SOMMAIRE
INTRODUCTION 2
CHAPITRE I : DECENTRALISATION FINANCIERE EN RDC,
UN PROCESSUS BOITEUX 15
Section 1 : CADRE JURIDIQUE ET INSTITUTIONNEL,
INCOMPLETUDE
DES DISPOSITIONS LEGALES 15 Section 2 : PRATIQUES DE LA
DECENTRALISATION, LE PROCESSUS
D'ENLISEMENT CONSACRE 31
CHAPITRE II : REDRESSEMENT DE LA DECENTRALISATION
FINANCIERE EN RDC, JUSTIFICATION ET ASPIRATIONS 59
Section 1 : CONTEXTE JUSTIFICATIF D'UNE NOUVELLE APPROCHE 59
Section 2 : STRATEGIES DE REDRESSEMENT, UNE NOUVELLE
TRANSVERSALE 63
CONCLUSION 81
INTRODUCTION
La décentralisation s'est imposée dans la
majorité des pays du monde, en tant que réforme politique et
institutionnelle, depuis les années 1980. Ceci à la suite des
mutations socioéconomiques ayant marqué cette époque,
notamment : la remise en cause du keynésianisme et de l'Etat-providence
en faveur de l'orientation vers la logique du marché ; la fin des
conflits internes et l'abandon des procédures autoritaires dans un grand
nombre de pays du Sud ; ainsi que l'effondrement de l'Union
soviétique1.
C'est dans ce contexte que la République
Démocratique du Congo, RDC en sigle, s'engage formellement, dès
1982, dans son processus de décentralisation, lequel se trouve
aujourd`hui conforté et relancé par la Constitution de 2006.
Mais, en dépit de son institutionnalisation, la décentralisation
en RDC demeure confrontée à de multiples problèmes,
particulièrement ceux d'ordre financier.
En effet, les informations émises à Kinshasa sur
la retenue à la source d'une partie des recettes du Trésor en
faveur des provinces et des entités territoriales
décentralisées ainsi que sur l'utilisation qu'en font les
autorités locales, montrent en fait que l'impact socioéconomique
de la décentralisation financière n'est pas perceptible sur
terrain. De même, cet impact sur la fiscalité locale laisse
apparaitre des écarts évidents et persistants entre les textes et
la réalité, entre les promesses et les réalisations, entre
la théorie et la pratique, alors que l'importance des finances publiques
dans l'équation du développement local n'est pas à
démontrer « tant elles sont le plus souvent
considérées comme l'épine dorsale, la colonne
vertébrale, le nerf, les poumons, le thermomètre, la toile de
fond, la pierre angulaire ou mieux l'âme de la
décentralisation » 2.
Ce constat ne nous laisse pas indifférent. Nous avons
jugé opportun de contribuer à la réflexion y relative
à travers le présent mémoire de Maîtrise dont le
sujet est intitulé : « Problématique de mise en oeuvre de la
décentralisation financière en République
Démocratique du Congo ».
1 Cités et Gouvernements Locaux Unis,
(2007), Premier Rapport Mondial sur la décentralisation et la
démocratie locale , Groupement de recherches sur l'administration locale
en Europe (Grale) ; le Grale est un réseau scientifique international
attaché au CNRS (Paris)
2 Epee, G. et Otemikongo, M. (1992) ; «
Entités territoriales décentralisées et financement public
du développement local au Zaïre » ; Zaïre-Afrique ;
N° 266. juin-juillet-août 1992 ; PP 347-355
Ainsi que le suggère cet intitulé, notre
recherche portera sur le territoire de la RDC et se focalisera sur la
période allant de 1982, année de la réforme
décentralisatrice initiée sous la Deuxième
République3, à 2009, année d'intensification
des débats sur la décentralisation financière et le
découpage territorial prévus dans la Constitution de la
3ème République4.
Cela étant, la revue de la littérature traitant
des aspects financiers de la décentralisation en général
et ceux relatifs à la RDC, en particulier, met en relief une
problématique se présentant sous deux aspects
complémentaires. Il s'agit, d'un côté, de la
praticabilité du projet décentralisateur dans son ensemble et, de
l'autre, du financement de la décentralisation.
Concernant la praticabilité du projet
décentralisateur dans son ensemble, on a mobilisé les travaux de
Watchter, Komlavi, Vunduawe, et Wendjo.
Les réflexions conduites par Wachter (1989) proposent,
en partant du cas de la France, des éléments de réponse
à la problématique d'efficacité du projet
décentralisateur, problématique formulée en ces termes :
«Cette politique gouvernementale a-t-elle atteint les objectifs qui
lui étaient assignés ? En externalisant des charges de gestion du
collectif au bénéfice des collectivités locales, l'Etat
a-t-il amélioré le rendement des interventions publiques tout en
assurant l'obtention d'un supplément de démocratie ?
»5. Observant la morphologie des marchés nationaux et
locaux d'interventions publiques pour appréhender les pouvoirs et les
rôles exercés par les autorités centrales et locales et les
interdépendances qui en découlent, lesdites réflexions
arrivent à la conclusion que l'innovation majeure induite par la
politique publique de décentralisation est la transformation des
autorités décentralisatrices en autorités
régulatrices. Dans ce cadre, des adaptations par la pratique sont
réalisées pour permettre l'applicabilité des mesures
édictées et ce, au fur et à mesure que des
problèmes concrets de coordination entre les politiques nationales et
les politiques locales émergent et appellent une solution ; telles que
la délimitation plus rigoureuse des compétences des acteurs
locaux, l'adaptation des transferts financiers décentralisés et
le statut du personnel des collectivités territoriales.
3 La Deuxième République se confond avec
le règne du Maréchal Mobutu en RDC, alors Zaïre, de 1965
à1997.
4 La Constitution de la 3ème
République est celle qui régit la vie publique et
institutionnelle en RDC depuis sa promulgation le 18 février 2006
5 Wachter, S. (1989) ; « Décentralisation
et marchés d'interventions publiques », in Wachter et al ;
Politiques Publiques et Territoires ; L'Harmattan ; PP 7-21
Ce qui permet, selon Wachter, à la politique publique
de décentralisation d'assurer l'efficacité économique tout
en privilégiant la stabilité6.
Komlavi (2002), qui s'est préoccupé du
changement politique et social induit par la décentralisation au Niger,
aborde la « gouvernance comme une confrontation des logiques d'acteurs
autour d'enjeux locaux, plutôt que généraux ou globaux
»7. Pour lui, le projet de décentralisation dans ce pays
se confond avec un retrait de l'Etat qui semble laisser la porte ouverte
à diverses formes d'appropriation et de dérives. C'est ainsi
qu'il conclut que « face à des logiques d'appropriation et
d'accaparement des biens collectifs, dans des situations de concurrence pour le
pouvoir et le contrôle des ressources (matérielles, humaines et
financières), et à des pratiques clientélistes et
corruptrices, la main invisible d'Adam Smith ne fonctionne pas tel que
l'entendent les initiateurs de la décentralisation
»8.
C'est dans le cadre d'une tentative de réponse à
la question de savoir « pourquoi et comment la décentralisation
territoriale des responsabilités en RDC » 9 que Vunduawe
(1992), après avoir exposé les motivations profondes à
l'origine de la réforme décentralisatrice de 1982, la
manière dont elle a été conduite et sa portée
exacte, arrive à la conclusion que les conditions de réussite de
la décentralisation en RDC se situent au triple plan des hommes, des
ressources financières et du comportement du pouvoir central.
Sur le plan humain, estime-t-il, il faut des « hommes
à l'esprit décentralisé pour conduire le programme de
décentralisation ; des hommes compétents, crédibles et
surtout politiquement engagés »10.
6 Wachter, S. (1989); op.cit. ; P.18
7 Komlavi, E. (2002) ; « La chefferie
coutumière face au projet de décentralisation dans une
localité de l'Ouest nigérien » ; Bulletin de l'Association
Euro-Africaine pour l'Anthropologie du Changement Social et du
Développement ; N° 23-24 ; Juin-Décembre 2002 ; PP 69-85.
8 Ibid ; P. 85
9 Vunduawe, T. (1982) ; « La
décentralisation territoriale des responsabilités au Zaïre.
Pourquoi et comment ? » ; Zaïre-Afrique ; N° 166 ; Août
1982 ; PP 327-343
10 Vunduawe, T. (1982); op.cit. ; P. 342
Sur le plan des ressources, préconise-t-il, les
provinces et entités territoriales décentralisées devront
faire preuve d'imagination pour générer leurs propres ressources
tandis que l'Etat n'interviendra en leur faveur qu'à titre d'appoint
sous forme d'interventions diverses. Concernant le comportement du pouvoir
central, Vunduawe suggère que ce dernier puisse jouer correctement son
« rôle de tutelle, de contrôleur, de modérateur et
de régulateur » 11.
Wendjo (1994) qui analyse l'expérience de
décentralisation sous la 2ème République en
RDC, se pose en substance la question de savoir « comment relancer et
améliorer le crédit territorial auprès de la population
tant urbaine que rurale ». Estimant que la résignation et la
méfiance qu'entretient la population vis-à-vis de la territoriale
constitue un handicap sérieux à tout effort consistant à
mobiliser les ressources disponibles, y compris les ressources
financières, au service du développement, il insiste, pour
conclure, sur l'implication et le rôle de trois groupes d'acteurs
stratégiques ci-après : les territoriaux, les partis politiques
et la société civile. En ce qui concerne la territoriale dont il
épingle sept tares (ignorance, clientélisme,
irresponsabilité, incompétence, corruption, égoïsme,
mensonge), Wendjo estime que quatre axes prioritaires devraient constituer
l'épine dorsale de tout effort de démocratisation de la gestion
des entités territoriales décentralisées ou d'adoption
d'une forme de gestion participative qui puisse rendre la territoriale efficace
et opérationnelle à savoir : « réévaluer
les objectifs de la territoriale ; déterminer les critères et les
procédures
de choix des territoriaux ; développer la formation
; et, répartir équitablement l'appuilogistique et les
compétences dans la gestion des ressources » 12.
Les partis politiques selon le
même auteur, ont pour mission l'information et
l'éducation des masses concernant le processus de démocratisation
; tandis que la contribution de la société civile s'avère
incontournable devant la faillite, la démission ou la paralysie des
structures étatiques.
Bien que la problématique d'ensemble portant sur le
bien-fondé et les conditions d'application du projet
décentralisateur ne néglige pas les aspects financiers, les
travaux de Bouvier, Paulais, Yatta, Epee et Otemikongo, et Mabi se concentrent
particulièrement sur ces derniers et sont instructifs à plus d'un
titre.
11 Vunduawe, T. (1982); op.cit. ; P. 343
12 Wendjo, P. (1994), Pour un renouveau de l'effort de
développement à la base, Noraf
Bouvier (1998), dans une vaste réflexion sur les
finances locales en France, s'attache à la description et à la
reformulation des procédures et techniques des finances locales telles
qu'elles se trouvent placées au coeur du dispositif de changement et du
nouveau processus de régulation qu'induisent les transformations de
l'Etat dans le cadre de la décentralisation des collectivités
territoriales. Après avoir démontré l'importance capitale
et la montée en puissance des finances locales, lesquelles apparaissent
comme un des éléments essentiels pour juger de l'accomplissement
de la réforme décentralisatrice, et après avoir
décrit les différentes ressources financières reconnues
aux collectivités locales ( fiscalité locale, concours de l'Etat,
emprunt, gestion du patrimoine et des services locaux), Bouvier arrive à
la conclusion que l'approche technique et de gestion des finances locales, bien
que nécessitée par le nouveau contexte n'est pas suffisante ;
elle doit toujours s'accompagner d'un intérêt marqué
vis-vis de la qualité du lien social, car « c'est bien la
solidarité qui constitue depuis toujours la raison d'être des
communautés locales » 13.
Paulais (2006) se demande, lui, comment vont être
financés les besoins en investissements des villes africaines, le taux
d'urbanisation de ces dernières devant dépasser les 50% d'ici
2030 ? Pour lui et en guise de réponse à cette
problématique, le financement des investissements desdites villes devra
être envisagé comme un marché potentiel pour les
opérateurs financiers privés et les bailleurs de fonds qui
pourront désormais intervenir directement en termes de prêts dits
sous-souverains, étant donné que les Etats sont de plus en plus
nombreux qui manifestent leur réticence à accorder leur garantie
aux emprunts sollicités par les collectivités territoriales
craignant d'alourdir la dette publique.
Concrètement, Paulais (2006) souhaite que, devant
l'ampleur des besoins dans les décennies à venir, le processus de
responsabilisation et d'autonomisation permette de relever les défis qui
limitent l'implication des collectivités locales comme acteurs
financiers directs. Aussi, suggère-t-il que « l'aide public au
développement (APD) crée les conditions de l'action et donne aux
collectivités locales les moyens de se financer plutôt que de les
financer directement »14.
13Bouvier, M. (1998), Les finances locales, Librairie
générale de droit et jurisprudence
14 Paulais, T. (2006) ; « Comment vont être
financés les besoins en investissements des villes africaines » ;
La Revue Africaine des Finances Locales ; N°9 ; Octobre 2006 ; PP 5-8
Pour répondre à cette préoccupation, il
estime que la décentralisation fiscale se pose comme condition
nécessaire à la mise en oeuvre par les collectivités
locales des objectifs du millénaire pour le développement. C'est
dans cette logique qu'il propose ce qui suit pour renforcer la
décentralisation fiscale en Afrique, à savoir : assurer le
contrôle des reversements aux collectivités locales
effectués dans le cadre de la fiscalité partagée et la
définition conséquente des voies de recours ; subordonner le
bénéfice des concours et subventions de l'Etat aux performances
réalisées dans la mobilisation des ressources ; revoir les
politiques sectorielles et les territorialiser ; structurer le dialogue entre
Etat et collectivités locales par des informations partagées sur
les finances locales, le potentiel et le rendement fiscaux, le niveau de
performance dans la mobilisation des ressources locales, etc. 15
Pour Epee et Otemikongo (1992), les entités territoriales
décentralisées en RDC sont appelées à faire
preuve de créativité et d'esprit d'initiative et à
cultiver une « mentalitéd'investissement
» pour faire sortir les finances locales de l'impasse dans laquelle
elles se
trouvent enfoncées16. Aux yeux de ces auteurs,
la culture d'investissement dans le chef des collectivités locales est
possible sous réserve de trois préalables suivants :
1° Que tous les contribuables consentent à payer
à l'Etat son dû
2° Que les agents percepteurs ainsi que les services
producteurs de recettes versent 'intégralité des recettes dans
les caisses de l'Etat
3° Que les gestionnaires des crédits publics
soient imbus du souci de développer les entités qu'ils
administrent, en faisant un dosage savant entre le fonctionnement de celles-ci
d'une part, et le financement des investissements ou du développement,
d'autre part.
Pour Mabi (2006) qui, au regard de la Constitution de 2006,
s'applique à actualiser la problématique de mobilisation des
recettes par les provinces et entités territoriales
décentralisées et des actions à entreprendre pour une
gestion des finances publiques locales et territoriales de développement
en RDC, la nécessité d'un aménagement ou d'une
réforme du système fiscal s'impose.
15Yatta, F. (2006) ; « Ressources
financières locales et atteinte des OMD »; La Revue Africaine des
Finances Locales ; N°9 ; Octobre 2006 ; PP 30-37
16Epee, G. et Otemikongo, M. (1992) ; op.cit. ; P
355
Car, la décentralisation renforcée ayant
élargi les compétences des entités territoriales
décentralisées en allégeant celles du pouvoir central, il
va de soi que leurs moyens d'action empruntent la même tendance.
Dans cet ordre d'idées, Mabi (2006) estime que les
réformes à entreprendre devraient se traduire en termes
d'impératifs liés à un apport supplémentaire en
matière d'efficacité à insuffler au système de
mobilisation des ressources plus qu'avant au profit aussi bien du pouvoir
central que des provinces. Pour aboutir à cette conclusion, Mabi a
analysé le système fiscal actuel des entités
décentralisées, lequel repose, selon lui, sur la
rétrocession et le fonds de péréquation17.
Toutes ces analyses nous confortent davantage à porter
notre attention aussi bien sur la nature des difficultés que rencontre
la décentralisation financière et qui l'empêchent de
produire le maximum de résultats avec un minimum d'effort que sur la
manière de les surmonter.
Aussi, allons-nous articuler la problématique de notre
recherche autour d'une question principale et deux questions secondaires,
à savoir:
- Comment peut-on dégager la mise en oeuvre de la
décentralisation financière en RDC des entraves à son
efficacité ?
- En quoi ces entraves consisteraient-elles pour que la
décentralisation financière s'avère globalement
inopérante ?
- Quelles stratégies faudra-t-il adopter pour les
contourner et rendre la décentralisation financière plus à
même d'atteindre les objectifs lui assignés ?
Afin de nous rassurer du même entendement de cette
problématique et des développements y afférents, il sied
d'en définir et opérationnaliser quelques concepts-clés,
en l'occurrence : décentralisation financière ; politique
budgétaire ; déconcentration ; autonomie locale ;
viabilité financière; efficacité économique;
stratégie et richesse.
Décentraliser signifie opérer un mouvement
contraire à la centralisation, qui est un mode d'organisation des
services publics qui consiste à confier leur gestion au pouvoir central
de l'Etat. La décentralisation est ainsi une démarche
seconde qui suppose une centralisation
préalable18.
Selon le « Lexique des termes juridiques », elle est
« un système d'administration consistant à permettre
à une collectivité humaine (décentralisation territoriale)
ou à un service (décentralisation technique) de s'administrer
eux-mêmes sous le contrôle de l'Etat en les dotant de la
personnalité juridique, d'autorités propres et de ressources
»19.
Le 1er Rapport Mondial sur la
Décentralisation et la Démocratie Locale précise cette
définition lorsqu'il souligne que « l'une des finalités
les plus importantes de la décentralisation est de permettre une
réponse efficace et adaptée aux besoins des populations locales
»20.
Dans cette optique, la décentralisation
financière est appréhendée dans notre mémoire
comme ce volet de la décentralisation territoriale recouvrant la
répartition des ressources publiques et l'organisation des rapports
financiers entre l'Etat et les collectivités locales, ainsi que les
questions liées à l'allocation des ressources au niveau local
pour la prise en charge du fonctionnement et la mise en oeuvre de la plupart
des investissements et services publics.
Elle comprend ainsi la décentralisation fiscale
et la décentralisation budgétaire.
Yatta (2006) mesure la décentralisation fiscale par les
trois indicateurs suivants: le rapport recettes locales/budget de l'Etat ; le
rapport recettes fiscales locales/recettes fiscales de l'Etat et le rapport
recettes locales/nombre d'habitants par collectivité locale. La
décentralisation budgétaire est beaucoup plus une notion
juridique dans la mesure où elle repose sur la distinction entre
finances du pouvoir central et finances des collectivités locales.
18 Toengaho Kokundo, F. (2009) ; « La
décentralisation et la réforme de l'Etat congolais» ;
communication ; Atelier de formation de formateurs sur la sensibilisation
à la décentralisation ; Ministère de la
Décentralisation ; novembre 2009 ; Kinshasa
19 Guinchard, S., Montagnier, G., Guillon, R. et
Vincent, J. (2007), Lexique des termes juridiques ; Dalloz
20 Cités et Gouvernements Locaux Unis, (2007) ;
op.cit. ; P. 35
La politique budgétaire étant
définie comme « celle qui décide du montant des
dépenses gouvernementales et des impôts » 21 ou encore
comme étant la manipulation des recettes et dépenses publiques en
vue d'influencer l'activité économique, la mise en oeuvre de la
décentralisation financière ne peut qu'en être tributaire.
Dans le même registre, la décentralisation financière peut
être considérée comme un moyen de la politique
financière de l'Etat dans la mesure où celle-ci est
définie dans le sens d'une recherche de l'efficacité
économique de l'Etat en mettant en évidence les
préoccupations principales de ce dernier en matière
économique et sociale22.
Ainsi comprises, la politique financière comme la
politique budgétaire et, par ricochet, la décentralisation
financière peuvent s'interpréter, dans notre travail, comme des
pans entiers de la politique économique.
En tout état de cause, il est également utile de
distinguer la décentralisation de la déconcentration. La
différence entre les deux concepts voisins tient au statut des organes
qui bénéficient de la redistribution du pouvoir. Contrairement
à la décentralisation où ces organes ont leur
identité propre et dispose d'une relative autonomie vis-à-vis de
l'Etat, dans le cadre de la déconcentration, les organes qui
bénéficient de certaines compétences ne sont que les
agents locaux du pouvoir central.
L'autonomie locale, local self government en
anglais, ou libre administration, signifie le «
droit et la capacité effective pour les collectivités locales
de régler et gérer dans le cadre de la loi, sous leur propre
responsabilité et au profit de leurs populations, une part importante
des affaires publiques »23. C'est en fait l'état
d'effectivité et la résultante de la décentralisation
territoriale. Mais, « la décentralisation effective et
l'autonomie locale exigent une autonomie financière appropriée
»24. Et, il y a autonomie financière lorsque «
les ressources financières des autorités locales sont
proportionnelles aux tâches et responsabilités qu'elles assument
et leur assurent la viabilité
financière...»25.
21 Mishkin, F. (2007), Monnaie, banque et
marchés financiers, Nouveaux Horizons
22 Billy, J. (1991), La politique économique,
PUF
23 Cités et Gouvernements Locaux Unis,
(2007) ; op.cit. ; P 17 ; il s'agit ici d'un extrait de l'article 3 de la
Partie 1 de la Charte Européenne de l'autonomie locale ; cette charte,
adoptée en 1985 par le Conseil de l'Europe et ratifiée par une
quarantaine de pays, est le premier document de portée juridique, sur le
plan international, relatif au statut et aux droits des collectivités
locales
24 Ibid. ; P 63
25 Ibid
L'Organisation de Coopération et de
Développement Economique (OCDE) (2002) définit la
viabilité (pérennité ou durabilité) comme la
continuation des bénéfices résultant d'une action de
développement après la fin de l'intervention ; la
probabilité d'obtenir des bénéfices sur le long terme ; ou
une situation par laquelle les avantages nets sont susceptibles de
résister aux risques26. C'est ce dernier sens que nous
adoptons pour traiter de la santé financière des provinces et
collectivités locales.
Ceci dit, selon le Petit Robert, l'efficacité
se définit comme la capacité de rendement, l'efficience ou la
capacité de produire le maximum de résultat avec un minimum
d'effort. Cette définition comprend la notion d'économie qui se
traduit par le non-gaspillage d'une ressource donnée et qui laisse
entendre qu'une action est économique lorsque le coût
d'utilisation des ressources rares se rapproche du minimum requis pour
atteindre les objectifs prévus27.
L'efficacité économique ne fait sens
que par rapport à un objectif défini au préalable et peut
s'interpréter comme celle qui garantit les avantages globaux au
coût le plus bas possible. C'est dans ce sens que nous utiliserons ce
concept dans la suite du présent travail. Quant à la
stratégie, le même Petit Robert la définit, elle,
comme un ensemble d'actions coordonnées, de manoeuvres en vue d'une
victoire.
Appliquée à notre problématique, ce
concept voudrait renvoyer aux étapes à suivre, aux actions
à mener, pour redresser le volet financier de la décentralisation
en RDC et le rendre plus efficace.
Pour Gilder (1981), « la richesse est un ensemble
d'actifs qui garantissent un flux ultérieur de revenus. Les revenus
pétroliers (par exemple) ne deviennent des actifs stables qu'en prenant
la forme d'un capital productif - industries, ponts, routes, écoles et
technologie - qui assure à l'avenir un flux de revenus lorsque les
réserves pétrolières s'épuiseront
»28 .
C'est cet entendement que nous adopterons dans notre travail
pour aborder, par rapport aux préoccupations de la
décentralisation financière, ce que l'on a coutume d'appeler en
RDC « richesses du sous-sol » (diamant, cobalt, or, cuivre, coltan,
etc.).
26 Organisation de Coopération et de
Développement Economique, OCDE (2002), Glossaire des principaux termes
relatifs à l'évaluation et la gestion axée sur le
résultat, Comité d'Aide au Développement
27 OCDE, (2002), op.cit P. 20
28 Gilder, G. (1981), Richesse et pauvreté,
Albin Michel
Les concepts jugés indispensables pour l'exploration
perspicace de notre objet d'étude, ayant été
explicités, nous pouvons formuler les objectifs spécifiques
poursuivis par notre étude.
Au demeurant, il s'agit, pour nous de :
1° Montrer en quoi consistent les entraves à la mise
en oeuvre efficace de la décentralisation financière en RDC
2° Proposer des voies et moyens à même de
relever les défis majeurs et améliorer l'impact
socio-économique de la décentralisation financière en
RDC.
Dans le développement de notre sujet de recherche, nous
nous appliquerons à la vérification des hypothèses
suivantes:
- Le non-respect chronique des textes de base et des
procédures en vigueur en matière de gestion administrative et
budgétaire, au niveau du pouvoir central, des provinces et
entités territoriales décentralisées, entretiendrait le
dysfonctionnement de la décentralisation financière,
empêcherait l'atteinte des objectifs assignés à cette
dernière et affecterait la réforme décentralisatrice dans
sa substance ;
- Les faibles capacités de mobilisation des ressources
budgétaires et de leur gestion constitueraient également un
handicap de taille à l'efficacité économique de l'Etat par
la décentralisation ;
- Pour redresser durablement la mise en oeuvre de la
décentralisation financière en RDC, il conviendrait d'orienter le
comportement des acteurs dans le sens du respect des règles et principes
en vigueur ;
- En outre, pour remédier avec succès aux
défaillances de mobilisation et de gestion des ressources
budgétaires, il serait indiqué de mener des actions
spécifiques de renforcement des capacités d'intervention
financière de l'Etat, des provinces et des autorités locales.
Comme on peut le constater, l'actualité de notre sujet
ainsi que sa portée socio-économique constituent les principales
raisons qui fondent son choix.
En effet, cette actualité est particulièrement
dominée par l'exacerbation des discussions entre les provinces et le
gouvernement central sur le financement de la décentralisation ainsi que
par des tensions récurrentes entre les exécutifs provinciaux et
leurs organes délibérants respectifs sur la gouvernance
locale.
La portée socio-économique du sujet est telle
que les résultats positifs attendus de cette réflexion pourraient
éclairer les décisions prises par l'Etat, les provinces, les
entités territoriales décentralisées, les
opérateurs économiques, la société civile et le
citoyen congolais pour contribuer tant soit peu au redressement du volet
financier du processus décentralisateur ainsi qu'à
l'amélioration de l'offre locale des utilités publiques en
perspective de l'atteinte des objectifs du millénaire pour le
développement.
Par ailleurs, l'intérêt de notre sujet ne peut se
limiter au seul territoire de la RDC, étant donné que ce pays
entretient des rapports socio-économiques séculaires avec 9 pays
voisins, dont la République du Congo qui abrite l'institution
universitaire au sein de laquelle nous préparons ce mémoire,
outre qu'elle fait partie de plus d'une communauté économique
régionale (CEEAC, SADC, CEPGL, etc.) et coopère
étroitement avec la communauté internationale (PNUD, Banque
Mondiale, FMI, Union Européenne, etc.).
Les ressortissants des différents pays voisins ainsi
que les partenaires régionaux et/ou internationaux au
développement étant de loin ou de près concernés
par la viabilité de toute réforme institutionnelle fondamentale
en RDC, il va de soi qu'ils ne peuvent que s'intéresser d'une
manière ou d'une autre aux résultats de la présente
recherche.
Ainsi, avons-nous structuré notre travail en deux
chapitres : il nous sera donné, dans un premier chapitre, de rendre
compte des entraves à la mise en oeuvre réussie de la
décentralisation financière en RDC. Dans un second chapitre, nous
allons proposer quelques stratégies à même de garantir le
relèvement et l'efficacité de la décentralisation
financière dans ce pays. Pour ce faire, nous nous appuierons sur les
faits ainsi que sur la logique du raisonnement comme outils d'analyse ; tandis
que la recherche et l'exploitation documentaires, l'analyse des données
statistiques, et l'observation participante serviront comme moyens de collecte
des données. Nous procéderons, dans le traitement de ces
dernières, par comparaison, induction, déduction ou extrapolation
pour vérifier nos différentes hypothèses.
En guise de conclusion, nous présenterons les
résultats obtenus et les implications de politique économique qui
en découlent en regard de la problématique énoncée
et des hypothèses retenues, et, nous mettrons en évidence les
limites actuelles de notre travail et les possibilités de son
affinement.
CHAPITRE I : DECENTRALISATION FINANCIERE EN
RDC, UN PROCESSUS BOITEUX
La décentralisation financière en RDC n'est ni
une excroissance gouvernementale ni un épiphénomène : elle
repose sur la décentralisation territoriale et se fonde, dans le cadre
de cette dernière, sur des textes juridiques qui définissent les
rapports entre le pouvoir central, les provinces et entités
administrativement décentralisées, déterminent les
compétences et ressources respectives de ces dernières et
entraînent des implications pour les différents acteurs (Section
1).
Au cours de la période d'analyse, soit de 1982 à
2009, la décentralisation financière en RDC a été
mise à mal par des défaillances fréquentes et
persistantes, tant au niveau du pouvoir central qu'à celui des provinces
et ETD, dans la prise en charge des tâches et responsabilités
respectives en matière de mobilisation et de gestion des ressources
budgétaires (Section II).
SECTION 1 : CADRE JURIDIQUE ET INSTITUTIONNEL,
INCOMPLETUDE DES DISPOSITIONS LEGALES
Les textes fondateurs de la décentralisation
financière comprennent aussi bien les textes instituant la
décentralisation dans son ensemble que ceux spécifiques aux
finances locales. Deux blocs de lois dominent la réforme
décentralisatrice en RDC au cours de la période sous revue. Il
s'agit des lois « Vunduawe » de 1982 et des « lois sur la
décentralisation » de 2008. Cet ordre juridique et institutionnel
fixe implicitement des objectifs à atteindre et se trouve
également chargé d'implications d'actions pour les acteurs du
processus.
1.1. Textes de base de la décentralisation
financière en RDC: des lois « Vunduawe »
de 1982 à l'ordre constitutionnel de
2006
Les textes fondateurs de la décentralisation de 1982
à 2009 s'apparentent sur plusieurs points, notamment la volonté
politique d'apporter un changement profond à l'organisation territoriale
et administrative du pays pour en améliorer le rendement. Mais, ils ne
manquent pas de points de démarcation compte tenu des différences
liées au contexte socio-politique et/ou à la garantie
constitutionnelle de la réforme engagée.
1.1.1. Réforme décentralisatrice de 1982 et
réajustements y relatifs
Bien que constituant le fondement juridique de la
réforme décentralisatrice, les lois « Vunduawe » ont
subi quelques modifications pour s'adapter à l'évolution de
l'ordre constitutionnel qui a régi la RDC au cours de la période
allant de 1982 à la veille de la Constitution du 18 février 2006.
Comme l'indique le tableau I.1 ci-dessous, trois textes de
référence forment ensemble la législation sur la
décentralisation de 1982. Il s'agit des Ordonnances-lois n° 82-006,
82-007 et 82-008 du 25 février 1982 portant successivement organisation
territoriale, politique et administrative de la RDC ; organisation des
élections législatives, locales et municipales ; et, statut de la
Ville de Kinshasa.
Tableau I.1 : Les lois de décentralisation de
1982
PERIODE
|
TEXTES DE BASE
|
ENTITES CONCERNEES
|
1982
|
Ordonnance-loi n° 82-006 portant
organisation territoriale, politique et
administrative de la République ;
Ordonnance-loi n° 82-007 portant
organisation des élections législatives, locales
et municipales ; et, Ordonnance n° 82-008 portant statut de la Ville de
Kinshasa, du 25 février 1982.
|
Région ; Ville ; Zone Rurale ; Zone Urbaine ; et,
Collectivité
|
Source : Données reconstituées par
nous-mêmes sur base des archives du Ministère de la
Décentralisation et Aménagement du Territoire ; Cellule Technique
d'Appui à la Décentralisation
Les trois textes de 1982 ont été pris dans un
contexte où, « il fallait pour éviter le risque de
blocage des institutions du pays y remédier par la
décentralisation territoriale courageuse. Il y avait
nécessité de redonner un souffle nouveau au développement
régional et partant à la relance de l'ensemble de
l'économie nationale»29. Cinq entités sont
décentralisées à la faveur de la réforme de 1982,
en l'occurrence : la Région, la Ville, la Zone Rurale, la Zone
Urbaine.
1.1.1.1. Modifications apportées aux « lois
Vunduawe » en 1995
En 1995, le pouvoir législatif issu de la
Conférence Nationale Souveraine, autrement appelé «
Haut-Conseil de la République-Parlement de Transition», va
édicter la Loi n° 95-005 du 20 décembre 1995.
29 Vunduawe, T. (2007), Traité de Droit
Administratif, De Boeck et Larcier
« Le texte du Parlement de Transition ajoute la
Collectivité à l'architecture territoriale de 1982, tandis que la
Zone Rurale devient Territoire et la Zone Urbaine, Commune. La
Déclaration de prise du pouvoir du Conseil Elargi de l'Alliance des
Forces Démocratiques pour la Libération (AFDL) du 17 mai 1997
sanctionne le changement de régime étant donné que les
nouvelles autorités avaient affiché clairement la volonté
de remplacer les institutions politiques et administratives en suspendant des
institutions existantes »30.
1.1.1.2. Modifications apportées aux « lois
Vunduawe » en 1998
Tel que l'illustre le tableau I.2, le Décret-loi du 2
juillet 1998 s'inscrit dans cette logique en suspendant le fonctionnement des
assemblées régionales et en retenant comme entités
territoriales décentralisées la Province (alors Région en
1982 et 1995), la Ville, le Territoire, et la Commune (uniquement pour la Ville
de Kinshasa).
Tableau I.2 : Modifications des « lois Vunduawe
» (1995-1998)
PERIODE
|
TEXTES DE BASE
|
ENTITES CONCERNEES
|
1995
|
Loi n° 95-005 du 20 décembre 1995
|
Région ; Ville ; Commune
(Zone Urbaine en 1982) ;
Territoire (Zone Rurale en 1982) ; et, Collectivité
|
1998
|
Décret du 2 juillet 1998
|
Province (Région de 1982 à
1995) ; Ville ; Territoire ; Commune (uniquement pour la Ville
de Kinshasa)
|
Source : Données reconstituées par
nous-mêmes sur base des archives du Ministère de la
Décentralisation et Aménagement du Territoire ; Cellule Technique
d'Appui à la Décentralisation.
1.1.2. Réforme constitutionnelle de 2006 :
régionalisme politique et décentralisation administrative
La Constitution du 18 février 2006 prévoit une
nouvelle organisation de l'administration locale qui comprend à la fois
une administration régionalisée au niveau provincial
(constituée de la Ville de Kinshasa et des provinces), une
administration décentralisée formée des entités
décentralisées (Ville, Commune, Secteur, Chefferie) et la
déconcentration qui, elle, s'applique aux territoires, quartiers,
groupements, et villages.
30 Vunduawe, T. (2007), Traité de Droit
Administratif, De Boeck et Larcier
Ces dernières entités ne rentrent pas
directement dans notre champ d'étude, mais entretiennent un potentiel
d'influence sur la santé financière des ETD dans la mesure
où leur coût de gestion, lorsqu'il est exagéré, peut
être interprété comme un réducteur de choix pour la
libre administration locale.
C'est depuis 2008, comme l'indique le tableau I.3 ci-dessous,
que des textes législatifs et réglementaires sont pris, en
référence à l'ordre constitutionnel de 2006, pour
réorganiser la décentralisation en RDC.
Tableau I.3 : Institutionnalisation de la
décentralisation territoriale (2006-2008)
2006
|
Constitution du 18 février 2006
|
Province (Entité territoriale
|
régionalisée) ; Ville ; Commune ;
|
Secteur ; Chefferie
|
2008
|
Loi n° 08/012 du 31 juillet 2008 portant principes
fondamentaux relatifs à la libre administration des provinces ;
Loi organique n° 08/015 du 7 octobre 2008 portant
modalités d'organisation et
fonctionnement de la Conférence des Gouverneurs ;
Loi organique n° 08/016 du 7 octobre 2008 portant
composition, organisation et
fonctionnement des Entités Territoriales
Décentralisées et leurs rapports avec l'Etat et les provinces
;
Décret n° 08/06 du 26 mars 2008 portant
création d'un Conseil National de mise en oeuvre et de suivi du
Processus de la Décentralisation ;
Arrêté Ministériel n° 033 du 25
juillet 2008 portant organisation et fonctionnement de la Cellule Technique
d'Appui à la Décentralisation.
|
|
Source : Données reconstituées par
nous-mêmes sur base des archives du Ministère de la
Décentralisation et Aménagement du Territoire ; Cellule Technique
d'Appui à la Décentralisation.
La répartition de compétences et de ressources
entre le pouvoir central, la province et les entités territoriales
décentralisées est l'élément central des textes
organisant la décentralisation territoriale. Les matières faisant
l'objet de répartition sont, soit de la compétence concurrente du
pouvoir central et des provinces, soit de la compétence exclusive du
pouvoir central, des provinces et/ou des entités territoriales
décentralisées.
1.1.2.1. Charges et responsabilités incombant aux
provinces et entités territoriales
décentralisées
Il est intéressant de noter, à la lumière
de la Constitution de 2006, que les compétences reconnues à titre
exclusif aux provinces ne sont pas des moindres, sachant que d'autres sont
partagées avec le pouvoir central. Elles sont particulièrement
prononcées dans les domaines aussi vitaux que la fonction publique
provinciale, les finances publiques provinciales et locales, la santé,
l'enseignement primaire, secondaire, professionnel et spécialisé
y compris l'alphabétisation, et l'agriculture, pour ne citer que
ceux-ci31.
Un tel volume de compétences de proximité ne
peut être valablement envisagé sans ressources budgétaires
correspondantes.
Le législateur confie à la ville des
compétences importantes particulièrement prononcées dans
les domaines vitaux suivants : la construction de la voirie et des
équipements collectifs; la création et/ou la
réhabilitation d'écoles; l'assistance sociale ; l'eau potable ;
l'électricité ; et, l'assainissement32. Des
compétences qui exigent également pour leur prise en charge
efficace, outre les capacités humaines, des moyens financiers
conséquents...
Le législateur reconnaît à la commune des
compétences semblables à celles de la ville. Ces
compétences portent essentiellement sur les équipements
collectifs, la santé publique et l'enseignement primaire, secondaire et
spécial. Elles suffisent, elles aussi, pour justifier l'attention
égale que devrait requérir la satisfaction des besoins en
ressources budgétaires de ces différentes entités et ce,
au même titre que ceux de la province33.
Quoi qu'il en soit, le secteur et la chefferie, en tant
qu'entités décentralisées ont aussi des compétences
spécifiques qu'il conviendrait de rappeler ici. .
Le rôle assigné par le législateur au
secteur et à la chefferie consiste en la responsabilisation de ces
entités qui découle du principe de subsidiarité et fait
d'elles de véritables centres d'impulsion et d'incitation du
développement à la base.
31 Constitution du 18 février 2006, article
204
32 Loi organique n°08/016 du 7 octobre 2008,
article 11
33 Ibid
En effet, des domaines de proximité comme les routes
d'intérêt local, la lutte contre les épidémies, la
construction et l'exploitation des mini-centrales d'électricité,
l'énergie solaire et l'aménagement des sources et des puits d'eau
34, et nous en passons, constituent de lourdes charges
socio-économiques qui ne peuvent être valablement assumées
sans moyens suffisants et durables.
1.1.2.2. Ressources budgétaires reconnues aux
provinces et entités territoriales
décentralisées
Après ce bref examen des compétences
transférées aux provinces, villes, communes, secteurs et
chefferies, il convient de dire un mot sur les ressources reconnues à
ces entités par le législateur en tant qu'éléments
déterminants de leur autonomie financière respective.
Comme d'aucuns ne l'ignorent, la Loi Financière
n°83-003 du 23 février 1983 a été initiée et
promulguée pour adapter la gestion des finances publiques au contexte de
décentralisation consacré, à l'époque, par
l'Ordonnance-loi n° 82-006 du 25 février 1982 portant organisation
politique, territoriale et administrative de la RDC et les textes voisins.
Cette loi financière, outre qu' elle prévoit le
mécanisme de péréquation pour tenir compte de la
nécessaire solidarité nationale et garantir le
développement équilibré des composantes territoriales du
pays, définit les ressources reconnues à ces dernières
pour leur permettre de faire face à leurs nouvelles charges nées
de l'exercice des compétences transférées et stipule que
les budgets des entités administratives décentralisées
sont exécutés dans les mêmes formes que celui du pouvoir
central et font partie du budget général de l'Etat.
Aujourd'hui encore, les finances publiques provinciales et
locales sont des corollaires logiques de l'autonomie financière dont
sont investies les provinces et les entités territoriales
décentralisées en RDC en vertu des articles 3 et 171 de la
Constitution du 18 février 2006. En effet, l'article 3 de la
Constitution stipule en son alinéa 3 que les provinces et entités
territoriales décentralisées «jouissent de la libre
administration et de l'autonomie de gestion de leurs ressources
économiques, humaines, financières et techniques
»35.
34 Ibid., article 73
35 Constitution du 18 février 2006, articles 3
et 171
L'article 171 de la même Constitution, quant à
lui, précise que les finances du pouvoir central et celles des provinces
sont distinctes. A ce sujet, Vunduawe (2007) note que « pour
concrétiser l'idée de la décentralisation politique au
niveau des provinces et administrative à l'échelon des
entités de base (Ville, Commune, Secteur, Chefferie), le constituant
pose alors un certain nombre de principes au nombre desquels il y a :
- le principe de la distinction des finances du pouvoir
central et celles des provinces ;
- le principe de la rétrocession d'une part des
recettes à caractère national à allouer aux provinces. A
cet effet, le taux de la rétrocession est constitutionnalisé et
fixé à 40%. En outre, la rétrocession s'opère par
retenue à la source ;
- et le principe d'une fiscalité locale devant
comprendre notamment l'impôt foncier, l'impôt sur les revenus
locatifs et l'impôt sur les véhicules automoteurs, en vue d'un
système de prélèvements constitué des taxes et des
droits provinciaux et locaux »36.
Cependant, il importe de relever que malgré l'autonomie
de gestion des ressources économiques, humaines, financières et
techniques reconnue aux entités territoriales, le Parlement reste
néanmoins l'unique autorité budgétaire de l'Etat car le
budget des recettes et des dépenses de l'Etat, à savoir celui du
pouvoir central et des provinces, est arrêté chaque année
par une loi.
C'est au même Parlement, d'ailleurs, qu'il revient
« de fixer l'organisation et le fonctionnement de la caisse nationale
de péréquation, (...) qui dispose justement d'un budget
alimenté par le Trésor Public à concurrence de 10% de la
totalité des recettes à caractère national revenant
à l'Etat chaque année » 37.
36 Vunduawe, T. (2007), op.cit., P. 509
37 Ibid.
Les autres textes de base de la décentralisation, en
l'occurrence la Loi n° 08/012 du 31 juillet 2008 portant principes
fondamentaux relatifs à la libre administration des provinces ; la Loi
organique n° 08/015 du 7 octobre 2008 portant modalités
d'organisation et fonctionnement de la Conférence des Gouverneurs ; la
Loi organique n° 08/016 du 7 octobre 2008 portant composition,
organisation et fonctionnement des Entités Territoriales
Décentralisées et leurs rapports avec l'Etat et les provinces,
précisent certains contours des ressources financières des
provinces et des entités territoriales décentralisées en
attendant l'élaboration, le vote et la promulgation d'une nouvelle loi
financière.
Qu'à cela ne tienne, un bref rappel des ressources
financières reconnues aux provinces et entités
décentralisées s'avère nécessaire pour la suite de
notre analyse.
Ces ressources se regroupent, pour chaque entité, en trois
grandes catégories que sont : - Les ressources propres ;
- Les ressources provenant des recettes à caractère
national et,
- Les ressources exceptionnelles.
Les ressources propres de la province comprennent les
impôts, les taxes, les droits provinciaux et locaux ainsi que les
recettes de participation38.
La part des recettes à caractère national
allouée aux provinces est établie à 40%. Elle est retenue
à la source. La retenue à la source s'effectue par un versement
automatique de 40% dans le compte de la province et de 60% dans le compte
général du Trésor. Ce mécanisme est effectué
par la Banque Centrale du Congo conformément à la loi
financière. Aux termes de la Loi n° 08/012 du 31 juillet 2008
portant principes fondamentaux relatifs à la libre administration des
provinces, sont à caractère national, les recettes
administratives, judiciaires, domaniales et de participation ; les recettes des
douanes et accises ; ainsi que les recettes provenant des impôts
recouvrés sur les grandes entreprises, des pétroliers producteurs
ainsi que les autres impôts pouvant être perçus à
leur lieu de réalisation.
38 République Démocratique du Congo et
Organisation Internationale de la Francophonie, (2009), op.cit. P 114
La province peut bénéficier des ressources
provenant de la caisse nationale de péréquation. Les ressources
exceptionnelles des provinces sont constituées des emprunts
intérieurs auxquels l'Etat peut recourir pour financer les
investissements. La province peut également bénéficier
pour ses besoins des emprunts extérieurs contractés et garantis
par l'Etat conformément à la Constitution et à la loi
financière. Elle peut bénéficier des dons et legs dans les
conditions définies par la loi.
Les ressources propres d'une entité territoriale
décentralisée comprennent l'impôt personnel minimum, les
recettes de participation, les taxes et droits locaux. L'impôt personnel
minimum est perçu au profit exclusif des communes, des secteurs ou des
chefferies. La clé de répartition du produit des taxes
d'intérêt commun entre les entités territoriales
décentralisées est fixée par la législation qui
institue lesdites taxes, après avis de la Conférence des
Gouverneurs de province. Les ressources des entités territoriales
décentralisées provenant des recettes à caractère
national sont de l'ordre de 40% de la part desdites ressources reconnues aux
provinces. L'Etat en détermine le mécanisme de
répartition. La répartition de cette part des recettes entre les
entités territoriales décentralisées est fonction des
critères de capacité de production, de la superficie et de la
population. Une entité territoriale décentralisée peut
bénéficier des ressources provenant de la caisse nationale de
péréquation. Elle peut recourir aux emprunts intérieurs
pour financer ses investissements. Elle peut également
bénéficier des dons et legs dans les conditions définies
par la loi39.
Hormis l'impôt personnel minimum qui, lui, n'est pas
reconnu à la ville, les entités territoriales
décentralisées ont une fiscalité propre assise sur des
ressources identiques...Les ressources reconnues à la province et aux
entités territoriales décentralisées ayant
été rappelées, il ne serait pas superflu de noter ici que
« les comptes des provinces et ceux des différentes
entités territoriales décentralisées sont soumis au
contrôle de l'Inspection Générale des Finances et de la
Cour des Comptes »40.
39 République Démocratique du Congo et
Organisation Internationale de la Francophonie, (2009), op.cit. PP 165- 168
40 Ibid, P. 114
Cela étant, plusieurs débats politiques ont eu
lieu au cours des 9 premiers mois de l'année 2007 au sujet des recettes
à caractère national et ont débouché sur des
arrangements qu'il conviendrait de signaler aussi dans ce travail. Il s'agit du
consensus dégagé par le Forum National sur la
Décentralisation qui, à l'initiative du Gouvernement et de la
Société Civile, a eu lieu du 3 au 5 octobre 2007 et a
réuni plus de 300 délégués représentant le
Gouvernement Central, l'Assemblée Nationale, le Sénat, les
Assemblées Provinciales, les Gouvernements Provinciaux, la
Société Civile, les chefs coutumiers et les partenaires au
développement.
En permettant l'approfondissement des analyses pour assurer le
transfert de 40% des recettes aux provinces et promouvoir un système
financier viable pour les entités territoriales
décentralisées, ledit forum a, de manière consensuelle,
arrêté ce qui suit :
1° Les recettes jugées attribuables et
localisables, c'est-à-dire les recettes réalisées dans
chaque province par la Direction Générale des Impôts (DGI)
et la Direction Générale des Recettes Administratives, Domaniales
et de Participation (DGRAD) seront, après déduction de la
rétrocession au personnel de 5% pour la DGI et 10% pour la DGRAD,
automatiquement retenues à la source ;
2° Les recettes non identifiables et pas localisables,
c'est-à-dire les recettes réalisées par l'Office des
Douanes et Accises (OFIDA) et la Direction des Grandes Entreprises (DGE) de la
Direction Générale des Impôts, seront, quant à
elles, réparties entre les provinces en fonction du poids
démographique ;
3° Les recettes pétrolières, en ce qui les
concerne, ne seront pas rétrocédées, mais serviront, sur
l'insistance du Fonds Monétaire International (FMI) à
l'allègement de la dette extérieure, au moins jusqu'à
l'atteinte du point d'achèvement des mécanismes de l'initiative
PPTE41.
Le consensus ainsi dégagé s'intègre
désormais à l'ensemble des textes de base instituant les
règles de conduite à suivre et à respecter pour la mise en
oeuvre et la réussite de la décentralisation financière en
RDC.
Cette régulation bienveillante sous-entend des objectifs
à atteindre et des implications d'action pour les différents
intervenants.
1.2. Textes de base et implications d'action pour les
acteurs
Les implications d'actions qu'induisent les textes de base
pour les acteurs de la décentralisation financière, sont
liées aux objectifs de cette dernière ainsi qu'à certains
préalables à réaliser.
1.2.1. Objectifs et préalables de la mise en oeuvre
de la décentralisation financière
La décentralisation financière n'est pas
envisagée pour rien : elle poursuit des objectifs bien
déterminés et dont l'atteinte exige la réalisation de
quelques préalables.
1.2.1.1. Objectifs de la décentralisation
financière
Une croissance économique d'un niveau
élevé et de grande durabilité étant souhaitable
pour promouvoir le développement économique et plus
précisément le développement industriel et permettre
à la population locale d'accéder à un plus grand confort
matériel et moral et de disposer davantage de temps pour s'adonner
à des occupations favorites, c'est à son service que doit
être mise en oeuvre la décentralisation territoriale 42.
Dans cette logique, l'objectif principal de la
décentralisation financière n'est autre que la recherche de
l'efficacité économique de l'Etat à partir des provinces
et ETD.
Concrètement, la décentralisation financière
doit permettre à l'Etat de mieux stimuler la croissance
économique.
Bien qu'il ne soit pas aisé de connaître
parfaitement les mécanismes de croissance économique ni les
facteurs déterminants de cette croissance, nous pouvons nous
référer aux travaux de Denison 43, pour nous faire une
idée des objectifs spécifiques qui s'imposent à la
décentralisation financière pour en garantir l'efficacité.
Selon Denison, outre le degré d'ouverture de l'économie et les
termes de l'échange, l'accroissement de la production dans un pays peut
provenir des facteurs déterminants suivants : l'augmentation du capital
physique ; la croissance du capital humain ; le progrès technologique ;
et l'utilisation plus efficace des ressources.
42 Cités et Gouvernements Locaux Unis, (2007) ;
op.cit. ; P. 35
43 Denison, F. (1974), Accounting for United States
Economic Growth 1929-1969, Brookings Institutions; cité par Mountou (G)
dans son cours de Politique financière de l'Etat, Faculté des
Sciences Economiques, Université M. Ngouabi de Brazzaville, 2007,
(inédit)
Dans cet ordre d'idées, l'efficacité
économique de l'Etat par la décentralisation financière
dépendrait de la mesure dans laquelle les dépenses publiques des
provinces et ETD peuvent influencer chacun de ces facteurs44.
1.2.1.2. Quelques préalables indispensables à
la mise en oeuvre de la décentralisation financière
L'analyse des concepts de base ainsi que l'examen sommaire du
contenu du cadre juridique et institutionnel de la décentralisation
territoriale révèlent que la prise en charge par les populations
locales de leurs propres affaires suppose la réalisation de certains
préalables que l'on ne peut contourner sans porter atteinte à la
substance de la réforme. Ces préalables sont, notamment : la mise
en place des autorités locales ; le transfert officiel et effectif des
compétences reconnues par les textes aux autorités locales
démocratiquement élues ; l'attribution des moyens d'action
conséquents aux provinces et ETD ; ainsi que la définition par
les populations locales elles-mêmes des objectifs prioritaires à
atteindre dans le cadre de leur propre plan de développement. Ce qui
suppose, pour la réalisation de ces derniers, l'implication effective
des acteurs du processus.
1.2.2. Implications d'actions pour les acteurs au
processus
La décentralisation financière, nous venons de
le voir, est tributaire de la mise en place de l'architecture territoriale et
administrative de l'Etat dans son ensemble. Car, il ne peut y avoir
décentralisation financière s'il n'y a pas de collectivité
territoriale décentralisée et s'il n'existe pas d'affaires
locales à financer. Ceci revient à dire que les acteurs de la
décentralisation territoriale et sectorielle sont aussi acteurs de la
décentralisation financière, leurs actions et leur
rationalité, influant de loin ou de près sur les finances
locales.
La réforme décentralisatrice étant du
ressort de l'Etat, les implications d'actions pour les acteurs publics ne
peuvent pas être traitées sur un même pied
d'égalité que celles relatives aux acteurs non étatiques
et/ou aux partenaires extérieurs.
44 Cités et Gouvernements Locaux Unis, (2007) ;
op.cit ; P.63
1.2.2.1. Implications d'actions pour les acteurs
étatiques
A la lumière des textes de base, les acteurs
institutionnels de la mise en oeuvre de la décentralisation ne sont
autres que l'Etat central, le Parlement, les provinces (Gouvernements et
Assemblées provinciaux) et les entités territoriales
décentralisées, ainsi que les entités et services
déconcentrés de l'Etat et des provinces.
L'implication logique découlant du respect du cadre
juridique de la décentralisation par ces différents acteurs n'est
autre chose que leur appropriation du processus45.
Au regard de la Constitution du 18 février 2006,
plusieurs lois organiques devraient normalement être
élaborées et promulguées. Il s'agit, notamment, de la loi
organique portant fixation des limites des provinces et de la Ville de Kinshasa
; de la loi organique portant subdivision à l'intérieur des
provinces ; de la loi portant organisation et fonctionnement de la Commission
Electorale Nationale Indépendante (CENI) ; de la loi portant statut des
chefs coutumiers ; du statut général des fonctionnaires et agents
des services publics du pouvoir central, des provinces et des ETD, de la loi
organisant le fonctionnement des services publics du Pouvoir Central, des
Provinces, et des Entités Territoriales Décentralisées ;
de la nouvelle loi financière ; de la loi organique portant organisation
et fonctionnement de la Caisse Nationale de Péréquation ; de la
loi portant nomenclature des recettes 46 et des dépenses pour
tenir compte du changement de la structure des ressources et des charges que
décline le transfert de compétences aux provinces et ETD.
La mise en application de ce paquet complémentaire des
textes de base ne manque pas d'incidence sur le financement de la
décentralisation.
45 Ministère de la Décentralisation et
Aménagement du Territoire, (2009), Guide du Formateur sur la
décentralisation sectorielle, Unité d'Appui à la
Décentralisation Sectorielle
46 Commission Episcopale Justice et Paix, (2009) ;
« A quels défis seront confrontées les futures provinces et
les ETD ? » ; Ensemble pour un Etat de droit ; N° 29 ; Octobre 2009 ;
P.3
En effet, la fixation des limites des provinces et à
l'intérieur de ces dernières ou, en d'autres termes, la mise en
oeuvre du découpage territorial et administratif, permettrait aux
dirigeants provinciaux et locaux de prendre la mesure du champ spatial
d'application de leurs fiscalités et de dresser en connaissance de cause
la cartographie des besoins essentiels à intégrer dans leurs
programmes d'action respectifs47.
La mise en place d'une commission électorale nationale
indépendante conforterait la participation citoyenne et, par ricochet,
le civisme fiscal, la population étant sensée choisir librement
et en toute transparence les dirigeants qu'elle veut.
La définition claire du statut des chefs coutumiers
éviterait toute confusion entre le patrimoine personnel ou familial du
monarque local et celui de la Chefferie.
La décentralisation de la fonction publique devrait,
quant à elle, donner lieu à une meilleure adéquation entre
les missions et les ressources à engager en tenant compte des
capacités financières réelles et disponibles avec pour
impact une offre de services publics moins coûteuse48.
Les textes attendus sur les finances publiques et leur stricte
application soutiendraient, eux, l'organisation financière
décentralisée de l'Etat et guideraient ainsi la maximisation des
recettes et la rationalisation des dépenses aux niveaux provincial et
local.
L'implication qui s'ensuit pour le Parlement consiste,
naturellement, en l'examen et l'adoption rapides des textes juridiques «
manquants » de la décentralisation tout en assurant avec
efficacité la double mission d'autorité budgétaire et de
contrôleur de l'action gouvernementale, sachant que le budget de l'Etat
comprend bien ceux des provinces et des ETD.
47Makala Nzengu, P. (2009) ; « La gestion du
secteur agricole et rural dans le contexte de la décentralisation»
; communication ; Atelier de formation de formateurs sur la sensibilisation
à la décentralisation ; Ministère de la
Décentralisation ; 9-10 novembre 2009 ; Kinshasa
Concernant les provinces (y compris leurs organes
délibérants) le respect, par elles, du corpus juridique de la
décentralisation se traduirait par leur responsabilisation dans la
conduite du développement provincial et leur coordination des actions de
développement local avec les ETD sans exclure les représentants
de la société civile et du secteur privé. L'incidence
financière majeure d'une telle responsabilisation des provinces serait
la montée en puissance des finances locales sans basculer dans la
sous-optimalité, la résolution à l'interne des conflits de
compétence en matière fiscale, le partage équitable et
régulier des recettes à caractère national et/ou
d'intérêt commun entre provinces et ETD ainsi que la
cohérence dans la programmation et l'exécution des
dépenses.
L'implication pour les ETD de la mise en application, par
elles, des textes de base de la décentralisation se confondrait avec
leur responsabilisation dans l'offre des services publics locaux de base ainsi
que l'animation du développement local. « Elles seront le
premier niveau de référence pour les populations locales en
matière de services sociaux de base et des infrastructures marchandes.
Elles joueront un rôle important dans la contribution à l'atteinte
des OMD »49.
Les services et entités déconcentrés de
l'Etat ou de la province sont apparemment des acteurs passifs de la
décentralisation mais, en réalité, ils ont vocation
à demeurer actifs dans la mesure où c'est parmi eux que se
recrutent les services d'assiette ou poseurs d'actes en matière
d'exécution des recettes administratives.
Par ailleurs, si le coût de gestion des services
déconcentrés est exagéré, il peut se constituer en
facteur réducteur de choix pour les provinces et entités
territoriales décentralisées et handicaper la poursuite des
objectifs assignés à la décentralisation.
Pour cette raison, l'implication de ces services et
entités est indiquée et se justifie. Cette implication portera
essentiellement sur l'adoption d'une logique d'intervention de nature à
favoriser l'atteinte des objectifs de la décentralisation au moindre
coût possible.
1.2.2.2. Implications d'actions et responsabilités
pour les autres acteurs
Les organisations de la société civile et la
presse jouent un rôle de contre-pouvoirs et d'institutions de
surveillance externe dans le jeu démocratique50. L'incidence
financière de leur implication dans la décentralisation se
traduirait en termes de coûts évités grâce à
la promotion de la culture de redevabilité, à la
dénonciation des dérives dans le chef des gestionnaires
(corruption, clientélisme, tribalisme, etc.) et au gain de transparence
qui s'ensuivrait.
Les acteurs du secteur privé ne sauraient être
marginalisés en dépit du fait qu'ils sont maximisateurs de leur
propre intérêt.
En effet, en tant que producteurs de richesses marchandes,
leur implication dans le processus influencerait la croissance
économique, la responsabilisation des pouvoirs publics en matière
de stabilisation du cadre macro-économique et fiscal, ainsi que la
demande d'investissements publics à effet induit et d'un cadre
institutionnel et juridique propice à la prospérité des
affaires au niveau local.
Au surplus, le secteur privé pourrait soutenir,
grâce à son épargne et à travers son volet bancaire
et financier, le financement privé de la décentralisation ainsi
que la sécurité des transactions financières.
Le soutien et l'engagement des partenaires extérieurs
dans la mise en oeuvre de la décentralisation consisteraient en l'appui
technique et financier à l'ensemble du processus. Cependant, l'appui
extérieur ne peut être envisagé sans tenir compte de la
souveraineté nationale en matière de prêts.
Dans le cas de la RDC, seul le pouvoir central peut contracter
et garantir des emprunts extérieurs pour faire face aux besoins des
provinces.
Après avoir ainsi élucidé le cadre
légal et institutionnel et ses implications pour les différents
acteurs, voyons maintenant comment se manifeste dans la pratique l'enlisement
de la décentralisation financière en RDC.
SECTION II : PRATIQUES DE LA
DECENTRALISATION,
L'ENLISEMENT CONSACRE
L'expérience de décentralisation
financière en RDC de 1982 à 2009 est particulièrement
dominée dans la pratique par le non-respect des textes légaux et
réglementaires en vigueur ainsi que par des faiblesses fréquentes
et persistantes de capacité en matière de mobilisation et de
gestion des ressources nécessaires à la satisfaction des besoins
des populations locales.
Dans cette seconde section, il sera essentiellement question
d'administrer le témoignage de l'enlisement dont souffre la mise en
oeuvre de la décentralisation financière en RDC.
2.1. Non-respect chronique des textes de base
Le non-respect des textes se traduit dans les faits par la
mise en place incomplète de l'ordre juridique et institutionnel de la
décentralisation et le déficit de collaboration financière
entre l'Etat central et les provinces d'une part et, entre les provinces et les
entités territoriales décentralisées, d'autre part.
2.1.1. Mise en place incomplète de l'ossature
juridique et institutionnelle de la décentralisation
La mise en place incomplète de l'ordre juridique et
institutionnel de la décentralisation se traduit aussi bien par la
non-exécution du découpage territorial et de la
décentralisation sectorielle que par la non-organisation des
élections au sein des entités territoriales
décentralisées.
2.1.1.1. Non-exécution du découpage
territorial et de la décentralisation sectorielle
Il y a lieu de stigmatiser le caractère incomplet du
dispositif juridique et institutionnel en vigueur par la
non-exécution à ce jour du découpage territorial
alors que le Constituant avait prévu un délai de 36 mois pour ce
faire à compter de l'installation effective du Sénat.
L'absence persistante de la loi organique portant fixation des
limites des provinces et de la ville de Kinshasa, de la loi organique portant
subdivision à l'intérieur des provinces, de la loi portant statut
des chefs coutumiers, ainsi que de la loi organisant le fonctionnement des
services publics du Pouvoir Central, des provinces et des ETD,
matérialise davantage le caractère incomplet de l'architecture
territoriale de la décentralisation financière.
C'est en fait par le biais de cette dernière loi, pour
ne revenir que sur ce cas, que les dépenses de
rémunération des secteurs à compétence exclusive
des provinces pourraient être aisément évaluées,
engagées, liquidées, ordonnancées et payées. Il
s'agit des dépenses de rémunération des professionnels de
la Santé, de l'Agriculture, et Développement Rural, de
l'Enseignement Primaire, Secondaire et Professionnel ainsi que celle des
autorités coutumières51.
Epee et Otemikongo (1992) relevaient déjà en ces
termes cette impasse, il ya 17 ans : « Les études
consacrées à l'administration territoriale (...) ont eu à
démonter que le démarrage effectif de la décentralisation
se butte encore à nombre d'obstacles d'ordre institutionnel (qui) ne
sont pas de nature à faciliter sa mise en route conformément
à la réforme du 25 février 1982
»52.
2.1.1.2. Non-organisation des élections locales
municipales et urbaines et perte
d'efficacité économique de l'Etat
Bien que l'élection des députés et la
mise en place des exécutifs au niveau provincial ait déjà
eu lieu entre 2006 et 2007 pour la première législature de la
3ème République, il n'en est pas encore le cas pour
les entités territoriales décentralisées, à savoir
: la ville, la commune, le secteur et la chefferie.
La non-organisation à ce jour des élections
municipales et locales et le maintien dans leurs postes respectifs des
autorités municipales et locales désignés par le Pouvoir
Central ne cadrent guère avec l'esprit et la lettre de la
décentralisation et renversent le sens de la redevabilité : les
dirigeants en place ne se sentant pas concernés par l'obligation de
rendre compte à un souverain primaire dont ils ne sont pas
l'émanation.
Cette réalité est d'autant plus troublante qu'elle
persiste ainsi depuis que la décentralisation a été
formellement relancée en 1982 sous l'empire des lois « Vunduawe
».
51Mbusa, A. (2009), Rapport de Mission
effectuée à Bukavu-Sud Kivu , Ministère de la
Décentralisation et Aménagement du Territoire
52 Epee, G. et Otemikongo, M. (1992) ; op.cit. ; P.
355
Cela étant, en renvoyant à 2011 les
élections locales et municipales lors de son discours du 7
décembre 2009 sur l'état de la Nation, le Chef de l'Etat n'a-t-il
pas fait officiellement et honnêtement l'aveu du déficit
institutionnel de la décentralisation et de son enlisement
subséquent.
Toutes ces faiblesses et imperfections ont pour effet
d'entretenir des coûts d'opportunité considérables dans le
chef des autorités locales dans la mesure où la hiérarchie
et le souverain primaire qui sont sensés les contrôler sont
malheureusement beaucoup moins informés de la conduite des affaires
locales que ne l'aurait pu être une assemblée locale élue
et dédiée audit contrôle. En d'autres termes, en l'absence
de tout dispositif de surveillance rapprochée pouvant limiter localement
le comportement opportuniste du bureaucrate, le risque moral profitant à
l'agent, c'est-à-dire à l'autorité locale non
élue et non contrôlée localement, ne peut qu'avoir pour
effets l'atrophie des capacités financières locales et
l'inefficacité économique de l'Etat.
2.1.2. Déficit de solidarité
financière entre l'Etat central et les provinces d'une part et, entre
les provinces et les entités territoriales décentralisées
La solidarité financière qui doit marquer les
rapports entre les échelons territoriaux du pouvoir étatique est
largement déficitaire et contribue à l'enlisement de la
décentralisation.
Ce déficit s'explique par la non-actualisation de la
législation financière et le faible niveau de rétrocession
en faveur des provinces, d'une part, et par l'absence de
péréquation et l'exacerbation des déséquilibres
économiques internes, d'autre part.
2.1.2.1. Non-actualisation de la législation
financière et faible niveau de rétrocession
Nous pouvons, d'entrée de jeu, noter qu'en 1987
déjà, l'ordonnance n° 87/004 du 10 janvier 1987 modifiant et
complétant la loi financière n°83/003 du 23 février
1983 stigmatisait dans son exposé des motifs la persistance des
difficultés rencontrées dans l'élaboration de cette
dernière. Il s'agit principalement de la non-répartition des
compétences en matière financière alors qu'un délai
légal de deux ans était accordé pour ce faire.
Aussi, le législateur va-t-il par cette ordonnance de
1987 « accorder un nouveau délai de deux ans au Conseil
Exécutif (...) pour prendre toutes les mesures réglementaires
nécessaires (...) et allouer des subventions d'équilibre aux
budgets des Entités Administratives Décentralisées (...)
lorsqu'ils sont votés en déséquilibre (...) et que
l'intervention du pouvoir central est sollicitée et dûment
justifiée » 53.
En d'autres termes, un moratoire de 7 ans ayant pris effet
à compter de 1982 venait d'être explicitement reconnu au
Gouvernement pour ajuster l'ordre réglementaire à l'obligation
d'autosuffisance financière à laquelle les entités
décentralisées étaient soumises.
En 2009, soit 27 ans après l'entrée en vigueur
de la réforme décentralisatrice, le même
phénomène de non-respect du cadre légal et
réglementaire se répète et persiste.
Pour preuve, la loi financière en vigueur en RDC est
encore celle de 1983, alors que depuis 2006, il est constitutionnellement
stipulé que les finances du pouvoir central et celles des provinces sont
distinctes et qu'à ce titre un nouveau cadre légal suivi d'un
dispositif réglementaire approprié devraient désormais
organiser la conduite financière des provinces et des ETD ainsi que les
rapports entre ces différentes entités et le pouvoir central.
En effet, la loi organique sur les finances publiques devrait
permettre d'organiser les lois des finances, les budgets des provinces et des
ETD en définissant les principes généraux de gestion des
finances publiques et d'encadrement de la politique budgétaire. «
Elle devrait permettre de tenir compte des dispositions de la Constitution
en envisageant toutes les perspectives d'une gestion moderne des finances
publiques » 54(54).
Cette inadéquation entre le cadre juridique et
institutionnel et la réalité ne peut que favoriser
l'opacité des rapports financiers entre le pouvoir central et les
provinces et, en même temps, anéantir tout effort d'autonomisation
financière des provinces et des ETD.
53 Exposé des motifs de la loi
financière n°83/003 du 23 février 1983 telle que
modifiée et complétée par l'ordonnance n° 87/004 du
10 janvier 1987
Une autre illustration du non-respect des textes en vigueur
et/ou des arrangements institutionnels se trouve être la
non-effectivité de la rétrocession de la quotité des
recettes à caractère national reconnues aux provinces dans les
conditions prévues par la loi.
Les informations que contiennent les tableaux II.1 et II.2
ci-dessous nous montrent qu'en dépit de la modicité des recettes
de la fiscalité provinciale et locale, le pouvoir central n'a pas
procédé à la rétrocession de la quote-part due aux
provinces (ex-Régions) pendant plusieurs années et ce, en
violation des textes instituant la décentralisation.
Tableau II.1 : Recettes budgétaires des
Régions et de l'Etat (en Zaire-monnaie)
N°
|
Année
|
Régions
|
Etat
|
% Régions
|
1
|
1987
|
2 481 243 076
|
106 000 000 000
|
2,34
|
2
|
1990
|
22 398 616 095
|
584 258 430 000
|
3,83
|
TOTAL
|
|
24 879 859 171
|
690 258 430 000
|
3,60
|
Accroissement
1990/1987 (%)
|
|
902,72
|
551,19
|
|
Source : Comité Central du MPR-Parti Etat ;
données tirées de Epee (G) ; 1992 ; op.cit. ; P351 ; compte tenu
de l'instabilité de la monnaie et de l'hyperinflation de
l'époque, nous n'avons pas jugé indiqué de reconvertir en
francs congolais ou en dollars américains les masses budgétaires
de ce tableau, le plus important étant le rapport en % entre les
recettes des Régions et celles du pouvoir central.
Ce tableau indique que les recettes propres aux provinces
(ex-Régions) sont insignifiantes par rapport à celles du Pouvoir
Central : elles n'en représentent que 2,34% en 1987 et 3,60% seulement
en 1990 même si elles ont connu au cours de la même période
un rythme de croissance plus rapide soit 902,72% pour elles contre 551,19% pour
l'Etat.
Cette illustration d'un faible niveau de «
décentralisation fiscale » 55(55) est
profondément explicative de l'enlisement de la réforme
décentralisatrice et de son inefficacité.
En outre, le tableau II.2 ci-dessous indique que les provinces
n'ont pu bénéficier pendant plusieurs années de la
quote-part leur reconnue par les textes en vigueur au titre de
rétrocession, alors que ladite quote-part à
rétrocéder n'atteignait même pas les 0,4% des recettes
globales de l'Etat.
Tableau II.2 : Recettes perçues et recettes
rétrocédées par le Pouvoir Central pour le compte des
entités décentralisées de 1984 à 1987 (en
Zaire-monnaie)
Année
|
Recettes totales
|
Quote-part revenant aux Régions
|
% Quote-part à
rétrocéder
|
Recettes rétrocédées
|
1984
|
24 857 663 480,00
|
47 471 320,00
|
0,19
|
0
|
1985
|
43 149 139 987,00
|
61 540 362,00
|
0,14
|
0
|
1986
|
49 716 146 674,00
|
178 947 328,00
|
0,36
|
0
|
1987
|
106 000 000 000,00
|
228 087 557,00
|
0,22
|
0
|
TOTAL
|
223 722 950 141,00
|
516 046 567,00
|
0,23
|
0
|
Source : Comité Central du MPR-parti Etat ;
données tirées de Epee (G) et Otemikongo (M) ; 1992 ; op.cit. ;
P351
L'instabilité politique et sécuritaire dans
laquelle le pays a été plongé du début des
années 1990 jusqu'à la veille des élections de 2006 nous
porte à avoir la conviction que rien ne pouvait, au cours de cette
période trouble, arrêter fondamentalement ce comportement
répréhensible du pouvoir central.
55 Yatta, F. (2006), op.cit. ; PP 31-32
A ce sujet, le tableau II.3 ci-dessous nous renseigne, faute
d'informations fiables sur la part des provinces dans les budgets 2006, 2007,
2008 et 2009, que les prévisions budgétaires pour 2010 portent
à 6,84% seulement le niveau de décentralisation fiscale alors
qu'en France, par exemple, ce rapport est de 40% même si celui de la RDC
est légèrement supérieur à la moyenne des pays de
l'UEMOA qui s'est située autour de 4,38% en moyenne de 1999 à
2004 avec comme points extrêmes 1,57% pour le Mali contre 6,10% pour le
Sénégal 56(56).
Tableau II.3: Part des provinces dans les recettes
budgétaires globales de l'Etat pour l'exercice 2010 (en milliards de FC)
ANNEE
|
BUDGET DE L'ETAT
|
PART DES PROVINCES
|
% PART PROVINCES
|
2010
|
4.488
|
307
|
6,84
|
Source : Allocation du Premier Ministre à
l'occasion de la présentation du projet du budget de l'Etat pour
l'exercice 2010 devant l'Assemblée Nationale, Kinshasa, octobre
2009.
Cette projection d'un bas niveau de décentralisation
fiscale en 2010 n'est pas de nature à soutenir l'émancipation
financière des provinces et entités territoriales
décentralisées dans la mesure où elle contraste avec les
gains projetés pour la même année dans le cadre de la
revisitation des contrats miniers et de l'amélioration de la
viabilité de la dette à travers l'atteinte du point
d'achèvement.
Cette dernière pourrait permettre à la RDC
d'« accéder (dès juin 2010) aux ressources
additionnelles estimées à plus de 500 millions de dollars
américains, en sus des économies qui seront
générées par l'annulation de 90% du stock de la
dette extérieure »57. Dans le même
ordre d'idées, nous nous souviendrons qu'en octobre 2006
déjà, le Gouvernement de Transition avait décidé
souverainement de soustraire les recettes de la Direction des Grandes
Entreprises (DGE) du panier des recettes à rétrocéder aux
provinces et ETD et ce, contrairement aux prescrits de la Constitution.
56 Yatta, F. (2006); op.cit. ; P. 32
57 Muzito, A. (2009), Allocution à l'occasion
de la présentation du projet du budget de l'Etat pour l'exercice 2010
devant l'Assemblée Nationale; Kinshasa, octobre 2009
Même si cette mesure avait été prise en
son temps pour venir en appui au Programme Relais de Consolidation visant le
resserrement des dépenses et l'encadrement efficient des actions de
recettes pour corriger les dérapages budgétaires constatés
pendant toute l'année 2006, cela revenait à vider de son contenu
l'idée de la rétrocession des recettes à caractère
national étant donné que les recettes des grandes entreprises
représentent les 70% des recettes de la Direction Générale
des Impôts58. Par ailleurs, l'affectation par le pouvoir
central des recettes des pétroliers producteurs au service de la dette
réduit davantage les opportunités de financement du
développement local à partir de la base.
En outre, bien que le budget de l'Etat pour l'exercice 2008
ait pris en compte la décentralisation financière sur base de la
formule consensuelle du Forum National de la Décentralisation, «
les données sur l'exécution dudit budget montrent qu'en
réalité, la rétrocession totale n'a
représenté que 10,5% des recettes nationales
»59. De plus, le Gouvernement Central ayant opté pour un
retour à l'ancienne pratique de la répartition de la
rétrocession sur base des critères arbitraires, la situation de
la décentralisation financière s'est même aggravée
en 2009.
En effet, les interprétations contradictoires de la
rétrocession dite « de 40% » aux provinces ne cessent de
défrayer la chronique et alimentent davantage le doute sur les chances
de son application effective alors qu'elle constitue la principale ressource
financière de la décentralisation.
Les discussions les plus courantes aujourd'hui sont celles qui
opposent les provinces les plus nanties (Bas-Congo, Katanga et Kinshasa),
lesquelles tiennent à tout prix à une retenue à la source
de « 40% » des recettes à caractère national, au reste
de provinces qui, elles, estiment qu'il s'agit de 40% des recettes produites
dans l'ensemble du pays et qu'il conviendrait de rétrocéder
équitablement à toutes les provinces. Pour appuyer leur prise de
position, ces provinces soutiennent, entre autres arguments, que les recettes
à caractère national réalisées à Kinshasa ne
sont pas la traduction exacte des performances économiques de la
capitale qui fiscalise les diamants des deux Kasaï, le bois de l'Equateur
et le pétrole du Bas-Congo...
58 Banque Mondiale, (2009), Note sur le
Découpage, op.cit. P .29 59Ibid; P. 25
Une autre pomme de discorde concerne les transactions
douanières dans la mesure où elles profiteraient plus aux
provinces-portes d'entrée alors que ces dernières ne sont
nécessairement ni uniques consommatrices finales des marchandises
importées ni seules productrices des biens
exportés60.
A ces difficultés non résolues s'ajoute l'absence
de péréquation et l'exacerbation des déséquilibres
entre provinces et à l'intérieur de ces dernières.
2.1.2.2. Absence de péréquation et
exacerbation des déséquilibres économiques internes
L'enlisement de la décentralisation financière
en RDC est également due à l'absence d'organisation et de
fonctionnement de la caisse nationale de péréquation
alors que les disparités socio-économiques entre les provinces et
à l'intérieur de ces dernières ne font que se prononcer.
Prévue pourtant dans la loi financière de 1983, loi encore en
vigueur, et préconisée formellement dans la Constitution de 2006,
la péréquation se fait toujours attendre et son absence laisse
davantage se creuser les écarts entre provinces, le mécanisme de
rétrocession à ces dernières de 40% de la part des
recettes nationales tablant formellement sur le poids démographique et
la capacité productive de chacune d'entre elles.
Les tableaux II.4, II.5 et II.6 ci-dessous montrent à
suffisance que sans la correction prévue dans le cadre de la
péréquation pour marquer la nécessaire solidarité
nationale, la « rétrocession » financerait un
développement déséquilibré du pays et
neutraliserait de ce fait, l'efficacité économique de l'Etat
attendue de la décentralisation.
Entretenue à l'époque par la politique
économique dite des « pôles de développement
», politique qui encourageait la concentration des investissements
privés dans trois provinces polaires (Kinshasa, Province
Orientale-ex-Haut-Zaire, et Katanga-ex-Shaba) avec l'espoir de voir se propager
les effets induits dans les provinces voisines et de proche en proche sur toute
l'étendue du pays, la diffusion inégale du pouvoir
économique a provoqué des disparités énormes au
plan financier.
Tableau II.4 : Recettes budgétaires des
Régions en 1987 et 1990 ( en Zaire-monnaie)
N°
|
REGIONS
|
BUDGET 1987 (en Zaîre)
|
|
% Total
Régions
|
BUDGET 1990 (en Zaîre)
|
|
% Total Régions
|
% Moyenne
1987-1990
|
1
|
Kinshasa
|
|
728
|
576
|
732,00
|
29,36
|
8
|
634
|
350
|
762,00
|
38,55
|
|
33,96
|
2
|
Bandundu
|
|
282
|
171
|
514,00
|
11,37
|
1
|
305
|
430
|
934,00
|
5,83
|
8,60
|
|
3
|
Bas-Zaire
|
|
78
|
160
|
335,00
|
3,15
|
|
651
|
424
|
550,00
|
2,91
|
3,03
|
|
4
|
Equateur
|
|
275
|
509
|
972,00
|
11,10
|
1
|
296
|
077
|
140,00
|
5,79
|
8,45
|
|
5
|
Haut-Zaire
|
|
258
|
066
|
882,00
|
10,40
|
2
|
159
|
910
|
287,00
|
9,64
|
|
10,02
|
6
|
Kasai Occidental
|
|
208
|
914
|
941,00
|
8,42
|
1
|
818
|
847
|
311,00
|
8,12
|
8,27
|
|
7
|
Kasai Oriental
|
|
117
|
719
|
893,00
|
4,74
|
|
840
|
070
|
088,00
|
3,75
|
4,25
|
|
8
|
Shaba
|
|
210
|
567
|
231,00
|
8,49
|
3
|
034
|
979
|
465,00
|
13,55
|
|
11,02
|
9
|
Kivu
|
|
321
|
555
|
576,00
|
12,96
|
|
|
|
|
|
|
|
10
|
Maniema
|
|
|
|
|
4,32
|
|
807
|
053
|
316,00
|
3,60
|
3,96
|
|
11
|
Nord-Kivu
|
|
|
|
|
4,32
|
1
|
016
|
415
|
100,00
|
4,54
|
4,43
|
|
12
|
Sud-Kivu
|
|
|
|
|
4,32
|
|
833
|
691
|
122,00
|
3,72
|
4,02
|
|
|
TOTAL
|
2
|
481
|
243
|
076,00
|
112,96
|
22
|
398
|
250
|
075,00
|
100,00
|
|
100,00
|
Source : Comité Central du MPR - Parti Etat ;
données tirées de l'article du Professeur Epee Gambua (1992) ;
op.cit. ; P 353
Le tableau II.4 montre que les recettes budgétaires des
3 provinces polaires sont de l'ordre de 48,25% de l'ensemble en 1987 et de
61,74% en 1990, soit en moyenne 54,99% pour les deux périodes, avec
33,96% pour la seule ville-province de Kinshasa contre 3,96% pour le Maniema,
soit une tension de 1 à 8,5.
Le pays ayant été marqué par un
environnement socio-économique caractérisé par une
inflation à 3 chiffres, les pillages de 1991 et 1993, la guerre dite de
« libération » de 1996- 1997, l'agression de 1998, et
la transition de 2001 à 2006, ces déséquilibres doivent
avoir persisté s'ils ne se sont pas aggravés.
C'est ce que nous donne, d'ailleurs, à penser le tableau
ci-dessous.
Tableau II.5 : Etat de suivi budgétaire de la
rétrocession aux provinces de 2006 à 2008 (en FC)
N°
|
PROVINCES
|
2006
|
|
|
|
2007
|
|
|
2008
|
|
|
|
TOTAL
|
|
|
%
|
1
|
Kinshasa
|
16
|
085
|
542
|
511
|
8
|
321
|
288
|
456
|
14
|
861
|
358
|
981
|
39
|
268
|
189
|
948
|
18,90
|
2
|
Bas-Congo
|
7
|
353
|
130
|
647
|
7
|
559
|
965
|
880
|
21
|
021
|
504
|
963
|
35
|
934
|
601
|
490
|
17,29
|
3
|
Bandundu
|
|
306
|
611
|
654
|
2
|
501
|
184
|
530
|
7
|
144
|
685
|
133
|
9
|
952
|
481
|
317
|
4,79
|
4
|
Equateur
|
|
325
|
157
|
533
|
5
|
655
|
049
|
271
|
9
|
903
|
966
|
589
|
15
|
884
|
173
|
393
|
7,64
|
5
|
P. Orientale
|
|
710
|
841
|
095
|
2
|
593
|
986
|
226
|
12
|
313
|
031
|
018
|
15
|
617
|
858
|
339
|
7,52
|
6
|
Nord-Kivu
|
1
|
573
|
503
|
025
|
1
|
957
|
027
|
833
|
6
|
771
|
634
|
269
|
10
|
302
|
165
|
127
|
4,96
|
7
|
Maniema
|
|
401
|
451
|
307
|
1
|
441
|
216
|
519
|
5
|
772
|
101
|
529
|
7
|
614
|
769
|
355
|
3,66
|
8
|
Sud-Kivu
|
1
|
128
|
125
|
932
|
2
|
383
|
184
|
256
|
6
|
158
|
859
|
882
|
9
|
670
|
170
|
070
|
4,65
|
9
|
Katanga
|
5
|
691
|
153
|
571
|
8
|
683
|
753
|
516
|
21
|
111
|
902
|
426
|
35
|
486
|
809
|
513
|
17,08
|
10
|
Kasai Occidental
|
|
621
|
417
|
249
|
6
|
075
|
806
|
256
|
7
|
373
|
905
|
126
|
14
|
071
|
128
|
631
|
6,77
|
11
|
Kasai Oriental
|
|
663
|
921
|
335
|
2
|
822
|
816
|
993
|
10
|
519
|
569
|
286
|
14
|
006
|
307
|
614
|
6,74
|
|
TOTAL
|
34
|
860
|
855
|
859
|
|
49 995 279 736
|
122
|
952
|
519
|
202
|
|
207
808 654 797
|
100
|
Source : Données collectées auprès du
Ministère du Budget, Chaîne de la Dépense, Direction de la
préparation et du suivi budgétaire, août 2009,
Kinshasa
Il ressort des données ci-haut que 3 provinces,
à savoir : Kinshasa, Bas-Congo et Katanga, bénéficient
à elles seules de 53,27% de l'enveloppe débloquée au titre
de rétrocession effective aux provinces de 2006 à 2008 en RDC et
ce, en entretenant un déséquilibre interprovincial
caractérisé par une tension de 1 à 5,15.
Aujourd'hui, en 2009, la répartition entre les
différentes provinces des « recettes à caractère
national », telle que l'indique le tableau II.6, reflète le
même déséquilibre économique interprovincial.
Tableau II.6 : Recettes à caractère
national allouées aux provinces pour l'exercice 2009
N°
|
PROVINCES
|
MONTANT ALLOUE en FC
|
% DU TOTAL
|
1
|
Kinshasa
|
107 248 243 404,00
|
19,09
|
2
|
Bas-Congo
|
70 915 887 505,00
|
12,63
|
3
|
Bandundu
|
64 497 860 215,00
|
11,48
|
4
|
Equateur
|
45 774 875 476,00
|
8,15
|
5
|
Province Orientale
|
43 535 998 361,00
|
7,75
|
6
|
Nord-Kivu
|
24 931 490 502,00
|
4,44
|
7
|
Maniema
|
19 476 333 541,00
|
3,47
|
8
|
Sud-Kivu
|
25 117 984 965,00
|
4,47
|
9
|
Katanga
|
84 425 037 435,00
|
15,03
|
10
|
Kasai Occidental
|
36 236 737 550,00
|
6,45
|
11
|
Kasai Oriental
|
39 506 805 713,00
|
7,03
|
|
TOTAL
|
561 667 254 667,00
|
100
|
Source : Ministère du Budget; données
tirées de Kukatula (O) ; (2009) ; op.cit
Comme on peut le constater, la ville-province de Kinshasa, ses
deux provinces voisines (Bas-Congo et Bandundu) ainsi que la province du
Katanga absorbent à elles seules les 58,24% de l'ensemble de l'enveloppe
de rétrocession prévue pour l'exercice 2009.
Kinshasa demeure en tête avec 19,09% suivie du Katanga
avec 15,03%, tandis que la tension globale entre les provinces est cette
fois-ci de l'ordre de 1 à 5,5. En d'autres termes, les provinces les
plus nanties bénéficiant de la part la plus importante de la
rétrocession, les déséquilibres ne peuvent qu'être
exacerbés du fait d'une décentralisation financière qui
s'avère inéquitable à cause de la non-application des
textes en vigueur.
L'inquiétude face à cette situation est d'autant
plus justifiée que même le Fonds de Promotion de l'Industrie
(FPI), entreprise publique créée par ordonnance n°089-171 du
7 août 1989 pour soutenir financièrement l'essor du tissu
industriel national, n'a pas contribué au cours de ses 20 ans
d'existence, soit de 1989 à 2009, à la réduction des
déséquilibres économiques prononcés entre
provinces.
En effet, les interventions du FPI ont ajouté aux
déséquilibres existants. Car, ce « fonds »,
dont la ressource principale est la taxe de promotion de l'industrie, a pu
financer 688 projets depuis sa création pour un montant total de 175 244
294,99 $us dont les 52% pour la seule ville de Kinshasa61. Le
graphique 1 ci-dessous nous renseigne comment ledit fonds est
inégalement réparti entre les 11 provinces que compte la RDC.
Graphique 1 : Interventions du FPI entre les 11
provinces de la RDC de 1989 à 2009
![](Problematique-de-la-mise-en-oeuvre-de-la-decentralisation-financiere-en-Republique-Democratique1.png)
Source : Fonds de Promotion de l'Industrie , (2009) ;
Comité de Gestion.
Il se dégage de cette ventilation que les 3 provinces
les plus nanties actuellement, en l'occurrence la ville de Kinshasa, le
Bas-Congo et le Katanga, reçoivent la part du lion avec 72% des
interventions du « Fonds » alors que la tension globale qu'elle
entretient est de 1 à 52, la province du Maniema étant toujours
la lanterne rouge.
Ces différentes illustrations de la disparité du
potentiel économique entre les provinces concourent à la mise en
évidence de la nécessité et d'une rétrocession plus
équitable et du jeu de péréquation pour assurer un
développement harmonieux des provinces et ETD. En termes clairs,
l'absence de critères objectifs et équitables de
rétrocession ainsi que le non-recours à la
péréquation maintiennent bon nombre de provinces et
entités territoriales décentralisées dans une trajectoire
de développement inégal prononcé. Sans une
rétrocession équitable et une péréquation effective
et conséquente donc, on est en présence d'une situation où
le financement inconsidéré de la décentralisation, par une
rétrocession automatique et sans discernement, favoriserait
énormément quelques provinces au détriment de la
majorité d'entre elles.
Cette réalité ne peut que conforter l'enlisement de
l'autonomisation financière des provinces prises dans leur ensemble.
Des faiblesses identifiées dans la mobilisation et la
gestion de ressources budgétaires aggravent davantage cet état de
choses.
2.2. Faiblesses fréquentes et persistantes en
matière de mobilisation et de gestion des ressources
Il s'agit des faiblesses observées tant dans la
mobilisation des ressources budgétaires que dans la gestion de ces
dernières.
2.2.1. Faiblesses en matière de mobilisation des
ressources budgétaires
Dans le domaine de mobilisation des ressources
budgétaires, il est indiqué de relever, d'une part,
l'insuffisance persistante des ressources budgétaires part rapport
à la hauteur des tâches et responsabilités des provinces et
entités décentralisées, et, d'autre part, l'extraversion
prononcée du financement budgétaire de l'Etat.
2.2.1.1. Insuffisance persistante des ressources
budgétaires par rapport à la hauteur des tâches et
responsabilités des provinces et ETD
Comme nous le savons, le nombre de provinces devra passer de
11 à 26, dans le cadre du découpage territorial accompagnant le
processus décentralisateur. L'installation, le fonctionnement et le
développement des nouvelles provinces et ETD nécessiteront la
mobilisation conséquente des ressources tant humaines,
matérielles que financières.
Le tableau II.7 ci-dessous tente de donner une idée de
ce que serait la hauteur de la charge financière qu'impliquerait ce
découpage territorial pour les provinces et les ETD en RDC, en termes de
rémunération des effectifs supplémentaires en personnel
politique et agents d'appoint, de frais d'installation et de fonctionnement,
avec l'élection d'au moins 6384 «
députés provinciaux et locaux » auxquels il
conviendra d'ajouter près de 2000 «chefs des
exécutifs provinciaux et locaux» et plus de
3000 « ministres provinciaux et locaux »,
sans compter les membres des organes délibérants des communes,
secteurs et chefferies62.
Tableau II.7 : Etendue des besoins
supplémentaires suscités par le découpage
territorial
![](Problematique-de-la-mise-en-oeuvre-de-la-decentralisation-financiere-en-Republique-Democratique2.png)
![](Problematique-de-la-mise-en-oeuvre-de-la-decentralisation-financiere-en-Republique-Democratique3.png)
Source : Ministère de l'Intérieur,
Décentralisation et Sécurité, document-vidéo
exposé le 12 mai 2007 à Kananga par le Général
Kalume Numbi, alors Ministre d'Etat.
L'énorme étendue des besoins d'installation des
nouvelles provinces et ETD dans le cadre de la décentralisation a fait
dire en son temps au Général Denis Kalume Numbi, alors Ministre
d'Etat en charge de l'Intérieur, qu'il faut « 1000 000 $us par
entité territoriale décentralisée, chiffre à
multiplier par 1015 entités ; même exercice pour les 26 provinces
qui doivent bénéficier chacune de 50 000 000 $ comme frais
d'installation»63. Nous pouvons, de ce qui
précède, estimer à environ 2 315 000 000 $us l'enveloppe
à mobiliser pour financer l'installation des nouvelles provinces et
entités territoriales décentralisées.
Quand on sait que ce montant faramineux vaut plus de quatre
fois le coût des élections de 2006, lesquelles ont
été entièrement financées par l'extérieur,
il y a lieu de douter de la capacité financière du pays à
en supporter facilement la charge.
La faiblesse du niveau des ressources budgétaires
mobilisées face aux potentialités dont regorge le pays et aux
besoins de financement de la décentralisation est un véritable
goulot d'étranglement pour cette dernière en RDC
Pour en convaincre le lecteur, nous allons rendre compte de
quelques aspects de la vie financière du Pouvoir Central et des
provinces, à savoir : le paradoxe fiscal actuel du secteur minier ; la
pauvreté structurelle des ménages ; la faiblesse du taux de
prélèvement sur les économies locales ainsi que la
non-viabilité financière d'un bon nombre de provinces, et nous en
passons...
Les ressources minières constituent la principale
richesse de la RDC. Ce pays détient la moitié des réserves
mondiales de cobalt et l'une des plus importantes réserves mondiales de
cuivre. La RDC était d'ailleurs le premier producteur mondial de cobalt
avec 6 100 t de minerai en 1996, deuxième pour les diamants en 1995 avec
20 millions de carats ; avant 1991, le cuivre était le produit
d'exportation le plus lucratif. Les autres ressources minières sont
l'étain, l'or, l'argent, le zinc, le manganèse, le
tungstène, le coltan et le cadmium. Les gisements de pétrole en
mer sont exploités depuis 197564.
63 Le Potentiel, (2007) ; « Cap sur la
décentralisation » ; Edition du 25 octobre 2007
64 Elément tiré de Microsoft ®
Encarta ® 2009. (c) 1993-2008 Microsoft Corporation sur la RDC
Mais aussi paradoxal que cela ne puisse paraître,
aujourd'hui, le secteur minier est devenu au plan budgétaire l'ombre de
lui-même à cause de la gestion prédatrice dont il n'a
cessé de souffrir. Des décennies durant, l'opinion publique a
cherché, en vain, à savoir ce que le gouvernement faisait du
pétrole exploité sur le littoral à Moanda dans la province
du Bas-Congo. Cinquante ans après, l'on est loin, très loin du
compte. Le rapport Mutamba Dibue, diligenté par le Sénat, est
venu encore renforcer ces appréhensions. Etabli sur la période de
2007-2008, ce document renseigne que « les services publics organisent
eux-mêmes le maquillage des chiffres pour le compte de leurs
responsables, minorant la hauteur des redevances, taxes et impôts annuels
payés par les opérateurs miniers. L'Etat se retrouve toujours
perdant »65.
La faiblesse relative des ressources financières
publiques provenant du secteur minier est aussi le fait de la gestion
prédatrice des entreprises publiques minières dont la plus grande
du pays, à savoir la Gécamines, a vu sa production de cuivre
passer de 465000 tonnes en 1990 à 19000 tonnes seulement en 2002. Cette
gestion calamiteuse est particulièrement caractérisée par
la multiplication des contrats dits « léonins » entre les
années 1997 et 2006. C'est ce que nous donne à découvrir
le tableau ci-dessous.
Tableau II.8 : Résultats de la revisitation des
partenariats miniers entre 1997 et 2006
N°
|
Contractant
|
Partenariats Conclus
|
Gré à gré
|
A base
d'appel d'offre
|
A résilier
|
A renégocier
|
Approuvé Sans
objection
|
1
|
ETAT
|
4
|
4
|
|
2
|
2
|
-
|
2
|
ENTREPRISES
|
|
|
|
|
|
|
|
MIBA
|
6
|
6
|
|
|
6
|
-
|
|
EMK-Mn
|
2
|
2
|
|
1
|
1
|
-
|
|
OKIMO
|
9
|
9
|
|
3
|
6
|
-
|
|
SAKIMA
|
5
|
5
|
|
4
|
1
|
-
|
|
SODIMICO
|
6
|
6
|
|
5
|
1
|
-
|
|
GECAMINES
|
29
|
28
|
1
|
9
|
20
|
-
|
|
TOTAL
|
61
|
60
|
1
|
24
|
37
|
-
|
Source : Ministère des Mines de la RDC, Rapport de la
Commission de Revisistation des Contrats Miniers (Volumes 1 et 2), (2009),
Editions Cepas.
65 Le Potentiel, (2010), « A haute voix.
Opacité » ; PP1-2 ; N°4884 du 26 mars 2010.
En effet, il ressort de l'examen attentif de ces informations
relatives à la revisitation des contrats miniers conclus par les
pouvoirs et entreprises publics entre 1997 et 2006 que sur 61 contrats conclus,
60, soit les 98,36 %, l'ont été de gré à
gré, donc entachés de suspicion légitime de corruption, 24
sont déclarés résiliables et 37, soit les 60,67%, devront
être renégociés même s'il est déplorable de
constater que « la Commission (de revisitation) n'a pas pu s'assurer
auprès des services fiscaux et des autres régies
financières que les entreprises amodiataires sont en règle
vis-à-vis d'eux (et) qu'elle espère que lors des phases suivantes
du processus de revisitation des contrats, le Gouvernement y veillera
»66.
Un des points les plus saillants qui ait retenu notre
attention dans ce rapport de revisitation réside dans le fait que les
parties aux contrats bénéficiaient de la part de l'Etat des
avantages fiscaux exorbitants.
Parmi ces avantages, on peut épingler «
l'exonération jusqu'à la quinzième année
d'exploitation de tous les impôts, taxes, droits, contributions et
prélèvements de quelque nature que ce soit, directs ou indirects,
fiscaux ou parafiscaux, nationaux ou locaux dus à l'Etat, aux
collectivités locales ou territoriales, aux entités
administratives existantes et à venir ; exonération
étendue aux fournisseurs, contractants, sous-contractants et
prestataires » 67 et ceci, même pour la production des
métaux aussi précieux et au prix relativement stable que l'or,
par exemple.
Le réalisateur belge du film « Katanga Business
», Thierry Michel, livre en ses termes sa lecture de cette
sous-fiscalisation du secteur minier congolais : « Le Congo a besoin
d'argent (...), il n'est pas capable de financer quoi que ce soit, et est
obligé de solder son empire minier »68.
Le gangstérisme qui a élu domicile dans
certaines contrées minières du pays contribue, également,
à l'exacerbation du contraste déroutant entre le potentiel fiscal
des richesses exploitées et les faibles ressources budgétaires
collectées par les pouvoirs publics.
66Ministère des Mines, (2009), Rapport des
travaux, Commission de Revisitation des Contrats Miniers ; Cepas
67Ministère des Mines, (2009), op.cit. PP 7-226.
La pauvreté structurelle des ménages explique
à son tour l'insuffisance des ressources budgétaires publiques.
Selon le PNUD, si « l'on agrège l'ensemble des revenus
d'activités des ménages, on obtient un revenu moyen par
ménages de 84$ dans la ville-province de Kinshasa contre 42$ sur
l'ensemble de la RDC69. Cette triste réalité
était déjà reconnue par le Document de Stratégie de
Réduction de la Pauvreté (DSRP) dans sa version
intérimaire lorsqu'il soulignait que : « En dépit de
toutes (ses) immenses ressources humaines et de sous-sol, la RDC est
classée parmi les pays les plus pauvres du monde (...). Près de
80% de sa population survivent à la limite de la dignité humaine,
avec moins de 0,20 $us par personne et par jour »70. Cet
état de choses entretient la pauvreté fiscale globale et perturbe
la mise en oeuvre réussie de la décentralisation
financière.
Le dernier exposé public du Premier Ministre sur la
situation socio-économique du pays confirme que le PIB/habitatnt de la
RDC, soit 200$us, est un des plus bas de l'Afrique subsaharienne. C'est ce qui
est illustré ci-dessous.
Tableau II.9 : Situation économique et sociale
de la RDC par rapport à quelques pays africains en 2009
Pays
|
PIB (en milliards de $us)
|
Population
(en millions
d'habitants)
|
PIB/Habitant (en $us)
|
Budget
(en milliards $us)
|
RD CONGO
|
12,5
|
62
|
200
|
2,5
|
R. CONGO
|
13,6
|
3
|
4250
|
3,8
|
ANGOLA
|
119,3
|
18
|
6630
|
27
|
ZAMBIE
|
14,3
|
13
|
1130
|
2,7
|
SOUDAN
|
41,0
|
18,3
|
2240
|
10,5
|
GABON
|
14,5
|
1,5
|
9700
|
4,6
|
RSA
|
277,2
|
49
|
5690
|
73,6
|
NIGERIA
|
214
|
140
|
1450
|
39,9
|
Source : Cabinet du Premier Ministre ; données
tirées de Kisungu (K) ; (2010) ; « Le discours
décrypté du Premier Ministre ; Muzito : le temps de l'inventaire
» ; Africanews ; N° 423 ; 15-16 février 2010 ; PP 4-10
69Agence DIA, (2009) ; « RDC : Pauvreté
structurelle des ménages à Kinshasa » ; juin 2009
70Ministère du Plan, (2004), Document de Stratégie de
Réduction de la Pauvreté.
![](Problematique-de-la-mise-en-oeuvre-de-la-decentralisation-financiere-en-Republique-Democratique4.png)
Ce tableau indique qu'en dépit de ses énormes
potentialités, la RDC affiche en 2009 un PIB inférieur, tant en
valeur absolue que par habitant, à celui de nombre de pays africains
avec un écart de 1 à 33 entre ledit PIB et celui de l'Angola, par
exemple, pays n'ayant obtenu son indépendance qu'en 1975, soit 15 ans
après la RDC...
Graphique 2 : PIB/HAB du Congo Brazzaville en 2008 et
évolution du PIB/HAB de la RD Congo de 2009 à 2040 ( en $us)
Source : Cabinet du Premier Ministre ; données
tirées de Kisungu (K) ; (2010) ; « Le discours
décrypté du Premier Ministre Muzito : le temps de l'inventaire
» ; Africanews ; N° 423 ; 15-16 février 2010 ; PP
4-10
Le graphique 2 révèle que la RDC, avec un PIB
per capita de 200$us et un taux de croissance de 13% à partir de 2009,
doit mettre 30 ans pour atteindre le niveau actuel de son voisin, le Congo,
qui, lui, est de 4250 $us actuellement.
La complexité du système fiscal opère
aussi dans le même sens dans la mesure où elle est
caractérisée par une multitude d'impôts et taxes
supportées par une infime partie de la population : plus il y a
d'entités territoriales décentralisées plus il y a des
taxes locales à faible rendement.
La mobilité de la matière imposable en milieu
rural, le bétail par exemple, rend difficile, elle aussi,
l'évaluation des bases d'imposition et la perception des recettes y
relatives et participe, de ce fait de la modicité des ressources
financières.
Par ailleurs, les taux de recouvrement des ressources locales
demeurent faibles du fait de la rareté des systèmes
d'information, du mauvais état et/ou de l'inexistence des
infrastructures et moyens de transport appropriés qui mettent à
mal la mobilité des agents percepteurs.
En outre, « quelques failles, fréquemment
enregistrées dans la phase d'encaissement (des recettes), telles que la
délivrance de fausses preuves de paiement, l'existence de bordereaux
parallèles de versement, la falsification et l'encaissement partiel des
sommes dues »71, tout comme l'absence des services
d'assiette et de recouvrement appropriés dans certaines contrées,
le faible niveau de formation des agents locaux et un bas niveau ou l'absence
de motivation, sont également stigmatisés parmi les facteurs qui
favorisent de faibles performances budgétaires de l'administration
fiscale en général et, plus particulièrement, des
provinces et entités décentralisées72.
Les analyses de la Banque Mondiale sont sans appel à ce
sujet, en ce qu'elles précisent que la faiblesse des performances
fiscales s'explique partiellement par la défaillance des administrations
fiscales, qui sont dotées d'un personnel qualitativement et
quantitativement insuffisant et qui sont, en outre,
sous-équipées73.
A cette autre difficulté d'instrumentation des
ressources locales, il conviendrait d'ajouter la non-viabilité
financière de la majorité des futures provinces. Selon la Banque
Mondiale, l'évolution de la viabilité des futures provinces
affiche une tendance à la baisse à partir de 2010 où elle
sera de 74,3% contre 80% en 2009 pour se fixer en 2012 à moins de 50%,
soit 49,4%. C'est ce qui ressort du tableau II.10.
Tableau II.10 : Evolution consolidée de la
viabilité financière des futures provinces
DESIGNATION
|
2007
|
2008
|
2009
|
2010
|
2011
|
2012
|
Recettes totales
|
164471059922
|
270655 358377
|
363949447623
|
499771080849
|
649315852275
|
840524898718
|
|
Dépenses totales
|
252638125803
|
339274927549
|
454808648499
|
672997867441
|
1044217385083
|
1701271601514
|
|
Ecart(R-D)
|
88167065881
|
68619569172
|
90859200876
|
173226786 592
|
394901532 808
|
860746702796
|
|
Taux de viabilité
|
65,1%
|
79,8%
|
80%
|
74,3%
|
62,2%
|
49,4%
|
|
|
|
|
|
|
|
Source : Banque Mondiale ; (2009) ; Note sur le
Découpage; Division Réforme du Secteur Public et Renforcement
des Capacités (AFTPR) Région Afrique ; op.cit. P .42
71Katalayi, K. (2009) ; « Les banques
agrées impliquées dans la stratégie de maximisation des
recettes » ; Bulletin de la DGRAD ; N° 03 ; juin-août 2009 ; P.
5
72Epee (G) et Otemikongo (M); (1992); op.cit. ; P.
351
73 Banque Mondiale, (2009), Note sur le
Découpage, op.cit. P .45
Selon la même source, le tableau II.11 ci-dessous montre
que sur les 21 nouvelles provinces qui seront issues du découpage
(parmi 26 au total), 17 sont jugées financièrement
non- viables, soit les 80,95%, 2 ont une viabilité mitigée
tandis que 2 autres seulement sont viables.
Tableau II.11 : Viabilité financière
spécifique des futures provinces de 2007 à 2012
N°
|
PROVINCES
|
VIABLE
|
VIABILITE MITIGEE
|
NON -
VIABLE
|
1
|
Kwilu
|
|
|
X
|
2
|
Kwango
|
|
|
X
|
3
|
Mai-Ndombe
|
|
|
X
|
4
|
Tshilenge
|
|
|
X
|
5
|
Lomami
|
|
|
X
|
6
|
Sankuru
|
|
|
X
|
7
|
Haut-Katanga
|
X
|
|
|
8
|
Haut-Lomami
|
|
|
X
|
9
|
Lualaba
|
X
|
|
|
10
|
Tanganyika
|
|
|
X
|
11
|
Tshopo
|
|
X
|
|
12
|
Ituri
|
|
X
|
|
13
|
Haut-Uele
|
|
|
X
|
14
|
Bas-Uele
|
|
|
X
|
15
|
Kasai Central
|
|
|
X
|
16
|
Kasai
|
|
|
X
|
17
|
Nord-Ubangi
|
|
|
X
|
18
|
Sud-Ubangi
|
|
|
X
|
19
|
Mongala
|
|
|
X
|
20
|
Equateur
|
|
|
X
|
21
|
Tshuapa
|
|
|
X
|
|
TOTAL
|
2
|
2
|
17
|
Source : Banque Mondiale ; (2009) ; op.cit. ; PP 32-49
Cela étant, la faiblesse du niveau de
prélèvement sur les économies tant nationales que locales
est aussi entretenue et aggravée par l'incivisme fiscal qui se traduit
par la remise en question de l'Etat et de sa principale prérogative
qu'est l'impôt et ce, particulièrement dans la partie - Est du
pays bien connue à la fois pour la crise sécuritaire qui y
sévit ainsi que pour l'exploitation illicite de ses ressources
naturelles dont elle souffre...
Nous ne pouvons, cependant, boucler cette section sans
établir de rapport entre la crise financière internationale,
conjoncturelle soit-elle, et la mise en oeuvre de la décentralisation
financière.
A cause de la crise financière, les perspectives de
croissance du PIB ont été largement revues à la baisse
pour 2009 de 9% à 2,7%, après cinq années pendant
lesquelles le taux de croissance du PIB a été en moyenne de
5,7%.
Ce repli du PIB a entraîné une baisse
considérable des recettes de l'Etat au dernier trimestre 2008 et au
premier trimestre 2009. Comparées à leur niveau du premier
trimestre 2008, les recettes publiques ont fortement baissé au premier
trimestre 2009. En termes réels, elles sont passées de
230 millions de dollars américains en mars 2008
à 176 millions en mars 2009, soit une baisse de 24
%74.
Dans un tel contexte, les moyens de l'Etat et ceux propres aux
provinces et ETD se trouvent fortement réduits sous l'influence des
chocs exogènes.
2.2.1.2. Extraversion prononcée du financement
budgétaire de l'Etat
Le niveau relativement élevé de la part des
recettes extérieures dans le budget de l'Etat contribue également
à l'enlisement de la décentralisation financière.
74 Muzito, A. 2009; op.cit.
Tableau II.12 : Part des recettes extérieures
dans le budget de l'Etat
EXERCICE BUDGETAIRE
|
RECETTES TOTALES
|
RECETTES EXTERIEURES
|
PART RECETTES
EXTERIEURES EN %
|
|
EN MILLIARDS DE $US
|
EN MILLIARDS DE $US
|
|
2006
|
2
|
1,008
|
50,4
|
2007
|
2,4
|
0,82
|
34,17
|
2008
|
3,5
|
1,3
|
37,14
|
|
EN MILLIARDS DE FC
|
EN MILLIARDS DE FC
|
|
2009
|
2629
|
1031
|
39,22
|
2010
|
4488
|
2233
|
49,76
|
Moyenne/5 exercices
|
|
|
42,14
|
|
Source : Programme du Gouvernement pour 2009 ; les
prévisions de 2010 sont celles du projet de budget déposé
pour adoption par l'Assemblée Nationale
Comme on peut le constater ci-haut, avec un budget
dépendant de l'extérieur à hauteur de 42,14%
en moyenne, les ressources attendues des prélèvements
sur les économies nationale et locale ne peuvent servir qu'à
faire face à près de la moitié des dépenses
budgétaires.
Ce qui ne peut manquer de réduire la marge de manoeuvre
du Gouvernement et de rendre la décentralisation financière aussi
hypothétique que l'aide extérieure et ce, malgré la
tendance haussière du budget.
La dette extérieure entretient elle aussi
l'insuffisance des ressources budgétaires. Il ne faut pas un dessin pour
comprendre que son service réduit davantage la liberté d'action
budgétaire des pouvoirs publics et, mutatis mutandis, la
régularité de la « rétrocession » due aux
provinces et ETD. Ce constat fait par le Ministre congolais des Finances est
édifiant à plus d'un titre : « le stock de la dette
extérieure de la RDC représente environ 700% des recettes
publiques et 90% du PIB, contre des seuils tolérables respectifs de 200%
et 30%. La dette extérieure de la RDC est tout simplement non
viable »75.
75 Matenda, A. (2008 ) ; « Les
déclencheurs du point d'achèvement de l'initiative PPTE à
l'examen à la CISP » ; Le Potentiel ; N° 4514 du 31
décembre 2008.
2.2.2. Défaillances en matière de gestion des
ressources financières publiques
A côté des faiblesses tenant à la
mobilisation de ressources, il y a aussi des imperfections liées
à leur gestion. Dans ce cadre, nous pouvons stigmatiser la
décapitalisation des entreprises publiques ainsi que les multiples cas
d'allocation irrationnelle de ressources, de détournement de fonds
publics et d'absence de sanctions appropriées.
2.2.2.1. Décapitalisation des entreprises du
portefeuille de l'Etat
Concernant l'exécution des recettes budgétaires,
la tendance à élargir l'assiette fiscale sans répondant
proportionnel dans le secteur productif, est singulièrement
prononcée en 2001 avec la fixation par l'Etat des sommes forfaitaires
que les entreprises publiques devaient acquitter au titre de contributions
spéciales au Trésor. Depuis 2002, les contributions
spéciales se sont muées en avances sur dividendes. Sur les 19
entreprises ayant fait leur versement en 2002, 10 n'ont pas établi
d'états financiers, 5 ont des états financiers indiquant que
l'exercice s'est clôturé en perte alors que les avances sur
dividendes ont été importantes, 4 entreprises disposant
d'états financiers avec des résultats positifs ont payé
des avances sans proportion avec les bénéfices76.
Pour preuve, Cohydro a des résultats positifs de 27,6
millions et a payé 122 millions à titre d'avances, Ogefrem a des
résultats positifs de 7,8 millions et a payé 27,2 millions, ONT a
des résultats positifs de 7,8 millions et a payé 0,8 millions. La
Cour conclut que « le système des avances sur dividendes, tel
qu'il est pratiqué, a un impact négatif sur le cadre
macroéconomique du pays par l'opacité qu'il engendre, dans la
mesure où la plupart de ces entreprises n'ont pas d'états
financiers, et par la décapitalisation des entreprises publiques qu'il
entraîne » 77.
En entamant ainsi la base productive globale par la
décapitalisation des entreprises publiques, cette pratique a pour
conséquence de restreindre à terme et sensiblement la
portée économique des effets externes attendus desdites
entreprises et de réduire, par ricochet, la richesse nationale ainsi que
l'assiette fiscale de l'Etat et des entités
décentralisées. Ce qui constitue un handicap sérieux
à la mise en oeuvre réussie de la décentralisation
financière.
76 De Saint Moulin, L. (2006) ; « Observations de
la Cour des Comptes sur les comptes de l'Etat pour les exercices 1997, 1998,
2001, 2002 et 2003 » ; Congo-Afrique ; n° 401, janvier 2006 ; P
33.
77 De Saint Moulin, L. (2006) ; op.cit ; P 32
2.2.2.2. Imperfections en matière d'allocation des
ressources et déficit de contrôle
Les observations de la Cour des Comptes sur les comptes de
l'Etat pour quelques exercices budgétaires, indiquent que certains cas
de dépassements budgétaires et de détournement des deniers
publics retenus à titre exemplatif suffisent pour témoigner d'une
certaine manière des difficultés de l'Etat à conduire les
finances publiques en fonction de la décentralisation.
Dans l'exécution des dépenses courantes, la Cour
des comptes constate pour l'exercice 2003 un niveau fort élevé de
crédits restés disponibles et annulés (101,6 milliards)
contrastant avec l'ampleur de l'exécution de dépenses non
prévues au budget ou en dépassement sur les prévisions
(100,5 milliards) sans qu'aucune modification ou rectification n'ait
été apportée à, la loi budgétaire 2003.
La même Cour relève que « les paiements
n'ayant pas fait l'objet d'ordonnancement de façon formelle
représentent en 2003 41% du total des paiements, contre 53,2% en 2002 et
31% en 2001 », tandis que «14 projets non approuvés
ont été exécutés 2003 à hauteur de 59,8% de
l'ensemble des paiements faits au titre des dépenses en
capital»78.
Comme si ces données ne suffisaient pas pour nous
édifier sur la mégestion publique, la Direction de la Reddition
des Comptes du Ministère des Finances a publié comme repris au
tableau ci-dessous les chiffres sur le dépassement budgétaire
imputé à l'espace présidentiel 79. Ce dépassement
est de l'ordre de 115% en moyenne et se situe dans la fourchette de 36 à
242% des dépenses autorisées ...
78 Ibid; P 3
79 De Saint Moulin, L. (2006) ; op.cit ; P 35
Tableau II.13 : Etat des dépassements
budgétaires de l'espace présidentiel pour l'exercice
budgétaire 2006 (janvier à décembre)
COMPOSANTE
|
% DEPASSEMENT BUDGETAIRE
|
Présidence de la République
|
91%
|
Vice-Présidence en charge de la Politique, Défense
et Sécurité
|
99%
|
Vice-Présidence en charge des Questions
Economiques et Financières
|
242%
|
Vice-Présidence en charge des Questions Socio-
culturelles
|
109%
|
Vice-Présidence en charge de la Reconstruction
|
36%
|
Source : Ministère des Finances ; Direction de la
Reddition des Comptes ; données tirées de Obotela (N) ; (2006) ;
« Afrique -actualités, novembre 2005 », Congo-Afrique, n°
401 ; janvier 2006 ; P. 62
Les détournements des deniers publics ont
été légion au cours de la période sous-revue, alors
qu'en contribuant à l'effritement des moyens d'intervention de l'Etat,
ils réduisent les chances de réalisation effective de la
décentralisation au plan financier. A titre illustratif, au cours d'un
point de presse animé en date du 5 novembre 2005, le Président de
la Cour des Comptes et l'Inspecteur Général des Finances ont fait
part à l'opinion publique du détournement d'un montant de 28
millions de dollars américains à la Direction
Générale de l'Impôt. Environ 2 semaines après, la
presse a fait état du démantèlement du réseau de
malfaiteurs ayant été à la base d'un détournement
de 3 millions de dollars américains à la Banque
Centrale80.
L'enlisement de la décentralisation financière
est davantage exacerbé par le déficit de contrôle et de
sanctions exemplaires en cas de dérapages. L'exemple des contrats
léonins dans le secteur minier est éloquent à ce sujet.
En effet, le rapport de 2007 sur la revisitation des contrats
miniers conclus par les pouvoirs publics et les entreprises entre 1997 et 2006
n'a jusqu'ici fait l'objet d'aucune sanction à l'endroit des
décideurs publics ayant facilité de loin ou de prêt leur
conclusion tandis que l'on ignore à ce jour la suite
réservée aux résultats dudit rapport pour ce qui est des
cas de résiliation (22,95%) ou de renégociation (77,05%), sachant
que c'est à la faveur du contrôle et du suivi, seulement, que
l'Etat peut valablement évaluer les pertes subies et proposer des
réparations ou des compensations conséquentes81.
Par ailleurs, la rétention de l'information de la part
de certains mandataires publics et de leurs partenaires82 devrait
davantage justifier le besoin de contrôle et de suivi pour garantir les
intérêts de l'Etat et, par ricochet, la capacité de ce
dernier à procéder aux transferts financiers
décentralisés en faveur des provinces et ETD.
Au regard de tout ce qui précède, il convient
d'envisager des stratégies à même de favoriser le
redressement et l'efficacité de la décentralisation
financière en RDC.
81 Ministère des Mines, (2009), op.cit. PP
7-226 82Ibid ; P. 5
CHAPITRE II : REDRESSEMENT DE LA DECENTRALISATION
FINANCIERE EN RDC, JUSTIFICATION ET ASPIRATIONS
Pour permettre aux provinces et ETD de se relever
financièrement et de contribuer efficacement à la maximisation du
surplus collectif en RDC, par « l'augmentation de
l'accessibilité et de la qualité des services publics
»83, il importe que des stratégies
appropriées y soient mises en oeuvre. C'est dans ce cadre que nous
proposons dans les lignes qui suivent une approche adaptée aux
réalités de ce pays.
Pour ce faire, nous allons, dans un premier temps, justifier
l'adoption de ladite approche (Section I) et, dans un deuxième temps, en
formuler les stratégies en termes d'actions concrètes à
mener (Section II).
SECTION I : CONTEXTE JUSTIFICATIF D'UNE
NOUVELLE APPROCHE
L'expérience spécifique de la RDC ainsi que les
enjeux de l'heure justifient le recours à une approche du redressement
de la décentralisation financière fondée sur deux leviers
complémentaires, à savoir : d'une part, le changement des
mentalités84 dans le chef des acteurs et, d'autre part,
la soutenabilité budgétaire de la réforme
décentralisatrice.
1.1. Expérience-pays et justification de la nouvelle
approche
Les leçons tirées au cours de la période
sous-revue, témoignent à grand trait de la double
nécessité du changement des mentalités et de l'adaptation
des moyens d'action aux nouvelles tâches et responsabilités du
Pouvoir Central, des provinces et des ETD, comme éléments
catalyseurs de la réussite de la décentralisation
financière en RDC.
1.1.1. Nécessité du changement des
mentalités
Les analyses qui ont précédé nous ont
suffisamment montré qu'il ne suffit pas d'élaborer de bonnes lois
ou des règlements rigoureux ni de décréter leur respect,
pour que le mot d'ordre soit suivi.
83Fumuzanza, J. (2009) ; « La bonne
gouvernance en RDC : orientations et stratégies de la gouvernance »
; Communication ; Séminaire-atelier organisé par la Commission
Interministérielle d'Audit et Bonne Gouvernance (CIABG)/; 16-17 juillet
2009 ; Kinshasa
Ces mêmes analyses nous ont aussi appris que
l'allocation budgétaire d'un volume donné de ressources aux
provinces et ETD n'entraîne pas toujours leur bénéfice par
ces dernières ; tandis que lorsqu'elle est effective, cette allocation
n'aboutit pas automatiquement à l'atteinte des objectifs assignés
à la décentralisation. Ceci montre à suffisance «
qu'il ne faut rien attendre des changements naturels, mais qu'il faut tout
attendre des moyens artificiels susceptibles d'améliorer un ordre
donné de choses »85. C'est-à-dire, en fait,
que le redressement visé devrait porter sur le changement durable des
pratiques, un « changement qui doit être ordonné,
dirigé et stimulé artificiellement »86.
C'est bien à ce changement qu'invitait déjà
Vunduawe (1982) en estimant qu'il faut des hommes à l'esprit
décentralisé pour mener à bon port la réforme
lancée alors en 1982.
Dans le même ordre d'idées, Epee et Otemikongo
(1992), ont insisté sur la promotion de la culture
d'investissement dans le chef des acteurs.
Les stratégies de mobilisation des citoyens autour des
objectifs des programmes gouvernementaux mettent aussi au premier plan le
changement des mentalités.
Sous la Deuxième République, la
préoccupation du changement de comportement était bien
perceptible dans le cadre de l'esprit du Salongo à travers des
slogans tels que : « Retroussons les manches » ou «
Moto na moto abongisa » (que chaque citoyen contribue à la
construction d'une société meilleure où qu'il se
trouve).
Pendant la Transition, il avait suffit que le gouvernement
issu de la Conférence Nationale Souveraine, fasse de la lutte contre
l'impunité son cheval de bataille, pour voir les dignitaires de
l'époque retourner d'eux-mêmes les biens publics dont ils
s'étaient accaparés87.
La législature actuelle a placé son programme
d'action sous le signe de la « Tolérance Zéro »
ou de la « Fin de la récréation ».
85 Toengaho Kokundo, F. (2009); op.cit. ; P. 4
86 Ibid
87Plusieurs véhicules et autres biens de
valeur remis volontairement à l'Etat ont été
exposés à l'époque devant le Palais du Peuple. De retour
d'un séjour officiel à l'étranger, le Ministre de
l'Agriculture de l'époque avait reversé au compte du
Trésor le reliquat de ses frais de mission.
Ngoma-Binda (2007) est convaincu à ce sujet qu'il
s'agit « d'opérer une révolution profonde des
mentalités (...), un changement (...) de (l') attitude vis-à-vis
du bien commun (...) et dans (la) perception de l'action publique
»88.
C'est dans cette logique qu'il convient de circonscrire la
mise sur pied, au niveau de la Primature, de la Commission
Interministérielle d'Audit et Bonne Gouvernance, pour ne prendre que ce
cas.
Le Forum National sur la Décentralisation, pour sa
part, a eu, entre autres recommandations, à souligner la
nécessité d'entreprendre une campagne de sensibilisation des
acteurs impliqués en vue de l'appropriation par eux de la réforme
décentralisatrice. Mais, la durabilité de cette réforme se
trouve aussi subordonnée à la viabilité financière
des provinces et entités décentralisées.
1.1.2. Nécessité de la soutenabilité
budgétaire de la réforme décentralisatrice
Les données provenant de la Banque Mondiale et fournies
dans les pages précédentes ont indiqué que sur l'ensemble
de 21 nouvelles provinces que comptera la RDC à l'issue du
découpage territorial, 17 sont jugées financièrement non
viables. Cet état de chose suggère qu'il importe d'allouer aux
provinces et ETD de la RDC des moyens d'action qui soient proportionnels
à leurs nouvelles compétences, moyens qu'elles devront, à
leur tour, gérer rationnellement.
En effet, si la majorité des 11 provinces actuelles ne
sont pas en mesure de faire face aux dépenses engendrées par
leurs nouvelles tâches et responsabilités, notamment celles
liées à la prise en charge des rémunérations et du
fonctionnement des secteurs de la santé, de l'enseignement primaire et
secondaire et de l'agriculture, il est inimaginable que les 21 provinces
attendues du découpage territorial puissent être, elles,
plus viables financièrement.
Par conséquent, peut-on comprendre, il est
nécessaire d'assurer la soutenabilité budgétaire de la
réforme, si l'on veut réussir la décentralisation
financière et ce, compte tenu des enjeux de l'heure.
1.2. Enjeux de l'heure et justification de la nouvelle
approche
La démocratie et le développement sont les deux
enjeux de l'heure qui justifient le recours à une approche
appropriée de redressement de la décentralisation
financière en RDC car, « le premier enjeu de la réforme
décentralisatrice (y compris bien entendu la décentralisation
financière) est le progrès de la démocratie (en RDC) ; le
second enjeu est celui d'assurer un développement
équilibré et harmonieux des (provinces)
»89.
1.2.1. Gouvernance démocratique et
nécessité du changement des pratiques
Le processus de démocratisation exige des acteurs de la
décentralisation le changement de comportement en termes de bonne
gouvernance.
En effet, la décentralisation est avant tout un
état d'esprit, une volonté d'aller plus en avant dans
l'approfondissement de la démocratie (...) Comme la démocratie a
besoin des démocrates, la décentralisation a besoin des hommes
à l'esprit décentralisé qui refusent de croire à la
centralisation de l'Etat »90.
La bonne gouvernance, quant à elle, est
«absolument essentielle pour atteindre un développement
durable, une croissance économique soutenue et l'éradication de
la pauvreté (tandis que) la trilogie bonne
gouvernance-démocratie-respect des droits de l'homme, sont les piliers
principaux de la gestion moderne de l'Etat et de la coopération entre
les nations, servira comme socle »91.
1.2.2. Développement équilibré et
harmonieux des provinces et nécessité de la solidarité
nationale et de l'esprit d'initiative locale
La décentralisation ne peut aboutir au
développement équilibré et harmonieux des provinces et ETD
sans changement des mentalités dans le chef des acteurs en termes de
promotion de l'esprit de solidarité devant se traduire par
l'effectivité de la rétrocession tant verticale qu'horizontale et
de la de la péréquation. Mais, l'esprit de solidarité ne
dispense pas les provinves et ETD de l'esprit d'initiative, d'émulation
et de compétitivité.
89Vunduawe, T. (1982) ; « L'évolution de
l'administration locale au Zaire de 1885 à 1982 » ;
Zaïre-Afrique ; N° 165 ; mai 1982 ; PP 261-273
90 Ministère de la Décentralisation et
Aménagement du Territoire, (2009) ; op.cit. ; P. 13
91 Kabila, J. (2007) ; « Discours
présidentiel d'investiture » ; Congo-Afrique ; N° 411 ;
janvier 2007 ; P. 18
Notre approche de redressement de la décentralisation
financière ayant été justifiée, voyons maintenant
quelles actions stratégiques proposer pour la mettre en oeuvre.
SECTION II : STRATEGIES DE REDRESSEMENT, UNE
NOUVELLE TRANSVERSALE
Ainsi que nous venons de le soutenir, nos stratégies de
redressement de la décentralisation financière en RDC
s'articulent autour d'une approche transversale à deux leviers
complémentaires, à savoir : d'une part, l'action pour le
changement durable des pratiques et, d'autre part, l'action pour la
soutenabilité budgétaire du processus décentralisateur
dans son ensemble.
2.1. Action sur les acteurs pour le changement durable des
pratiques
Le Forum National sur la Décentralisation a
initié une stratégie de sensibilisation en vue de l'appropriation
du processus décentralisateur par les différents acteurs. Cette
stratégie mérite d'être adoptée et enrichie dans le
cadre de notre mémoire. A côté de cette stratégie,
des mesures de surveillance et d'incitation méritent, également,
d'être envisagées.
2.1.1. Adoption et enrichissement de la stratégie de
communication sociale proposée par le Forum National sur la
Décentralisation
Pour saisir le bien-fondé de cette stratégie, il
importe d'en souligner l'intérêt pour la décentralisation
financière et de mettre en évidence ses objectifs.
2.1.1.1. Bien-fondé de la stratégie du Forum
National sur la Décentralisation
Le Gouvernement de la RDC a souscrit à cette
démarche, par sa décision « de se doter d'une
stratégie de communication sociale sur la décentralisation, en
exécution des recommandations du Forum National sur la
Décentralisation organisé à Kinshasa du 3 au 5 octobre
2007 , (laquelle stratégie) vise à changer les
comportements et les attitudes de tous les acteurs de la
décentralisation dans la perception de la gestion des affaires publiques
au niveau du pouvoir central, dans les provinces et dans les ETD
»92.
Cette stratégie tombe à point nommé dans la
mesure où les objectifs qu'elle poursuit peuvent valablement servir les
préoccupations de la décentralisation financière.
L'objectif général de la campagne de
communication sociale sur la décentralisation est d'informer et de
sensibiliser la population congolaise tant du milieu rural que du milieu urbain
sur la réforme de l'organisation territoriale basée sur la
responsabilisation des provinces et les entités territoriales
décentralisées dans la gestion de leur développement. Il
s'agira d'impliquer l'ensemble des acteurs dans le processus de mise en oeuvre
de la décentralisation 93.
Privilégiant une approche partenariale entre l'Etat
Central et les provinces, et entre le public et le privé, cette
stratégie qui se veut transversale, est appelée à
s'investir dans la durée étant donné que la
décentralisation territoriale, sous ses différents aspects
(sectoriel ou financier), demeure soumise au principe de
progressivité.
Elle a pour thèmes, la vulgarisation de la
réforme décentralisatrice et du Cadre Stratégique de Mise
en OEuvre de la Décentralisation en RDC (CSMOD, en sigle)94.
Les résultats attendus de cette campagne concourent tous à
l'appropriation générale du processus dans le sens de la
recherche de l'efficacité économique de l'Etat à partir
des provinces et ETD.
Ainsi, avec des termes de référence aussi clairs
que précis, il ne fait l'ombre d'aucun doute que cette stratégie
gouvernementale bousculera les pratiques décriées. Aussi,
pensons-nous qu'elle mérite d'être enrichie dans le cadre de notre
recherche.
L'intégration des questions transversales mais
pertinentes telles que la sécurité, la bonne gouvernance et la
restitution normée de l'information ainsi que la valorisation de la
thématique partenariale, peut permettre d'élargir le champ
d'action ainsi que la portée socioéconomique de la campagne de
sensibilisation déjà amorcée et favoriser davantage une
appropriation des enjeux de la décentralisation par les
différents intervenants ciblés.
93Ministère de la Décentralisation et
A.T., (2009) op.cit; P.3
94 Ministère de la Décentralisation et
A.T., (2009) ; op.cit; PP 6-7
2.1.1.2. Enrichissement de la stratégie du
Forum National sur la Décentralisation
La réforme projetée du secteur
sécuritaire (Armée, Police, Services de Renseignement, Justice),
réforme fondée sur les critères de transparence, de l'Etat
de droit et du renforcement de la sécurité humaine, confortera la
gouvernance démocratique à tous les niveaux en garantissant le
respect des textes légaux et réglementaires95.
Etant donné que, dans cette perspective, la
réforme du secteur sécuritaire favorisera la relance des affaires
et l'élargissement de la base imposable tant en province que dans les
ETD, son appropriation par les acteurs de la décentralisation ne peut
qu'être souhaitable.
Dans cette démarche d'éveil de conscience pour
l'appropriation de la décentralisation, les recommandations du
Séminaire-atelier sur la Gouvernance du Secteur Public en RDC qui a
été organisé à Kinshasa du 16 au 17 juillet 2009
par la Commission Interministérielle d'Audit et de Bonne gouvernance
(CIABG) et l'organisme international EISA méritent d'être
également capitalisées pour soutenir le relèvement de la
décentralisation financière.
Un Mémento pour la Bonne Gouvernance reprend 46
articles, expressions ou thèmes rappelant succinctement de faire ou de
ne pas faire dans la conduite des affaires de l'Etat96.
L'appropriation par les acteurs de la décentralisation
du bien-fondé ainsi que des exigences de la bonne gouvernance, aiderait
à comprendre que cette dernière, dans un pays post-conflit comme
la RDC, doit concerner tout le secteur public, c'est-à-dire que toutes
les institutions doivent fonctionner normalement et que chaque entité
doit refléter le bien-être de la population. A cette même
occasion, il sera donné aux acteurs de la décentralisation
d'avoir la maîtrise « des éléments constitutifs de
la bonne gouvernance parmi lesquels le leadership responsable et de conviction,
la participation populaire, le cadre institutionnel et le respect par les
dirigeants des valeurs éthiques (...) »97.
95 Forum des Dirigeants Africains, OUA et ONU (1992) ;
« Le Document de Kampala : Towards a Conference on Security, Stability,
Development and Cooperation » ; Rapport de travaux ; P.9
96 Commission Interministérielle d'Audit et de
Bonne Gouvernance, CIABG et EISA, (2009) ; « La gouvernance dans le
secteur public en RDC » ; Rapport général du
Séminaire-atelier ; 16-17 juillet 2009 ; Kinshasa
97 Ibid ; P..5
A côté de la réforme du secteur
sécuritaire et de la bonne gouvernance, nous proposons d'intégrer
dans le dispositif de communication sociale visant le changement de
comportement des acteurs de la décentralisation financière en
RDC, la restitution normée de l'information financière et/ou de
son analyse en vue de véhiculer une vision claire et partagée du
changement souhaité, par la structuration du débat sur la
décentralisation financière autour de certains indicateurs dont
la liste ne peut être exhaustive.
Nous pensons, à ce sujet et en toute modestie, que la
communication sociale sur la vie financière des provinces et ETD,
c'est-à-dire sur leur stabilité, leur évolution et leur
viabilité financières, gagnerait en perspicacité et en
efficacité si l'on mettait régulièrement en vedette le
comportement des indicateurs spécifiquement élaborés et
adaptés. Cette pratique est déjà de mise dans les pays de
l'UEMOA (Benin, Mali, Burkina Faso, Sénégal, Côte d'Ivoire,
Niger, Togo) où l'Observatoire des Finances Locales (OFL) produit
régulièrement diverses publications sur les finances locales, au
nombre desquelles « Les Collectivités Locales en Chiffres, le
Regard sur les Finances Locales, la Revue Africaine des Finances Locales et
l'Equilibre Financier » 98.
Dans ces différentes publications, il est souvent fait
état du comportement des indicateurs suivants : le niveau de
décentralisation fiscale (Recettes locales/Budget de
l'Etat-Recettes fiscales locales/Recettes fiscales Etat), le niveau des
ressources locales par habitant, la part des collectivités
locales dans les dépenses publiques d'investissement,
l'épargne nette locale, la capacité
d'investissement, la capacité de financement, et le
résultat de clôture.
Régulièrement organisée, une restitution
normée de l'information financière provenant des provinces et ETD
et destinée au Pouvoir Central, au Parlement, à la population, et
à l'ensemble des partenaires nationaux et internationaux de la
décentralisation, rendrait plus lisible et plus fiable l'analyse de la
vie budgétaire. Elle encouragerait l'harmonisation des procédures
aux niveaux national et/ou communautaire, faciliterait la prise des
décisions, contribuerait à l'élévation du niveau du
débat sur les finances locales, conforterait la comparaison des
performances et susciterait la concurrence et l'émulation entre
entités99.
98 Observatoire des Finances Locales, (2004) ; «
Problématique de l'équilibre financier des collectivités
locales des pays de l'UEMOA » ; L'Equilibre Financier ; 2004 ; P. 2
99 Observatoire des Finances Locales, (2004);
«Pourquoi un regard sur les finances locales» ; Regard sur les
Finances Locales dans les pays de l'UEMOA ; 2004 ; P. 2
Ce qui ne pourrait manquer d'influer à terme sur le
suivi et les modes de gestion financière publique ainsi que sur les
chances de réalisation des projets économiques et sociaux tant au
niveau national qu'à ceux provincial et local.
L'information et la sensibilisation systématique des
élus et de la population sur les termes de référence des
différents programmes soutenus par les partenaires au
développement et entretenant des rapports étroits avec la
décentralisation, peut aussi venir en appui à la démarche
du Forum.
La recherche de la viabilité financière des
provinces et des ETD pourrait également être rendue possible
grâce à l'appropriation par les différents acteurs des
opportunités qu'offrent la coopération internationale et le
partenariat public-privé. A titre exemplatif, dans le Programme-cadre de
coopération avec la RDC pour le cycle 2008-2012, le PNUD concentre ses
appuis autour de deux grands axes, à savoir : la gouvernance
démocratique et la lutte contre la pauvreté100. Dans
le cadre de l'exécution de ce programme, il est prévu des
activités d'appui à la relance de l'économie (formation
professionnelle, développement des filières et des
micro-entreprises, meilleur accès au crédit, etc.) et au
renforcement des capacités de bonne gouvernance locale (appui à
l'élaboration des plans locaux de développement, formation des
responsables gouvernementaux et de la société civile,
renforcement des mécanismes participatifs et inclusifs, etc.).
En se proposant de soutenir la cohésion sociale et la
gouvernance communautaire, le « relèvement communautaire »
appuyé par le PNUD peut intégrer l'éducation au
civisme fiscal et à l'esprit de la décentralisation et contribuer
ainsi à l'élargissement de l'assiette de l'impôt. L'essor
de la « microfinance », par l'intérêt et les
espoirs qu'il suscite, peut faciliter la fiscalisation progressive du secteur
informel. Cette fiscalisation est d'autant plus revendiquée que les
membres de la Fédération des Entreprises du Congo (FEC) crient
à l'injustice fiscale estimant qu'ils supportent à eux seuls les
70% des recettes fiscales de l'Etat alors que le secteur informel produit
également des richesses mais demeure largement
sousfiscalisé101.
100 PNUD, (2010) ; Avis de vacance de poste n°CDS/2010/022 ;
www.mediacongo.net
101 Kudisala, F. (2010) ; « Doublement des recettes :
sévère réquisitoire de la FEC » ; Le Potentiel ;
N° 4889 du 23 mars 2010 ; P.2
Par ailleurs, la microfinance peut être mise à
contribution pour sécuriser les flux financiers des provinces et des ETD
là où le système bancaire traditionnel fait
défaut.
Les élus provinciaux et/ou locaux pourront trouver
à travers les interventions du PNUD dans les domaines de l'environnement
et de lutte contre le Vih/Sida, domaines relevant également du champ des
« affaires locales », des opportunités de renforcement des
synergies d'action, de rationalisation de leurs propres interventions
budgétaires dans le secteur (en considérant l'impact de l'apport
extérieur) et, de réduction conséquente des risques de
dispersion et/ou de double emploi des ressources mobilisées.
L'expertise du PNUD dans le cadre de son appui au DSCRP et
à l'atteinte des OMD peut constituer pour les provinces et ETD
avisées, une opportunité de renforcement de leurs
capacités à se hisser à la hauteur des défis
à relever.
Un autre exemple est celui du Programme d'Appui à la
Redevabilité du Secteur de la Sécurité et la
Réforme de la Police, programme de la Coopération Britannique qui
sera amené, dans son volet « Redevabilité externe
», à « (soutenir) les parlements provinciaux en vue
d'améliorer leur capacité à contrôler
l'exécutif y compris le suivi budgétaire (...) et à voter
des lois (...) liées au secteur sécuritaire ; à travailler
avec la société civile, les chercheurs, les médias, les
personnes et organisations communautaires locales et les institutions locales
de sécurité et justice, en vue de concrétiser leurs
agendas de proposition et collaborer pour améliorer la
sécurité locale par le biais du nouveau cadre de la police de
quartier et de services de police répondant aux besoins locaux
»102.
Si ce programme est approprié par les animateurs
publics de la décentralisation, il pourrait permettre à ces
derniers de rassurer à leur tour la population, plus
particulièrement les opérateurs économiques-contribuables,
sur l'effort et les modalités d'amélioration du climat
sécuritaire des affaires.
Ce qui aurait pour impact de crédibiliser l'Etat, de
créer un climat de partenariat public-privé plus serein et plus
favorable à la maximisation des recettes budgétaires des
provinces et des ETD et de tirer la croissance.
En intégrant donc l'information et la sensibilisation
portant sur ces différents programmes et tant d'autres qui leur seraient
semblables mais qui n'ont pas été cités ici, la
stratégie globale de communication sociale destinée à
promouvoir « l'esprit de la décentralisation » ne
manquera pas d'apporter un plus à la mise en oeuvre de la
décentralisation financière en RDC.
Sans prétendre à l'exhaustivité, une
autre thématique non négligeable à exploiter dans le cadre
de la communication sociale visant le changement de comportement se trouve
être le partenariat public privé.
En effet, les besoins de financement de la RDC pour mettre en
place une plate-forme minimale d'infrastructures nécessaires pour une
croissance forte, créer les emplois et réduire la pauvreté
sont estimés à 5 milliards de dollars américains l'an
pendant les 10 prochaines années. Au cours des récentes
années, la RDC a, bon an mal an, mobilisé environ 1 milliard de
dollars américains pour les infrastructures103. Le pays fait
donc face à un déficit de financement. Il est indiqué que
les acteurs étatiques sachent pertinemment bien que les ressources de
l'Etat étant limitées, il importe que ce dernier
accélère la mobilisation des financements privés. Pour
cela, il a besoin de mettre en place un cadre et un ensemble de règles
et des procédures pour canaliser les interventions du secteur
privé.
Des projets relevant du « partenariat public-privé
» (PPPs) peuvent donc permettre à la RDC de réaliser de
nouvelles infrastructures dont elle a besoin et qui font grandement
défaut à son développement économique et social.
Ainsi donc, à la faveur de cette stratégie
globale de communication sociale enrichie de notre modeste contribution, chaque
intervenant devra jouer sa partition pour atteindre les objectifs
escomptés.
Cela étant, l'orientation du comportement opportuniste des
élus, des décideurs publics et/ou des fonctionnaires n'est pas
à négliger.
103 Noumba, P. (2010) ; « Cinq questions à Paul
Noumba » ; Le Poteniel ; N°4872 ; 12 mars 2010 ; P. 4
2.1.2. Orientation du comportement des acteurs par la
surveillance et l'incitation
Si nous considérons, dans le cadre de la
décentralisation, qu'il existe une relation principal-agent où
les électeurs peuvent être assimilés au principal du fait
de la délégation de pouvoir qu'ils donnent aux gouvernants, et
où le politicien (la tutelle) agit comme principal lorsqu'il
délègue des pouvoirs au fonctionnaire (bureaucrate) qui devient
agent, il importe que des stratégies de limitation du comportement
opportuniste et d'incitation de l'agent soient envisagées parce qu'il
est impossible d'assurer à coût nul que l'agent prendra des
décisions optimales du point de vue du principal104.
C'est la raison pour laquelle nous proposons qu'à
côté de la stratégie de communication sociale ciblant tous
les intervenants au processus de décentralisation, que des mesures de
surveillance et d'incitation des décideurs publics et des fonctionnaires
soient rendues opérationnelles pour garantir que ces derniers
évolueront dans le sens de l'intérêt général
là où ils sont, par nature, maximisateurs de leur propre
profit105.
2.1.2.1. Surveillance des décideurs publics et
fonctionnaires
Même si des règles de prudence visant la
surveillance et le contrôle de l'agent public existent en RDC et
régentent formellement la conduite de la vie financière publique,
nous l'avons vu plus haut, il n'en demeure pas moins que leur application
souffre soit de l'absence de suivi soit du déficit de sanctions
exemplaires en cas d'abus avérés.
C'est pourquoi, il importe de proposer des mesures
adéquates pour y remédier. Ces mesures sont, notamment :
l'observance de la politique dite de « Tolérance Zéro
»106 et la transparence des transactions financières
entre le pouvoir central, les provinces et les ETD.
Au niveau national, pour que la « Tolérance
Zéro » ne soit pas l'ombre d'elle-même, les pouvoirs
législatif, exécutif et judiciaire doivent agir.
104 Gabrie, H. et Jacquier, J. (2001) ; Les théories
modernes de l'entreprise : l'approche institutionnelle ; Economica
105 Jensen, M. et Meckling, W.(1976); Theory of the firm :
managerial behavior, agency cost, and ownership structure ; Journal of
Financial Economic
106 La tolérance zéro, qui rime avec la sanction
systématique à la moindre infraction, désigne la politique
d'impunité préconisée par la 1ère
législature de la 3ème République.
Le parlement doit placer l'intérêt
général au-dessus des intérêts partisans
(OppositionMajorité) pour jouer effectivement le rôle de
contrôleur de l'exécutif. A cet égard, les rapports de la
Cour des Comptes seront exploités de manière optimale, sans
complaisance et dans l'intérêt supérieur de la Nation.
Il est souhaitable, dans la perspective d'un suivi de
proximité, que des chambres régionales des comptes et de
discipline budgétaire soient également rendues
opérationnelles au niveau des provinces au lieu de laisser la seule
instance nationale de la Cour des Comptes se contenter des missions sporadiques
de ses membres à l'intérieur du pays.
L'exécutif devrait veiller à la transparence et
à l'obligation de rendre compte en réhabilitant l'Inspection
Générale des Finances dans sa mission d'audit interne. Un
système de suiviévaluation interne et périodique de
l'action gouvernementale (dont la poursuite de la revisitation des contrats
léonins, par exemple) est à recommander qui pourrait
naturellement préparer le terrain aussi bien aux sanctions internes et
rappels à l'ordre qu'aux interpellations parlementaires et aux revues
éventuelles des partenaires extérieurs. Pour besoin de
perspicacité, ce système s'appuiera sur des informations
normées et vérifiables se traduisant en termes d'agrégats
ou d'indicateurs de performance.
Le pouvoir judiciaire, quant à lui, a une part de
responsabilité déterminante dans la mesure
oüc'est lui qui doit sévir de manière exemplaire
et en toute indépendance, tout cas d'abus des
biens sociaux dans le chef de tous les décideurs
publics et fonctionnaires impliqués de loin ou de près dans la
chaîne des recettes et des dépenses publiques. Le renforcement de
la surveillance de l'agent public doit se traduire par la fin de
l'impunité 107. Sans un tel dispositif, l'utilisation
rationnelle et efficace des transferts décentralisés de pouvoirs
et d'avoirs au niveau des provinces et ETD ne peut être garantie.
En ce qui concerne la traçabilité des
transactions financières provinciales et locales, les mesures
proposées au niveau national sont aussi valables, mutatis mutandis, pour
les provinces et ETD. Néanmoins, la traçabilité des
transactions financières provinciales et locales devrait être
garantie par le recours systématique au circuit bancaire.
107Ngoma-Binda, P. (2007) ; op.cit. ; P. 28
Par ailleurs, la mise en place des autorités
élues au niveau des ETD est indispensable non seulement pour
crédibiliser le processus mais aussi, pour que les électeurs
s'assurent, par le biais de l'organe délibérant, de la
lisibilité des actes de gestion de la chose publique
2.1.2.2. Incitation des décideurs publics et
fonctionnaires
Un système d'intéressement des décideurs
publics et fonctionnaires est indispensable pour leur motivation et
l'orientation de leur comportement dans le sens de la satisfaction de
l'intérêt général108.
L'application effective des mesures existantes
d'intéressement du personnel des administrations fiscales en RDC est
à recommander vivement notamment le paiement à termes
échus des avantages dus aux agents d'exécution du
budget109, sans omettre l'adaptation des mesures d'incitation aux
réalités provinciales et locales. Les mesures existantes mais non
encore appliquées de manière satisfaisante sont : la
rétrocession et la prime de performance (ou bonus) reconnus au personnel
des régies financières de l'Etat. Des textes
réglementaires organisent leurs modalités de paiement. Les
dispositions en vigueur veulent que le personnel des régies
financières bénéficie d'une rétrocession mensuelle
à raison de 5% des réalisations pour la DGI ou l'OFIDA et 10%
pour la DGRAD, dont la moitié doit revenir au personnel des services
administratifs poseurs d'acte. En cas de dépassement des assignations,
un bonus leur est accordé auquel il est déduit les
déficits éventuels (contre-performances) des périodes
antérieures110.
Pour minorer les pertes résiduelles ou
coûts d'opportunité qu'elle subirait du fait de
l'asymétrie d'information, et pour éviter des contre-performances
budgétaires en cas de grève, la tutelle se doit de respecter les
textes existants et, par conséquent, de payer à termes
échus les avantages dus au personnel des régies
financières111.
108Banque Mondiale , (2009), Note sur le
Découpage, op.cit. P .45
109 Epee, G. et Otemikongo, M. (1992); op.cit. ; P. 351
110 Ministère des Finances, (2005) ; « Contrat de
performance entre le Ministère des Finances et la DGRAD », article
5 ; le non-paiement de la rétrocession et du bonus à
termes échus aboutit souvent à des grèves intempestives du
personnel des régies financières en RDC
111Jensen, M. et Meckling, W. (1976) ; op.cit. ; P. 6
; Dzaka-Kikouta, T. (2009), Microéconomie approfondie. Editions ICES,
Corbeil-Essonnes Cedex
Cependant, nous estimons, pour notre part, que les
exonérations, exceptionnelles soient-elles, ne devraient pas,
contrairement à ce que prévoient lesdits textes, être
intégrées au titre de réalisations dans le calcul de la
rétrocession ou du bonus, car elles constituent une
recette en moins pour le Trésor.
En outre, la plupart de provinces étant encore entrain
de mettre en place leurs propres administrations fiscales, nous pensons que
tout système de motivation concernant leur personnel devrait, pour
être réaliste, tenir compte de leurs spécificités
financières et ne pas copier servilement, dans ce domaine, des formules
dont l'application stricte s'avère déjà difficile au
niveau national.
Cela étant, il importe que le changement des
mentalités impulse dans le chef des acteurs la poursuite inlassable de
la soutenabilité budgétaire de la décentralisation.
2.2. Action pour la soutenabilité budgétaire
de la décentralisation
Le renforcement des capacités budgétaires du
pouvoir central, des provinces et ETD, tout en s'appuyant sur les
stratégies de changement de comportement préconisées et
exposées ci-haut, passe par le respect des textes de base en vigueur
et/ou, selon les cas, leur adaptation aux contingences locales ainsi que par
quelques remèdes aux faiblesses fréquentes et persistantes en
matière de mobilisation et de gestion des ressources
financières.
2.2.1. Application des textes de
référence
L'application des textes de référence en vigueur
permettra l'achèvement de l'architecture juridique et institutionnelle
de la décentralisation et la résorption du déficit de
solidarité financière entre le pouvoir central et les provinces,
entre les provinces et entre ces dernières et les ETD.
2.2.1.1. Exécution du découpage territorial
et organisation des élections locales
La question du découpage territorial demeure sans
solution jusqu'à ce jour, alors qu'elle ne devrait pas être
dramatisée. A notre avis, compte tenu de l'immense étendue du
territoire national, la préoccupation du rapprochement entre gouvernants
et gouvernés ainsi que l'amélioration subséquente des
conditions de vie de la population sont à privilégier par rapport
aux considérations d'ordre infrastructurel.
En effet, le territoire national demeurant le même en
dépit de la transformation des anciens Districts en nouvelles Provinces,
rien ne saurait retarder la mise en place de nouvelles entités
territoriales si ce n'est que l'élaboration, la promulgation et
l'application des textes d'application tel que prévu dans la
Constitution de 2006.
A la faveur de ce double effort législatif et
exécutif, le reste s'organiserait progressivement, à savoir : le
transfert effectif de ressources et compétences appropriées, la
régulation du pouvoir central et l'auto-prise en charge du processus de
développement local. Soutenir une démarche qui subordonnerait le
découpage territorial à la dotation préalable et non
progressive des nouvelles provinces en nouvelles infrastructures
administratives, reviendrait tout simplement à retarder le processus de
démocratisation et à étouffer la recherche de
l'efficacité économique de l'Etat à partir des provinces
et ETD.
La révision du fichier électoral par la
Commission Electorale Nationale Indépendante ayant été
prévue pour le mois de juin 2010, il y a lieu d'encourager
l'organisation dans les meilleurs délais des élections locales,
municipales et urbaines pour faciliter, outre le transfert officiel des
services et du patrimoine aux nouvelles entités territoriales, une
organisation conséquente et plus responsable de la vie budgétaire
locale.
2.2.1.2. Résorption du déficit de
solidarité financière
Il y a lieu d'actualiser la législation
financière, d'appliquer de manière correcte et consensuelle la
rétrocession en faveur des provinces et de rendre opérationnelle
la péréquation pour réduire les
déséquilibres insoutenables entre provinces.
Une nouvelle loi financière devrait remplacer celle de
1983 pour intégrer les innovations apportées par la Constitution
de 2006 ainsi que les lois induites sur la décentralisation de 2008.
Quant à la retenue à la source de 40%, la
polémique défrayant la chronique sur son application perdrait
d'intérêt par rapport au développement harmonieux de toute
la nation si elle demeure quantitativiste et formaliste.
Car, appliquée sans préoccupations de
solidarité nationale, de justice sociale et d'équité, la
retenue à la source « des 40% » ne profiterait qu'aux
provinces les plus nanties au détriment de toute la
société et ne saurait résoudre le problème
fondamental de recherche de l'optimum global à cause du
déséquilibre économique interprovincial et de la
non-viabilité financière de la plupart de futures provinces
qu'elle approfondirait112.
Pour les provinces les moins nanties, la retenue à la
source de leurs maigres recettes à caractère national
équivaudrait à une formule de financement, à titre
principal, de leur développement par leur propre misère et se
traduirait, in fine, en une limitation insoutenable des
capacités et perspectives d'autonomie locale.
C'est pourquoi, il conviendrait que la rétrocession
tienne compte du consensus dégagé lors du Forum National sur la
Décentralisation en ce qu'il permet une redistribution plus
équitable des recettes pétrolières, des recettes
douanières et des recettes de la Direction des Grandes Entreprises. Il
importe, dans cette logique, que ce consensus du Forum soit formalisé en
termes de loi ou de règlement pour en garantir une application qui
s'imposerait à tous.
La solidarité financière entre le pouvoir
central et les provinces se jouera aussi au niveau de la
péréquation par le fonctionnement effectif de la caisse nationale
de péréquation. Mais, cette solidarité signifie aussi que
le pouvoir central devra revoir à la baisse son train de vie pour tenir
compte de ses obligations de transfert et de régulation vis-à-vis
des provinces.
La solidarité financière est aussi indispensable
à la base, c'est-à-dire entre provinces et ETD.
Bien que nous n'ayons pas d'informations sur les rapports
financiers entre provinces et ETD, nous jugeons vivement souhaitable que la
rétrocession des recettes à caractère national des
provinces vers les ETD fasse l'objet de suivi et de rapportage
réguliers.
112 Http//
fr.wikipedia.org/wiki/Jhon_Rawls
; http//
www.simonwuhl.org/9.html
; à propos de l'équité, nous nous sommes sommairement
inspiré de la Théorie de la Justice de Rawls où elle se
définit de façon rigoureuse, en référence à
l'application des principes et règles de justice : lorsque ces principes
sont satisfaits, la répartition des avantages et des obligations de
chacun s'établit de façon équitable ; car les
inégalités ne pourraient être justifiées que si la
société en tire elle-même un plus grand avantage, tandis
que la justice est la première vertu des institutions sociales comme la
vérité est celle des systèmes de pensée.
Outre, une contribution accrue des autorités
provinciales et locales dans la maximisation des recettes à
caractère national de leurs juridictions respectives par l'exercice d'un
droit de regard sur les performances des régies financières, nous
recommandons l'échange réciproque d'informations de base et une
harmonisation fiscale régulière entre entités de
même échelon pour épargner le contribuable du risque de
double paiement d'une taxe de même nature sur l'étendue du pays
pour un même exercice (cas de la vignette automobile, par exemple). Cette
solidarité empêcherait toute tentative d'évasion fiscale et
contribuerait à l'amélioration des recettes locales.
2.2.2. Amélioration de la gestion
budgétaire
Les délégués au Sommet Africités
qui s'est tenu du 18 au 24 septembre 2006 à Naïrobi au Kenya sur la
réalisation effective des objectifs du millénaire pour le
développement (OMD) au sein des collectivités locales africaines,
ont pris en considération la nécessité de relever le
défi de la mobilisation optimale et de la gestion responsable des
ressources financières.
En effet, lesdits délégués ont
partagé clairement la conviction que « sans une
amélioration significative des capacités financières des
collectivités locales africaines et de la gestion des finances locales,
il y a peu de chances que les collectivités locales jouent leur
rôle dans la réalisation effective des OMD
»113. C'est pourquoi, il est bon, d'une part, de niveler les
capacités de mobilisation des ressources budgétaires à la
hauteur des tâches et responsabilités des provinces et ETD et
d'autre part, d'améliorer la gestion desdites ressources.
2.2.2.1. Mobilisation optimale des ressources
budgétaires
Le nivellement des ressources budgétaires à la
hauteur des charges des provinces et ETD peut être rendu possible
grâce au renforcement des capacités financières locales,
par l'élargissement de la base productive, l'atteinte du point
d'achèvement, la réforme des entreprises publiques ainsi que les
performances des administrations fiscales (exécution des recettes
à un niveau au moins égal à celui des assignations;
concordance entre la contribution au PIB d'un secteur donné de
l'économie et sa part au budget ; progrès dans la lutte contre la
fraude et l'évasion fiscales ; réduction de la dépendance
financière vis-à-vis de l'Extérieur, etc.).
L'élargissement de la base productive, en termes de
capacité d'attraction des investissements privés,
nécessite l'amélioration de la fourniture des biens collectifs
essentiels et l'essor d'une industrie compétitive et à forte
valeur ajoutée locale basée sur le raffinage des matières
premières. C'est dans un tel élan que des branches porteuses mais
sous-exploitées, comme le tourisme, pourront être
relancées. A propos du tourisme, « la RDC a
réalisé en 1992 des entrées de 33.000 touristes seulement
alors que pendant la même période, le Kenya et l'Afrique du Sud
enregistrent respectivement 650.000 et 1.300.000 entrées des touristes
internationaux (...). Les pouvoirs publics de la RDC (doivent) produire une
onde de choc pour que le tourisme démarre effectivement, se
développe et contribue au PIB dans une proportion à la mesure des
potentialités du pays (...) »114.
Pour ce qui est de l'amélioration des ressources
budgétaires dans le cadre du programme avec le FMI, il est souhaitable
d'atteindre le fameux point d'achèvement dans les délais et
accéder, ainsi, à des ressources additionnelles à
même de profiter notablement à la décentralisation
(libération des recettes pétrolières et réduction
du service de la dette extérieure, notamment).
En effet, à l'atteinte du point d'achèvement, le
stock de la dette extérieure passera entre 2009 et 2010 de 12,8 à
4,3 milliards de dollars américains115, tandis que les
recettes des pétroliers producteurs pourront être
intégrées dans la formule de rétrocession.
La réforme des entreprise publiques fait partie des
objectifs intermédiaires assignés au pouvoir central dans le
cadre de son programme avec les partenaires extérieurs. Mais, cette
réforme ne peut être soutenable que dans la mesure où elle
peut concilier la recherche de performance des secteurs concernés avec
la poursuite par l'Etat de la maximisation de l'utilité sociale. Cette
préoccupation est d'autant fondée que certains secteurs à
forte demande sociale, comme le transport en commun dans la ville de Kinshasa
(9 millions d'habitants) où le retrait de l'Etat est perceptible
à l'oeil nu, ne permettent plus de répondre aux besoins de la
population. De même, les transactions « public-privé »
doivent le plus possible s'ouvrir à la concurrence pour en assurer la
transparence et l'équité.
114 Sekana, J. (2009) ; « La RDC peut financer son
économie rien qu'en maximisant ses recettes fiscales » ;
Congo-Fiscalité Magazine; N° 004 ; année 2009 ; PP 24-25
115 Le Potentiel, (2009) ; « Accord FMI-RDC : le plus dur
est à venir » ; Le Poteniel ; N°'4803; 14 décembre 2009
; P. 2
Il serait aussi souhaitable que la pratique des avances
aveugles sur dividendes soit formellement bannie au sein des entreprises
publiques et que la revisitation des contrats jugés opaques soit
poursuivie et élargie à tout le portefeuille de l'Etat. Pour
s'assurer de bons résultats et insuffler une nouvelle philosophie au
partenariat public-privé dans son ensemble, il est
préférable que la revisitation des contrats y relatifs soit
assurée par des personnes (physiques ou morales) reconnues
intègres, expertes et distinctes de celles qui seraient de loin ou de
prêt mêlées à la conclusion mise en cause.
L'amélioration des performances des administrations
fiscales par une fiscalisation adéquate de l'activité informelle,
des télécommunications et de l'environnement peut favoriser
l'élargissement de la matière imposable.
Une analyse rigoureuse et régulière du rendement
budgétaire de l'industrie extractive (bois, minerais et pétrole)
mettant en relief le rapport, pour chaque branche, entre «sa
contribution au PIB et sa part au budget de l'Etat sans recettes
exceptionnelles», peut contribuer à éclairer la
lanterne des citoyens et améliorer leurs capacités de
participation, dans la mesure où ils ne cessent de s'interroger chaque
jour sur l'inadéquation entre la pauvreté budgétaire de
l'Etat (pays pauvre très endetté) et l'exploitation
effrénée de ses immenses ressources naturelles116.
En ce qui concerne les télécommunications, il
est en effet inconcevable que « sous d'autres cieux une licence de
téléphonie mobile de troisième génération
(Zain, Vodacom et autres) se négocie à 1.500.000.000 $us (cas de
l'Arabie Saoudite) tandis qu'en RDC la même licence est bradée
à 55.000.000 $us lesquels sont payés à tempérament
pendant que l'opérateur est déjà opérationnel
117.
Pour ce qui est de l'environnement, d'aucuns pensent
que la RDC devrait bénéficier d'une compensation monétaire
du fait de la purification naturelle de l'air par sa forêt
équatoriale et ce, en imposant une taxe internationale des puits
carbone.
Selon cette opinion, ladite taxe devrait être
supportée par tous les grands pollueurs du monde en faveur des pays qui,
par la conservation de leurs forêts, filtrent le gaz à effet de
serre.
116 Le Potentiel, (2010), « Ressources oubliées
»; Le Poteniel ; N° 4849 du 13 février 2010 ; P.2
117 Sekana, J. (2009) ; op.cit. ; P. 25
Tout en reconnaissant la légitimité et le
bien-fondé de cette démarche, nous considérons que la
réflexion y relative devrait être davantage approfondie en ce qui
concerne les modalités d'imposition et de recouvrement d'une telle taxe
à l'échelle internationale.
La promotion du civisme fiscal par une éducation
populaire tirant ses arguments des réalisations socio-économiques
palpables et convaincantes peut sensiblement contribuer à la
réduction des contre-performances dues à la fraude et à
l'évasion fiscales.
Pour réduire progressivement la dépendance
budgétaire vis-à-vis de l'Extérieur et ce, pour des
raisons faciles à deviner, l'augmentation des recettes à
caractère national de l'Etat, la remise d'une bonne partie de la dette
publique et la montée en puissance de la fiscalité provinciale et
locale s'avèrent indispensables.
Qu'à cela ne tienne, la gestion des ressources doit
être également améliorée pour garantir davantage la
soutenabilité budgétaire de la décentralisation.
2.2.2.2. Amélioration de la gestion des ressources
mobilisées
La réforme de la dépense publique ainsi que le
renforcement conséquent des capacités de ressources humaines
constituent des stratégies à même de contribuer à
l'amélioration de la gestion des ressources financières.
Il importe que la structure de la dépense publique
traduise un nouveau train de vie de l'Etat qui soit dominé par l'esprit
de la décentralisation et la ferme volonté de construire un Etat
moderne au service de ses citoyens. Aussi, conseillons-nous la révision
à la baisse des déficits publics par la suppression de toute
dépense injustifiée et des avantages exorbitants (budget base
zéro) pour favoriser les transferts destinés aux provinces
et ETD ainsi que les investissements publics à même de tirer
durablement la croissance économique.
En effet, il est inconcevable qu'à l'aube du
Cinquantenaire de l'Indépendance et en plein 3ème
Millénaire, la majeure partie du territoire national de la RDC, soit
sans infrastructures routières fiables ni sources d'énergie
électrique à usage industriel.
Il importe que ces dernières respectent la chaîne
de la dépense, produisent régulièrement des états
de suivi budgétaire et organisent des conseils des adjudications pour la
passation des marchés publics118.
Car, les provinces et ETD sont sensées manipuler les
50% des recettes à caractère national (40% de rétrocession
+ 10% de péréquation) alors qu'elles courent, du fait de leur
multiplicité119, le risque de voir leurs ressources
s'émietter et se diluer dans des dépenses improductives. C'est
pour réduire un tel risque et éviter les coûts et
conséquences fâcheuses qu'il peut entrainer, que les provinces et
leurs entités inférieures devraient organiser leur destin commun
dans le cadre d'un plan de développement provincial offrant des
opportunités de réalisation des projets inter-entités
à effets induits mais ce, sans compromettre l'esprit de
compétitivité et d'émulation.
Les provinces et ETD ont intérêt à
être compétitives, étant donné que seules les plus
performantes d'entre elles pourront être à même d'attirer le
plus grand nombre possible d'investisseurs à l'intérieur de leurs
limites géographiques respectives et de s'attirer les faveurs des
institutions de financement et/ou de la coopération
décentralisée. Dans le même ordre d'idées, les
élus locaux ont intérêt à être efficaces pour
bénéficier, le moment venu, du renouvellement de confiance de la
part de leur base électorale.
Par ailleurs, la montée en puissance des finances
provinciales et locales ainsi que la nécessaire adoption de nouvelles
procédures et méthodes de travail, exigent l'adaptation et le
renforcement conséquents des capacités des ressources humaines
à tous les niveaux et ce, par des ateliers de formation, des missions
d'études et/d'échange d'expériences, etc.
Néanmoins, cette mise à niveau des ressources
humaines, qui se veut régulière, devra, pour être efficace,
tenir compte des spécificités de chaque entité.
L'enlisement de la mise en oeuvre de la
décentralisation financière en RDC ayant été
décortiqué et diagnostiqué, quelques propositions de
redressement ayant été formulées, le tout dans les limites
bien comprises de nos capacités et moyens de recherche, nous pensons que
le moment est venu de conclure notre modeste travail.
118 Mabi, M. (2006), op.cit. , PP. 113-123
119 Kalume Numbi, D. (2007), op.cit.
CONCLUSION
La question principale de notre étude était de
savoir comment dégager la mise en oeuvre de la décentralisation
financière en RDC des entraves à son efficacité.
Pour ce faire, il nous fallait trouver des éléments
de réponse aux questions secondaires suivantes :
1°-En quoi ces entraves consisteraient-elles ?
2°-Quelles stratégies faudra-t-il adopter pour les
contourner et rendre la décentralisation financière plus à
même d'atteindre ses objectifs ?
En guise de réponse provisoire à ces
préoccupations, nous avions considéré, comme principaux
goulots d'étranglement à la mise en oeuvre réussie de la
décentralisation financière en RDC, d'une part le non-respect
chronique des textes de base et des procédures en la matière et,
d'autre part, les faibles capacités de mobilisation et de gestion des
ressources budgétaires tant au niveau national, en provinces que dans
les ETD.
Nous avions également envisagé de proposer,
comme remèdes à ces différents maux, le changement de
comportement du pouvoir central, des provinces et des ETD dans le sens du
respect des règles et principes en vigueur, d'un côté et,
de l'autre, le renforcement de leurs capacités de mobilisation et de
gestion des ressources budgétaires.
Pour vérifier ces différentes hypothèses,
nous avons, dans le développement de l'objet de notre travail,
montré comment la décentralisation en général et la
décentralisation financière, en particulier, sont
instituées et organisées en RDC au cours de la période
d'analyse, soit de 1982 à 2009. Nous avons, à cet égard,
identifié les compétences, les ressources et les missions
reconnues par les textes légaux et réglementaires aux
différents niveaux du pouvoir d'Etat (Pouvoir Central, provinces et
ETD).
Par la suite, nous avons, à la lumière de ce
cadre de référence, analysé la manière dont le
secteur financier du pouvoir central et des provinces et ETD était
conduit. Nous avons cherché à savoir d'où venaient
l'enlisement et l'inefficacité de la mise en oeuvre de la
décentralisation financière en RDC. Les goulots
d'étranglement alors identifiés en exploitant les données
vérifiables en notre possession, nous avons pu proposer, en connaissance
de cause, quelques voies à emprunter pour y remédier.
Cet exercice nous a permis d'aboutir aux résultats que
nous nous empressons de présenter cidessous.
En général, il ressort clairement de notre travail
que toutes nos hypothèses ont été vérifiées.
Dans bien de cas, elles ont été significativement enrichies.
L'hypothèse du non-respect chronique des textes de base
et des procédures en vigueur a été vérifiée
en référence à quelques faits et phénomènes
majeurs ayant marqué le processus décentralisateur au cours de la
période d'analyse.
Il s'agit, notamment, de la mise en place incomplète de
l'ossature juridique et institutionnelle de la décentralisation ainsi
que du déficit de solidarité financière entre l'Etat
central et les provinces et, entre les provinces et les entités
territoriales décentralisées.
En effet, nonobstant la volonté politique clairement
exprimée à travers les principaux textes fondateurs de la
décentralisation, à savoir les lois « Vunduawe » de
1982, la Constitution de 2006 ainsi que les lois de décentralisation de
2008, le caractère incomplet de l'exécution juridique et
institutionnelle de la décentralisation en RDC se manifeste par la
non-exécution du découpage territorial, lequel fixerait les
limites des nouvelles provinces et ETD; la nonexécution de la
décentralisation sectorielle, laquelle assurerait le transfert officiel
des compétences et responsabilités à ces dernières;
et, la non-organisation des élections locales municipales et urbaines,
lesquelles garantiraient l'exercice démocratique du pouvoir d'Etat
à la base.
Le déficit de solidarité financière,
quant à lui, s'explique par la non-actualisation de la
législation financière ; l'indiscipline budgétaire ; un
très faible niveau de rétrocession des recettes à
caractère national reconnues aux provinces par rapport au niveau
prévu dans la Constitution, soit en moyenne 10,5% en 2008 au lieu de 40%
; ainsi que par l'absence de péréquation alors que le
déséquilibre économique interprovincial est tel que la
tension extrême entre les recettes des provinces est de l'ordre 1
à 8,5.
Ce premier résultat entraîne naturellement, comme
implication de politique économique, le rétablissement de
l'équilibre financier des provinces et entités territoriales
décentralisées par la consolidation du cadre juridique et
institutionnel de la décentralisation et de la vie financière
nationale et provinciale, ainsi que par l'application effective des principaux
mécanismes de financement de la décentralisation, à savoir
la rétrocession et la péréquation.
Néanmoins, la présente étude a eu
à révéler que le contexte économique de la RDC
étant caractérisé par un déséquilibre
prononcé entre le potentiel des différentes provinces, toute
exécution automatique de la rétrocession par la retenue
à la source de 40% des recettes à caractère national
pourrait s'avérer néfaste dans la mesure où elle peut
davantage creuser les écarts entre ces dernières. Cette nouvelle
donne souligne le rôle déterminant que doivent jouer la
péréquation ainsi que le consensus dégagé lors du
Forum National sur la Décentralisation pour corriger progressivement les
disparités.
L'implication de politique économique que suscite ce
résultat inattendu consisterait à coupler la rétrocession
et avec la péréquation de 10% des recettes à
caractère national et avec l'application de la formule consensuelle
dudit Forum.
L'hypothèse des faiblesses fréquentes et
persistantes de capacité du pouvoir d'Etat dans la mobilisation et la
gestion des ressources budgétaires, a été principalement
vérifiée par l'insuffisance des ressources budgétaires des
provinces et ETD par rapport à la hauteur des tâches et
responsabilités de ces dernières.
Cette insuffisance a été
appréhendée à travers l'inadéquation insoutenable
entre le potentiel fiscal des richesses du sol et du sous-sol et les maigres
ressources budgétaires extraites pour le compte des pouvoirs publics ;
la chute de la production minière telle que symbolisée par le
déclin de la Gécamines, la plus grande entreprise minière
du pays, qui a vu sa production de cuivre passer de 465000 tonnes en 1990
à 19000 tonnes en 2002 ; et, par la conclusion
inconsidérée des contrats dits « léonins » dans
le secteur minier entre 1997 et 2006.
La pauvreté fiscale globale traduite par un
PIB/habitant de 200$us en 2009, soit plus de vingt fois moins que celui du
congolais du Congo-Brazzaville (4250$us), un taux de décentralisation
fiscale de 6,84% seulement projeté pour 2010, un stock de la dette
extérieure représentant 700% des recettes budgétaires et
90% du PIB, une administration fiscale non performante ainsi que la
non-viabilité financière de la majorité des provinces
(80,95%), constituent autant d'éléments concluants qui ont
également permis d'établir ladite insuffisance de ressources
budgétaires.
La même hypothèse de faiblesses en termes de
capacité de mobilisation et de gestion des ressources
budgétaires, a été davantage vérifiée en
référence à l'extraversion prononcée du financement
budgétaire de l'Etat, avec un de taux de financement extérieur du
budget de 42,14% en moyenne pour la période de 2005 à 2010 ;
à la décapitalisation des entreprises du portefeuille de l'Etat ;
à des dépassements budgétaires extravagants au sommet de
l'Etat, soit 115% de moyenne en 2006 dans une fourchette de 36 à 242%
des dépenses autorisées; à quelques cas notables de
détournement intempestif des deniers publics ; et, à l'absence
relative de contrôle des agents d'exécution du budget.
En mettant en relief l'interdépendance entre la double
question de mobilisation et d'allocation des ressources budgétaires au
niveau national et celle de la viabilité financière des provinces
et ETD, ce modeste résultat suggère que la recherche de
l'efficacité économique de l'Etat à partir des provinces
et ETD serve de dénominateur commun à la politique
financière de ces dernières et celle de l'Etat.
Dans cette perspective, les préoccupations sans cesse
exprimées par la population au sujet de la visibilité fiscale des
secteurs productifs prépondérants, comme celui de l'industrie
extractive (minerais, pétrole, bois), cesseront d'être un tabou
pour s'inscrire de façon légitime au centre des
thématiques financières prioritaires et transversales ouvertes
à toutes les parties prenantes (pouvoir central, provinces, ETD,
Société Civile et partenaires extérieurs).
Les hypothèses relatives aux voies et moyens de
redressement ont été, quant à elles, validées et
intégrées dans le cadre d'une approche transversale s'appuyant
sur deux leviers du redressement de la décentralisation
financière, à savoir : l'action sur les acteurs en vue du
changement des mentalités, d'une part, et l'action pour la
soutenabilité budgétaire de la décentralisation, d'autre
part.
Ainsi donc, l'hypothèse du changement de comportement
du pouvoir central, des provinces et des ETD dans le sens du respect des
règles et principes en vigueur s'en trouve validée et
jugée fondamentale à travers ladite approche.
En effet, notre travail de recherche nous a permis de
comprendre, en référence à l'expérience
socio-politique propre à la RDC et aux enjeux de l'heure que sont la
démocratie et le développement équilibré et
harmonieux de toute la nation, que l'un des problèmes majeurs de la mise
en oeuvre de la décentralisation financière demeure celui de
l'état d'esprit des différents acteurs et décideurs
face à la réforme décentralisatrice.
La justesse de ce résultat est particulièrement
illustrée par la stratégie de communication sociale
proposée en octobre 2007 par le Forum National sur la
Décentralisation et mise en oeuvre depuis le début de
l'année 2009 par le Ministère de la Décentralisation.
Aussi, nos recherches ont-elles enrichi cette stratégie
en proposant d'y intégrer, comme thèmes transversaux à la
décentralisation, la sécurité, la bonne gouvernance et la
culture de restitution normée de l'information financière.
Dans le même registre, nous avons proposé que le
partenariat public-privé et la coopération internationale soient
également insérés dans la thématique de la campagne
de sensibilisation des acteurs de la décentralisation.
Par ailleurs, en traitant les rapports
électeur-gouvernant et politicien-fonctionnaire comme
des relations de type « principal - agent » en
théorie de l'agence, notre travail a permis de justifier la
même hypothèse en proposant que des mesures de surveillance et
d'incitation des décideurs publics et des fonctionnaires soient rendues
opérationnelles pour garantir que ces derniers évolueront dans le
sens de l'intérêt général là où ils
sont, par nature, maximisateurs de leur propre profit.
Ce résultat implique que la stratégie de
communication sociale pour le changement de comportement, bien
qu'étant transversale, soit accompagnée à la fois par des
mesures de limitation du comportement opportuniste des acteurs de la
décentralisation ainsi que par celles d'orientation de ces derniers dans
le sens de la maximisation du bien-être collectif.
L'hypothèse du renforcement des capacités
financières du pouvoir central et des provinces a été,
quant à elle, largement validée par les multiples faiblesses
identifiées en matière de mobilisation et d'utilisation des
ressources budgétaires tant au niveau national qu'à celui des
provinces et ETD.
Pour y remédier, notre recherche a proposé les
stratégies suivantes, à savoir : la poursuite de la mise en place
de l'ossature juridique et institutionnelle de la décentralisation ;
l'actualisation de la législation financière et la formalisation
conséquente du consensus dégagé lors du Forum National sur
la Décentralisation en ce qui concerne les modalités de
répartition équitable des recettes à caractère
national ; l'effectivité du jeu de péréquation ; la
mobilisation des ressources budgétaires à la hauteur des
tâches et responsabilités des autorités élues et des
attentes de la population ; la réduction progressive de la
dépendance vis-à-vis de l'extérieur dans le cadre du
financement budgétaire de l'Etat ; la réforme de la
dépense à tous les niveaux pour assurer au coût le plus bas
possible les transferts destinés aux provinces et ETD, le fonctionnement
de ces dernières ainsi que les investissements publics à
même de tirer durablement la croissance économique ; et, le
renforcement conséquent des capacités des ressources humaines. Ce
résultat a pour implication, la nécessité pour la
politique budgétaire de la décentralisation de s'appuyer sur des
indicateurs de performance construits à partir des solutions
stratégiques adaptées aux réalités de terrain.
Cela étant, les limites de notre modeste réflexion
sont vite apparues, comme d'aucuns pourraient s'en apercevoir, lorsqu'il
fallait traiter de la vie financière des provinces et ETD.
La raison, nous semble-t-il, en est simple : il s'agit de
l'absence d'informations fiables et normées sur la gestion
budgétaire des provinces pour la période sous-revue. Il s'agit
aussi du manque de données crédibles sur la contribution de
chaque province au PIB, sur la structure du budget de l'Etat, ainsi que sur la
répartition sectorielle et territoriale tant du financement
extérieur que des investissements publics et leur impact respectif sur
les économies provinciales et locales.
De ce qui précède, les pistes de recherche qui
s'ouvrent à nous pour cette étude sont, au plan pratique, celles
d'une meilleure évaluation d'impact de la politique financière de
l'Etat en matière de décentralisation en RDC, grâce
à l'élargissement de la collecte et de l'analyse des
données aux transactions financières publiques, provinciales et
locales et ce, en tenant compte des évolutions cruciales qui s'annoncent
à l'horizon, notamment : l'atteinte du point d'achèvement de
l'Initiative PPTE en juin 2010, le découpage territorial, l'organisation
des élections locales, l'exécution du contrat de doublement des
recettes qui lie depuis belle lurette le Ministère des Finances aux
régies financières, la poursuite de la fameuse
revisitation des contrats léonins dans le secteur minier, et
pourquoi pas l'instauration, on en parle déjà au
Parlement, de la TVA en RDC.
Cet approfondissement de notre recherche pourrait nous
permettre, au plan théorique, de débattre de la
méthodologie d'intégration de l'Etat dont devrait s'inspirer la
RDC, comme fondement de son intervention économique, pour assurer le
financement efficace de la décentralisation, sachant d'une part, que ce
pays post-conflit, fragile et pauvre a besoin d'un pouvoir d'Etat actif et des
moyens colossaux pour sa reconstruction et, d'autre part, que les principes et
dogmes néo-classiques de neutralisation économique de l'Etat qui
ont contribué à la remise en cause du keynésianisme et de
l'Etat-providence en faveur de l'orientation vers la logique du marché,
sont encore dominants aujourd'hui et servent de sous-bassement aux politiques
d'appui extérieur conduites par les partenaires traditionnels.
Dans un tel cadre d'analyse, nous pourrons, entre autres
thématiques, être en mesure d'émettre un avis critique et
motivé aussi bien sur la pertinence de la formule des «contrats
chinois» (minerais contre infrastructures) actuellement mise en
vedette dans le cadre du programme dit des « Cinq chantiers de la
République » que sur l'intérêt qu'il y a ou non
à améliorer et renforcer le cadre de coopération en
vigueur avec les partenaires traditionnels (prêts conditionnés
par la capacité d'absorption déterminée selon les
critères du bailleur ; initiative PPTE ; etc.), pour assurer le
financement public extérieur des provinces et ETD à un coût
qui soit le plus bas possible pour les générations futures.
En attendant d'engager notre recherche dans une trajectoire,
nous nous permettons de noter, au stade actuel de nos investigations, que la
mise en oeuvre fructueuse de la décentralisation financière en
RDC demeure largement tributaire du changement des mentalités dans le
chef des acteurs, lequel changement devrait se traduire dans la pratique, ainsi
que nous l'avons recommandé, par la complétude et l'application
sans faille du cadre juridique et institutionnel ainsi que par la
soutenabilité budgétaire de la réforme
décentralisatrice dans son ensemble.
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3. Kalume Numbi, D. (2007) ; « Suivi et
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Communication ; Atelier de formation de formateurs sur la sensibilisation
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Noumba » ;Le Poteniel ; N°4872 ; 12 mars 2010 ; P. 4
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www.mediacongo.net
18. Programme d'Appui à la Redevabilité du Secteur
Sécuritaire et Réforme de la Police (2010) ; Avis de recrutement
;
www.mediacongo.net
19. Sekana, J. (2009) ; « La RDC peut financer son
économie rien qu'en maximisant ses recettes fiscales » ;
Congo-Fiscalité Magazine ; N° 004 ; année 2009 ; PP
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