1.3) REVUE DE LITTERATURE ET
METHOLOGIE
1.3.1) Une revue de
littérature
La lutte contre la pauvreté est l'une des
préoccupations des économistes. Depuis l'application des
Programmes d'Ajustement structurel (PAS) et leurs échecs, lutter contre
la pauvreté est devenu la priorité pour les Institutions de
Bretton Woods. Cette revue de littérature s'attachera à
présenter les concepts de la politique budgétaire et son
rôle dans la réduction de la pauvreté, ensuite montrer la
pauvreté sous toutes ses formes, et les stratégies pour la
combattre.
La politique budgétaire constitue avec la politique
monétaire, les principaux leviers de la politique économique. La
politique budgétaire consiste à utiliser certains instruments
tels que les dépenses publiques, l'endettement public et les
prélèvements fiscaux pour influer sur la conjoncture
économique. Elle s'appuie sur l'élaboration du budget de l'Etat
qui n'est autre que la prévision de l'ensemble des recettes et
dépenses de l'Etat pour l'année. De cette présentation
succincte de la politique budgétaire, il ressort deux notions
principales et importantes, que sont les recettes et les dépenses
publiques. La règle veut que les recettes et les dépenses
s'égalisent afin que le budget soit équilibré, un
excédent ou un déficit selon les courants de pensée est
applaudi ou décrié. Ces différentes conceptions ont
donné naissance à une politique budgétaire qui utilise le
solde budgétaire comme un instrument de politique économique en
ce sens qu'il donne un reflet de l'activité économique. Ces
différentes conceptions ont donné quatre approches de la
politique budgétaire :
- le budget cyclique (G. MYRDAL) : le solde
budgétaire déficitaire est souhaité s'il est
étalé sur plusieurs années afin que les années
excédentaires comblent les années déficitaires ;
- le budget compensatoire (A. LERNER) : le budget doit
compenser un écart (permanent), entre l'épargne et
l'investissement d'une insuffisance chronique de l'investissement
privé ;
- la politique budgétaire anticyclique utilise le
rôle régulateur du budget et se repose sur le jeu des
stabilisateurs automatiques publics en vue d'agir sur l'activité
économique. Cette politique tend à se transformer en une
politique conjoncturelle discrétionnaire ;
- l'approche Keynésienne attribue un rôle au
budget. Le solde budgétaire doit servir à la politique
économique et selon les orientations politiques du moment, le budget
doit relancer l'économie (budget en déficit) et budget
d'austérité pour freiner l'activité économique.
Jusqu'à la crise de 1930, la gestion des finances
publiques a eu pour principal objectif d'assurer le financement des services
publics. Le volume des dépenses de l'Etat n'était
considéré comme une variable susceptible d'influencer le niveau
d'activité de l'économie. L'analyse de l'économiste
britannique J. M. KEYNES a modifié cette conception soulignant l'impact
de la politique budgétaire sur le niveau d'activité
économique d'un pays.
Les recettes publiques proviennent de la politique fiscale. La
fonction de la fiscalité est d'assurer le financement de la production
des services traditionnels. Elle sert également à la
redistribution du revenu. Elle est utilisée pour réduire les
disparités sociales grâce au recours à la
progressivité des taux d'imposition, à divers abattements et
déductions pour les charges personnelles et familiales. Ainsi, l'Etat
doit utiliser son pouvoir de taxation, de dépense et d'endettement pour
réaliser une allocation des ressources.
Les recettes publiques financent les dépenses de
l'Etat, qui sont les dépenses du secteur public engagées en vue
d'un intérêt public. Les dépenses publiques sont les
dépenses effectuées par l'Etat pour son fonctionnement et celles
orientées vers les secteurs prioritaires (sociaux,
sécurité) pour l'amélioration du bien-être des
populations.
De JANVRY et al. (1991), D et L. DEMERY (1992), LIPTON et
RAVALTON (1993) et AHO et al. (1997) ont tous montré l'impact social des
dépenses publiques. Ils ont montré que les dépenses
publiques permettent d'accroître la productivité et les profits
des facteurs et par conséquent d'augmenter les revenus des
ménages. Il ne faut surtout pas omettre de préciser que la
dépense publique dépend de la politique budgétaire. Le
budget devient donc un instrument d'exécution de la politique
gouvernementale, principalement dans le domaine économique et social,
car l'Etat par l'intermédiaire de son budget essaie de réduire
l'inégalité de richesse, mais aussi de régulariser la
croissance économique. La liaison ainsi ressortie permet de voir que la
politique budgétaire a son rôle dans la lutte contre la
pauvreté. Les dépenses publiques jouent un rôle majeur dans
la lutte contre la pauvreté. Les effets de la politique
budgétaire peuvent être appréhendés à travers
ce schéma ci-dessous.
Schéma 1 : Effets de la politique
budgétaire sur les ménages
Politique budgétaire
Niveau
Macroéconomique
Infrastructure économique
Dépenses sociales
Marché des biens et services
Niveau
Mésoéconomique
Marché des facteurs
Capital humain
Revenu des ménages
Niveau
microéconomique
Consommation
Accumulation des actifs produits
Source : D. et L. DEMERY (1992) et AHO et al.
(1997)
En effet, ces dépenses publiques sont, avant tout,
insérées dans une politique budgétaire qui a des effets
sur les conditions de vie des ménages, lesquelles conditions de vie
déterminent la catégorie sociale des ménages et les
classent pour la grande majorité chez les pauvres.
Complexe dans ses déterminants et dans sa mesure, la
pauvreté revêt de multiples facettes (économique,
politique, sociale, culturelle, etc.) d'où les difficultés d'une
définition standard satisfaisante. La pauvreté humaine recouvre
l'idée d'insuffisance ou de manque bien plus divers que l'insuffisance
de revenu.
La pauvreté se définit comme étant une
insuffisance de ressources, matérielles ou immatérielles,
nécessaires à la satisfaction des besoins essentiels d'un
ménage ou d'individu. La plus connue est la pauvreté
monétaire qui est l'absence ou l'insuffisance de revenu monétaire
ou de moyens de communication. Il en découle donc deux notions :
pauvreté absolue et pauvreté relative.
La pauvreté absolue renvoie à un seuil de
pauvreté exprimé en valeur absolue et correspond à la
non-satisfaction des besoins minimaux, alors qu'on parle de pauvreté
relative pour des personnes qui sont bien loties que la majorité des
autres membres de la même communauté. Par rapport au revenu, une
personne se trouve dans la pauvreté absolue si son revenu est en
deçà d'un seuil défini, mais elle est relativement pauvre
si elle appartient à un groupe à faible revenu (AHOYO Adjovi,
2002). Un ménage ou un individu est frappé d'ultra
pauvreté lorsqu'il consacre plus de 80% de ses revenus à l'achat
de produits alimentaires pour sa consommation (PNUD, 1997).
D'un point de vue économique, la pauvreté se
traduit par une faible dotation en capital physique, humain et financier,
l'exclusion d'une frange importante des forces de travail de la nation, une
productivité du travail réduite, une déperdition des
capacités de production. L'inégalité ou l'absence
d'accès aux connaissances technologiques nécessaires à
l'utilisation de ce capital du choix individuel des gens, quant à
l'allocation du temps entre le travail et le loisir, entre la consommation et
l'épargne et enfin l'inégalité des chances de s'en sortir
(Z. MAÏGA, 1999).
Le combat de la pauvreté s'est engagé depuis
longtemps avec d'illustres économistes et des institutions
internationales. Des plans et stratégies de lutte ont été
créés, certains des points convergent tandis d'autres se
contredisent.
Selon R. MALTHUS, secourir les pauvres, c'est multiplier la
pauvreté. En effet, pour lui, la réduction de la pauvreté
est difficile puisque les hommes augmentent de façon
géométrique tandis que la progression des ressources suit un
rythme arithmétique. Par conséquent, les lois sur les pauvres et
l'assistance sont condamnées à un échec car elles
favorisent la multiplication des plus pauvres. Il reconnaîtra plus tard
que le progrès technique s'accompagne de revenus élevés.
Sa stratégie de lutte est la limitation des naissances. Toutefois, il
défend l'idée de l'école gratuite et obligatoire car
les lumières apportées au peuple sont la meilleure façon
de lutter contre la pauvreté.
A. SMITH a fait une importante contribution en expliquant la
relation entre croissance et la pauvreté. Il prétend que celle-ci
pourrait se résorber en adoptant des politiques appropriées et
en favorisant la croissance économique. Il pense que l'économie
moderne a besoin de division de travail, mais qu'elle risque de diminuer les
opportunités d'emploi des travailleurs pauvres et d'aggraver la
pauvreté. Pour éviter cela, il a suggéré à
l'Etat de fournir des moyens permettant d'adapter la main d'oeuvre au
marché du travail (AHO et Al, 1997).
D. RICARDO a pour sa part soutenu que le progrès
technique s'accompagne de salaires élevés et d'un
déplacement de la main d'oeuvre de l'agriculture vers d'autres secteurs
de l'économie, permettant de ce fait l'amélioration des
conditions de vie des populations pauvres.
Pour SAMUELSON, les politiques de lutte contre la
pauvreté s'articulent autour de deux points : l'Etat providence
(pour assurer un niveau de vie minimum) et les programmes de garantie des
revenus.
La plupart des débats sur la lutte contre la
pauvreté mettaient l'accent sur le capital humain. SMITH
considérait que de meilleurs soins permettent d'élever et la
capacité de travail et le niveau des salaires qui améliorait la
condition de vies des travailleurs. Les classiques préconisent des
subventions à l'éducation de base qui permettent une meilleure
formation et qui font croître la productivité et les initiatives
privées.
A partir des années 40, les stratégies de lutte
contre la pauvreté ont pris une nouvelle tournure tout en ayant des
similarités avec les anciennes. Ces politiques
préconisaient nécessaire de faire jouer à l'Etat un
rôle dans la redistribution des richesses entre les agents
économiques. Cette fonction de l'Etat s'est traduite par l'apparition du
concept d'Etat-providence.
Dans les années 60, les actions de lutte contre la
pauvreté portaient entre autres sur les réformes
financières, l'éducation de masse, l'amélioration des
soins de santé. A cette époque, on accordait peu d'attention
à la croissance agricole comme moyen de lutte contre la pauvreté.
Jusqu'au milieu des années 70, les objectifs des programmes de lutte
contre la pauvreté tournaient autour du concept de redistribution des
richesses.
A NAÏROBI en 1973, il a été demandé
de revoir les priorités en matière d'aide au
développement. L'aide au développement doit maintenant se tourner
vers les projets de développement rural pour aider les plus
démunis. Ces interventions doivent cibler l'éducation, la
santé, etc.
Cette orientation stratégique opérée par
les Institutions de Bretton Woods est le fruit d'une réflexion en
profondeur dont l'origine tient à l'aggravation de la pauvreté
dans de nombreux pays en développement dans un contexte marqué
par l'échec des Programme d'Ajustement Structurel remettant en cause la
légitimité de ces institutions. Face aux critiques, un saut
qualitatif a été fait pour mieux lutter contre la
pauvreté. De cette réorientation découle deux courants de
pensée qui ont leurs forces et faiblesses.
La première de ces approches est celle de la Banque
Mondiale, qui est l'approche de la croissance du revenu. Cette approche
suggère de se concentrer sur l'augmentation des revenus et de laisser
les individus choisir librement l'allocation optimale des ressources selon
leurs préférences. Elle est fondée sur le
développement humain (DH), la promotion de la croissance et la mise en
place de filets de sécurité. L'investissement et le filet de
sécurité sont au centre de la lutte car ils permettent
d'atténuer les conséquences les plus graves de la
pauvreté. La croissance est la clé de voûte d'une politique
de lutte contre la pauvreté. La croissance passe par l'accès des
pauvres aux facteurs de production à des conditions simples,
l'accroissement des facteurs de l'agriculture et du secteur informel. La limite
de cette approche est que l'augmentation du revenu des ménages ne se
traduit pas nécessairement par une amélioration des conditions
de vie et par un meilleur accès aux services de base.
La seconde approche, est celle du PNUD, qui est une approche
en terme de besoins essentiels qui privilégient la fourniture des
services sociaux de base. Elle se fonde sur le développement humain qui
est un processus qui conduit à élargir la gamme des
possibilités d'épanouissement qui s'offrent à chacun dans
la société. Trois possibilités revêtent une
importance capitale pour la réalisation de nombreuses autres, à
savoir : vivre longtemps et en bonne santé, acquérir un
savoir et avoir accès aux services nécessaires pour jouir d'un
niveau de vie convenable. L'indicateur du développement humain qui est
l'Indice du Développement Humain (IDH), est meilleur que les autres
indicateurs. Mais, il n'en demeure pas moins qu'il reste déficient et
imparfait puisqu'il ne capte pas la réalité et il ne prend pas en
compte certains éléments d'appréciation tels que le niveau
de démocratisation, la bonne gouvernance, etc. Cette approche a le
mérite de promouvoir l'accès des populations aux services sociaux
de base, mais ne tient pas compte des préférences de celles-ci.
Elle est aussi coûteuse à mettre en place.
Les deux approches précédemment abordées
(celles des Institutions de Bretton Woods) seront celles sur lesquelles notre
étude s'appuiera, les autres analyses développées plus
haut viendront en soutien à notre étude.
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