La libéralisation des télécomunications au Sénégal: concurrence, innovation et réglementation( Télécharger le fichier original )par cheikh ahmed tidiane Dieng Université de Nice Sophia Antipolis - Master 2 recherche en économie de l'innovation et dynamique industrielle 2004 |
Chapitre 2 : La régulation du secteurL'administration publique est synonyme de service public au sens formel du terme, c'est-à-dire un ensemble organisé de ressources humaines, matérielles mises en oeuvre par l'Etat en vue de la satisfaction des besoins des administrés par l'exercice d'activités d'intérêt général. Au Sénégal, comme dans nombre de pays en développement, l'administration apparaît comme le produit de la capitalisation de l'héritage colonial. Convaincus cette administration constituait à la fois le signe et le vecteur de la modernité, les élites dirigeantes de l'administration. Mais plus trente ans après, les défaillances de la bureaucratie au sens de Max Weber ou de celui de l'appareil d'Etat se pose toujours avec autant d'acuité. L'administration des télécommunications n'a pu échapper à cet état des faits et a fortement subi les mutations entreprises par les états africains dans le but de sortir de la crise économique et financière parce que contraints de libéraliser leurs économies dans les cadre de programmes d'ajustement structurel sous l'égide des institutions de Breton Woods. La théorie néolibérale, après l'opérateur historique et les infrastructures, a ainsi prévalu sur les structures de régulation des télécommunications au Sénégal (section 1), de même que sur les différentes modalités d'accès au marché (section 2).
Section 1 L'administration et les télécommunications.En matière de télécommunications, il était très difficile au Sénégal de savoir qui s'occupe de quoi. Le principal problème qui se pose est celui de la multiplicité des centres de décisions et de l'instabilité des pôles de décisions (paragraphe A) que l'on a pallié par la mise en place d'une autorité indépendante en fin 2001 (paragraphe B). Paragraphe 1 : Les acteurs de la régulationIl existe plusieurs structures qui interviennent dans le secteur des technologies de l'information et de la communication parmi lesquelles on peut citer : Le comité national de coordination des télécommunications, créé en 1960, il dépendait de la présidence de la république et a assuré la régulation depuis. Le comité national à l'information dépendant de la présidence de la république créée en 197262(*) La délégation à l'informatique (DINFO) créée en 198763(*) Le Ministère du commerce et de l'artisanat qui assure la tutelle du Trade Point. Instabilité car certaines structures comme la DINFO ont mille fois changé de tutelle. S'y ajoute le fait que la politique nationale en matière d'inforoutes, qui est au coeur des politiques impliquant l'utilisation des technologies de l'information et de la communication, a tantôt été définie par la DINFO, tantôt par le ministère, ensuite le Conseil Supérieur de l'industrie au fur et à mesure que les différentes structures se sont livrées à des stratégies de positionnement qui ont fait retarder les résultats escomptés. 1) Les autorités compétentes Sous l'ère du monopole, l'essentiel du régime juridique des télécommunications relevait du droit administratif (biens, actes, relations, avec les usagers, ...). L'encadrement de l'activité des télécommunications demeure soumis au droit administratif. En matière de réglementation, c'est le Ministère de la communication et des Nouvelles Technologies de l'Information et de la Communication qui exerce ses attributions par des procédés traditionnels de droit administratif. Ø La DERPT (Direction des Etudes et de la Réglementation de la Poste et des Télécommunications). Créée par le décret n°94-896/MICOM/SAGE du 05 septembre 1994, la DERPT exécute la politique réglementaire depuis cette année, sous l'autorité du Ministère de la communication et des Nouvelles Technologies et de la Communication. A ce titre, la DERPT approuve les tarifs fournis sous le régime du monopole, délivre les autorisations d'exploitation des services, gère l'attribution des fréquences radio électriques etc. Elle a été placée sous la tutelle du secrétariat général du gouvernement depuis le remaniement ministériel de 2001 qui a vu la suppression du Ministère de la communication et des nouvelles Technologies de l'Information et de la Communication. Ø Le Ministère de la communication Quant à la réglementation, c'est le ministère de la communication qui exécutait la politique dans le secteur des télécommunications. Son rôle est précisé par l'article 49 de l'ancien code des télécommunications de 1996. Il était chargé d'approuver par arrêté les tarifs des services qui étaient fournis sous le régime du monopole, conjointement avec le ministère chargé des finances et celui chargé du commerce. Aussi devait-il délivrer les autorisations d'exploitation, veiller aux dispositions contenues dans les conventions de concession, cahiers de charges etc. Il avait pour rôle aussi d'accorder les agréments des équipements terminaux, d'assurer la gestion du spectre des fréquences, bref de contribuer à l'exercice des missions de l'Etat en la matière. 2) Les limites de la fonction de régulation Le désengagement de l'Etat dans les secteurs productifs a eu un grand d'impact sur le rétrécissement de l'espace administratif. Partout dans les pays sous ajustement structurel, ce désengagement se poursuit dans le cadre de la régulation du secteur public par le marché. Les entreprises qui ont échappé aux privatisations sont ainsi soumises au régime du droit commun c'est-à-dire à la législation applicable aux sociétés de droit commercial du secteur privé. La nécessité d'une décentralisation administrative est admise par toutes familles politiques64(*). Ainsi, la pléthore de structures, ayant pour objet la promotion de l'industrie des télécommunications (fait relatif à la bureaucratie galopante au sein des administrations dans les pays en développement) avait pour conséquence un manque d'autorité qui puisse à terme centraliser et coordonner toutes les activités des uns et des autres. Ainsi beaucoup d'idées, de projets ont été ébauché sans pour autant qu'ils puissent voir le jour. Donc, l'Etat dépensait ses ressources pour les mettre au tiroir. La volonté de prédominance d'un établissement vis-à-vis des autres suscitait des oppositions et l'on ne soutenait plus les programmes que les autres départements voulaient mettre en oeuvre au risque de se voir priver de financement. Au lendemain de l'ouverture du secteur à la concurrence, la DERPT et le ministère de la communication étaient dépourvus de moyens techniques et humains pour être à même d'exécuter correctement leurs tâches par exemple en matière de vérifications d'ordre techniques. Par ailleurs, ils faisaient appel aux techniciens de la Sonatel, cela était d'autant normal que la Sonatel qui assurait la planification, la gestion et le contrôle du spectre de fréquences, aussi y avait-il des agents de la Sonatel mis à la disposition de l'Etat en service dans ses départements. C'est voir que jusqu'en 2001, date de la mise en place de L'ART (Agence de régulation des télécommunications), on a permis au monopole d'une façon ou d'une autre d'anticiper sur la stratégie de la concurrence, de surveiller la politique développée par celle-ci et de pouvoir la retarder ou la contrecarrer puisque ce sont ses employés qui assuraient la conformité du matériel, bref tout le volet technique que l'Etat en ce moment ne pouvait assumer en personne. Il était plus que jamais impératif de mettre en place une structure indépendante qui puisse assurer une indépendance, ce neutralité et impartialité vis-à-vis des autres entreprises du fait que la Sonatel, avait et a encore des filiales dans toutes les autres branches d'activités et que ceux-ci en demeuraient avantagées. * 62 Arrêté n°8543/PM/SGG du 02 août 1972. * 63 Décret n°87-1402 du 17 novembre 1987 * 64 Où en est l'administration publique ?, l'Afrique politique, 2001, p23 à 46, Augustin Loada, Université de Ouagadougou. |
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