Du contentieux constitutionnel en République Démocratique du Congo. Contribution à l'étude des fondements et des modalités d'exercice de la justice constitutionnelle( Télécharger le fichier original )par Dieudonné KALUBA DIBWA Université de Kinshasa - Doctorat en droit 2010 |
§2. Le contrôle a prioriLe contrôle préalable est l'une des caractéristiques essentielles du modèle européen car il procède de l'idée qu'aujourd'hui, l'Etat n'est plus simplement défini comme un ensemble d'autorités publiques, mais également comme un système hiérarchisé de règles de droit. Ce contrôle est abstrait dans la mesure où il est initié par les autorités publiques soucieuses de défendre l'intérêt général et non par des personnes privées enclines à défendre des droits subjectifs ; de même, la solution du litige ne fait cas d'aucune situation particulière.330(*) La doctrine enseigne que le contrôle préalable peut emprunter deux formes selon qu'il est exercé avant ou après la promulgation de la loi. Il sera dès lors ou antérieur ou postérieur à la loi et avec deux significations différentes : avant la promulgation, le contrôle préalable antérieur s'analyse en une étape de formation de la règle de droit. Il possède, en outre, un lien étroit avec le contentieux de fonctionnement des pouvoirs publics. Le contentieux des libertés se trouve relégué au second plan. En revanche, le contrôle abstrait postérieur à l'entrée en vigueur de la loi peut s'analyser en un contentieux des valeurs constitutionnelles.331(*) C'est l'apanage des personnes privées ainsi que de la minorité politique qui n'a pas pu ou su renverser la machine de la majorité lors de l'adoption de la loi querellée. L'on doit à la vérité de dire que le contrôle préalable abstrait est plutôt rare. L'on le rencontre en France alors que le contrôle abstrait postérieur se retrouve en Autriche, en Allemagne, en Espagne et même en Belgique sous réserve des détails qui ont été exposés plus haut. La France, avec son contrôle abstrait antérieur a fait des émules dans le monde, en l'occurrence la Roumanie, la Pologne et la Hongrie sans compter les nombreux pays francophones d'Afrique noire. L'on peut également noter que le contrôle préalable des traités et accords internationaux est plus répandu que celui des lois. En effet, dans les pays connaissant la justice constitutionnelle spécialisée de type européen, il est logique, dit Michel Fromont, que ce contrôle soit effectif car c'est le seul moyen de concilier le caractère irrévocable des engagements de l'Etat avec la nécessité d'organiser le contrôle de leur compatibilité avec la Constitution.332(*) Le contrôle préalable présente l'avantage technique qu'il ne laisse pas l'ordonnancement juridique s'infecter d'une inconstitutionnalité avant de la voir expurger plus tard. Une nuance de taille s'impose au demeurant. En effet, dès l'adoption, la loi a une existence juridique certaine et une obligatoriété qui ne saurait être niée, la promulgation par le Chef de l'Etat ne faisant que certifier de l'existence de la loi de même qu'elle donne l'ordre à l'Administration de l'exécuter.333(*) De ce point de vue, la classification désormais traditionnelle du contrôle préalable pose problème à moins de dire que la norme juridique n'entre en vigueur et n'existe qu'à partir de la promulgation. Or, l'on ne peut promulguer que ce qui existe déjà pour le porter à la fois à la connaissance des citoyens et en ordonner l'exécution. A tout considérer, le contrôle a priori est une donnée du modèle européen originel car les avatars ont adopté quelques fois des contrôles postérieurs ; le contrôle par voie d'action est également un trait saillant du modèle sous étude qu'il faut analyser ici. * 330 FROMONT (M.), La justice constitutionnelle dans le monde, op.cit, pp.69-71. * 331 Ibidem * 332 FROMONT (M.), La justice constitutionnelle dans le monde, op.cit, p.71 ; lire aussi les développements intéressants sur la question de la compatibilité des engagements internationaux avec la Constitution dans QUOC DINH (N.)(+), DAILLIER(P.) et PELLET(A.), Droit international public, 7ème édition, Paris, LGDJ, 2002, pp.284-291. * 333 Lire VUNDUAWE te PEMAKO (F.), Traité de droit administratif, Bruxelles, Larcier, 2007, p.215. |
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