CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS
Le modèle de gravité n'a été que
rarement utilisé dans le cadre des pays d'Afrique Subsaharienne et dans
l'UEMOA en particulier. Il n'y a donc que très peu de résultats
quantifiables sur les phénomènes de création et de
détournement de commerce sur cette zone. Or étant donné
l'intérêt des pays de l'UEMOA pour l'intégration
régionale (tous les Organes et Institutions prévus par le
Traité du 10 janvier 1994, sont aujourd'hui opérationnels) il est
important d'analyser l'évolution du commerce entre ces pays, et, dans le
cas ou ce commerce aurait augmenté, de déterminer si le
phénomène est dû principalement à une
création ou à un détournement de commerce. En effet, si le
détournement d'importations domine, cela peut aggraver les
problèmes de compétitivité des pays membres de
l'accord.
Dans cette étude, une attention particulière a
été accordée à l'impact de l'union douanière
sur le commerce intra-UEMOA et les déterminants de celui-ci après
l'harmonisation tarifaire intervenue au 1er Janvier 2000.
Les résultats de l'étude montrent, que l'UEMOA
(le TEC) favorise les échanges intracommunautaires, même si cet
impact n'est pas aussi important que ceux qui sont engendrés par les AR
d'Asie du Sud-Est ou d'Amérique Latine. Par ailleurs, l'accroissement du
commerce, attribuable à l'union douanière induit un
détournement de flux commerciaux au détriment des partenaires
hors UEMOA.
Enfin, l'étude a permis d'identifier le produit
intérieur (brut et par tête) et les affinités culturelles
captées par la variable langue commune « Lgij » comme facteurs
déterminants de l'accroissement du commerce bilatéral au sein de
l'UEMOA. Par contre, la distance entre les pays partenaires et l'enclavement
sont les principales contraintes à l'expansion du commerce intra-UEMOA.
Il faudrait aussi souligner que l'instauration du TEC n'a pas modifié
les déterminants du commerce du groupement.
Quatre implications majeures peuvent être tirées des
résultats de cette étude :
1. L'Union Economique et Monétaire Ouest-Africaine offre
aux pays membres l'opportunité d'accroître leur commerce
intra-communautaire et hors zone. Les pays de
l'UEMOA devraient donc renforcer davantage la
coopération interne et procéder à la libéralisation
totale des échanges intra-communautaires en veillant à
l'application complète de la politique commerciale de l'union. Pour
différentes raisons, le TEC est appliqué de façon
partielle par les Etats de l'union. Certains ont introduit de nouveaux droits
et taxes de porte en plus de ceux inscrits au TEC et ne respectent pas touj
ours la dégressivité de la TDP. De nouvelles taxes internes sont
parfois mises en place, en plus des seuls TVAs et droits d'accises
harmonisés qui sont autorisés par l'union. L'élimination
de tous ces obstacles tarifaires et non tarifaires contribuera à plus
d'échanges commerciaux intra-UEMOA.
2. La perspective des moins values de recettes
douanières a constitué une difficulté majeure dans la mise
en oeuvre des programmes de consolidation de l'union douanière de la
zone et de son marché commun. Une méthode pour dissiper cette
crainte de perte de revenus (justifiée ou pas) et encourager la
participation effective à un programme de libéralisation des
échanges est d'introduire un mécanisme de compensation effective,
durable et financé sur une base régulière qui s'occupera
des questions de perte de revenus, du manque d'équité et/ou des
inégalités qui découleraient de la mise en oeuvre des
programmes de libéralisation des échanges. Un tel
mécanisme est susceptible d'encourager les pays à respecter les
programmes de l'union. La Côte d'Ivoire, locomotive de l'UEMOA et le
Sénégal sont appelés à jouer un rôle de
leader pour amener les pays qui auraient le sentiment de ne pas profiter de
l'intégration à appliquer totalement les accords. Pour cette
question de compensation qui se heurte souvent à l'antagonisme entre
Etats membres (le cas de la CEAO dans les années 1980 avec l'arrêt
des contributions de la Côte d'Ivoire et le Sénégal),
certains auteurs ont suggéré la compensation en termes des
infrastructures des projets intégrateurs afin de créer des biens
communs, durables et utiles à tous.
3. Parmi les facteurs qui affectent négativement le
commerce intra-UEMOA, le coût des transports, exprimé par la
distance absolue entre les partenaires et l'enclavement sont très
déterminants. Cette contrainte doit être levée pour
permettre au commerce intra - UEMOA de s'accroître. Ainsi, à
l'approche libre échangiste et institutionnaliste de
l'intégration régionale qui est celle privilégiée
dans la région et qui semble recevoir l'aval des principaux bailleurs
de fonds ne sera pas suffisante. Elle devra être
complétée
par une approche regionale du développement sectoriel
et des infrastructures notamment dans le domaine du transport, de
l'énergie et de la télécommunication pour connecter les
pays de l'union, particulièrement à ceux du sahel qui sont
enclavés. Toutefois, en tenant compte de la limite des ressources
budgétaires des Etats en proie à des crises financières,
il serait alors judicieux de ne financer que les interconnexions jugées
prioritaires sur la base des études de trafic de biens et de personnes
qu'elles pourraient contribuer à augmenter de façon significative
au niveau des frontières ainsi que des coûts de transport qu'elles
pourraient induire à la baisse. La logique économique devrait
prévaloir sur la logique géopolitique dans le choix des
tronçons jugés prioritaires.
4. Adopter des mesures destinées à promouvoir le
commerce intra-régional et la compétitivité de leurs
produits resteront sans effet si les pays de l'UEMOA ne se dotent pas du cadre
fondamental qu'exige tout programme d'expansion du commerce. Deux
éléments sont indispensables dans l'optique d'un tel cadre ; il
s'agit de la stabilité macro-économique et de la promotion de
l'initiative privée. En outre, la paix et la sécurité
(facteurs potentiels de désintégration de cette
sous-région avec la crise socio politique de la Côte d'Ivoire) ont
un rôle crucial en ce qui concerne la mise en oeuvre des programmes de
libéralisation des échanges commerciaux. Par conséquent,
la paix, la sécurité et la résolution des conflits doivent
mériter une attention de tous les instants afin de créer un
environnement propice pour les activités de la zone et au renforcement
de la confiance des investisseurs pour l'attrait des investissements directs
étrangers.
En somme les résultats de cette étude ont mis en
relief l'importance de la suppression des barrières tarifaires et non
tarifaires, l'adoption du TEC dans la zone UEMOA et de la continuité de
l'application des politiques de réformes. Ceci est un gage pour
l'intensification des échanges et par conséquent pour
l'amélioration des conditions de croissance économique. Dans ces
conditions, l'intégration régionale et d'autres actions à
mener pourront être des initiatives provenant des africains et pour le
bien-être des africains.
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