1.3. Les droits des patients
La notion de droits conférés au patient est
relativement récente dans le sens qu'elle découle directement des
principes fondamentaux des Droits de l'Homme (1948) qui reconnaissent
l'importance à accorder à l'intérêt et au
bien-être de la personne. Cette reconnaissance se manifeste entre autre
:
«[...] par le consentement aux soins, le respect de
la vie privée, l'interdiction de toute forme de discrimination en raison
du patrimoine génétique, l'encadrement du don d'organe et de
tissus»27.
La Déclaration de l'OMS sur la promotion des droits des
patients de 1994 traduit cette évolution de pensée en
reconnaissant à chacun les droits suivants :
o droit au respect de sa personne en tant qu'être
humain;
o droit à l'autodétermination;
o droit à l'intégrité physique et
mentale;
o droit à la sécurité de sa personne;
o droit au respect de sa vie privée;
o droit au respect de ses valeurs morales, culturelles;
o droit au respect de ses convictions religieuses et
philosophiques;
o droit à la protection de sa santé par des mesures
appropriées de prévention des maladies et de soins;
o droits aux moyens d'atteindre le meilleur état de
santé dont on est capable.
En 1997, une Convention européenne des droits de
l'homme et de la biomédecine est signée par la majorité
des Etats, indépendamment du degré de développement de
leur système de santé : une reconnaissance officielle des droits
du patient en Europe qui met en exergue le respect de la personne,
l'encouragement à exercer son libre arbitre et l'engagement des Etats
à se donner les moyens d'assurer des soins de qualité en les
adaptant à leur propre contexte. Cette convention fait appel à
des droits collectifs et individuels.
27 N. Fraselle, in «Nouvelle
encyclopédie de bioéthique : médecine et environnement
biotechnologique», de G. Hottois et J.-N. Missa, collectif, Ed. De Boeck
Université, Paris Bruxelles, 2001, p. 330
Nadine Fraselle précise que cette convention
«vise à protéger l'être humain dans sa
dignité et son identité et à garantir à toute
personne, sans discrimination, le respect de son intégrité et de
ses autres droits et libertés fondamentaux à l'égard des
applications de la biologie et de la
médecine»28.
Il est à noter que l'importance de
l'autodétermination émane, d'une part, des progrès de la
médecine et des risques inhérents à son
développement, de la complexification des systèmes de
santé qui déshumanise la prise en charge du patient et, d'autre
part, de mouvements sociaux en faveur du respect des droits de l'Homme qui se
développaient dans le monde entier. Ces différents facteurs ont
généré un changement sociétal dans le sens qu'ils
ont contribué à encourager la proactivité du patient en le
considérant consommateur de prestations de services médicaux
à visée curative, préventive, réparatrice ou
prédictive.
L'auteure précise :
«Appliqué au secteur des soins de
santé, le droit à la consommation s'affine pour rendre au patient
la place première qui lui revient dans la relation patient -
médecin, à savoir celle d'un sujet de droits, maître de son
destin et non celle d'un objet du processus de
consommation»29.
Les droits reconnus aux patients, d'une part, visent à
protéger leur identité, leur dignité et leur
intégrité en tant que personne humaine, à préserver
leurs
droits et libertés face à la bio-médecine
et, d'autre part, engagent la collectivité à mettre sur pied des
moyens qui garantissent la qualité des prestations de soins et de les
adapter dans le but d'assurer l'exercice de ces droits. Selon Nadine Fraselle,
la société est tenue de favoriser l'expression de
l'insatisfaction en prévoyant des dispositifs de recours à
l'égard des patients qui estiment que leurs droits n'ont pas
été respectés. Elle dit en substance :
«Ainsi, les patients qui estiment que leurs droits
n'ont pas été respectés doivent avoir la
possibilité de porter plainte. A côté des tribunaux, des
mécanismes indépendants doivent, notamment, garantir que les
informations concernant la procédure sont mises à disposition des
patients et que ceux-ci peuvent avoir recours et accès à une
personne indépendante qui les conseille sur la meilleure
28 N. Fraselle in «Nouvelle
encyclopédie de bioéthique : médecine et environnement
biotechnologique», de G. Hottois et J.-N. Missa collectif, Ed. De Boeck
Université, Paris Bruxelles, 2001, p. 330
29 Ibidem
façon d'agir[...]. Les patients ont le droit
d'obtenir que leurs plaintes soient examinées et qu'il soit
statué à leur sujet de façon approfondie, équitable
et rapide et d'être informée de la suite qui leur est
donnée»30.
En Suisse, l'ensemble des lois de santé romandes
contiennent une majorité des droits reconnus au patient, suite à
leur révision datant en principe du début des années 2000.
L'édition en 2005 d'une brochure intitulée «L'Essentiel sur
les droits des patients» est la résultante d'une recherche
d'uniformisation en termes de promotion de ces droits par les services de
santé publique de six cantons31. Cette brochure
décline les neuf droits reconnus au patient mais rappelle, au
préalable, ses devoirs qui s'apparentent aux logiques de collaboration
et de compliance attendues dans un processus de soins et de traitements :
«[...] ils ont aussi d'ailleurs, dans leur propre
intérêt, certaines responsabilités. Ainsi, il leur incombe
d'informer de la manière la plus exacte possible le soignant des
symptômes ressentis, des traitements reçus ou en cours, ainsi que
des effets des thérapies déjà suivies. De même, il
est de la responsabilité du patient de suivre le traitement prescrit ou,
en cas d'interruption, de l'annoncer à son
soignant»32.
Il est stipulé en fin d'introduction :
«[...] une relation transparente permet le
développement d'un cadre thérapeutique de qualité et que
celui-ci peut contribuer à rendre la maladie et les traitements plus
supportables»33.
Nous comprenons par là que le respect de l'
autodétermination du patient par les professionnels de la santé
contribue à la construction d'une relation thérapeutique de
confiance basée sur un dialogue éthique et que ce dernier est un
facteur de qualité des prestations de soins qui peut influencer
l'état de santé. Les droits reconnus au patient clarifiant les
relations entre le soigné et le soignant se déclinent comme suit
:
30 N. Fraselle in «Nouvelle
encyclopédie de bioéthique : médecine et environnement
biotechnologique», de G. Hottois et J.-N. Missa collectif, Ed. De Boeck
Université, Paris Bruxelles, 2001, p. 333
31 Cantons concernés : Vaud,
Valais, Fribourg, Neuchâtel, Jura et Bern
32 Brochure «L'essentiel sur les
droits des patients dans les cantons de Berne, Fribourg, Jura, Neuchâtel,
Vaud et Valais», Ed. Sanimédia, Information en santé
publique, Lausanne, 2005, p. 3
33 Ibidem, p. 4
1.3.1. Le droit à l'information34
«Le patient a le droit d'être informé de
manière claire et appropriée sur son état de santé,
sur les examens et traitements envisageables, sur les conséquences et
les risques éventuels qu'ils impliquent, sur le pronostic et sur les
aspects financiers du traitement.
Au moment de son admission dans un établissement
sanitaire, le patient reçoit, en principe, une information écrite
sur ses droits et ses devoirs et sur les conditions de son
séjour».
Sans demande particulière du patient, le professionnel
de la santé est tenu de lui donner naturellement une information
complète, objective, précise et claire qui permette d'exercer son
libre arbitre, soit de consentir ou non à un traitement, de demander un
second avis professionnel interne ou externe, de lever le secret pour une
transmission d'informations le concernant entre professionnels ou à son
représentant thérapeutique. L'information donnée lui est
donc en principe strictement destinée Deux particularités
limitent toutefois cette information : l'une concerne son «refus de
savoir» sans restriction de soins et, l'autre, les situations d'urgence
dans lesquelles l'information par évidence suit les décisions et
les actions de soins effectuées sans son consentement.
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