I.2. Pauvreté
I.2.2. Concept de pauvreté
La pauvreté, selon Sen, « est un monde complexe,
multiforme, qui exige une analyse précise de toutes ses
nombreuses dimensions car les êtres humains sont
extrêmement divers. »16
Cette conception se retrouve aussi chez Kalonji Ntalaja
« La pauvreté est un phénomène complexe. Il
change selon les circonstances des lieux et des temps, et a l'état
actuel de la recherche, il n'existe ni concept universel, ni théorie
cohérente de pauvreté. Un vide relatif est aussi manifeste au
niveau de méthodes d'analyse de ce phénomène.
»17
La revue littérature sur le concept de
pauvreté est extrêmement abondante et
caractérisée par un niveau d'ambiguïté
très élevé dans son rapport a la théorie
économique. Elle fournit plusieurs façons de définir
la pauvreté, qui conduisent évidemment a une identification
différente des pauvres.
Ainsi, nous avons identifié trois écoles qui
appréhendent le concept de pauvreté.
a) Selon l'école welfarist
Le concept de pauvreté tire ses origines dans la
théorie microéconomique moderne
et découle de l'hypothèse de base que les
individus maximisent leur bien- être. Pour eux, Le bien-être
est un sentiment procuré par la satisfaction d'un besoin ;
cette satisfaction peut être procurée par des biens et services
marchands ou par des biens non-marchands, comme par exemple les relations
interpersonnels ou la consommation de biens collectifs.
Eu égards a cette définition deux approches
s'opposent et se complètent : l'approche utilitariste et
non-utilitariste.
L'approche utilitariste analyse le bien-être sur base de
l'utilité des biens et services marchands et l'approche
non-utilitariste analyse le bien-etre sur base l'utilité des
biens et services non-marchands.
b) Selon l'école des besoins de base
L'appréhension de la pauvreté se
définit par un petit sous ensemble des biens et services
spécifiquement identifiés et perçus comme rencontrant
les besoins de bases de tous les être humains. Ils sont dits
« de base » car leur satisfaction est considérée
comme un préalable a l'atteinte d'une certaine qualité de vie
». (18)
c) Selon l'école de capacité
(capabilities)
Pour cette école, l'appréhension la
pauvreté ne se fait ni a travers l'utilité et la
satisfaction de besoins mais a travers des habilités ou
capacités humaines. « la valeur de la vie d'une personne
dépend en fait d'un ensemble de facons d'etre (being) et de faire
(doing), qu'il regroupe sous le terme général de fonctionnement
(functionings)» (19). Le principal maître d'oeuvre
de cette école, Amartya Sen a eu
16 Cité par Yemba Poyo B. , La
pauvreté monétaire et alimentaire à Masina : Quartier
sans fil , Mémoire, UNIKIN, 2001-2002.
17 Idem.
18 Louis-Marie Asselin et Anyck Dauphin, Mesure de
la pauvreté : un cadre conceptuel, octobre 2000, Québec-
Canada, pp.20-21.
19Louis-Marie Asselin et Anyck Dauphin, Op.Cit.
, pp.20-21.
une vision plus vaste : développer une nouvelle conception
de ce qui a de la valeur pour l'humain.
En dehors de ces trois écoles, on trouve un
concept chez le professeur KALONJI NTALAJA qui fait ressortir 3
catégories de la pauvreté a savoir, la pauvreté primaire,
secondaire et tertiaire. Pour lui, la pauvreté est un
état de manque intrinsèque ou instrumental de
capacités d'action nécessaires a une existence et/ou une
performance viable20.
· La pauvreté est intrinsèque
lorsqu'elle porte sur les capacités d'actions
nécessaires a la satisfaction des besoins
élémentaire appelés besoins fondamentaux, sans
lesquels une personne physique ( individu ou ménage )
ou morale ( Etat ou Nation ) ne peut mener une
existence viable. Une personne physique ou morale frappée par la
pauvreté intrinsèque << une personne
démunie>>.
· La pauvreté est instrumentale ou
fonctionnelle lorsqu'elle porte sur les capacités
nécessaires a la réalisation d'une performance. La
pauvreté de
performance s'apparente, dans le langage de l'administration des
affaires, a
ce qu'on pourrait appeler <<manque de capacités
managériales>>
nécessaires a la vie de la société.
· La pauvreté primaire est un manque
intrinsèque de capacités d'actions nécessaires a une
existence humaine élémentaire, dont la
responsabilité n'incombe pas a la personne concernée ( Un
handicapé physique, un fou, un vieillard ou un retraité ).
L'existence d'un système de sécurité sociale efficace
permet de palier a cette catégorie de pauvreté.21
· La pauvreté secondaire est un manque
intrinsèque de capacités d'actions nécessaires a la
satisfaction des besoins de base, entre autres l'alimentation,
la santé et l'instruction par une personne physique ou
morale apte.
· La pauvreté tertiaire ou de performance
est un manque ou une carence de capacités d'actions
instrumentales ou fonctionnelles indispensables pour acquérir et
/ ou soutenir certaines performances, nécessaires a un fonctionnement
viable.
Pauvreté absolue et pauvreté relative, quid
?
Pauvreté absolue : issue de l'approche
utilitariste, elle constitue une privation des besoins humains
fondamentaux, soit une condition de survie jugée particulièrement
rigoureuse par la communauté internationale. Le principe
général est le suivant : une norme de consommation fixe les
besoins
fondamentaux d'une société donnée a une
époque donnée (il s'agit donc plus d'un concept
« absolu sociohistorique» que d'un concept purement
absolu qui serait pertinent pour tous les pays a toutes les
époques et dont il est facile de percevoir le caractère
totalement irréaliste). Sont considérés comme pauvres les
ménages - les personnes
- qui ne peuvent s'assurer ce niveau de consommation en biens
« fondamentaux », aux prix les plus bas du marché,
indépendamment du niveau de vie des couches de
la société plus fortunées.22
20 Cité par Yemba Poyo B. , Op.Cit
21 Idem.
22Daniel Verger et al, Bas revenus, consommation
restreinte ou faible bien-être: Les approches statistiques de
pauvreté à l'épreuve des comparaisons internationales,
Document de travail, INSEE, Paris, Avril 2005, p.7
Pauvreté relative : La pauvreté est
envisagée comme une forme d'inégalité : sont pauvres
les personnes ou les familles dont le niveau de vie est très
inférieur a celui
de la majorité de la population, qui ont
un niveau de vie inférieur à un certain
seuil, a un certain pourcentage du niveau de vie réputé
« normal ».23
Cette conception permet des comparaisons internationales.
IL existe d'autres approches pour l'appréhension du
concept de pauvreté dont notamment :
1. La pauvreté monétaire :
Dans cette approche on prend en compte le faible niveau du
revenu monétaire comme indicateur central pour définir la
pauvreté par l'insuffisance des ressources.
2. Approches par la consommation
Devant les limites des approches par le revenu, d'aucuns
préconisent d'aborder la pauvreté a partir de la
consommation, ce qui peut sembler fournir une alternative
séduisante. On peut y trouver en effet divers avantages
conceptuels : c'est la consommation plus que le revenu qui est source
directe d'utilité ; faute de mesurer des différentiels de
prix, la quantité consommée serait plus informative que
la capacité a dépenser ; de plus la consommation est plus «
lisse » que les revenus, moins sensible aux aléas
conjoncturels que le revenu lui-même, grâce au
comportement actif sur le marché de l'endettement et de l'épargne
d'un consommateur qui cherche a maintenir un profil le plus constant
possible de la consommation. Ces atouts conceptuels seraient doublés
d'avantages sur le plan de
la mesure, la consommation étant a priori moins «
tabou » que le revenu, donc mieux déclarée.
3. Approche dite « subjective » :
La dénomination de « pauvreté subjective » se retrouve
dans la tradition de la littérature internationale sur le sujet
élaboré dans la lignée de l'école de Leyden .
Cette approche appréhende la pauvreté a travers les «
difficultés a équilibrer son budget » c'est a dire est
pauvre celui qui n'arrive pas à boucler ses fins de mois
avec le revenu dont il dispose.
Dans le cadre de ce travail, nous allons adapté
l'approche par le revenu ou la consommation.
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