Du role de la société civile pour une consolidation de la démocratie participative au Sénégal( Télécharger le fichier original )par Mamadou Hady DEME Université Gaston Berger de Saint-Louis - Maitrise 2008 |
Paragraphe 2 : le rôle des intellectuels dans l'émergence de la société civileLa notion de société civile connaît souvent des erreurs de qualification. La plupart des cas ce sont des sujets isolés ou hâtivement organisés qui, spontanément, s'autoproclament « société civile ». Parfois aussi c'est une certaine presse qui, délibérément, baptise un groupe ou une communauté sous la même appellation. La désignation s'applique à un objet flou, une entité collective à configuration vague, en fonction des circonstances d'alliance, d'opposition ou de distanciation par rapport au jeu politique. C'est ainsi qu'il apparaît malaisé de circonscrire avec précision les vrais acteurs de la société civile. Gramsci s'est intéressé de prés au rôle des intellectuels dans la société, il se disait notamment que tous les hommes sont des intellectuels, mais que tous n'ont pas la fonction sociale d'intellectuel. La marque première de l'intellectuel est un fait son engagement. Les intellectuels ne doivent pas se limiter à la production de discours comme cela est encore très fréquent au Sénégal, mais ils doivent s'impliquer dans l'organisation de pratiques sociales, y comprise les pratiques politiques. Ces intellectuels organiques ne décrivent pas simplement en fonction des de règles scientifiques, mais expriment plutôt les expériences et les sentiments que les masses ne pourraient pas exprimer par elles-mêmes. La nécessité de créer une culture propre aux travailleurs est à mettre en relation avec l'appel de Gramsci pour un type d'éducation qui permette l'émergence d'intellectuels qui partagent les passions des masses et formant ainsi l'ossature d'une vraie société civile. La théorie de l'hégémonie de Gramsci est inséparable de sa conception de l'État capitaliste, dont il dit qu'il dirige par la force et le consentement. L'État ne doit pas être compris comme le seul gouvernement, Gramsci distingue deux grandes parties : la « société politique », lieu des institutions politiques et du contrôle constitutionnel légal (la police, l'armée, le système légal) ; la « société civile », que l'on désigne habituellement comme la sphère privée ou non étatique, et qui inclut l'économie. La première est régie par la force, la seconde par le consentement. Gramsci précise cependant que cette distinction est avant tout conceptuelle et que les deux sphères se recoupent souvent. Les intellectuels conçus comme la frange éclairée de la société, constituent le socle de son existence et de sa vitalité. « En s'inscrivant dans une optique positive d'insertion et d'action sociales sous l'égide des droits de l'homme de la personne, de l'Etat de droit, de la démocratie en général, l'intellectuel africain s'engage aussi à s'assurer une certaine représentativité afin de mieux gérer sa condition et finaliser son action » 5(*). L'intellectuel sénégalais et africain devra compter avec le symbolisme mystico politique du pouvoir et en même temps trouver une plus large représentativité_ hormis les partis politiques_ dans les associations, clubs, cercle de réflexion ou courant de pensée. Le débat intellectuel, la réflexion devra être au centre des organisations de la société civile. C'est la somme de ces réflexions et de ces débats qui tendront à ramer à contre-courant, si besoin est, de l'Etat en tant qu'instance de décision instance de décision. Les intellectuels entrent alors en convergence avec d'autres pôles d'influences sociaux affirmés dans leurs principes apolitiques et jouant un rôle déterminant dans l'équilibre des jeux et des enjeux publics. C'est ainsi que commerçants, artistes et toutes les autres composantes de la société civile classiques peuvent se voir rallier les intellectuels, ce aux fins d'une mise en commun de leur pouvoir d'influence et de leur capacité d'action. Par ailleurs, il n'est pas imaginable de réduire la société civile au microcosme des groupes ou individualités instruits, influents sous quelque rapport ou vivant un milieu urbain, avec la constance de n'être pas impliqués dans le jeu politique, comme cela peut être le cas pour les syndicats. L'intelligentsia sénégalaise, appelée dès les débuts de la colonisation groupe des « évolués » a contribué à façonner la société civile, porteuse des doléances des populations. Ella a été à l'origine de tout un courant d'idées qui, pour s'être installées dans la contradiction et le conflit, sont devenues une dimension importante de la société et de la culture sénégalaise. L'école a joué aussi un rôle important dans la formation de l'intellectuel. La pérennité de la société civile doit passer par une scolarisation à l'école des futurs héritiers Les intellectuels ne sauront être en marge de la composition des acteurs de la société civile. D'ailleurs, c'est dans les pays développés où l'éducation des citoyens a acquis une certaine performance que les organisations de la société civile connaissent un prestige véritable. Ils se distinguent dès lors par leur implication dans le tissu social. * 5 O. Diagne. « L'intellectuel et la société civile » : revue sénégalaise de sociologie |
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