Le Roman français et l' Avenir de la littérature francophone, face au Manifeste pour une littérature Monde( Télécharger le fichier original )par Mame Diarra DIOP Université Paris IV La Sorbonne - Master 1 de Lettres Modernes Appliquées 2007 |
4. Pour une littérature Monde : l'OuvrageNous l'avions annoncé, le manifeste a donné lieu à un ouvrage collectif. Sous la direction de Michel Le Bris et Jean Rouaud, écrivain, une trentaine d'auteurs choisis, dont Tahar ben Jelloun, Maryse Condé ou Nancy Huston, poursuivent le combat et apportent leur points de vues dans Pour une Littérature Monde, publié chez Gallimard. En voici quelques extraits et le premier, Michel Le Bris s'exprime : « Littérature Monde très simplement pour revenir à une idée plus large, plus forte de la littérature, retrouvant son ambition de dire le monde, de donner un sens à l'existence, d'interroger l'humaine condition, de reconduire chacun au plus secret de lui-même... » Plus loin, Maryse Condé affirme : « J'aime à répéter que je n'écris ni en français, ni en créole, mais en Maryse Condé... » La jeune martiniquaise Fabienne Kanor développe son argumentation en s'amusant avec les mots et les terminologies douteuses : « Suis-je un auteur créolofrancophone qui s'ignore ? Une écrivaine négropolitanophone? Francopériphéricophone ? Négroparigophone ? Francophone ? Où ne suis-je pas plutôt un auteur tout court qui, à l'instar de Maryse Condé, rêve d'une littérature sans épithète mais avec toutes les bâtardises possibles. D'une langue sans origine, ni étiquette, qui ne serait que celle de l'auteur. Des langues originales pour dire les mondes... » Plus élogieux, l'écrivain tchadien Nimrod, s'épanche sur la République des Lettres : « Il est un territoire que j'aime particulièrement en France : il s'appelle la littérature ! Les français savent en faire commerce avec une générosité sans égale. Les salons du livre, les festivals, les prix littéraires les plus grandioses ou les plus farfelus font des belles lettres, un paysage à lui tout seul. C'est dans ce territoire là que je me sens le plus accueilli... » Quant au marocain Tahar Ben Jelloun et prix Goncourt pour La Nuit Sacrée70(*), il porte un jugement sans appel : « La France pense que sa langue est assez forte pour résister toute seule aux assauts de l'anglais ou de l'espagnol. Cette arrogance est de l'ignorance... » L'universitaire et romancier français Grégoire Polet, ajoute avec une certaine inspiration « L' art du roman est à l' aube d' une ambition nouvelle : donner le spectacle du monde entier, dans son perpétuel mouvement présent, un spectacle qui dépasse les capacités de toute science et qui les comprend toutes, qui les rend visibles et les met en rapport dans une fresque sans résumé, et dont le travail d'un romancier, ne saurait constituer qu' un détail, et dont les oeuvres de plusieurs romanciers, mises bout à bout et articulées par les lecteurs, commenceront de représenter l'ampleur et les profondeurs et l'innombrable émerveillement... » Enfin, le congolais Wilfried Nsondé, rencontré à Paris et auteur de Le Coeur des Enfants léopards71(*), conclut : « D'abord, en ce qui concerne la francophonie en tant qu'institution, c'est quelque chose que je connais très mal. Or la polémique entre la littérature Monde et la francophonie se base sur une critique de la francophonie en tant qu'institution, qui tiendrait à créer une différence dangereuse entre français et francophones. Pour ma part, j'ai signé le manifeste parce que mon profil correspond à toutes les catégories de littératures connues : française, africaine, francophone. Il n'y a que dans un concept plus global comme la littérature Monde en langue française que je pouvais me sentir pleinement à l'aise. » * 70 Voir Bibliographie. * 71 Roman,Actes Sud, 2006. |
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