L'impact de l'auto emploi sur le chômage et la pauvreté au Cameroun( Télécharger le fichier original )par Aloys Mahwa Université Catholique d'Afrique Centrale - Maîtrise 2007 |
CONCLUSIONLe taux moyen de survie, bien que faible (27%), ne doit pas inquiéter ni limiter les a priori positifs sur la dynamique d'auto emploi. Le lancement d'une activité (d'une entreprise) est une aventure passionnante, mais très risquée. La combinaison de plusieurs facteurs empêche de cerner le principal déterminant de la pérennité. Selon Papin84(*) le taux moyen d'échec est de 30% dès la première année, 50% pour la période des 2 premières années, 65% après les trois premières années et 75% après les quatre premières années. Toutefois selon, O'Leary85(*), des taux élevés de survie peuvent résulter d'un phénomène d'« écrémage », seuls les meilleurs projets étant acceptés. D'autres facteurs, souvent inattendus, peuvent surgir lorsque l'on veut promouvoir l'auto emploi. Ces aspects ne sont ni de la responsabilité des organisations (FNE), ni celle des promoteurs. De manière générale, des spécialistes86(*) estiment que certains problèmes difficilement mesurables sont susceptibles d'apparaître lorsque l'on promet l'auto- emploi soit par aides publiques soit par des allégements fiscaux. Il y a des effets d'aubaine, de substitution et de déplacement liés à ces mesures d'encouragement. En matière de financement, on parle d'effet d'aubaine, par exemple, lorsqu'une personne qui avait l'intention de travailler comme salarié devient chômeur pendant un certain temps simplement pour bénéficier d'une aide dont elle n'avait pas absolument besoin. Il y a effet de substitution lorsqu'une possibilité d'emploi indépendant est saisie par une personne plutôt que par une autre, simplement parce que la première peut bénéficier d'une aide. Enfin, des effets de déplacement se produisent lorsque de nouvelles affaires exploitées par des indépendants, grâce à des aides, évincent du marché des affaires qui ne bénéficient pas des mêmes aides. Or, ces effets sont très difficiles à mesurer, à moins que la population d'entreprises susceptibles d'être affectées ne soit strictement définie. Un autre problème qui n'est pas proche de notre contexte est la question de « faux indépendants » souligné par le rapport de l'OCDE (2000), ceux qui deviennent indépendants afin d'échapper à la fiscalité. Partant de ce qui précède, le taux de survie des activités créées est un aspect fondamental à considérer. Le taux de survie semble très lié à la rigueur avec laquelle le projet d'entreprise est jugé et les motivations de son promoteur. Les facteurs que nous avons utilisés dans notre modèle ne sont pas les seuls à expliquer la pérennité des activités. Certains facteurs n'ont pas été pris en compte. Ces facteurs relèvent de la macro économie notamment de la fiscalité, de l'inflation, des changements des comportements des consommateurs, des conjonctures (comme la grippe aviaire pour les secteurs Elevage), etc. Ces facteurs justifient également la survie des activités. La plupart des conseillers interrogés attestent que « la pression fiscale est la difficulté que rencontre souvent les promoteurs une fois installés.» Les autres difficultés relèvent de la saturation de marché, la rentabilité de certaines activités a attiré d'autres promoteurs dans le secteur. D'autres encore c'est l'insuffisance de financement de besoin en fonds de roulement. L'interrogation sur la manière dont ces difficultés influencent l'auto emploi constituerait une autre piste de recherche. Cette étude porte sur une population d'activités créées, alors que l'accompagnement comme le traitement des dossiers s'est fait au cas par cas. Les promoteurs, bien que issus de la province du Centre du Cameroun, sont très différents et leurs motivations diffèrent également. La recherche portant sur le taux de survie au cas par cas serait l'idéal, mais cette manière de faire se butterait à la difficulté de rencontrer les promoteurs qui ne sont plus sur le marché, les seuls porteurs des vraies raisons d'abandon du projet ou de cessation d'activité. Une étude sur l'issu des promoteurs qui n'exercent plus leurs activités premières permettrait un meilleur jugement sur l'efficacité de la politique de la promotion d'auto emploi par le FNE. En effet, certains promoteurs peuvent avoir abandonné le projet pour une activité plus rentable ou pour un emploi plus rémunérateur que son activité. Une enquête sur le devenir des travailleurs indépendants, qui ne sont plus sur le marché, est une nouvelle piste de recherche que le taux de survie n'a pas suffisamment rendue compte. Cette étude s'est limitée au cas des promoteurs du Fonds National de l'emploi en cherchant à cerner l'impact de la promotion d'auto emploi sur la pauvreté et le chômage. La détermination du taux de survie (pérennité) et les facteurs qui l'influencent, nous ont permis de proposer des mesures au Fonds National de l'emploi afin d'aider ses promoteurs à maintenir leur statut d'emploi et leur autonomie financière pendant une longue durée. L'insuffisance d'emploi au Cameroun demande beaucoup d'imagination et beaucoup d'initiative. Sans créer des emplois, en effet, il est difficile de réduire le taux de chômage. Sans emploi, il est également difficile de lutter contre la pauvreté. Ce travail a permis de mettre en évidence l'insuffisance de marge de manoeuvre du FNE afin de faire face à sa gigantesque mission de promouvoir l'emploi au Cameroun. Cette insuffisance de marge de manoeuvre retarde le début des activités des promoteurs et partant compromet la pérennité de leurs activités. Une question reste, comment améliorer le faible taux de survie des activités ? Comment allonger la durée de vie des activités afin d'agir efficacement et durablement sur la pauvreté et le chômage? * 84 Papin, R., Stratégie pour la création d'entreprise, création, reprise développement, 5è éd. Paris, Dunod, 1993. * 85 O'Leary, « Promoting self-employment Among the Unemployed in Hungary and Poland », W. E. Upjohn Institute for employment Research, September, polycopié, 1998. * 86 OCDE, « La renaissance partielle de l'emploi indépendant », Perspectives de l'emploi de l'OCDE, Paris, 2000, P.195. |
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