INTRODUCTION
« Le récidiviste est d'abord
apparu comme l'homme à éliminer, puis il est devenu un individu
dangereux pour la société qu'il fallait écarter le plus
longtemps possible. Plus récemment encore, grâce aux
progrès de la médecine, on s'est attaché à l'aspect
psychologique du problème »1(*).
Ces propos de Céline Jacques résument les
différents modes contemporains de traitement de la récidive. Le
terme traitement selon l'encyclopédie libre et collaborative
wilkitionary désigne une opération que l'on fait subir à
une chose ou à une personne, une manière d'agir envers quelqu'un,
de traiter un sujet, un ensemble de soins qu'exige un état
pathologique. Il est pour Pierre Couvrat, la façon de
se comporter à l'égard d'une personne et de mettre en oeuvre une
opération.2(*). Jean
Pinatel quant à lui, estime que « Traiter les délinquants,
c'est mettre en oeuvre une cure psycho-morale ayant pour but de remodeler leur
système de valeurs, dans les conditions de sécurité
exigées par leur dangerosité individuelle et s'efforcer
d'améliorer par un travail de rééducation leurs
possibilités d'adaptation sociale »3(*). Parmi les expressions utilisées en
corrélation avec le traitement, notamment, rééducation,
resocialisation et réinsertion, seule la dernière correspond le
mieux au sens du traitement car réinsérer dans la
société un délinquant, tel est le but du traitement
criminologique.
Selon l'étymologie, la récidive signifie
rechute, du latin recidere. En droit pénal, il ne s'agit pas d'une
simple rechute mais d'une rechute après une condamnation pénale
devenue définitive et se produisant dans un délai
déterminé. Est par exemple récidiviste au sens de
l'article 88 du code pénal camerounais, sauf en ce qui concerne les
peines perpétuelles, celui qui, après avoir été
condamné pour crime ou délit commet une nouvelle infraction
qualifiée crime ou délit dans un délai qui commence
à courir à compter de la date de la condamnation devenue
définitive et qui expire cinq ans après l'exécution de la
peine prononcée ou sa prescription. Est également
récidiviste, toujours selon cet article, celui qui, après avoir
été condamnée pour contravention, commet une nouvelle
contravention dans un délai qui commence à courir à
compter de la date de la condamnation devenue définitive et qui expire
douze mois après l'exécution de la peine prononcée ou sa
prescription.
La récidive désigne ainsi le fait d'un individu
qui a encouru une condamnation définitive à une peine pour une
certaine infraction et qui en commet une autre, soit de même nature
(récidive spéciale), soit de nature différente
(récidive générale). Cette notion,
particulièrement étudiée par les positivistes, renvoie
à la dangerosité des individus, ainsi qu'à la
délinquance d'habitude. Elle peut être criminelle,
délictuelle ou contraventionnelle. Pour Bouzat et Pinatel 4(*)« Le
concept de récidivisme englobe : la récidive naturelle ou
générale qui est la délinquance à
répétition intervenant en dehors de toute condamnation, la
récidive sociale qui suppose une condamnation antérieure, la
récidive légale telle qu'elle est définie par le code
(...), la récidive pénitentiaire définie par le
séjour antérieur en prison et la récidive persistante ou
multirécidiviste ». Cependant, cette notion de récidive
mérite d'être nettement distinguée des notions voisines
comme la réitération d'infractions et le concours réel
d'infractions.
Il y a réitération d'infractions pénales
lorsqu'une personne physique ou morale déjà condamnée
définitivement pour un crime ou un délit commet une nouvelle
infraction qui ne répond pas aux conditions de la récidive
légale. La première infraction doit être un crime ou un
délit. Comme pour la récidive, il faut que la première
infraction ait donné lieu à une condamnation définitive.
Si la première infraction n'a pas donné lieu à une
condamnation définitive, il y aura concours réel d'infractions.
Le juge usera alors de son libre pouvoir d'appréciation pour augmenter
le quantum de la peine, ou, inversement, pour le diminuer, voire pour prononcer
la confusion des peines, s'il l'estime nécessaire
La réitération n'intervient que lorsque les
conditions de la récidive ne sont pas remplies. Contrairement à
ce que laisse penser le terme
« réitération », il ne s'agit pas de la
commission d'une même infraction, ou d'une infraction du même
groupe d'infractions au regard de la récidive, mais de la commission de
n'importe quelle autre infraction hors les cas de récidive en cause,
c'est-à-dire de crime à crime, de crime à délit, de
délit à crime, ou de délit à délit.
Elle existe lors de la commission de n'importe quelle
infraction ne constituant pas le second terme d'un des cas de récidive,
ce qui recouvre, premièrement, les cas de commission d'une contravention
après une condamnation pour délit ou pour crime, mais le juge n'a
ici aucun pouvoir d'appréciation pour fixer le quantum de la peine. La
réitération existe également lorsque la récidive
est temporaire ou spéciale et que la seconde infraction ne réunit
pas les conditions pour constituer le second terme d'un cas de récidive.
Si les conditions de la réitération sont réunies, le juge
ne peut plus user de son pouvoir de libre appréciation de la peine
à infliger au délinquant. L'état de
réitération a également pour effet d'exclure la confusion
des peines et le cumul plafonné des peines pour les infractions en
concours.
Il y a concours d'infractions lorsqu'il existe plusieurs
infractions pénales distinctes commises par le même auteur,
successivement ou simultanément, liées ou non entre elles et non
séparées par une condamnation pénale définitive.
C'est dire que le concours d'infractions encore appelé cumul réel
d'infractions suppose la commission d'une infraction par une personne avant sa
condamnation définitive pour une autre infraction. Cette situation peut
résulter soit du fait que le délinquant a pu se soustraire aux
poursuites, soit qu'il a commis des infractions successives dans un
délai bref et n'a pas pu être jugé. En d'autres termes, le
concours d'infractions intervient lorsqu'une infraction est commise par une
personne avant que celle-ci ait été définitivement
condamnée pour une autre infraction. On parle également de
concours d'infractions lorsqu'un individu a commis un ou plusieurs actes
différents avant que le premier ait donné lieu à une
condamnation définitive. Peu importe que ces actes aient
été commis quasi-simultanément ou à des moments
différents. Il peut aussi avoir concours d'infractions lorsqu'un
individu commet un seul acte visé par plusieurs textes. Il s'agit d'un
acte unique qui tombe sous le coup de deux textes différents.
La récidive intéresse
l'efficacité du système pénal dans son ensemble, et
singulièrement la capacité du traitement pénal à
prévenir une rechute des individus déjà condamnés.
Elle apparaît ainsi comme une manière d'imposer à ceux qui
ont commis une infraction d'une certaine gravité une conduite
irréprochable.
L'histoire du droit pénal est en grande partie celle
de la répression de la récidive. Il faut relever que sous
l'Ancien Régime français les sanctions applicables aux
récidivistes étaient cruelles mais à l'époque,
elles ne se distinguaient pas fondamentalement des cruautés ordinaires.
Les anciennes coutumes en vigueur avant les grandes ordonnances royales,
prévoyaient par exemple en matière de vol à la
première fois, on n'encourait qu'une amende et le fouet. A la
deuxième condamnation, on pratiquait l'essorillement
c'est-à-dire qu'on coupait une oreille au délinquant. A la
troisième fois, il n'y avait pas de rémission: Le voleur
était définitivement essorillé puis pendu. Les coutumes
variaient évidemment beaucoup d'une région à l'autre mais
la sévérité était partout, même si elle
prenait des formes légèrement différentes selon le sadisme
des législateurs et des praticiens.
En matière de blasphème, une ordonnance de Louis
XII de 1511 prévoyait 7 échelons de punition: une amende
modérée, une amende doublée, triplée,
quadruplée, l'emprisonnement en cas d'insolvabilité. A la
cinquième condamnation c'était le carcan. La sixième fois,
la lèvre supérieure était coupée «de sorte que
les dents apparaissent». La huitième fois, c'était la
lèvre inférieure et enfin la dernière fois, on
perçait la langue. Pour la plupart des infractions, en
réalité, la peine de mort était prononcée
très rapidement, dès la première récidive.
Les ordonnances royales ont renforcé et
systématisé cette sévérité pour les
récidivistes. Les prévôts des maréchaux avaient la
charge de juger ces derniers. En 1724 une déclaration royale sur le vol
prévoyant qu'au premier vol une lettre «V» (comme vol) devait
être marquée sur l'épaule est publiée. Lorsqu' une
nouvelle infraction était ensuite commise (vol ou autre), le
délinquant était envoyé aux galères ou en maison de
force pour les femmes.
Une loi du 23 floréal an X (13 mai 1801) avait
prévu que la lettre «R» soit marquée sur
l'épaule gauche des condamnés récidivistes de crime
à crime. « L'efficacité était nulle mais cette
stigmatisation apparente apaisait facilement l'opinion publique. La
flétrissure persistait mais la récidive aussi. Le détenu
restait une bête qu'on pouvait marquer comme faisant partie du
cheptel des êtres malfaisants, pour qu'on le repère
immédiatement ».5(*) Le code pénal français
de 1810 n'est cependant pas revenu sur cette mesure emblématique. Le
régime applicable à la récidive était lourd: le
code avait prévu une récidive criminelle et correctionnelle
perpétuelle.
La relégation demeurait la sanction la plus connue en
matière de lutte contre la récidive. Elle a été
introduite en France par une loi du 27 mai 1885 après de longs
débats. Elle avait pour objectif majeur d'éloigner le plus
longtemps possible les récidivistes de la métropole.
Déjà dans le premier et éphémère code
pénal de 1791, la déportation des criminels récidivistes
avait été prévue mais elle n'avait pu être
appliquée faute de moyens. Cette loi partait de l'idée que les
récidivistes étaient incorrigibles ou
irrécupérables et qu'il fallait les éliminer, ou du moins
les éloigner. Selon les théories positivistes de l'époque,
le délinquant était un microbe social qu'il fallait traiter. La
loi du 30 mai 1854 au début du Second Empire avait certes fermé
les bagnes mais les avait remplacés par l'exécution de travaux
forcés dans un territoire d'outre-mer, notamment en Nouvelle
Calédonie. Toutes ces mesures ont été adoptées sous
l'influence de la doctrine.
En effet, F.J Gall (1728-1828)6(*) s'est intéressé au cerveau humain,
notamment aux localisations cérébrales par la phrénologie
entendue comme la science qui étudie le crâne. Il a
découvert que l'homme avait des tendances et des penchants qui le
prédisposaient au crime en faisant une distinction entre le crime
résultant directement du penchant auquel celui-ci n'a pu
résister et celui dans lequel ce penchant fait défaut et dont les
seules circonstances de l'infraction ont entraîné la commission de
l'infraction déplorée. Dans le premier cas de figure,
estimait-il, la récidive était un risque à ne pas prendre
à la légère car sa possibilité de se
matérialiser était très élevée. Pour
protéger la société du récidiviste, il fallait
simplement soumettre celui-ci à une longue peine d'emprisonnement.
Cesare Lombroso (1835-1909)7(*), médecin de formation puis
professeur de psychiatrie clinique et d'anthropologie criminelle est une figure
de proue de l'école positiviste italienne. Il a élaboré
à partir de ses recherches sur l'anatomie des crânes de criminels,
la théorie dite de l'homme criminel ou du criminel né qui est un
être irrécupérable, une erreur de la nature vouée
à la disparition. Pour cet auteur, le délinquant est un homme en
voie de régression vers le stade atavique, c'est-à-dire un retour
en arrière jusqu'à un stade primitif. C'est un individu qui a
subi un arrêt dans l'évolution conduisant à ''
l'honnête homme' 'et dont il faut mettre hors d'état de nuire.
Enrico Ferri (1856-1928)8(*), professeur de droit pénal et homme politique
italien a développé le concept de la sociologie criminelle qu'il
a fondé sur la distinction entre le crime comme fait individuel et le
crime comme phénomène social. A partir des facteurs
anthropologiques, physiques ou sociaux, il a mis sur pied cinq
catégories de criminels : les criminels nés, les criminels
fous, les criminels d'habitude, les criminels d'occasion et les criminels
passionnels. Pour cet auteur, les récidivistes sont des criminels
d'habitude c'est-à-dire ceux qui sont ancrés dans un processus de
criminalité permanente en raison de différents facteurs sociaux
comme le chômage, la précarité, la misère. Par ses
recherches, il a remis en cause les fondements de la responsabilité
pénale en écartant l'idée d'un libre arbitre, d'une faute
pour privilégier celle du risque qui pèse sur la
société. Les peines selon ce dernier doivent disparaître
pour laisser place à des mesures de défense sociale, notamment
des substituts pénaux visant purement et simplement l'élimination
du délinquant car «L'armée du crime est faite
essentiellement de récidivistes ».9(*)
Les questions que pose la récidive sont nombreuses et
ardues. Sous-jacent à ces indications, Il convient de se demander quelle
est la méthode la plus efficace pour lutter contre la récidive
des délinquants. Est-ce la voie de la répression ou celle de la
prévention ? Quelle pénalité d'élimination sociale
faut-il adopter ? D'un autre point de vue, les sanctions imposées
aux délinquants sont-elles de nature à éradiquer ou du
moins à réduire la récidive ?
D'ores et déjà, faut-il le souligner, le
traitement de la récidive a le mérite de poser le problème
de l'efficacité du système pénal contre la
dangerosité, l'insécurité et précisément la
capacité à prévenir une rechute des individus
déjà condamnés mais aussi celui des enjeux contemporains
du traitement pénal réservé à ce fléau. Ce
thème a également le mérite de susciter le débat
sur la délicate recherche d'un équilibre entre la protection
nécessaire de la société et l'objectif de
réinsertion des délinquants récidivistes, d'être un
indicateur permettant d'évaluer le jeu entre politiques pénales
et politiques sociales relatives à la récidive. Enfin,
étudier le traitement de la récidive, c'est globalement
s'intéresser aux intérêts juridiques qu'attache le droit
pénal à la distinction entre les criminels qui sont encore
dangereux lorsqu'ils sortent de prison et ceux qui semblent ne l'avoir jamais
été.
La récidive est un des plus graves problèmes de
politique criminelle. La question qu'elle pose n'est évidemment pas
qu'un problème de répression même si elle nécessite
toujours une sanction pénale. La résumer à la façon
la plus dure de punir un récidiviste têtu qui ne comprendrait rien
aux avertissements qu'on lui prodigue est une injure à l'esprit. Ainsi,
s'il apparaît que la répression est le principal mode de
traitement de la récidive (Première partie), force est de
constater que de nouvelles formes de traitement de ce fléau se sont
développées (Deuxième partie).
PREMIERE PARTIE : LA REPRESSION COMME PRINCIPAL MODE DE
TRAITEMENT DE LA RECIDIVE
« On ne supprimera jamais totalement la
récidive, on ne pourra jamais en finir avec elle. La justice ne fait pas
de miracle » déclarait le magistrat Serges Portelli10(*) au sujet de la
polémique sur la lutte acharnée contre la récidive en
France. Pourtant il faut, pour la survie et la sécurité
collective, mener un rude combat avec pour objectif d'endiguer ou du moins
limiter la récidive. En effet, ce fléau provoque aujourd'hui
l'exaspération des citoyens et contribue inéluctablement à
l'aggravation du sentiment d'insécurité ce d'autant plus que les
forfaits commis par les récidivistes, personnes physiques ou morales,
font l'objet d'une forte médiatisation. L'actualité est
quotidiennement marquée par des faits divers commis par des individus
présentés comme particulièrement dangereux,
inquiétants et monstrueux. Il s'agira ici de présenter la
réaction délibérée et organisée de l'Etat et
de ses composantes contre ce phénomène. Celui-ci a ainsi
conçu la peine comme principale sanction de la récidive
(Chapitre) et les mesures de sûreté comme sanction secondaires
(Chapitre II).
CHAPITRE I - LA PEINE COMME PRINCIPALE SANCTION DE LA
RECIDIVE
L'aggravation traditionnelle de la répression de la
récidive demeure toujours d'actualité et constitue l'un des
moyens efficaces mis en place par le législateur pour aborder la
question du traitement des récidivistes. Cette aggravation de la peine
encourue liée à la récidive se justifie par la plus grande
dangerosité que révèle celui qui persévère
dans la voie de la délinquance en dépit des avertissements de la
justice. Parlant des buts de la sanction, Denis Zsabo a soutenu que
« ce sont l'intimidation ou dissuasion, l'élimination ou
neutralisation et l'amendement ou punition »11(*). Aussi, aborder la question du
traitement de la récidive des infractions pénales, c'est
manifester la volonté de prendre en compte le choix de la peine
applicable au délinquant (Section I) qui, dans la plupart des cas,
renvoie à l'emprisonnement apparaissant comme un moyen efficace de
neutralisation de la récidive (Section II).
SECTION I- LE CHOIX DE LA
PEINE APPLICABLE AU DELINQUANT RECIDIVISTE
La société entend que toute entorse à ses
lois soit sanctionnée. La sanction est une réponse de cette
dernière à un acte contraire aux normes en vigueur. Elle rappelle
non seulement aux délinquants, mais aussi aux autres citoyens, qu'ils
sont liés par un pacte social, qu'ils sont tenus de se soumettre aux
lois et aucune transgression ne sera tolérée.
La sanction pénale est perçue comme le
complément de la loi. L'application effective de la peine aux coupables
est l'accomplissement de la justice sociale. La peine est
définie comme toute sanction liée à une incrimination et
prononcée par une juridiction pénale.12(*). Il y a également peine
lorsqu'une sanction figure au catalogue des peines édictées par
le code pénal, et qu'elle est en conséquence
décidée par un juge pénal en rétribution d'un
comportement que la loi prohibe13(*). Pour Emile Durkheim, Elle « consiste dans une
réaction passionnelle, d'intensité graduée, que la
société exerce par l'intermédiaire d'un corps
constitué sur ceux de ses membres qui ont violé certaines
règles de conduite »14(*). Elle apparaît aussi comme la sanction
caractéristique de l'infraction, mesure de répression atteignant
le délinquant, soit dans sa personne, soit dans ses biens, soit dans son
honneur.15(*) En un mot,
la peine désigne la sanction prononcée à l'encontre d'un
condamné par un tribunal répressif.
Elle a pour but d'empêcher de commettre une nouvelle
infraction. Intimidante ou corrective, elle empêche la récidive.
Exemplaire ou éducative, elle prévient la délinquance.
Elle est aussi utile parce qu'elle est éliminatrice, soit
définitivement, soit temporairement.16(*) Elle doit cependant être méritée
et proportionnée.
L'article 93 du code pénal camerounais parlant du
choix de la peine indique que « la peine ou la mesure
prononcée dans les limites fixées ou autorisées par la loi
doit toujours être fonction des circonstances de l'infraction, du danger
qu'elle présente pour l'ordre public, de la personnalité du
condamné et des possibilités de reclassement et des
possibilités pratiques d'exécution ». Le choix de la
peine en cas de récidive suppose la prise en compte de la
dangerosité du délinquant, personne physique ou morale (I) qui
encourt le double du maximum de la peine prévue (II).
I- LA PRISE EN COMPTE DE LA DANGEROSITE DANS LE TRAITEMENT DE
LA RECIDIVE
Une étude de la notion de dangerosité (A) et de
celle des outils de son évaluation s'avère importante pour
appréhender la place que cette dernière occupe dans le traitement
de la récidive (B).
A-
DIVERSES CONSIDERATIONS SUR LA NOTION DE DANGEROSITE
La dangerosité peut être définie comme
étant un état, situation ou action dans lesquels une personne ou
un groupe de personnes font courir à autrui ou aux biens un risque
important de violence, de dommage, ou de destruction. Sa prise en compte dans
la sanction par le juge apparaît davantage comme une manière
d'imposer à ceux qui ont commis une infraction d'une certaine
gravité, une conduite irréprochable.
Elle est la probabilité que présente
un individu de commettre une infraction, soit contre les biens, soit contre
les personnes. C'est un phénomène psycho-social
caractérisé par des indices révélateurs de la
grande probabilité de commettre une infraction contre les personnes ou
les biens.17(*) La
dangerosité peut être présumée à partir de la
nature particulière de l'acte commis (torture, actes de barbarie comme
le terrorisme, le crime contre l'humanité), du mode opératoire
(présence d'une arme, intrusion par effraction extérieure dans un
domicile, empoisonnement).
La notion de dangerosité a d'abord été
historiquement théorisée par les criminologues positivistes.
Ainsi, Lombroso (L'homme criminel) et Ferri (Sociologie criminelle) ont
proposé des classifications des délinquants organisées
autour du critère de la dangerosité. Les délinquants
d'occasion sont plus facilement accessibles au traitement pénal que les
délinquants d'habitude, si bien que la nuisibilité de ces
derniers à l'égard du corps social appelle une réponse
plus énergique. La dangerosité se mesure par la capacité
du délinquant à récidiver, et peut être
détectée tant au regard de facteurs exogènes que de
facteurs endogènes. Pour les criminels nés et les criminels
d'habitude, seules la mise à mort et la relégation garantissent
une protection efficace de la société
La défense sociale reprendra, après 1945, la
notion de dangerosité, sous le vocable notamment de
redoutabilité, mais en débarrassant les théories
positivistes de leurs aspects les plus inhumains et les plus
controversés. Dès les lois Bérenger de 1885 et 1891, le
droit pénal s'inspirera de ces acquis de la criminologie pour
diversifier les incriminations et les sanctions pénales en fonction du
profil du délinquant. Le droit pénal ne se fonde plus seulement
sur le trouble objectif causé à l'ordre social mais aussi, de
façon plus subjective, sur la personnalité du délinquant
et le niveau de dangerosité qu'il représente pour le corps
social. Pour les délinquants dangereux, les peines principales et
complémentaires visent la protection de la société.
S'agissant des peines principales, la peine d'emprisonnement ferme assortie
d'une mesure de sûreté constitue la réponse la plus
sévère adressée aux délinquants dangereux. Durant
cette période, toute mesure de traitement de faveur à leur
égard, comme par exemple la libération conditionnelle, est
exclue.
B -
LES CRITERES ET LES OUTILS D'EVALUATION DE LA DANGEROSITE
Pour qu'il ait dangerosité, il faut que l'individu
supposé dangereux fasse preuve de violence, c'est-à-dire de
brutalité extrême vis-à-vis d'autrui ou d'un bien,
susceptible de causer un dommage ou une destruction.
Divers outils d'évaluation sont traditionnellement
utilisés par les magistrats pour déterminer la dangerosité
d'un individu mis en cause dans la commission d'une infraction pénale.
Ils peuvent avoir recours à des instruments scientifiques comme les
expertises balistiques ou psychiatriques d'une part ou des instruments
empiriques tels que l'enquête de personnalité, l'enquête
sociale rapide ou encore la consultation de bases de données d'autre
part. L'expertise est traditionnellement définie comme l'examen des
questions d'ordre technique confié, par le juge, à un
spécialiste.
L'expertise psychiatrique qui, est sollicitée d'un
médecin psychiatre, a pour objet de déterminer si la personne
mise en cause souffre d'un trouble psychique ou neuropsychique de nature
à abolir son discernement ou le contrôle de ses actes. Elle est
destinée à relever les aspects de la personnalité du
délinquant considéré comme répondant à la
normale (affectivité, émotivité), à
déterminer les niveaux d'intelligence, d'habileté manuelle et
d'attention, à fournir les données utiles pour la
compréhension des mobiles du délit et pour le traitement des
délinquants. Elle est même devenue une pratique courante en
matière pénale.
Deux types de méthodes d'évaluation de la
dangerosité sont généralement distingués : les
méthodes cliniques et les méthodes actuarielles :18(*)
L'évaluation clinique repose sur un entretien, tendant
au recueil de faits et de témoignages, focalisé sur la
manière dont les événements ont été
vécus et interprétés par le sujet. L'évaluateur
reconstitue les données socio-démographiques concernant le sujet
et sa famille : parcours scolaire et professionnel, développement
psychosocial et sexuel, développement psychomoteur,
antécédents psychiatriques, éventuels troubles
addictifs...). La criminogenèse (analyse de la carrière
criminelle du sujet) peut également être utilement
étudiée dans la perspective de formuler un pronostic concernant
la dangerosité et le risque de récidive.
L'évaluation actuarielle des risques suppose la
collecte et l'utilisation d'informations prédéterminées,
comparées à des résultats connus pour un groupe de
personne en particulier (auteurs de violences au sein du couple, auteurs de
viols ou d'agressions sexuelles...). Des variables, dites prédictrices,
sont réunies en une liste d'items à pondérer. La somme des
items constitue une mesure actuarielle probabiliste du risque
représenté par le sujet. L'appréciation finale du risque
de violence d'un individu est rendue de façon algorithmique sur la base
de règles fixes, explicites, préexistantes et d'un rapport
démontré entre une série de variables et le risque de
violence. L'utilisation actuarielle de tests psychologiques particuliers a
permis de rendre plus opérationnels certains concepts psychologiques.
Ainsi, par exemple, plusieurs études ont établi que
l'évaluation des traits de personnalité psychopathique permettait
d'améliorer la prédiction de la récidive criminelle
à l'âge adulte.
Cependant, il apparaît nécessaire de distinguer
la dangerosité criminologique de la dangerosité psychiatrique La
dangerosité criminologique se manifeste par une absence de pathologie
psychiatrique et l'existence d'un risque de récidive ou de
réitération d'une nouvelle infraction empreinte d'une certaine
gravité. La dangerosité psychiatrique, selon le rapport Burgelin,
renvoie « à un risque de passage à l'acte principalement
lié à un trouble mental et notamment au mécanisme et
à la thématique de l'activité délirante
»19(*).
C'est à la notion de dangerosité criminologique
que s'attache la récidive, car, toutes sont deux critères
d'appréciation essentiels dans le choix de la peine, dans le
prononcé des aménagements de peine, et, surtout, des mesures de
sûreté. Il est fait obligation aux médecins, qu'ils soient
experts, coordonnateurs ou traitants, aux magistrats, de faire usage du concept
de dangerosité criminologique.
La dangerosité du délinquant, une fois
déterminée, justifie le recours à des peines
rétributives ou à des mesures de sûretés.
II- LA SANCTION EN CAS DE RECIDIVE AVEREE : LE DOUBLEMENT
DU MAXIMUM DE LA PEINE PREVUE
La récidive est un sujet grave qui nécessite des
solutions sérieuses. Le principe de l'aggravation de la peine
prévue par le code pénal apparaît satisfaisante et laisse
au juge une marge de manoeuvre satisfaisante.20(*) La vraie réponse à la récidive,
c'est une plus grande individualisation de la sanction. Le casier judiciaire
est un élément d'une importance indéniable pour le juge
chargé de la répression de la récidive car il permet
à celui-ci d'individualiser cette sanction pénale (A). Parlant du
doublement du maximum de la peine en cas de récidive, il faudra
distinguer selon qu'il s'agit de la récidive des personnes physiques (B)
ou de la récidive des personnes morales (C).
A-
LE CASIER JUDICIAIRE : UN INSTRUMENT D'INDIVIDUALISATION DE LA SANCTION
DANS LA REPRESSION DE LA RECIDIVE
L'institution de la récidive et plus largement celle de
l'individualisation des peines ont rendu nécessaire la connaissance du
passé pénal d'une personne en cause. Une fois l'identité
du délinquant connue, il faut pouvoir connaître les condamnations
antérieures dont il a fait l'objet. C'est à quoi la
création du casier judiciaire est venue répondre en rapportant
les preuves de ses antécédents judiciaires. La mise en place du
casier judiciaire est l'oeuvre du magistrat Bonneville de Marsangy qui en 1848
avait émis l'idée d'inscrire des condamnations sur des fiches,
lesquelles devaient être tenues au greffe du tribunal du lieu de
naissance du délinquant condamné.21(*) Quant à son organisation matérielle,
celle-ci repose sur la tenue de fiches centralisant les diverses
décisions de condamnation concernant un délinquant
donné.
Au cameroun, le casier judiciaire est institué au
greffe du tribunal de première instance et au ministère de la
justice.22(*) Celui
existant au greffe du tribunal est appelé fichier d'arrondissement et
concerne les personnes nées dans le ressort dudit tribunal. Celui du
ministère, appelé fichier central intègre les fiches du
casier judiciaire des personnes de nationalité camerounaise ou
étrangère nées à l'étranger, des fiches du
casier judicaire des étrangers nés au cameroun, dont la naissance
n'a pas été déclarée à l'état-civil
camerounais et résidant au cameroun, les fiches du casier judiciaire des
personnes de nationalité camerounaise ou étrangère dont le
lieu de naissance est inconnue ou dont l'identité est douteuse.
Le casier judiciaire comporte les renseignements
d'identité, la photographie, les empreintes digitales et les
signalements morphologiques et anthropométriques, les condamnations et
mesures de sûreté prononcées par les juridictions
nationales ou étrangères, les condamnations pour contraventions,
les mesures spéciales, les avis de recherche, les jugements
déclaratifs de faillite ou de liquidation judiciaire, les
décisions de grâce et de réhabilitation. Il existe trois
sortes de bulletins de casier judiciaire. C'est le bulletin no 2 qui est
produit pour renseigner le juge sur le passé pénal du
délinquant. Traditionnellement réservé aux personnes
physiques, le casier judiciaire s'applique désormais aux personnes
morales, dans la logique du principe de leur responsabilité
pénale.
B -
LE TRAITEMENT DE LA RECIDIVE DES PERSONNES PHYSIQUES
Avant que d'aborder le tarif de la peine en cas de
récidive des personnes physiques (2), il apparaît judicieux de
mettre en exergue les conditions de cette récidive (1).
1-
Les conditions de la récidive pénale
La récidive est une cause d'aggravation de la sanction
pénale applicable à la deuxième infraction
subséquente à la première. Elle est néanmoins
soumise à certaines conditions. Pour qu'une personne soit en état
de récidive légale, deux conditions doivent être
réunies :
Premièrement, il faut une condamnation pénale
définitive, c'est-à-dire insusceptible de voies de recours
usuelles, n'ayant pas fait l'objet d'amnistie, de réhabilitation ou de
grâce, généralement prononcée par un tribunal
national compétent ou par exemple, s'agissant de la France, par une
juridiction française ou par une juridiction pénale d'un pays
membre de l'union européenne. 23(*) En d'autres termes, pour que l'aggravation
résultant de la récidive s'applique à une personne, il
faut d'abord que cette dernière ait déjà été
condamnée pénalement, à titre définitif
c'est-à-dire qu'une décision ayant « force de chose
jugée », insusceptible de recours, et devenant alors
exécutoire, ait été émise par une juridiction
pénale compétente. C'est le premier terme de la récidive.
Il faut ensuite la commission d'une nouvelle infraction pour
que l'aggravation résultant de la récidive s'applique à
une personne. Cette nouvelle infraction peut être soit différente
de la première infraction commise, soit identique à la
première infraction pour que le magistrat puisse juger qu'il y a eu
récidive. On parle alors de récidive générale ou
spéciale. Par ailleurs, la récidive peut être encourue dans
certains cas sans tenir compte du temps passé depuis la commission de la
première infraction. En revanche, dans d'autres cas, la récidive
ne pourra être prononcée si un certain délai s'est
déjà écoulé depuis la première infraction.
C'est le deuxième terme de la récidive.
2-
Le tarif proprement dit de la peine en cas de récidive
« La coutume en délit aggrave le
péché » dit une ordonnance de 1539. Il faut une "peine
adaptée à la nature de celui qu'elle va frapper".24(*)
Cependant, la peine applicable au récidiviste personne physique
diffère selon qu'il s'agit d'une personne majeure ou mineure. Alors
qu'on note une rigueur et un énervement de la répression pour ce
qui est du majeur récidiviste (a), l'on observe un certain adoucissement
de la peine en ce qui concerne le mineur récidiviste (b).
a- La rigueur et l'énervement de la peine
applicable au récidiviste majeur
25(*)
L'aggravation, des peines encourues par un délinquant majeur d'au moins
dix huit ans en vertu de la récidive se cumule avec les aggravations
spéciales pour d'autres raisons ainsi qu'avec toute disposition
complémentaire, telle que par exemple la fermeture d'un
établissement prévue pour les cas spéciaux de
récidive. Elle ne se cumule pas avec l'aggravation des peines
principales prévues pour des cas spéciaux de récidive.
Dans ce cas, l'aggravation spéciale prévaut.
Cette aggravation, faut-il le préciser, diffère
selon qu'il s'agit d'une récidive de crime après crime ou de
contravention après contravention. Le facteur commun réside dans
le fait que l'infraction postérieure doit être commise
après que la condamnation antérieure est devenue
définitive.
Cependant, il n'y a pas d'aggravation en cas de
récidive de crime à délit ni même de crime
après crime, si le premier a été puni d'une peine maximum
de cinq ans, peine qui n'aurait pu résulter que de l'admission d'une
circonstance ou d'une excuse atténuante. Il n'y a pas d'aggravation en
cas de crime ou de délit politique et vise versa.
Dans l'hypothèse d'une contravention, le délai
entre la condamnation précédente devenue définitive et
l'infraction qui la suit ne doit pas excéder un an. Les deux infractions
doivent en outre avoir été commises dans le ressort du
même tribunal.
En cas de délit, le délai maximum est de cinq
ans, sans aucune limite territoriale et même les délits commis
à l'étranger peuvent être pris en
considération.26(*)
Lorsqu'il s'agit de crime, aucune limite, ni de temps, ni territoriale n'est
fixée. Quoi qu'il en soit, l'aggravation ne s'applique qu'au maximum de
la peine et dans chacun des trois cas, elle consiste dans un simple doublement
de la peine.27(*)
Pour le cas spécifique de la répression de la
récidive en matière contraventionnelle, outre le doublement du
maximum de la peine prévue par la loi, la juridiction compétente
peut, s'agissant les contraventions des trois premières classes,
prononcer une peine d'emprisonnement dont le minimum ne peut être
inférieur à cinq jours et le maximum supérieur à
dix jours.28(*) Cette
aggravation de la sanction ne concerne pas les peines dites
perpétuelles.
b- l'adoucissement de la peine pour le mineur
récidiviste
La politique criminelle applicable à la
délinquance juvénile est fondamentalement protectrice du mineur
en conflit avec la loi. En effet, la présomption
d'irresponsabilité pénale des mineurs relègue au second
plan la fonction répressive du traitement de la récidive du
mineur.
Ce dernier bénéficie en effet de la protection
de la loi29(*). En effet
celle-ci indique que le mineur de dix ans n'est pas pénalement
responsable. Celui de dix à quatorze ans pénalement responsable
ne peut faire que de l'une des mesures spéciales prévues par la
loi. Le mineur âgé de plus de quatorze ans et de moins de dix huit
ans pénalement responsable bénéficie de l'excuse
atténuante de minorité.
IL en résulte que le mineur de dix ans, totalement
irresponsable, ne peut faire l'objet d'un jugement ou d'une condamnation pour
des faits qu'il a commis quelque soit leur degré de gravité. Tout
au plus, des mesures de garde ou de protection pourront être prises
à son encontre. Celui dont l'age est compris entre dix et quatorze ans,
bien que pénalement responsable, ne peut être également
condamné mais peut faire l'objet que des mesures spéciales
prévues par la loi, notamment l'attribution de sa garde à ses
parents, tuteur ou gardien ou toute autre personne digne de confiance, le
placement dans une institution spécialisée ou dans un
établissement de formation professionnelle.30(*)
A la lecture de ce texte, seul le mineur dont l'age est
compris entre quatorze et dix huit ans peut faire l'objet d'une condamnation
pénale. Lorsque sa responsabilité pénale est
avérée, il y a lieu de relever que même à ce
niveau, il a la faveur de la répression en raison de sa minorité.
En effet, lorsqu'il encourt la peine de mort ou une peine
perpétuelle, la peine est réduite à une peine privative de
liberté de deux à dix ans. S'il encourt une peine à temps
en cas de crime, la peine est réduite à une peine privative de
liberté de un à cinq ans. En cas de délit, le maximum des
peines privatives de liberté et d'amende est réduit de
moitié et le minimum est de cinq jours et l'amende est de un franc. Le
juge a même la possibilité de ne lui infliger que l'une des deux
peines puisqu'il s'agit d'une peine alternative31(*). En tout état de cause, il appartient
seulement au juge de prendre en compte les aménagements légaux
protecteurs de la délinquance juvénile.32(*)
C-
LE TRAITEMENT DE LA RECIDIVE DES PERSONNES MORALES
Aborder la question de la peine applicable à la
récidive des personnes morales (2) suppose au préalable la mise
en exergue de la question de leur responsabilité pénale (1).
1-
La question de la responsabilité pénale des personnes morales
La responsabilité pénale de toutes les personnes
morales peut être recherchée, sauf celle de l'Etat.33(*) Cette responsabilité
peut être engagée si l'un des organes ou son représentant
ont agi pour leur compte en commettant une infraction dans le cadre de
l'exercice d'activités ayant pour objectif d'assurer leur organisation
et leur fonctionnement. Le droit pénal français a posé le
principe de la responsabilité des personnes morales en ces termes :
« Les personnes morales, à l'exclusion de l'Etat, sont responsables
pénalement (...) dans les cas prévus par la loi ou le
règlement des infractions commises, pour leur compte, par leurs organes
ou représentants »34(*).
Pour que cette responsabilité soit retenue, il faut
quelle soit spécialement prévue par un texte qui définit
et réprime l'infraction. Ce texte peut être soit une loi si
l'infraction consiste en un crime ou un délit, soit un règlement
si l'infraction consiste en une contravention. Les infractions susceptibles
d'engager la responsabilité des personnes morales peuvent être les
crimes contre l'humanité, l'homicide et les violences involontaires, le
trafic de stupéfiants, l'expérimentation médicale
illicite, le proxénétisme, la dénonciation calomnieuse, le
vol, l'abus de confiance, l'escroquerie, le chantage, le détournement de
gage ou d'objet saisi, l'organisation frauduleuse d'insolvabilité
etc.
2-
La répression de la récidive des personnes morales
Déjà, faut-il le rappeler, les conditions de
leur récidive sont identiques à celles des personnes physiques
ci-dessus développées. Le principe est également
l'aggravation de la sanction pénale. La récidive des personnes
morales est abordée à la sous-section 2 du code pénal
français et le législateur a opté pour l'aggravation de
sanction.
35(*)Ainsi, lorsqu'une personne morale,
déjà condamnée définitivement pour un crime ou pour
un délit puni par la loi en ce qui concerne les personnes physiques de
100000 euros d'amende, engage sa responsabilité pénale par
un crime, le taux maximum de l'amende applicable est égal à dix
fois celui qui est prévu par la loi qui réprime ce crime.
Lorsqu'elle est déjà
condamnée définitivement pour un crime ou pour un délit
puni par la loi en ce qui concerne les personnes physiques de 100000 euros
d'amende, elle engage à nouveau sa responsabilité pénale,
dans le délai de dix ans à compter de l'expiration ou de la
prescription de la précédente peine, par un délit puni de
la même peine, le taux maximum de l'amende applicable est égal
à dix fois celui qui est prévu par la loi qui réprime ce
délit.
Lorsqu'une personne morale, déjà
condamnée définitivement pour un crime ou pour un délit
puni par la loi en ce qui concerne les personnes physiques de 100000 euros
d'amende, engage sa responsabilité pénale, dans le délai
de cinq ans à compter de l'expiration ou de la prescription de la
précédente peine, par un délit puni par la loi en ce qui
concerne les personnes physiques d'une peine d'amende supérieure
à 15000 euros, le taux maximum de l'amende applicable est
égal à dix fois celui qui est prévu par la loi qui
réprime ce délit.
Lorsqu'une personne morale, déjà
condamnée définitivement pour un délit, engage sa
responsabilité pénale, dans un délai de cinq ans
à compter de l'expiration ou de la prescription de la
précédente peine, soit par le même délit, soit par
un délit qui lui est assimilé au regard des règles de la
récidive, le taux maximum de l'amende applicable est égal
à dix fois celui qui est prévu par la loi qui réprime ce
délit en ce qui concerne les personnes physiques.
Dans les cas où le règlement le
prévoit, quand une personne morale, déjà condamnée
définitivement pour une contravention de la cinquième classe,
engage sa responsabilité pénale, dans le délai d'un an
à compter de l'expiration ou de la prescription de la
précédente peine, par la même contravention, le taux
maximum de l'amende applicable est égal à dix fois celui qui est
prévu par le règlement qui réprime cette contravention en
ce qui concerne les personnes physiques.
Sous le bénéfice de tout ce qui
précède, il en résulte que la récidive, tant pour
les personnes physiques que pour les personnes morales est
réprimée par l'aggravation de la sanction pénale. En tout
état de cause, l'emprisonnement demeure, à notre sens, l'un des
meilleurs moyens de neutralisation de la récidive. Par ailleurs, l'on
peut évoquer les peines encourues par le récidiviste sans faire
allusion à la prison, cadre de leur exécution car la peine
renvoie à l'emprisonnement.
SECTION II - L'EMPRISONNEMENT COMME MOYEN DE NEUTRALISATION DE
LA RECIDIVE
La peine de prison apparaît principalement
comme l'indicateur de la dureté de la peine et l'aggravation de la
sanction pénale a pour corollaire le prolongement du séjour du
délinquant récidiviste en milieu carcéral. Pour quels
objectifs et pourquoi emprisonne -t-on, faut-il se demander ? La
neutralisation qui vise à réduire les comportements
prohibés en tentant d'empêcher les condamnés de commettre
des infractions pendant un certain temps est un des objectifs de
l'emprisonnement. Une analyse du rôle de la prison révèle
que cette structure est un cadre destiné à punir, à
dominer et à guérir le récidiviste. D'où la
question de ses fonctions (I). Elle est aussi un cadre de sa resocialisation
par le travail (II).
I- LES FONCTIONS DE LA PRISON
La peine, afflictive ou infamante a une fonction utilitaire.
Elle ne doit pas seulement être juste, elle doit être aussi utile
c'est-à-dire tournée vers l'avenir. Elle doit éviter
qu'une nouvelle infraction soit commise par une personne quelconque ou par une
personne déjà condamnée. L'emprisonnement remplit
plusieurs fonctions. Elle est expiatoire, intimidante, éliminatrice et
amendante. Alors punir (A), dominer (B) et guérir (C)36(*), telle est l'utilité de
la prison dans le traitement de la récidive.
A-
LA PRISON POUR PUNIR
Le rétributivisme est une théorie du
châtiment selon laquelle celui qui s'est rendu coupable d'une offense
mérite d'être châtié. Le principe fondamental de
cette théorie réside dans une conception très exigeante de
la dignité humaine. Pour les tenants de cette position, le
châtiment infligé doit se justifier en lui-même et ne peut
être considéré comme un moyen servant une fin
utilitaire.
Le rétributivisme peut se présenter selon
plusieurs variantes. Pour les uns, toute faute exige une sanction. L'imposition
d'une sanction est une nécessité morale. La seule existence de la
faute fonde la nécessité de punir. Pour d'autres, la faute
justifie aussi l'imposition des peines. Enfin, une autre catégorie de
rétributivistes justifie les sanctions pénales par des
finalités utilitaires, notamment pour réduire les comportements
prohibés, mais a recours au rétributivisme comme principe de
distribution. On ne peut punir que celui qui s'est effectivement rendu coupable
d'une infraction et qu'en fonction de sa responsabilité.
Les établissements pénitentiaires encore
appelés prisons, sont des lieux où s'exécutent les peines
privatives de liberté.37(*) Instrument principal de la répression
pénale, la prison est un lieu de supplice38(*) pour le délinquant
récidiviste qui se voit fondamentalement privé de sa
liberté. Priver ce dernier de sa liberté constitue une peine car
celle-ci engendre la souffrance entendue comme une douleur physique ou morale.
Cette souffrance résulte du fait que l'emprisonnement impose de
manière brutale au délinquant la privation des êtres, des
choses qu'il aime, qui lui sont familiers, de son environnement habituel.
Elle lui impose un cadre de vie étranger avec d'autres
habitants plus ou moins hostiles. Lorsqu'on parle de liberté, de cette
liberté que la prison va entraver, on pense d'abord à la
liberté d'aller et venir, la liberté de locomotion.39(*) Au cours de son internement,
il peut se voir appliquer des suppléments punitifs comme le port des
chaînes, l'isolement complet, l'affectation aux travaux harassants, une
alimentation insuffisante. Parlant de la prison comme cadre de punition, un
auteur a pu déclarer : « Une autre fonction de la prison est
de fournir un lieu pour la punition que le détenu reconnaît
mériter et sans laquelle il ne pourrait affronter le monde
»40(*).
L'enfermement d'un sujet permet de l'étudier et de le
soumettre à des règles qui doivent le rendre moins dangereux avec
un maximum de sécurité. Elle joue sur le délinquant un
rôle dissuasif et protège par conséquent la
société de ses velléités, l'enjeu de la prison
étant dans un premier temps de l'empêcher de commettre des
infractions dans la prison, et d'utiliser ses efforts pour qu'ils servent, dans
un second temps, à prévenir la récidive. 41(*) Cet enfermement dit de
neutralisation consiste fondamentalement en une mise à l'écart du
récidiviste avec pour objectif de prévenir la
répétition de l'infraction. Une peine plus longue ferait que le
récidiviste prenne conscience de la gravité de son acte et de sa
situation. Il réitérerait alors moins.
B-
LA PRISON POUR DOMINER
Comme le disait le Marquis Cesare Bonesana BECCARIA il y 250 ans
« le but des châtiments n'est autre que d'empêcher le
coupable de nuire encore à la société et de
détourner ses concitoyens de tenter des crimes semblables. Parmi les
peines et la manière de les infliger, il faut donc choisir celle qui,
proportion gardée, doit faire l'impression la plus efficace et la plus
durable sur l'esprit des hommes et la moins cruelle sur le
criminel. »42(*)
Pour assurer le bon fonctionnement de la prison et
l'accomplissement de ses missions de sécurité,
l'établissement pénitentiaire impose au criminel
emprisonné toute une succession de règles auxquelles il doit se
plier. Elle est comme une institution disciplinaire. La prison doit donc dans
un premier temps neutraliser les tendances transgressives du criminel pouvant
s'exprimer à tout moment.
Lorsqu'un détenu viole une règle, plusieurs
sanctions lui sont applicables. Il s'agit des règles de domination mises
en place par l'Etat dans ses fonctions régaliennes et destinées
à vaincre la propension du délinquant à commettre un
crime. Le récidiviste est isolé entre quatre mûrs. Tout
d'abord, les dispositions du code pénal sont toujours en vigueur
à l'intérieur de la prison, et il peut avoir à
répondre de ses actes devant la justice criminelle. Mais au-delà,
le prisonnier peut être sanctionné pour une transgression du
règlement intérieur. Il sera alors soumis à une justice
disciplinaire interne de la prison. Bref, il est soumis à une discipline
pénitentiaire rigoureuse dont il ne peut se soustraire. Il peut ainsi
faire l'objet de l'emprisonnement commun ou de l'emprisonnement cellulaire de
type pennsylvanien.
L'emprisonnement commun signifie, et sous réserve de la
séparation des hommes et des femmes, et de celle des mineurs et des
adultes, que les détenus vivent ensemble aussi bien le jour que la nuit,
partagent les mêmes dortoirs et prennent ensemble leur repas. Le
régime d'emprisonnement cellulaire consiste dans un isolement total du
délinquant aussi bien pendant le jour que la nuit. Il est enfermé
dans une cellule où il mène toutes ses activités et
lorsqu'il en sort pour circuler dans les couloirs, il est tenu de se couvrir le
visage avec une cagoule pour ne pas être identifié par ses
co-détenus. Cette domination du récidiviste par l'isolement
permet son amendement à travers la pénitence et la vertu
moralisatrice de la réclusion solitaire. On est dans le cadre d'un
enfermement d'autorité qui s'inscrit exclusivement dans une logique de
pouvoir et de domination.
C-
LA PRISON POUR GUERIR
La réhabilitation du récidiviste par la prison
est basée sur l'idée générale que la cause
principale du comportement délinquant se trouve dans la personne qui a
commis l'infraction et qu'un des moyens de diminuer les comportements
délinquants est de transformer ou de guérir cette personne.
Plusieurs hypothèses et théories ont justifié l'entreprise
de correction des délinquants dans le système pénal. En
simplifiant, on peut les résumer en trois grandes orientations.
En premier lieu on doit rappeler qu'au XIXe siècle,
lors de la création des prisons et des maisons de correction,
l'entreprise de correction avait une forte connotation morale et la
transformation du délinquant passait par la reconnaissance de la faute
grâce à l'isolement, la réflexion, la lecture de la Bible,
etc. Plus tard, la criminologie d'inspiration positiviste niera le libre
arbitre et postulera que le délinquant est déterminé par
des causes biologiques, psychologiques ou sociologiques et est quelqu'un de
différent des non délinquants.
Cependant, on peut aussi concevoir que ceux qui enfreignent la
loi ne sont pas différents de ceux qui la respectent
généralement mais qu'ils ont soit appris des normes et des
valeurs différentes de celles de la majorité ou qu'ils n'ont pas
encore ou pas adéquatement appris certaines façons de faire,
certaines normes, certaines valeurs dominantes. Alors l'entreprise de
correction en est surtout une démarche d'information,
d'éducation, de socialisation. Le régime progressif irlandais qui
consiste en des faveurs diverses et successives destinées à
stimuler les efforts du détenu afin de l'amener à recouvrer sa
liberté est l'un des moyens de guérison de la
récidive.43(*)
On peut espérer empêcher la récidive des
condamnés en transformant leur personnalité intime durant
l'exécution de leur peine.44(*) En effet, le récidiviste aux prises avec les
vicissitudes de la vie carcérale, face à la déliquescence
de sa vie sociale et familiale, seul entre quatre murs, peut se résoudre
à ne plus jamais commettre un crime. La prison dans une telle
perspective, peut permettre au détenu de s'améliorer et de
maximiser sa capacité de changer. Il peut arriver aussi que la prison
réalise un interlude ou une pause ou un interrègne dans sa
carrière pendant lequel il peut faire un bilan et prendre conscience de
la voie où il est engagé et décider de faire quelque chose
contre cela. Certains délinquants sexuels sont grandement aidés
dans leur approche du futur par le fait de savoir qu'ils ont été
punis45(*). Dans cette
perspective,on doit offrir à chaque sujet de l'univers carcéral
la chance d'un nouveau départ . On doit multiplier des
expériences soigneusement conduites et évaluées par
rapport aux types de délinquants46(*)
La peine, pour parler comme Sutherland, exprime une
hostilité envers non seulement un crime, mais aussi envers un criminel
et dont la nature est de faire souffrir, doit être utilisée
à l'amendement du criminel47(*). Ainsi, l'enfermement conduit le détenu
récidiviste à mettre à profit la pause qui lui est
imposée pour considérer de façon positive le chemin
où il s'est embarqué et songer à mener une vie paisible
une fois sa peine exécutée. Car, il est un homme en attente de
liberté appelé à réintégrer la
société après avoir purgé sa peine, après
avoir payé sa dette.48(*)
Certes, cette peine ressentie à travers le corps et
l'esprit peut l'amener à se conformer aux règles, à
régulariser sa vie sociale mais le travail, perçu comme cette
activité de l'homme appliquée à la production, à la
création et productrice de valeurs constitue aussi un moyen non
négligeable de lutte contre la récidive.
II - LE TRAVAIL EN PRISON : UN MOYEN DE RESOCIALISATION
DU DELINQUANT RECIDIVISTE
Le rôle de la prison a évolué. De simple
outil de rétention et d'exécution d'une peine, elle est devenue
un cadre de réadaptation sociale des délinquants.
L'emprisonnement est d'ailleurs cette peine privative de liberté pendant
laquelle le condamné est astreint au travail.49(*) Dans certains pays
(principalement les démocraties libérales), elle est un outil
ayant à la fois pour objectif de protéger la
société de ses éléments dangereux et de les
réinsérer. Les ambitions pour la prison ont évolué
avec le temps. L'emprisonnement devait donc s'accompagner de travail, qui comme
on le sait, éloigne le vice. En créant les premiers
pénitenciers, la loi anglaise de 1778 se proposait d'inculquer les
habitudes de travail, d'habituer les condamnés à méditer
sérieusement et de leur enseigner tant les principes que la pratique de
tous les devoirs chrétiens et moraux50(*) Il s'agit alors de se demander quel type de travail
est offert au détenu (A) et quelle est sa condition juridique (B).
A -
LES TRAVAUX PROPOSES AUX DELINQUANTS DANS LE CADRE DE LEUR READAPTATION
SOCIALE
L'apprentissage d'un métier adapté au
marché du travail constitue un des objectifs essentiels du traitement
pénal de la récidive. Plusieurs types de travaux sont ainsi
proposés aux délinquants détenus dans le cadre de leur
réadaptation sociale. Il y a d'abord le service général
qui englobe les travaux d'entretien, de maintenance et de fonctionnement des
établissements. Il y a ensuite la régie industrielle des
établissements pénitentiaires dont les activités
principales concernent la menuiserie, la métallurgie, l'agriculture et
l'informatique. Il y a également la concession qui consiste à
concéder la main d'oeuvre constituée par les détenus
à des entrepreneurs privés. Il est aussi permis aux
détenus de pratiquer des activités liées à
l'artisanat, à la peinture et à la sculpture. Ils peuvent
même bénéficier d'un stage professionnel dans leur domaine
respectif de compétence dans le cadre d'une remise à niveau.
A ce propos Lejins a pu déclarer que « le
modèle de vie d'un condamné à l'incarcération
punitive pourrait se décomposer de la façon suivante : du
temps pour diverses activités récréatives, du temps pour
l'entretien des locaux où il vit et de l'institution ; l'exigence
de se livrer à un travail productif ».51(*) Ainsi, le récidiviste
en optant pour l'un des métiers qui lui sont proposés se
détourne de son envie de commettre des infractions. Par ces
différents emplois, l'objectif visé est sa resocialisation. Il
s'agit, tout compte fait, d'insérer l'ancien délinquant dans la
société des hommes libres. L'insertion dans la
société exclut la possibilité de la
réitération du crime.52(*) Il s'agit là d'un enfermement de
différenciation sociale qui vise à apporter une compétence
spécifique au délinquant sous les verrous.
B -
LA CONDITION JURIDIQUE DU DETENU TRAVAILLEUR
En principe, le détenu travailleur n'est pas
explicitement pris en compte par le code du travail. Les relations de travail
entre les détenus et leur employeur ne font pas l'objet d'un contrat de
travail.53(*) Pour autant,
l'organisation du travail est soumise à des règles
précises : durée par jour et par semaine, temps
nécessaire pour les repas, le repos, la promenade et les
activités éducatives et de loisirs, respect du repos hebdomadaire
et des jours fériés, application des dispositions relatives
à l'hygiène et à la sécurité. Ils sont
protégés par la législation relative aux accidents du
travail comme les travailleurs jouissant de leur liberté54(*) et leurs familles
bénéficient des prestations familiales.55(*) Ils ont droit à une
rémunération lorsqu'ils ne sont pas employés directement
par l'administration pénitentiaire.
Cependant, il y a lieu de préciser que les produits de
chaque condamné sont affectés aux dépenses communes de la
maison, au payement des condamnations pécuniaires prononcées au
profit du Trésor Public, à un fonds de pécule dont il peut
disposer au cours de sa détention et à sa sortie de
prison.56(*) Le
pécule constitue l'ensemble des valeurs pécuniaires qui figurent
au compte greffe de l'établissement où il est condamné.
L'aggravation de la sanction pénale, tout compte fait,
constitue la juste peine prise à l'encontre du délinquant
récidiviste qui, en dépit de sa première condamnation, n'a
pas cru devoir retenir l'avertissement à lui adressé par le juge.
Elle apparaît comme un dispositif guerrier par lequel l'Etat
élimine ses éléments rebelles pour des durées
variables.
En dehors de la peine comme sanction principale, d'autres
mesures dites secondaires ont été aménagées dans
l'arsenal répressif de la délinquance d'habitude. Il s'agit des
mesures de sûreté.
CHAPITRE II : LES MESURES DE SURETE : MESURES
SECONDAIRES DANS LE TRAITEMENT DE LA RECIDIVE
Les mesures de sûreté sont définies comme
des mesures individuelles coercitives, sans coloration morale, imposées
à des individus dangereux pour l'ordre social afin de prévenir
les infractions que leur état rend probables.57(*) La mesure de
sûreté se distingue de la peine par son origine, son but et son
régime.58(*)
Par son origine, la mesure de sûreté, à
l'opposé de la peine, ne suppose nécessairement une infraction,
une faute pénale commise par un auteur responsable. Elle est
déclenchée par l'état socialement dangereux d'un individu,
même irresponsable, même non délinquant.
Par son but, la mesure de sûreté, contrairement
à la peine, ne vise pas à infliger une souffrance, un blâme
et n'est ni rétribution d'un forfait passé. Elle tend à
la protection de la société, ne considère que l'avenir, ne
comporte aucun contenu d'ordre moral et est vide de toute réprobation.
La peine, quant à elle, vise un but utilitaire de prévention
générale, celui de détourner de la délinquance ceux
qui seraient tenté d'imiter l'exemple du coupable59(*)
Par son régime, elle se distingue également de
la peine. Alors que la durée de la peine est fixée par une
décision judiciaire passée en force de chose jugée, celle
de la mesure de sûreté est révisable. Justifiée par
l'état dangereux de l'individu, fondée sur la protection de la
société, elle sera modifiée et peut durer
indéfiniment en fonction de l'état dangereux et de la
défense sociale. Elle s'applique à un état, à un
comportement dans le temps, bien plus qu'à un acte isolé. Seule
importe la cessation de l'état dangereux.
La peine et la mesure de sûreté se ressemblent
cependant sur le plan de la légalité et sur le plan de la
pratique. S'agissant de la légalité, la règle nullum
crimen, nulla poena sine lege leur est applicable. Elles sont fixées par
la loi et ne sont prononcées qu'à raison des infractions
légalement prévues.60(*) AU plan pratique, lorsque les mesures de
sûreté ont un caractère fixe, la condamnation
prononcée a les mêmes effets que s'il s'agit de la condamnation
résultant d'une peine.
Pour nous résumer, on peut dire que la peine est
prononcée en raison de l'infraction et la mesure de sûreté,
en raison à la fois de l'infraction et de l'état dangereux de la
personne à laquelle elle s'applique. Dans le cadre du traitement de la
récidive, il faut distinguer selon qu'il s'agit des mesures de
sûreté privatives ou restrictives de liberté (Section I) ou
des mesures de sûreté non privatives de liberté auxquelles
nous allons associer la question de l'engagement préventif.(Section
II).
SECTION I- LES MESURES DE SURETE PRIVATIVES OU RESTRICTIVES
DE LIBERTE
Les mesures de sûreté privatives ou restrictives
de liberté telles que prévues par le code pénal
camerounais sont la relégation, l'internement dans une maison de
santé et les mesures d'assistance post-pénales. Nous aborderons
ces différentes mesures quant à leurs conditions (I) et leurs
effets sur le traitement de la récidive (II).
I- LES CONDITIONS DES MESURES PRIVATIVES OU RESTRICTIVES DE
LIBERTE
Il s'agira ici de présenter les conditions de
l'exécution de la relégation (A), de l'internement dans une
maison de santé (B) et des mesures d'assistance post-pénales (C).
A-
LA RELEGATION
La relégation est l'internement pour une durée
de cinq ans à vingt ans sous un régime de travail et de
réadaptation sociale pendant laquelle les relégués sont,
à défaut d'établissement spécial,
séparés des condamnés qui exécutent leurs peines.
Il s'agit d'un internement de sûreté qui s'applique
généralement aux délinquants professionnels dits
incorrigibles. En effet, selon une disposition de la loi pénale du
Groenland61(*), il peut
être fait emploi de la relégation à l'égard des
délinquants qui peuvent être qualifiés de criminels
professionnels ou habituels ou spécialement dangereux, lorsque la
sécurité publique le requiert. Selon une loi française du
27 mai 1885, le récidiviste à éliminer est l'individu qui,
dans un délai de dix ans, a encouru plusieurs condamnations d'une nature
spéciale.
Au cameroun62(*), pour que les conditions de la relégation
soient réunies, il faut que le délinquant auquel cette mesure
s'applique soit récidiviste au sens des articles 14, 15 et 88 du code
pénal, condamné pour crime ou délit de droit commun. Il
faut ensuite que la dernière infraction susceptible d'entraîner la
relégation soit commise dans un intervalle de dix ans, non comprises les
peines subies et les mesures de sûreté privatives de
liberté.
Le point de départ de la période
décennale est la date de la dernière infraction susceptible
d'entraîner la relégation. Il doit donc, à partir de ce
délai, avoir subi soit deux condamnations à l'emprisonnement pour
crime ou la peine de mort originellement commuée en emprisonnement,
soit quatre condamnations pour délits à plus d'un an
d'emprisonnement, soit encore une condamnation pour crime ou une peine de mort
commuée en peine d'emprisonnement assortie de deux condamnations pour
délits à plus d'un an d'emprisonnement.
Par ailleurs, les condamnations intéressant la
relégation doivent être définitives et chacun des faits
motivant ces condamnations doit être postérieur à la
condamnation précédente devenue définitive. Il est
également tenu compte des condamnations qui ont fait l'objet de
grâce de commutation ou de réduction de peine. Ne sont pas par
contre pris en compte, les condamnations prononcées contre les mineurs
âgés de moins de dix huit ans lors de la commission des faits. Il
y a lieu de préciser que sont exclues de la relégation, les
condamnés âgés de moins de vingt cinq ans ou de plus se
soixante ans après l'expiration de la peine principale.63(*)
IL est nécessaire de relever que la relégation
est une mesure énergique qui se caractérise par l'obligation du
relégué à travailler et à être soumis
à un régime drastique de réadaptation sociale.
B-
L'INTERNEMENT DANS UNE MAISON DE SANTE
L'internement à ce niveau peut être
effectué pour cause de démence (1) ou pour cause d'alcoolisme, de
toxicomanie ou d'infirmité mentale (2).
1-L'intenement pour cause de démence
Cet internement intervient généralement lorsque
la santé de la personne intéressée est défaillante
pour cause de démence au moment de la perpétration de
l'infraction. L'article 43 du code pénal camerounais énonce
qu' « en cas d'acquittement pour cause de démence de
l'auteur d'un crime ou d'un délit passible d'une peine d'emprisonnent de
deux ans au moins, et lorsque la liberté de l'inculpé est
reconnue dangereuse pour l'ordre public par la juridiction saisie, celle-ci
ordonne son internement dans une maison spéciale de
santé ».
De cette disposition légale, se dégagent deux
conditions susceptibles d'entraîner l'internement d'une personne. Il faut
d'abord la commission d'un crime ou d'un délit non politique passible
puni d'au moins deux ans d'emprisonnement. Il faut ensuite une constatation par
la juridiction compétente de ce que la liberté de l'individu en
cause est dangereuse à l'ordre public. L'existence d'une maison
spéciale de santé susceptible de recevoir le dément, comme
par exemple le Centre Jamot, Annexe de l'hôpital central à
Yaoundé est aussi requise.64(*)
Il convient relever que cette notion de démence n'est
pas définie par la loi . La doctrine a néanmoins
essayé de lui donner un contenu précis. Stricto sensu, la
démence, est l'état des fous ou des individus dont les
facultés mentales normalement développées se sont perdues
ou altérées.65(*) Sont assimilés également à la
démence, les délires chroniques ou genèse hallucinatoire,
interprétative ou imaginaire, les états d'excitation chez le
maniaque, les états dépressifs, les troubles de l'intelligence ou
l'insuffisance intellectuelle, les troubles du caractère et de l'humeur,
les manifestations psychiatriques de l'encéphalite épidermique,
l'épilepsie.
2 -
L'internement pour alcoolisme, toxicomanie et infirmité mentale
Il résulte des dispositions de l'article 44 du code
pénal camerounais que lorsqu'une personne alcoolique, toxicomane ou
atteinte d'une infirmité mentale est condamnée pour crime ou
délit passible d'une peine d'emprisonnement de deux ans au moins en
rapport avec ses habitudes ou son état mental et que sa liberté
est reconnue dangereuse pour l'ordre public, la juridiction saisie peut
ordonner son internement dans une maison spéciale de santé.
Aux termes de cet article, pour que l'internement intervienne
ici, l'alcoolique, le toxicomane ou l'infirme mental doit avoir commis un crime
ou un délit puni d'un emprisonnement d'au moins deux ans. Puis,
l'infraction doit avoir été commise en rapport avec les habitudes
de toxicomanie, d'ivrognerie déplorées et le délinquant
doit l'avoir commise sous l'emprise de l'ivresse, de la toxicomanie ou de
l'infirmité mentale. Enfin, la juridiction saisie doit avoir
constaté que sa liberté est dangereuse pour l'ordre public et
s'assurer de l'existence des dispositions pratiques d'exécution de cette
mesure.
L'infirmité donc il fait état ici englobe les
handicaps comme la folie partielle, l'hystérie, le somnambulisme, la
surdi-mutité. L'ivresse, elle, peut provenir de l'usage
exagéré de l'alcool ou de stupéfiants, substance
hallucinogène par excellence. La toxicomanie est l'ivresse née de
l'usage des stupéfiants et autres substances psychotropes. Toutes ces
ivresses peuvent conduire les citoyens à commettre des infractions de
nature à ébranler l'ordre public.
C-
LES MESURES DE SURVEILLANCE ET D'ASSISTANCE POST-PENALES
Les mesures d'assistance et de surveillance
post-pénales s'appliquent à tout condamné à une
peine privative de liberté supérieure à un an qui, compte
tenu des faits mis à sa charge, est placé par décision
motivée du tribunal compétent pour une durée maximum de
cinq ans, avec des obligations générales ou
spéciales.66(*)
L'observation de ces obligations par le condamné est effectuée
par un magistrat désigné à cet effet. Cependant, ce
contrôle est exercé par la police pour un crime ou d'un
récidiviste condamné pour délit. Elles constituent une
sorte de mise à l'épreuve après exécution de la
peine principale.
De nombreuses obligations pèsent sur la personne objet
de cette mesure. Elle est par exemple tenue d'établir de plein droit
son domicile en un lieu déterminé, de répondre aux
convocations de l'autorité chargée de la mission de surveillance
et d`assistance, de recevoir les visites du surveillant et lui communiquer des
documents permettant de vérifier ses moyens de subsistance , de
prévenir ou justifier auprès du surveillant des motifs de ses
changements d'emploi ou de résidence, de toute absence excédant
quinze jours et l'aviser de son retour, d'obtenir au préalable de
l'autorité chargée de cette mission, l'autorisation pour tout
déplacement à l'extérieur du pays.67(*)
Il lui est également fait obligation de ne pas
paraître en certains lieux déterminés, sauf autorisation
temporaire ou spéciale, d'exercer une activité professionnelle,
de suivre un enseignement ou recevoir une formation professionnelle, de se
soumettre à des mesures de contrôle, de traitement ou de soins aux
fins d'intoxication même sous régime d'hospitalisation, de ne pas
fréquenter certains condamnés, notamment ses coauteurs ou
complices de l'infraction ayant suscité cette mesure.68(*)
II- LES EFFETS DES MESURES DE SURETE PRIVATIVES OU
RESTRICTIVES DE LIBERTE
Les mesures de sûreté produisent deux
effets principaux. D'abord la réadaptation sociale du délinquant
(A) et ensuite la protection de la société (B).
A-
LA READAPTATION SOCIALE DU DELINQUANT
La réadaptation sociale des délinquants soumis
aux mesures privatives ou restrictives des libertés s'accomplit par
trois moyens à savoir le travail, l'éducation, notamment
l'école et la formation professionnelle.
Le travail est le meilleur moyen d'éducation des
délinquants. Cette obligation a été formulée lors
du congrès des Nation Unies en 1955. Il a été dit à
ce congrès que tous les détenus condamnés doivent
être astreints au travail compte tenu de leur aptitude physique et telle
qu'elle sera établie médicalement. Le travail
pénitentiaire ne doit pas être considéré comme une
peine additionnelle, mais comme un moyen de faciliter la réadaptation
sociale des détenus, de les préparer à exercer un
métier, de leur inculquer de saines habitudes de travail et de
prévenir l'oisiveté et le désordre. Le travail
éduque et donne des résultats palpables puisqu'à la fin de
leur détention, les condamnés peuvent se mettre à leur
propre compte pour créer des richesses ou mettre leur compétence
au service de leur pays ou des personnes privées. Par exemple par des
techniques culturales modernes apprises de l'exécution des mesures de
sûreté qui leur ont été imposées, ils peuvent
non seulement subvenir à leurs propres besoins mais aussi à ceux
des autres citoyens. Ainsi par le travail en détention, ils deviennent
meilleurs et utiles.
Les mesures de surveillance et d'assistance
post-pénales permettent également au condamné de se
reclasser socialement car sa personnalité, sa famille, son nouveau
travail sont pris en compte. Il certain d'être observé par la
société qui ne tardera pas à réagir au cas il
serait tenté de tomber à nouveau dans la délinquance.
Cependant pour que toutes ces mesures soient efficaces, il faudra penser
à doter l'administration pénitentiaire et les autres organes de
moyens conséquents.
B-
LA PROTECTION DE LA SOCIETE
La stabilité, la paix sociale est la conséquence
du reclassent des membres de la société par les mesures qu'elle
leur impose. La famille qui est un élément essentiel de la
société se trouve protégée par l'obligation du
condamné de contribuer aux charges du ménage ou d'acquitter
régulièrement les pensions alimentaires prévue à
l'article 45 alinéa 5 du code pénal camerounais sur les mesures
de surveillance et d'assistance post-pénale. La société
elle-même se trouve protégée de la mendicité pouvant
être commise par certains de ses membres. Cette obligation constitue une
mesure d'assainissement social non négligeable dans le traitement de la
récidive.
La société, par les mesures comme la
relégation et l'internement, assure également sa stabilité
par la mise hors d'état de nuire des criminels dangereux et des
déments pouvant poser des actes aux conséquences incalculables.
En plus, la relégation est une mesure d'entraînement à la
discipline sociale. A bien rechercher la volonté du législateur,
l'on pense que pour lui, il n'y a pas d'hommes incorrigibles. Cette mesure est
un moyen susceptible de les ramener à la vie normale et la
société y gagne en terme de stabilité.
SECTION II- LES MESURES DE SURETE NON PRIVATIVES DE
LIBERTE
Les mesures de sûreté non restrictives de
liberté sont prévues par les articles 36 et 45 du code
pénal. Ce sont l'interdiction de profession, et la confiscation des
biens. Bien qu'étant une mesure particulière, nous parlerons
également dans cette partie de l'engagement préventif. La
compréhension du rôle de ces mesures sur la récidive passe
également par l'étude de leurs conditions d'une part (I) et de
leurs implications d'autre part (II).
I - LES CONDITIONS DES MESURES DE SURETE NON PRIVATIVES DE
LIBERTE
Notre tache portera ici sur l'analyse des conditions
nécessaires à l'application des mesures d'interdiction de
profession et de la confiscation des biens (A) et de celles de l'engagement
préventif (B).
A-
LES CONDITIONS NECESSAIRES A L'APPLICATION DES MESURES D'INTERDICTION DE
PROFESSION, DE LA CONFISCATION DES BIENS
Aux termes de l'article 36 du code pénal camerounais,
l'interdiction de profession requiert quatre conditions pour être
prononcée. Il faut dans un premier temps que l'infraction
entraînant la condamnation assortie de l'interdiction soit un crime ou un
délit de droit commun. Ce qui suppose l'exclusion des condamnations pou
contraventions et les condamnations pour infractions politiques. Dans un
deuxième temps, la juridiction qui prononce l'interdiction doit avoir
constaté une relation directe entre l'infraction et la profession du mis
en cause. Il faut dans ce cas de figure que la délinquance soit vraiment
liée à la vie professionnelle. Ensuite, la juridiction doit avoir
constaté que la continuation de l'exercice de la profession est de
nature à causer la rechute du condamné. Enfin, ces constatations
doivent être suffisamment motivées.
La confiscation nécessite une interdiction formelle,
par exemple, la fabrication, la détention, la vente ou l'usage d'une
chose quelconque, la commission d'une infraction ayant un rapport avec
l'interdiction, la constatation judiciaire du caractère illicite du bien
ou de la chose en cause.69(*)
B-
LES CONDITIONS NECESSAIRES A L'APPLICATION DE LA MESURE DE L'ENGAGEMENT
PREVENTIF
L'engagement préventif70(*) est la possibilité donnée au juge de
contraindre une personne qui n'a pas encore commis une infraction, ni
tenté de la commettre, de s'en abstenir. Il est applicable, sauf pour
les mineurs, sans qu'aucune infraction n'ait été encore commise.
Il ne peut donc être imposé que par une autorité
judiciaire, notamment le président du tribunal. Celui-ci doit constater
que la conduite de la personne indexée ne laisse aucun doute sur son
intention de commettre une infraction susceptible de troubler la paix publique.
Il est aussi tenu de fixer, en fonction des possibilités de
l'engagé une somme que celui-ci s'engage à payer dans
l'hypothèse où il viendrait à commettre l'infraction
durant la période déterminée. Cet engagement peut
être d'ailleurs renforcé par des garants qui viennent le secourir.
La durée de l'engagement qui est d'un an peut être portée
à trois ans lorsqu'il s'agit d'une délinquance d'habitude.
II- LES IMPLICATIONS DES MESURES DE SURETE NON PRIVATIVES DE
LIBERTE
Ces mesures bien que n'entraînant pas la privation de
liberté pour les personnes soumises à leur emprise jouent
cependant un rôle non négligeable dans le traitement de la
récidive. Les mesures d'interdiction de l'exercice de profession et de
confiscation des biens (A) et l'engagement préventif (B) ont des
implications certaines.
A
-LES MESURES D'INTERDICTION DE L'EXERCICE DE PROFESSION ET DE CONFISCATION DES
BIENS QUANT A LEURS IMPLICATIONS
L'interdiction de l'exercice de profession est temporaire. Sa
durée est en principe de cinq ans. Mais en cas de récidive
pour crime ou délit de même nature, cette interdiction est
perpétuelle. IL ne s'agit plus du doublement de la peine. Etant une
mesure post-pénale, elle s'exécute à l'expiration de la
peine principale. En cas de violation de l'interdiction de la profession,
l'interdit est puni d'une peine d'emprisonnement de quinze jours à six
mois et d'une amende de 10000 à 100000 francs cfa.71(*)
La confiscation des biens apparaît comme une mesure
énergique de protection sociale en ce sens qu'elle touche le corps du
délit. L'objet par lequel le crime ou le délit a
été perpétré est mis hors de portée du
récidiviste. Celui-ci n'aura plus l'occasion de l'utiliser pour
commettre d'autres infractions. Par ailleurs, la mesure de confiscation peut
être perçue également comme une mesure sans peine. La
personne poursuivie est déclarée non coupable mais ses biens sont
néanmoins confisqués par ce qu'ayant un caractère
illicite. L'objectif poursuivi ici est de protéger à tout prix la
société contre le danger que présente un bien, une chose
précise.
B-
L'ENGAGEMENT PREVENTIF QUANT A SON IMPLICATION
Le but de l'engagement préventif est d'éviter
les infractions futures en éliminant ou en neutralisant les facteurs
criminogènes72(*).
Elle met à nue et annihile l'intention non équivoque du
récidiviste de commettre dans un futur proche une infraction. Il faut
noter que le refus de l'engagement préventif entraîne
l'incarcération de la personne en cause jusqu'à l'acceptation de
la mesure ou jusqu'à la désignation d'un garant. Cette
incarcération ne peut excéder la durée de la
période prévue dans l'engagement. Si l'engagé viole la
promesse de ne pas commettre l'infraction redoutée, il peut faire
l'objet d'une contrainte par corps car la somme fixée
préalablement par le président du tribunal saisi devient une
amende, sans préjudice des poursuites contre l'infraction commise.
D'ailleurs, le paiement de cette somme est indépendant des
pénalités résultant de cette infraction.
D'où vient-il alors que malgré le durcissement
de la répression par l'aggravation de la sanction pénale et la
soumission aux mesures de sûreté des délinquants, la
récidive demeure récurrente et marquée d'une
vitalité déconcertante ?
DEUXIEME PARTIE : LES NOUVELLES FORMES DE TRAITEMENT DE
LA RECIDIVE
Comme nous l'avons vu dans les développements
précédents, le recours systématique à l'aggravation
de la sanction pénale n'a pu éradiquer la récidive qui
d'ailleurs continue encore à faire des ravages et à
ébranler l'opinion publique des différentes nations
confrontées à ce fléau. Le système carcéral
ayant montré ses limites (Chapitre I), d'autres alternatives ont
été mises en place (Chapitre II).
CHAPITRE I - LES LIMITES DU SYSTEME CARCERAL
Il est généralement dit dans le mythe fondateur
de la prison que l'enfermement carcéral a pour fonction d'amender et de
réinsérer ceux qui le subissent. L'observation du
phénomène de la criminalité montre cependant que la
récidive demeure un problème récurrent. Abordant la
question de l'échec de la prison, Michel Foucault soutenait que la
détention provoque la récidive ; elle ne peut manquer de
fabriquer des délinquants. Il ajoutait également que la prison
favorise l'organisation d'un milieu de délinquant.73(*) Qu'est-ce qui peut bien
expliquer Cet échec ? L'on peut dire que la récidive est une
réalité qui est insuffisamment prise en compte par la
chaîne pénale (Section I). La prison est également
considérée aujourd'hui comme un cadre de développement de
ce fléau. (Section II).
SECTION I - LA RECIDIVE : UNE REALITE INSUFFISAMMENT
PRISE EN COMPTE PAR LA CHAINE PENALE
Le traitement de la récidive n'a pas encore acquis ses
lettres de noblesse pour plusieurs raisons : d'abord elle est un
concept délicat pouvant être confondu aux notions voisines et qui
suscite une justice sévère mais aveugle (A). Ensuite la poursuite
par voie de flagrant délit ne permet pas de connaître le
passé pénal d'un individu (B). Il y a également
l'épineux problème de l'exécution des décisions de
justice (C).
A-
LA RECIDIVE : UN CONCEPT DELICAT POUR UNE JUSTICE SEVERE MAIS AVEUGLE
La récidive est une notion difficile à cerner
dans la mesure où le risque de la confondre aux notions voisines que
sont le concours réel d'infractions et la réitération est
évident. Dans les trois hypothèses, il y a forcément une
commission successive de plusieurs infractions par un même un
délinquant. Cependant là où la loi opère une
distinction entre ces trois concepts, certaines personnes les qualifient
indistinctement de récidive.
La récidive telle que définie par la loi est une
situation dans laquelle après avoir fait l'objet d'une condamnation
pénale devenue définitive, appelé le premier terme de la
récidive, le délinquant commet une nouvelle infraction, le second
terme, qui va aggraver la première peine prévue.
Le concours réel d'infractions intervient lorsque
plusieurs infractions sont commises par un même délinquant sans
qu'aucun jugement de condamnation définitif ne soit intervenu. Il peut
s'agir d'infractions poursuivies au même moment et ayant fait l'objet
d'un jugement unique. Il peut également s'agir d'infractions ayant fait
l'objet de plusieurs poursuites et jugements.
La réitération concerne la situation dans
laquelle une personne déjà définitivement condamnée
commet une nouvelle infraction dans des conditions qui ne correspondent pas
à celles de la récidive légale. Ainsi, les similitudes
entre ces trois notions empêchent non seulement de mieux cerner la
récidive mais aussi de donner un état chiffré
précis du taux de sa prévalence.74(*)
Il y a lieu de préciser que lorsque les conditions de
la récidive légale sont réunies, automatiquement le double
du maximum de la sanction prévue est appliqué au
délinquant mis en cause. A ce stade, le juge répressif
apparaît simplement comme un distributeur automatique de sanctions.
Certes le récidiviste est durement réprimé mais ce dernier
perd de vue l'intérêt de la victime qui ne souhaite qu'une juste
indemnisation et non forcément une sévère
répression de son bourreau.
B-
LA POURSUITE PAR VOIE DE FLAGRANT DELIT : UN OBSTACLE A LA CONNAISSANCE DU
PASSE PENAL DU RECIDIVISTE
La poursuite par voie de flagrant délit est un mode de
saisine du tribunal correctionnel initié par le parquet. Elle a lieu
lorsqu'à la suite d'une enquête de police ou de gendarmerie
révélant la commission d'une infraction, celui qui parait en
être l'auteur est conduit devant le procureur de la république.
Lorsque les faits déplorés sont avérés, celui-ci
procède immédiatement à son inculpation en lui notifiant
les faits mis à sa charge, la qualification légale retenue, les
textes applicables. Il le renseigne sur sa situation pénale et la date
de l'audience à laquelle il devra comparaître.
Cette voie de saisine qui se caractérise par la
célérité quant au traitement du dossier ne permet pas au
ministère public chargé de soutenir l'accusation de
procéder à une vérification du passé pénal
de la personne poursuivie, que celui-ci soit né dans son ressort ou
ailleurs. Le casier judiciaire est pratiquement inaccessible dans la mesure
où non seulement il peut être sollicité de n'importe quelle
juridiction du pays mais aussi, parce qu'il n'est pas centralisé obtenu
rapidement. Par ailleurs, il faut aussi relever que les parquets ne
relèvent pas systématiquement la récidive comme
circonstance aggravante lorsqu'ils saisissent le tribunal.
Jean Luc Warsmann, à ce sujet, a soutenu que
l'incapacité de la justice à « être
renseigné en temps réel sur l'existence des condamnations qu'elle
a elle-même prononcées (...) a des conséquences graves sur
la décision que le tribunal sera amené à rendre. Dans
l'ignorance d'une ou plusieurs condamnations, non encore parvenues au casier
judiciaire, le tribunal n'est pas non plus informé de
l'éventuelle récidive commise par le prévenu. Il ne sait
pas, en outre, au cas où il prononce une peine d'emprisonnement ferme si
celle-ci révoque des sursis qui ont été
précédemment prononcés »75(*) Jacques céline
estime également que ce ralentissement dans la transmission du casier
judiciaire peut être mise à la charge des techniques
elles-mêmes qui demeurent archaïques et hostiles aux nouvelles
technologies de l'information et de la communication.76(*)
La récidive est ainsi est favorisée par une justice
qui ignore la personnalité et n'individualise pas la sanction: à
justice aveugle, récidive certaine est-on tenté de relever.
C-
L'EPINEUX PROBLEME DE L'EXECUTION DES DECISIONS DE JUSTICE
L'exécution des décisions de condamnation
pénale constitue aujourd'hui un atout majeur pour la permanence de la
récidive. De nombreuses difficultés existent. D'abord le code de
procédure pénale camerounais est outrancièrement
protecteur du délinquant, même au niveau de l'exécution de
la décision rendue à son encontre. Par exemple lorsque le
tribunal prononce une peine privative de liberté, il décerne un
mandat d'incarcération ou un mandat d'arrêt contre le
condamné. Toutefois, si ce dernier manifeste l'intention de relever
appel du jugement et si la peine n'excède pas un an, le tribunal peut,
à la demande du condamné, le laisser en liberté
jusqu'à l'expiration des délais d'appel.77(*)
Cette pratique a pour effet de banaliser la fonction
intimidante et dissuasive de la peine. Or l'exécution de la
première sanction est un élément essentiel dont les vertus
pédagogiques et préventives ne peuvent être
ignorées. Plus il y a retard entre le prononcé et
l'exécution de la condamnation, moins la peine est comprise. Pourtant,
il faut exécuter les sanctions pénales sans délai, ni
faiblesse et donner du sens à la politique de sécurité de
l'Etat.
Ensuite, tous les acteurs intervenant dans le processus de
l'exécution des décisions rendues par les juges ne jouent pas
pleinement leur rôle. Les parquets contrôlent rarement
l'effectivité de l'exécution des mandats d'arrêt transmis
aux unités de police ou de gendarmerie et encore moins la
présence physique des délinquants incarcérés dans
les prisons. Les officiers de police judiciaire sont peu enclins à
exécuter les mandats de justice motifs pris de ce qu'ils manquent de
personnel et de moyens de locomotion. Le personnel de l'administration
pénitentiaire a pris la fâcheuse habitude de se familiariser et de
s'attacher aux détenus, toute chose de nature à conforter ces
derniers dans leur volonté de transgression permanente des règles
sociales. Les évasions sont également facilitées par leur
sous équipement en armement performant et en matériel roulant.
C'est pourquoi, entre autres raisons, la prison est considérée
comme une machine à récidive.
SECTION II - LA PRISON : UN CADRE DE DEVELOPPEMENT DE LA
RECIDIVE
La prison est un lieu qui favorise la récidive et ce
pour de multiples raisons : Les délinquants vivent dans des
conditions d'incarcération peu propices à leur
amélioration (I), sont aux prises avec des facteurs qui stimulent leur
volonté de transgression des règles sociales (II).
I - DES CONDITIONS D'INCARCERATION PEU PROPICES A
L'AMELIORATION DE L'HOMME
La prison se caractérise généralement par
des conditions matérielles (A) ou humaines (B) très souvent
dégradantes, humiliantes et aux antipodes des Droits Fondamentaux de
l'Homme. Elle reflète généralement le niveau de
développement des sociétés dans lesquelles elle est
érigée. Ce sont les deux aspects qui font d'elle un cadre de
développement de la récidive.
A -
DES CONDITIONS MATERIELLES DEGRADANTES
En dehors de la surpopulation carcérale permanente,
les détenus sont très souvent confrontés aux autres
occupants permanents des cellules : les rats et les cafards. Les
sanitaires et les douches sont communs, mal ou pas du tout entretenus et ne
laissent que peu de place à l'intimité. Vivre en cellule c'est
aussi être très souvent contraint de subir les aléas du
thermomètre extérieur, ne pas choisir sa compagnie. La nourriture
est non seulement de piètre qualité, mais aussi insuffisante. La
vie en cellule est pesante et dans les établissements les plus anciens
ou vétustes, elle est humainement dégradante. La pesanteur de la
détention vient souvent des gens avec qui elle est partagée, mais
l'inhumanité de l'incarcération revient, pour sa part, à
l'insalubrité des conditions de détention dégradantes.
Le régime de l'emprisonnement commun qui
caractérise généralement nos prisons, parce que
présentant l'avantage d'être moins coûteux, a ses
inconvénients. Du point de vue moral, il corrompt plus qu'il amende. La
promiscuité qu'il comporte ne contribue guère au
relèvement de l'individu. Elle l'expose à subir les mauvaises
influences et, au lieu de l'améliorer, elle risque de le pervertir
moralement et physiquement. Les communications entre les détenus qui
vivent en commun sont considérables. De véritables associations
de malfaiteurs peuvent ainsi se constituer à l'intérieur de la
prison, en vue de préparer des crimes qu'ils commettront ensemble
après leur libération.78(*)
B - DES CONDITIONS HUMAINES DEGRADANTES
Lors d'un entretien avec un détenu
multirécidiviste à la prison centrale de Garoua quant à sa
détention, il a fait les déclarations suivantes :
« La prison, agresse permanemment l'esprit et le
corps. Elle se caractérise par de fortes odeurs, des bruits insondables,
des voix fortes, des cris. Lorsqu'on y pénètre, on est envahi par
une sensation oppressante de dureté qui se dégage des êtres
et des choses. Une angoisse vous saisit à tel point qu'elle vous
paralyse dans un mal-être permanent dont il est difficile de se
débarrasser. La prison a ses règles, ses traditions, sa culture
propre. C'est un milieu ayant ses règles, ses rites qui d'ailleurs sont
aux antipodes de ce que l'on peut connaître à l'extérieur.
Ici, la règle qui prédomine sur tout le reste est la loi du plus
fort, du plus malin, du plus vicieux .Elle rassemble tout ce que
l'humanité a de mauvais »79(*)
Ces propos son suffisamment édifiantes pour ce
qui est des causes de la récidive en milieu carcéral.
Une chose est sure, les personnes vivant dans des conditions difficiles en
prison ont cette propension à récidiver dès que l'occasion
leur est offerte car les conditions dans lesquelles elles vivent les
prédisposent à la récidive.
II- LES AUTRES FACTEURS DE STIMULATION DE LA RECIDIVE EN
MILIEU CARCERAL
Les détenus sont généralement soumis
à l'enfermement commun. Ce qui permet à ceux d'entre eux qui sont
endurcis dans le crime d'influencer négativement ceux qui sont encore
à leurs premiers pas (A). L'on note également que
l'évaluation de leur dangerosité est insuffisante (B) et leur
sortie de prison n'est pas du tout préparée (C). Ce qui favorise
la propagation de la récidive.
A-
L'INFLUENCE DES DETENUS ENDURCIS SUR LES DELINQUANTS PRIMAIRES
Les détenus endurcis exercent sur les jeunes
délinquants une influence manifestement déterminante qui se
traduit par un renforcement de leurs comportements antisociaux On y
retrouve les meurtriers ou violeurs en série, les têtes pensantes
de réseaux criminels. En effet, le contact entre deux criminels
exacerbe la criminalité, soit en la flattant par le récit de
leurs exploits, soit en échafaudant de nouveaux desseins criminels pour
le temps qui suit leur libération. Le criminel étant souvent un
homme seul à sa sortie, les seuls réseaux de réinsertion
lui sont fournis par les connaissances de la prison. Ces réseaux sont
généralement mis à sa disposition par des détenus
professionnels du crime de haute facture qui se sont illustrés par une
criminalité organisée, réfléchie et bien
structurée. Cette criminalité étant fondée le plus
souvent sur des réseaux, la stimulation de ces réseaux par la
promiscuité carcérale aura une incidence négative sur le
potentiel avenir du jeune délinquant.
Par ailleurs, il y a un phénomène qui semble
aujourd'hui prospérer. L'incarcération redevient un rite de
passage obligatoire dans les bandes organisées et les classes sociales
non scolarisées et analphabètes. « Tu es un homme
maintenant ! » s'adressent-elles à l'un des leurs lorsque
celui-ci se retrouve en prison. Toutes ces considérations amènent
le délinquant débutant à s'engager résolument dans
la voie de la récidive.
B
-UNE INSUFFISANTE EVALUATION DE LA DANGEROSITE DES DETENUS
L'évaluation de la personnalité des
détenus quant à leur dangerosité pour eux-mêmes
(risque suicidaire), pour les gardiens surveillants et leurs codétenus
(risque d'agression) ou pour l'administration pénitentiaire (risque
d'évasion ou de trafics divers) est embryonnaire ou inexistante. Le
risque de récidive est par conséquent inconnu. La pratique en
vigueur, bien que nécessaire, n'en demeure pas moins partielle et
dépourvue de tout caractère prospectif sur la dangerosité
du détenu qui est généralement définie
comme un phénomène psychosocial caractérisé
par les indices révélateurs de la grande probabilité pour
un individu de commettre une infraction contre les personnes ou les biens.
Alors que récidive et comportement dangereux sont liés, aucun
instrument spécifique tendant à leur évaluation n'est
prévu.
C -
UNE ABSENCE DE PREPARATION DE LA SORTIE DES DETENUS APRES L'EXECUTION DE LEURS
PEINES
Parce qu'elle est privative de liberté, la prison a
également pour effet d'anémier la capacité du
détenu à se prendre en charge. Préparer la sortie, c'est
avant tout, réapprendre les gestes de l'autonomie et donc lutter contre
la récidive. Comme l'a signalé Jean-Luc Warsmann dans son rapport
précité, « la sortie de prison, quelle que soit la
durée de la peine purgée, est un moment difficile à vivre.
La personne libérée sans préparation ni accompagnement
risque de se retrouver à nouveau dans un environnement familial ou
social néfaste, voire criminogène, ou bien au contraire dans un
isolement total, alors qu'elle aurait besoin de soutien pour se
réadapter à la vie libre. Tout ceci peut l'amener à la
récidive »80(*). L'on constate généralement que la
sortie de prison des délinquants ayant purgé leur peine n'est
pas toujours suivie.
A l'issue de l'étude de l'emprisonnement comme
principal mode de traitement de la récidive, une insatisfaction subsiste
dans notre esprit. L'on se demande s'il constitue la meilleure façon de
faire face à la récidive qui pratiquement met à nue les
failles des politiques criminelles mises en place par les Etats. L'on est
même tenté de convenir avec Serges Portelli que c'est une
politique irresponsable et dangereuse que de laisser croire aux citoyens que la
criminalité pourrait se dissoudre dans plus de prisons . Par
ailleurs, le recours-réflexe à l'incarcération pour
juguler les désordres urbains est un remède qui, dans bien des
cas, ne fait qu'aggraver le mal qu'il est censé guérir.
Institution basée sur la force et opérante, la prison est un
creuset de violences et d'humiliations quotidiennes, un vecteur de
désaffiliation familiale, de méfiance civique et
d'aliénation individuelle.
Et, pour beaucoup de détenus marginalement
impliqués dans des activités illicites, c'est une école de
formation, voire de « professionnalisation », aux
carrières criminelles. Pour d'autres, et ce n'est guère mieux,
l'enfermement est un gouffre sans fond, un enfer hallucinatoire qui prolonge la
logique de destruction sociale qu'ils ont connue à l'extérieur en
la redoublant d'un broyage personnel. L'histoire pénale montre, en
outre, qu'à aucun moment et dans aucune société la prison
n'a su accomplir la mission de redressement et de réintégration
sociale qui est censée être la sienne dans une optique de
réduction de la récidive.81(*)
En plus, le récidiviste n'est pas un monstre et il ne
sert à rien de le diaboliser. Il faut plutôt faire appel aux
autres formes de traitement également efficaces et nécessaires
à sa réinsertion.
CHAPITRE II : LA PROMOTION DES MESURES
ALTERNATIVES DE TRAITEMENT DE LA RECIDIVE
Des recherches ont démontré que les programmes
visant à résoudre les problèmes qui empêchent les
délinquants de fonctionner dans la collectivité permettent
efficacement de réduire la récidive criminelle et sont, par
conséquent, essentiels à la poursuite de l'objectif premier du
système correctionnel, à savoir le maintien d'une
société juste, paisible et sécuritaire.
Compte tenu du fait que la plupart des délinquants qui
purgent une peine d'emprisonnement sont libérés un jour ou
l'autre dans la collectivité, il est de la plus grande importance de
reconnaître que l'emprisonnement ne constitue qu'une mesure temporaire de
sécurité publique et que seule une transformation durable du
comportement des délinquants peut assurer une protection de la
collectivité à long terme. A cet égard, le suivi-socio
judiciaire par la surveillance électronique ( Section I) et le suivi
médical avec injonction de soins (Section II) apparaissent comme de
nouvelles techniques de lutte contre la récidive.
SECTION I - LE SUIVI-SOCIO JUDICIAIRE DES RECIDIVISTES PAR
LEUR PLACEMENT SOUS SURVEILLANCE ELECTRONIQUE
Le suivi socio-judiciaire emporte, pour le condamné,
l'obligation de se soumettre, sous le contrôle du juge de l'application
des peines et pendant une durée déterminée par la
juridiction de jugement, à des mesures de surveillance et d'assistance
destinées à prévenir la récidive. La durée
du suivi socio-judiciaire ne peut excéder dix ans en cas de condamnation
pour délit ou vingt ans en cas de condamnation pour crime. Toutefois, en
matière correctionnelle, cette durée peut être
portée à vingt ans par décision spécialement
motivée de la juridiction de jugement.82(*)
Lorsqu'il s'agit d'un crime puni de trente ans de
réclusion criminelle, cette durée est de trente ans ; lorsqu'il
s'agit d'un crime puni de la réclusion criminelle à
perpétuité, le tribunal de grande instance compétent peut
décider que le suivi socio-judiciaire s'appliquera sans limitation de
durée, sous réserve de la possibilité pour le tribunal de
l'application des peines de mettre fin à la mesure à l'issue d'un
délai de trente ans. La décision de condamnation fixe
également la durée maximum de l'emprisonnement encouru par le
condamné en cas d'inobservation des obligations qui lui sont
imposées.
Cet emprisonnement ne peut excéder trois ans en cas de
condamnation pour délit et sept ans en cas de condamnation pour crime.
Les conditions dans lesquelles le juge de l'application des peines peut
ordonner, en tout ou partie, l'exécution de l'emprisonnement sont
fixées par le code de procédure pénale. Le
président de la juridiction, après le prononcé de la
décision, avertit le condamné des obligations qui en
résultent et des conséquences qu'entraînerait leur
inobservation. Le suivi socio-judiciaire est une nouvelle et intelligente
approche de la récidive. Il intègre le placement sous
surveillance électronique comme outil de politique pénale (I)
dont il apparaît nécessaire de s'interroger sur ses enjeux
(II).
I- LE PLACEMENT SOUS SURVEILLANCE ELECTRONIQUE : UN
NOUVEL OUTIL DE POLITIQUE PENALE CONTRE LA RECIDIVE
Il est question à ce niveau de mener une étude
sur la définition et l'introduction de la surveillance
électronique en droit positif français (A), la mise en oeuvre du
placement sous surveillance électronique (B).
A-
LA DEFINITION ET L'INTRODUCTION DU PLACEMENT SOUS SURVEILLANCE ELECTRONIQUE EN
DROIT POSITIF FRANÇAIS
Le placement sous surveillance électronique comprend
à la fois le placement sous surveillance électronique fixe (1)
et le placement sous surveillance électronique mobile (2).
1-
Le placement sous surveillance électronique fixe
Le placement sous surveillance électronique est un
dispositif technique qui consiste à apposer sur le délinquant un
bracelet électronique fixe, destiné à suivre ses
mouvements sur un espace donné et pour une durée précise.
Il s'agit d'une surveillance statique effectuée grâce à un
système à émission continue qui fait appel à trois
constituants à savoir un émetteur fixé sur un bandeau
attaché à la cheville ou au poignet de la personne
assignée appelé bracelet électronique, un récepteur
placé au lieu d'assignation consistant en un boîtier relié
à une ligne téléphonique et au secteur électrique,
un centre de surveillance situé au sein d'un établissement
pénitentiaire et regroupant des équipements informatiques et de
télécommunications.
L'émetteur ou le bracelet électronique,
posé à la cheville ou au poignet du délinquant,
doté d'une batterie émet automatiquement des signaux radios de
présence très fréquents d'une portée de quelques
dizaines de mètres. En cas de rupture du bandeau par son porteur, il
émet des signaux d'alarme spécifiques. Il est étanche et
anallergique. La personne assignée le porte en permanence pendant toute
la durée de sa peine. Le récepteur placé au lieu
d'assignation capte et décode les signaux émis par le bracelet
électronique porté par cette dernière. Si le niveau de
réception des signaux émis par le bracelet devient faible ou
inexistant pendant les horaires d'assignation, ce qui traduit l'absence de la
personne assignée de son lieu d'assignation et le récepteur
envoie automatiquement, via la ligne téléphonique, un message au
centre de surveillance.
Celui-ci détermine alors si l'absence du
délinquant des lieux de l'assignation est licite ou non en en fonction
des horaires d'assignation préalablement fixés par le juge. Il
n'est pas superflu de rappeler que le récepteur dispose d'une batterie
de secours qui lui permet de fonctionner pendant douze heures d'affilée
en cas de coupure de défaillance du secteur électrique. Le
placement sous surveillance électronique fixe a été
consacré en France par la loi du 19 décembre 1997 portant sur
modalités de l'exécution des peines privatives de liberté.
2-
Le placement sous surveillance électronique mobile
Instauré par la loi du 12 décembre 2005, le PSEM
(placement sous surveillance électronique mobile), consiste à
faire porter au condamné un bracelet électronique
intégrant un émetteur qui permet, à tout moment, de
déterminer à distance sa localisation sur l'ensemble du
territoire national. Le dispositif est installé sur le condamné
au plus tard une semaine avant la libération. Contrairement au simple
PSE (placement sous surveillance électronique), le PSEM ne
nécessite pas, pour le détenu, de disposer d'un
hébergement et d'une ligne de téléphone fixes. Sa mise en
oeuvre doit garantir le respect de la dignité, de
l'intégrité et de la vie privée de la personne.
B-
LA MISE EN OEUVRE DE LA SURVEILLANCE ELECTRONIQUE DANS LE TRAITEMENT DE LA
RECIDIVE
Les moyens de traitement de la récidive dans ce cas de
figure sont le placement sous surveillance électronique mobile (1) et le
placement sous surveillance électronique fixe (2).
1-
La mise en oeuvre du placement sous surveillance électronique mobile
Cette mise en oeuvre a trait aux personnes susceptibles de
faire l'objet d'un placement sous surveillance électronique mobile (a),
aux autorités compétentes en cette matière (b), à
la durée et au recours possible contre cette mesure (c).
a- Les personnes susceptibles de faire l'objet d'un
placement sous surveillance électronique mobile
La loi du 12 décembre 200583(*) a prévu qu'à
compter de leur libération les personnes majeures condamnées
à une peine privative de liberté d'au moins sept ans et dont la
dangerosité aura été reconnue par expertise
médicale pourront être placées sous surveillance
électronique mobile, à titre de mesure de sûreté
dans le cadre d'un SSJ (suivi socio-judiciaire) qui aura été
prononcé par le juridiction de jugement au moment de la condamnation. Ce
placement est décidé lorsqu'il apparaît indispensable
à la prévention de la récidive. Le PSEM (placement sous
surveillance électronique mobile) peut également être
requis à l'égard d'une personne bénéficiant d'une
libération conditionnelle, si elle a été condamnée
pour une infraction pour laquelle le SSJ était encouru, mais n'a,
cependant, pas été ordonné par la juridiction de
jugement.
D'autre part, les personnes condamnées
antérieurement à la loi précitée peuvent
également être soumises à ce régime par le biais de
la surveillance judiciaire. Après une expertise médicale de
dangerosité, la surveillance électronique mobile peut ainsi
être utilisée pour les condamnés libérés, et
ce, quelle que soit la date de commission des faits ayant donné lieu
à la condamnation. Ainsi, le PSEM peut, notamment, s'appliquer dans
l'hypothèse où le condamné ne souhaite pas
bénéficier d'une libération conditionnelle. Les
différentes formes de recours au PSEM ne peuvent pas, en principe,
être appliquées cumulativement. Cependant, les personnes
condamnées pour des faits antérieurs à l'entrée en
vigueur de la loi peuvent être placées sous surveillance
électronique mobile dans le cadre de la surveillance judiciaire, alors
même que leur peine d'emprisonnement serait déjà assortie
d'un SSJ.
b- Les autorités compétentes en
matière de placement sous surveillance électronique
mobile
Le PSEM peut être décidé par la
juridiction de jugement comme obligation d'un SSJ. Lorsque le PSEM est
ordonné par un tribunal correctionnel, il doit faire l'objet d'une
décision spécialement motivée. Lorsque c'est une cour
d'assises qui l'ordonne, il doit alors être décidé dans les
conditions de majorité prévues pour le condamné du maximum
de la peine. Lorsque la juridiction de jugement n'a pas ordonné de PSEM,
le JAP (juge de l'application des peines) peut, après la
libération, ajouter, de sa propre initiative, cette mesure à un
SSJ déjà prononcé.
Dans les deux cas, les décisions du JAP sont prises au vu
d'une expertise médicale de dangerosité qu'il met en oeuvre
après avis de la commission pluridisciplinaire des mesures de
sûreté (organisme nouvellement créé par la loi du 12
décembre 2005). Le PSEM décidé dans le cadre de la
libération conditionnelle est ordonné par le JAP ou le TAP
(tribunal de l'application des peines) selon les mêmes
modalités.
Le JAP est, par ailleurs, compétent pour prononcer un
PSEM, dès lors qu'il décide de soumettre un condamné
à une surveillance judiciaire après sa libération. Sa
décision de placer le condamné sous surveillance
électronique mobile intervient après avis de la commission
pluridisciplinaire des mesures de sûreté. Ces compétences
sont exercées par le TAP lorsque la personne a été
condamnée pour des faits commis avant l'entrée en vigueur de la
loi du 12 décembre 2005.
c- La durée et le recours contre le placement
sous surveillance électronique mobile
La durée effective du PSEM est déterminée
par le JAP un an au moins avant la date prévue de libération du
condamné soumis à cette surveillance, au vu d'un examen
censé permettre d'évaluer sa dangerosité et de mesurer le
risque de commission d'une nouvelle infraction. D'autre part, le JAP peut
décider, selon les mêmes modalités, de la prolongation du
placement. A défaut de prolongation, il est mis fin au PSEML Le JAP se
prononce sur la durée et la prolongation éventuelle de cette
mesure après débat contradictoire. Ces deux décisions
peuvent faire l'objet d'un appel de la part du condamné ou du procureur,
dans un délai de dix jours à compter de leur notification, et
d'un pourvoi en cassation dans les cinq jours, selon la procédure
applicable dans le cadre des mesures d'aménagement de peine.84(*)
En tout état de cause, la durée du PSEM ne peut
excéder deux ans ; elle est renouvelable une fois, en
matière délictuelle, et deux fois, en matière criminelle.
Par ailleurs, lorsque le PSEM est ordonné dans le cadre d'une
surveillance judiciaire, le JAP peut décider, par jugement, de prolonger
le PESM, sans que la durée totale de celui-ci ne dépasse celle
des réductions de peine. Le condamné doit, alors, être
obligatoirement assisté d'un avocat lors du débat contradictoire.
Cette décision de prolongation est pareillement susceptible de
recours.
Les condamnés, comme le procureur, peuvent contester
une ordonnance de PSEM prise par le JAP. L'appel doit se faire dans un
délai de vingt-quatre heures à compter de la notification de la
décision. En cas d'appel du condamné, le parquet dispose d'un
délai supplémentaire de vingt-quatre heures pour faire appel
à son tour. L'appel est porté devant le président de la
chambre de l'application des peines de la cour d'appel, qui statue par
ordonnance motivée, au vu des observations écrites du
condamné, ou de son avocat, et des réquisitions du procureur de
la république85(*).
La décision du président de la chambre de l'application des
peines peut faire l'objet d'un pourvoi en cassation dans les cinq jours de sa
notification.
2-
La mise en oeuvre du placement sous surveillance électronique fixe
Le placement sous surveillance électronique fixe est
une forme d'assignation à domicile contrôlée à
distance. Sa bonne compréhension suppose également une
présentation des personnes susceptibles de la subir (a), des personnes
habilitées à l'ordonner (b), une indication de sa durée et
de la possibilité d'un recours possible à son encontre(c).
a- Les personnes susceptibles de placement sous
surveillance électronique fixe
Sont susceptibles de faire l'objet d'une
telle mesure, les personnes mises en examen, les personnes
condamnées à une ou plusieurs peines privatives de liberté
dont la durée n'excède pas un an ou les personnes
condamnées avec un reliquat de peine inférieur ou égal
à un an mais qui purgent leur peine en dehors du milieu carcéral,
les personnes qui ont purgé leur peine, mais font l'objet d'un suivi
socio-judiciaire, d'une « surveillance de sûreté» ou
d'une interdiction de séjour.
Les conditions matérielles à remplir sont les
suivantes : avoir un domicile fixe ou un hébergement stable (au
moins pendant la durée du placement sous surveillance
électronique) ; posséder une ligne de téléphone
fixe sans aucun ajout (Internet, répondeur...) ; s'il y a lieu, disposer
d'un certificat médical attestant de la compatibilité de
l'état de santé de la personne bénéficiaire avec le
port du bracelet électronique ; avoir le consentement de la personne
condamnée lorsque cette mesure n'a pas été ordonnée
par la juridiction de jugement ;
Elle peut se faire assister d'un avocat, au besoin
désigné par le bâtonnier, pour décider de donner ou
non son accord à la mesure. Le JAP doit l'informer de cette
possibilité. Lorsque la mesure concerne un mineur, les titulaires de
l'autorité parentale doivent exprimer leur consentement, en plus de
celui de l'intéressé. La personne condamnée est, d'autre
part, en droit d'exiger qu'un médecin vérifie que ce placement
électronique ne présente pas de danger pour sa santé. Le
JAP peut également décider d'office de faire procéder
à cet examen médical.
En outre, chaque fois qu'il est envisagé d'assigner
l'intéressé ailleurs que dans son propre domicile, le
consentement du « maître des lieux » est requis, sauf
s'il s'agit d'un lieu public. Il s'agit de la personne qui cohabite avec le
condamné et qui est le propriétaire ou le titulaire du contrat de
location du lieu où sera installé le récepteur. Son accord
écrit est recueilli par le service pénitentiaire d'insertion et
de probation, sauf si le condamné a lui-même fourni le document au
juge.
Si le condamné est propriétaire ou locataire
conjointement avec une autre personne, le consentement de cette dernière
doit également être recueilli par écrit. Le contexte
familial et social doit, d'autre part, être favorable à la mise en
oeuvre d'une telle mesure. Une enquête peut être
réalisée pour s'en assurer. La Cour de cassation considère
que les autres membres du foyer doivent être informés de
l'assignation dans les lieux du condamné sous surveillance
électronique. (Arrêt de la chambre criminelle du 15 février
2005).
Pour bénéficier de cette mesure, la personne
condamnée doit justifier soit de l'exercice d'une activité
professionnelle, soit de son assiduité à un enseignement ou un
formation professionnelle, ou encore d'un stage ou d'un emploi temporaire en
vue de son insertion sociale, soit de sa participation essentielle à la
vie de sa famille, soit de la nécessité de suivre un traitement
médical. La juridiction compétente doit également
apprécier la capacité du condamné à se soumettre
aux conditions particulières de cette mesure.
b- Les autorités compétentes en
matière de placement sous surveillance électronique
fixe
Le placement sous surveillance électronique fixe est
une mesure qui peut être prononcée à différents
stades soit par la juridiction de jugement, soit par la juridiction de
l'application des peines. Lorsqu'un tribunal correctionnel, une cour d'appel ou
un tribunal de grande instance prononce une peine d'emprisonnement ferme
inférieure ou égale à un an, cette juridiction peut
décider qu'elle sera exécutée sous le régime du
placement sous surveillance électronique. Il appartient, ensuite, au JAP
(juge de l'application des peines) de fixer, dans un délai de quatre
mois, par une ordonnance non susceptible de recours, les modalités de
l'exécution de la mesure.
Le JAP peut aussi substituer au placement sous surveillance
électronique fixe initialement prévu une autre mesure
(semi-liberté ou placement à l'extérieur), si elle lui
paraît plus adaptée à la personnalité du
condamné ou si les moyens disponibles le justifient. Il peut
décider de ce placement avant l'incarcération du
condamné.86(*)
Lorsqu'il se prononce au cours de l'exécution de la peine, il est
compétent pour décider d'un placement sous surveillance
électronique à l'égard d'une personne condamnée
à une ou plusieurs peines d'emprisonnement dont le total n'excède
pas un an. Lorsque ce placement intervient comme une mesure probatoire à
l'octroi d'une libération conditionnelle, il est décidé
par le JAP. Dans ce cas, la durée du placement ne peut excéder un
an.
c- La durée et le recours contre le refus
placement sous surveillance électronique fixe
Le placement sous surveillance électronique prend fin
à son terme qui est la date de la fin de la peine, lorsque le
placé fait l'objet d'une sanction de retrait de la mesure de placement
ou lorsque le condamné restitue le bracelet. Le condamné, comme
le procureur, peut contester une décision de refus d'une mesure de
placement sous surveillance électronique fixe. Cet appel doit se faire
dans un délai de dix jours à compter de la notification de la
décision. En cas d'appel du condamné, le parquet dispose d'un
délai supplémentaire de cinq jours pour faire appel à son
tour. Lorsque l'appel du procureur intervient dans les vingt-quatre heures de
la notification, l'exécution de la mesure est suspendue.
L'appel est porté devant la chambre de l'application
des peines de la cour d'appel, qui statue après un débat
contradictoire, au cours duquel sont entendues les réquisitions du
procureur et les observations de l'avocat du condamné. Sauf
décision contraire de la chambre, le condamné n'est pas entendu.
Si la chambre confirme le jugement refusant d'accorder cet aménagement
de peine, elle peut fixer un délai pendant lequel toute nouvelle demande
sera irrecevable. Ce délai ne peut excéder ni le tiers du temps
de détention restant à subir ni trois années. La
décision de la chambre de l'application des peines peut faire l'objet
d'un pourvoi en cassation dans les cinq jours suivant sa notification.
II - LES ENJEUX DU PLACEMENT SOUS SURVEILLANCE ELECTRONIQUE DU
DELINQUANT
Les enjeux du placement sous surveillance électronique
sont immenses. Il y a tout d'abord l'élargissement du filet et la
surpénalisation des délinquants (A), les effets sur la population
et la surpopulation carcérale (B). Il y a ensuite la protection de la
société et la baisse de la criminalité (C). Il y a enfin
le respect des droits fondamentaux (D).
A-
LES ENJEUX QUANT A L'ELARGISSEMENT DU FILET ET LA SURPENALISATION DES
DELINQUANTS
L'élargissement du filet pénal est sans doute
l'effet le plus évoqué dans la Littérature criminologique
lorsqu'il est question des solutions de rechange à
l'incarcération. L'élargissement du filet se produit lorsqu'un
contrevenant est orienté vers une solution de rechange, alors qu'il
aurait été soumis, par exemple, simplement à une
ordonnance de probation régulière si ces solutions n'avaient pas
existé. Les solutions de rechange élargissent alors le filet du
contrôle en déplaçant un contrevenant d'une probation ou
d'une libération conditionnelle régulière à une
situation plus contrôlante, comme la surveillance intensive ou la
surveillance électronique. C'est ce qui conduit à la
surpénalisation de la personne contrevenante.
Elle se manifeste également lorsqu'une mesure comme la
surveillance électronique vient s'ajouter à la mesure
sentencielle, comme la probation ou le sursis, alors que sans son existence,
les contrevenants auraient été soumis aux mêmes mesures. La
littérature criminologique estime que le détenu soumis à
la surveillance électronique et à plusieurs autres sanctions
intermédiaires se détourne très rapidement du vice. Dans
le même ordre d'idées, la surveillance électronique peut
être utilisée pour des contrevenants à faible risque afin
de renforcer le suivi en probation ou en absence temporaire
B-
LES ENJEUX QUANT LA POPULATION ET LA SURPOPULATION CARCERALE
La surveillance électronique, parce qu'elle
délocalise la prison à domicile permet aux établissements
pénitentiaires de se désengorger et de permettre à ceux
qui sont détenus de mieux purger leur peine. Cependant, disent certaines
voix dissonantes, les solutions de rechange à l'incarcération
remplacent ainsi généralement de courtes sentences ou de courts
séjours en détention, comme c'est le cas pour la surveillance
électronique. Conséquemment, cela minimise leur effet sur le
nombre de personnes incarcérées à un moment donné,
c'est-à-dire sur le compte réel. Par ailleurs, Cullen et al
87(*) avaient
relevé le problème de la faible capacité des programmes.
Ces derniers ne peuvent évidemment pas détourner un grand nombre
de personnes de la prison hormis quelques cas.
C'est ainsi, comme Landreville88(*) le rappelle, que la faible capacité des
programmes, en plus de s'adresser aux délinquants condamnés
à de courtes sentences, font en sorte que l'effet est la plupart du
temps nul en autant que la population des prisons ou leurs budgets sont
concernés. L'auteur élargit sa conclusion en affirmant que
chacune des mesures de substitution à l'incarcération aura
généralement une incidence limitée sur le nombre de
personnes présentes en établissement, de telle sorte qu'il serait
erroné de prétendre que la mesure pourrait, à court terme,
générer des économies considérables
C-
LES ENJEUX QUANT A LA PROTECTION DE LA SOCIETE ET LA REDUCTION DE LA
CRIMINALITE
Un autre avantage de la surveillance électronique est
qu'elle est efficace pour prévenir la récidive et mieux
protéger ainsi la société. Les délinquants sont
suivis à la loupe et sont conscients de ce qu'ils sont surveillés
et épiés. Normandeau 89(*) fait les constatations suivantes :
Pour les délinquants condamnés, la surveillance
électronique est efficace de façon significative par rapport
à la surveillance ordinaire en probation ou en libération
conditionnelle : plus de violations techniques et moins de nouveaux
délits. .
La question que l'on se pose cependant est celle de savoir si
cette surveillance électronique a des effets sur le nombre de crimes
commis par des contrevenants lorsqu'ils sont sous la supervision
correctionnelle et après cette période, de même que sur le
non-respect des conditions en cours de surveillance. D'entrée de jeu,
selon Bonta90(*), il est
très difficile d'évaluer les effets des programmes de
surveillance électronique sur la récidive. Ils déplorent
d'abord le peu d'études faisant appel à un procédé
se rapprochant d'une méthode expérimentale, avec participation
aléatoire, et le fait que l'on a rarement recours à un groupe
témoin approprié. De plus, plusieurs études n'ont pas tenu
compte du niveau de risque que posaient les délinquants sous
surveillance électronique. En somme, rien n'est moins certain que la
surveillance électronique prévienne mieux les risques de
récidive et protège mieux la société.
D- LES ENJEUX QUANT AU RESPECT DES DROITS
FONDAMENTAUX
La surveillance électronique est également
respectueuse des droits fondamentaux car elle concilie l'exigence de
sécurité et le respect des droits personnes auxquelles elle
s'applique.
Cette évolution de la technologie est néanmoins
porteuse d'une intrusion injustifiable de l'État dans la vie
privée des personnes. Cela soulève donc la question du respect
des droits fondamentaux des individus. Question toujours très
délicate et qui mérite une profonde réflexion, plusieurs
auteurs s'interrogeant justement sur ces pouvoirs excessifs. Ainsi et tel qu'il
a été soulevé par Mampaey91(*), la surveillance électronique peut
entraîner une « altération fondamentale dans le type et le
degré de contrôle qu'un État peut exercer sur les
contrevenants, dans la mesure où elle redéfinit comme espace
pénal des lieux publics et privés qui ont toujours
été l'objet d'un libre choix sans contrôle pour les
citoyens ».
La John Howard Society soulevait, quant à elle,
l'idée que l'assignation à domicile introduisait désormais
radicalement une nouvelle situation, à savoir que chaque domicile
devenait potentiellement une prison. On se retrouvait ainsi en face d'un bond
important du risque d'atteinte à la vie privé.92(*)
Par ailleurs l'on observe désormais une
délocalisation de la délinquance vers des zones non couvertes. Ne
faudra t-il pas plutôt privilégier les mesures comme le suivi
socio-judiciaire avec injonction de soins pour traiter les
récidivistes ?
SECTION II - LE SUIVI SOCIO-JUDICIAIRE AVEC INJONCTION DE
SOINS AUX RECIDIVISTES
Le suivi socio-judiciaire est une peine qui contraint le
condamné, auteur d'une ou plusieurs infractions sexuelles, à se
soumettre à des mesures de surveillance et d'assistance sous le
contrôle du juge faisant office de juge d'application des peines.
Outre les obligations liées aux mesures de surveillance
électronique et d'assistance, la juridiction de jugement peut assortir
le suivi socio-judiciaire d'une injonction de soins. Le suivi médical
par injonction de soins fait partie de nouvelles formes de traitement de la
récidive pénale. Il est applicable depuis le 20 juin 1998 mais
uniquement pour des faits commis à compter de cette date.93(*)
Les soins désignent toute thérapie,
psychothérapie, traitement médicamenteux, prise en charge
socio-éducative, accompagnement pouvant être dispensés aux
auteurs d'infractions à caractère sexuel dans le cadre de leur
incarcération. L'injonction de soins est alors l'obligation
définie par le juge et adressée aux auteurs d'infractions
à caractère sexuel condamnés à se soumettre
à des soins pendant le temps de leur incarcération. L'injonction
de soins, obligatoire pour les auteurs d'infractions à caractère
sexuel, se matérialise par la mise en place d'un programme de prise en
charge spécialement conçu et spécifique au
délinquant mis en cause. Ce suivi socio-judiciaire par injonction de
soins s`appliquant au délinquant (I) comporte des implications
juridiques ou judiciaires (II).
I- L'INJONCTION DE SOINS APPLICABLE AU DELINQUANT
RECIDIVISTE
La précision du cadre général
d'application et les objectifs de cette mesure (A), mais aussi de son contenu
(B), tout comme la mise en oeuvre et la fin de celle-ci (C) permet de mieux
cerner son efficacité dans le traitement de la récidive.
A-
LE CADRE GENERAL ET LES OBJECTIFS DE L'APPLICATION DE L'INJONCTION DE SOINS AUX
DELINQUANTS
Dans les cas prévus par la loi, la juridiction de
jugement peut ordonner un suivi socio-judiciaire. Le suivi
socio-judiciaire emporte, pour le condamné, l'obligation de se
soumettre, sous le contrôle du juge de l'application des peines et
pendant une durée déterminée par la juridiction de
jugement, à des mesures de surveillance et d'assistance destinées
à prévenir la récidive.
Le suivi socio-judiciaire est une peine complémentaire
mais peut également être prononcé comme peine principale en
matière délictuelle.
Il est encouru en cas, de meurtre ou assassinat,
précédé ou accompagné d'un viol, de tortures ou
d'actes de barbarie, viol, agression sexuelle ou exhibition sexuelle, actes
visant à favoriser la corruption de mineur, fabrication, transport,
diffusion d'image pornographique portant gravement atteinte à la
dignité humaine, susceptible d'être vu ou perçu par un
mineur, atteinte sexuelle. La durée du suivi socio-judiciaire ne peut
excéder 10 ans en cas de condamnation pour un délit, 20 ans en
cas de condamnation pour crime. L'injonction de soins a pour but de lutter
contre la récidive d'infractions sexuelles en instaurant des mesures de
surveillance et d'assistance ainsi que, le cas échéant, un suivi
médical secondé, par des mesures d'assistance, les efforts du
condamné en vue de sa réinsertion sociale.
B-
LE CONTENU DE LA MESURE DE SUIVI SOCIO-JUDICIAIRE
Les obligations qui peuvent être prononcées par
la juridiction de jugement dans le cadre d'un suivi socio-judiciaire sont au
nombre de trois : interdiction de se rendre dans certains lieux,
interdiction de fréquenter certaines personnes interdiction
d'exercer une activité professionnelle ou social impliquant des
contacts réguliers avec les mineurs. L'injonction de soins ne peut
être prononcée qu'à la condition que l'expertise
médicale, obligatoire avant tout jugement sur le fond d'une personne
poursuivie pour une infraction sexuelle,94(*) ait conclu à l'opportunité d'un
traitement médical. Aucun traitement ne peut être entrepris sans
le consentement de la personne condamnée. Une seconde expertise,
ordonnée dans le cadre du suivi socio-judiciaire mais après la
décision sur le fond, peut également conduire le juge à
adjoindre une injonction de soins. Elle fait intervenir trois experts.
Elle fait intervenir trois praticiens : l'expert, le
médecin coordonnateur désigné par le JAP sur une liste
établie par le procureur de la république95(*), le médecin traitant.
L'expert est expressément interrogé sur l'opportunité de
prononcer une injonction de soins dans le cadre du suivi socio-judiciaire.
L'expertise est confiée à 2 experts dans les cas de meurtre ou
d'assassinat d'un mineur précédé ou accompagné d'un
viol, de tortures ou d'actes de barbarie. Le médecin coordonnateur qui
est choisi sur une liste de psychiatres ou de médecins ayant suivi une
formation appropriée est chargé d'inviter le condamné
à choisir un médecin traitant, d'inviter le
condamné, au vu des expertises réalisées au cours de
la procédure ainsi que, le cas échéant, au cours de
l'exécution de la peine privative de liberté, à choisir un
médecin traitant. En cas de désaccord persistant sur le choix
effectué, le médecin est désigné par le juge de
l'application des peines, après avis du médecin coordonnateur.
Ce dernier a pour obligation de conseiller le médecin
traitant si celui-ci en fait la demande, de transmettre au juge de
l'application des peines ou à l'agent social compétent les
éléments nécessaires au contrôle de l'injonction de
soins, d'informer, en liaison avec le médecin traitant, le
condamné dont le suivi socio-judiciaire est arrivé à son
terme, de la possibilité de poursuivre son traitement en l'absence de
contrôle de l'autorité judiciaire et de lui indiquer les
modalités et la durée qu'il estime nécessaires et
raisonnables en raison notamment de l'évolution des soins en cours.
Le médecin traitant intervient seul dans le
déroulement des soins. Il peut décider d'interrompre le suivi
sous réserve d'en aviser le médecin coordonnateur.96(*) Il délivre, à
intervalles réguliers, des attestations de suivi de traitement à
la personne condamnée, et peut proposer au juge d'ordonner une expertise
médicale, avise le médecin coordonnateur de toute
difficulté survenue dans l'exécution du traitement.97(*)
Toutefois pour les condamnés mineurs, le choix
du médecin traitant est effectué par les titulaires de l'exercice
de l'autorité parentale ou, à défaut, par le juge des
tutelles. L'accord du mineur et de ses parents sur ce choix doit être
recherché.97(*) En cas de désaccord entre le père
et la mère du mineur condamné sur le choix du médecin
traitant, celui-ci est fait par le juge aux affaires familiales. En cas de
carence des titulaires de l'exercice de l'autorité parentale, le juge
des mineurs procède à la désignation du médecin
traitant et informe le médecin choisi des conditions de mise en oeuvre
de l'injonction judiciaire et recueille son accord écrit.
Le médecin traitant est tenu de convoquer
périodiquement le condamné et au moins une fois par an pour
réaliser un bilan de sa situation. Il est également
tenu de transmettre au juge d'application des peines ou à
l'agent social compétent les éléments nécessaires
au contrôle de l'injonction de soins, d'informer, en liaison avec le
médecin traitant, le condamné de la possibilité de
poursuivre son traitement au delà de la durée fixée par la
décision judiciaire. En toutes hypothèses, le principe de la
liberté des soins doit être respecté. La personne peut
changer de médecin. Le juge des enfants ne peut en aucun cas intervenir
dans le déroulement des soins décidés par le
médecin traitant.
C-
LA MISE EN OEUVRE ET LA FIN DE L'INJONCTION DE SOINS
La peine de suivi socio-judiciaire ne peut être
prononcée que pour les infractions prévues par la loi. Ainsi,
encourent la peine de suivi socio-judiciaire, les personnes physiques coupables
de meurtre ou d'assassinat d'un mineur, précédé ou
accompagné d'un viol, de tortures ou d'actes de barbarie98(*), de viol, d'agression sexuelle
ou d'exhibition sexuelle, de corruption d'un mineur, de fabrication, de
transport, diffusion d'images pornographiques de mineur ou de messages à
caractère violent ou pornographique portant gravement atteinte à
la dignité humaine, susceptible d'être vus ou perçus par un
mineur, ainsi que d'atteinte sexuelle. Depuis la loi n° 2005-1549 du 12
décembre 2005 relative au traitement de la récidive des
infractions pénales, les crimes d'atteinte volontaire à la vie
des personnes, de meurtre qui précède, accompagne ou suit un
autre crime, d'assassinat ou empoisonnement, d'enlèvement ou de
séquestration 99(*) entraînent l'injonction de soins.
Le juge peut à tout moment modifier ou
compléter les mesures de surveillance ou d'assistance du suivi
socio-judiciaire, après audition du condamné et avis du procureur
de la République, prononcer une injonction de soins. Le suivi
socio-judiciaire est suspendu par toute détention intervenue au cours de
son exécution. La fin du suivi socio-judiciaire intervient à
l'issue de l'expiration du délai initialement fixé et la peine
est réputée non avenue. Néanmoins, les incapacités,
interdictions et déchéances continuent de produire leurs effets.
Le condamné peut, à l'issue d'un délai d'un
an, à compter de la décision, demander le relèvement de sa
condamnation, sauf lorsque le suivi socio-judiciaire a été
prononcé à titre de peine principale.
En cas de refus il peut présenter une nouvelle demande
au terme d'un délai d'une année après la décision
de refus. La demande de relèvement est adressée au juge des
enfants qui ordonne une expertise médicale confiée à deux
experts s'agissant d'un condamné mineur. Il la transmet à la
juridiction compétente avec les conclusions des experts ainsi que son
avis motivé .La juridiction peut décider de relever le
condamné d'une partie seulement de ses obligations. En cas d'accord, la
réhabilitation ne produit ses effets qu'à la fin de la mesure. La
décision figure aux bulletins n°2 et 3 du casier judiciaire pendant
la durée de la mesure. Elle s'étend aux incapacités,
interdictions et déchéances prononcées dans les
mêmes conditions.
En cas de non-respect des obligations formulées, le
juge des mineurs peut, soit d'office soit sur réquisition du procureur
de la République, ordonner par décision motivée la mise
à exécution partielle ou totale de l'emprisonnement fixé
par la juridiction de jugement lors du prononcé de la peine de suivi
socio-judiciaire. La durée de l'emprisonnement ne peut être
supérieure à deux ans si la mesure est prononcée pour un
délit et à cinq ans si elle est prononcée pour un
crime.
La décision est prise en chambre du conseil
après débat contradictoire. Elle est exécutoire par
provision. Elle peut faire l'objet d'un appel dans les dix jours devant la cour
d'appel qui statue dans le délai d'un mois. Toutefois, l'emprisonnement
pour inobservation des obligations du suivi socio-judicaire ne dispense pas le
condamné de l'exécution dudit suivi socio-judiciaire.
L'emprisonnement se cumule, sans possibilité de
confusion, avec les peines privatives de liberté prononcées pour
des infractions commises pendant l'exécution de la mesure.
En revanche, le juge des enfants peut décider qu'il
soit mis fin à l'emprisonnement s'il lui apparaît que le
condamné peut respecter les obligations du suivi socio-judiciaire. Dans
cette hypothèse, il rend une ordonnance motivée.
II- LES CONSEQUENCES DU SUIVI SOCIO-JUDICIAIRE AVEC
INJONCTIONS DE SOINS
Le suivi-socio judiciaire avec injonction de soins
présente plusieurs avantages. Elle suppose une meilleure qualité
de l'action médicale (A), des décisions judiciaires mieux
adaptées aux délinquants (B)
A-
UNE MEILLEURE QUALITE DE L'ACTION MEDICALE
Préoccupation légitime du corps médical,
l'éventualité d'une mise en cause de la responsabilité du
praticien en cas de nouvelle infraction commise par le condamné soumis
à une injonction de soins, entraîne certainement une exigence
particulière de formation. Ce qui implique que les
praticiens, comme pour toute discipline, aient une maîtrise de
l'état des connaissances au regard de la spécificité des
troubles du comportement des délinquants sexuels. Sans
méconnaître toutefois que l'obligation de soins s'applique au
condamné, qu'elle ne peut constituer tout au plus qu'une obligation de
moyen pour le médecin, tout soin ne pouvant qu'être limité
par l'exercice du libre-arbitre du sujet auquel il s'applique.
L'injonction de soins impose aux praticiens médicaux
une exigence de formation tant en ce qui concerne le diagnostic que le
traitement et l'évaluation ce qui implique une
pluridisciplinarité d'intervenants même si l'on peut regretter
l'absence du psychologue dans l'équipe.100(*)
Cette compétence acquise devrait être mise
à contribution lorsqu'un auteur d'agression sexuelle se présente
devant un médecin psychiatre pour demander un certificat médical
en vue de modérer le quantum de la sanction devant être
prononcée par une juridiction pénale. Alors que la pratique
médicale tendait à donner un certificat médical avec une
grande facilité dès lors que celui-ci devait être favorable
au condamné, l'utilisation du médecin dispensateur de certificat
permettant d'éluder l'action de la justice pénale devrait trouver
ses limites face à une meilleure connaissance de cette population
pénale par les praticiens.
En tout état de cause, le domaine de la transgression
sexuelle apparaît riche d'inconnues avec des résultats d'autant
plus aléatoires qu'ils sont conditionnés par la liberté
d'action du condamné qui sera cependant canalisée par le cadre
judiciaire des soins obligés et l'éventualité de
décisions de justice pouvant être prise à l'égard de
l'agresseur.
B-
DES DECISIONS JUDICIAIRES MIEUX ADAPTEES AU DELINQUANT
Le certificat médico-légal décerné
dans le cadre de l'injonction de soins par des praticiens maîtrisant
parfaitement leur matière et avec la crainte de voir leur
responsabilité engagée en cas de délivrance fantaisiste de
ce document, pourra désormais permettre au juge d'individualiser
aisément la sanction pénale. Les mesures qu'il sera amené
à prendre seront conformes à la personnalité du
délinquant mis en cause. Il revient désormais aux médecins
de déterminer la dangerosité des délinquants, surtout la
dangerosité criminologique entendue comme l'ensemble des facteurs
environnementaux et situationnels susceptibles de favoriser l'émergence
du passage à l'acte et correspondant à « la
probabilité qu'un individu commette une infraction contre les personnes
ou les biens » ou à « la probabilité de
réitération chez un sujet déjà condamné
»101(*)
Ainsi, les dispositions relatives aux mesures
d'individualisation de la peine concernant les personnes condamnées pour
une infraction pour laquelle le suivi socio-judiciaire est encouru,
s'appliquent, de facto, à toutes les personnes soumises à une
injonction de soins. Par ailleurs, la libération conditionnelle ne peut
leur être accordée si elles refusent pendant leur
incarcération de suivre le traitement qui leur est proposé par le
juge. Elle ne peut davantage être accordée aux condamnés
qui ne s'engagent pas à se soumettre, après leur
libération, à l'injonction de soins.
CONCLUSION
A l'issue de l'étude du traitement de la
récidive, une constance s'impose à notre esprit : l'arsenal
de son traitement pénal est suffisamment varié et fourni. Il y a
d'une part la répression qui est constamment mise en exergue pour
juguler cette délinquance d'habitude, notamment par le doublement du
maximum de la peine prévue et le recours aux mesures de
sûreté, privatives ou non privatives de liberté. Il y a
d'autre part, par ce que le système carcéral a montré ses
limites, les nouvelles formes de traitement de la récidive comme la
surveillance électronique et le suivi socio-judiciaire avec injonction
de soins.
Il s'agit, pour ce dernier cas de figure, d'une
véritable intrusion de l'informatique et de la médecine dans le
champ pénal. Ce qui est certain, le droit pénal connaitra
d'autres incursions dans le cadre du traitement de la récidive, des
plus saugrenues aux plus sophistiquées et efficaces. A cet effet, l'on
songe déjà à son traitement par la discipline militaire,
dans des camps de type militaire102(*) et à la chimie pour la castration des
récidivistes d'agressions sexuelles.103(*)
Malgré ce foisonnement de solutions, l'on s'interroge
sur l'éradication totale de ce fléau. L'on demeure sceptique
quant à sa disparition souhaitée et comme l'a souligné
Serges Portelli, « Le crime ne disparaîtra jamais et la
récidive pas davantage. Nous devons nous battre inlassablement contre
eux mais en sachant qu'il n'y a pas de miracle possible (...) Il faut tout
faire pour réduire les effets de ce mal et protéger les citoyens,
en sachant que nous n'éradiquerons jamais définitivement le crime
même par la peine de mort, même en multipliant par dix ou cent, le
nombre de prisons ».
Quoi qu'il en soit, pour lutter contre la récidive,
l'effort doit être général et ne pas se limiter au seul
problème de la récidive. Il faut d'abord rehausser le niveau de
qualité de la justice pénale pour que le récidiviste
potentiel puisse être détecté à temps. La
rapidité de la justice, l'accroissement des procédures rapides
font que la personnalité des prévenus reste inconnue. Faute d'une
individualisation suffisante de la sanction, on condamne aveuglément
à des peines fermes des personnes qui mériteraient une adaptation
de leur sanction. Il faudra songer, pour résorber ce problème,
à arrimer l'institution judiciaire aux nouvelles techniques de
l'information et de la communication. Il faudra également équiper
l'administration pénitentiaire en matériel roulant et en
armement, ceux actuellement mis à leur disposition étant
vétustes et relativement efficaces pour le suivi des détenus en
général et des récidivistes en particulier. En un mot, il
faut une mise en oeuvre exigeante des moyens humains, juridiques et
matériels.
BIBLIOGRAPHIE
I- Ouvrages généraux
· Beccaria Bonesana (C), Traité des délits
et des peines, P.147, disponible sur le site
www.lesalondelectureducombremasque.fr
· Durkheim (E.), De la division du travail social, 1893,
Paris, PUF, P.64.
· Ferri (E.), la sociologie criminelle, Dalloz 3e ed.
· Gall (JF.), Histoire de la criminalité
française, sous la direction de Mucchielli (L.), L'harmattan, Paris,
1994, P.535.
· Lombroso (C.), L'homme criminel, Alcan , Paris
1887, texte disponible à l'adresse suivante :
http://visualiser.bnf.f
· Pinatel (J), La société
criminogène, P.206.
· Rossi (P.), Traité de droit pénal,
1825.
· Stefani (G.) et Levasseur (G), Droit pénal
général et procédure pénale, Ed 1964, P.275
· Soyer (J.C), Droit pénal et Procédure
pénal, 12e Edition, L.G.D.J, P.457.
Ouvrages spéciaux
· Bonta, J., Wallace-Capretta, S. et J. Rooney.
«Can Electronic Monitoring Make a Différence? An Evaluation of
Three Canadian Programs», Crime & Delinquency, Vol. 46, No.
1, January 2000, pp. 61-75.
· Bouloc (B), Pénologie, Exécution des
sanctions adultes et mineurs, Dalloz, 2 Ed. P.157.
· Bouzat (P.), Pinatel (J.), Traité de droit
pénal et de criminologie Tome III, no 84
· Couvrat (P.), le suivi-socio judiciaire, une peine pas
comme les autres, RSC 1999, P.376.
· Coté (G), Les instruments
d'évaluation du risque de comportements violents : mise en perspective
critique, Criminologie, volume 34, 2001-p.31.
· Cullen, (F.T) et al. «Control in the community.
The limits of reform?'', Choosing correctionnels options that
works : Defining the demand and evaluating the supply, Thousand Oaks,
Gillian Dickens Ed., 1996, P. 69-116.
· Foucault (M.), Surveiller et punir naissance de la prison,
Paris, Gaillimard, 1975.
· Léauté (J.), Criminologie et science
pénitentiaire, Thémis, 1972, P.757.
· Locard (E.), L'identification des récidivistes,
Paris 1909.
· MacKenzie (D.L), Boot Camp Prisons and Recidivism in
Eight States », Criminology, vol. 33, n° 3, 1995, P.
327.
· Minkoa She (A.), Droits de l'Homme et Droit
pénal au cameroun, Economica no 428, Paris 1999, P.199.
· Poncela (P.), Droit de la peine, 1995, Paris, PUF,
Thémis, P.445
· Portelli (S), Ruptures, Mars 2007, Texte disponible
à l'adresse suivante :www.betapolitique.fr, P.102.
· Saleilles (R.), L'individualisation de la peine, Etude de
criminalité sociale, Paris,1898.
· Szabo Denis, Criminologie et politique criminelle, Paris,
Les presses universitaires de Montréal, 1978, P.318.
THESES ET MEMOIRES
· Céline (J.), le droit de la récidive,
Mémoire de master droit recherche, mention droit pénal
publié le 29 novembre 2006 disponible sur
http://edoctorale74.univ-lille2.fr, P.122.
· Gontard (P.R), L'utilité des peines privatives
de liberté pour les peines criminelle, Mémoire de droit
privé, option carrières judiciaires, disponible à
l'adresse suivante : www.memoireonline.
· Ngongang-ouandji (A), Les mesures de
sûreté au cameroun, Thèse de doctorat d'Etat en droit
soutenue le 19 Avril 1969 à la Faculté de Droit et des Sciences
Economiques de Bordeaux.
DOCUMENTS ET RAPPORTS OFFICIELS
· Rapport Burgelin de Juillet 2005, Santé, justice et
dangerosité : pour une meilleure prévention de la
récidive
· Mampaey (L.), Technologies dans les prisons,
Etude intérimaire, document de travail pour le comité STOA/GRIP,
Parlement européen, 10 mars 2000, P.16
· Warsmann (J.L), Rapport sur les peines
alternatives à la détention, les modalités
d'exécution des courtes peines, la préparation des détenus
à la sortie de prison, La Documentation française, Avril
2003
LES REVUES EN RAPPORT AVEC LE
THEME
· Emsley (C.), Porret (M), Récidive et
récidivistes : De la Renaissance au XXe siècle, Texte
disponible à l'adresse suivante : http://calenda.revue.org
· Landreville, ( P.) «Prison overpopulation and
strategies for decarceration», Revue canadienne
· de criminologie, janvier 1995, 37, 1, P.
39-60.
· Normandeau (A), « Bilan criminologique de
quatre politiques et pratiques pénales améri-
· caines contemporaines », Revue de science
criminelle et de droit pénal comparé, 2, 1, 1996,
· P 333-346.
ARTICLES
· Debuyst (C.), « La notion de dangerosité et sa
mise en cause », VIIe journées internationales de criminologie
clinique, Gênes, 1981
· Delmas Saint-Hilaire (J.P), La Prison pourquoi
faire ? , in Problèmes actuels de science criminelle, PUAM, volume
VII, P.35
· Du Mesnil du Buisson (G), "Entre le juge et le
thérapeute, quelle place pour le condamné transgresseur
sexuel ? - Pour une réponse interdisciplinaire aux violences
sexuelles lors de l'application de la peine" - L'Evolution
psychiatrique n° 61/1, janvier-mars 1996.
· Hall Williams (J.E), Changement de concept de la
Prison, in Mélanges offerts à Jean Pinatel, Paris Ve, Ed. Pedone,
1980, P.162
· John Howard Society of Ontario Electronic
Monitoring. Fact Sheet No. 7, Toronto, April 1996
· Lejins (P.P), Programmes non correctionnels pour
condamnés criminels : un problème naissant de politique
criminelle, in La criminologie, Bilan et perspectives, Mélanges offerts
à Jean Pinatel, Paris Ve Ed. A. Pedone, 1980, P.43
· Plawski (S.), La notion de traitement
pénitentiaire, in La criminologie, Bilan et perspectives,
Mélanges offerts à Jean Pinatel, Paris Ve Ed. A. Pedone, 1980,
P.179
· Sutherland (E.), in Principes de criminologie,
Bilan et perspectives, Mélanges offerts à Jean Pinatel, Paris Ve
Ed. A. Pedone, 1980, P.125
· Sutherland (E.) et Cressey (D.), Principes de
criminologie, in La criminologie, Bilan et perspectives, Mélanges
offerts à Jean Pinatel, Paris Ve Ed. A. Pedone, 1980, P.470
· Wacquant (L.), Des politiques carcérales
injustes et criminogènes, Fermons les prisons ! Monde diplomatique
de septembre 2004, Texte disponible à l'adresse suivante :
http://www.monde-diplomatique.fr/2004/09/
· Portelli (S.), mobiliser l'intelligence et non la peur,
texte disponible à l'adresse suivante : www.betapolitique.fr
CODES ET LEGISLATIONS
· Code de procédure pénale camerounais de
Juillet 2005
· Code pénal français de 2004
· Code de procédure pénale français de
1994
· Code pénal camerounais de 1967
· Loi criminelle du Groenland du 05 mars 1954
· Loi no 2005-1549 du 12 décembre 2009 relative au
traitement de la récidive pénale en France
· Dictionnaires
· Dictionnaire le Petit Larousse en couleur, dictionnaire
encyclopédique, 1991
· Encyclopédie libre et collaborative Wilkitionary
COURS
· Yawaga (s), Cours de criminologie, Université de
Ngaoundéré, 2007 et 2009
TABLE DES MATIERES
INTRODUCTION
1
PREMIERE PARTIE : LA REPRESSION COMME
PRINCIPAL MODE DE TRAITEMENT DE LA RECIDIVE
8
CHAPITRE I - LA PEINE COMME PRINCIPALE SANCTION DE
LA RECIDIVE
9
SECTION I- LE CHOIX DE LA PEINE APPLICABLE AU
DELINQUANT RECIDIVISTE
9
I- LA PRISE EN COMPTE DE LA DANGEROSITE DANS LE
TRAITEMENT DE LA RECIDIVE
10
A- DIVERSES CONSIDERATIONS SUR LA NOTION DE
DANGEROSITE
10
B - LES CRITERES ET LES OUTILS D'EVALUATION DE LA
DANGEROSITE
12
II- LA SANCTION EN CAS DE RECIDIVE AVEREE :
LE DOUBLEMENT DU MAXIMUM DE LA PEINE PREVUE
14
A- LE CASIER JUDICIAIRE : UN INSTRUMENT
D'INDIVIDUALISATION DE LA SANCTION DANS LA REPRESSION DE LA RECIDIVE
14
B - LE TRAITEMENT DE LA RECIDIVE DES PERSONNES
PHYSIQUES
15
1- Les conditions de la récidive
pénale
15
2- Le tarif proprement dit de la peine en cas de
récidive
16
C- LE TRAITEMENT DE LA RECIDIVE DES PERSONNES
MORALES
18
1- La question de la responsabilité
pénale des personnes morales
18
2- La répression de la récidive des
personnes morales
19
SECTION II - L'EMPRISONNEMENT COMME MOYEN DE
NEUTRALISATION DE LA RECIDIVE
20
I- LES FONCTIONS DE LA PRISON
21
A- LA PRISON POUR PUNIR
21
B- LA PRISON POUR DOMINER
22
C- LA PRISON POUR GUERIR
23
II - LE TRAVAIL EN PRISON : UN MOYEN DE
RESOCIALISATION DU DELINQUANT RECIDIVISTE
25
A - LES TRAVAUX PROPOSES AUX DELINQUANTS DANS LE
CADRE DE LEUR READAPTATION SOCIALE
26
B - LA CONDITION JURIDIQUE DU DETENU
TRAVAILLEUR
26
CHAPITRE II : LES MESURES DE SURETE :
MESURES SECONDAIRES DANS LE TRAITEMENT DE LA RECIDIVE
28
SECTION I- LES MESURES DE SURETE PRIVATIVES OU
RESTRICTIVES DE LIBERTE
29
I- LES CONDITIONS DES MESURES PRIVATIVES OU
RESTRICTIVES DE LIBERTE
29
A- LA RELEGATION
29
B- L'INTERNEMENT DANS UNE MAISON DE SANTE
30
1-L'intenement pour cause de démence
31
2 - L'internement pour alcoolisme, toxicomanie et
infirmité mentale
31
C- LES MESURES DE SURVEILLANCE ET D'ASSISTANCE
POST-PENALES
32
II- LES EFFETS DES MESURES DE SURETE PRIVATIVES OU
RESTRICTIVES DE LIBERTE
33
A- LA READAPTATION SOCIALE DU DELINQUANT
33
B- LA PROTECTION DE LA SOCIETE
34
SECTION II- LES MESURES DE SURETE NON PRIVATIVES DE
LA LIBERTE
34
I - LES CONDITIONS DES MESURES DE SURETE NON
PRIVATIVES DE LIBERTE
35
A- LES CONDITIONS NECESSAIRES A L'APPLICATION DES
MESURES D'INTERDICTION DE PROFESSION, DE LA CONFISCATION DES BIENS
35
B- LES CONDITIONS NECESSAIRES A L'APPLICATION DE LA
MESURE DE L'ENGAGEMENT PREVENTIF
35
II- LES IMPLICATIONS DES MESURES DE SURETE NON
PRIVATIVES DE LIBERTE
36
A -LES MESURES D'INTERDICTION DE L'EXERCICE DE
PROFESSION ET DE CONFISCATION DES BIENS QUANT A LEURS IMPLICATIONS
36
B- L'ENGAGEMENT PREVENTIF QUANT A SON
IMPLICATION
37
DEUXIEME PARTIE : LES NOUVELLES FORMES DE
TRAITEMENT DE LA RECIDIVE
38
CHAPITRE I - LES LIMITES DU SYSTEME CARCERAL
39
SECTION I - LA RECIDIVE : UNE REALITE
INSUFFISAMMENT PRISE EN COMPTE PAR LA CHAINE PENALE
39
A- LA RECIDIVE : UN CONCEPT DELICAT POUR UNE
JUSTICE SEVERE MAIS AVEUGLE
39
B- LA POURSUITE PAR VOIE DE FLAGRANT DELIT :
UN OBSTACLE A LA CONNAISSANCE DU PASSE PENAL DU RECIDIVISTE
40
C- L'EPINEUX PROBLEME DE L'EXECUTION DES DECISIONS
DE JUSTICE
41
SECTION II - LA PRISON : UN CADRE DE
DEVELOPPEMENT DE LA RECIDIVE
42
I - DES CONDITIONS D'INCARCERATION PEU PROPICES A
L'AMELIORATION DE L'HOMME
42
A - DES CONDITIONS MATERIELLES DEGRADANTES
43
B - DES CONDITIONS HUMAINES DEGRADANTES
43
II- LES AUTRES FACTEURS DE STIMULATION DE LA
RECIDIVE EN MILIEU CARCERAL
44
A- L'INFLUENCE DES DETENUS ENDURCIS SUR LES
DELINQUANTS PRIMAIRES
44
B -UNE INSUFFISANTE EVALUATION DE LA DANGEROSITE
DES DETENUS
45
C - UNE ABSENCE DE PREPARATION DE LA SORTIE DES
DETENUS APRES L'EXECUTION DE LEURS PEINES
45
CHAPITRE II : LA PROMOTION DES MESURES
ALTERNATIVES DE TRAITEMENT DE LA RECIDIVE
47
SECTION I - LE SUIVI-SOCIO JUDICIAIRE DES
RECIDIVISTES PAR LEUR PLACEMENT SOUS SURVEILLANCE ELECTRONIQUE
47
I- LE PLACEMENT SOUS SURVEILLANCE
ELECTRONIQUE : UN NOUVEL OUTIL DE POLITIQUE PENALE CONTRE LA RECIDIVE
48
A- LA DEFINITION ET L'INTRODUCTION DU PLACEMENT
SOUS SURVEILLANCE ELECTRONIQUE EN DROIT POSITIF FRANÇAIS
48
1- Le placement sous surveillance
électronique fixe
48
2- Le placement sous surveillance
électronique mobile
49
B- LA MISE EN OEUVRE DE LA SURVEILLANCE
ELECTRONIQUE DANS LE TRAITEMENT DE LA RECIDIVE
50
1- La mise en oeuvre du placement sous
surveillance électronique mobile
50
2- La mise en oeuvre du placement sous
surveillance électronique fixe
52
II - LES ENJEUX DU PLACEMENT SOUS SURVEILLANCE
ELECTRONIQUE DU DELINQUANT
55
A- LES ENJEUX QUANT A L'ELARGISSEMENT DU FILET ET
LA SURPENALISATION DES DELINQUANTS
55
B- LES ENJEUX QUANT LA POPULATION ET LA
SURPOPULATION CARCERALE
56
C- LES ENJEUX QUANT A LA PROTECTION DE LA SOCIETE
ET LA REDUCTION DE LA CRIMINALITE
57
D- LES ENJEUX QUANT AU RESPECT DES DROITS
FONDAMENTAUX
57
SECTION II - LE SUIVI SOCIO-JUDICIAIRE AVEC
INJONCTION DE SOINS AUX RECIDIVISTES
58
I- L'INJONCTION DE SOINS APPLICABLE AU DELINQUANT
RECIDIVISTE
59
A- LE CADRE GENERAL ET LES OBJECTIFS DE
L'APPLICATION DE L'INJONCTION DE SOINS AUX DELINQUANTS
59
B- LE CONTENU DE LA MESURE DE SUIVI
SOCIO-JUDICIAIRE
60
C- LA MISE EN OEUVRE ET LA FIN DE L'INJONCTION DE
SOINS
62
II- LES CONSEQUENCES DU SUIVI SOCIO-JUDICIAIRE AVEC
INJONCTIONS DE SOINS
63
A- UNE MEILLEURE QUALITE DE L'ACTION MEDICALE
63
B- DES DECISIONS JUDICIAIRES MIEUX ADAPTEES AU
DELINQUANT
64
CONCLUSION
66
BIBLIOGRAPHIE
68
* 1 Céline (J.), le
droit de la récidive, Mémoire de master droit recherche, mention
droit pénal, publié le 29 novembre 2006 disponible sur le site
http://edoctorale74.univ-lille2.fr,
P.17.
* 2 Couvrat (P.), le suivi-socio
judiciaire, une peine pas comme les autres, RSC 1999, P.376.
* 3 Pinatel (J), La
société criminogène, Ed. Calman-Levy, 1971, P.206.
* 4 Bouzat (P.), Pinatel (J.),
Traité de droit pénal et de criminologie Tome III, no 84,
cité par Céline Jacques, P.14.
* 5 Portelli (S.), mobiliser
l'intelligence et non la peur, texte disponible à l'adresse
suivante :
www.betapolitique.fr, P.9.
* 6 Gall (JF.), Histoire de la
criminalité française, sous la direction de Mucchielli (L.),
L'harmattan, Paris , 1994, P.535.
* 7 Lombroso (C.), L'homme
criminel, Alcan , Paris 1887, texte disponible à l'adresse
suivante : http://visualiser.bnf.fr
* 8 Ferri (E.), la sociologie
criminelle, Dalloz 3e Ed
* 9 Locard (E.),
L'identification des récidivistes, La Bibliothèque de
criminologie, Paris 1909, cité par Céline Jacques, P.11.
* 10 Portelli (S.), La
récidive, mobiliser l'intelligence, non la peur, Texte disponible
à l'adresse suivante : http: /comm.justice.lesverts.fr, P.27.
* 11 Szabo (D), Criminologie et
politique criminelle, Paris, Les presses universitaires de Montréal,
1978, P.244.
* 12 Poncela (P.), Droit de la
peine, 1995, Paris, PUF, Thémis, P.37.
* 13 Soyer (J.C), Droit
pénal et procédure pénale, 12e Ed., L.G.D.J,
1975, P.143.
* 14 Durkheim (E.), De la
division du travail social, 1893, Paris, PUF, P.64.
* 15 Bouzat (P.) et Pinatel
(J.), Traité de droit pénal et de criminologie, 1963, P.293.
* 16 Poncela (P.), op.cit, P.52
et 53.
* 17 Debuyst (C.), « La
notion de dangerosité et sa mise en cause », VIIe journées
internationales de criminologie clinique, Gênes, 1981, P.14.
* 18 Coté (G), Les
instruments d'évaluation du risque de comportements violents : mise en
perspective critique,
Criminologie, volume 34, 2001, P.31.
* 19 Rapport Burgelin de
Juillet 2005, Santé, justice et dangerosité : pour une
meilleure prévention de la récidive disponible à l'adresse
suivante :www.assemblée.nationale.frhttp/htsl
* 20 Portelli (S), Ruptures,
Mars 2007,Texte disponible à l'adresse
suivante :www.betapolitique.fr, P.50.
* 21 Soyer (J.C), op. cit. ,
P.200.
* 22 Art. 573 du code de
procédure pénale camerounais.
* 23 Art. 132-16- du code
pénal français.
* 24 Saleilles, (R.),
L'individualisation de la peine, Etude de criminalité sociale, Paris,
1898
* 25 Art. 88 du code
pénal camerounais.
* 26 Art. 14. et 15 du code
pénal camerounais.
* 27 Art. 88 op. cit.
* 28 Art. 363 du code
pénal camerounais.
* 29 Art. 80 du code
pénal camerounais.
* 30 Art. 724 du code de
procédure pénale camerounais.
* 31 Art. 87 et 92 du code
pénal camerounais.
* 32 Art. 724 et suivants du
code de procédure pénale camerounais.
* 33 Art. 121-2 du code
pénal français.
* 34 Art. 121-2 du code
pénal français.
* 35 Art. 132-12 et Suiv. du
code pénal français.
* 36 Delmas Saint-Hilaire
(J.P), La Prison pourquoi faire ? , in Problèmes actuels de science
criminelle, PUAM, volume VII, P.35.
* 37 Bouloc (B),
Pénologie, Exécution des sanctions adultes et mineurs, Dalloz, 2
Ed. P.157.
* 38 Delmas Saint-Hilaire
(J.P), op. cit, P.36.
* 39 Delmas Saint-Hilaire
(J.P), op. cit, P.36.
* 40 Hall Williams (J.E),
Changement de concept de la Prison, in Mélanges offerts à Jean
Pinatel, Paris Ve, Ed. Pedone, 1980, P.162.
* 41 Gontard (P.R),
L'utilité des peines privatives de liberté pour les peines
criminelle, Mémoire de droit privé, option carrières
judiciaires, disponible à l'adresse suivante : www.memoireonline
* 42 Beccaria Bonesana (C),
Traité des délits et des peines, P.147, disponible sur le site
www.lesalondelectureducombremasque.fr
* 43 Bouloc (B.), op. cit,
P.138.
* 44 Léauté (J.),
Criminologie et science pénitentiaire, Thémis, 1972, P.757.
* 45 Hall William (J.E.),
Changement de concept, in La criminologie, Bilan et perspectives,
Mélanges offerts à Jean Pinatel, Paris Ve, Ed. A. Pedone, 1980,
P.162.
* 46 Zsabo (D), op.cit.,
P.253.
* 47 Sutherland (E.), in
Principes de criminologie, Bilan et perspectives, Mélanges offerts
à Jean Pinatel, Paris Ve Ed. A. Pedone, 1980, P.125.
* 48 Minkoa She (A.), Droits
de l'Homme et Droit pénal au cameroun, Economica no 428, Paris 1999,
P.199.
* 49 Art. 24 du code
pénal camerounais.
* 50 Sutherland (E.) et Cressey
(D.), Principes de criminologie, in La criminologie, Bilan et perspectives,
Mélanges offerts à Jean Pinatel, Paris Ve Ed. A. Pedone, 1980,
P.470.
* 51 Lejins (P.P), Programmes
non correctionnels pour condamnés criminels : un problème
naissant de politique criminelle, in La criminologie, Bilan et perspectives,
Mélanges offerts à Jean Pinatel, Paris Ve Ed. A. Pedone, 1980,
P.43.
* 52 Plawski (S.), La notion de
traitement pénitentiaire, in La criminologie, Bilan et perspectives,
Mélanges offerts à Jean Pinatel, Paris Ve Ed. A. Pedone, 1980,
P.179.
* 53 Danti-Juan M., 1998,
L'absence de contrat de travail dans l'univers pénitentiaire, Revue
pénitentiaire et de droit pénal, n° 1-2,
P.127-135.
* 54 Art. 10 du code de
procédure pénale français.
* 55 Cir.minist.Travail et
Sec.soc du 08 juin 1949.
* 56 Art. 720 du code de
procédure pénale français.
* 57 Stefani (G.) et Levasseur
(G), Droit pénal général et procédure
pénale, Ed 1964, P.275.
* 58 Soyer (J.C), op cit P.
149.
* 59 Ngongang-ouandji (A), Les
mesures de sûreté au cameroun, Thèse de doctorat d'Etat en
droit soutenue le 19 Avril 1969 à la Faculté de Droit et des
Sciences Economiques de Bordeaux, édité par le Centre d'Edition
et de Production de Manuels et d'Auxiliaires de l'Enseignement, P.15.
* 60 Art. 17 du code
pénal camerounais.
* 61 Art. 107 de la loi
criminelle du Groenland du 05 mars 1954.
* 62 Art. 39 du code
pénal camerounais.
* 63 Art.38 du code
pénal camerounais.
* 64 Art. 93 du code
pénal camerounais.
* 65 Ngongang-ouandji (A), op.
cit. ,P.48.
* 66 Art. 40 du code
pénal camerounais.
* 67 Art. 41 du code
pénal camerounais.
* 68 Art. 42 du code
pénal camerounais.
* 69 Art 45. du code
pénal camerounais.
* 70 Art. 46 du code
pénal camerounais.
* 71 Art. 178 du code
pénal camerounais.
* 72 Ngongang-ouandji, op. cit.
,P.105.
* 73 Foucault (M.), Surveiller
et punir, Naissance de la prison, Paris, 1975.
* 74 Céline (J.), op.
cit, P.49.
* 75 Warsmann (J.L), Rapport
sur les peines alternatives à la détention, les modalités
d'exécution des courtes peines, la préparation des détenus
à la sortie de prison, La Documentation française, Avril 2003
* 76 Céline (J.), op.
cit, P.52.
* 77 Art. 797 du code de
procédure pénale camerounais.
* 78 Bouloc (B.), op. cit,
P.132.
* 79 Entretien du 07 Août
2009 avec un détenu multirécidiviste à la Prison centrale
de Garoua
* 80 Warsmann (J.L), op. cit,
P.33.
* 81 Wacquant (L.), Des
politiques carcérales injustes et criminogènes, Fermons les
prisons ! Monde diplomatique de septembre 2004, Texte disponible à
l'adresse suivante : http://www.monde-diplomatique.fr/2004/09/.
* 82 Art. 131-36-1 du code
pénal français.
* 83 Loi no. 2005-1549 du 12
décembre 2009 relative au traitement de la récidive pénale
en France.
* 84 Art. 124 et 127 du code de
procédure pénale français.
* 85 Art. 124 et 127 op.cit.
* 86 Art. 100 du code de
procédure pénale français.
* 87 Cullen, (F.T) et al.
«Control in the community. The limits of reform?», Choosing
correctionnels
options that works : Defining the demand and evaluating the
supply, Thousand Oaks, Gillian
Dickens Ed., 1996, P. 69-116.
* 88 Landreville, ( P.)
«Prison overpopulation and strategies for decarceration», Revue
canadienne
de criminologie, janvier 1995, 37, 1, P. 39-60.
* 89 Normandeau (A), «
Bilan criminologique de quatre politiques et pratiques pénales
améri-
caines contemporaines », Revue de science criminelle et
de droit pénal comparé, 2, 1, 1996,
P. 333-346.
* 90 Bonta (J), Capretta (W) et
Rooney (S.J), Can Electronic Monitoring Make a Différence?
An Evaluation of Three Canadian Programs», Crime &
Delinquency, Vol. 46, No. 1, January
2000, P. 61-75.
* 91 Mampaey (L.),
Technologies dans les prisons, Etude intérimaire, document de travail
pour le comité STOA/GRIP, Parlement européen, 10 mars 2000,
P16.
* 92 John Howard Society of
Ontario Electronic Monitoring. Fact Sheet No. 7, Toronto, April
1996.
* 93 Crim.2 septembre 2004
Bull. N° 197.
* 94 Art. 746-747 du code de
procédure pénale française.
* 95 Art. L 3711-11 du code de
la santé publique française.
* 96 Art. L37-11-3 du code de
la santé publique française.
* 97 Art. 355-44 du code de la
santé publique française.
* 98 Art. 2221-9-1-1 du code
pénal français.
* 99 Art. 221- et suivants du
code pénal français.
* 100 Du Mesnil du Buisson
(G), "Entre le juge et le thérapeute, quelle place pour le
condamné transgresseur sexuel ? - Pour une réponse
interdisciplinaire aux violences sexuelles lors de l'application de la peine" -
L'Evolution psychiatrique n° 61/1, janvier-mars 1996.
Cet article appelait à la mise en place de
véritables programmes de soins en détention, d'une réelle
pluridisciplinarité et d'un médecin-orienteur suivant le
condamné orienté vers un médecin traitant
compétent, ce "médecin-orienteur" préfigurant le
médecin coordonnateur institué désormais dans le cadre du
suivi socio-judiciaire.
* 101 Rapport de la
commission Justice-Santé 2005 en France.
* 102 MacKenzie (D.L), Boot
Camp Prisons and Recidivism in Eight States », Criminology, vol.
33, n° 3, 1995, P. 327.
101 Bernard Debré médecin, membre du
Comité consultatif national d'éthique, avait déposé
en 2005, puis en 2007, une proposition de loi en ce sens en France
|