Source : Réalisés par nous. SECTION 2 :
Interprétation des résultats
Dans cette partie, nous analyserons les différents
résultats, puis dégagerons les implications qui en
découlent. Ensuite nous tenterons d'expliquer les principales remarques,
en nous basant sur les réalités de la Poste.
Sur toute la période de notre étude, le
résultat net de la Poste est resté négatif.
La décomposition de ce résultat en ses
différents sous-comptes ( exploitation, financier et exceptionnel )
montre bien l'origine de ces grands déficits. Le compte de
résultat exceptionnel est excédentaire sur la période
d'étude, ce qui signifie que durant cette période, les
opérations hors activités ordinaires ont influencé
positivement les résultats de la Poste. Il en est de même pour les
opérations financières. Le résultat financier est
excédentaire partout sauf en 2000 où ce résultat a connu
un déficit énorme de l'ordre du milliard. Cette situation
particulière a été provoquée par la perte de change
enregistrée au niveau des immobilisations financières, perte due
à la dévaluation du franc CFA en 1994. Cette perte
financière a eu une forte répercussion sur le résultat
net de l'exercice 2000.
Le déficit global de la Poste n `est donc pas
imputable aux opérations financières ni aux opérations
hors activités ordinaires. Il est plutôt dû à
l'exploitation même de l'entreprise. Ce déficit relativement
faible les deux premières années, s'est accentué les deux
années suivantes, dépassant même le milliard. Ce
déficit provient du résultat brut d'exploitation qui était
déjà négatif. Si le résultat brut d'exploitation
est déficitaire, c'est soit parce que les consommations
intermédiaires sont élevées par rapport au chiffre
d'affaires réalisé, et /ou soit parce que les charges salariales
sont élevées par rapport à la valeur ajoutée
dégagée. Les consommations intermédiaires ont certes
connu sensiblement une croissance au cours de la période, mais elles
sont restées généralement inférieures à
quarante pour cent du chiffre d'affaires ( CI < 40 % CA ). Ce taux n'est
quand-même pas élevé lorsqu'on sait qu'on ne peut produire
sans consommer. Par contre, les charges salariales sont vraiment
élevées par rapport à la valeur ajoutée, comme le
montre le ratio ( charges salariales / valeur ajoutée ). Ce ratio
croissant sur toute la période indique la supériorité
nette des charges salariales sur la valeur ajoutée.
Cela signifie que l'effectif du personnel de la Poste est
pléthorique ou qu'elle adopte une politique de
rémunération élevée. De toutes les façons,
ce ratio prouve que la richesse créée par la Poste ne suffit
même pas à couvrir les seules charges salariales. Une entreprise
privée ne bénéficiant pas de subvention déposerait
son bilan dans de pareilles circonstances. La richesse créée par
la Poste ne peut rémunérer ni le capital physique, ni les fonds
de tiers, ni le capital à risque.
La marge brute sur chiffre d'affaires est négative sur
la période de notre étude. Ce qui confirme la contre performance
commerciale réalisée par la Poste, contre performance liée
à sa structure d'exploitation et qui risque suite à sa
séparation des Télécommunications de mettre l'entreprise
en péril. La Poste est désormais appelée à
évoluer sans la contribution des Télécommunications qui
financent jusqu'ici son déficit d'exploitation. Pour survivre elle devra
équilibrée ses charges d'exploitation par son activité
productive. Elle doit assurer en un mot son équilibre de gestion.
Le ratio dotation aux amortissements sur valeur ajoutée
est généralement inférieur à 30 % sur la
période. La politique de rémunération du capital physique
n'influence donc pas considérablement le résultat. Contrairement
aux Télécommunications, la Poste n'investi pas beaucoup dans le
capital physique.
En définitive, les charges salariales expliquent
beaucoup plus l'origine du déficit du résultat net de la Poste.
Le déséquilibre entre la production et les
charges salariales est plus remarquable lorsque nous considérons les
bureaux situés dans les zones rurales ou petites agglomérations.
Les ratios étudiés à ce niveau indiquent qu'en
général les bureaux de petites agglomérations
réalisent des recettes très faibles voire négligeables,
nettement inférieures aux charges salariales de leurs personnels. Cette
analyse basée seulement sur l'exercice 2003 montre que la contribution
de ces bureaux à la recette globale de la Poste est pratiquement nulle
tandis que le poids de leurs charges salariales sur les charges globales de la
Poste n'est pas négligeable.
Les bureaux de grandes agglomérations quant à
eux contribuent mieux à la recette globale de la Poste. La Recette
principale de Cotonou par exemple a pu réaliser au cours de
l'année 2003 quinze pour cent de la recette globale de la Poste.
Si l'on devait tenir compte du seul objectif de profit, ces
bureaux de faibles recettes devraient fermer leurs portes. Mais la Poste
poursuit des objectifs qui vont au delà du simple profit. En ce sens
elle constitue un véritable instrument de répartition des
ressources productives ; elle exerce des effets d'entraînement sur
plusieurs secteurs de l'économie nationale. A travers la couverture
territoriale la Poste joue un rôle économique, grâce
à ses infrastructures qui contribuent au développement
économique de notre pays. Elle remplit une mission d'ordre
macro-économique, en résorbant le chômage par l'effectif
pléthorique de son personnel. Toutes ces raisons nous amènent
à dire que l'évaluation de la Poste doit objectivement tenir
compte, outre des indicateurs financiers, des indicateurs économiques et
sociaux.
Le critère de performance économique peut bien
rendre compte des objectifs d'intérêt général
poursuivis par la Poste, car l'idée de "performance" économique
comme critère d'évaluation consiste justement à
vérifier le degré de réalisation des objectifs de
développement économique et social (Hirshihorn et Kaell 1988).
Lorsqu'une entreprise poursuit de tels objectifs, il est sous-entendu que sa
performance ne peut s'apprécier sur la seule base de l'efficacité
relative à l'activité productive. Cette dernière n'est
qu'un critère d'appréciation parmi tant d'autres. Une performance
technique ou financière qui aboutirait à aggraver la
disparité des revenus n'est guère justifiée du point de
vue de l'intérêt général. Inversement une
activité moins performante (techniquement ou financièrement)
comme celle de la Poste, qui a pour but de désenclaver une région
pauvre (Zones rurales) et de lui donner une grande chance de participer
à la croissance du pays, peut être justifiée dès
lors que ses chances de réussite sont nombreuses.
Mais la mesure de performance basée sur le
critère de rentabilité économique n'est pas toujours
facile à mettre en oeuvre dans la pratique. Plusieurs méthodes
ont été développées pour évaluer un projet
(exante ou expost) en tenant compte de son impact sur l'économie
nationale (Bridier et Michailof 1987). Malheureusement la plupart de ces
méthodes présentent beaucoup d'inconvénients. Les outils
qu'elles proposent sont d'un emploi délicat et exigent des informations
rarement disponibles dans les pays en développement.
Compte tenu de toutes ces difficultés, la
méthode des comptes de surplus (CERC 1980) présente des
avantages, elle présente un grand intérêt dans
l'évaluation de l'entreprise publique où un des objectifs est de
satisfaire l'intérêt général. Elle s'appuie sur les
comptes de résultats qui sont moins difficilement accessibles.
Elle fournit une vision globale de l'entreprise en tant
qu'unité de création et de distribution de richesses. Elle montre
d'une part comment l'entreprise utilise les facteurs de production pour
maximiser la production. Elle explique d'autre part comment s'organise
l'activité de répartition entre tous les fournisseurs des
facteurs de production et comment cette production évolue dans le temps.
Elle fait ainsi apparaître la part qui revient à chacun dans
l'amélioration réalisée en commun et facilite le partage
des fruits de la croissance entre les divers partenaires sociaux.
C'est pourquoi nous avons choisi de l'appliquer au cas de la
Poste en complément des ratios déjà
étudiés.
Les résultats issus de l'application de cette
méthode seront présenté en annexe :
Notre interprétation portera essentiellement sur les
deux derniers tableaux des comptes de surplus : Tableau de variation du
surplus de productivité ( 1) et tableau de variation de la
répartition du surplus (2).
Tous les résultats correspondent à des moyennes
sur la période d'analyse.
Sur le tableau (1) nous constatons que la poste a
dégagé un surplus de productivité sur toute la
période sauf au cours de la période 2001-2002 ou elle a connu une
perte de productivité.
Au cours des deux (02) périodes 2000-2001et 2002-2003
les gains de productivité réalisés par la poste
proviennent d'une variation positive de la production suivie d'une variation
négative des facteurs de production.
La perte de productivité est due au fait que la baisse
de la production a été suivie d'une augmentation des facteurs
de production.
Sur le tableau (2) la répartition des avantages
réels montre que ce sont le personnel et l'Etat qui sont les grands
bénéficiaires des avantages dégagés alors que les
fournisseurs de fret et voyage n'ont bénéficié de ces
avantages que dans la période de 2001-2002.
Du côté des clients, on constate que les usagers
des affranchissements et ceux des autres services, sont les grands
bénéficiaires des avantages dégagés, contrairement
aux usagers de colis postaux,EMS DISFLASH, mandats et chèques postaux.
On retient de cette analyse que les plus grands
bénéficiaires des avantages réels de la poste sont le
personnel et les usagers des affranchissements ce qui confirme le
caractère social du service postal qui est un service public.
Nous devons reconnaître que la baisse de production
constatée est sous l'influence de nombreux facteurs dont certains
échappent totalement au contrôle de la Poste. Parmi ces facteurs,
nous relevons les variables exogènes suivantes :
- les fluctuations monétaires comme la
dévaluation du francs CFA ;
- l'appartenance de la Poste béninoise à la
chaîne internationale de la Poste. Ce qui fait que si l'un des maillons
de cette chaîne est en panne, il influence négativement les
autres maillons quelle que soit leur performance.
- La vulgarisation de l'Internet à travers la
prolifération des cybers centres
A côté des facteurs externes, plusieurs variables
internes peuvent également expliquer la baisse de la production postale.
Nous citerons ici quelques causes les plus visibles à savoir :
- la vétusté des infrastructures et des
équipements. Cette détérioration a contribué
largement à la limitation de l'offre des services postaux, ce qui a
permis aux concurrents de la Poste de percer le marché ;
- des mauvaises conditions d'exploitation : le manque de
rapidité dans l'acheminement des courriers, les pertes et spoliations
des objets d'envoies ;
- l'absence d'autonomie de gestion caractérisée
par les interventions persistantes du gouvernement sur la gestion courante de
la Poste. La Poste est sollicitée à accomplir une mission de
service public sans que les moyens nécessaires lui soient fournis
(obligation d'appliquer des tarifs bas, peu ou pas de subvention en
équipement, etc.).
Ces deux derniers facteurs cités caractérisent
le management de la Poste. Tous les problèmes évoqués sont
résumés dans la figure suivante :
Perte de productivité globale des
facteurs
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