Diagnostic de la situation financière de la Banque Centrale du Congo( Télécharger le fichier original )par Felix TSHIBANGU KOTA Université Protestante au Congo - Licencié en Administration des Affaires 1998 |
SECTION II. MANIFESTATION DE LA CRISE ECONOMIQUE AU CONGO
Source : Banque Centrale du Congo / Rapports annuels de 1985 à 1995 Comme on pourrait le remarquer à partir du tableau ci-dessus, à l'exception du diamant artisanal qui a connu une augmentation de 26%, tous les principaux produits miniers, agricoles et industriels ont accusé des baisses très sensibles : 93 % pour le cuivre ; 62 % pour le cobalt ; 93 % pour le zinc ; 18 % pour le diamant industriel ; 46% pour l'or ; 30 % pour le café ; 60 % pour le bois ; 51 % pour le caoutchouc ; 78 % pour l'huile de palme ; 89% pour l'huile palmiste ; 55 % pour le ciment et 17 % pour le pétrole brut. La régression de l'activité de production observée au cours de la période sous-analyse s'est traduite par le recul du Produit Intérieur Brut (PIB). Examinons l'évolution du taux de croissance de ce dernier. Tableau n° 2 : Evolution du taux de croissance du P.I.B. (en %)
Source : Banque Centrale du Congo / Rapport annuel 1995. Comme les données chiffrées du tableau ci-dessus l'indiquent, le taux de croissance du P.I.B. est demeuré positif jusqu'en 1988, malgré des variations en dents de scie entre 1986 (+0,1) et 1987 (+2 ,5). A partir de 1989, la croissance négative a commencé avec un taux de -1,4% sans redressement jusqu'en 1995, année au cours de laquelle le taux de croissance s'est situé à -0,6%. En définitive, la détérioration de l'activité de production observée au cours de la période sous revue confirme le recul du P.I.B. qui a enregistré des taux de croissance négatifs. II.2. Hyperinflation L'hyperinflation, autrement appelée inflation galopante, est l'un des phénomènes les plus marquants de l'économie congolaise (zaïroise) des années 90. En effet, l'hyperinflation s'appréhende comme une accélération très forte des prix accompagnée d'un effondrement de la valeur de la monnaie. Elle se caractérise par une hausse des prix exponentielle, incontrôlable et imprévisible. Les taux d'inflation sont généralement supérieurs à la masse monétaire. Aussi, les prix relatifs perdent de plus en plus leur cohérence et la monnaie nationale, l'exercice de ses fonctions essentielles.((*)5) Cette description ressemble fort à la situation qu'a connu l'économie du Zaïre de 1990 à 1994, à l'exception de 1992 où le taux d'expansion de liquidités monétaires a dépassé celui de la hausse des prix, en raison principalement de la crise des émissions monétaires. (Voir tableau n°2). C'est depuis l'avènement de la transition politique, en 1990, que l'économie congolaise a basculé dans l'ère de l'hyperinflation marquée par un accroissement fulgurant des prix, au rythme annuel de 4725%. ((*)6) En effet, l'hyperinflation, qui est une hausse brutale et exponentielle des prix, est apparue dans toute sa dimension dans notre pays à partir du dernier trimestre 1990. Elle s'est enracinée dans l'économie de notre pays sous l'effet conjugué du financement monétaire accru des déficits budgétaires et du recul important de la production intérieure. En dépit des « efforts » fournis par les différents gouvernements de transition pour l'enrayer, l'hyperinflation n'a même été maîtrisée. Toutefois, grâce aux effets conjugués du programme de gestion macro-économique et de stratégie de désinflation rapide mise en oeuvre en 1995, le taux d'inflation est descendu à 370%. Cependant, faute de mesures structurelles conséquentes, ce résultat encourageant ne s'est pas consolidé en 1996 qui a connu une inflation de 753%. Par ailleurs, il convient de noter que depuis l'avènement du nouveau pouvoir politique intervenu au mois de mai 1997, l `économie zaïroise (devenue congolaise depuis cette date) est brusquement passée de « l'hyperinflation zaïroise à la déflation congolaise » pour utiliser la jolie formule de MUSUSA ULIMENGU.((*)7) Selon l'IRES, cette rupture se confirme avec le taux de variation annuelle de -0,4 % enregistré en 1997 contre 753% en 1996. Tableau n°3 : Evolution du taux
d'inflation et du taux de la variation de la
Source : IRES et Banque Centrale du Congo A l'exception de 1992 et 1995, il s'observe que la hausse des prix intérieurs a excédé l'expansion de la masse monétaire au cours de la période sous-revue . La pénurie des signes monétaires qui s'est généralisée au cours de l'année 1992 a eu comme conséquence la modification de la structure de la masse monétaire où la monnaie scripturale est devenue prépondérante. Compte tenu de la relation directe entre monnaie fiduciaire et les prix intérieurs, il en est résulté un ralentissement de l'inflation non corrélé avec la forte croissance de la masse monétaire. En 1995, le passage brusque de l'inflation de 4 à 3 chiffres résultait de la politique de désinflation rapide qui a permis de ramener le taux de hausse des prix à un niveau inférieur à celui de la masse monétaire.
On entend par finances publiques, l'ensemble des problèmes relatifs à la gestion des fonds publics c'est-à-dire de l'Etat à différents niveaux d'échelons (niveau national et local). Le terme se rapporte également aux institutions internationales aussi bien régionales, sous-régionales que continentales.((*)8) Par ailleurs, la gestion des finances publiques s'apprécie à travers la gestion du budget de l'Etat. Principale cause des déséquilibres qui affectent l'économie congolaise depuis plus d'une décennie, , la gestion des finances publiques est restée marquée, particulièrement depuis 1991, par des dérèglements importants : mobilisation insuffisante des recettes et explosion des dépenses. Cette expansion des dépenses publiques, dans un contexte de fléchissement continu des recettes, a favorisé l'élargissement insoutenable des déficits budgétaires. Le financement de ces déficits essentiellement par création monétaire a conduit inéluctablement à l'explosion des prix intérieurs et à l'accélération de la dépréciation du taux de change. Comme les finances publiques comprennent les grandes masses c'est-à-dire les dépenses publiques d'une part, et les recettes d'autre part, examinons à présent comment ces dernières ont évolué durant la période allant de 1985 à 1995. Tableau n°4 : Evolution annuelle des finances publiques (en millions de dollars)
Source : Banque Centrale du Congo / nos calculs. Comme les données chiffrées du tableau ci-dessous l'indiquent, les finances publiques ont présenté des réelles insuffisances, particulièrement depuis 1991 ; les dépenses publiques sont restées à un niveau sensiblement élevé alors que les recettes périclitent d'année en année. Ainsi, par exemple, de 1.266,1 millions de dollars américains en 1989, les recettes publiques sont tombées jusqu'à 468,26 millions de dollars de recettes publiques. Quant aux dépenses, elles sont montées en flèches jusqu'à atteindre un pic de 2.024 millions de dollars en 1993. Ces dépenses n'ayant pas été contenues dans le temps, le déficit des finances publiques s'est fortement accentué, atteignant jusqu'à 1.584,19 millions de dollars en 1993. Plusieurs facteurs expliquent l'évolution des recettes et des dépenses publiques entre 1985 et 1995 : Au niveau des recettes , les faibles réalisations sont dues essentiellement à la baisse de la contribution de la GECAMINES à l'Etat au titre des divers impôts et taxes, à la fraude et à l'évasion fiscale, à l'octroi des exonérations fiscales en dehors de celles prévues par la loi, à l'amenuisement de la base d'imposition consécutif au ralentissement de l'activité économique, aux prélèvements à la source des recettes encaissées ainsi qu'aux réajustements tardifs des impôts et taxes spécifiques. Quant aux dépenses, elles ont connu une forte expansion en raison essentiellement des facteurs ci-après : le non respect des procédures et de la loi budgétaire, la surfacturation des biens et services offerts à l'Etat dont le mode de paiement convenu est le virement bancaire, l'indexation à l'évolution du taux de change des dépenses récurantes de fonctionnement ainsi que le relèvement sensible de l'enveloppe des rémunérations, particulièrement en 1991 et 1993. II.4. Position extérieure précaire et insoutenable Bien plus que pour les pays industrialisés, le commerce extérieur est un élément vital de l'économie de la plupart des pays africains, dont le Congo. En effet, grâce aux différentes recettes d'exportations dont il rapporte, le commerce extérieur offre à l'Etat les moyens de réaliser des recettes budgétaires avec lesquelles il peut financer le développement des différents secteurs de l `économie. La régression de l'activité économique telle que décrite peu avant s'est réflectée au niveau du commerce extérieur par la contraction des recettes d'exportation. Cette situation est attribuable d'une part à la détérioration des cours des principaux produits miniers et agricoles, et d'autre part à la réduction sensible du volume des produits exportés. La situation des ressources en devises a été par ailleurs aggravée par l'amenuisement des aides étrangères à la suite du gel de la coopération tant bilatérale que multilatérale. En définitive, la précarité de la position extérieure du Congo transparaît dans l'élargissement du solde négatif de la balance générale des paiements. Le solde c'est-à-dire la différence entre les dépenses et les recettes de chaque poste ou groupe des postes de la balance des paiements va nous aider à caractériser la situation des paiements extérieurs dans laquelle se trouve notre pays. Tableau n°5 : Evolution de la
situation des paiements extérieurs de 1985 à 1995
Source : Banque Centrale du Congo / Rapports annuels de 1985 à 1995 Comme les données disponibles du tableau ci-dessus l'indiquent, les recettes d'exportation sont en baisse depuis 1992. En effet, une tenue satisfaisante des recettes d'exportation générées par l `économie de 1985 à 1991 en se situant aux environs d'une moyenne de 1500 millions de DTS a brutalement chuté à 869,8 millions de DTS en 1992, 818, 1 millions de DTS en 1993 et 876,9 millions de DTS en 1994. Toutefois, une tendance à la hausse est observée en 1995. Quant au solde de la balance des paiements, celui-ci est resté négatif durant toute la période sous-analyse. De 130,0 millions de DTS en 1985, le solde de la balance des paiements est passé à 752,6 millions de DTS en 1995. Par ailleurs, l'amenuisement des ressources en devise a eu pour conséquence la dépréciation persistante de la monnaie nationale, ainsi que l'accumulation d'importants arriérés de la dette extérieure. II.5. Désintermédiation du système bancaire Depuis l'avènement de l'hyperinflation en 1990, le système bancaire a été marqué jusqu'en 1994 par une crise de liquidités aiguës, laquelle a accentué la désintermédiation bancaire.((*)9) Cette crise qui rend le système illiquide, s'est traduit par l'inconvertibilité de la monnaie scripturale sous forme fiduciaire, gênant ainsi l'activité économique tout en accentuant la méfiance du public vis-à-vis des banques. Plusieurs causes ont été à la base de cette crise de liquidités ; certaines sont lointaines tandis que d'autres sont immédiates.
Parmi les causes lointaines, l'on peut relever principalement le financement monétaire des déficits budgétaires, la persistance de l'inflation, la prédominance de la monnaie fiduciaire qui reflète la faible utilisation des moyens de paiements scripturaux et l'expansion de l'économie informelle. Il convient d'ajouter à ces causes la libéralisation en 1983 de l'exploitation artisanale des matières précieuses. Les sommes importantes drainées par cette exploitation sont gardées sous forme fiduciaire (billets de banque) du fait de l'inexistence des guichets bancaires et de l'insuffisance des activités commerciales et industrielles dans les zones diamantifères. Toutefois, il sied de relever qu'en sus des causes lointaines ci-dessus , d'autres causes immédiates ont été à la base de cette crise. Ces causes sont essentiellement :
* (5) BANQUE DU ZAÏRE, Bulletin mensuel des statistiques, octobre 1996, p. 5. * (6) LOLO MASSY, « L'enracinement de l'hyperinflation », in : Notes de Conjoncture, n°27, Août 1996, p. 8. * (7) MUSUSA ULIMWENGU,
« De l'hyperinflation zaïroise à la déflation
congolaise », in : Notes de Conjonc- * (8) MUBAKE MUMEME, Finances
publiques et fiscalité, cours dispensé en troisième
graduat grestion, Kinshasa, * (9) BANQUE DU ZAIRE, Rapport annuel 1995, p. 143.
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