En Côte-d'Ivoire, le type Faux Corne (et en particulier
le cultivar Corne 1) représente au moins 90 % des plantains
cultivés. La production est abondante d'octobre a mars. En revanche,
l'approvisionnement des marchés est relativement faible d'avril a
septembre. Certains facteurs susceptibles de provoquer des pertes ont
été recensés (N'DA ADOPO, 1993):
· récoltes effectuées le plus souvent a un
stade de remplissage très avancé, assez proche du
déclenchement de la maturation,
· conditions de transport déplorables
(véhicules trop chargés) et longs délais d'acheminement,
fruits tassés puis déchargés sans ménagement;
· mauvaises conditions de stocKage en période
d'abondance.
Les grandes zones de production qui ravitaillent Abidjan,
principal centre de consommation de la Côte-d'Ivoire, sont situées
dans la moitié sud forestière du pays; elles sont parfois
éloignées de quelques centaines de Kilomètres (300 a 400
Km dans certains cas) de ce point de vente (N'DA ADOPO, 1993). Les longs
trajets d'acheminement des fruits se font souvent en plusieurs étapes.
Au cours de celles-ci, il arrive que les régimes soient
déchargés, regroupés en tas sur un
marché régional de collecte pendant quelques heures voire une
journée, avant d'approvisionner le marché final. Il en
résulte qu'une proportion non négligeable de régimes
mürs peut être observée dans les lots transportés et
mis sur les derniers points de vente.
L'organisation de la filière de commercialisation de
la banane plantain au Cameroun présente de grandes similitudes avec
celle qui a été étudiée dans le cas de la
Côte-d'Ivoire:
· la production la plus abondante se situe sensiblement
d'octobre-novembre a marsavril (ALMY et BESONG, 1989),
· la culture se concentre dans la moitié sud du pays
car les conditions climatiques y sont plus favorables (provinces du Sud-Ouest
et du Centre principalement),
· la manutention des régimes, de facon
générale, s'effectue dans le même état d'esprit
qu'en Côte-d'Ivoire; les capacités de charge des véhicules
sont souvent dépassées pour rentabiliser le voyage.
Mais les cultivars consommés sont plus
diversifiés (types Corne et French sensiblement en proportions
égales). A côté des plantains on trouve aussi une
quantité importante de bananes de dessert qui proviennent soit des
plantations traditionnelles paysannes, soit des refus d'exportation des
plantations industrielles. Cela augmente la diversité des régimes
sur les places de marché. Ces bananes sont consommées cuites, a
l'état vert.
Les grands centres de consommation sont ravitaillés par
leur voisinage immédiat; les véhicules qui transportent le
plantain ne parcourent pas de grandes distances, excepté pour la partie
nord du pays non productrice. Les durées de transport, de 2 a 5 heures
au maximum, sont donc plus courtes. Yaoundé, capitale du Cameroun, est
entourée par sa zone d'approvisionnement distante de 30 a 50 Km en
moyenne (LENDRES, 1990). A Douala, les régimes proviennent surtout du
sud-ouest et secondairement du littoral, a des distances de 50 a 100 Km en
moyenne.
Il n'existe pas alors, dans ces circuits d'approvisionnement,
de marchés régionaux intermédiaires oü sont
regroupées les collectes et déchargées les récoltes
qui s'entassent pendant plusieurs heures avant d'être chargées a
nouveau pour la destination finale.
Les régimes sont récoltés très
verts, plus précocement qu'en Côte-d'Ivoire en
général. La durée de vie verte est donc normalement plus
longue. L'observation de bananes plantains müres dans les lots
transportés et dans ceux des points de vente finaux est, ici,
relativement moins fréquente.
Il n'y a pas d'excès de plantains sur le marché
par rapport aux besoins de la consommation. Même en saison de forte
production les régimes n'attendent pas plus de 3 a 4 jours avant
d'être définitivement commercialisés.
Dès que des échanges réguliers ou
fréquents s'établissent entre les producteurs et les acheteurs,
un système permettant de récupérer tout le plantain
récolté se met assez rapidement en place. Diverses techniques
peuvent être adoptées (N'DA ADOPO, 1991), ainsi:
· les producteurs vendent souvent leur récolte en
gros; ce procédé interdit aux intermédiaires de trier les
régimes pour n'acheter que les meilleurs et abandonner le reste des lots
entre les mains du paysan;
· les intermédiaires utilisent un dispositif de
récupération et de valorisation des fruits détachés
des régimes, et parfois cassés au cours des manutentions et des
transports.
A côté des vendeurs classiques, il existe
d'autres acteurs du circuit de commercialisation de la banane plantain qui
peuvent être véritablement spécialisés dans
certaines fonctions: rangement des régimes dans les camions, classement
des régimes sur le marché en fonction des initiales
marquées sur la hampe par chaque grossiste-livreur après
l'achat.
Une fois les transactions terminées, certains
manutentionnaires commercialisent les plantains dans un véritable
sous-circuit qui fonctionne sur la place du marché avec d'autres vrais
vendeurs spécialisés. Les doigts qui auraient été
accidentellement arrachés ou cassés au cours des transports et
des manutentions sont classés dans une catégorie
inférieure aux autres fruits et se vendent moins chers. Cela profite a
une certaine clientèle urbaine relativement modeste.
Cette organisation fonctionne assez bien; elle permet
d'accroItre les gains des vendeurs tout en contribuant a minimiser les pertes
du produit. Même si les techniques utilisées dans la
filière de commercialisation de la banane plantain paraissent peu
rationnelles a première vue, il s'avère qu'elles correspondent a
l'aboutissement d'une certaine tradition. Elle serait, en fin de compte, en
équilibre avec la structure du circuit de distribution et le
système global de commercialisation et de consommation.
Finalement il s'avère qu'au Cameroun, les pertes
après récolte les plus évidentes se situent actuellement
chez le producteur, dans les sites d'accès difficile car relativement
enclavés, en saison pluvieuse particulièrement.
La vulgarisation de nouveaux procédés de
commercialisation se présente différemment selon qu'elle
s'adresse a une zone de production oü le prix du plantain est relativement
faible, ou a des régions éloignées de ces sites oü la
denrée se vend a des prix plus élevés, quel que soit son
degré de maturation. Les tests de distribution de plantains
conditionnés en cartons sur les marchés de Douala et de
Yaoundé ne se sont pas révélés
économiquement rentables. Ces procédés pourraient, par
contre, être intéressants dans les centres urbains de
consommation, non producteurs, situés dans l'extrême nord du pays.
Le coüt élevé de cet aliment pourrait alors justifier
l'utilisation de tels conditionnements spéciaux (N'DA ADOPO, 1993).