L'Union européenne et Chypre: autopsie d'un succès inachevé( Télécharger le fichier original )par Meriem JAMMALI Université Paris IV Sorbonne - Master Enjeux, conflits, systèmes internatinaux à l'époque moderne et contemporaine 2006 |
II. L'axe Athènes/ Londres1. Le rôle de la Grèce dans l'accélération du processus d'adhésion chyprioteDepuis 1974, l'opinion publique et les politiciens grecs de toute tendance se sont réunis autour d'une même évidence: la Turquie est un ennemi principal responsable de l'occupation de la partie Nord de Chypre161(*), une île considérée grecque162(*). Cependant, la Grèce n'a pas oublié la force de la Turquie grâce aux armements américains. C'est pour cette raison qu'elle a préféré éviter une diplomatie directe en internationalisant le problème surtout après l'intervention dans l'affaire de Macédoine. La classe politique et l'opinion publique grecques ont fait pression pour obtenir un changement de nom de la République ex yougoslave. Elle a préféré faire appel aux Nations unies en premier temps et puis depuis son adhésion elle a toujours sollicité l'aide européenne. En novembre 1974, la Grèce informe Bruxelles de son intention de demander son adhésion et la présente officiellement le 12 juin 1975. Quatre ans après la, le traité d'adhésion de la Grèce est signé à Athènes (28 mai 1979). Il entre en vigueur le 1er janvier 1981. Depuis cette date, la Grèce devient un Etat membre parfois tumultueux163(*). Malgré son rapprochement constant vers ses partenaires européens, elle n'a jamais cessé d'utiliser Bruxelles comme moyen de pression sur Ankara. L'influence qu'a exercé la Grèce au sein de la Communauté européenne n'aurait jamais porté ses fruits en restant à la marge de la CEE. La règle du vote à l'unanimité a un effet de levier dans la mise en place de l'embargo contre l'accord d'association signé en 1963 entre la Communauté et la Turquie. L'année 1995 a été décisive dans l'accélération du processus de négociation avec Chypre. La Grèce n'est pas étrangère à cette politique. Elle se lance dans une course sans merci afin de favoriser l'adhésion de chypre et elle a eu recours à maintes reprises à des pressions afin que l'UE accepte Chypre en son sein. Andréas Papandérou164(*) joue un rôle très actif dans l'avancement du processus de négociation. Il menace d'utiliser son droit de veto sur la finalisation de l'Union douanière entre la Turquie et l'UE lorsque la coalition gouvernementale dirigée par Tansu Ciller a multiplié les efforts en vue de la conclusion de l'union douanière entre l'UE et la Turquie165(*). La Grèce profitant des difficultés de l'Union européenne à définir ses intérêts en politique étrangère, règle d'unanimité obligeant, arrive à imposer à l'UE un changement de stratégie dans le dossier chypriote166(*). Dans cette logique, les gouvernements grec et Chypriote grec signent le 18 mars un « accord de défense commune », suivi par la signature le 16 mars 1996 d'un « accord de coopération économique » afin de préserver l'espace hellénique de toute menace turque et imposer leur stratégie à l'Union européenne167(*). Pour contourner l'intransigeance grecque, l'UE sous la présidence française en mars 1995 négocie un deal avec les ambassadeurs grec et turc à Paris : L'UE accorde 500 millions d'écu d'aide au textile grec en échange de son droit de veto, en contrepartie, l'UE supprime la condition de règlement préalable à toute adhésion. De plus, pour manifester son mécontentement de la présence armée turque à Chypre, la Grèce a préparé sa menace de veto contre la Turquie pour empêcher légalement les paiements dus à la Turquie depuis 1983 et d'alléger les paiements des fonds de la MEDA. De ce fait, la Grèce obtient la décision d'inclure Chypre dans le nouveau processus d'élargissement168(*). Par la suite, c'est le veto contre l'élargissement vers les pays de l'est qui a servi de catalyseur afin d'assurer la poursuite des négociations avec la république de Chypre. Ainsi, l'Agenda 2000 de l'UE officialise l'adhésion de Chypre sans condition préalable à une solution à la division de l'île169(*). Cependant, pour montrer qu'un règlement est préférable avant son adhésion, les membres instaurent un système de représentation afin de mener des négociations entre les deux communautés et juge que son action envers le problème en question doit être plus active avec la collaboration du secrétaire général des Nations unies. Chypre est par conséquent, le prix pour la Grèce pour qu'elle n'oppose pas son veto. * 161 DREVET (J.F), op. cit., p.302. * 162 Cyprus : The Need For New perspective p. 152 * 163 DREVET (J.F), op .cit. , p. 252. * 164 Professeur d'économie et plusieurs fois ministre, est le chef de l'opposition socialiste au Parlement depuis 1974. Chef du PASOK (parti socialiste panhellénique), il devient Premier ministre après la victoire de son parti en 1981 et se maintient au pouvoir jusqu'en 1989. La victoire du PASOK aux élections législatives de 1993 entraîne le retour aux affaires de son dirigeant jusqu'en 1996. * 165KLEBES PLESSIER (A), loc. cit, p. 445. * 166 BREWIN (Ch), «European Union Perspectives on Cyprus Accession», in Middle Eastern Studies, vol.36, n°1, January 2000, pp. 28-29. * 167 BREWIN (Ch), op. cit., p. 243. * 168 Selon les conclusions du Conseil des Ministres du 6 mars 1995: « The council of Ministers, after re-eximing Cyprus'application in line with its earlier decisions and conclusions of the Corfu and Essen European Councils and after examing the report from the EU observer for Cyprus :reaffirms the suitability of Cyprus for accession to the EU and confirms the EU'will to incorporate Cyprus in the next stage of its enlargement,», Se referrer au texte integral de la decision disponible dans The European stand and Cyprus problem, Nicosia, Cyprus 2003, p. 75. * 169Dans sa Résolution du 4 octobre, le Parlment européen decide que « Wheras Cyprus can consequenttly expect to join the Union at an early stage and wheras any objection to its accession on account of the particular circumstances existing on the Island would be both politically and morally untenable,», Résouliton intégrale in The european stand on the Cyprus Problem, p. 127. |
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