Du role de la société civile pour une consolidation de la démocratie participative au Sénégal( Télécharger le fichier original )par Mamadou Hady DEME Université Gaston Berger de Saint-Louis - Maitrise 2008 |
CHAPITRE DEUXIEME :LES AMBIGUITES DE POSITIONNEMENT DE LA SOCIETE CIVILE PAR RAPPORT AU POLITIQUESECTION I : LES DOMAINES D'INTERVENTION DE LA SOCIETE CIVILELa vague de démocratisation des sociétés africaines, le triomphe sans cesse du libéralisme, a permis aux organisations de la société civile d'agir sur plusieurs secteurs de la vie publique. Dans une démocratie libérale, caractérisée par l'économie de marché, le développement de l'initiative privée est fortement encouragé par les politiques. C'est dans ce contexte que la société civile trouve sa place dans l'espace économique, mais aussi dans l'espace politique poussant ainsi les gouvernants à tenir compte de leurs points de vu dans l'élaboration des politiques publiques infléchir sur certaines politiques publiques. Paragraphe I : L'espace socio économiqueL'intervention de la société civile dans l'espace économique est une des caractéristiques des sociétés à démocratie libérale. L'Etat cède une partie importante de son champ d'action pour encourager les citoyens à participer à la construction du pays. La dimension économique des organisations de la société civile est marquée au Sénégal par la présence d'associations de femmes, de GIE (groupement d'intérêt économique) de groupements de producteurs, d'exploitants forestiers etc. Ces différentes franges de la société constituent des poids économiques que l'Etat est obligé de prendre en considération dans ses politiques sociales et économiques. Ces forces sociales se substituent d'une part à l'Etat et constituent des avants- garde de la santé économique du pays qui dans une certaine mesure constitue le point de départ d'une stabilité socio politique. Depuis le début des années 90 on assiste au Sénégal à l'émergence de conditions favorables à l'intervention de la société civile dans l'espace économique national. En effet, à la faveur du désengagement de l'Etat, de l'accroissement de la pauvreté qui est la résultante de mal gouvernance et des politiques d'ajustements structurels des institutions de Bretton Wood, et qui favorise des initiatives individuelles ou collectives, des individualités des associations des ONG de diverses natures ont proliféré dans le paysage national pour répondre à des besoins spécifiques qui sont non ou mal pris en compte par les structures étatiques. Ainsi, le libéralisme politique d'un côté, et le libéralisme économique de l'autre, auxquels sont venus s'ajouter la décentralisation, ont favorisé un boom d'initiatives venant d'acteurs privés.
Avec le slogan moins d'Etat, mieux d'Etat apparu avec les politiques d'ajustements structurels on a assisté à l'apparition et à la consolidation d'organisations locales de développement. Certains sont nés se dotant du statut de groupement d'intérêt économique (GIE), d'organisation non gouvernementale (ONG) etc. Et d'autres de type informel et traditionnel d'abord et qui par la suite ont évolué vers des formes légales et plus structurées. C'est le cas des organisations paysannes et des coopératives villageoises évoluant dans le monde rural. Tout ceci traduit le besoin des populations de se doter de cadres associatifs les plus appropriés selon le contexte socio-politique du moment afin de mieux participer au changement social et d'occuper de nouveaux espaces d'expression. Dans le contexte sénégalais caractérisé par la massification de la pauvreté, de l'analphabétisme les divisions ethniques, les discriminations liées au sexe etc., la société civile en a fait un combat global de relance de l'économie. Les GIE composés le plus souvent d'association de femmes occupent une place importante dans la prise en compte de la dimension genre. Ces organisations agissent dans une perspective de défense des intérêts de la femme souvent reléguée au second plan dans la lutte contre la pauvreté. La situation de la femme au Sénégal est peu enviable. Elle est largement défavorisée par le système socio culturel, économique et politique alors qu'elle doit être un acteur économique et un agent incontournable du développement. Cette prise de conscience des femmes qui constituent une frange importante de la société civile est louable au regard de leur intervention dans les PME. Dans ce cas le combat des femmes intellectuelles se mouvant dan la société civile est salutaire et va à l'encontre de l'idéologie dominante chez les sociétés patriarcales rapportées par Christine Zoé NARE : Selon l'idéologie propre aux sociétés patriarcales, la subordination de la femme à l'homme ne devait pas être économique, elle devait être juridique, sociale et psychologique car l'image de la femme n'est valorisée que dans ses fonctions de mère et d'épouse. Elle ne doit pas être poussée à la réussite dans les domaines qui sont la chasse gardée des hommes comme le domaine économique, public, les sphères du pouvoir toute chose que la réussite dans le système éducatif contribuerait à rendre possible. 8(*) C'est en participant activement au changement de ses conditions d'existence matérielle que la femme modifie le sens du regard que la société a sur elle. A ce titre K. Marx rappelle que : Les rapports juridique ainsi que les formes de l'Etat ne peuvent pas eux-mêmes, ni par la prétendue évolution de l'esprit humain, mais qu'ils prennent au contraire leurs racines dans les conditions d'existence matérielles dont Hegel à l'exemple des Anglais et Français du XVIIIe siècle comprend sous le nom de société civile et que l'anatomie de la société civile doit être recherchée à son tour dans l'économie politique. 9(*)
Le poids économique de la société civile favorise sa crédibilité face à la société politique et renforce sa capacité d'action auprès des politiques d'où la place prépondérante des femmes et des jeunes dans la société civile sénégalaise car constituant la majorité sociale. L'économie informelle n'est pas seulement une réaction aux insuffisances de l'économie officielle à l'intérieur d'un pays quelconque. Elle devenue un processus une réaction à ce que l'on appelle aujourd'hui mondialisation et qui est un processus d'unification des marchés. A ce titre l'économie informelle dans laquelle se meut la société civile du pays participe partiellement à la défense des intérêts nationaux battus en brèche par la mondialisation. Dans le langage politique actuel la société civile idéale se veut un ensemble harmonieux de citoyens conscients et actifs. Cette conscience politique et cette activité civique s'opposent au conditionnement qui provient inévitablement des institutions et de l'Etat en particulier. La question de l'économie informelle et celle de la société civile sont comparables parce que les deux expressions renvoient à des pratiques de substitution. En effet, les échecs de l'économie officielle se traduisent par un chômage massif et un nombre croissant d'exclus dont les plus inventifs cherchent une solution de substitution qui est aussi une solution de survie dans l'économie informelle. Par ailleurs après les échecs de la construction du socialisme et de la marche au communisme occasionnés par la montée en puissance du libéralisme, le recours à la société civile comme une solution de substitution est suggérée par le cours de l'histoire. A cet effet le discours du président François Mitterrand tenue à la Baule en 1990 exhortait les Etats africains à prendre en compte toutes les composantes de la société dans la lutte pour le développement. Dans les recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations (1776), Adam Smith expose sa théorie d'une distinction fondamentale entre le politique et l'économique, autrement dit l'Etat et la société civile qui est le champ de rapports fondamentaux engendrés entre les individus par les activités du commerce et de l'industrie. Selon Marx et Engels la société civile embrasse l'ensemble des rapports matériels des individus à l'intérieur d'un stade de développement déterminé des forces productives. Elle embrasse l'ensemble de la vie commerciale et industrielle d'une étape et déborde par là même l'Etat et la nation ou société moderne, bien qu'elle doit par ailleurs s'affirmer à l'extérieur comme nationalité et à l'intérieur comme Etat. La présence de la société civile dans le terrain économique renvoie à la conception hégélienne, théorisée par Dominique COLAS, de bataille de l'intérêt privé individuel de tous contre tous, de même que le conflit de cet intérêt avec les intérêts particuliers et les dispositions de l'Etat. La société civile serait dans ce cas un champ de bataille des classes sociales et des divers groupes sociaux où ce qui est directement en jeune sont non la politique comme à la fois système social et résultat de celui-ci pour le contrôle du pouvoir que peut conférer le profit, le gain l'argent et la maîtrise des diverses ressources qui les génèrent En définitive, malgré les nombreuses décisions prises concernant la promotion économique des organisations de la société civile, il reste beaucoup car leur application n'est pas toujours effective intervient-elle dans le domaine politique pour la promotion démocratique et économique. * 8 C Z Nare. «Être femme intellectuelle en Afrique : de la persistance culturelle » : Afrique et développement, vol XXII 1997. p.70. cité par Mamadou el Bachir Kanouté dans Revue sénégalaise de sociologie N° 2-3 janvier 1998. p289 * 9 (K), Marx. Contribution à la critique de l'économie politique. Paris : Editions sociales. 1957 p.4 |
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