régionalisation de l'espace UEMOA 34 Section 2 : Rôle des transports et du réseau routiers dans le développement des Etats de l'UEMOA 38

    Chapitre 2 : Comment viabiliser les infrastructures routières dans l'espace

    UEMOA ? 46

    Section 1 : Sur les plans institutionnel et des infrastructures routières 46

    Section 2 : Les défis de la fluidité et de la sécurité des transports 50

    CONCLUSION GENERALE 58

    INTRODUCTION GENERALE

    L'évolution de l'histoire des hommes a été de tout temps marquée par leur volonté de vivre ensemble. Ainsi, au Néolithique, suite à la découverte de l'agriculture, les hommes se sédentarisent. Les familles, unités de base de toute organisation, se mettent ensemble pour former des groupements plus importants. Du coup, on assiste à l'apparition de nouveaux modes d'organisation pour gérer les affaires collectives.

    Au Moyen âge, l'Afrique offre au monde de grands Empires à l'instar de ceux du Ghana, du Mali et de Songhaï. Leur rayonnement est allé au-delà de leurs aires géographiques. Bien plus tard, la fin de la colonisation fait place à de nouveaux Etats, qui héritent des frontières issues du partage du « gâteau africain » réalisé lors de la Conférence qui a eu lieu à Berlin du 15 novembre 1884 au 26 février 1885 ou d'autres arrangements entre les puissances colonisatrices.

    A Bandoeng en 1955 puis à Addis-Abeba en 1963, les jeunes Etats africains militent pour des regroupements entre eux sans jamais perdre de vue l'intangibilité des frontières héritées de la décolonisation. Le panafricanisme connaît toutefois, déjà à sa proclamation, des soubresauts en ce qui concerne le modèle à suivre. Deux thèses s'opposent et prennent corps, l'une autour des Etats « modérés » (groupe de Monrovia) et l'autre autour des Etats « révolutionnaires » (groupe de Casablanca)1. C'est dans ce contexte que naît l'Organisation de l'Unité Africaine (OUA) le 25 mai 1963 à Addis-Abeba.

    Par ailleurs, dans les années 70, on assiste à la naissance d'ensembles sous-régionaux comme la Communauté Economique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO), l'Union Douanière des Etats de l'Afrique Centrale (UDEAC), etc. qui sont des entités conçues sur une base géographique. Dans cette logique, on assiste dans les années 90 à la naissance des unions économique, monétaire et douanière.

    La chute du Mur de Berlin et la dislocation de l'empire soviétique à la fin des années 80 ont entraîné, à l'échelle mondiale, une recomposition des ensembles politiques et socioéconomiques. En Europe, bon nombre de pays se sont regroupés au sein de l'Union Européenne (UE), héritière de la Communauté Economique Européenne (CEE)2. En Afrique,

    1 Allusion faite au Groupe de Casablanca qui veut réaliser l'unité du continent en liquidant le colonialisme et le néo-colonialisme. Il est caractérisé par son progressisme et son hostilité au groupe réformiste. Le Groupe de Monrovia, réformiste est constitué en mai 1961. C'est lui qui, à Lagos en 1962 puis à Addis-Abeba en 1963 fonde l'OUA après des concessions faites avec le groupe révolutionnaire dit de Casablanca.

    2 Le 1er juillet 1967, le Traité instituant la CEE entre en vigueur à la suite des mutations voulues pour adapter la Communauté Européenne de Charbon et d'Acier (CECA) du 25 juillet 1952. En 2008, l'UE compte 27 pays membres.

    l'Union Africaine (UA) qui est née le 12 juillet 2000 à Lomé résulte de la volonté des dirigeants de consacrer les bases du panafricanisme. Selon la Charte de l'OUA et l'Acte Constitutif de l'UA, l'un des idéaux de l'unité africaine est l'intégration régionale qui doit désormais sous-tendre tout processus de développement. Il est alors évident que des initiatives collectives à l'échelle continentale ou sous-régionale sont souhaitables. L'adoption du Nouveau Partenariat pour le Développement de l'Afrique (NEPAD) par les Chefs d'Etat et de Gouvernement illustre cette nécessité. De ce point de vue, certains pays africains pauvres optent pour une intégration régionale, mieux, sous-régionale qui s'assimile à la formation, sur le continent, des regroupements sous-régionaux, coordonnateurs dans une large mesure des politiques macro-économique et monétaire : UEMOA, CEMAC, CEEAC, etc.

    En Afrique de l'ouest, le Traité de Dakar du 10 janvier 1994 met en place l'Union Economique et Monétaire des Etats de l'Afrique de l'Ouest (UEMOA) qui complète l'Union Monétaire de l'Afrique de l'Ouest (UMOA)3 et remplace la CEAO (Communauté Economique d'Afrique de l'Ouest), qui a été volontairement dissoute le 15 mars 1994, afin d'éviter qu'elle ne fasse doublon avec la nouvelle entité ouest-africaine. L'ensemble des institutions de la CEAO seront liquidées et reversées en bonne partie dans le patrimoine de l'UEMOA. Cette nouvelle structure qui regroupe, comme l'UMOA, les pays ayant en partage l'usage du franc de la Communauté Financière Africaine (CFA) en Afrique de l'ouest cohabite avec la CEDEAO ou la concurrence. En tout état de cause, elle prône l'égalité souveraine des Etats membres et travaille à la mise en place d'instruments communautaires qui visent l'intégration véritable basée sur la libre circulation des personnes, des biens et des services.

    Une telle option suppose que la régionalisation passe par la construction d'infrastructures de transport viables. Lorsqu'on sait que dans cette partie du continent, le niveau de vie des populations ne leur permet pas d'opter pour le transport aérien et qu'il n'existe quasiment pas de lignes ferroviaires, fluviales ou maritimes, on comprend aisément que la route terrestre soit non seulement un moyen de transport, mais davantage un outil intégrateur. KOITA Y.4 affirme que dans l'ensemble de l'espace UEMOA, 95% du transport intérieur sont assurés par la route. Par ailleurs, outre la voie aérienne, la quasi-totalité des pays de cet espace ne sont liés que par la route.

    3 L'UMOA est créée le 12 mai 1962 par les Etats fondateurs de la BCEAO (Côte d'Ivoire, Bénin, Burkina Fao, Mauritanie, Niger, Sénégal). En 1963, le Togo adhère à l'Union et la demande du Mali en 1967 n'est effective que le 1er juin 1984.

    4 KOITA Y. (2005) : La situation générale des opérations de transport sur les corridors de la CommunautéEconomique Des Etats de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO), page 6.

    Il résulte de ce qui précède que la route est un facteur déterminant dans la libre circulation des personnes et des biens dans l'espace communautaire et qu'une importance de plus en plus accrue doit lui être accordée. A cet égard, l'analyse des transports routiers en rapport avec l'intégration des pays de l'UEMOA devient une préoccupation légitime et, sans dénier le rôle de tous les autres moyens de transports dans le développement socioéconomique des Etats, met en relief l'état actuel des transports routiers communautaires, les contraintes qui s'opposent à leur optimisation et les perspectives qui peuvent sous-tendre leur rentabilisation.

    L'objectif général de notre travail est de mener une réflexion sur le développement durable en Afrique de l'ouest, mieux, dans les pays membres de l'UEMOA en lien direct avec la mise en place des infrastructures routières et le processus de l'intégration. Il permet de montrer la place et le rôle du réseau et des transports routiers dans la politique d'intégration régionale de l'UEMOA et, par conséquent, dans le développement durable de ses pays membres tel que le Togo.

    De cet objectif général découlent plusieurs autres. Ce sont des objectifs spécifiques. Il

    s'agit :

    - d'analyser les différentes conceptions de l'intégration sous-régionale,

    - de présenter l'institution sous-régionale dans sa structure et son fonctionnement, - de présenter l'état actuel de la route dans l'espace communautaire,

    - de ressortir les différents enjeux et contraintes de la mise en place d'un réseau routier rentable dans l'UEMOA,

    - de présenter l'importance de la route dans le processus d'intégration et de développement des pays de l'Union.

    Partant de ces objectifs, il se pose les questions suivantes : quels sont les enjeux et les contraintes de l'optimisation du réseau et des transports routiers sur l'intégration sousrégionale et le développement des pays de l'UEMOA? Sous quelles formes se présentent les contraintes liées à la libre circulation des personnes et des biens sur les routes de l'espace communautaire ? Quels sont les obstacles à surmonter en vue de rentabiliser les transports routiers dans les huit pays de l'environnement d'étude ? Que peut-on attendre de l'optimisation des infrastructures routières sur les plans sécuritaire, politique et économique en matière d'aménagement du territoire communautaire?

    Pour répondre à ces interrogations et atteindre les objectifs sus-présentés, une approche méthodologique s'impose. Elle s'articule autour de deux axes.

    D'une part, la recherche documentaire permet d'examiner les différentes théories qui gouvernent l'analyse des questions d'intégration en Afrique et la réalité de leur application dans l'espace UEMOA. Dans ce cadre, outre les documents généraux sur la méthodologie de recherche, nous nous intéresserons aux rapports d'activités et aux données chiffrées de la Commission de l'UEMOA, particulièrement du Département de l'Aménagement du Territoire Communautaire, des Transports et des Télécommunications (DATC) et de l'Observatoire des Pratiques Anormales (OPA).

    D'autre part, une analyse comparative et statistique du processus d'intégration dans l'espace communautaire permettra, sur la base des données relatives à la longueur du réseau routier, à sa densité et à l'évolution des échanges intra-régionaux, de montrer la faible dotation de l'Union en routes. Il s'agit, sur la base d'exemples précis, d'analyser l'effectivité de la libre circulation des personnes et des biens dans la zone d'étude dans le cadre de la politique d'aménagement du territoire communautaire. En ce sens, à partir des réalités vécues au Togo par exemple, il s'agira de montrer l'importance que revêtent le réseau routier et les transports terrestres dans les processus d'intégration et de développement des huit Etats de l'Union.

    En définitive, notre démarche méthodologique conduit à donner des réponses provisoires à nos questions. Ces réponses qui s'identifient aux hypothèses de recherche se regroupent en trois. D'abord, dans un espace régional où les transports routiers sont le principal moyen de communication et le seul véritablement accessible à toutes les couches sociales, l'optimisation du réseau et des transports routiers favorise l'intégration régionale effective. En outre, l'optimisation des infrastructures routières dans l'espace UEMOA favorise le développement socio-économique des pays membres. Enfin, la création d'un réseau routier viable et efficace suppose que les Etats doivent surmonter, entre autres contraintes majeures, les contraintes liées à la sécurité, à la politique et à l'économie.

    Notre travail portera respectivement sur la construction de l'espace communautaire et les difficultés inhérentes aux transports routiers (1ière Partie) puis sur l'importance des transports routiers dans les processus de développement et d'intégration des Etats de l'UEMOA (2ième Partie).

    Première partie :

    LA CONSTRUCTION DE L'ESPACE
    COMMUNAUTAIRE ET LES DIFFICULTES
    INHERENTES AUX TRANSPORTS ROUTIERS

    Suite à la résolution 1514 de l'Assemblée Générale des Nations-Unies portant sur l'octroi de l'indépendance aux peuples coloniaux, adoptée le 14 décembre 1960, la majorité des pays africains a accédé à la souveraineté internationale avec un très lourd handicap. En effet, les frontières de ces derniers sont toutes issues des décisions du concert européen qui, réuni du 15 novembre 1884 au 26 février 1885 à l'invitation du chancelier allemand Otto Von BISMARK, décida la balkanisation, communément appelée partage de l'Afrique. Cette situation a fait que les frontières internationales des Etats africains correspondent aux limites administratives des anciennes colonies.

    On constate alors que la plupart de ces nouveaux Etats sont de dimension modeste, tant sur le plan démographique, territorial qu'économique. Enfermés dans un carcan d'espace socio-économique étroit, les Etats africains se rendent compte de la nécessité de dépasser le cadre de leur souveraineté nationale. Bien que de nombreux efforts aient été fournis en faveur de l'unité africaine en général, force est de constater que le chemin qui reste à parcourir est encore long du fait de l'état des infrastructures routière, notamment.

    Dans une telle perspective, l'intégration régionale apparaît comme la réponse la plus adéquate, au-delà de l'Etat-nation postcolonial, au défi de développement. L'analyse de la construction de l'espace communautaire et des difficultés inhérentes aux transports routiers au sein de l'espace UEMOA exige de faire l'historique de cette institution et de présenter la nécessité de l'intégration sous-régionale en Afrique de l'ouest (Chapitre 1) avant de dresser l'état des lieux des transports et du réseau routiers dans la zone d'investigation (Chapitre 2).

    Chapitre 1 : HISTORIQUE ET OBJECTIFS DE L'INTEGRATION SOUS-REGIONALE DANS L'ESPACE UEMOA

    De création récente, l'UEMOA est née des exigences de l'heure. En effet, suite à la dévaluation du franc CFA en 1994, les pays qui partagent l'usage de cette monnaie décident de mettre ensemble leurs ressources pour devenir plus compétitifs dans le cadre de la mondialisation. Le processus qui a conduit à la création de l'UEMOA et de la CEMAC5 est né lors de la réunion des ministres de la zone franc tenue à Paris en 1990. Le présent chapitre vise à mieux circonscrire les différentes conceptions et les contours historiques de l'intégration sous-régionale en Afrique de l'ouest (Section 1) et permet de présenter les raisons qui justifient la mise en place de cette institution (Section 2).

    Section 1 : Historique de l'intégration sous-régionale en Afrique de l'ouest

    L'historique de l'intégration permet de parcourir les principales acceptions de l'intégration régionale (Paragraphe 1) et les étapes importantes qui ont jalonné la construction de l'espace communautaire à l'échelle de l'UEMOA (Paragraphe 2).

    Paragraphe 1 : Les différentes acceptions de l'intégration régionale

    Elles s'assimilent aux grandes théories qui régissent les regroupements régionaux dans le temps et dans l'espace. Le concept d'intégration présente divers contours, qui se définissent à la fois par la forme et la dimension qu'on lui donne. On distingue ainsi l'intégration économique de l'intégration politique. En réalité, ce sont les travaux de VINER J. portant sur les effets de l'union douanière sur l'échange international qui ont donné un sens classique de la notion. Selon lui, deux conséquences peuvent découler de l'institution d'un tarif extérieur commun. Il s'agit d'une part du détournement des échanges au détriment des non membres de l'union et d'autre part d'un effet de création qui se perçoit à travers le développement des échanges au bénéfice des pays membres de l'union. Ce paragraphe sera axé autour de la diversité des théories de l'intégration (A) et de leur application à l'UEMOA (B).

    A. Une diversité de théories

    HASS E. lui, définit l'intégration comme « le processus par lequel les acteurs politiques dans plusieurs cadres nationaux distincts sont amenés à transférer leurs obédiences, attentes et activités politiques vers un nouveau centre dont les institutions possèdent ou

    5 La Communauté Economique et Monétaire de l'Afrique Centrale (CEMAC) est créée en 1994 et regroupe le Cameroun, le Tchad, la République Centrafricaine, le Gabon, la Guinée Equatoriale et le Congo-Brazzaville.

    exigent une juridiction sur les Etats nationaux préexistants». Dans une approche plus économique de l'intégration, LINDBERG L. définit l'intégration économique comme un « acte traduisant le consentement entre deux ou plusieurs nations sur des objectifs communs et sur les politiques qu'elles se sont assignées».

    De ce qui précède, l'on peut déduire que l'intégration économique est à la fois un processus et un état6. Dans ce même ordre d'idées, on peut dire que l'intégration régionale n'est pas seulement un simple acte de construction d'un espace politique ou économique, encore moins d'un marché, mais un profond processus de modification et de transformation structurelle qui s'opère au sein d'un espace régional formé de plusieurs pays, et qui est en mesure de déclencher le développement social et économique de ces pays de manière durable.

    A l'évidence, l'intégration ou la régionalisation a un caractère multiforme et multidimensionnel. On peut ainsi différencier une entente ou une coopération (politique, économique, commerciale, diplomatique, ...) d'une véritable intégration qui résulte des pratiques des acteurs économiques, financiers, commerciaux, culturels ou technologiques. En lien direct avec cette dernière approche, on peut identifier selon HUGON P. quatre principales conceptions de la régionalisation : libérale, volontariste ancienne, nouvelle économie industrielle, d'économie géographique.

    La conception libérale s'articule autour de la dimension commerciale de l'intégration. Sur cette base, l'intégration commerciale est assimilée à la libéralisation des échanges et des facteurs de production au regard de la concurrence mondiale. Dans cette optique, intégrer, c'est réduire les barrières nationales et se rapprocher du marché mondial.

    La conception volontariste ancienne ou protectionniste prend forme autour de la dimension économique. Les tenants de cette conception considèrent l'intégration régionale comme un processus de déconnexion visant à protéger les économies intégrées de la concurrence mondiale. Elle revient à protéger un système de production régionale par la mise en place de politiques convergentes.

    La conception de la nouvelle économie industrielle met l'accent sur la dimension productive. Elle conçoit l'intégration productive comme la mise en place d'interconnexions par les acteurs en termes de projets sectoriels, de réseaux transnationaux, d'internationalisation des relations dans un espace régional.

    6 Lire BALASSA B. & STOUTJESDIJ K. (1978): Economic integration among developing countries in Journal of Common Markets studies, Vol. 14.

    L'économie géographique, de son côté, met l'accent sur la dynamique spatiale de l'intégration. Selon cette conception, l'intégration se caractérise par les effets d'agglomération et de polarisation. Du fait de la mondialisation, c'est un processus qui permet d'une part de réduire les distances géographiques en rapport avec les nouvelles technologies de l'information et de la communication, et d'autre part, de construire un marché régional compétitif. La réduction des distances géographiques favorise le développement des échanges intracommunautaires. Pour que ces échanges soient effectifs, il faut des infrastructures de communications intégratrices.

    B. L'application théorique à l'UEMOA

    Le soubassement de toute théorie de l'intégration régionale est la mobilité des facteurs de production, des biens et des services. Il se pose alors, en dépit de la diversité des acceptions liées à la notion de l'intégration, la question unique qui pose la problématique de l'insertion spatiale des sociétés et surtout de la disponibilité des outils de mobilité. ROBSON P. est plus affirmatif sur ce point quand il avance que, quelle que soit sa forme ou sa dimension, l'intégration régionale implique nécessairement une libre circulation des facteurs de production, ainsi que des biens et des services.

    L'UEMOA est guidée dans sa construction par la logique de l'union économique qui est un marché commun accompagné d'une harmonisation ou d'une coordination des politiques économiques, monétaires, financières et sociales des pays membres. En ce sens, la mise en place du Tarif Extérieur Commun (TEC) plafonné à 22% des droits d'entrée dans l'Union fait penser à la conception volontariste ancienne ou protectionniste de l'intégration. Par ailleurs, l'institution d'une coordination des politiques sectorielles nationales par la mise en oeuvre d'actions et de politiques communes dans les domaines tels que l'aménagement d'un territoire communautaire, l'agriculture, l'environnement, les transports, les infrastructures. rappelle la conception de l'économie géographique axée sur l'intégration spatiale. Dans cette optique, la franchise totale de taxes pour les produits de l'agriculture, de l'élevage, de l'artisanat et leur réduction de 30% sur les produits industriels agréés originaires de l'Union permet de se référer à la conception libérale de l'intégration. En ce qui concerne la conception de la nouvelle économie industrielle, elle trouve son application au sein de l'espace UEMOA dans la politique industrielle commune lancée en décembre 1999.

    Il est évident que les théories telles qu'énoncées par HUGON P. ne sont ni exclusives, ni exhaustives. Il convient de dire que, dans la pratique, leur application tient plus compte des réalités politiques internes et externes de l'espace. Elles peuvent en ce sens se fondre ou être complétées pour s'adapter au contexte. L'union monétaire peut donc, contrairement à ce que

    l'on pense au vu de l'exemple européen, précéder l'intégration économique. D'ailleurs, l'UMOA a précédé à bien des égards l'UEMOA qui met l'accent sur une intégration économique et commerciale7. Cette mutation mérite alors d'être analysée sous forme de l'historique de la construction de l'espace communautaire.

    Paragraphe 2 : Les grandes étapes de l'intégration au sein de l'UEMOA

    L'UEMOA couvre aujourd'hui un ensemble de huit (8) Etats8, d'une superficie de 3 509 610 km2 pour une population de 76 millions d'habitants. Cinq (5) objectifs guident ses actions. L'UEMOA a l'ambition de « renforcer la compétitivité des activités économiques et financières des Etats membres dans le cadre d'un marché ouvert et concurrentiel et d'un environnement périodique rationalisé et harmonisé ». Mais, pour mieux cerner les contours de cette ambition, il y a lieu de revisiter le passé (A) afin de déterminer les réelles motivations qui sous-tendent sa réalisation (B).

    A. Les origines anciennes de l'UEMOA

    Le 12 mai 1962, la Côte d'Ivoire, le Sénégal, le Niger, le Bénin, le Burkina Faso et la Mauritanie, Etats fondateurs de la Banque Centrale des Etats de l'Afrique de l'Ouest (BCEAO) créent l'UMOA. L'adhésion du Togo à cette Union se fait en 1963 puis celle du Mali est acceptée le 1er juin 1984. L'Union, forte de sept membres, est caractérisée par l'unité monétaire (le Franc de la Communauté Financière Africaine, F CFA) dont l'émission est confiée à la BCEAO qui prête, par ailleurs, son concours aux économies nationales.

    L'année 1973 sera déterminante dans l'évolution de l'Union. En effet, le 09 juillet, la Mauritanie se retire tandis que le 14 novembre, un nouveau traité est signé par les autres Etats membres. Le 04 décembre, un accord de coopération entre l'UMOA et la République Française sur la base de quatre principes est conclu. Il s'agit de la convertibilité garantie par le trésor français, de la fixité des parités, de la libre transférabilité et de la centralisation des réserves de change.

    La convertibilité garantie par le trésor français fait appel à la convertibilité des monnaies émises par la BCEAO et la BCEAC qui sont garanties sans limite par le trésor français. Les monnaies de la zone sont convertibles entre elles, à des parités fixes, sans limitation de montants, ce qui rappelle la fixité des parités. Quant à la libre transférabilité, elle suppose que les transferts sont libres à l'intérieur de la zone, qu'il s'agisse des transactions

    7 Il faut dire que l'UE est née de la transformation de la Communauté Economique de Charbon et d'Acier (CECA). En Afrique de l'Ouest, l'UMOA créée en 1962 avait pour vocation la gestion de la monnaie (CFA). La dimension économique s'est ajoutée seulement en 1994 avec la création de l'UEMOA.

    8 Il s'agit du Bénin, du Burkina Faso, de la Côte d'Ivoire, de la Guinée Bissau, du Mali, du Niger, du Sénégal et du Togo.

    courantes ou de transfert de capitaux. Enfin, au nom de la centralisation des réserves de change, en contrepartie des échanges illimités garantis par la France, la BCEAO est tenue de déposer au moins 65% de ses réserves de change, à l'exception des sommes nécessaires à sa trésorerie courante et de celles relatives à ses transactions avec le Fonds Monétaire International (FMI), auprès du trésor français, sur le compte d'opération ouvert en son nom depuis 1975.

    Aux termes de cet accord, la présence française au sein du Conseil d'Administration de la banque centrale est réduite puis en 1978, son siège quitte Paris pour Dakar.

    B. La mise en place de l'UEMOA

    Le 10 janvier 1994, le Traité de Dakar est signé pour compléter celui de l'UMOA. Il institue l'UEMOA et fait de la BCEAO et de la Banque Ouest Africaine de Développement (BOAD) des institutions spécialisées autonomes de la nouvelle structure. Dès l'entrée en vigueur du Traité de Dakar, le 1er août 1994, différents instruments sont mis en place pour la réalisation des objectifs. En 1997, la Guinée-Bissau en devient le huitième membre.

    L'adoption de divers textes conduit, dans un premier temps, à l'entrée en vigueur, le 1er juillet 1996, d'un régime tarifaire préférentiel transitoire suivi le 1er janvier 1998, du Système Comptable Ouest Africain (SYSCOA) et de l'Indice Harmonisé des Prix à la Consommation (IHPC). L'Union veut assurer la convergence des performances et des politiques économiques des Etats membres par l'institution d'une procédure de surveillance multilatérale et créer entre eux, un marché commun basé sur la libre circulation des personnes, des biens et le droit d'établissement des personnes exerçant une activité indépendante ou salariée ainsi que sur un tarif extérieur commun et une politique commerciale commune. Elle entend harmoniser, pour un bon fonctionnement du marché commun, les législations des Etats membres et, particulièrement, le régime fiscal9.

    Pour ce faire, l'UEMOA a institué une coordination des politiques sectorielles nationales par la mise en oeuvre d'actions et de politiques communes dans les domaines tels que l'aménagement d'un territoire communautaire, l'agriculture, l'environnement, les transports, les infrastructures, etc. L'adoption, entre décembre 1999 et décembre 2000, de la politique industrielle commune, du pacte de convergence, de stabilité, de croissance et de solidarité, entre les Etats membres, du code de transparence dans la gestion des finances publiques, du document portant réforme des marchés publics et la politique minière commune ont lancé les jalons d'un véritable contexte économique sous-régional. On peut aussi noter

    9 Se référer à l'article 4 du Traité Révisionnel de l'UEMOA adopté le 29 janvier 2003 à Dakar.

     

    NOYOULEWA T. Adong (2009) | Transports routiers et intégration des Etats de l'UEMOA

    18

    l'entrée en vigueur du Tarif extérieur commun (TEC), le lancement du Programme Economique Régional (PER), dont le financement est estimé à plus de 800 milliards de F CFA et qui augure une ère nouvelle dans l'espace UEMOA selon la logique « Huit Etats, un destin commun ».

    Section 2 : Le cadre institutionnel de l'intégration sous-régionale dans l'UEMOA

    Il s'agit de passer en revue les structures de l'UEMOA et ses objectifs (Paragraphe 1) avant d'analyser les dispositions institutionnelles et juridiques dont elle se dote en vue d'atteindre ses objectifs (Paragraphe 2).

    Paragraphe 1 : L'UEMOA : un ensemble sous-régional aux objectifs multiples

    La construction de l'espace communautaire au sein des huit pays de l'UEMOA passe par la mise en place de structures fonctionnelles (A) ayant pour mission de travailler à la réalisation des objectifs définis par le Traité (B).

    A. La structure et le fonctionnement des organes de l'UEMOA

    Le fonctionnement de l'UEMOA s'articule autour de la Présidence de la Commission et des Départements dirigés, chacun, par un Commissaire, nommé par son pays d'origine. Le Président de la Commission veille à ce qu'à tout moment, la Commission exerce, avec l'efficacité voulue, la plénitude de ses fonctions, avec les prérogatives et responsabilités que lui confère le Traité. Les organes de direction, consultatifs, de contrôle juridictionnel, de contrôle parlementaire et les Institutions spécialisées autonomes participent également au système institutionnel.

    Les organes de direction rappellent d'abord la Conférence des Chefs d'Etat et de Gouvernement. Elle est l'autorité suprême de l'Union et tranche toute question n'ayant pu trouver de solution par accord unanime du Conseil des Ministres. Elle se réunit au moins une fois par an et prend ses décisions à l'unanimité (Article 5 du Traité de l'UMOA et Article 17 du Traité Révisionnel). Ensuite, le Conseil des Ministres définit la politique monétaire et de crédit de l'Union afin d'assurer la sauvegarde de la monnaie commune et de pourvoir au financement de l'activité et du développement économique des Etats membres. La BCEAO organise les séances du Conseil dont elle assure le Secrétariat10. Le Conseil se réunit au moins deux fois par an et prend ses décisions à l'unanimité (Article 6 du Traité de l'UMOA et

    10Voir l'article 3 du Traité Révisionnel : « Le Gouverneur de la BCEAO participe de plein droit, avec voix consultative, aux réunions de la Commission. Il peut se faire représenter. Il peut demander l'inscription d'un point à l'ordre du jour ou suggérer au Conseil d'inviter la Commission à prendre une initiative dans le cadre de sa mission ».

    Articles 20 à 24 du Traité Révisionnel). Enfin, la Commission de l'UEMOA exerce, en vue du bon fonctionnement et dans l'intérêt général de l'Union, le pouvoir d'exécution, délégué par le Conseil des Ministres. Elle transmet à la Conférence et au Conseil les recommandations et avis qu'elle juge utiles à la préservation et au développement de l'Union, exécute le budget de l'Union et peut saisir la Cour de Justice en cas de manquement des États membres aux obligations qui leur incombent en vertu du droit communautaire. Il existe sept Départements au sein de la Commission. Le Département des politiques économiques (i), le Département des politiques fiscales, douanières et commerciales (ii), le Département des fonds structurels et de la coopération internationale (iii), le Département du développement social (iv), le Département de l'aménagement du territoire, des infrastructures, des transports et des télécommunications (v), le Département du développement rural et de l'environnement (vi) et le Département de l'énergie, des mines, de l'industrie, de l'artisanat et du tourisme (vii). Ils siègent à Ouagadougou au Burkina Faso.

    Les Organes de contrôle juridictionnel font appel à la Cour de Justice et à la Cour des
    Comptes (Protocole Additionnel n°I). La Cour de Justice veille à l'interprétation uniforme du
    droit communautaire, à son application et juge, notamment, les manquements des Etats à leurs
    "obligations communautaires". Elle assure le respect du droit relativement à l'interprétation et
    à l'application du Traité, arbitre les conflits entre les Etats membres ou entre l'Union et ses
    agents. Elle est composée de juges, un par État, nommés pour un mandat de six ans
    renouvelable. Son siège est à Ouagadougou. La Cour des Comptes contrôle les comptes des
    organes de l'Union et la fiabilité des données budgétaires nécessaires à l'exercice de la
    surveillance multilatérale. Trois conseillers sont mandatés pour six ans renouvelables une fois.
    Les organes de contrôle parlementaire s'identifient au Comité Interparlementaire,
    embryon du futur Parlement de l'Union. Le Comité Interparlementaire joue un rôle consultatif
    et d'animation des débats sur l'intégration. Il reçoit le rapport annuel de la Commission et
    s'exprime sous forme de rapports ou de résolutions. Il préfigure le parlement de l'Union qui
    sera chargé du contrôle démocratique des organes de l'Union. Il compte 40 membres et se
    réunit au moins une fois par an. Son siège est à Bamako au Mali. Les membres du Parlement
    portent le titre de « Députés au Parlement de l'UEMOA ». Actuellement, ils sont désignés
    parmi les députés de leurs pays respectifs mais ils seront élus au suffrage universel direct,
    pour une durée de cinq ans, selon une procédure électorale qui sera déterminée par un acte
    additionnel de la Conférence, après consultation du Parlement. Le Parlement se réunit en deux
    sessions. Le nombre des Députés est fixé à cinq par Etat membre et la présidence du

    Parlement est exercée par un Député ressortissant de l'Etat qui assure la présidence de la Conférence.

    L'Organe consultatif est la Chambre Consulaire Régionale qui est le lieu privilégié de dialogue entre l'UEMOA et les principaux opérateurs économiques. La Chambre, créée par le Traité de l'Union, est chargée de réaliser l'implication effective du secteur privé dans le processus d'intégration de l'UEMOA. Chaque Etat y est représenté par sept (7) membres. Son siège est à Lomé au Togo.

    Les Institutions spécialisées autonomes sont au nombre de deux. Ce sont : La Banque Centrale des Etats de l'Afrique de l'Ouest (BCEAO) et la Banque Ouest Africaine de Développement (BOAD).

    La Banque Centrale des Etats de l'Afrique de l'Ouest (BCEAO), institut d'émission commun aux huit Etats membres de l'UEMOA, est un établissement public international dont le siège est fixé à Dakar. Outre l'émission des signes monétaires dans les Etats membres de l'Union dont elle a le privilège exclusif, la BCEAO a en charge la centralisation des réserves de devises de l'Union, la gestion de la politique monétaire des Etats membres de l'Union, la tenue des comptes des Trésors des Etats de l'Union, la définition de la loi bancaire applicable aux banques et aux établissements financiers.

    La Banque Ouest Africaine de Développement (BOAD) est l'institution commune de financement du développement des Etats de l'UEMOA. Elle est créée par Traité signé le 14 novembre 1973 par ses Etats membres. Conformément au Traité de l'UEMOA entré en vigueur le 1er août 1994, la BOAD est une institution spécialisée commune de l'Union. Elle concourt " en toute indépendance à la réalisation des objectifs de l'UEMOA sans préjudice des objectifs qui lui sont assignés par le Traité de l'UMOA". C'est un établissement public à caractère international qui a pour objet, aux termes de l'article 2 de ses Statuts, "de promouvoir le développement équilibré des Etats membres et de réaliser l'intégration économique de l'Afrique de l'Ouest," en finançant des projets prioritaires de développement. Sont membres de la BOAD et participent à son capital et à son administration: les membres titulaires d'actions de série A et les membres titulaires d'actions de série B11. Le capital souscrit, d'un montant de 350 milliards F CFA, est réparti entre les actionnaires de catégorie A et ceux de catégorie B à concurrence de 95,96 % et 4,04 % respectivement. La BOAD a en son sein trois structures spécialisées : Cauris Investissement SA, Fonds de Garantie des

    11 Les titulaires des actions de type A sont les Etats membres de l'UEMOA et la BCEAO alors que ceux qui détiennent les actions de type B sont la France, l'Allemagne, l'Union Européenne, la BAD et le Royaume de Belgique.

    Investissements Privés en Afrique de l'Ouest (GARI) et le Projet d'Utilisation du Fonds Suisse (PUFS).

    La structure ainsi présentée dans sa composition et son fonctionnement travaille au quotidien pour l'atteinte d'un certain nombre d'objectifs.

    B. Les objectifs visés par le Traité constitutif de l'UEMOA

    Au titre de l'article 4 du Traité Additionnel de 2003, « sans préjudice des objectifs définis dans le Traité de l'UMOA, l'Union poursuit, dans les conditions établies par le présent Traité, la réalisation des objectifs ci-après : renforcer la compétitivité des activités économiques et financières des Etats membres dans le cadre d'un marché ouvert et concurrentiel et d'un environnement juridique rationalisé et harmonisé (i), assurer la convergence des performances et des politiques économiques des Etats membres par l'institution d'une procédure de surveillance multilatérale (ii), créer entre les Etats membres un marché commun basé sur la libre circulation des personnes, des biens, des services, des capitaux et le droit d'établissement des personnes exerçant une activité indépendante ou salariée, ainsi que sur un tarif extérieur commun et une politique commerciale commune (iii), instituer une coordination des politiques sectorielles nationales, par la mise en oeuvre d'actions communes et, éventuellement, de politiques communes, notamment dans les domaines suivants : ressources humaines, aménagement du territoire, transports et télécommunications, environnement, agriculture, énergie, industrie et mines (iv), harmoniser, dans la mesure nécessaire au bon fonctionnement du marché commun, les législations des Etats membres et, particulièrement, le régime de la fiscalité (v). »

    Dans la pratique, la réalisation de l'objectif n°3 relatif à « la création entre les Etats membres d'un marché commun basé sur la libre circulation des personnes, des biens, des services, des capitaux et le droit d'établissement des personnes exerçant une activité indépendante ou salariée, ... », est confiée au Département de l'aménagement du territoire, des infrastructures, des transports et des télécommunications de la Commission. Pour ce faire, le Commissaire assure l'élaboration, la coordination et le suivi de politiques sectorielles communes de l'Union, dans les domaines de l'aménagement du territoire communautaire, du désenclavement des Etats membres, de la lutte contre les disparités régionales, de la mise en place des infrastructures de transport et des moyens de télécommunication.

    Dans l'ensemble, un arsenal juridique est mis en place pour conduire chaque Etat membre au respect des engagements communautaires ou les contraindre à réaliser les

    objectifs collectifs. Il s'agit d'un ensemble de normes dont la finalité est la réalisation de l'intégration sous-régionale.

    Paragraphe 2 : Les moyens juridiques pour atteindre ces objectifs

    La mise en place d'une institution multilatérale communautaire passe par l'adoption d'un droit primaire. Il s'agit du Traité instituant l'UEMOA qui obéit aux règles du droit international conventionnel classique. Cela signifie que le Traité est négocié et signé, il est ensuite soumis à une autorisation de ratification par les parlements nationaux, et enfin à la publication au journal officiel des Etats parties. Une telle procédure diffère fortement de celle qui est utilisée pour le droit dérivé. C'est un ensemble de règles édictées par l'UEMOA pour amener les Etats à agir en sorte que les objectifs communautaires soient atteints. Selon leur portée, ces règles de droit dérivé peuvent être classées en normes de premier rang (A), et en normes de second rang (B) en rapport avec la latitude dont disposent les Etats à les mettre en pratique.

    A. Les normes de premier rang.

    Les actes prévus par le Traité de l'UEMOA sont, d'une part, le Traité lui-même et les actes additionnels (protocoles) qui viennent ultérieurement apporter certaines modifications, en s'incorporant à la norme suprême. Mais, d'autre part, il y a ce qu'on appelle les sources dérivées qui sont constituées des actes pris par les autorités de l'Union pour l'application du traité. Selon l'article 42 du Traité de l'UEMOA, première disposition du chapitre III intitulé : Du régime des Actes pris par les organes de l'Union, « pour l'accomplissement de leurs missions et dans les conditions prévues par le présent Traité..., le Conseil édicte des règlements, des directives, et des décisions ; il peut également formuler des recommandations et/ ou des avis ; la Commission prend des règlements pour l'application des actes du Conseil et édicte des décisions; elle peut formuler des recommandations et/ ou des avis ». C'est dire que les actes du droit dérivé sont constitués d'abord des règlements et des directives pouvant émaner du Conseil et de la Commission.

    Les règlements sont des textes obligatoires dans tous leurs éléments. Mais, ce qui fait surtout leur spécificité, c'est leur valeur normative, car ils sont directement applicables dans tous les Etats membres dès leur entrée en vigueur. Ces normes ont donc la même valeur juridique dans l'ensemble des Etats, et elles s'insèrent dans l'ordre juridique de chaque Etat, sans nécessiter l'intervention d'un texte législatif ou réglementaire. On peut citer par exemple le Règlement n° 15/2002/CM/UEMOA relatif aux systèmes de paiement dans les Etats membres de l'UEMOA. Ce règlement dote aujourd'hui tous les Etats membres de l'UEMOA

    d'une réglementation unique en matière d'effets de commerce (la lettre de change, le billet à ordre). Ainsi considérés, les règlements sont les normes suprêmes du droit dérivé de l'Union. C'est la raison pour laquelle, lorsque l'entité veut poser un acte fondamental pour réglementer un domaine déterminé du droit des affaires ou de l'activité économique de manière générale elle a toujours recours à un règlement. Le premier règlement adopté par le Conseil des ministres date de 1996 ; c'est le règlement n°1/96/CM portant règlement de procédure de la Cour de Justice de l'Union.

    Quant à la directive, c'est un texte certes obligatoire parce que s'imposant à tous les Etats membres de l'Union, mais, à la différence du règlement, elle n'est pas d'une application immédiate. En effet, la directive est un instrument juridique souple, qui est utilisée de manière générale dans les cadres communautaires, soit pour faire égard à la sensibilité de certains domaines, soit pour ménager la souveraineté des Etats. Mais, la précision qu'il faut surtout faire, c'est que la directive n'est pas d'une application facultative, contrairement à l'erreur qui est souvent faite, consistant à considérer les directives comme des normes non obligatoires. La directive est obligatoire dans tous ses éléments, même si une petite marge de manoeuvre est laissée aux Etats. Cela étant, l'UEMOA utilise la directive pour fixer aux Etats parties un certain nombre d'objectifs, de buts à atteindre mais dans une fourchette de temps déterminée. Pour ce faire, par le biais de leurs instances nationales, les Etats ont donc le choix des moyens et de la forme pour le respect de l'obligation communautaire révélée par la directive. Comme exemple de directive UEMOA, on peut citer la Directive n°08/2002/CM/UEMOA portant sur les mesures de promotion de la bancarisation et de l'utilisation des moyens de paiement scripturaux. Eu égard à leur souplesse, les Directives sont aussi utilisées dans l'UEMOA, par exemple en matière fiscale où les Etats se montrent très réticents face aux réformes que leur impose l'entité communautaire. Il en est ainsi de la directive portant harmonisation des législations des Etats membres en matière de taxe sur la valeur ajoutée12. La Directive n°03/2008/CM/UEMOA relative aux fournisseurs de services portuaires est la dernière adoptée à Dakar le 28 mars 2008.

    En plus de ces normes, il existe d'autres variétés de normes, qui certes, sont d'une valeur inférieure, mais d'une importance non moindre dans l'ordonnancement juridique communautaire.

    12 Voir Directive n°2/98/CM/UEMOA du 22 décembre 1998.

     

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    24

    B. Les normes de second rang du droit dérivé de l'Union

    Pour la réalisation de l'objectif d'Intégration, l'UEMOA est tenue de ménager la souveraineté des Etats. Pour cette la raison des choix sont faits dans l'emploi des normes ou techniques juridiques à utiliser pour imposer tel ou tel objectif aux Etats. En effet, dans certains domaines où l'élaboration d'une réglementation uniforme peut s'avérer laborieuse dans l'immédiat, l'Union a recours aux décisions, aux avis ou à des recommandations ; c'est cet ensemble qui est constitue les normes du second rang.

    La décision est l'obligation imposée à une personne ou à une catégorie de personnes. Selon l'article 43 du Traité, elle est obligatoire dans tous ses éléments pour les destinataires qu'elle désigne. Conformément à l'article 45, les décisions dûment motivées doivent être notifiées à leurs destinataires et prennent effet à compter de leur date de notification. La première décision de l'Union a été prise en 1997. C'est la Décision n°01/97/COM/UEMOA portant détermination des informations aux comités nationaux de politiques économiques pour les besoins de la surveillance multilatérale.

    Pour ce qui est des recommandations et avis, c'est l'invitation faite aux Etats d'agir en vue de telle ou telle mesure. Par exemple, la dernière recommandation de l'Union est relative aux orientations de politiques économiques des Etats membres de l'Union pour l'année 2009, c'est la Recommandation n°01/2008/CM/UEMOA du 26 juin 2008.

    Quoi qu'il en soit, recommandations et avis n'ont pas de force exécutoire, c'est-à-dire qu'ils n'impriment aucun sentiment obligatoire aux destinataires. Ces normes n'ont pas certes de valeur contraignante, elles ne créent pas d'obligations juridiques. Mais elles ont une valeur politique, car elles expriment la position des institutions sur une question donnée. Par conséquent, en créant une certaine coutume communautaire, cette catégorie de normes contribue, par ricochet, à l'élaboration des normes de l'Union.

    Des principales acceptions de l'intégration régionale aux instruments juridiques de sa réalisation dans l'espace UEMOA, nous avons présenté tour à tour les grandes étapes de l'intégration communautaire, la structure et le fonctionnement de l'institution puis ses objectifs. Au total, il en résulte que l'UEMOA travaille à la mise en place et à la consolidation de liens forts entre ses Etats membres par l'entremise de la libre circulation des personnes, des biens et services. La finalité d'une telle oeuvre reste le développement durable au sein de l'espace. Cela étant, la route demeure le facteur de mobilité par excellence dans la zone car, elle seule est accessible à toutes les couches sociales. C'est ce qui fait d'elle, plus qu'un moyen de transport, un outil intégrateur. Qu'est-ce qui sous-tend un tel rôle ? Quelles sont les entraves de sa réelle viabilisation dans l'espace ?

    Chapitre 2 : ETAT DES LIEUX DES TRANSPORTS ET DU RESEAU ROUTIERS DANS L'ESPACE UEMOA

    Dans le présent chapitre nous allons faire l'état des lieux du réseau (section 1) et des transports (section 2) routiers dans l'espace UEMOA.

    Section 1 : Eléments d'analyse du réseau routier au sein de l'UEMOA

    On appelle réseau un entrelacement de lignes. En aménagement du territoire, le réseau est un ensemble cohérent de mailles plus ou moins serrées reproduisant une organisation de l'espace13. En tant que tel, il se construit sur une surface (un territoire) et se compose de lignes (des voies de communication) reliant des noeuds (des agglomérations humaines). En lien direct avec la route, nous pouvons dire que le réseau routier est, sur un territoire donné, l'ensemble des routes qui desservent les différentes localités. Dans l'espace UEMOA, le réseau routier est l'ensemble des routes qui lient les localités d'un pays entre elles puis les huit pays entre eux.

    Dans l'analyse du réseau routier dans l'espace communautaire, nous aborderons successivement les questions de l'insuffisance de la dotation de l'Union en routes (Paragraphe 1) et de l'inégale répartition des infrastructures routières (Paragraphe 2) entre les différents pays membres.

    Paragraphe 1 : Un espace communautaire insuffisamment doté de routes

    La faible dotation de l'espace communautaire UEMOA en routes peut être analysée en lien direct avec la superficie (A) et l'effectif de la population (B).

    A. Une faible densité du réseau routier

    L'espace UEMOA couvre une superficie de 3 509 610 km2. Le réseau de routes classées de l'Union, constitué de routes inter-Etats (RI) et de routes nationales (RN), a une longueur de 148.600 km, soit environ 90% du réseau routier total de l'Union. Un peu plus de 15% seulement de ce réseau est revêtu (22.530 km). Le réseau communautaire, d'une longueur d'environ 20.930 km, est constitué de routes côtières et de corridors de désenclavement des pays de l'hinterland. La classification des routes nationales et celle des collectivités locales reste de la responsabilité des Etats. Les routes côtières assurent la liaison des pays côtiers entre eux et les corridors de désenclavement ou couloirs de transit routier assurent la liaison

    13 Lire BRAND D. et DUROUSSET M. (2002) : Dictionnaire thématique d'histoire et géographie, 6ième Ed., p. 469 et GRAWITZ M. (1999) : Lexique des sciences sociales, 7ième Ed., p. 354.

    Sur la base de ces chiffres, l'on peut estimer à 4,7

    km la longueur de routes pour 100 km2 de superficie. Même si cette moyenne est légèrement supérieure à celle de l'Afrique prise dans son ensemble (4,2 km/100 km2), e

    lle est loin de celle du Ghana par exemple qui avoisine

    16,75 km/100 km2.

    Cette situation reflète également celle qui prévaut lorsqu'il s'agit de nombre d'habitants.

    calculer les moyennes de longueurs de routes par

    B.

    La faiblesse des moyennes de routes par habitant

    L'espace UEMOA rassemble 76

    millions d'habitants. Leur mobilité pour tous les

    On se rend

    motifs suppose que l'Union est dotée d'infrastructures de transports adéquats.

    compte qu'au sein des pays, la mise en place des infrastructures de transports tient souvent compte des densités de populations. Or, dans l'UEMOA, à côté des pays dont les densités de population sont relativement élevées, subsistent de vastes pays ayant des densités faibles comme indiqué sur la figure n°1 sur la base des données de la Commission de l'UEMOA.

    Figure n°1

    : Densité de population dans les pays de l'UEMOA

    100

    40

    90

    80

    70

    60

    50

    30

    20

    10

    0

    De ce qui ressort de l'analyse de la figure n°1

    , les densités de populations sont disparates au sein de la communauté. Ainsi, au Togo, on dénombre environ 93 hab./km2 contre par exemple 10 et 8 hab./km2 pour le Mali et le Niger respectivement. De ce fait, la

    dépassée par la plu

    moyenne régionale de 41 hab./km2 se trouve part des pays et la dotation en

    infrastructures routières s'en trouve tout aussi affectée. On dénombre du coup dans l'espace communautaire 2,68 km

    pour 1000 habitants.

    Mais ces

    A l'évidence, l'Union est faiblement dotée en infrastructures routières.

    chiffres globaux cachent des disparités qui tiennent autant à la situation différenciée entre les

    -

    Etats qu'à celle entre les deux sous zones que constituent les pays côtiers et ceux du Sahel. Paragraphe 2 : Un réseau routier inégalement répartiL'analyse d

    es données globales

    relatives à la dotation de l'Union en infrastructures routières laisse apparaître des disparités qui se rapportent à la particularité de chaque Etat membre (A) et

    à la distinction entre pays côtiers et pays sahéliens (B).

    A.

    Les disparités

    de répartition du réseau routier entre les Etats

    membres

    Les disparités entre les différents Etats

    en matière de dotation en infrastructures

    routières s'a

    perçoivent d'une part en termes de densité de routes par unité de surface et d'autre part de densité par effectif de population. A ce propos, deux histogrammes sont conçus pour servir de base d'analyse de ces disparités.

    Ils sont présentés sur les figuress 2 et

    3.

    Ces histogrammes sont conçus sur la base des données tirées du Document-cadre d'orientations générales de la politique d'aménagement du territoire communautaire de l'UEMOA (2003) à la page 51.

    Figure n°2

    : Densité du réseau routier en km pour 1 00 km2 par pays de l'UEMOA

    30

    25

    20

    15

    10

    0

    5

    Benin

    Burkina
    Faso

    Côte
    d'Ivoire

    Guinée
    Bissau

    Mali Niger Sénégal

    Togo

    Au regard de l'histogramme contenu sur la figure n°2

    , certains pays sont mieux lotis en matière d'infrastructures routières que d'autres. Ainsi, pour la même unité de surface (100 km2), la Côte d'Ivoire présente la meilleure

    dotation avec 25,23 km de routes contre respectivement 15,3 km et 14,06 km pour le Togo et le Bé

    nin. Au bas du tableau, on retrouve

    le Niger, le Mali et le Burkina Faso avec 1,15 km ; 1,19 km et 4.54 km dans le même ordre.

    Cette même disparité s' perçoit lo

    rsqu'on considère la densité du réseau routier par rapport au

    nombre d'habitants.

    Figure n°3 : Densité du réseau routier en km pour 1000 hab.

    4

    0

    6

    5

    3

    2

    1

    Benin Burkina

    Faso

    Côte
    d'Ivoire

    Guinée
    Bissau

    Mali Niger Sénégal Togo

    La Côte d'ivoire, comme dans le cas de la densité du réseau routier par unité de surface, se retrouve en tête du peloton lorsqu'il est question d'apprécier cette densité par rapport au nombre d'habitants. Dans cette optique, on décompte 5,69 kilomètres de routes pour 1000 habitants en Côte d'ivoire tandis que la Guinée Bissau et le B énin suivent avec 2,99 km et 2,79 km respectivement. Pour le même nombre d'habitan ts (1000 hab.), le Burkina Faso et le Niger sont dotés chacun en ce qui le concerne de 1,25 km, 1,48 km de routes. Lorsqu'on sait que la moyenne communautaire est de 2,68 kilomètres de routes pour 1000 habitants, on peut facilement déduire que seuls 37,5% soit 3 pays sont dotés de routes au -delà de la moyenne sous-régionale.

    Il ressort de cette analyse de la densité du réseau routier par rapport aux unités de surfaces (100 km2) et par rapport à l'effectif de la population (1000 hab.) que le réseau routier est inégalement réparti sur l'ensemble de l'espace communautaire si l'on considère les Etats comme base de l'analyse. Cette inégale répartition se retrouve, par ailleurs, lorsqu'on se situe

    dans une analyse basée sur la distinction des sous

    -zones, sur la base des

    conditions naturelles.

    B. Disparités entre les pays côtiers et les pays sahéliens

    Sur le plan natu

    rel, il convient de rappeler que les huit pays de l'Union disposent de réalités géographiqu es différentes. A cet égard

    , les conditions naturelles classent les Etats en trois (3) zones écologiques bien marquées. D'abord, une zone sahélo- guinéenne ouverte sur la mer, avec le Sénégal et la Guinée Bissau, qui couvrent 6.60% du territoire de l'Union. Ensuite,

    une zone forestière située au Sud, également ouverte sur la mer, mais de façon très inégale, qui concerne le Bénin, la Côte d'Ivoire et le Togo. Elle repré

    sente 14,20% de l'espace

    communautaire. Enfin, une zone sahélienne (Burkina Faso, Niger, Mali) avec des conditions climatiques plus austères, caractérisées surtout par la rareté de l'eau de surface, la désertification, une pluviométrie faible intéressant le Sud et le centre des territoires essentiellement. Ces trois (3) pays font à eux seuls 79,20% de l'espace communautaire. Contrairement à la zone CEMAC où la forêt est le premier handicap dans la mise en place des infrastructures de transports routiers, dans l'UEMOA, ce sont les pays sahéliens qui sont moins dotés en infrastructures routières. Ainsi, le réseau routier communautaire est localisé à 71% dans les pays côtiers plus ou moins forestiers qui ne couvrent que 20% de l'espace communautaire. Les pays sahéliens (avec 80% de la superficie) n'ont que 29% du réseau comme indiqué sur le tableau n°1.

    Tableau n°1 : Disparités pays côtiers/pays sahéliens en matière d'infrastructures routières
    dans l'espace UEMOA.

     

    Superficie

    Réseau routier

    en km2

    %

    en km

    %

    Pays côtiers

    701 922

    20

    103 904

    71

    Pays sahéliens

    2 807 688

    80

    42439

    29

    Total UEMOA

    3 509 610

    100

    146 343

    100

    Source : Document-cadre d'orientations générales de la politique d'aménagement du territoire communautaire
    de l'UEMOA
    (2003) à la page 24.

    Au total, par delà d'être inégalement réparti, le réseau routier de l'espace communautaire est aussi d'une mauvaise qualité. L'implication de cette faible dotation en routes et leur mauvaise répartition dans l'espace sur le parc automobile et le trafic routier est claire. Le parc automobile dans la zone de l'UEMOA est estimé en 2002 à près de 800.000 véhicules, non compris les deux roues motorisés. Le pourcentage de poids lourds varie, selon les pays, de 5 à 38%. La circulation sur le réseau dans les Etats de l'UEMOA est caractérisée par des différences très importantes entre les zones géographiques et les itinéraires. Depuis 15 ans, les Directions en charge de la planification routière dans ces Etats collectent régulièrement les données relatives au trafic routier sur l'ensemble du réseau. Il en ressort que des taux annuels de croissance du trafic varient entre 3 et 6% suivant les pays et les catégories de véhicules. Selon les données relatives aux importations et exportations de marchandises par les pays enclavés de la sous-région, les échanges commerciaux représentent environ 4,2 millions de tonnes en 2002, dont 2 millions de tonnes pour le Burkina Faso et 1,8 millions de tonnes pour le Mali. Par voie de conséquence, l'inexistence ou la mauvaise qualité des routes se conjuguent pour porter un frein à la fluidité des transports routiers.

    Section 2 : Eléments d'analyse des transports routiers communautaires

    Le transport est l'action, la manière de faire mouvoir quelque chose ou quelqu'un d'un lieu à un autre. Mis au pluriel, les transports sont l'ensemble des moyens permettant de déplacer des personnes et des marchandises. On parle ainsi des transports aériens, des transports routiers ou de politique de transports. Nous utiliserons le concept « transports routiers » pour désigner l'action de transporter des personnes et des marchandises à l'aide d'automobiles (voitures, camions, cyclomoteurs, etc.) par l'usage de la route.

    L'appréciation de la fluidité des transports passe par la prise en compte des flux de circulation qui eux-mêmes sont tributaires de l'état de praticabilité de la route (Paragraphe 1) et des tracasseries observées par les usagers de la route (Paragraphe 2).

    Paragraphe 1 : Des transports routiers entravés par la mauvaise qualité des routes

    La contrainte que constitue le mauvais état des routes est examinée autour de deux axes qui s'énoncent autour des réalités observées entre les huit pays de la zone d'investigation (A) et au sein de chacun de ces pays (B).

    A. La question de la qualité des routes entre les Etats de l'UEMOA

    Cette analyse ne saurait se faire sans des données précises sur les flux de marchandises et de personnes entre les huit pays d'autre part. Or, dans l'espace UEMOA, ces données sont inexistantes. Mais à l'évidence et en dépit de leur mauvais état, les routes africaines permettent de faire mouvoir de grandes quantités de marchandises et de nombreuses populations. A titre indicatif, au Cameroun (zone CEMAC), la Commission Economique pour l'Afrique (CEA) estime à 14 millions de tonnes les marchandises transportées par an sur le réseau routier, dont 400 000 tonnes de trafic de transit14.

    Dans la zone UEMOA, le Mali est une plate-forme idéale pour mesurer les besoins et les enjeux liés au transport et surtout la nécessité de les maintenir dans un bon état. En effet, 95% des exportations et des importations de ce pays ainsi que 90% du transport intérieur se font par la route. De même 35% du coût de revient de la plupart des produits de première nécessité et de biens de consommation est tributaire du transport routier d'où la nécessité d'entretenir nos routes et de lutter contre les abus de la surcharge sur les routes de l'espace communautaire.

    14 KOULAKOUMOUNA E. (2006) : Transport routier et effectivité de l'intégration régionale dans l'espace CEMAC : enjeux et contraintes pour le développement durable du Congo, CERAPE, page 8.

    Les conséquences de la surcharge sont graves et réduisent la durée vie des routes. Une surcharge de 48% sur 96% du trafic réduit la durée de vie d'une route de 15 ans à 4 ans15. C'est de ce constat qu'il devient impérieux de travailler à la mise en place du contrôle de la charge à l'essieu dans les pays.

    Il est alors évident que « la route reste le mode de transport dominant en Afrique. L'activité de ce mode de transport représente 80 à 90% du trafic interurbain et inter-Etats de marchandises. En termes de déplacements quotidiens, il apparaît de même comme le mode de transport qui assure le plus de voyages, tous motifs confondus »16. De par son coût, il reste le seul moyen accessible aux populations. Cependant, les transports dans l'Union sont entravés par la mauvaise qualité des routes. Ainsi, à l'intérieur de chaque pays, les réalités ne sont pas meilleures comme nous le montrent les données nationales du Togo.

    B. Les réalités internes aux Etats membres de l'UEMOA : le cas du Togo

    La nomenclature des routes au Togo permet de scinder le réseau routier national en trois types. Il s'agit des routes nationales, des voiries urbaines(VU) et des pistes rurales (PR). Au total, ce réseau s'étend sur 11 272 km donnant des densités de 20,70 km/100 km2 et de 1,87 km pour 1000 habitants17.

    D'abord, le réseau des routes nationales comprend les routes nationales revêtues (RNR) et les routes nationales non revêtues (RNNR). La longueur totale des RNR répertoriées en décembre 2007 est d'environ 1 718,8 km, soit 21,7% de l'ensemble du réseau routier. Quant aux routes nationales non revêtues, elles sont longues de 1 354,3 km et équivalent à 17,1% de l'ensemble du réseau routier national.

    Ensuite, la longueur totale des pistes rurales en décembre 2007 est de 6 802 km. Il s'agit des pistes rurales classées (PRC) et des pistes rurales non classées (PRNC) longues respectivement de 892 km et 5 910 km soit 8,7% et 57,3% du réseau routier national dans le même ordre.

    Enfin, le dernier inventaire réalisé par l'Agence de Développement Urbain et Municipal CITAFRIC en 2007 estime la longueur de la voirie urbaine au Togo à 434 km. Sur cet ensemble, 60% environ relèvent de la seule commune de Lomé. Comme on le voit, les

    15 Actes de la première édition du Salon International des Transports en Afrique de l'Ouest (SITRAO) tenu à Bamako le 12 mars 2009 sur le thème : les transports, facteur majeur de développement et d'intégration.

    16 Note conceptuelle de la Conférence des Ministres Africains en charge du transport routier, Durban (Afrique du sud), 15 - 19 octobre 2007, page 2.

    17 Ces données comme celles qui suivent sont tirées de Rapport économique, financier et social 2008, Loi de finances 2009 (Togo) page 72. Elles sont en nette progression par rapport à celles des tableaux précédents qui datent de décembre 2007. On peut noter une légère augmentation de la longueur des routes nationales due au bitumage de la route Sokodé -Tchamba-Frontière Bénin et de l'aménagement des VU.

    pistes rurales non classées sont au prorata de 57, 3% de l'ensemble du réseau. A l'évidence, la qualité du réseau dans son

    ensemble se détériore surtout en saison des pluies, limitant du coup les possibilités de mobilité des personnes et des biens. Sur la base des travaux de la Direction Générale des Travaux Publics (DGTP) datés de 2007 et du

    Rapport économique, financier et , page 70

    social 2008, Annexe 2, Loi de finances 2009 (Togo) , il est possible de dresser le

    4

    tableau global de l'état du réseau routier au Togo à travers la figure n° .

    Figure

    4 : Etat du réseau routier togolais par Région et par type

    POURCENTAGES

    40

    20

    70

    60

    50

    30

    10

    0

     

    Routes
    Nationales
    Revêtues

    Routes
    Nationales Non
    Revêtues

    Pistes Rurales
    Classées

    Voies Urbaines

    Etat du réseau: Bon

    33

    13

    4,8

    2,4

    Etat du réseau: Moyen

    50

    67,6

    37,4

    42,8

    Etat du réseau: Mauvais

    17

    19,4

    57,8

    54,8

    A

    l'évidence est que le réseau routier togolais n'est pas

    de bonne qualité. En effet,

    13 % seulement de ce réseau sont bons contre 49% de qualité moyenne. Quant aux 37%, ils alité. Mais

    sont simplement de mauvaise qu , au regard de la figure n°4, dans ces réalités

    le type

    globales se cachent des disparités selon du réseau. Ainsi, les voies urbaines sont celles

    qui présentent la plus mauvaise qualité avec un pourcentage de 54,8%. Elles sont suivies des PRC (5

    7,8%), des RNNR (19,4%) et des RNR (17%). Par ailleurs, on note que les RNR en bon état représentent 3 3% contre respectivement 13% ; 4,

    8% et 2,4% pour les RNNR, les PRC et les VU. Le reste du réseau routier est de qualité moyenne. Un tel visage du réseau routier a nécessairement une incidence négative sur les transports routiers. De plus, les

    tracasseries qui

    usagers des routes dans l'Union doivent surmonter un certain nombre de

    .

    s'identifient aux barrières non tarifaires

    Paragraphe 2 : Les tracasseries routières : véritables barrières à la circulation

    A l'instar de la mauvaise qualité des voies de communication, les tracasseries constituent une véritable entrave à la circulation des personnes, des biens et des services autant au sein des territoires nationaux que dans l'espace communautaire. Elles sont perçues sous le double plan administratif et sécuritaire (A) et des pertes financières enregistrées (B).

    A. Les tracasseries administratives et sécuritaires

    Les tracasseries administratives rappellent les difficultés que rencontrent, d'une part, les transporteurs et, d'une autre, les commerçants dans le convoyage de leurs marchandises ainsi que dans leurs propres déplacements. Sur cet aspect, en dépit de la Décision n° 7/2001/CM/UEMOA du 20 septembre 2001 portant adoption de la stratégie communautaire et d'un réseau d'infrastructures routières au sein de l'UEMOA, il est à noter que, de nos jours, des formalités administratives sont encore exigées aux ressortissants des pays de l'Union lors de la traversée de certaines frontières.

    En ce qui concerne les tracasseries douanières, policières et de gendarmerie, elles s'entendent des difficultés qu'éprouvent biens et personnes aux traversées des postes de contrôle policier, gendarme ou douanier à l'intérieur et aux frontières des Etats.

    Globalement, ces tracasseries relèvent davantage du comportement des hommes qui ont du mal à accepter des dispositions qui les privent de menus avantages illégaux. Ainsi, le personnel des douanes et celui de la police, ainsi que de la gendarmerie transforment les barrages destinés à contrôler le bon déroulement des voyages en points de rackets.

    L'espace UEMOA révèle un ensemble de corridors prioritaires du fait de la fréquence de la circulation sur ces voies dans l'optique de desservir les différents Etats. Sur ces corridors qui sont le support physique des échanges sous-régionaux, des points de contrôles ont été installés. Certains sont légaux, d'autres par contre résultent de pratiques anormales tendant à entraver la fluidité des échanges. L'Observatoire pour les Pratiques Anormales (OPA) dans la zone a, au fil des années, procédé à des observations par des enquêtes dissimulées en faisant voyager des individus à l'insu de tous.

    Il résulte des travaux de la Commission sur la localisation des postes de contrôle effectués en octobre 2005 lors de la Conférence des ministres en charge des transports entrant dans le cadre de la mise en place d'un plan régional de contrôle sur les onze axes routiers inter-Etats prioritaires de l'espace UEMOA la carte ci-dessous.

    Carte des corridors et points d'emplacement des postes de contrôle routier au départ, aux passages frontaliers et à la destination finale de
    l'UEMOA

    Source : Plan Régional de contrôle sur les onze axes routiers inter-Etats prioritaires de l'UEMOA, Octobre 2005

    Selon le rapport de l'Observatoire des Pratiques Anormales (OPA) établi sur la période du 16 juin au 30 septembre 2008, le corridor Ouagadougou-Bamako a la plus forte densité de barrières. Soit au total près de 36 arrêts par voyage avec un ratio de 3,95 arrêts aux 100 km pour ce 3ème trimestre de l'année 2008. Il faut préciser que cette forte densité provient surtout du nombre élevé de barrières du côté malien, qui enregistre 29 barrières alors qu'il y en a 7 du côté Burkinabé. Le corridor Lomé-Ouagadougou s'est illustré, ce trimestre, par le nombre le moins élevé de barrières avec 18,3 arrêts pour un ratio de 1,80 arrêt aux 100 km. Il est à noter que les arrêts intempestifs sont dus en grande partie et par ordre de grandeur décroissant, à la gendarmerie, à la police et à la douane au Mali.

    Ces données récentes contrastent dans bien des cas avec celles qui résultent des enquêtes réalisées il y a cinq ans au moins. C'est d'ailleurs ce qui explique le fait que l'OPA évoque des avancées en matière de réduction des tracasseries routières dans l'espace communautaire. Le tableau n°3 présente la fréquence de ces barrières sur certains axes routiers principaux dans la zone CEDEAO entre 1999 et 2000.

    Tableau n°3 : Fréquence des postes de contrôles sur quelques axes routiers entre 1999 et 2000

    Parcours

    Distance (km)

    Nombre de postes

    Fréquences (1/100km)

    Lagos-Abidjan

    992

    69

    14

    Niamey-Ouagadougou

    337

    20

    17

    Lomé-Ouagadougou

    989

    34

    29

    Cotonou-Niamey

    1 036

    34

    30

    Abidjan-Ouagadougou

    1 122

    37

    30

    Accra-Ouagadougou

    972

    15

    65

    Source : CEDEAO, (2000).

    Il ressort du tableau n°3 que l'on dénombrait au moins 14 postes de contrôles sur 100 km et au plus 65 sur la même distance en 2000. Même si ces données confirment des avancées évidentes en rapport avec les réalités actuelles, il n'en reste pas moins que les barrières qui subsistent sont à la base de dépenses énormes pour les conducteurs.

    B. Les implications financières des tracasseries routières

    Les tracasseries induisent une perte de temps pour les passagers mais aussi elles ont une réelle implication sur les pertes d'argent comme indiqué sur le tableau n°2.

    Tableau n°2 : Coûts des barrages routiers illégaux sur quelques axes routiers de l'espace UEMOA

     

    Togo :

    Lomé - Cinkansé

    Burkina Faso:

    Cinkansé - Ouaga - Bobo

    Mali :

    Frontière Burkina F. - Bamako

    Total

    Barrages
    routiers

    5

    32

    15

    52

    Coût (FCFA)

    125.900

    387.065

    243.717

    756.682

    Source : KOITA Y. (2005) : La situation générale des opérations de transport sur les corridors de la Communauté
    Economique Des Etats de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO),
    page 6.

    En nous référant à cette même source, on compte au total quatre (4) barrages entre Lomé et Malanville en République du Bénin. Le coût induit par ces 4 barrages est de 20 000 francs CFA, une somme qui est inférieure aux 125 900 FCFA que perdent les passagers entre Lomé et Cinkansé. Les données collectées et analysées indiquent également que les perceptions illicites moyennes par corridor, les plus élevées, ont été effectuées sur le corridor Ouagadougou-Bamako, avec 40.850 FCFA par voyage. Cette situation est essentiellement imputable au Mali, qui, avec 31.509 FCFA, bat le record des perceptions les plus élevées par pays et par corridor au cours d'un voyage. Au contraire, le corridor Tema-Ouagadougou enregistre les niveaux de prélèvement les moins élevés, avec 13.770 FCFA, mais il demeure malgré tout assez contraignant en matière de tracasseries.

    Ainsi, les prélèvements illégaux participent à l'augmentation des prix de revient des marchandises dans les pays sahéliens. En effet, compte tenu de leur situation d'enclavement, le commerce extérieur de ces pays est influencé par les coûts des transports de leurs marchandises. Par exemple, pendant que les coûts de transports interviennent pour 10% à 15 % dans le prix de revient des marchandises dans les pays à façade maritime de la sous-région, il est de 25% à 45%, voire 60% dans certains cas comme au Burkina Faso18. C'est dire que l'essentiel de ces coûts provient du passage portuaire et du transport terrestre. On dénombre dans la zone environ un barrage tous les 38 km avec un coût moyen de dépenses par barrage estimé à 2 000 F CFA.

    Les résultats d'un exercice de simulation des manques à gagner dus à la non-application de la Convention TRIE de 1997, dans les huit (8) Etats membres de l'UEMOA, sont récapitulés dans le tableau n°4. Il s'agit des études réalisées par la Commission Economique Africaine (CEA) en 2006 et portant sur une estimation du transit routier du Burkina Faso, du Mali, du Niger passant par les ports de Dakar, d'Abidjan, d'Accra, de Lomé et de Cotonou. Le tonnage est d'environ 1.125.000 tonnes de marchandises.

    18 Ali TRAORE, Directeur Général du Conseil Burkinabé des Chargeurs dans Fluidité et encombrement des transports terrestres, document pdf téléchargé le 20 novembre 2008.

    Tableau n°4 : Principaux déterminants des pertes induites par les barrages routiers par an

    Rubriques

    Unités

    Nombre de camions chargés de 30 tonnes pour l'évacuation des marchandises

    37.500 camions

    Distance moyenne parcourue par camion et par voyage

    1.100 km

    Total kilomètres parcourus par rapport au Tonnage annuel

    41.250.000 km

    Nombre de barrages routiers : à raison de 1 par 40 km

    1.031.250

    Coût moyen par barrage

    2.000 F CFA

    S/Total coût global des barrages routiers

    2.062.500.000 F CFA

    Nombre de camions correspondants au coût global des barrages routiers à raison de 80 millions de FCFA/camion

    27 camions neufs

    Nombre d'heures perdues à raison de 10 mn par barrage

    .soit

    .soit

    171.875 heures 7.161 jours

    239. mois

    Coût directs correspondants au nombre de mois perdus :

    · Chauffeur : 100.000 F/mois

    · apprenti : 20.000 F/ mois

    23.900.000 FCFA 4.780.000 FCFA

    S/Total coût supplémentaire du personnel roulant

    28.680.000 FCFA

    Coût global du transit en termes de manque à gagner

    2.091.180.000 FCFA

    Source : CEA (2006) cité par KOITA Y., Animateur du sous groupe 2.4.1 de l'AIPCR in La situation générale
    des opérations de transport sur les corridors de la Communauté Economique Des Etats de l'Afrique de l'Ouest
    (CEDEAO).

    Au regard du tableau n°4, sur une année de trafic en provenance des ports de Dakar, d'Abidjan, d'Accra, de Lomé et de Cotonou et à destination du Burkina Faso, du Mali et du Niger, 2 062 500 000 F CFA de frais supplémentaires sont perdus à raison de 2 000 francs par barrage routier. Ce montant équivaut au prix d'achat de 27 camions neufs à raison de 80 millions de F CFA l'un. Dans le même temps, on a essayé d'évaluer le montant perdu par les conducteurs et leurs apprentis du fait du temps qu'ils perdent à ces barrages. Pour ce faire, en supposant qu'un camion perd 10 mn par barrage, l'incidence financière globale annuelle pour l'ensemble des camions, en ce qui concerne le personnel roulant, est de 28 680 000 F CFA. Sur cette base, le coût global du transit en termes de manque à gagner annuellement est estimé à 2 091 180 000 F CFA. Ces résultats confirment les données du Rapport de l'OPA en 2008, qui stipule que « de tels rackets induisent aussi des pertes de temps sur la route pour les conducteurs. Le retard dû aux nombreux arrêts se décline par ordre de grandeur comme suit : sur le corridor Tema-Ouagadougou, long de 1057 km, les pertes totales de temps sont

    estimées à 249 mn soit 24 mn de retard aux 100 Km. Sur l'axe Bamako-Ouagadougou, long de 920 km, on enregistre une perte de temps de 181 mn soit 20 mn de retard aux 100 km. Enfin, Lomé-Ouagadougou, distant de 1020 km, compte 75 mn de retard soit 7,3 mn aux 100 km.»

    Au total, le réseau routier de l'ensemble de la sous-région est non seulement en mauvais état, mais aussi souffre de fluidité du fait de l'existence des barrages routiers ainsi que de la complexité des démarches administratives. Toutefois, la route reste un instrument important dans le développement économique du Togo ainsi que de son insertion dans l'espace communautaire. Voyager donc sur les routes de l'Union coûte cher, sans doute au moins aussi cher que de parcourir les grandes autoroutes payantes européennes.

    En 2005 par exemple, un poids lourd doté d'une remorque doit payer 293 € (environ 192 200 F CFA) pour 100 km. En 2000, un poids lourd faisant la route Bamako-Dakar (1 245 km) devait payer en moyenne de 217 à 220 € pour 200 km « de péage sauvage ». A la fin des années 90, il en coûtait 122 € pour 100 km entre Lagos et Maiduguri (ville frontalière du Cameroun située au Nord du Nigeria). On paye donc pratiquement aussi cher pour rouler sur une autoroute européenne à 4 voies ou plus, que sur les routes ouest-africaines à 2 voies traversant villages et villes et pleines de nids de poules. Seulement, à la différence de la pratique en vigueur en Europe, les « péages » ouest-africains sont le plus souvent de simples « taxations informelles » qui n'alimentent aucun fonds de construction ou d'entretien routier.

    Ainsi, de la présentation de l'historique et des objectifs de l'intégration des Etats de l'UEMOA à celle des transports et du réseau routiers comme véritable outil de l'intégration physique en Afrique de l'ouest, nous avons pu montrer que pour atteindre véritablement les objectifs assignés à ce regroupement sous-régional, les Etats membres doivent pouvoir mettre en pratique les différentes normes dans le but d'augmenter la dotation de l'Union en routes et d'en améliorer la qualité. Dans cette logique, l'importance des transports et du réseau routiers dans l'intégration des Etats de l'UEMOA mérite d'être présentée.

    Deuxième partie :

    ROLE DES TRANSPORTS ET DU RESEAU ROUTIERS DANS LE PROCESSUS DE L'INTE GRATION DES ETATS DE L'UEMOA

    La présentation du rôle des transports et du réseau routiers dans le processus d'intégration ouest-africaine part du fait que l'UEMOA, outil d'intégration économique et monétaire, fait aussi de l'interconnexion entre ses Etats membres une priorité. En effet, depuis sa mise en place en 1994, cette organisation sous-régionale prend de plus en plus d'importance dans le processus de l'intégration de l'Afrique de l'Ouest dans son ensemble. Au niveau de l'Union Africaine (UA), même si c'est la CEDEAO qui est retenue comme la Communauté Economique Régionale (CER) devant régir l'intégration dans cette partie du continent, il est évident que les efforts réalisés par l'UEMOA constituent, de loin, un exemple d'intégration sous-régionale. C'est pourquoi depuis 1994, elle a fait de la phrase « la route du développement passe par le développement de la route » un cheval de bataille. Cette phrase à elle seule est un indicateur du rôle qu'entendent confier les dirigeants de cet espace à la route dans le processus d'intégration qu'ils réalisent.

    Dans tous les cas, l'intégration en question prend en compte la libre circulation des personnes et des biens pour des raisons économiques et touristiques. Dans ces conditions, la réalisation de la libre circulation des personnes et des biens passe par l'existence des facteurs de mobilités. Un des plus importants, car accessible à tous, reste la route. En tant que telle, elle reste dans l'espace UEMOA le moyen de transport le plus utilisé par les populations. Ce faisant, les infrastructures routières deviennent, plus qu'un moyen de transports, un véritable outil intégrateur (Chapitre 1), dont la rentabilisation passe par la levée de trois défis principaux (Chapitre 2).

    Chapitre 1 : TRANSPORTS ET RESEAU ROUTIERS : VERITABLES OUTILS D'INTEGRATION ET DE DEVELOPPEMENT DANS L'ESPACE UEMOA

    La route reste le mode de transport dominant en Afrique. L'activité de ce mode de transport représente 80 à 90% du trafic interurbain et inter-Etats de marchandises19. En termes de déplacements quotidiens, il apparaît de même comme le mode de transport qui assure le plus de voyages, tous motifs confondus. De par son coût, il reste le moyen le plus accessible aux populations. Pour ce faire, les transports et le réseau routiers présentent dans la sousrégion des enjeux multiples dans les processus d'intégration et de développement. Une étude de la Banque Mondiale réalisée en 2006 montrait qu'une diminution de 10% du prix des transports entraînerait 25% d'augmentation du commerce africain. Du coup, la route, plus qu'un simple moyen de transport, est un facteur intégrateur (section 1) et un facteur de développement socio-économique (section 2).

    Section 1 : Rôle des transports et du réseau routiers dans la régionalisation de l'espace UEMOA

    Selon BIGNICOURT J., « la régionalisation a deux significations. D'une part, elle est un processus d'analyse, c'est-à-dire l'emboîtement d'unités territoriales subalternes au sein de cadres géographiques progressivement étendus. D'autre part, la régionalisation est une action ». Elle est alors perçue comme une politique de décentralisation confiant à des autorités régionales représentatives une partie des prérogatives administratives de l'Etat. Dans un sens comme dans l'autre, elle diffère fondamentalement du régionalisme qui revêt un caractère idéologique visant à l'autonomisation régionale axée sur la contestation du pouvoir centralisateur de l'Etat qui fait très souvent référence aux revendications identitaires et sécessionnistes.

    A l'échelle communautaire, la régionalisation prend d'abord le sens d'un processus d'analyse qui vise, en dernier ressort, l'emboîtement des territoires nationaux des huit Etats membres de l'Union dans un ensemble plus grand. On s'accorde alors à dire que le processus d'intégration sous-régionale doit aboutir à une réorganisation spatiale, c'est-à-dire à la création d'un espace communautaire. C'est ici qu'intervient le second sens qui est relatif à la perception de l'intégration comme une action. En effet, l'UEMOA vise, dans le cadre de sa

    19 Note conceptuelle de la Conférence des Ministres Africains en charge du transport routier, Durban (Afrique du sud), 15 - 19 octobre 2007, page 2.

    politique d'aménagement du territoire communautaire, à créer un espace harmonisé dont les principaux déterminants se rattachent plus au niveau sous-régional qu'au niveau national.

    Il convient alors, au regard des dispositions du Protocole additionnel n° II au Traité de 1994 en son article 6, de dire que les Etats membres doivent harmoniser les plans nationaux d'infrastructures en vue de l'équilibre des différentes composantes du territoire communautaire et du désenclavement des zones frontalières. L'objectif de cette vision est de créer un territoire homogène dont l'appréciation tient plus compte de l'UEMOA que de ses Etats membres. Cependant, l'intégration véritable passe par la constitution de Nations fortes et économiquement viables.

    Notre approche nous conduit à montrer en quoi la route peut être un réel facteur d'unité nationale (paragraphe 1) et stimuler du même coup l'intégration sous-régionale entre les huit Etats de l'UEMOA (paragraphe 2).

    Paragraphe 1 : Transports et réseau routiers comme facteur d'unité nationale

    Le mauvais état des routes, en général, et leur praticabilité saisonnière, en particulier, sont vécus de façon différentielle selon les pays à l'échelle régionale. Au sein d'un même pays, cette disparité permet de faire une typologie qui distingue les zones frontalières du reste du territoire. Il en est de même de la distinction à faire entre zones enclavées et zones désenclavées, milieux ouverts et milieux fermés, localités spatialement insérées et localités spatialement non insérées. Il en résulte une analyse axée sur la situation d'enclavement au niveau des Etats (A) et l'approche « pays-frontière » comme solution plausible de désenclavement des zones transfrontalières (B).

    A. L'enclavement, expression géographique de la discontinuité des réseaux routiers

    Dans les pays de l'UEMOA, comme partout ailleurs, la plupart des zones frontalières souffrent d'une absence chronique de voies de communication qui induit une extraversion de leur économie. En fait, dans les zones transfrontalières, le problème de l'inexistence de routes ou de leur mauvais état prend une forme particulière. En lien direct avec les frontières héritées de la colonisation, les zones frontalières sont très souvent les plus enclavées. Cette situation relève non seulement de leur éloignement par rapport à la capitale, mais davantage de la question de la sécurité. A cet égard, l'Est de la région des Plateaux au Togo avec les localités de Kpékplémé, Glitto ou Igboloudja constitue un exemple éloquent. Dans ces localités rurales, on assiste à un développement des échanges transfrontaliers qui prennent corps autour de la théorie des avantages comparatifs qui fait que les Béninois achètent des céréales du côté

    togolais alors que les Togolais importent des produits pétroliers du Bénin. Néanmoins, il est à préciser le caractère purement informel de ces transactions20.

    A une toute autre échelle, des contrées quoique situées loin des frontières souffrent des retombées négatives de l'enclavement. On a pu parler à juste titre de localités enclavées qui rappellent le sens de « landlock » qui signifie « enfermer à l'intérieur des terres » puisque d'après le Dictionnaire Harcourt ( www.harcourt.com), en géographie, l'enclavement rappelle « un région qui n'a pas d'accès à la mer 21». Plus encore que l'accès à la mer, l'enclavement des localités dans les pays de l'espace UEMOA s'assimile à « l'isolement dans lequel se trouve une aire plus ou moins étendue, souvent dans un milieu montagneux ou désertique, du fait de l'absence ou de l'insuffisance des moyens de communication»22.

    L'idée qui sous-tend notre analyse est que, en l'absence de routes pour relier les localités frontalières au reste du territoire national, ou les localités d'un même Etat entre elles, l'on peut réfléchir à la mise en place d'infrastructures de transports dans une logique nationale ou communautaire. Si au niveau interne des différents Etats, c'est la notion de centralité qui doit régir la mise en place de ces infrastructures, au niveau communautaire, le concept de « pays-frontière » tel qu'énoncé par les conclusions du Séminaire de Sikasso en 2002 nous paraît pertinent.

    B. Le concept « pays-frontière », une innovation dans l'aménagement des zones frontalières

    Aux termes du séminaire sous-régional de Sikasso le «pays-frontière» a été définit comme un espace géographique à cheval sur les lignes de partage de deux ou plusieurs États limitrophes où vivent des populations liées par des rapports socio-économiques et culturels. Cette définition du «pays-frontière» reconnaît l'existence des lignes frontières entre les différents pays et s'appuie sur une communauté dynamique vivant des mêmes réalités socioéconomiques et culturelles. Il vise à renforcer la politique d'intégration sous-régionale ouest-africaine par la création de zones d'intégration de proximité.

    A partir de sa mise en oeuvre, les populations commenceront par se sentir membres d'une entité unique à laquelle elles peuvent s'identifier. De plus, la notion de Nation prend tout son sens et les obstacles liés à la suspicion d'exclusion de certaines communautés seront

    20 NOYOULEWA T. A. (2006) : Enclavement et développement des zones rurales d'Afrique subsaharienne : Recherche bibliographique, Mémoire de DEA, Société - Environnement - Aménagement, Laboratoire de Recherche sur la Dynamique des Milieux et des Sociétés (LARDYMES), Université de Lomé, 111 pages.

    21 Traduit de l'anglais « a land region having no access to a waterway » tel que présenté dans le dictionnaire cité

    22 RABALLAND G. et ZINS M. (2003) : "La question de l'enclavement en Asie centrale", in Cahiers d'Etudes sur la Méditerranée Orientale et le Monde Turco-Iranien (CEMOTI), n° 35 de janvier - juin 2003. http://www.cemoti.revues.org/document759.htlm, document téléchargé le 28 juin 2005.

    franchis afin que la marche des nouveaux Etats de l'Afrique de l'Ouest vers la constitution des Nations aboutisse plus rapidement.

    L'avantage de cette approche est que, dans le plus grand nombre de pays au monde, les revendications identitaires commencent toujours autour d'une question d'exclusion par rapport aux richesses du pays. Dans cette logique, que ce soit chez les Touaregs du Niger, dans la Région du Delta au Nigeria, chez les Basques en Espagne ou en France, les mouvements de revendication ou de sécession commencent par le fait que des peuples se sentent exclus de l'entité territoriale à laquelle ils sont supposés appartenir. Dans certains cas, les difficultés de ralliement de la capitale par les voies de communication conventionnelles restent la preuve physique de cette exclusion.

    En conséquence, les populations qui le peuvent, du fait de leur situation géographique, se tournent vers les pays voisins pour s'approvisionner en produits de base. L'absence des routes qui permettraient l'insertion spatiale de ces sociétés dans le réseau de leur pays se conjugue avec l'unité linguistique et monétaire23 pour entraîner un fait nouveau. Il s'agit du fait que les populations des zones frontalières enclavées développent une logique qui traduit une exclusion par rapport au reste du pays. La conséquence de cette situation est que, à long terme, l'unité nationale risque d'être menacée.

    Autant dire que la route, plus qu'un simple moyen de transport, est un outil d'unité nationale. Elle permet à toutes les communautés de se sentir proches à travers les échanges qu'elles entretiennent. C'est pourquoi, il a été souvent reproché aux dirigeants politiques de certains pays de ne se rendre dans certaines localités qu'en période électorale et de ne s'en souvenir que quand approchent des élections du fait de l'impraticabilité des routes. Une telle situation n'est pas de nature à conforter l'unité nationale qui, en définitive, est la base de toute intégration régionale véritable et durable.

    Paragraphe 2 : Transports et réseau routiers comme facteur d'intégration régionale

    L'intégration régionale s'entend dans cette analyse de la formation d'espaces communautaires au sein desquelles les pratiques sont harmonisées (A) puis de la possibilité offerte à chaque citoyen des Etats membres de cette entité à mouvoir sans contraintes majeures (B).

    23 Allusion au fait que dans la plupart des cas, les frontières ont divisé des familles qui sont dorénavant à cheval sur une frontière. Aussi, l'usage du F CFA dans les pays frontaliers encourage-t-il les échanges commerciaux.

    A. Le rôle des transports et du réseau routiers dans la réalisation d'un ensemble

    communautaire homogène

    A la première Session de la Conférence des Ministres Africains des transports tenue à Alger du 21 au 25 avril 2008 sur le thème «Transport, moteur de l'intégration et du développement durable de l'Afrique», les Ministres en charge des transports du continent ont adopté une série d'initiatives connues sous le vocable de « Déclaration d'Alger ». Sur la base de ce texte et au vu de la Décision EX.CL/Dec.294 de la IXème Session du Conseil Exécutif tenue à Banjul en juillet 2006 instituant la Conférence des Ministres Africains des Transports, les Ministres des transports réunis ont réaffirmé « le rôle des infrastructures et des services de transport, dans le développement politique, économique et social ainsi que pour l'intégration de l'Afrique, afin de lui assurer une participation significative à la mondialisation.»

    Pour ce faire, les Communautés Economiques Régionales (CER), en tant que piliers de l'intégration africaine, sont appelées à la mise en oeuvre des programmes de développement des infrastructures et des services de transport. L'idée qui sous-tend cette préoccupation est que l'intégration au niveau des CER passe par l'existence d'un système de transport fiable, sûr, efficace et abordable en Afrique.

    Le phénomène du transport en commun reste un défi à relever en Afrique de l'Ouest et dans l'espace UEMOA en particulier. Pour relever ce défi qui ouvrirait la voie à une intégration réelle des peuples, la construction d'une infrastructure routière de bonne qualité et en quantité suffisante est un impératif. A cet égard, l'universitaire et Secrétaire Général du Centre d'Etudes Européennes et de l'Intégration (CEEI), Luc Marius IBRIGA s'interroge sur l'utilité de l'Union africaine et des institutions sous-régionales si elles ne fondent pas les projets d'un développement durable du continent sur les réalités sociales diverses ; elles mêmes tributaires de la possibilité qu'ont les peuples à se déplacer facilement sur des routes bien faites.

    De fait, si l'UEMOA, entité faisant partie intégrante de la CEDEAO, veut, à terme, réaliser ses objectifs en matière d'intégration, il va falloir qu'elle puisse au préalable mettre en place les infrastructures adéquates à la libre circulation des personnes et des biens.

    B. Les transports et le réseau routiers, facteurs de la libre circulation dans

    l'UEMOA

    La libre circulation des personnes et des biens est la clé de l'intégration. Les chefs d'Etat en ont conscience. Pour réussir l'intégration, il va falloir que les gens se sentent libres de circuler. Sur cette base, la route apparaît comme l'un des meilleurs outils véritables dans l'intégration effective des populations de cette sous-région. En fait, comment des peuples

    peuvent-ils se sentir membres d'une même entité sous-régionale si, au préalable, ils ne peuvent pas facilement accéder aux lieux qu'ils désirent visiter ?

    De nouvelles théories devraient prendre corps pour guider la mise en place des infrastructures de transport dans l'espace communautaire. En effet, la mise en commun des ressources communautaires permettra de viabiliser les routes qui relient des localités voisines, habitées très souvent par un même peuple mais à cheval sur deux entités nationales différentes. La viabilisation de ces infrastructures permettra de rapprocher davantage les populations des Etats membres de l'UEMOA et induira à coup sûr un plus grand contrôle en matière de sécurité. Cette conséquence est aussi perceptible en cas de ralliement des zones de production à celles de consommation afin de créer une plus-value morale du fait de la prise de conscience de la complémentarité entre les régions et entre les pays d'un même espace. Autant d'éléments qui peuvent stimuler l'intégration à la base et entre les peuples.

    Dans cette optique, l'UEMOA s'attelle à coordonner, harmoniser et intégrer les réseaux et les services des transports et à faciliter le transport et le transit routiers au niveau des corridors conjointement identifiés avec la CEDEAO. Le Programme d'Actions Communautaires des Infrastructures et des Transports Routiers (PACITR) prévoit dans cette même logique, l'installation des postes de contrôle juxtaposés et l'élimination des pratiques anormales.

    Au total, l'importance et le rôle des infrastructures et des services de transport dans le développement politique, économique et social, ainsi que pour l'intégration de l'Afrique sont évidents. Les infrastructures assurent à terme à la sous-région et plus encore à l'Afrique une participation plus significative à la mondialisation. C'est pourquoi, pour que l'intégration régionale soit effective, il faut avant tout construire de véritables Nations économiquement viables.

    Ainsi, l'état des économies nationales et communautaire demeure le fondement de la politique d'intégration ; mais il paraît nécessaire d'analyser le rôle que peuvent jouer les transports routiers dans leur développement.

    Section 2 : Rôle des transports et du réseau routiers dans le développement des Etats de l'UEMOA

    En adoptant en avril 2008 un Plan d'action pour les Transports Routiers sur la période 2008-2012, les Ministres Africains des transports traduisaient dans les faits l'attachement des Gouvernements de leurs pays respectifs à un développement durable du continent pour le bien-être des populations.

    A l'échelle du continent, les chantiers d'infrastructures requièrent un budget de 5 milliards de dollars par an soit près de 3 000 milliards de F CFA. Dans la sous-région ouestafricaine, les investissements au titre du Programme Communautaire des Infrastructures Routières est de 1 195 milliards de F CFA. Au niveau national, les Etats devront leur consacrer 5% du PIB sans compter les sommes nécessaires pour la maintenance des routes. Ce faisant, les retombées de ces engagements sont considérables. Selon une étude datant de 2006, les entreprises africaines sont compétitives lorsque seule la productivité de l'usine est prise en compte. Mais elles perdent leur compétitivité lorsque le surcoût lié à la médiocrité des moyens de transport est pris en compte. En ce sens, ne pas investir dans les infrastructures ne fait que perpétuer le fardeau. En Ouganda par exemple, on estime que les exportations du secteur des textiles coûtent 80% de plus en raison des coûts élevés des transports.

    Pour cela, il y a lieu de montrer le rôle des transports et du réseau routiers dans les économies nationales des Etats (Paragraphe 1) puis, partant, dans l'économie de la communauté tout entière (Paragraphe 2).

    Paragraphe 1 : L'importance des transports et réseau routiers dans les économies

    nationales

    L'importance des transports et du réseau routiers dans les économies nationales est examinée à travers le fait que la route est à la fois un vecteur de liaison entre bassins de production et points de commercialisation (B) d'une part, et entre les ports côtiers et pays de l'hinterland (B) d'autre part.

    A. La route, vecteur de liaison entre bassins de production et centres de

    commercialisation

    La déconnexion de certaines contrées rurales par rapport à l'espace territorial joue contre la solidarité nationale en dépit des efforts qui sont faits jusqu'ici pour promouvoir un développement intégral. Ainsi, les zones enclavées, très souvent rurales, apparaissent comme les zones les plus pauvres à l'échelle des Etats. Eu égard aux difficultés des transports qui y prévalent, les paysans de ces contrées sont obligés de vendre leurs récoltes à des prix dérisoires du fait de l'impossibilité d'accès aux points de commercialisation. On assiste dès lors à une augmentation des prix des opérations culturales de l'ordre de 44% à 75%. Dans le même temps, le prix des intrants agricoles connaît une hausse qui avoisine 16% contre 50% pour les prix d'achat des outils de travail. Lorsqu'on sait que, contrairement à la tendance des prix d'achat des diverses composantes du prix de production, les prix de vente des produits récoltés connaissent plutôt une tendance à la baisse par rapport à ceux pratiqués dans les marchés plus intégrés au réseau national, on peut aisément déduire que les populations vivant

    dans ces localités rurales frontalières et/ou enclavées sont plus exposées à la pauvreté. En ce sens, l'on a pu estimer à 65% la variation des prix des céréales à Koutougou, localité frontalière avec le Bénin, située au sud-est de la préfecture de la Kéran au Togo, durant la campagne agricole 2004-200524. Une telle faiblesse des prix des céréales à Koutougou découle de sa situation enclavée entre la rivière Binah au Sud, la chaîne de l'Atakora au Nord et à l'Ouest puis la frontière béninoise à l'Est.

    Pour inverser cette situation, la mise en place des infrastructures de communication devient un impératif. Ainsi, un nouveau maillage doit voir le jour afin de permettre de relier les pôles de productions et les centres urbains ou semis-urbains commerciaux. Cette initiative a pour but de faciliter l'accès des paysans aux points de vente de leurs produits afin d'accroître leurs possibilités financières. Quoiqu'il en soit, c'est l'économie nationale qui en ressentira les retombées puisqu'elle pourra profiter des investissements réalisés par la masse paysanne qui, il faut le rappeler, représente 60 à 90% de la population active dans les Etats de l'UEMOA.

    B. La route, vecteur d'échanges entre pays côtiers et ceux de l'hinterland

    Le rôle des infrastructures routières dans le développement économique de ces Etats peut s'apercevoir à travers l'importance que revêt la route dans les liaisons entre les pays côtiers et ceux enclavés du sahel. Ainsi, la route assure le transport de plus de 95% des marchandises entre les ports des pays de la côte et les pays enclavés (Burkina Faso, Niger et Mali).

    Par ailleurs, autant dans les pays côtiers que dans ceux de l'hinterland, on remarque que la part prise par les droits et taxes à l'importation dans les recettes nationales n'est pas négligeable. Elle varie en effet de 03% et 05% selon les années et les pays25. De ce point de vue, les exportations togolaises vers les pays de l'UEMOA - qui se font à 95% par la route - représentent 43,3% de la valeur totale des exportations et se chiffrent à 61,3 milliards de F CFA. Ces transactions se font essentiellement dans l'ordre d'importance avec le Niger (17,1 milliards soit 12% des exportations) et le Bénin (14,6 milliards soit 10,3% des exportations) suivis par le Burkina Faso avec 9,2% de la part des exportations26. En 2004 par exemple, le transit en import et export au port de Lomé en provenance et à destination des pays du Sahel

    24 Ces données sont tirées de NOYOULEWA T. A. (2005) : Koutougou, un terroir Temberma enclavé dans la Kéran, Mémoire de Maîtrise de géographie rurale, Université de Lomé, pp. 85-87.

    25 Au Togo, les droits et taxes à l'importation (DTI hors TVA) sont de 40 738,7 milliards, 48 037 milliards et 42 831,6 milliards en 2006, 2007 et 2008 respectivement et représentent 4,01%, 4,64% puis 4,10% du PIB durant les mêmes années dans le même ordre selon le Rapport économique, financier et social, Annexe n°2, Loi de finances 2009, pages 13-27.

    26 Données tirées du Rapport économique, financier et social, Annexe n°2, Loi de finances 2009, page 35.

    membres de l'UEMOA était de 914 mille tonnes de marchandises. Or, le seul moyen de transport de marchandises reliant ces pays et le port de Lomé est la route terrestre.

    A l'évidence, les défaillances des infrastructures routières sont ressenties de manière disproportionnée par les populations les plus démunies et les plus enclavées dans les Etats. Ainsi, une mobilisation visant à améliorer l'état des routes permettra aux personnes marginalisées de participer au développement de leur pays.

    Autant dire que pour que l'Union joue pleinement son rôle d'intégration, il est urgent de mener des politiques qui favorisent la promotion de pôles de développement et qui contribuent à un meilleur rééquilibrage du peuplement et à l'émergence de véritables réseaux routiers fonctionnels basés sur les intérêts comparés de chaque Etat.

    Paragraphe 2 : L'importance des transports et réseau routiers dans l'économie communautaire

    En matière d'infrastructures, rappelons que l'Union en est faiblement dotée. Elle accuse un retard important par rapport à la plupart des autres régions du monde en termes de quantité, qualité, coût et égalité d'accès des populations aux infrastructures de communication. Il en résulte une faible compétitivité des économies, une imparfaite intégration des marchés, des difficultés de circulation des personnes, des biens et services et une faible croissance économique, obstacle majeur à la réduction de la pauvreté. Alors que le minimum requis pour induire le développement en termes de densité du réseau routier est d'au moins 20 à 25 km de route pour 100 km2, la zone de l'UEMOA n'est qu'à une moyenne de 4,73 km. Il s'en suit un blocage manifeste de la production et des échanges, puisque beaucoup de zones ne sont pas desservies. C'est pourquoi ce paragraphe prend en compte la route comme facteur de l'intégration de l'économie (A) et comme stimulateur du développement (B).

    A. La route, facteur d'une économie sous-régionale intégrée

    On note en Afrique occidentale une forte proportion de la part du coût des transports dans la valeur marchande des produits à l'exportation avec par exemple 36% pour le Mali contre 9% dans les pays développés et 17% pour l'ensemble des pays les moins avancés. Ce faisant, l'implication de cette situation est la hausse des prix des produits de consommation de base.

    L'espace UEMOA est loin d'être un îlot de prospérité socio-économique tel qu'en rêvent les dirigeants. Actuellement, les approches adoptées par les Etats sont plutôt celles d'économies concurrentielles, essentiellement basées sur des activités de rentes. Celles-ci sont soit d'origine agro-exportatrice, soit d'exploitation minière à l'état brut, soit de commerce de

    réexportation avec une économie d'entrepôt qui tend à transformer la région en de véritables « poubelles » des pays industrialisés. Par ailleurs, les échanges entre les Etats de la région sont estimés à seulement 15%. Le reste (85%) se fait avec l'extérieur, mais à des conditions qui ne permettent pas de tirer profit de ces activités commerciales27. Cette désintégration de l'économie sous-régionale est non seulement le fait de la similitude des conditions naturelles et humaines mais davantage découle de l'inexistence des voies de communications terrestres pour le déplacement des moyens de production et des produits.

    Il est temps d'inverser cette tendance extravertie de l'économie de la sous-région par la diversification des productions et par le renforcement du support physique des échanges. La politique d'aménagement du territoire devrait également mettre l'accent sur la création de meilleures opportunités de développement en renforçant la complémentarité des économies. Par exemple, la crise ivoirienne a mis en évidence l'insuffisance et les grands déséquilibres du maillage et des liaisons entre les villes côtières et celles de l'intérieur de la région. En effet, l'analyse du fonctionnement de l'espace montre que les réseaux urbains sont déséquilibrés et mal connectés, faute de réseaux routiers intégrés, de chemins de fer achevés et de moyens de transport adéquats.

    B. La route, véritable stimulateur du développement communautaire

    Sur le plan social, la pauvreté demeure une préoccupation quotidienne dans les Etats membres. Le phénomène est aggravé par d'autres fléaux tels que le Sida, le paludisme et l'analphabétisme. En effet, la plupart des indicateurs sociaux de l'Union sont à des niveaux peu satisfaisants. Le nombre de personnes vivant en dessous du seuil de pauvreté se situe à 45 % en moyenne de la population totale. Le taux de mortalité infantile (0 à 1 an) est estimé à 103 %o contre 92 %o pour l'Afrique subsaharienne. Les taux de scolarisation primaire et secondaire se situent, respectivement, à 64 % et 15 %, contre 77 % et 27 % pour l'Afrique Subsaharienne. L'espérance de vie à la naissance y est de 47 ans, au même niveau que celui de l'Afrique Subsaharienne.

    Dans l'ensemble de l'espace UEMOA, la question du développement reste une préoccupation majeure. Les graphiques n°s 4 et 5 conçus à partir des données du Bilan du monde 2007 : L'Atlas de 174 pays, la situation économique internationale28, présentent les principaux déterminants socio-économiques dans les différents pays et dans l'ensemble de

    27 Cette situation découle d'une situation différenciée entre pays côtiers et pays de l'hinterland. Les premiers, du fait de leurs ports, sont des lieux de transit au profit des seconds qui ne peuvent échanger essentiellement qu'avec le moyen portuaire.

    28 Le Monde : Bilan du monde 2007 : L'Atlas de 174 pays, la situation économique internationale, Le Monde, Hors série, pp. 41, 89 et 125

    l'espace communautaire. Ces graphiques établissent respectivement le PNB par habitant et l'indice du développement humain dans les différents Etats de l'espace.

    Figure n° 5: PNB/hab. dans les pays de l'UEMOA

    0

    Bénin

    900

    800

    700

    PNB/Hab.

    600

    500

    400

    300

    200

    100

    Burkina
    Faso

    Côte
    d'Ivoire

    Guinnée
    Bissau

    Mali

    Niger

    Sénégal

    Togo

    UEMOA

    510

    400

    840

    370

    380

    240

    710

    350

    475

    PNB/hab.

    Pour évaluer le niveau de développement des pays du monde, l'on a recours à des indices qui sont soit le Produit Intérieur Brut (PIB) soit le Produit National Brut (PNB). Le PIB, en comptabilité nationale, est la somme des valeurs ajoutées (biens et services) réalisées annuellement sur le territoire national par les entreprises d'un pays, quelle que soit leur nationalité. Quant au PNB, c'est la somme totale du PIB et du solde des revenus de facteurs de production transférés par l'étranger et/ou à l'étranger. Il est souvent retenu pour caractériser la puissance économique d'un pays. Dans l'UEMOA et au regard du graphique n°5, il est en moyenne de US 475 $. Sur cette base, seuls la Côte d'Ivoire, le Sénégal et le Bénin avaient en 2007 un PNB supérieur à la moyenne communautaire avec 840, 710 et 510 dollars US dans le même ordre. Dans le même temps, le Niger et le Togo, par exemple, ne présentent que 270 et 350 dollars US par habitant et par an respectivement.

    A l'évidence, la moyenne régionale reste encore bien loin de celle des autres pays en développement, des pays émergents ou des pays développés. On peut ainsi noter que l'Angola et le Cameroun ont un PNB de 1350 et 1010 dollars US contre 3460 et 1740 dollars US pour le Brésil et la Chine. En ce qui concerne les pays développés, ils ont un PNB plus élevé, se situant autour de 38 980 et 34 810 dollars US pour le Japon et la France à titre indicatif.

    Cependant, cette donnée qui caractérise la puissance économique ne traduit pas réellement le niveau de développement du pays. Aussi a-t-on recours à l'Indice de Développement Humain (IDH) dont la valeur par pays est présentée sur la figure n° 6.

    Figure n° 6: IDH dans les pays de l'UEMOA

    0,5

    0,4

    IDH

    0,3

    0,2

    0,1

    0

    Bénin

    IDH

    0,44

    0,33

    0,4

    0,34

    0,49

    0,46

    0,42

    0,42

    0,31

    0,6

    Burkina
    Faso

    Guinnée
    Bissau

    Niger

    Sénégal

    Togo

    UEMOA

    Côte
    d'Ivoire

    Mali

    L'Indice de Développement Humain (IDH), est un indicateur économique servant à évaluer le niveau de développement d'un pays et reposant sur trois éléments fondamentaux : la longévité (espérance de vie à la naissance), le savoir (taux d'alphabétisation et de scolarisation) et le niveau de vie (PNB par habitant). Dans son appréciation, plus il se rapproche de 1, plus le niveau de vie du pays est élevé. Il est en moyenne de 0,405 dans l'UEMOA et dénote du niveau de pauvreté qui y règne.

    Mais, la situation diffère d'un pays à un autre. Ainsi, le Togo, le Sénégal, la Guinée, le Bénin et la Côte d'Ivoire ont un IDH respectif de 0,495 ; 0,460 ; 0,445 ; 0,428 et 0,421. Quant aux autres pays, leur IDH est inférieur à la moyenne communautaire.

    Toutefois, il faut préciser que l'IDH des pays de l'UEMOA les placent très loin dans le classement mondial des pays riches. A ce titre, on peut citer la France et les Etats-Unis qui ont un IDH de 0,942 et 0,948 dans le même ordre. Avec l'IDH le plus élevé de la zone, le Togo, par exemple, est classé 143ième pays sur 177 classés. Quant au Niger, son IDH de 0,311 le place simplement en dernière position du classement mondial.

    En définitive, notre analyse nous permet d'avancer que la zone UEMOA constitue une véritable poche de pauvreté dans le monde et que des efforts doivent être faits en vue de la rendre plus viable économiquement. A ce sujet, le développement des infrastructures de transports routiers constitue une voie idoine pour y parvenir.

    Dans un article intitulé « Des infrastructures pour le développement » paru dans Jeune Afrique hors série n°12 : l'état de l'Afrique en 2006, Gobind NANKANI, vice-président de la Banque Mondiale pour l'Afrique, pense qu'à l'heure où l'Afrique et ses partenaires élaborent des stratégies pour réduire la pauvreté et doper la croissance, la construction d'infrastructures fait figure de priorité. Elles conditionnent à son avis autant le bien-être des hommes que la croissance économique.

    A cet effet, il affirme que les infrastructures de transport sont au coeur de la stratégie de la Banque Mondiale pour l'Afrique. Leur amélioration devrait accroître la productivité, libérant les potentialités pour l'agriculture, une activité qui emploie près de 75% d'Africains.

    Dans cet ordre d'idées, pour réduire la pauvreté en Afrique d'ici 2015, les pays africains devront porter leur niveau de croissance à 7% par an. Une infrastructure inadéquate rendra plus difficile cet objectif. Une étude de la Banque Mondiale montre que si le niveau des infrastructures de communication avait été dans les années 1980 comparable à celui de l'Asie de l'Est, le taux de croissance annuel en Afrique afficherait aujourd'hui 1,3 point de plus. Dans la réalité, au cours de ces années, l'aide au développement provenant de l'étranger consacrait 4 milliards de dollars aux infrastructures. Cette enveloppe a été réduite, pour n'atteindre que 2,4 milliards de dollars en 2003. Dans le même temps, l'élan attendu par le secteur privé ne s'est jamais concrétisé et les investissements privés ont été plutôt absorbés par les télécoms et se sont focalisés sur l'Afrique du Sud29.

    Cependant, outre la nécessité de mettre en place les infrastructures routières pour conforter l'unité nationale, doper l'économie des Etats, réaliser l'intégration de ces Etats et la croissance de l'économie communautaire, il y a lieu de noter que la levée des barrières tarifaires et non tarifaires ainsi que des autres obstacles à la fluidité des transports participe à la construction d'un espace communautaire économiquement viable et homogène.

    29 NANKANI G. (2006) : Des infrastructures pour le développement, in Jeune Afrique : L'état de l'Afrique en 2006 : 53 pays à la loupe, hors série n°12, page 75.

    Chapitre 2 : COMMENT RENTABILISER LES INFRASTRUCTURES ROUTIERES DANS L'ESPACE UEMOA ?

    La Recommandation n°04/97/CM du 21 juin 1997 du Conseil des Ministres en charge des transports de l'UEMOA énonçait dans son préambule le rôle primordial des infrastructures et des transports routiers dans la réalisation de l'intégration économique des Etats membres de l'UEMOA. Aussi ajoutait-elle la nécessité d'entreprendre, à court et moyen termes, des actions prioritaires, en matière d'infrastructures et de transports routiers, dans la perspective de l'élaboration et de la mise en oeuvre, à terme, d'une politique sectorielle commune des transports.

    Pour la Commission Economique pour l'Afrique (CEA), les transports sont indispensables pour la réalisation des Objectifs du Millénaire pour la Développement (OMD) et de ceux de l'intégration en Afrique. Il faut, pour ce faire, absolument renforcer la compétitivité de l'Afrique sur les marchés mondiaux et régionaux en réduisant le coût élevé des transactions qui est aggravé par le mauvais état des infrastructures de transport30.

    En s'inspirant des conclusions du Conseil des Ministres des Travaux Publics et des Transports des Etats membres de l'UEMOA, réuni le 30 mai 1997 à Ouagadougou (Burkina Faso), la Recommandation invite les Etats membres de l'UEMOA à mettre en oeuvre, à court et moyen termes, un Programme d'Actions Communautaires des Infrastructures et des Transports Routiers (PACITR), s'articulant autour des axes qui prennent en compte le plan institutionnel, ceux des infrastructures routières, des transports et de la sécurité.

    Sur cette base, pour tirer un plus grand profit de la route dans l'environnement d'étude, l'Union doit renforcer ou mettre en place les institutions et les infrastructures routières (Section 1) puis lever les obstacles liés à la fluidité des transports tout en renforçant la sécurité sur les routes (Section 2).

    Section 1 : Sur les plans institutionnel et des infrastructures routières

    Tout comme à l'échelle des Etats, toute politique visant à améliorer le secteur des transports dans l'Union doit se fonder sur des institutions adaptées et dotées de personnalité morale et juridique (Paragraphe 1). C'est à elles que revient la mission de mettre en place et d'exécuter les différents projets en matière de réhabilitation, de construction et d'entretien des infrastructures routières (Paragraphe 2).

    30 CEA et UA (2008) : Etat de l'intégration régionale en Afrique III, page 44.

     

    NOYOULEWA T. Adong (2009) | Transports routiers et intégration des Etats de l'UEMOA

    55

    Paragraphe 1 : Des réformes institutionnelles

    Les réformes institutionnelles en matière de gestion des infrastructures routières dans l'espace UEMOA doivent se faire à une échelle nationale (A) d'une part et à une échelle communautaire (B) d'autre part.

    A. Les réformes institutionnelles à l'échelle nationale

    En général, l'option faite par un organe national ou interétatique d'améliorer la dotation de son territoire en une infrastructure donnée provient de ses dirigeants. Il en est de même pour les infrastructures de transports routiers qui, inscrites dans une logique concurrentielle, peuvent faire l'objet d'une marginalisation par rapport à d'autres moyens de transports.

    Pour que l'Union opte pour de grands efforts de construction, de réhabilitation et d'entretien de routes, il faut d'abord que ses responsables soient convaincus du bien-fondé d'une telle option. En effet, bien d'autres moyens de transports existent ou peuvent exister dans l'espace communautaire. Il s'agit, entre autres, de la voie ferroviaire et de la voie aérienne.

    Mais, il faut encore souligner que la route reste le moyen le plus efficace et le plus accessible dans l'espace communautaire. Pour ce faire, les dirigeants doivent résolument s'engager sur la voie de l'amélioration des performances des routes nationales. C'est dans cette perspective que doivent s'inscrire les réformes institutionnelles qui visent à doter les Etats d'institutions capables de recentrer la question des transports routiers ou à renforcer celles déjà existantes.

    De ce fait, des améliorations institutionnelles devront permettre aux Etats de favoriser :

    - la création de comités nationaux, sectoriels et sous-sectoriels en matière de transport au niveau des Etats,

    - la création et/ou le renforcement des banques de données routières avec l'introduction des Systèmes d'Informations Géographiques (SIG),

    - la mise en place d'un mécanisme de suivi et d'évaluation du Programme au sein des

    Etats.

    En définitive, cet ensemble d'aménagements au niveau des Etats membres de l'UEMOA permettront à terme la mise en place d'un système d'échanges d'informations sur le secteur au niveau communautaire.

    B. Les réformes institutionnelles à l'échelle communautaire

    Les projets actuels visant à l'harmonisation des normes de construction et d'entretien du réseau inter-Etats, à la définition et à l'adoption d'un statut juridique communautaire du réseau inter-Etats, à l'élaboration d'un Code communautaire de la route et à la mise en place d'un système d'information sur les accidents de la route sont à encourager. Ces projets devraient dépasser à présent leur stade de voeux pour connaître une réelle application dans les faits.

    C'est pourquoi nous recommandons la mise sur pied de comités inter-cantonaux à cheval sur les frontières. Une telle initiative permet que des cantons voisins appartenant à deux pays différents puissent collaborer à travers les comités inter-cantonaux dans la recherche de solutions aux questions de transport. Aussi, ce comité, reconnu par les administrations des Etats auxquels ils appartiennent, seront-ils actifs dans tous les domaines relevant du domaine de l'aménagement du territoire frontalier.

    En somme, la création de ce nouvel acteur en matière de gestion des questions relevant de l'Union permet de combler le vide depuis longtemps laissé par les dirigeants. En effet, très souvent, les populations à la base, qui sont censées vivre l'intégration au quotidien sont mises à l'écart dans la gestion des problèmes qui les concernent. Il en est ainsi des populations frontalières qui vivent tous les jours toutes les formes d'intégration sans trop savoir qu'il existe à l'échelle du pays des structures en charge de ces questions.

    L'objectif pratique de cette réforme institutionnelle est de résoudre la question du procès qui est souvent fait à l'UEMOA et qui fait d'elle une institution aux mains des élites. L'association des peuples à la gestion de leurs problèmes quotidiens à une échelle supérieure à celle de leurs Etats leur fera prendre conscience de la réalité de l'intégration.

    Ce choix de renforcement institutionnel au sein des Etats devrait induire un meilleur équilibre afin que le projet communautaire en matière d'aménagement du territoire ne souffre des disparités perpétuelles qui existent entre les Etats. C'est d'ailleurs cette prédisposition qui permettrait aux Etats de se mobiliser au même titre et avec un même engagement dans la recherche des moyens économiques pour réaliser les projets en matière d'infrastructures de transports.

    Paragraphe 2 : Renforcement de la dotation en infrastructures routières La dotation de l'espace communautaire en routes, en quantité (A) et en qualité (B) suffisantes est une nécessité.

    A. De la dotation en infrastructures routières en quantité suffisante

    Celle-ci résulte du fait que les indicateurs relevés autant en termes de longueur des routes par unité de surface que par effectif de population sont très faibles dans l'Union. Les seuils enregistrés de nos jours sont de 20,70 km/100 km2 et de 1,87 km pour 1000 hab. Cette dotation a pour objectifs de moderniser tous les maillons manquants du réseau routier interEtats, d'harmoniser les programmes d'entretien périodique et courant des routes bitumées inter-Etats et d'uniformiser le niveau de service des routes revêtues du réseau inter-Etats.

    La démarche actuelle qui régit la réalisation de ces objectifs dans l'Union est conçue autour de l'élaboration d'un programme d'action communautaire à partir des programmes nationaux, de la répartition des axes routiers en routes inter-Etats et internationales (RIE) et en réseau de routes d'interconnexion (RI). Dans ce cadre, le programme d'action commune prend en compte deux composantes majeures, à savoir les routes bitumées et les routes en terre. Sur chacune de ces routes, trois sous-composantes seront exécutées. Il s'agit de l'entretien, de la réhabilitation et de l'aménagement. De plus, un programme spécifique couvre le volet ouvrages d'art.

    Selon le communiqué final rendu public à l'issue des travaux du Conseil des Ministres chargés des Infrastructures et des Transports Routiers des Etats Membres de l'UEMOA réuni le 31 juillet 2009 à Ouagadougou, les différents problèmes qui se posent dans le cadre de la définition et de la mise en place d'un schéma d'amélioration des infrastructures de transport routier dans l'espace UEMOA ont été analysés. Ces difficultés concernent, notamment l'inexistence de textes communautaires harmonisés devant faciliter et améliorer la construction, l'entretien, l'exploitation et la gestion de ces infrastructures, conditions indispensables devant permettre à celles -ci de jouer pleinement leur rôle crucial dans le développement économique de la sous -région31.

    En son état actuel, le programme d'action communautaire vise essentiellement à relever les seuils de dotation de la zone en routes. Mais il ne sert à rien de construire des routes sans pouvoir les entretenir ou pour les laisser se dégrader rapidement du fait du mauvais usage qui en est fait.

    B. Des infrastructures routières de qualité

    Le programme d'action communautaire en matière d'infrastructures routières met un accent particulier sur la réhabilitation et l'aménagement par les Etats du réseau routier interEtats de l'Union, l'affectation par les Etats de ressources plus importantes à l'entretien de

    31 La Semaine de l'UEMOA, bulletin hebdomadaire de l'UEMOA, N° 247 Du 03 au 09 août 2009, document Bull247.pdf téléchargé le 08 septembre 2009 sur www.uemoa.int.

    l'ensemble du réseau routier. Par ailleurs, il est indispensable d'oeuvrer pour le respect par les Etats de la charge à l'essieu d'exploitation de 11,5 tonnes sur le réseau routier et la mise en oeuvre par les Etats d'une politique nationale de recherche sur les matériaux de construction routière.

    Là encore, l'Union jette tout son dévolu sur les réalisations qu'elle peut faire et celles réservées aux Etats. Il se pose du coup la question de la pérennité des infrastructures. Les Etats ne peuvent-ils pas associer les populations à la gestion des routes ? Comment les Etats peuvent-ils mobiliser les ressources nécessaires à la construction des routes ?

    Généralement, la mise en place des infrastructures routières dans les pays du Sud répond aux besoins économiques. Ainsi, certaines régions à l'intérieur d'un même pays ont été plus dotées en routes que d'autres, créant des disparités énormes, qui elles-mêmes sont porteuses de disparités sociales. A titre indicatif, dans la Région des Plateaux au Togo, la zone Ouest, zone d'économie de plantation par excellence présente les seuils les plus élevés en routes par opposition à la zone orientale.

    Lorsqu'on sait le niveau toujours élevé d'investissement que requiert la construction des routes, ce choix paraît raisonnable. Cependant, l'évidence est que moins une région est desservie, moins elle se développe. C'est donc un grand défi financier que doit relever l'Union dans sa marche vers le développement.

    A titre d'exemple, le coût initial du volet relatif aux infrastructures routières interétatiques au titre du Programme d'Actions Communautaires des Infrastructures et du Transport Routiers (PACITR) adopté en 2001 par l'UEMOA est de 11 237 milliards de F CFA pour couvrir 13 300 km de routes. Dans le même temps, le programme quinquennal prioritaire qui concerne 8 610 km de routes devait coûter 637 milliards de F CFA. Quant à la composante des routes secondaires rurales qui vise à mettre en place un réseau routier rural transfrontalier de 750 km, il devait engloutir 3,75 milliards de F CFA sur trois ans.

    Il ressort de ces composantes et autres que le coût total du PACITR est de 1 253,5 milliards de francs CFA. De cet ensemble, seuls 281 milliards, soit 22,4% ont été débloqués alors que 972,5 milliards restent à rechercher. Il est alors clair que le défi de la mise en place des infrastructures routières s'assimile à bien des égards à une question budgétaire. Par ailleurs, quand elles existent, les routes dans l'Union doivent servir aux transports de plus en plus fluides et en sécurité.

    Section 2 : Les défis de la fluidité et de la sécurité des transports

    Il s'agit de présenter les dispositions à mettre en oeuvre au sein de l'UEMOA pour lever les obstacles relatifs aux transports routiers (Paragraphe 1) et à la sécurité sur les routes (Paragraphe 2).

    Paragraphe 1 : La fluidité des transports routiers dans l'espace UEMOA

    La question de la fluidité des transports routiers dans l'UEMOA est un élément essentiel dans la viabilisation de la route afin d'en faire un outil de développement et d'intégration. C'est en ce sens qu'il y a lieu d'examiner l'amélioration de l'état de la route (A) et les défis liés aux tracasseries dont font l'objet les usagers de la route (B), pour démontrer comment leur amélioration peut être décisive dans l'économie communautaire.

    A. L'amélioration de l'état des routes

    De tout le réseau routier dans l'espace UEMOA, seuls 21,7% sont constitués de routes nationales revêtues (RNR). Le reste rassemble, comme on l'a déjà dit, les routes nationales non revêtues, les pistes rurales classées et les pistes rurales non classées. Ainsi, le mauvais état des routes n'est plus à démontrer. Même les routes nationales revêtues, qui font toujours l'objet d'un entretien, sont en mauvais état par endroit.

    Tout comme la construction, l'entretien des routes nécessite des investissements aussi élevés qu'il est parfois difficile aux Etats de les assumer.

    Au Togo par exemple, le Fonds d'Entretien Routier (FER) a, entre 1997 et 2006, dépensé 58 086 712 617 francs CFA pour assurer l'entretien des routes sous son ressort. Durant ces dix années, à travers les postes de péages et d'autres activités, le Fonds a fait des recettes d'une valeur de 59 583 642 949 francs CFA. La marge brute de bénéfices sans les charges administratives sur dix ans s'élève donc à 1 496 930 330 francs CFA, soit moins de 150 millions de francs CFA par an32.

    L'idée qui sous-tend cette analyse est que, si l'on ne peut contester aux Etats leur rôle dans la construction des routes, l'entretien de celles-ci peut faire l'objet d'une nouvelle approche. Celle-ci doit associer les différents usagers à la gestion de la route et, par conséquent, à son entretien. Dans cette optique, le tableau n°5 ci-après propose une nomenclature des routes dans l'espace et les acteurs qui peuvent être associés à leur gestion.

    32 Données tirées de FER MAGAZINE n°01, mai - juillet 2007, page 16.

     

    NOYOULEWA T. Adong (2009) | Transports routiers et intégration des Etats de l'UEMOA

    60

    Tableau n°5 : Esquisse d'une gestion participative de la route dans l'espace UEMOA

    Echelle
    d'analyse

    Nomenclature
    des routes dans
    l'espace
    UEMOA

    Sous-composantes de la gestion de la route

    Construction

    Entretien
    périodique

    Réhabilitation et
    renforcement

    Aménagement
    et bitumage

    Construction
    des ouvrages
    d'art

    Commu-
    nautaire

    Routes
    Interétatiques

    UEMOA

    UEMOA

    UEMOA

    UEMOA

    UEMOA

    Routes
    d'interconnexion

    ETATS/UEMOA

    ETATS/PRIVES

    ETATS/PRIVES

    ETATS

    ETATS

    Nationale

    Routes
    Nationales

    ETATS

    ETATS/PRIVES

    ETATS/PRIVES

    ETATS

    ETATS

    Routes
    régionales

    ETATS

    PRIVES

    PRIVES

    ETATS

    ETATS

    Routes
    préfectorales

    ETATS

    REGIONS

    REGIONS

    -

    REGIONS

    Routes
    cantonales

    ETATS

    COMMUNES

    COMMUNES

    -

    COMMUNES

    De ce qui ressort de l'analyse du tableau n°5, la nomenclature en vigueur et qui permet de distinguer les routes nationales revêtues de celles qui ne le sont pas, les pistes rurales classées de celles qui ne le sont pas, ne permet pas de traduire les différents niveaux d'échelles dans lesquelles se posent les questions des transports.

    Pour pallier cette insuffisance, à défaut de changer complètement ladite nomenclature, il y a lieu d'introduire une nomenclature propre lorsqu'il est question de percevoir le problème des moyens de transport sous l'angle de leur gestion. De cette nouvelle approche, l'on pourra distinguer aisément les routes et les entités auxquelles elles sont rattachées. L'analyse doit alors se situer à deux niveaux : au niveau communautaire et au niveau national.

    Le niveau communautaire permet de distinguer les routes interétatiques et les routes d'interconnexion. Les routes interétatiques s'identifient aux routes à vocation internationale. Elles permettent dans l'espace UEMOA de relier les huit pays. Leur gestion devrait revenir dans toutes ses composantes à la Commission de l'UEMOA à travers son Département de l'Aménagement du Territoire Communautaire, des Transports et des Télécommunications. Quant aux routes d'interconnexion, ce sont, à l'échelle des Etats, les routes nationales. L'UEMOA peut participer à leur construction à travers des financements remboursables à long terme sur les bénéfices dégagés de la gestion des routes. Cependant, son rôle doit s'arrêter à ce niveau, le reste de leur gestion devant revenir aux organes nationaux de gestion des routes.

    Le niveau national regroupe l'ensemble du réseau routier sur le territoire national. Comme tel, il se subdivise en quatre types de routes, toutes devant être construites par les Etats à travers un organe central en charge des routes.

    NOYOULEWA T. Adong (2009) | Transports routiers et intégration des Etats de l'UEMOA

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    Les routes nationales sont celles qui ont pour vocation de relier les différentes régions au sein du pays. En ce qui concerne leur entretien courant, leur réhabilitation et leur renforcement, les Etats doivent établir un partenariat avec le secteur privé. Ici, le secteur privé est entendu comme des personnes physiques et morales représentant toute ou partie des usagers de la route. Il s'agit, entre autres, des conseils des chargeurs, des syndicats des conducteurs, des commerçants... Mais lorsqu'elles doivent faire l'objet d'aménagements ou de bitumage, c'est principalement l'Etat qui en est l'acteur.

    Par ailleurs, on distingue au niveau des Etats les routes régionales. Elles lient les préfectures d'une région entre elles. Leur gestion quotidienne doit faire l'objet de consortiums entre le public et le privé sur la même base que dans le cas des routes nationales.

    Dans ces deux cas, l'Etat assure la construction des ouvrages d'art, notamment les ponts et autres ouvrages de franchissement ainsi que le bitumage en cas de besoin.

    Les routes préfectorales lient les cantons d'une même préfecture. Ce sont les conseils régionaux qui doivent être les premiers responsables dans leur gestion alors que les communes devraient s'occuper de la dernière catégorie constituée de routes cantonales. Dans ces deux cas, la construction des ouvrages d'art qui sont des ponceaux et des radiers d'une valeur pas très importante, peut revenir respectivement aux régions et aux communes.

    La mise en place de cette approche ne va pas sans difficultés. La première relève du

    fait que les entités citées pour participer à la gestion de la route n'existent pas partout et, là elles existent, elles ne sont pas dotées d'une même personnalité juridique. C'est d'ailleurs ce

    qui appelle à l'harmonisation au préalable des politiques sectorielles, notamment dans le domaine de l'aménagement du territoire. En ce qui concerne les terminologies, elles peuvent bien s'adapter aux réalités de chaque pays. Ainsi, on pourra reconnaître facilement les routes préfectorales à travers les routes départementales, etc.

    Dans l'ensemble, l'ambition qu'a l'approche participative proposée est la mobilisation de ressources suffisantes pour entretenir les routes. Elle résulte du fait que, dans leur état actuel, les routes sont très peu entretenues par les Etats. Il revient alors à chacune des structures désignées de mettre en place un mécanisme pour rentabiliser la route. Le système des postes de péages devrait donc faire l'objet d'une analyse pour être introduit et/ou étendu avec les assouplissements nécessaires selon le type de route. D'ailleurs, une telle autonomisation de la gestion des routes responsabiliserait davantage les usagers et permettrait aux collectivités locales et régionales de dégager des ressources à investir dans d'autres domaines puisque la route doit à terme devenir une véritable industrie rentable.

    Outre les défis liés à l'amélioration de l'état des routes, la réduction des tracasseries sur les routes est un élément important dans la fluidité des transports routiers de l'espace.

    B. Les défis liés aux pratiques anormales

    Les tracasseries s'identifient aux entraves humaines rencontrées par les usagers de la route. Dans l'espace UEMOA, ce sont les contrôles administratifs effectués par les gendarmes, les policiers et les douaniers. Il s'agit pour nous de montrer les dispositions qui peuvent être prises en vue de faciliter la circulation sur les routes de l'Union étant entendu que les tracasseries ont été identifiées comme un frein à la fluidité des transports. Ainsi, outre l'OPA au niveau communautaire, il faut mettre un accent sur la création d'observatoires nationaux des transports, indépendants et dont le financement proviendrait des Etats et des autres acteurs du domaine des transports.

    Par ailleurs, la limitation au niveau des Etats des postes de contrôles routiers, permettrait aux usagers de passer moins de temps sur le territoire national. Ainsi, les services de police, de gendarmerie et de douane pourraient harmoniser leurs méthodes de travail afin de mener conjointement les contrôles. Cette option permettrait de réduire le nombre de contrôles qui ont lieu entre deux frontières nationales.

    Enfin, la création par les Etats de postes frontaliers juxtaposés de contrôle est identifiée comme solution plausible au temps perdu à la frontière lorsque les conducteurs sont obligés de passer deux contrôles de part et d'autre d'une même frontière. Dans cette logique, un programme communautaire de construction de postes de contrôle juxtaposés aux frontières a été mis en place. Dans sa phase pilote lancée depuis 2007, ledit programme s'attelle à construire trois postes, notamment aux frontières Togo -Burkina (Cinkanssé), Côte d 'Ivoire - Burkina (La Léraba) et Bénin - Niger (Malanville). La poursuite du programme tient sur huit postes. Il s'agit des postes aux frontières Bénin - Burkina, Bénin - Togo (Hillacondji), Burkina - Mali (Hérémankono), Burkina - Niger, Côte d'Ivoire - Mali, Mali - Niger (Labizanga), Sénégal - Guinée Bissau (Mpack) et Sénégal -Mali (Diboli).

    De plus, l'UEMOA travaille à la mise en place de Comités Techniques de Suivi en vue de lever les barrières non tarifaires sur les routes de l'espace. Ces comités pourraient également encourager les Etats à harmoniser leurs dispositions nationales en la matière. De ce point de vue, il est question de mettre en place un tableau de bord qui permettra une évaluation périodique des composantes à base d'indicateurs précis retenus. Ces comités pourront en outre mener des actions de sensibilisation et de communication dans les Etats au plus haut niveau ainsi qu'au niveau des acteurs des transports.

    Si toutes ces actions conduisent à des résultats relativement intéressants, il faut néanmoins dire qu'au-delà de ces initiatives communautaires, les Etats doivent intègrer la dimension de fluidité des transports dans toutes les politiques de développement. En ce sens, l'association des autres acteurs des transports, notamment les usagers à travers les syndicats et les conseils des chargeurs, aux missions improvisées de contrôle, serait salutaire. Il s'agit par cette approche participative de responsabiliser les conducteurs en leur donnant la possibilité de découvrir les nombreuses irrégularités constatées et qui justifient dans une certaine mesure la réticence des Etats à lever les barrières.

    L'approche participative ainsi évoquée a pour intérêt d'associer les populations dans leurs diverses composantes aux actions de l'Union. L'objectif visé est de faire en sorte que les différentes instructions données aux utilisateurs de la route ne prennent pas toujours la forme d'injonctions punitives, surtout lorsqu'on sait que dans la plupart des cas, il n'y a pas que les irrégularités qui ouvrent la voie aux sanctions pécuniaires.

    En définitive, notre approche permet d'inscrire les contrôles effectués dans une dimension de «contrôleurs-contrôlés». En fait, le cadre mixte de contrôle composé de tous les acteurs du secteur des transports chargé de mener des descentes improvisées sur le terrain pour suivre comment les conducteurs se conforment aux normes et comment les contrôleurs se prennent pour faire exécuter les directives, permet d'éviter les abus. C'est aussi en ce sens que se situent les voies de recours à mettre en place. Il faut, pour ainsi dire, donner la possibilité aux conducteurs et autres acteurs de disposer des voies de recours quand ils se sentent victimes d'abus de la part des contrôleurs.

    A terme, une plus grande organisation de ce volet permet de résoudre dans une large mesure les problèmes d'insécurité qui sont observés sur les routes.

    Paragraphe 2 : Les défis liés à l'insécurité

    L'insécurité sur la route désigne l'ensemble des facteurs qui mettent en danger les usagers de la route. Elle peut découler de l'état physique des routes et la formation des conducteurs (A) ou/et des actes des bandes criminelles (B).

    A. L'insécurité liée au mauvais état de la route et à la formation des

    conducteurs

    La question de l'état des routes a été abordée plus haut comme un véritable obstacle à la fluidité de la circulation. En effet, elle constitue un facteur important dans la sécurité des usagers de la route. En ce sens, il est à retenir que, plus les routes sont en bon état, moins les accidents surviennent. L'état de la route est un facteur important dans la sécurité des

    passagers et des marchandises. De plus, le bon état de la route augmente la durée de vie des moyens de transports et du coup la rentabilité de l'activité routière. C'est aussi dans cette perspective qu'il faudra créer et améliorer les centres de visites techniques dans tous les Etats de l'Union afin de maintenir l'état du matériel roulant dans des conditions optimales.

    Par ailleurs, les accidents de circulation dans la zone tiennent quelques fois à la mauvaise formation des conducteurs. Pour remédier à cette situation, il y a lieu de passer par l'introduction par les Etats de l'enseignement du code de la route dans les programmes scolaires jusqu'au collège, la formation des formateurs, des conducteurs et des évaluateurs dans les Etats de l'Union, l'intensification du contrôle du respect de la signalisation sur les véhicules, le renforcement de la signalisation routière et le contrôle l'observation de la limitation de vitesse surtout dans les zones à risque.

    Quelque 5 000 personnes sont tuées par an des suites d'accidents sur les routes dans les

    huit pays membres de l'UEMOA. « Les systèmes d'information sur le niveau de sécuritéroutière au niveau de l'UEMOA ne sont pas bons », a déclaré Gouali Emmanuel YORO,

    responsable de la sécurité routière à la Commission de l'UEMOA à Ouagadougou.

    « Mais on a une moyenne de 30.000 accidents par an avec à peu près 50.000 blessés et 5.000 tués environ dans l'espace communautaire », a ajouté M. Yoro cité par le site officiel du gouvernement togolais. De plus, ces chiffres sont « totalement en deçà de la réalité », selon M. Yoro. Le mauvais état des routes, les fautes humaines, le mauvais entretien des véhicules, des réglementations insuffisantes et peu appliquées sont les principales raisons de cette hécatombe, selon cet expert. L'idée est de remettre les routes en l'état et d'en construire d'autres de façon à avoir un réseau routier qui permette à l'ensemble de l'espace d'être opérationnel au plan économique.

    A titre indicatif, le 15 novembre 2008, un car transportant 92 personnes, soit 27 de plus que sa capacité, avait quitté Koudougou (Burkina Faso) pour San Pedro (Côte d'Ivoire) lorsqu'il est entré en collision avec un camion transportant du sucre à Boromo (Burkina Faso) faisant 69 morts. Cet accident est considéré comme l'un des plus meurtriers de ces dernières années en Afrique de l'ouest.

    En définitive, si le réseau routier est amélioré en termes de qualité et si les conducteurs sont mieux outillés dans le respect des signalisations, le dernier défi auquel devra faire face l'Union est l'insécurité liée au grand banditisme.

    B. L'insécurité liée aux bandes criminelles

    Un des défis à lever en matière de sécurité des usagers de la route reste la prolifération des bandes organisées. Les braquages deviennent depuis les années 1990 de plus en plus

    fréquents sur les routes communautaires. C'est pourquoi les Etats doivent faire face à cette question afin d'en trouver des solutions autant en leur sein qu'au niveau communautaire.

    La mise en place des convois escortés dans le cadre du projet « Solidarité sur la mer » du Port Autonome de Lomé en partenariat avec les pays de l'hinterland est de ce point de vue une initiative à encourager et à étendre. On note d'ailleurs sur ce point que tous les pays se sont conjointement engagés dans cette perspective. C'est pourquoi, dans la coopération des services de sécurité des huit Etats de l'UEMOA, la collaboration frontalière occupe une place importante et permet aux forces de sécurité des différents pays de relayer leurs collègues dès qu'ils convoient les camions jusqu'à leur entrée sur le territoire voisin. Un renforcement de cette coopération peut passer par la mise en place d'un mécanisme efficace de financement des structures chargées de la sécurité routière dans les Etats, la création et/ou le renforcement dans les Etats de l'Union d'un organe national de sécurité routière regroupant les structures administratives et les partenaires privés.

    En ce sens, le Conseil des Ministres en charge des transports de l'Union a pris acte des préoccupations exprimées par la Commission de l'UEMOA relatives à l'insécurité routière grandissante dans l'espace de l'Union. En effet, le Conseil a été informé de ce que 90% des victimes d'accidents de la route sont concentrées dans les pays à revenu faible et moyen, notamment les Etats membres de l'UEMOA qui ont enregistré pour l'année 2007, 32 tués pour 100 000 habitants, bien au-delà de la moyenne mondiale qui se situe à 18 tués pour 100 000 habitants. Le Conseil a noté que cette situation préoccupante s'explique par la faiblesse des dispositifs nationaux de maîtrise et d'amélioration de la sécurité routière. Le Conseil a donc jugé pertinent d'examiner les projets de textes communautaires de sécurité routière proposés par la Commission et qui visent à harmoniser les domaines de gestion nationale et régionale de la sécurité routière et d'audit de sécurité routière.

    Mauvais état des routes, grand banditisme et mauvaise formation des conducteurs se conjuguent pour faire des routes africaines, en général, et celles de l'espace UEMOA en particulier, les plus meurtrières du monde. Ainsi, selon le Global Road Safety Partnership, en 2006, on a dénombré 339 décès pour 10 000 véhicules en Afrique contre 2,3 décès pour le même nombre de véhicules dans les 10 pays les plus motorisés du monde. L'option faite dans l'UEMOA de moderniser la route et ses moyens devrait permettre de réduire ces seuils alarmants.

    Dans l'ensemble, la rentabilisation des transports routiers dans l'espace UEMOA passe par la capacité de l'Union à surmonter les difficultés d'ordre institutionnel, de mise en place et d'entretien des routes, de fluidité des transports et de sécurité pour les usagers. Dans

    un cas comme dans l'autre, le financement apparaît comme la principale difficulté à résoudre. Toutefois, la volonté politique et le choix de l'approche paraissent tout aussi pertinents.

    Dans cette logique, l'Union doit, plus que par le passé, souscrire à une approche participative qui associe directement les bénéficiaires à toutes ses initiatives. Elle se fonde sur le secteur privé et les collectivités décentralisées comme nouveaux acteurs dans la gestion de la route. C'est ce qui soulève la question de l'harmonisation des politiques sectorielles dont celle de l'aménagement du territoire communautaire.

    Cependant, il est à retenir aux termes de cette partie que, autant les transports routiers jouent un rôle de premier plan dans le développement et l'intégration des huit Etats de l'UEMOA, autant ils font face à des défis multiples. Mais compte tenu de leur caractère primordial dans la vie économique et sociale de l'Union, les transports routiers doivent, plus que jamais, devenir la priorité dans la construction de l'espace communautaire. C'est seulement à ce prix que l'on en tirera le plus grand profit afin que les citoyens de l'espace UEMOA se sentent collectivement membres de cet ensemble qui se veut homogène et en bâtir un destin commun.

    CONCLUSION GENERALE

    L'étude faite sur les transports routiers et l'intégration de l'espace UEMOA nous a permis de présenter dans une première partie les grandes étapes de la construction de l'espace communautaire avant de faire l'état des lieux du réseau et des transports routiers. En ce sens, il s'est révélé que l'UEMOA est de création récente, car datant de 1994. Elle vise essentiellement la réalisation d'une union économique à travers des politiques sectorielles. Fondée sur la libre circulation des personnes et des biens, l'UEMOA s'est dotée d'instruments juridiques de nature diverse afin de faciliter son fonctionnement. Aussi distingue-t-on, au-delà des organes, des normes du droit primaire et celles du droit dérivé.

    Dans cet espace juridiquement organisé, il est établi que les hommes, les services et les biens peuvent circuler sans entraves. Encore faut-il que l'espace soit doté en infrastructures de transports conséquentes. Dans ce contexte, la route est assimilée au moyen de transport utilisé pour assurer le déplacement de 95% de marchandises. En tant que tel, un état des lieux nous a permis de présenter le faible niveau de dotation de l'espace en routes.

    Ainsi, nous avons vu que l'ensemble des huit pays de l'UEMOA sont inégalement dotés de routes. A côté des Etats comme la Côte d'Ivoire et le Togo qui présentent des moyennes de 25,23 et 15,3 km de routes pour 100 km2 et 5,69 puis 01,7 km de routes pour 1000 hab., survivent des pays comme le Niger et le Mali dont les dotations en routes sont de 1,19 et 1,15 pour la même unité de surface et 1,48 km de routes pour le même nombre d'habitants. Globalement, il se dégage des seuils sous-régionaux inférieurs aux normes requises pour enclencher tout processus de développement.

    On en est arrivé à conclure que l'espace UEMOA doit pouvoir jauger l'importance des transports routiers dans sa marche vers le développement socio-économique puis vers une intégration réussie et durable au service des populations.

    La seconde partie de notre travail a consisté à montrer dans un tout premier chapitre le rôle des transports dans le développement et l'intégration au sein de l'espace UEMOA. Au terme de celui-ci, la route est apparue comme dépassant son rôle classique d'outil de transport pour devenir un véritable outil d'intégration et de développement.

    Une approche analytique a donc permis de dresser la carte du développement dans la zone pour en arriver à la conclusion selon laquelle l'espace UEMOA est encore loin de ses objectifs de viabilité et de performance économiques. A partir d'exemples précis tirés des cas du Togo ou d'ailleurs, nous avons pu constater que le niveau de développement dans la zone était encore faible. De fait, les économies de la zone restent largement tributaires de

    l'extérieur au regard des faibles taux d'échanges entre les Etats de l'UEMOA. Dans cette optique, il nous été possible de monter l'interaction entre les transports et le développement des économies nationales et communautaire. En nous fondant sur une étude de la Banque Mondiale, nous en sommes arrivé à la conclusion qu'une baisse de 10% du coût des transports engendrerait sur le continent et dans la sous-région 25% d'augmentation du commerce.

    De plus, nous avons abordé le rôle que peuvent jouer les transports dans l'intégration physique et économique de la zone. De ce point de vue, la route est apparue comme pouvant réconforter l'unité nationale dans les Etats de l'UEMOA avant de jouer son rôle dans l'intégration régionale. Ainsi, en reliant les bassins de production aux centres urbains et semiurbains de consommation, les routes créent des relations de complémentarité entre toutes les régions d'un pays et une plus-value morale qui rejaillit sans aucun doute sur la cohésion de la Nation.

    En ce qui concerne l'intégration sous-régionale, elle tire son profit des routes viables à travers le fait que, lorsqu'on se situe dans une analyse comparative qui distingue la sous-zone côtière de celle sahélienne, la route reste le premier moyen pour les pays sans littoral d'importer et d'exporter les produits à partir des ports côtiers. Aussi, pour les pays appartenant à une même sous-zone, les frontières vivent dans une sorte de dualité qui laisse apparaître, d'une part, des populations parentes à cheval sur deux territoires nationaux différents et, d'autre part, des Etats qui veulent réduire leurs prérogatives nationales en confiant plus de responsabilité à l'entité sous-régionale. De cette dualité découle la nécessité de permettre aux populations de recourir indifféremment aux services de meilleure qualité, plus vite et moins cher sur la base des avantages comparatifs sans se sentir liées par leur appartenance à un pays. C'est justement la dimension que devrait prendre l'intégration dans l'espace UEMOA afin d'en faire profiter les hommes et les femmes qui y vivent.

    La route reste donc le support physique de cette entreprise et il y a lieu de la rentabiliser car, du fait de l'insuffisance des infrastructures de communication, le flux des échanges commerciaux est demeuré faible et ne représente que moins de 3% des importations et environ 5% des exportations entre les Etats membres. La sous-région nourrit de ce fait un véritable paradoxe. Alors que le secteur des transports représente une part importante des investissements publics atteignant 25 à 40% suivant les pays, il ne contribue qu'à hauteur de 5 à 10% dans la formation du PIB.

    La rentabilisation des infrastructures routières dans l'espace communautaire doit alors passer par plusieurs grands défis à relever. Il s'agit, entre autres, du renforcement institutionnel qui doit permettre à l'Union de mettre en place de nouvelles institutions tant à

    l'échelle des nations qu'à celle communautaire. Ensuite, une plus grande dotation de l'Union en infrastructures de transports permettrait de relever les faibles niveaux qui y sont observés de nos jours. Pour ce faire, il y a lieu d'harmoniser les projets nationaux d'aménagement du territoire pour un meilleur équilibrage des potentialités disponibles.

    En outre, la rentabilisation des routes communautaires passe par la résolution des difficultés inhérentes à la fluidité des transports. Dans cette optique, l'Union doit mettre en place une stratégie participative afin de générer des ressources pour maintenir les routes dans un bon état. Il s'agit pour l'Union et les Etats de considérer les autres acteurs du secteur dans la gestion des questions liées à la route. Dans cette logique, autant la Commission, à travers le DATC, que les Etats, à travers les organes nationaux des transports routiers, devraient associer les partenaires tels que les conseils nationaux des chargeurs, les syndicats des transporteurs et des commerçants puis les collectivités décentralisées (Conseils régionaux et collectivités locales) aux comités de gestion des routes. Ce faisant, les nouvelles structures collégiales pourraient étudier et introduire ou étendre l'usage des postes de péages pour en adoucir les effets nuisibles sur les usagers selon les réalités de chaque milieu.

    Enfin, la question de la sécurité des usagers de la route reste en dernier ressort un des principaux défis à relever. En ce sens, il y a lieu de distinguer la sécurité liée à l'état des routes, celle liée aux bandes criminelles organisées et celle qui prend en compte la formation des conducteurs.

    S'agissant de la sécurité qui fait intervenir l'état de la route, nous avons identifié l'entretien courant et périodique des routes comme solution plausible à la réduction des accidents de circulation. Sous un autre angle, la coopération des services de sécurité des huit Etats de la région permettrait de lutter contre les bandes organisées qui, depuis le début des années 1990, multiplient les braquages sur les routes. Pour contribuer à lutter efficacement contre ces bandes, l'Union doit aider financièrement à la mise en place des organismes interétatiques de sécurisation des transports. En la matière, les résultats enregistrés sur le corridor Lomé-Ouagadougou-Bamako à travers le projet « Solidarité sur la mer » sont encourageants et ledit projet mérite d'être systématiquement étendu sur toutes les autres routes.

    Pour ce qui est de la formation des conducteurs, l'instauration des cours de conduite et de connaissance du code de la route dans les programmes scolaires jusqu'au collège devrait permettre de former des citoyens plus enclins aux questions de la route. Cette option résoudra du coup les nombreuses insuffisances constatées dans l'application du code de la route dans tous les pays.

    Au total, à travers l'étude sur les transports routiers et l'intégration des Etats de l'UEMOA, nous avons montré l'importance que revêt la route dans la vie de ces Etats. Elle est de ce point de vue l'instrument qui porte les échanges qui se développent au sein des territoires nationaux et en même temps l'outil qui favorise les échanges quotidiens entre les populations de l'espace communautaire. C'est pourquoi la logique selon laquelle « la route du développement passe par le développement de la route » doit, plus que jamais, sous-tendre toutes les actions de l'Union.

    Pour tout dire, construire les routes devient une nécessité pour l'UEMOA et ses Etats membres. C'est à ce prix seulement que les Etats pourront développer le commerce intérieur de l'Union et favoriser de façon durable la libre circulation des personnes, des biens et des services.

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    www.memoireonline.com www.monde-diplomatique.fr www.harcourt.com

     
     
     

    NOYOULEWA T. Adong (2009) | Transports routiers et intégration des Etats de l'UEMOA

    74

    TABLE DES FIGURES, TABLEAUX ET DES CARTES

    N° d'ordre

    Titres

    N° de
    pages

     

    FIGURES

    1

    Densité de population dans les pays de l'UEMOA

    20

    2

    Densité du réseau routier en km pour 100 km2 par pays de l'UEMOA

    21

    3

    Densité du réseau routier en km pour 1000 habitants

    22

    4

    Etat du réseau routier par Région et par nature des routes

    26

    5

    PNB/hab. dans les pays de l'UEMOA

    42

    6

    IDH dans les pays de l'UEMOA

    45

     

    TABLEAUX

    1

    Disparités pays côtiers/pays sahéliens en matière d'infrastructures routières dans l'espace UEMOA

    23

    2

    Coûts des barrages routiers illégaux sur quelques axes de l'espace UEMOA

    29

    3

    Fréquence des postes de contrôles sur quelques axes routiers entre 1999 et 2000

    30

    4

    Principaux déterminants des pertes induites par les barrages routiers par an

    31

    5

    Esquisse d'une gestion participative de la route dans l'espace UEMOA

    52

     

    CARTE

     

    Corridors et points d'emplacement des postes de contrôle routier au départ, aux passages frontaliers et à la destination finale de l'UEMOA

    28

    TABLE DES MATIERES

    N° d'ordre

    TITRES

    N° de
    pages

     
     

    Avertissement

    i

     

    Dédicace

    ii

     

    Remerciements

    iii

     

    Résumé et abstract

    iv

     

    Liste des sigles et abréviations

    v

     

    Sommaire

    vi

     
     

    INTRODUCTION GENERALE

    1

     

    1ière Partie

    LA CONSTRUCTION DE L'ESPACE

    COMMUNAUTAIRE ET LES DIFFICULTES
    INHERENTES AUX TRANSPORTS ROUTIERS

    5

     

    Chapitre 1

    HISTORIQUE ET OBJECTIFS DE L'INTEGRATION SOUS-REGIONALE DANS L'ESPACE UEMOA

    7

    Section 1

    Historique de l'intégration sous-régionale en Afrique de l'ouest

    7

    Paragraphe 1

    Différentes acceptions de l'intégration régionale

    7

    A

    Une diversité de théories

    7

    B

    L'application théorique à l'UEMOA

    9

    Paragraphe 2

    Les grandes étapes de l'intégration au sein de l'UEMOA

    10

    A

    Les origines anciennes de l'UEMOA

    10

    B

    La mise en place de l'UEMOA

    11

    Section 2

    Le cadre institutionnel de l'intégration sous-régionale dans l'UEMOA

    12

    Paragraphe 1

    L'UEMOA : un ensemble sous-régional aux objectifs multiples

    12

    A

    La structure et le fonctionnement des organes de l'UEMOA

    12

    B

    Les objectifs visés par le Traité constitutif de l'UEMOA

    15

    Paragraphe 2

    Les moyens juridiques pour atteindre ces objectifs

    16

    A

    Les normes de premier rang.

    16

    B

    Les normes de second rang du droit dérivé de l'Union

    18

     

    Chapitre 2

    ETAT DES LIEUX DES TRANSPORTS ET DU RESEAU ROUTIERS DANS L'ESPACE UEMOA

    19

    Section 1

    Eléments d'analyse du réseau routier au sein de l'UEMOA

    19

    Paragraphe 1

    Un espace communautaire insuffisamment doté de routes

    19

    A

    Une densité de route faible

    19

    B

    La faiblesse des moyennes de route par habitant

    20

    Paragraphe 2

    Un réseau routier inégalement reparti

    21

    A

    Les disparités entre les Etats membres

    21

    B

    Disparités entre les pays côtiers et les pays sahéliens

    22

    Section 2

    Eléments d'analyse des transports routiers communautaires

    24

    Paragraphe 1

    Des transports routiers entravés par la mauvaise qualité des

    24

     

    routes

     

    A

    La question de la qualité des routes entre les Etats de l'UEMOA

    24

    B

    Les réalités internes aux Etats membres de l'UEMOA : le cas du Togo

    25

    Paragraphe 2

    Les tracasseries routières : véritables barrières à la circulation

    26

    A

    Les tracasseries administratives et sécuritaires

    27

    B

    Les implications financières des tracasseries routières

    29

    2ième Partie

    ROLE DES TRANSPORTS ET DU RESEAU ROUTIERS DANS LE PROCESSUS DE L'INTEGRATION DES ETATS DE L'UEMOA

    33

     

    Chapitre 1

    TRANSPORTS ET RESEAU ROUTIERS : VERITABLES OUTILS D'INTEGRATION ET DE DEVELOPPEMENT DANS L'ESPACE UEMOA

    35

    Section 1

    Rôle des transports et du réseau routiers sur la

    régionalisation dans l'espace UEMOA

    35

    Paragraphe 1

    Transports et réseau routiers comme facteur d'unité nationale

    36

    A

    L'enclavement, expression géographique de la discontinuité des réseaux routiers

    36

    B

    Le concept « pays-frontière », une innovation dans

    l'aménagement des zones frontalières

    37

    Paragraphe 2

    Transports et réseaux routiers comme facteur d'intégration régionale

    38

    A

    Le rôle des transports et du réseau routiers dans la réalisation d'un ensemble communautaire homogène

    39

    B

    Les transports et le réseau routiers, facteurs de la libre circulation des personnes et des biens

    39

    Section 2

    Rôle des transports et du réseau routiers sur le

    développement des Etats de l'UEMOA

    40

    Paragraphe 1

    Transports et réseaux routiers dans les économies nationales

    40

    A

    La route, vecteur de liaisons entre bassins de production et centre de commercialisation

    41

    B

    La route, vecteur d'échanges entre pays côtiers et ceux de l'hinterland

    42

    Paragraphe 2

    Transport et réseau routiers dans l'économie communautaire

    42

    A

    La route, facteur d'une économie sous-régionale intégrée

    43

    B

    La route, véritable stimulateur du développement communautaire

    44

    Chapitre 2

    COMMENT VIABILISER LES INFRASTRUCTURES ROUTIERES DANS L'ESPACE UEMOA ?

    48

    Section 1

    Sur les plans institutionnel et des infrastructures routières

    48

    Paragraphe 1

    Sur le plan institutionnel

    49

    A

    Les réformes institutionnelles à l'échelle nationale

    49

    B

    Les réformes institutionnelles à l'échelle communautaire

    50

    Paragraphe 2

    Sur le plan des infrastructures routières

    50

    A

    De la dotation en infrastructures routières de quantité suffisante

    51

    B

    Des infrastructures routières de qualité

    51

    Section 2

    Les défis de la fluidité des transports et de la sécurité

    53

    Paragraphe 1

    La fluidité des transports routiers dans l'espace UEMOA

    53

    A

    L'amélioration de l'état des routes

    53

    B

    Les défis liés aux tracasseries

    54

    Paragraphe 2

    Les défis liés à l'insécurité

    57

    A

    L'insécurité liée au mauvais état des routes et à la formation des conducteurs

    57

    B

    L'insécurité liée au grand banditisme

    58

     
     

    CONCLUSION GENERALE

    61

     
     

    Bibliographie

    65

     

    Table des figures, tableaux et carte

    68

     

    Table des matières

    69






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"Et il n'est rien de plus beau que l'instant qui précède le voyage, l'instant ou l'horizon de demain vient nous rendre visite et nous dire ses promesses"   Milan Kundera