WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Du contentieux constitutionnel en République Démocratique du Congo. Contribution à  l'étude des fondements et des modalités d'exercice de la justice constitutionnelle

( Télécharger le fichier original )
par Dieudonné KALUBA DIBWA
Université de Kinshasa - Doctorat en droit 2010
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

CHAPITRE IV :
QUEL MODELE POUR LA REPUBLIQUE
DEMOCRATIQUE DU CONGO ?

Nous savons, depuis le doyen Gicquel, que « le droit constitutionnel participe de la culture de l'Occident », mais que sa généralisation ou plutôt son universalisme s'est opéré au détriment de sa spécificité485(*) Une telle profession de foi ne peut que faire tiquer le constitutionnaliste congolais qui se rappellera que déjà Aristote en classant les Constitutions des cités grecques n'avait pas omis de les ranger selon le tempérament de chaque peuple.

Du reste, l'on peut dire avec le Professeur Ntumba Luaba Lumu, qu'il a existé le constitutionnalisme précolonial dont la fonction était double : légitimer le pouvoir au moyen de la sacralité de ce dernier et éviter que le pouvoir ne devienne tyrannique.486(*) A pris pas sur ce constitutionnalisme, celui de la colonisation qui n'avait comme but et fonction que de légitimer ce phénomène d'asservissement du peuple. A cette occasion, un droit et des institutions d'origine européenne sont greffés sur le corpus normatif autochtone. La greffe n'a pas pris, à voir comment de larges zones de non droit écrit subsistent et résistent à l'avancée du droit moderne.487(*)

Après une longue période de mimétisme institutionnel, l'Afrique noire postcoloniale semble s'être rangée dans un déclic d'autochtonie constitutionnelle.488(*) Là, à notre avis, il s'éclaire la question du choix du modèle classique occidental ou d'un modèle postmoderne qui serait reconnaissable par la population congolaise dans son ensemble parce qu'issu de son schème de pensée traditionnelle sur la justice. Mais avant d'élaborer un modèle théorique qui aurait la prétention de rencontrer les aspirations populaires, il est utile de voir comment déjà en Afrique noire certaines nations ont tenté de résoudre cette question. Par un choix presque arbitraire, l'option a été levée en faveur de l'étude de trois pays africains émergents du point de vue de la justice constitutionnelle : le Sénégal, le Bénin et la République sud-africaine.

Le choix de ces pays est naturellement fondé sur l'avancée de la justice constitutionnelle qui s'y remarque et vide le problème théorique mineur, à notre avis, du champ géographique ou linguistique de l'étude. Faute de bibliothèques bien garnies, nous avons gardé un profil modeste devant l'ambition certes légitime de parcourir plusieurs pays africains de culture presque similaire.

L'on peut légitimement aussi remarquer d'emblée que le constituant sud-africain est à ranger dans le mouvement postmoderne d'autochtonie constitutionnelle par le jeu des institutions tant de justice transitionnelle489(*) qu'il a instituées que par celles de la justice constitutionnelle dont les spécificités constituent des pépites d'or pour le constitutionnaliste qui veut s'en approprier.

En revanche, tant dans son modèle que même dans ses applications, le juge constitutionnel sénégalais ou béninois, malgré son abondante productivité, est une copie servile du Conseil constitutionnel français. Nous pouvons dire que la marque de la colonisation française par le biais de l'assimilation a laissé de profondes traces qu'il sera difficile d'effacer.

Au demeurant, faut-il tout effacer ? Ne s'agit-il pas en définitive de faire accorder l'universel avec les spécificités de la justice en Afrique ? Il suffit de voir au sortir du palais de justice comment les plaideurs profanes sont désemparés tant par le langage du droit qui est manifestement ésotérique mais aussi et surtout par l'étiquette judiciaire qui se déroule comme une cérémonie d'initiés ou même « des sorciers des temps modernes », avec de longues robes noires490(*) avec chausse garnie de peau de léopard ou même de fourrure dont la signification est tout autant mystérieuse, pour ressentir la nécessité vitale de rendre la justice accessible.491(*)

Même l'Occident éprouve ce besoin malgré des siècles d'éducation qui ont reculé les frontières de l'analphabétisme à ses portions les plus congrues.492(*) Existe-t-il un modèle africain de justice constitutionnelle sur lequel nous pourrions être obligé d'ériger notre propre modèle théorique?

Section 1 : VERS UN MODELE AFRICAIN ?

La réponse à cette question, pour capitale qu'elle pourrait être, passe nécessairement par un essai de parcours même furtif des institutions de justice constitutionnelle des pays choisis. Ne fut-ce que par sa proximité géostratégique et l'intérêt qu'elle présente du fait de sa sortie récente des limbes de la dictature et de l'oppression de l'apartheid, commençons par la République sud-africaine.

* 485 GICQUEL (J.), Droit constitutionnel et institutions politiques, op.cit, p.33.

* 486 NTUMBA LUABA LUMU (A.-D.), Droit constitutionnel général, Kinshasa, EUA, 2005, p.116.

* 487 Lire BOSHAB (E.), Pouvoir et droit coutumiers à l'épreuve du temps, Louvain-la-neuve, Academia Bruylant, 2007, 338p. L'auteur indique de façon magistrale comment les pouvoir et droit coutumiers opposent une résistance aux pouvoir et droit de l'Etat. N'est-ce pas la résistance des vaincus dont parle Ziegler contre un Etat et son droit perçus comme les avatars d'une domination extérieure ? Ou, tout simplement, s'agissant d'une greffe, la durée n'est-elle pas insuffisante pour que celle-ci prenne sur le corps social congolais ? En tout cas, la réflexion peut continuer sur ces rivages.

* 488 Lire ROBINSON, « Constitutional Autochthony in Ghana », Journal of Commonwealth Political Studies, 1961, n°4, cité par NTUMBA LUABA LUMU (A.-D.), op.cit, p.117.

* 489 Nous pensons à la fameuse « Commission Vérité et Réconciliation » qui a fait ses preuves dans ce pays africain.

* 490 Lire avec intérêt l'excellent article de Bruno NEVEU, « Costume des juristes », Dictionnaire de la culture juridique, Paris, PUF, Lamy, Quadrige, 2003, pp.309-313.

* 491 Lire FACULTE DE DROIT DE LA KATHOLIEKE UNIVERSITEIT BRUSSEL, (sous la direction de), Le langage du droit accessible à tous ?, Actes du colloque tenu le 17 novembre 1999 à la faculté de Droit de la Katholieke Universiteit Brussel avec le concours de Recherches et Documentation juridiques africaines Asbl, Bruxelles, éditions RDJA, 2000, 138 pp.

* 492 YOKO YAKEMBE (P.), L'UNESCO et le développement de l'éducation en Afrique noire indépendante, Thèse de doctorat de spécialité en droit public, Université de Dijon, 1970.

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Il faudrait pour le bonheur des états que les philosophes fussent roi ou que les rois fussent philosophes"   Platon