2.3. Le modèle AGLINK de l'OCDE
Nous nous appuierons sur l'étude de Shaw et Love (2001)
pour présenter brièvement le modèle AGLINK de l'OCDE et
analyser les effets de la libéralisation des échanges. Cette
étude analyse les effets de la réduction des barrières
commerciales et des subventions aux exportations sur le marché laitier
mondial.
2.3.1. La structure du modèle
Le modèle AGLINK est un modèle structurel
dynamique de l'offre et de la demande des produits agricoles sur les
marchés mondiaux. Il a été mis au point par le
secrétariat de l'Organisation de Coopération et de
Développement Economique (OCDE) en étroite coopération
avec les pays membres. Il représente l'offre, la demande et les prix
annuels des principales denrées agricoles produites, consommées
et échangées dans les pays membres. La conception globale du
modèle accorde une importance particulière à l'impact
possible des politiques agricoles sur les marchés agricoles à
moyen terme. Elaboré sur la base de littérature économique
agricole, de modèles existants dans les pays membres et
d'échanges bilatéraux, le modèle reflète les vues
des pays membres participants.
AGLINK est un modèle en équilibre partiel qui
estime l'offre, la demande et les prix des produits agricoles (dont le lait et
les produits laitiers) sur les principaux marchés de l'OCDE et de
certains pays non membres. Les secteurs non agricoles ne sont pas
modélisés et sont traités de manière exogène
au modèle. Le modère considère treize (13)
pays/régions (Australie, Canada, Corée, Etats-Unis, Hongrie,
japon, Nouvelle-Zélande, UE, Argentine, Chine et le Reste du monde).
Dans le modèle AGLINK, les relations fonctionnelles qui
lient l'offre et la demande aux prix sont généralement
linéaires dans les logarithmes des variables. Les coefficients de
l'équation sont des élasticités partielles, dont la
plupart proviennent de modèles actuellement utilisés dans les
Etats membres. Certaines élasticités sont le résultat
d'une analyse économétrique établie par le
Secrétariat ou des consultants.
Dans cette étude, AGLINK est utilisé pour
mesurer l'impact des changements des politiques internationales dans
l'industrie laitière mondiale. Le modèle reproduit les
principales caractéristiques des industries et des échanges
mondiaux des produits laitiers. Les politiques de soutien domestique et
les politiques commerciales sont inclues dans le modèle. Le
modèle inclut le système d'intervention de l'UE au niveau des
stocks de beurre et de la PLE aussi bien que le système de soutien des
prix du fromage, du beurre et de la PLE des USA.
2.3.2. Les scénarios de
libéralisation
Deux scénarios sont simulés par le modèle
pour estimer les effets de la libéralisation des échanges
mondiaux des produits laitiers. Les résultats de ces deux
scénarios sont ensuite comparés aux données de
l'année de base 1999. Dans ces scénarios, l'on suppose que les
politiques domestiques sont maintenues fixes à leurs niveaux de 1999.
- scénario 1 : Augmentation de
l'accès au marché : il simule l'impact d'une
augmentation multilatérale de l'accès aux marchés laitiers
mondiaux. Cela se fait en doublant multilatéralement tous les TRQs et en
diminuant de moitié les tarifs douaniers (in-quota et over-quota) de
leur valeur de 1999 pour le fromage, le beurre et les poudres de lait.
- scénario 2 : Réduction des
exportations subventionnées : il simule les impacts de la
réduction du volume des exportations subventionnées de l'UE et
des USA. Pour ce faire, on diminue de moitié le volume maximal des
produits laitiers subventionnés (suite aux accords AAUR pour
l'année 1998-99).
Dans les deux scénarios, le modèle
détermine simultanément les importations, le volume des
exportations subventionnées et les stocks détenus par le
gouvernement et les privés. Les résultats sont analysés
après un (1) an et après trois (3) ans.
2.3.3. Les résultats et analyses des impacts de
la libéralisation
§ Augmentation de l'accès au
marché : résultas et analyses
L'augmentation de l'accès au marché engendre,
après une année, l'augmentation des prix mondiaux du fromage, du
beurre et des poudres de lait de 16 à 29% par rapport à la base.
Nous pouvons expliquer cela par le fait que une année après la
libéralisation, l'offre de lait varie très peu parce que
l'expansion des troupeaux est limitée par les contraintes
biologiques ; l'offre de lait est donc inélastique à court
terme. Cependant, les prix mondiaux des produits laitiers augmentent à
cause de l'accroissement de la demande de ces produits laitiers. Cet
accroissement de la demande est plus important que le volume
échangé. La valeur des échanges augmente (fromage (39%),
de beurre (37%), de PLE (25%) et de la poudre de lait entier (14%) mondiales).
(Voir tableau 5-1 Annexe 5)
Cependant, trois années après les prix sont
toujours élevés mais avec 12 à 19% d'augmentation. En
effet, les producteurs réagissent à l'augmentation à leurs
profits (dû à la hausse initiale des prix) par l'accroissement de
la production de lait (c'est la réponse de l'offre); ce qui va
modérer la hausse initiale des prix et augmenter ainsi la consommation.
Cela a aussi pour effet d'encourager l'expansion des échanges
commerciaux. La valeur des échanges des produits diminue comparée
à la valeur précédente.
L'on comprend mieux ces résultats en examinant les
résultats pour l'UE (fortement protégée par les TRQs et
tarifs douaniers). Sur le marché laitier européen,
l'accroissement des TRQs signifie que les consommateurs peuvent avoir
accès à des grandes quantités importées ;
donc, la réduction des tarifs douaniers signifie que ces importations
sont à un prix moins élevé qu'auparavant. C'est ainsi que,
par exemple, les importations de fromage de l'UE augmentent de 67%, la
consommation de fromage produit à l'intérieur baisse de 1%. En
effet, les marchés européens des produits laitiers sont fortement
protégés ; une augmentation de l'accès à ces
marchés est très bénéfique aux consommateurs
(à l'absence de variation de revenu, de goût ou des prix des
produits substituts aux produits laitiers).
En outre, l'effet de l'augmentation de l'accès au
marché sur les producteurs de l'UE est la baisse du prix moyen de lait
à la ferme de 1,5% la première année. Notons que
l'augmentation des importations dans les pays dont les marchés laitiers
sont fortement protégés est relativement petite par rapport
à la taille totale de ces marchés ; par conséquent,
la baisse des prix des produits laitiers sur les marchés domestiques est
très petite comparée à la hausse des prix correspondant
sur le marché mondial.
Tous les pays exportateurs (marchés fortement
protégés ou non) de produits laitiers font face à une
demande d'exportation plus élevée. Les exportateurs de l'EU
bénéficient de l'accroissement en volume et en valeur des
échanges des produits laitiers. Dans les pays exportateurs dont les
marchés sont faiblement protégés ou non
protégés, tel que la Nouvelle-Zélande, les prix
domestiques élevés réduisent la consommation ; la
production est exportée sur le marché mondial.
§ Réduction des exportations
subventionnées : résultats et analyse
La baisse des volumes d'exportations subventionnés de
l'EU et des Etats-Unis entraîne la réduction des quantités
exportées de ces deux régions sur le marché mondial. Ce
qui a pour effet la réduction de l'offre mondiale des produits
laitiers (de 6% pour le fromage, 11% pour le beurre, 8% pour la PLE et 14% pour
la poudre grasse) ; la conséquence est l'augmentation des prix
(poudre grasse (32%), PLE (27%), fromage (16%), beurre (14%) et la
réduction de la consommation sur la plupart des marchés. Comme
précédemment, à long terme, les producteurs vont
accroître leur production qui aura pour effet de réduire
l'accroissement initial de prix. (Voir tableau 5-2 Annexe 5)
Bien que les exportations subventionnées baissent, l'UE
et les USA bénéficient des prix mondiaux élevés sur
leurs exportations non subventionnés. Au niveau du producteur, les prix
de lait à la ferme de lait baissent de 6% dans l'Union
européenne. Comme dans la simulation précédente, quand les
prix mondiaux de produits laitiers augmentent la consommation baisse sur la
plupart des marchés. Avec des prix mondiaux élevés, les
importations des pays importateurs baissent tandis que les exportations des
pays exportateurs augmentent.
|