WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Un champ scientifique à l'épreuve de la Seconde guerre mondiale les revues de géographie françaises de 1936 à 1945

( Télécharger le fichier original )
par Laurent Beauguitte
Université Paris 7 - Master 1 2007
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

Le choix des dates

Pour savoir quels sont les changements apportés par la guerre et par le régime de Vichy, le premier travail consiste à tenter de caractériser la production d'avant-guerre.

La date de départ choisie est 1936.

Affirmer qu'en 1936, toutes ces revues ont plusieurs années d'existence et que leur contenu est probablement stabilisé, gommerait de profondes différences d'ancienneté (AG 1891, RGA 1913, BAGF 1924, ER 1925, BSLG 19306(*), RGPSO 1930). Surtout que toutes n'ont pas trouvé leur rythme de croisière dès le départ : les Études rhodaniennes deviennent une revue à part entière à partir de 1928 seulement, le BAGF tâtonne presque deux ans avant de fixer son contenu. Notons que ce dernier ne prétend pas être une revue, ce qu'Emmanuel de Martonne rappelle régulièrement (BAGF, 1935, n°86, p.56 ; 1947, n°183-184, p.22).

Les deux motifs expliquant le choix de cette date sont les suivants : il est difficile d'imaginer contraste contextuel plus fort qu'entre 1936 et 1940, et le temps disponible pour cette recherche limite les possibilités. Disposer de trois années de paix à distance de la crise économique du début des années 1930 paraît à l'auteur une base de comparaison suffisante.

Prolonger l'étude jusqu'en 1945 apparaît nécessaire. Les informations données sur les conditions de parution et la vie des différents Instituts de Géographie sont tout à fait précieuses pour notre travail. De plus, il est évident, comme le signale l'historien Pierre Laborie que « toute l'histoire de la France de Vichy ne commence certainement pas en juin 1940 et, l'observation vaut dans les deux sens, tout ce qui lui appartient ne s'arrête pas en août 1944 ». Il ajoute en note : « Ceci, pour insister sur le fait que Vichy ne peut être considéré, en aucune façon, comme une simple parenthèse » (Laborie, 1990, p.20).

Vocabulaire, style et anachronisme.

Plonger dans des textes des années 1930 et 1940 expose à quelques surprises lexicales et stylistiques. Ce n'est pas une géographie familière et, de la construction des textes en passant par leurs thèmes de prédilection, cette géographie paraît de prime abord étrange. Certes, et j'étais prévenu, et le terme se trouve dans toutes les histoires de la géographie, la géographie de l'époque est « organiciste ». Mais la multiplicité des métaphores biologiques, qu'elles concernent le monde rural, les industries ou le développement urbain, étonne un lecteur contemporain. Que les campagnes souffrent de congestion puis s'anémient à force d'hémorragies surprend peu - d'autant que certains discours actuels continuent d'utiliser ce vocable -, mais je ne m'attendais pas à lire des phrases comme « en Suisse, les toits de tuiles creuses (dites ici tuiles courbes) meurent » (Biermann, 1939, p.289) ou lire une description de « la verdure que trouent ça et là les os jaunis des maisons mortes » (Bozon, 1943, p.135).

Autre facteur d'étrangeté, l'utilisation extrêmement fréquente des termes race, raciale, ethnie. L'emploi de ces mots est normal, il ne présuppose aucun racisme et fait partie du vocabulaire scientifique courant de l'époque. Ainsi, le programme du Congrès international de la population informe que la deuxième partie traite des :

« Problèmes qualitatifs de la population :

1.) Méthodes propres à caractériser les individus (biométrie individuelle), à déterminer des types (biotypologie), à définir les races (ethnologie).

2.) Transmission héréditaire des caractères humains (caractères fragmentaires et ensembles typiques), les croisements entre les races.

3.) Questions pratiques (eugénique). » (BAGF, 1937, n°103, p.34).

Pour en rester au chapitre racial, les jugements de valeur sur certaines ethnies, notamment d'Afrique noire, paraissent choquantes aujourd'hui. Cela aussi faisait partie du langage scientifique en vigueur à l'époque.

Afin d'éviter tout contresens et toute interprétation erronée, j'ai lu, outre les revues, un certain nombre d'ouvrages de géographie publiés à l'époque. Il ne s'agissait pas de les lire en fonction de critères contemporains, ou de découvrir de supposés précurseurs, mais de se familiariser avec une langue, avec des expressions et des modes de raisonnement autres. Pour la même raison, j'ai respecté les catégories utilisées par les auteurs et par les comités de rédaction. Je nomme « article » ce qui est considéré comme article à l'époque, « chronique » ce qui est appelé chronique dans les tables des matières.

* 6 Le bulletin est beaucoup plus ancien (1878), 1930 marque le début de la deuxième série, et la reprise en main du bureau de la Société par l'Institut de géographie de l'université de Montpellier. Voir Thomas (1930) et Saussol (1990).

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"En amour, en art, en politique, il faut nous arranger pour que notre légèreté pèse lourd dans la balance."   Sacha Guitry