L'opération de maintien de paix de l'ONU en Côte d'Ivoire (Onuci)( Télécharger le fichier original )par Kouadio Bla Anne-Marie KOFFI Université Cocody-Abidjan - Diplôme d'Etudes Approfondies 2006 |
Section II : Les autres limitesElles sont relatives d'une part à la sécurité du personnel onusien et à la présence de l'Opération Licorne (Paragraphe 1) et d'autre part à la multiplicité des médiateurs dans la crise ivoirienne et à l'insuffisance de ressources humaines et financières de l'ONUCI (Paragraphe 2). Paragraphe 1 : Les limites liées à la sécurité et à la présence de la force française A- Les limites de l'ONUCI en matière de sécurité«Le gouvernement prendra toutes les mesures appropriées pour assurer la sécurité des membres de l'ONUCI. Il prendra notamment toutes les dispositions voulues pour protéger les membres de l'ONU CI, leurs matériels et leurs locaux contre toute attaque ou action qui les empêcherait d'accomplir leur mission, et ce, sans préjudice du fait que ces locaux sont inviolables et soumis au contrôle et à l'autorité exclusifs des Nations Unies »234(*). Quant au paragraphe 2 k) de la résolution 1609, il énonce : «l'ONUCI est chargée d'assurer la protection du personnel, des installations et du matériel des Nations Unies, assurer la sécurité et la liberté de circulation du personnel des Nations Unies et, sans préjudice de la responsabilité du Gouvernement de réconciliation nationale, protéger les civils en danger immédiat de violence physique, dans la limite de ses capacités et dans les zones de déploiement de ses unités». A la lumière de ces deux dispositions, la sécurité du personnel onusien et de la population ivoirienne incombe au premier chef les autorités ivoiriennes. L' ONUCI ne peut assurer sa propre protection et celle de la population ivoirienne si et seulement si elles sont en danger imminent. C'est dire que l'ONUCI n'a pas l'initiative de se protéger et protéger la population d'où sa limite en matière de sécurité. Ainsi, lorsque la force onusienne met la main sur des délinquants, elle le remet aux autorités ivoiriennes. Qu'en est-il de la présence de la force française en Côte d'Ivoire ? B- Les limites dues à la présence de l'Opération Licorne
La Côte d'Ivoire et la France ont signé deux accords en 1961 : l'accord de défense et l'accord d'assistance militaire technique, tous deux en date du 24 avril 1961, entrés en vigueur le 26 juillet 1961 et publiés au Journal Officiel du 5 février 1962. En date du 9 février 1962, les deux pays ont adopté une convention sur le maintien de l'ordre en Côte d'Ivoire235(*). En effet, l'accord d'assistance militaire technique prévoit qu'à la demande de la Côte d'Ivoire, la France s'engage à lui apporter « l'assistance de personnels militaires français pour l'organisation, l'encadrement et l'instruction des forces armées236(*). Au début de la crise plus précisément le 28 septembre 2002, le gouvernement ivoirien a demandé l'application des accords passés avec la France237(*). En dépit des sollicitations, la France ne répond pas aux demandes du Président GBAGBO, attendant que la régionalisation du traitement de la crise ait pris de la consistance. C'est qu'il y a une différence de taille entre les analyses du Président de la République ivoirienne et celles des autorités françaises. En effet, pour Abidjan, des rebelles appuyés par des pays étrangers menacent le pays et face à cette agression, en légitime défense, la Côte d'Ivoire sollicite son allié. Pour Paris, cette analyse ne rend pas compte de la réalité238(*). Ce malentendu a affecté les relations entre les deux Etats. L'envoi le 22 septembre 2002 de l'Opération Licorne, une intervention de l'armée française avait pour but ultime de protéger les ressortissants français et étrangers. Plus tard, au travers de la résolution 1464 en date du 4 février 2003, le Conseil de sécurité se félicite du déploiement de la Licorne qui travaille successivement en étroite collaboration avec l'Ecoforce, la MINUCI et l'ONUCI dont elle constitue sa force d'intervention rapide. Compte tenu du malentendu entre les autorités ivoiriennes et françaises, la collaboration entre la Licorne et l'ONUCI va déteindre sur les activités de celle-ci dans la mesure les forces impartiales ont été taxées de partialité dans la crise ivoirienne. Cette supposée partialité a causé plusieurs incidents entre la Licorne, les FANCI et les jeunes «patriotes». En effet, plusieurs incidents ont opposé les forces françaises de l'Opération Licorne et les FANCI autour des villages de Bouenneu et de Zouan Hounien du 26 février au 2 mars, dans ce qui semblait une tentative délibérée d'entraver la liberté de mouvements des forces de ladite opération. A deux reprises, des soldats des FANCI se sont infiltrés dans la zone de confiance à Bouenneu et ont harcelé les soldats français qui en assuraient l'intégrité. A l'issue d'une période relativement longue de dangereuse hostilité, une réunion entre les commandants de l'ONUCI et de l'Opération Licorne d'une part et le chef d'état major des FANCI d'autre part a finalement permis d'apaiser la tension239(*). En outre, il s'est produit plusieurs incidents au cours desquels les Forces de Défense et de Sécurité ivoiriennes, les jeunes «patriotes» et les Forces Nouvelles ont entravé les mouvements des troupes de l'ONUCI et de l'Opération Licorne240(*). La plupart des incidents pourrait s'expliquer par le fait que la population ivoirienne en général et les jeunes «patriotes» en particulier n'apprécient guère la présence de la force française sur le territoire ivoirien. Ce qui a eu pour conséquence de constituer une limite pour la force onusienne car les incidents ci-dessus énumérés l'empêchent véritablement de mettre en oeuvre sa mission. Aussi, n'est-il pas exclu que ces tensions aient affecté le moral du personnel onusien. Aux limites ci-dessus énumérées s'ajoutent la multiplicité des médiateurs et l'insuffisance de ressources humaines et de moyens logistiques.
* 234 Cf. Paragraphe 48 de l'article VI de l'accord signé entre l'ONU et le gouvernement de Côte d'Ivoire, op. cit. * 235 Gilles COTTEREAU, Une Licorne en Côte d'Ivoire au service de la paix, op. cit. P.181. * 236 Ibid P.182. * 237 Cf. Section de l'information de l'ONUCI op. cit. * 238 Gilles COTTEREAU, Une Licorne en Côte d'Ivoire au service de la paix, op. cit. P.188. * 239 Cf. 8e rapport S/2006/222 du Secrétaire général sur l'ONUCI, op. cit.,P.6. * 240 Cf. 9e rapport S/2006/532 du Secrétaire général sur l'ONUCI, op. cit, P.7. |
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