INTRODUCTION GENERALE
S'il est une donnée qui échappe en très
grande partie à l'emprise de l'homme, c'est le temps ; il constitue
un allié peu sûr. Le temps, selon Henri MENDRAS, peut être
conçu comme un cycle qui se renouvelle constamment, ou une ligne, sans
début et sans fin, le long de laquelle se rangent les
évènements.1(*) L'homme, par son intelligence, a fait des
découvertes et inventions dans plusieurs domaines de la vie. Il a
maîtrisé l'espace, la communication, la vitesse, etc. Mais du
temps, il n'a mis au point que des méthodes et techniques de sa mesure,
sans jamais le perturber, encore moins le modifier. Il passe, il court,
toujours trop vite quand on en a besoin, souvent trop lentement quand on veut
aller vite. La durée perçue par nous se déforme ainsi sous
l'influence de nos émotions. Dans tous les cas, on ne peut faire
certaines choses qu'à un moment donné ou au cours d'une
période dont il faut connaître les termes. On parle alors des
délais. Cet impondérable préside aux relations entre tout
justiciable. Il travaille aussi les relations entre le citoyen,
l'administration et la justice. Le justiciable qui a des prétentions
contre l'administration ne peut faire valoir ses droits que dans des
délais bien précis. Car si l'administration est désormais
limitée dans sa puissance2(*), l'administré a des obligations à
respecter, des procédures à suivre pour obtenir réparation
en cas de comportements fautifs de l'administration.
Avant de donner une définition juridique du
délai et du recours pour excès de pouvoir, essayons d'analyser le
contour historique de cette dernière notion.
Au-delà de la séparation des pouvoirs, garantie
fondamentale des libertés individuelles, l'institution du recours pour
excès de pouvoir semble, pour le citoyen, le symbole même de cette
limitation. C'est « la plus merveilleuse création des juristes,
l'arme la plus efficace, la plus économique, la plus pratique
qui existe au monde pour défendre les libertés
»3(*),
écrit Gaston GEZE.
Le recours pour excès de pouvoir qui protège les
libertés, participe ainsi à la réalisation d'un Etat de
droit. La notion de l'Etat de droit est définie par les professeurs
Olivier DUHAMEL et Yves MENY comme « processus, (...) de soumission de
l'Etat au droit, d'assujettissement du rapport de contrainte au rapport de
contrat, d'échange du procès contre la violence, bref la
dissolution de l'Etat-puissance. La dissolution de l'Etat-puissance qui suppose
elle-même, deux conditions récurrentes : la séparation des
pouvoirs et l'institutionnalisation des droits de l'homme »4(*).
L'Ordonnance N° 21/PR du 26 avril 19665(*), portant composition,
organisation, fonctionnement et attributions de la Cour Suprême au
Bénin, remise en vigueur par la loi N° 90-012 du 1er
juin 1990, attribue la compétence à ladite Cour, pour statuer sur
« les recours en annulation pour excès de pouvoir des
décisions des autorités administratives » (Art
31-1).
L'histoire du recours pour excès de pouvoir est
liée, en France, à la longue gestation du Conseil d'Etat
créé par la loi du 21 mai 18726(*).
La révolution française a adopté deux
textes fondamentaux, dont la loi des 16-24 Août 1790 et le décret
du 16 fructidor an III, interdisant aux juridictions judiciaires de «
troubler, de quelque manière que ce soit, les opérations des
corps administratifs », et de « connaître des
actes d'administration de quelque espèce qu'ils soient »
7(*).
L'administré dont les intérêts étaient
lésés par l'action administrative, avait le choix entre se
résigner et se tourner devant les autorités auteurs de ces griefs
pour solliciter réparation. Par la suite, la Révolution a
adopté la loi des 6-7 et 11 septembre 1790, donnant compétence
aux autorités administratives pour trancher la majeure partie du
contentieux administratif8(*). Mais quelle pouvait être l'efficacité
d'un tel recours, lorsque les autorités administratives, appelées
à trancher, sont en même temps juges et parties, si ce
n'était l'éventuelle intervention du Chef de l'Etat,
supérieur hiérarchique de tout l'appareil administratif ?
C'était la période de la justice retenue où les droits de
l'administré n'étaient guère protégés.
A partir de l'an VIII (1799), le Chef de l'Etat fait
préparer les solutions par un « conseil juridique
» : le Conseil d'Etat est ainsi créé. Ses projets,
préparés par la commission du contentieux
créée en 18069(*), sont presque toujours suivis par le Chef de l'Etat.
Cependant, le Conseil d'Etat est toujours lié à l'administration,
puisque les litiges devaient être d'abord portés devant le
ministre dont la décision pouvait être contestée en appel
devant le Conseil d'Etat : on parle alors de la justice
déléguée. Ce n'est qu'en 1892 que le Conseil d'Etat a
acquis son indépendance totale par l'arrêt Cadot, dont le
commissaire du gouvernement Jagerschmidt dégageait la doctrine :
« partout où il existe une autorité administrative ayant
un pouvoir de décision propre, pouvant prendre des décisions
administratives exécutoires, un débat peut naître et le
Conseil d'Etat peut être directement saisi »10(*).
Du fait de la colonisation française11(*), et par la technique de la
spécialité législative, le recours pour excès de
pouvoir est rendu applicable au Dahomey, devenu plus tard République du
Bénin. En effet, ce sont les lois 61/41 et 61/42 du 18 octobre 1961 qui
ont créé le tribunal administratif et la Cour Suprême du
jeune Etat (Dahomey) indépendant12(*).
Comme dans toute procédure juridictionnelle dont
l'action est, sous peine d'irrecevabilité, cantonnée dans un
intervalle de temps bien déterminé13(*), le contentieux de
l'excès de pouvoir est soumis à des délais très
précis.
La procédure connaît ici deux grands "moments".
Le recours devant l'administration elle-même. Il précède la
saisine du juge. Ces deux "moments" sont soumis chacun à des
délais.
L'étude portant sur les délais dans le
contentieux de l'excès de pouvoir au Bénin nous conduira, dans
cette introduction à définir les notions de recours pour
excès de pouvoir et de délai. Ensuite nous délimiterons
l'aire géographique de notre sujet, l'intérêt de la
présente étude, la problématique suivie de
l'hypothèse, et enfin le plan.
Conformément à l'article 31-1 de l'Ordonnance
21/PR, les « décisions des autorités
administratives sont susceptibles de recours pour excès de pouvoir
» devant la Chambre Administrative de la Cour Suprême.
Le professeur Georges DUPUIS définit le recours pour
excès de pouvoir comme « un recours contentieux par lequel
toute personne intéressée peut demander au juge administratif
d'annuler, en raison de son irrégularité, une décision
d'une autorité administrative »14(*).
Dans sa décision N°24/CA du 24 octobre 1997, le
juge administratif béninois formule la définition suivante : le
recours pour excès de pouvoir est « un recours juridictionnel
ouvert même sans texte contre tout acte administratif, qu'il a pour effet
d'assurer le respect du bloc de légalité sans lequel il ne
saurait y avoir d'Etat de droit »15(*). Le «respect du bloc de
légalité», comprend deux types de contentieux, qui
dépendent de la nature de la question posée au juge : il y a
d'une part le plein contentieux et d'autre part le contentieux de l'annulation.
Lorsque le juge est saisi afin de prononcer les sanctions
pécuniaires contre une personne morale de droit public, ou lorsque le
requérant demande la reconnaissance d'un droit subjectif, nous sommes en
présence du plein contentieux. Ici, le procès est dirigé
contre une personne, et il s'agit du droit subjectif. Dans ce contentieux,
l'administré demande la réparation du préjudice à
lui causé par ladite personne publique.
Par contre, si le juge est saisi d'une question qui porte sur
la violation ou la méconnaissance du droit objectif par
l'administration, c'est-à-dire la norme juridique, nous sommes en
présence du recours pour excès de pouvoir. Dans ce contentieux,
le juge confronte l'acte administratif dont il est saisi à la
règle de droit positif. Il s'agit du recours objectif : Une
«façon d'exprimer qu'il donne une réponse à une
question de droit objectif »16(*). C'est le contentieux qui nous importe dans le cadre
de cette étude.
Le recours administratif préalable à la
requête contentieuse 17(*), nous permet de retenir que le recours pour
excès de pouvoir est une contestation devant le juge administratif,
à la suite de la persistance d'un désaccord entre le justiciable
et l'Autorité Administrative, sur une décision qu'elle a prise ou
qu'elle refuse de prendre. C'est donc le moyen ainsi mis à la
disposition du requérant par le législateur, pour demander au
juge administratif de sanctionner, c'est-à-dire d'annuler une
décision (explicite ou implicite) d'une Autorité Administrative,
si celle-ci est irrégulière.
Le recours pour excès de pouvoir a été
longtemps considéré comme le recours de
légalité, expression qui peut réduire le champ
des règles que l'acte administratif doit respecter aux seules lois
stricto sensu.
Or, en utilisant l'expression « bloc de
légalité », le juge béninois englobe ainsi
toutes les normes en vigueur au Bénin. Ce qui signifie que
l'autorité administrative est obligée de se conformer aux
différents éléments de l'ordre juridique lorsqu'il veut
édicter sa décision. L'acte administratif doit être non
seulement conforme, dans la hiérarchie des normes, à la
constitution, aux accords internationaux, aux lois, aux principes
généraux du droit mais également aux règlements
édictés par l'administration elle-même. Dans la mesure
où il consiste à épurer l'édifice juridique d'un
acte administratif irrégulier, le recours pour excès de pouvoir
est qualifié par le professeur René CHAPUS
d'« un recours d'utilité publique »18(*).
Toutefois, le contrôle de constitutionnalité des
lois au Bénin, relève de la compétence de la Cour
Constitutionnelle, qui est également juge du contentieux des
élections présidentielles et législatives, ainsi que juge
de la violation des droits de l'homme.
Dans la procédure administrative contentieuse, ce
recours est soumis à une procédure dont les délais
constituent un élément fondamental. La question des délais
pose problème du fait de son essence, de sa définition et surtout
de la complexité parfois grande des méthodes de sa
computation.
Le Dictionnaire Le Petit Robert définit le
délai, soit comme le temps accordé pour faire quelque chose, soit
comme le temps à l'expiration duquel on sera tenu de faire quelque
chose. Gérard CORNU quant à lui le définit comme un laps
de temps fixé par la loi, le juge ou la convention soit pour interdire,
soit pour imposer d'agir avant l'expiration de ce temps.19(*) Le Lexique des termes
juridiques ne fournit aucune définition des délais, mais en
énumère les différents types et leurs effets juridiques.
On a par exemple le délai de grâce, le délai préfix,
le délai franc, le délai non franc, etc.
Ces deux définitions lient la notion de délai au
facteur temps. Le temps, il coule, il passe, parfois plus vite que l'on
voudrait, sans jamais s'arrêter. Mais, surtout, le principal
inconvénient du temps est qu'il ne se rattrape pas. Face donc à
ce temps irréversible et indifférent, qu'il nous faut pourtant
maîtriser, nous devons changer notre attitude à son égard,
selon la formule de Jean-Louis SERVAN-SCHREIBER: «Tout ce qui est
en notre pouvoir c'est de changer notre attitude à son égard,
d'en faire bon ou mauvais usage» 20(*)
Toutes les sciences, et plus particulièrement les
sciences sociales, intègrent le facteur temps dans la plupart de leurs
démarches. Les sciences juridiques en font un paramètre
fondamental de toutes leurs formalités. Le professeur Guillaume PAMBOU
TCHIVOUNDA résume bien l'état des relations qui lient le droit au
temps lorsqu'il considère que « le droit et le temps
entretiennent des rapports intimes faits de complexité ou de
duplicité ».21(*)
Les actes et faits juridiques sont soumis aux délais,
dont juristes, juges et autres professionnels du droit, donnent des sens,
parfois différents. Autour des délais naissent souvent des
débats juridiques passionnants, dont le juge suprême, gardien des
clés et grand prêtre du droit, tranche, en principe
définitivement. Mais il arrive souvent que la solution des juges
déclenche les critiques de la doctrine qui amènent parfois
à un revirement jurisprudentiel.
Dans le contentieux de l'excès de pouvoir, la
délicatesse de la notion du temps est encore accrue par sa
pluralité, car il n'y a pas qu'un seul délai. Il y en a
plusieurs. Il y a d'une part les délais prévus par un texte, et,
d'autre part ceux imposés par le juge, selon une typologie
établie par le professeur Georges DUPUIS.
En ce qui concerne les délais prévus par un
texte, ils peuvent être indicatifs ou impératifs. Selon le
régime attaché à chacun d'eux, ils peuvent être soit
des délais de forclusion, soit des délais de prescription.
Les délais indicatifs sont les délais minimums
fixés à l'administration pour l'accomplissement de certains
actes. Le but ici est d'assurer l'application rapide de la loi.
L'accomplissement de la formalité au-delà de ce délai
n'annule pas l'acte en question. Mais il arrive que le législateur
impose des délais qui revêtent alors un caractère
impératif.
Pour les délais impératifs, il peut s'agir d'une
substitution de compétence ou l'institution d'une garantie pour les
administrés. La première hypothèse est illustrée
d'une part par l'article 110 al.322(*) de la constitution béninoise relatif au budget
de l'Etat, et par l'article 57 al.6 de la même constitution relatif au
refus de promulgation d'une loi votée par l'Assemblée
Nationale23(*) d'autre
part.
En ce qui concerne l'institution d'une garantie pour les
administrés, l'exemple est fourni par l'article 18 al. 4 de la
constitution béninoise qui dispose que : « Nul
ne peut être détenu pendant une durée supérieure
à quarante huit heures que par décision d'un magistrat auquel il
doit être présenté. Ce délai ne peut être
prolongé que dans des cas exceptionnellement prévus par la loi et
qui ne peut excéder une période supérieure à huit
jours ». Selon les conséquences attachées à ces
délais, on peut opposer la forclusion à la prescription.
La forclusion est un moyen d'ordre public éteignant la
faculté d'agir en justice, ne pouvant donc être ni suspendu, ni
interrompu par quelque cause que ce soit et auquel on ne peut renoncer. Il peut
être opposé par l'une des parties au litige et à toute
hauteur de la procédure, si le juge ne l'a pas d'office soulevé.
La forclusion se distingue néanmoins de la prescription.
La définition du délai de prescription est
fournie par l'article 2219 du code civil (français) qui dispose qu'il
s'agit d'un « moyen d'acquérir ou de se libérer par un
certain laps de temps et sous les conditions déterminées par la
loi». Contrairement à la forclusion qui est un moyen d'ordre
public et, de ce fait doit être soulevé d'office par le juge, il
ne peut suppléer d'office le moyen résultant de la prescription
(article 2223 du code civil français). Le pouvoir « normateur
» reconnu au juge s'illustre aussi bien à ce niveau.
Dans une instance contentieuse, le juge (même sans
texte) impose souvent des délais à l'administration. Ils peuvent
être des délais utiles ou des délais raisonnables.
Selon le professeur DUPUIS, le délai utile est la
période minimale permettant à l'intéressé, non
seulement de recevoir communication des griefs retenus à son encontre (
et, éventuellement, de son dossier en cas de procédure
disciplinaire) mais encore de préparer et de faire parvenir à
l'autorité tous les éléments de sa défense sans
oublier le temps nécessaire à l'autorité administrative
pour tenir compte de la réplique développée par son
interlocuteur.24(*) Il est
donc traduit par trois obligations que doit respecter l'administration: c'est
d'abord la période minimale que l'autorité administrative doit
laisser à un administré pour prendre connaissance des griefs qui
lui sont reprochés avant de prendre sa décision; puis le temps
nécessaire pour que celui-ci présente sa défense à
l'autorité compétente et, enfin, le temps que doive observer
l'autorité administrative pour réagir aux développements
de l'administré. La non-observation de l'une quelconque de ces phases
par l'administration entraîne l'irrégularité de l'acte
administratif.
Le juge a élaboré ces délais afin que
soit respectés les droits de la défense dans une instance
contentieuse. Ces délais relèvent plutôt
d'éléments de la défense au fond et non une condition de
recevabilité.
Mais, il peut aussi s'agir d'un temps maximal au-delà
duquel une action ne peut être valablement menée. On parle alors
des délais raisonnables. Ce sont des délais maximaux
d'édiction d'un acte : l'Administration est tenue de ne pas les
dépasser.25(*) Il
s'agit d'un temps maximal au-delà duquel l'autorité ne peut plus
prendre une décision ou, a contrario que la décision prise
après ce temps est inopérante.
L'étude portant sur le contentieux de l'excès de
pouvoir nous renseigne en premier lieu sur la nature du régime
politique. Mais, la seule existence du recours pour excès de pouvoir
n'est pas suffisante pour qualifier la nature du régime. Ainsi, lorsque
le juge n'est ni indépendant ni impartial26(*), ou que la procédure
est d'une complexité confuse, le recours ressemble plutôt à
une fiction juridique. L'exercice du recours pour excès de pouvoir est
ainsi un « baromètre » pour apprécier
l'effectivité de l'Etat de droit.
La présente étude nous permettra d'analyser
l'une des causes probables de la lenteur de la juridiction administrative.
Cette «pathologie» de l'administration juridictionnelle
pourrait rendre vain l'espoir mis dans le recours pour excès de pouvoir,
et empêcher les citoyens d'intenter des actions contre
l'administration.
Du côté du justiciable, la maîtrise des
délais lui permet d'éviter le rejet pour irrecevabilité.
En fait, à quoi sert-il d'avoir raison lorsque le juge rejette pour
irrecevabilité la requête sans l'examiner au fond?
L'aire géographique choisie pour le cadre de notre
étude est le Bénin. Deux raisons ont motivé notre
choix.
Depuis la Conférence des forces vives de la nation
tenue à Cotonou du 19 au 28 février 1990, le Bénin est
considéré comme «vitrine de la
démocratie» en Afrique27(*) par la communauté internationale. Avec
à l'affiche, trois élections présidentielles, quatre
élections législatives et l'élection municipale de 2003,
le Bénin offre un cadre idéal pour apprécier le principe
de légalité. Nous avons voulu donc nous intéresser au juge
administratif, dont la mission est de sanctionner la violation de la
règle de droit et de parvenir à la réalisation d'un Etat
de droit dans l'un des domaines qui est le sien : le contentieux de
l'excès de pouvoir.
La deuxième raison est liée à l'antinomie
de la loi qui organise la procédure devant la Cour Suprême, la
plus haute juridiction à compétence exclusive en matière
de recours pour excès de pouvoir, et dont les décisions ne sont
susceptibles d'aucun recours. Cette absence du principe du double degré
de juridiction n'est-elle pas une violation du principe général
de procédure, garantie de liberté individuelle? Cette loi date de
1966, et n'a subi depuis lors, aucune modification en ce qui concerne les
délais de recours pour excès de pouvoir. Dès lors, le juge
a probablement joué un rôle capital pour adapter les règles
relatives aux délais à l'évolution de la
société. Dans notre analyse, nous recourons à des
solutions étrangères pour mieux apprécier les
originalités des positions du juge béninois.
Toute juridiction saisie d'un litige doit, avant de statuer au
fond, examiner au préalable si l'action portée devant elle est
recevable. En d'autres termes, il ne suffit pas qu'un litige soit porté
devant le juge pour que celui-ci statue au fond, c'est-à-dire sur
l'objet de la demande. Il faut aussi, et surtout que les règles de
procédure soient remplies pour que le juge tranche la question qui lui
est posée.
En droit administratif, notamment dans le contentieux de
l'excès de pouvoir, ces règles se rapportent à la
requête, au requérant, à l'acte contesté et à
la juridiction saisie par le demandeur28(*). Le contentieux administratif est une
opération essentiellement inquisitoire, c'est-à-dire ne
nécessitant pas la présence physique des parties au litige.
Celles-ci communiquent par le biais du juge, pierre angulaire de toute la
procédure. Cette dernière notion est centrale dans le contentieux
administratif : c'est un contentieux essentiellement procédurier.
D'où l'importance attachée à la démarche, à
toute une panoplie de règles à observer par le justiciable, et
dont certaines conditionnent même la recevabilité de sa demande.
La question des délais est dès lors fondamentale.
Les délais varient selon plusieurs paramètres
qui ne sont pas toujours maîtrisables pour le justiciable. Mais devant
défendre ses droits face à l'administration, il importe qu'il
maîtrise au moins le régime des délais. Les régimes
sont multiples, complexes et leur application n'est pas toujours exempte
d'ambiguïtés, ou d'incohérences. Pourtant, leurs
inobservations ou leurs observations approximatives peuvent entraîner
pour le justiciable des conséquences fâcheuses.
A la lecture des dispositions relatives aux délais de
recours pour excès de pouvoir au Bénin, un certain nombre
d'interrogations méritent d'être posées : une
décision d'une autorité administrative incompétente
fait-elle courir les délais de recours ? les deux formalités pour
la publicité sont-elles interchangeables ? Autrement dit, peut-on
utiliser la notification en lieu et place de la publication et vice versa ? ou
les deux ensemble ? Si non, quelles en sont les conséquences sur
les délais ? Quelle est l'incidence de la non-publication d'une
décision sur les délais ? Les recours prématurés ou
tardifs sont-ils recevables ? C'est autour de ces interrogations que nous
formulons la problématique à savoir le régime des
délais dans le contentieux de l'excès de pouvoir au
Bénin.
Saisi d'une requête en annulation pour excès de
pouvoir, le juge doit, non seulement interpréter la loi pour l'appliquer
au cas dont il est saisi, mais également poser de véritables
principes dans le silence de celle-ci. Cette obligation faite au juge
découle de l'article 4 du code civil (français) qui dispose que :
« Le juge qui refusera de juger sous prétexte du silence, de
l'obscurité ou de l'insuffisance de la loi, pourra être poursuivi
comme coupable de déni de justice »29(*). L'interprétation et la
création de la loi par le juge peuvent-elles être arbitraires ? En
d'autres termes, l'obligation faite au juge de juger, même dans le
silence de la loi est-elle synonyme d'une liberté sans limites?
Le législateur béninois, tout comme son
homologue français, n'a pas édicté une démarche que
doit suivre le juge. C'est le législateur suisse qui s'est essayé
en formulant une règle, aujourd'hui suivie partout : « A
défaut d'une disposition légale applicable, le juge prononce
selon le droit coutumier et, à défaut d'une coutume, selon les
règles qu'il élaborerait s'il avait à faire oeuvre de
législateur(...) il s'inspire des solutions consacrées
par la doctrine et la jurisprudence »30(*).
Mais la coutume n'est pas une source de droit de la
procédure contentieuse administrative ; le juge béninois n'est
donc soumis, dans l'application des règles relatives aux délais
qu'à l'autorité de l'Ordonnance N° 21/ PR du 26 avril 1966
sus-citée. Dans le silence de celle-ci, il peut faire oeuvre de
législateur ou de jurislateur, pour emprunter l'expression du
professeur René CHAPUS31(*).
Les règles posées par le législateur ne
sont pas toujours suffisamment claires pour régir toutes les situations
portées devant le juge d'une part et, d'autre part, elles sont muettes
sur bien d'autres cas ; la loi ne peut, en effet, tout prévoir.
Néanmoins, le juge doit juger, et de manière libre.
L'hypothèse que nous retenons dans le cadre de ce travail est que, dans
la procédure contentieuse du recours pour excès de pouvoir, le
juge administratif béninois applique souvent la loi et la
complète au besoin, mais souvent il crée de véritables
règles.
Il lui arrive donc de troquer sa toge de magistrat pour celle
de législateur ou, plus proprement de jurislateur. Ce
dédoublement du juge administratif béninois se vérifie
dans son oeuvre jurisprudentielle tant en ce qui concerne les délais
prescrits pour la procédure pré-contentieuse (première
partie) que pour ceux qui rythment la procédure contentieuse proprement
dite (deuxième partie).
PREMIERE PARTIE
LES DELAIS DANS LA PROCEDURE PRE-CONTENTIEUSE
Par procédure pré-contentieuse, nous entendons
la procédure qui se déroule devant l'autorité
administrative, à la suite de la demande du requérant. Dans le
contentieux de l'excès de pouvoir au Bénin, le législateur
subordonne la requête contentieuse du justiciable à la demande
préalablement exercée auprès des autorités
administratives. En effet, cette obligation découle de l'article N°
68 al-2 de l'Ordonnance N°21/PR du 26 avril 1966 qui dispose :
« Avant de se pourvoir contre une décision individuelle, les
intéressés doivent présenter un recours
hiérarchique ou gracieux tendant à faire reporter ladite
décision ». Le pré-contentieux regroupe donc la demande
du requérant, la réponse notifiée ou le silence de
l'administration.
Contrairement au contentieux qui se déroule devant le
juge, et dont les décisions ont autorité de chose jugée,
le pré-contentieux a quant à lui un autre objectif, tel que
dégagé par la jurisprudence béninoise : «
Considérant qu'en procédure contentieuse administrative, le
recours administratif préalable, lorsqu'il est obligatoire, a pour
fonction de permettre à l'autorité administrative soit de
régler le contentieux en prenant position, laquelle prise de position
lie le débat contentieux ».32(*) Il apparaît donc que le
pré-contentieux est un régime de faveur dont
bénéficie l'Administration et qui, selon le professeur Roger
Gabriel NLEP « lui assure une protection contre les
procès surprises, sortes de citations directes à
l'administrative ».33(*)
Les modalités de cette procédure ainsi que les
délais dans lesquelles elles doivent être exercées
(chapitre 2) dépendent de l'existence de la décision (chapitre1)
dont la régularité est contestée.
Chapitre 1
LE PREALABLE AUX RECOURS: L'EXISTENCE
D'UNE DECISION ADMINSTRATIVE.
La notion de préalable est entendue comme la condition
sine qua non, c'est-à-dire ce qui doit précéder
quelque chose. Le préalable au recours est entendue ici comme la
décision que doit prendre l'autorité administrative, laquelle
pourra éventuellement déclencher une contestation devant le juge.
La décision administrative constitue ainsi la matière
litigieuse.
Dans l'énumération des litiges qui
relèvent du contentieux administratif figure en bonne place la
contestation de la légalité des décisions des
autorités administratives. Cela ressort de l'Ordonnance N° 21/PR du
26 avril 1966.
Pour accomplir sa mission d'intérêt
général, l'administration procède par des
opérations matérielles ou prend des actes juridiques, parmi
lesquels on a les contrats (acte bilatéral) et les actes administratifs
(acte unilatéral).
La singularité de l'action administrative réside
dans la possibilité de prendre unilatéralement des
décisions administratives autonomes (section 1) qui sont
exécutoires. Dans certains cas, ces décisions sont
provoquées (section 2) par le requérant lui-même. Dans tous
les cas, il est nécessaire que l'acte administratif ait
été pris pour que la procédure du recours pour
excès de pouvoir puisse être valablement
déclenchée.
Section I : LES DECISIONS ADMINISTRATIVES AUTONOMES
Aux termes des dispositions de l'article 31-1 de l'ordonnance
N°21/PR du 26 avril 1966, le recours pour excès de pouvoir peut
être intenté contre les « décisions des
autorités administratives ». L'assimilation des notions
« décisions des autorités administratives »
aux « actes administratifs » est le fait du juge. En effet,
dans son arrêt N°24/CA du 24 octobre 1997, le juge définit le
recours pour excès de pouvoir comme un recours juridictionnel (...)
contre tout acte administratif. L'acte administratif unilatéral,
c'est-à-dire la décision exécutoire, est une
décision administrative qui confère des droits aux
administrés ou met des obligations à leur charge ; il
modifie l'ordre juridique34(*).
En vertu du principe de la séparation des
autorités administratives et judiciaires, le contentieux administratif
relève de la compétence de la juridiction administrative. Dans le
cas du Bénin, il s'agit de la chambre administrative de la Cour
Suprême. Dans son appréciation, le juge confronte l'acte dont il
est saisi à l'ensemble des normes juridiques en vigueur. Il va prononcer
l'annulation si l'acte attaqué est irrégulier. L'acte
administratif unilatéral est caractérisé par un faisceau
d'indices (§1), et ne peut en principe être opposable
qu'après la publicité (§2).
§1- LES CRITERES DE L'ACTE ADMINISTRATIF
UNILATERAL
Le législateur béninois, dans l'Ordonnance
N° 21/PR du 26 avril 1966 sus-citée, parle des décisions des
Autorités Administratives. Que doit-on entendre par Autorités
Administratives?
Dans l'Etat, il existe trois pouvoirs : le pouvoir
législatif, le pouvoir exécutif et le pouvoir judiciaire. Le
premier légifère, c'est-à-dire il édicte les
normes, le deuxième exécute les normes ainsi
édictées, et le troisième tranche les problèmes
résultant des relations sociales. Dans chacun de ces pouvoirs, on
retrouve les Autorités Administratives.
A- Les autorités auteurs de l'acte
Il doit s'agir des Autorités Administratives
nationales. Mais les actes de certaines autorités, bien que
situées sur le territoire d'un Etat, bénéficient d'une
immunité de juridiction35(*), et sont ainsi à l'abri de tout juge national,
qu'il soit judiciaire ou administratif. Il s'agit des actes des
autorités diplomatiques et consulaires. Cette immunité tient au
fait que « le juge est juge d'ordre interne qui n'a donc de
compétence qu'à l'égard des actes, faits et situations
régis par l'ordre juridique souverain dont il est l'organe
»36(*).
Les actes "traditionnels" du pouvoir
législatif sont les lois ; elles échappent au contrôle du
juge de l'excès de pouvoir. Elles ne peuvent être que
déférées devant la Cour Constitutionnelle, soit
directement par la procédure du contrôle de
constitutionnalité a priori, ou par la procédure d'exception
d'inconstitutionnalité soulevée devant une juridiction en vertu
des dispositions de l'article 122 de la constitution béninoise du 11
décembre 1990.
A côté de ces actes "traditionnels", le
pouvoir législatif prend d'autres actes qui n'ont pas le statut de lois.
C'est le cas de leurs règlements intérieurs, lesquels sont aussi
déférés devant le juge constitutionnel pour contrôle
de conformité à la constitution.37(*) Il en est de même des règlements
intérieurs de la Haute Autorité de l'AudioVisuel et de la
Communication, ainsi que ceux du Conseil Economique et Social. Ces actes qui
interviennent dans le cadre de la « mission parlementaire »
échappent, comme les lois, au contrôle du juge administratif.
Par contre, lorsqu'ils sont susceptibles de se rattacher
à l'« administration des services parlementaires »,
ils sont attaquables38(*) devant le juge de l'excès de pouvoir.
Cette évolution des actes parlementaires est l'oeuvre de la
jurisprudence française illustrée par l'arrêt
(Président de l'Assemblée Nationale) du 5 mars 1999.
En ce qui concerne les actes qui émanent des
juridictions, on a d'une part les actes concernant l'organisation du service
public de la justice. Ces actes sont attaquables pour recours pour excès
de pouvoir. Par contre, les actes relatifs au fonctionnement de la
«machine judiciaire» ne constituent pas des actes
administratifs, et le juge administratif est incompétent pour en
connaître39(*). On
parle plus couramment de décisions de justice (jugements, arrêts).
Les seules voies de contestation ouvertes à ces dernières sont
soit l'appel, l'opposition, la tierce-opposition, ou le pourvoi en
cassation.
Avec la politique de décentralisation, entendue selon
Monsieur Charles NACH MBACK comme «technique juridique
d'administration territoriale et modalité de partage de pouvoirs entre
les autorités centrales et les autorités locales dans un
pays»,40(*) on
est amené à avoir, à côté du pouvoir
"exécutif national", le pouvoir "exécutif
local".
Les actes qui émanent du pouvoir exécutif
national sont plus complexes. Il y a ceux qui échappent au
contrôle du juge de l'excès de pouvoir ; ce sont par exemple les
décrets de mise en application d'une loi votée. Pour les actes
qualifiés d'« actes de gouvernement », on note une
évolution jurisprudentielle marquée d'une part, par la limitation
de ces actes, et d'autre part, par le contrôle que le juge est
amené à effectuer.
Les actes des autorités locales peuvent faire l'objet
de recours pour excès de pouvoir.41(*) Il en est de même des actes qui interviennent
dans le cadre des rapports de tutelle conformément à l'article
114 de la loi N° 97-029 du 15 janvier 1999 portant organisation des
communes en République du Bénin.
Depuis le célèbre arrêt Monpeurt,
le Conseil d'Etat français considère que les décisions
unilatérales peuvent aussi émaner de personnes privées
dès lors qu'elles sont liées à l'exécution d'un
service public et nécessitant l'usage des prérogatives de
puissance publique.42(*)
B- La portée de l'acte administratif
unilatéral
L'acte doit modifier l'ordonnancement juridique
c'est-à-dire qu'il doit faire grief, créer des droits en faveur
ou des obligations à la charge des administrés sans le
consentement de ces derniers. L'acte querellé doit donc modifier
l'ordonnancement juridique pour son ou ses destinataires. Les professeurs J.-M.
AUBY et R. DRAGO résument ainsi l'état de la doctrine et de la
jurisprudence sur la question : « L'acte sans conséquences
juridiques, celui qui ne modifie pas l'ordonnancement juridique, n'entre pas
dans la catégorie des actes faisant griefs quels que soient les effets
dommageables qu'il puisse comporter ».43(*)
A ce niveau de l'analyse, une question importante se pose: la
présentation de l'acte administratif doit-il nécessairement
être écrit ou peut-il se présenter autrement? Et dans ce
dernier cas, emporte-t-il les mêmes conséquences juridiques?
Reprenant en cela la position classique de la jurisprudence et de la doctrine,
le juge administratif béninois tranche la question en ces termes:
« Considérant qu'en matière administrative, la forme
dans laquelle est prise la décision attaquée n'a rien de
sacramentel, qu'ainsi le juge administratif admet, malgré les
difficultés de preuve, qu'une décision verbale peut faire l'objet
d'un recours ; que la seule exigence de la jurisprudence est que la
décision ne soit pas contestée, qu'il en sera ainsi notamment
lorsque la décision aura été exécutée par
l'administration selon l'adage bien connu "acta probant se
ipsa"»44(*).
L'acte administratif peut donc être un écrit, un
ordre gestuel ou même symbolique (feux de circulation, panneaux stop,
etc.). La jurisprudence reconnaît à ces décisions le
caractère d'acte administratif, et par conséquent susceptibles de
recours pour excès de pouvoir lorsqu'ils font griefs.
Dès sa signature, l'acte administratif produit ses
effets, mais n'est en principe opposable aux administrés que dès
sa publication (§2), sous réserve des cas de la connaissance
acquise où, même en l'absence de publicité, le juge
reconnaît leurs effets juridiques.
Même écrit, oral, gestuel ou symbolique, l'acte
administratif produit-il ses effets à tout moment ? Autrement dit,
quelles sont les conditions d'entrée en vigueur de l'acte administratif
pour ses destinataires? La réponse consacrée est que l'acte
administratif doit être porté à la connaissance de ses
destinataires par une procédure de publicité.
§2- L'EXIGENCE DE LA PUBLICITE DES ACTES
ADMINISTRATIFS
La publicité est le procédé par lequel un
acte juridique est porté à la connaissance de ses destinataires.
Dans l'ordonnance N°21/PR du 26 avril 1966, le législateur
énumère, sans les distinguer, les deux modalités de
publicité de l'acte administratif : la notification d'une part, et la
publication de l'autre. C'est à la doctrine et à la jurisprudence
qu'il est revenu de distinguer les actes soumis à notification de ceux
soumis à publication (A). La jurisprudence est toutefois hostile
à certains modes de publicité (B), qu'elle considère comme
irréguliers.
A-La distinction entre les actes soumis à
notification
et ceux soumis à publication
Deux modes de publicité sont reconnus. Il y a d'une
part la notification et d'autre part la publication.
Dans son arrêt N°8/CA du 21 juin 1994, le juge
distingue les deux modes de publicité des actes administratifs en ces
termes : «Considérant qu'un acte individuel est un acte
administratif qui caractérise la situation de droit d'un
administré nommément désigné ; qu'il
apparaît normalement comme une application nominative du dispositif d'un
règlement qui lui, régit une situation considérée
en termes généraux ; que du point de vue de leur
régime juridique, l'un, l'acte administratif individuel est soumis
à la notification, l'autre, le règlement à la
publication...».45(*) Deux conséquences peuvent être
dégagées de cette jurisprudence : la première est relative
à la définition (a), et la deuxième aux
conséquences que le juge attache à cette formalité (b).
a) Les éléments de définition
La notification est un mode de publicité par lequel
l'acte administratif est directement et personnellement porté à
la connaissance de celui qui en est le destinataire. Les modalités
peuvent varier. Elles partent de la remise en mains propres contre
décharge à la transmission par exploit d'huissier, en passant par
la lettre recommandée avec accusé de réception.
La publication est quant à elle le mode de
publicité impersonnelle des actes réglementaires. Celle-ci peut
être faite par insertion au journal officiel, par affichage ou
par les deux.
b) Les conséquences attachées à chacune
de ces formalités
Les deux formalités de la publicité des actes
administratifs que sont la notification et la publication ne sont pas
interchangeables. Un acte administratif individuel ne fait courir les
délais à l'égard de la personne dont l'acte est
destiné, c'est-à-dire lui être opposable, si
l'administration a choisi la publication dudit acte. Ce n'est que dans
l'hypothèse d'une impossibilité de notifier (parce que
l'intéressé est inconnu de l'administration), que le juge
français, admet qu'une publication constitue un mode de publicité
suffisante.
Cependant, la publication d'un acte administratif individuel
est opposable aux tiers dès qu'elle est effectuée.
C'est ainsi que la jurisprudence considère par exemple
que le décret de nomination est un acte administratif à
portée individuelle qui doit s'inscrire dans le cadre des mesures
réglementaires à portée générale46(*).
En revanche, un acte réglementaire doit être
publié et non notifié. Cependant, certains actes, bien que
concernant la situation de certaines personnes bien déterminées,
tels les procès verbaux des admissibilités des étudiants,
peuvent être publiés et non notifiés. La publication peut
ainsi se faire également par affichage. Ces actes sont qualifiés
par la doctrine47(*)
d'actes collectifs.
Le juge administratif béninois refuse d'admettre
certains modes de publicité des actes administratifs. A plusieurs
reprises, la jurisprudence s'est opposée à certains modes de
publicité considérés par elle comme des voies de
publicité irrégulière des actes administratifs dans le
droit positif béninois. Il s'agit notamment d'un compte-rendu
radiophonique ou d'une information contenue dans un organe de presse.
L'arrêt N°5/CA du 16 janvier 1998 est
révélateur de cette conception du droit en la matière au
Bénin: « Considérant que le communiqué
radiodiffusé, l'insertion d'une information dans une presse publique ou
privée, ou le recours à un crieur public ne saurait tenir lieu et
être considéré comme mode régulier de
publicité des actes administratifs à savoir notification des
actes individuels et publication au journal officiel des actes
réglementaires, que tout au plus, ces moyens peuvent, compte tenu de
l'environnement socioculturel d'oralité et du niveau de conscience
administrative et civique des citoyens, servir d'amplificateurs aux modes
réguliers de publicité que sont la notification et la publication
au journal officiel ».48(*)
Il ressort donc de cette jurisprudence que tout
communiqué lu à la radio nationale, ou même à la
télévision d'Etat, n'est pas considéré, par la
jurisprudence comme mode de publicité, du moins régulier. Mais
c'est sans compter avec la persistance de l'administration qui revient une fois
encore à la charge pour opposer au requérant la publication faite
par radiodiffusion et reprise au quotidien national.
Statuant dans son arrêt N°55/CA du 19 août
1999, le juge confirme sa décision : «
considérant que le compte-rendu radiophonique et l'information par un
journal ne constituent pas des voies régulières de publication
pour les actes administratifs, lesquels actes sont dans le droit positif
béninois publiés au journal officiel »49(*), déboute à
nouveau l'administration sur son moyen tiré de la publication faite par
la radiodiffusion, et reprise dans le quotidien national. Ces modes de
publication ne peuvent être admis, au mieux, que comme appoint
d'amplification aux modes réguliers que sont le journal
officiel ou l'affichage.
Toutefois, il arrive souvent que, même en l'absence de
la publicité, le juge considère que le requérant, par son
attitude était suffisamment informé de l'existence de la
décision, et que celle-ci lui est donc opposable.
B- Un assouplissement à l'exigence de la
publicité : La théorie de la connaissance acquise
Au principe ainsi aménagé subordonnant le
déclenchement des délais à une mesure officielle
d'information, la jurisprudence apporte un assouplissement. Tout comme son
homologue français, le juge béninois admet la théorie de
la connaissance acquise pour faire échec à certaines demandes
jugées tardives.
La connaissance acquise est, selon Monsieur Jean-Claude KAMDEM
« la conception selon laquelle, en l'absence d'une publicité
régulière, le délai peut être
considéré comme commençant à courir s'il est
avéré d'une manière quelconque que
l'intéressé avait connaissance de l'acte ».50(*)
La connaissance acquise était autrefois
appliquée de façon générale par le juge
français pour déclarer certaines demandes tardives irrecevables,
dès lors qu'il était établi que le requérant avait
connaissance de la décision.
Elle est écartée pour certains actes par la
jurisprudence et par le législateur. Dans son arrêt du 12 avril
1972, le Conseil d'Etat français élimine les décrets de la
connaissance acquise en ces termes: « Ainsi, en ce qui concerne les
décrets, leur publication au journal officiel n'est pas seulement un
mode de publicité nécessaire, mais une condition même de
leur force obligatoire. Dès lors, à leur égard, la
connaissance acquise ne fait pas jouer le délai de recours contentieux
»51(*). La
connaissance acquise ne s'applique que dans trois hypothèses bien
précises :
· dans les recours formés par les membres d'une
assemblée délibérante contre les décisions prises
au cours des séances où lesdits membres étaient
présents ;
· lorsque le requérant montre, par son attitude
qu'il a nécessairement eu connaissance de la décision ;
· lorsque l'existence et le contenu d'un acte sont
nécessairement connus par un autre acte qui y fait
référence et qui, lui, a fait l'objet d'une publicité
adéquate.
Le juge administratif français réduit ainsi le
champ d'application de la théorie de la connaissance acquise et exclut
la simple connaissance de fait. Cette conception restrictive se retrouve chez
son homologue béninois.
C'est dans ce sens que la requête de monsieur MONTCHO
Marcel c/ Etat béninois a été rejetée52(*). Dans cette affaire, le
requérant a saisi par lettre le Président de la République
d'un recours gracieux en date du 13 juillet 1989. Dans ladite lettre, il fait
référence à une lettre du 24 février 1989 qui ne
figure pas au dossier mais qui indique en tout cas qu'à cette date, il
avait déjà connaissance de la décision incriminée.
L'arrêt ZODOGANHOU Thomas c/ Ministre de la
Défense Nationale, rendu en 1999 est très significatif en
matière de connaissance acquise. Les faits de l'espèce sont
relatifs à la radiation des Forces Armées de Monsieur ZODOGANHOU
Thomas, Chef d'Etat Major des Forces de défense nationale, en octobre
1984, puis inculpé de corruption. La notification de la décision
de radiation n'ayant pas été faite à
l'intéressé, celui-ci l'attaque en janvier 1991 devant le juge
administratif. Statuant sur la recevabilité, le juge oppose la
connaissance acquise au requérant en ces termes :
« Que la théorie de la connaissance acquise
est opposable au requérant dans le cadre de la procédure
engagée contre lui suite à son inculpation de corruption
consécutive à sa radiation des Forces Armées ; qui au
vu des pièces versées au dossier, une procédure judiciaire
a été engagée contre le sieur Thomas ZODOGANHOU
inculpé de corruption par l'entrepreneur Romain TOSSA ; Que cette
procédure découlait directement de la décision de
radiation contestée par le requérant a fait l'objet d'une
ordonnance de non-lieu en date du 5 juillet 1988.
Qu'à l'occasion de cette procédure
judiciaire, le requérant a été incontestablement
informé du lien qui existait entre son inculpation et la décision
par laquelle il a été radié des Forces
Armées ;
Qu'en admettant comme date de départ de la
connaissance acquise la date de prise de l'ordonnance de non-lieu,
c'est-à-dire le 5 juillet 1988, le requérant avait jusqu'au 5
septembre 1988 au plus tard pour former son recours
gracieux ;
Que par ailleurs, en admettant la date de la
délivrance de l'attestation de l'ordonnance de non-lieu, soit le 8 mai
1990, le requérant a jusqu'au 8 juillet au plus tard pour former son
recours gracieux ;
Que dans la réalité le recours gracieux de
Monsieur Thomas ZODOGANHOU étant intervenu hors délai, il y a
lieu de conclure à l'irrecevabilité du recours pour excès
de pouvoir du requérant »53(*).
Comme les décrets, lois, ordonnances, certains actes
sont impérativement publiés au journal officiel. C'est
le cas du compte-rendu des débats de l'Assemblée
Nationale.54(*)
De manière générale, lorsqu'une loi, ou
un règlement édicte de manière précise un mode de
publicité, le non-respect de cette formalité a pour
conséquence de ne pouvoir faire courir le délai contentieux.
L'administré est fondé à croire qu'il n'y a pas eu de
décision administrative le concernant. Dans une telle situation de
non-décision, le requérant peut inciter l'autorité
administrative à en prendre une. La règle selon laquelle "
pas d'intérêt pas d'action ", peut se résumer ici
par la formule " pas de décision pas de recours ".
Section II : LES DECISIONS ADMINISTRATIVES PROVOQUEES
Il arrive souvent que l'administration s'abstienne
ostensiblement de prendre une décision, mais qu'un administré
subisse les conséquences d'une telle attitude. Il est alors
nécessaire qu'il provoque ladite décision (§1) pour
être fixé sur son sort. L'attitude de l'administration quelle
qu'elle soit suite à la demande, constitue la décision
administrative recherchée (§2)
§1- LA NECESSITE DE PROVOQUER LA DECISION
ADMINISTRATIVE
Le recours pour excès de pouvoir est un procès
fait à un acte et non un litige qui oppose des parties55(*). Son objet est l'annulation de
l'acte irrégulier. Il est donc
impossible d'aller au contentieux de l'excès de pouvoir
sans pouvoir exhiber la décision dont on conteste la
régularité. Mais il peut arriver qu'il n'existe pas de
décision formelle et que l'administré subisse les effets d'une
décision virtuelle ou même d'une inertie de l'administration.
Dans cette hypothèse, toute personne
lésée par une telle situation est fondée à prendre
l'initiative (A) et saisir les autorités compétentes pour
provoquer une décision. Le requérant doit cependant éviter
que sa demande se présente soit sous forme d'une pétition ou
d'une menace (B).
A- L'auteur de la demande
Il est de principe que le droit d'action appartient à
celui ou à ceux que la loi désigne. Il peut s'agir du
Ministère public, de la victime ou de ses héritiers. Dans la
mesure où l'acte administratif cause des griefs à des personnes
déterminées, c'est à elles que la loi réserve le
droit d'action. Le droit parle de qualité pour agir.
Toutefois, le recours pour excès de pouvoir est de plus
en plus exercé par les associations, même sans personnalité
morale. « Ainsi, une association non déclarée
peut-elle se pourvoir devant le juge administratif (mais non un groupement
interdit par la loi, bien entendu ), d même que des incapables du droit
civil peuvent exercer le recours pour excès de pouvoir contre des
décisions qui portent atteintes à la liberté
individuelle» 56(*). Mais dans l'hypothèse où il n'existe
aucune décision officielle et qu'un administré subisse les
conséquences d'un acte administratif unilatéral, c'est
lui-même qui doit présenter sa demande ou son conseil. La demande
doit cependant obéir à certaines exigences. Ainsi le demandeur
doit ensuite montrer que ses intérêts ont été
lésés et que l'annulation de la décision ou l'effacement
de la situation contestée se soldera pour lui par une valeur
ajoutée en termes de droits rétablis ou à acquérir.
C'est l'intérêt à agir en justice.
B- La forme de la demande
Le législateur n'a indiqué aucune forme dans
laquelle le requérant doit présenter sa demande. La constitution
béninoise a néanmoins adopté le Français comme
langue officielle57(*),
c'est donc en français que doit être rédigée la
demande. L'objet de la demande doit être bien précisé et
formulé avec courtoisie. Une demande qui ressemble à une mise en
garde, à un tract ou encore à une pétition ne peut
être examinée. L'auteur doit décliner son identité,
la demande doit être signée et datée. Elle doit être
rédigée sur du papier libre. Un requérant, agent permanent
de l'Etat par exemple, dont le salaire est bloqué pour des raisons
inconnues de sa part, doit écrire aux autorités
compétentes, pour savoir de quoi il est question.
§2- L'ATTITUDE DE L'ADMINISTRATION FACE A
LA DEMANDE DU REQUERANT
Lorsque le requérant adresse son recours administratif
à l'autorité compétente, la suite de l'affaire
dépend du comportement de l'administration. Elle a une option, soit
notifier sa réponse (A) ou garder le silence (B). Dans un cas comme dans
l'autre, il y a décision. Décision explicite d'une part,
décision implicite d'autre part.
A-La réponse de l'administration
Dans un délai de deux mois à partir de sa
saisine, l'administration doit faire connaître sa position. Dans ce cas,
par notification, soit elle confirme sa décision virtuelle qui prend
ainsi la forme d'une décision explicite, soit elle règle le
malentendu et le problème est définitivement clos.
Dans tous les cas, la décision de l'administration est
désormais officielle ; le requérant, pour exercer son
recours contentieux doit donc satisfaire à l'obligation de recours
administratif préalable. L'administration n'est toutefois pas
obligée de répondre.
B-Le silence de l'administration
L'administration peut garder le silence devant la demande de
l'administré. La maxime selon laquelle « qui ne dit mot
consent », ne vaut pas dans la procédure administrative.
Dans le contentieux de l'excès de pouvoir, « qui ne dit mot
refuse »58(*).
Ainsi donc, le silence gardé plus de deux mois par l'administration
suite à la demande d'un requérant vaut décision implicite
de rejet. C'est ce silence que le requérant va déférer
devant le juge de l'excès de pouvoir. Une fois que la décision
existe, le requérant doit exercer son recours administratif
préalable dans les délais bien déterminés.
Chapitre II :
LE RECOURS ADMINISTRATIF PREALABLE
Le législateur béninois, oblige le
requérant à exercer son recours administratif avant d'adresser sa
requête au juge. Il s'agit de la survivance de la théorie du
Ministre-juge instituée en France, et qui devait en premier ressort
trancher le litige dont la décision devait être contestée
en appel devant le Conseil d'Etat.
Par recours administratif préalable, on entend la
demande d'un requérant potentiel, adressée soit à
l'autorité administrative auteur de l'acte, ou à son
supérieur hiérarchique.
L'article 68 al-2 de l'ordonnance N°21/PR du 26 avril
1966 dispose que: « Avant de se pourvoir contre une décision
individuelle, les intéressés doivent présenter un recours
hiérarchique ou gracieux tendant à faire rapporter ladite
décision ».
Les différents recours administratifs (gracieux et
hiérarchique) sont-ils hiérarchisés ? Autrement dit,
les deux recours doivent-ils être exercés successivement ?
La conjonction de coordination "ou" utilisée,
sert à indiquer qu'il s'agit d'une alternative, qui conduit le
requérant à exercer son recours préalable soit devant
l'autorité qui a pris l'acte (recours gracieux), soit devant son
supérieur hiérarchique (recours hiérarchique), et non
successivement les deux. Dans un arrêt rendu en 200059(*), le requérant exerce le
recours gracieux (au préfet) et le recours hiérarchique (au
ministre de l'intérieur), le même jour (21 juin 1996), le juge
constate seulement cet état de fait. Mais une espèce
antérieure nous permet d'affirmer que le juge retient lui aussi un seul
recours. L'arrêt ADEBO Bouarine Dine c/ Préfet de l'Atacora
illustre parfaitement cette position. En effet, le juge administratif
décide « que le recours hiérarchique daté du 4
mars 1997 ne peut plus annuler le premier recours gracieux daté du 3
mars 1995 »60(*). Le recours administratif préalable n'est
pas sans problèmes dans le contentieux de l'excès de pouvoir.
Section I : LES PROBLEMES LIES AU RECOURS ADMINISTRATIF
PREALABLE ET SA NATURE JURIDIQUE
Il est indéniable que l'option qu'offre le
législateur béninois quant au recours administratif
préalable recèle un avantage certain, celui de ne pas se tromper
de destinataire. Il est possible cependant que l'administration persiste dans
sa position. C'est sans doute pour cette raison que le législateur a
utilisé la formule « recours hiérarchique ou recours
gracieux». Cette disposition des recours administratifs
préalables, peut être analysée comme l'obligation faite au
requérant de saisir le supérieur hiérarchique lorsque
l'acte émane d'une autorité qui a un supérieur
hiérarchique, ou alors de saisir l'auteur même de l'acte lorsqu'il
n'en a pas. Le problème est l'identification des autorités
habilitées à recevoir le recours administratif (§1), ainsi
que la nature juridique de celui-ci (§2).
§1- L'IDENTIFICATION DES AUTORITES HABILITEES A
RECEVOIR LE RECOURS ADMINISTRATIF
Le recours administratif doit être dirigé
auprès des autorités administratives. Le recours gracieux est
celui qui est dirigé auprès de l'auteur de l'acte lui-même.
Ce dernier est facilement identifiable. Par contre, lorsque le requérant
choisit la voie du recours hiérarchique, l'identification du
représentant est moins évidente. La difficulté
réside souvent dans la complexité de l'organisation
administrative. Il arrive que certaines autorités n'aient pas de
supérieurs hiérarchiques apparents. Tel est le cas du
Président de la République, du maire ou du président de
l'Assemblée Nationale, etc.
A-Les difficultés liées à la
détermination du supérieure hiérarchique
Le recours hiérarchique est relatif au pouvoir
hiérarchique, qui suppose un supérieur hiérarchique et un
subordonné, liés entre eux par le lien de subordination. Le
subordonné a un devoir d'obéissance, mais ce devoir n'est pas
illimité.
Le recours hiérarchique est porté devant
l'autorité supérieure à celle qui a pris l'acte
incriminé. Il peut s'agir du supérieur immédiat, ou
même lointain. La notion de « supérieur
hiérarchique lointain » peut par exemple conduire à un
encombrement de la présidence. Mais le juge béninois n'a pas
hésité à consacrer cette formule dans l'arrêt
N° 24/CA du 24 octobre 1997. « Considérant que dans
l'organisation administrative béninoise, le titulaire principal du
pouvoir réglementaire, c'est le Chef de l'Etat, Chef du gouvernement,
qu'à ce titre il peut recevoir tout recours administratif
préalable ».61(*) On imagine l'engorgement des services de la
présidence si chaque administré devait s'adresser au Chef de
l'Etat pour la décision de toute autorité administrative quelle
que soit son échelle.
Quoiqu'il en soit, le supérieur hiérarchique
peut annuler ou même modifier l'acte pris par son subordonné, et
éviter un engorgement de la justice par des procès inutiles. Mais
il reste que la difficulté demeure. Car la détermination du
supérieur hiérarchique n'est pas souvent chose aisée, et
l'erreur qui consiste à la saisine d'une autorité
incompétente équivaut à un non-recours. C'est la position
du juge camerounais illustrée dans l'affaire GUIFFO J. P.
Enseignant de Droit public à la Faculté de Droit
et de Sciences Economiques de l'Université de Yaoundé, M. GUIFFO
a adressé son recours gracieux préalable au Ministre de
l'Education Nationale plutôt qu'au Chancelier de l'université,
seul habilité à représenter l'Université et donc
à recevoir le recours gracieux préalable. Sa requête est
simplement déclarée irrecevable par le juge pour défaut de
recours gracieux préalable62(*).
B-L'indifférence du juge béninois quant
à l'erreur dans la saisine de l'autorité administrative
compétente
Contrairement à son homologue camerounais qui
considère un recours « mal dirigé » comme l'absence de
recours, le juge béninois est moins rigoureux. Il valide un recours
administratif « mal dirigé », à condition qu'il
intervienne dans les délais. Dans un arrêt rendu en 1998, la Cour
Suprême n'a pas tenu compte de la nomenclature des actes du pouvoir
exécutif pour accepter qu'un ministre soit fondé à
recevoir le recours gracieux contre un décret pris en conseil des
ministres.
Les faits de l'espèce méritent d'être
rappelés. Madame Lydie POGNON née AKIBODE, par décret
N° 96-368 du 29 août 1996, est nommée Directrice à
l'Ecole Nationale d'Administration. Le Collectif des Enseignants de l'Ecole
Nationale d'Administration introduit une requête contentieuse
auprès de la Chambre Administrative de la Cour Suprême,
après avoir exercé son recours gracieux auprès du Ministre
de l'Education Nationale et de la Recherche Scientifique. Statuant sur
l'incompétence soulevée par le MENRS à recevoir le recours
gracieux, le juge tranche la question en ces termes : «
Considérant que la nomination contestée a été faite
dans le cadre du Ministère de l'Education Nationale et de la Recherche
Scientifique, qu'à ce titre, et conformément aux normes en
vigueur au Bénin, le décret a été
contresigné par le MENRS, en tant qu'il est chargé de son
application;
Considérant donc qu'à l'origine de la
proposition de nomination se trouve le MENRS, membre du gouvernement dont le
Président de la République signataire du décret
attaqué est le chef;
Considérant que le recours administratif peut
être adressé à l'autorité la mieux informée
ou à son supérieur hiérarchique;
Que dans le cas d'espèce, l'autorité la
mieux informée et bien celle de qui émane la proposition de
nomination et qui, par surcroît est chargée de l'exécution
de la décision en sa qualité d'autorité administrative
responsable du département ministériel concerné, ce
qu'atteste son contreseing et signée par le chef du gouvernement par les
ministres chargés de leur exécution et plus
particulièrement le ministre premier responsable du département
ministériel concerné, autorité la mieux informée
».63(*)
Malgré cette construction juridique, reste le
problème même du fondement juridique du recours administratif
préalable, qui n'est pas une simple formalité d'information.
Le fondement juridique du recours administratif réside
dans un arrêt de principe dégagé par la jurisprudence
française : « la possibilité pour les autorités
administratives d'assurer, par une procédure de retrait, le
contrôle de leurs propres actes ».64(*)
C'est cette jurisprudence que le juge béninois, dans
son arrêt du 4 août 1994, a repris en termes presque similaires :
« Considérant qu'aucune condition de capacité ni
d'intérêt n'est exigée pour l'exercice du recours
administratif préalable et que l'autorité administrative est
tenue sous peine d'annulation de sa décision, de procéder au
retrait de l'acte irrégulier... ».65(*) De quel pouvoir dispose donc un Ministre pour
retirer l'acte qui émane du Président de la République,
son supérieur hiérarchique ? En l'espèce, de quel droit le
MENRS aurait-il accédé à la demande du requérant en
retirant le décret présidentiel ? Le juge prétend t-il que
le MENRS aurait, par un arrêté retiré ou modifié un
décret présidentiel ? Cette décision de la Cour
Suprême ne devrait pas prospérer longtemps.
Pour limiter les conséquences de l'absence du recours
administratif préalable, le législateur ivoirien est intervenu en
1978 pour atténuer la rigueur de ce principe en prescrivant
à la Cour Suprême que : « la chambre administrative, si
elle est saisie, en l'absence de recours administratif préalable et sans
constitution d'avocat mais dans les délais prévus à
l'article 74 ci-dessus, peut impartir au requérant un délai pour
saisir l'autorité compétente».66(*)
Le recours hiérarchique existe même en dehors de
texte et se distingue du pouvoir de tutelle, exercé par exemple, par les
autorités administratives (cas du préfet) sur la commune67(*), pour assurer le respect des
lois et des règlements et l'harmonisation de ces actions avec celles de
l'Etat. Le pouvoir de tutelle est, quant à lui exercé dans les
limites établies par la loi, selon l'adage « pas de tutelle
sans texte ni au-delà des textes ».
§2-LA NATURE DU RECOURS ADMINISTRATIF
PREALABLE
Le juge béninois attache le caractère d'ordre
public au recours administratif préalable. Toutefois, la jurisprudence
et le législateur apportent quelques exceptions au caractère
d'ordre public attaché au recours administratif préalable.
A- Le caractère d'ordre public du recours
administratif préalable
Un moyen d'ordre public est celui qui peut être
soulevé d'office par le juge, à toute hauteur de l'instance. Pour
distinguer l'irrecevabilité d'une requête fondée sur le
moyen d'ordre public d'un autre moyen, le professeur Georges DUPUIS propose
l'utilisation de la formulation suivante : « S'il ( le juge )
a procédé ainsi, il propose, dans l'arrêt ou le jugement,
que l'annulation est prononcée « sans qu'il soit besoin d'examiner
les moyens de la requête ». Formule à ne pas confondre avec
« sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la
requête », qui signifie que le juge s'appuie sur un moyen pour
annuler la décision et laisse de côté le reste de
l'argument du requérant ».68(*)
Dans son arrêt N° 7/CA du 21 juin 1994, HOUNSOU J.
Abel c/ Ministre du Travail et des Affaires Sociales, le juge administratif,
après un bref rappel des dispositions de l'art.68
conclut : « Considérant qu'il ressort des
pièces du dossier que le requérant n'a formulé aucun
recours administratif avant d'introduire sa requête devant la
présente cour le 27 août 1985, qu'en se comportant de la sorte,
ledit requérant a violé les dispositions ( ...) que donc son
recours en annulation pour excès de pouvoir contre la décision (
...) est irrecevable ».69(*) D'autres arrêts postérieurs sont
allés dans le même sens70(*), et la jurisprudence administrative en la
matière est constante au Bénin.
B-Les exceptions au caractère d'ordre public
attaché
au recours administratif préalable
Le juge béninois et le législateur formulent
quelques exceptions au recours administratif préalable.
Dans son arrêt N° 61/CA du 19 août 1999 le
juge apporte un tempérament au caractère d'ordre public qui
s'attache au recours administratif préalable. Monsieur GNONRONFOUN
BAKARI est nommé au poste de Directeur Administratif et Financier du
Conseil Economique et Social par le Président de cette institution.
Mais, cette nomination est faite en violation des dispositions des articles 17
et 72 du règlement intérieur qui disposent que la nomination du
Directeur Administratif et Financier doit être faite par le
Président du Conseil Economique et Social après « avis
conforme du Bureau du Conseil Economique et Social ; »
Conseiller au Conseil Economique et Social, Me Robert BONOU a
saisi la Cour Constitutionnelle, laquelle s'est déclarée
incompétente dans sa décision DCC N° 97-020 du 06 mai 1997.
Après avoir exercé son recours gracieux le 22 mai 1997, Me BONOU
saisit la Chambre administrative de la Cour Suprême le 23 juillet 1997.
Statuant sur la recevabilité, la Cour trace la limite à la
règle de recours administratif en ces termes :
« Considérant que lorsque le juge
incompétent a été saisi, il est obligatoire de saisir
ensuite directement le juge compétent ;
Considérant que l'exercice d'un recours gracieux ou
hiérarchique consécutif au rejet pour incompétence d'une
réclamation contentieuse est sans effet et ne proroge pas le
délai de recours devant le juge compétent; »71(*)
Ainsi, lorsque le requérant saisit par erreur une
juridiction, qui se déclare incompétente, il dispose donc d'un
délai de deux mois à partir de la notification du jugement pour
saisir la juridiction compétente. Cette jurisprudence pose tout de
même un problème : le recours administratif est
destiné à permettre un arrangement entre l'administration et ses
agents. C'est une tentative de conciliation instituée par le
législateur. Cette sorte de "passerelle" directe de juridiction à
juridiction ne permet plus la réalisation de cette conciliation.
La deuxième exception du recours administratif
préalable est dressée par le législateur lui-même.
En effet, l'art.32 al.1er de l'Ordonnance 21/PR dispose :
« Elle (la Chambre administrative) connaît en outre,
comme juge d'appel, des décisions rendues en premier ressort, par les
Organismes administratifs à caractère juridictionnel ».
C'est ainsi que l'article 263 de la loi N° 98-004 portant
Code du Travail en République du Bénin dispose que: «
Les sentences arbitrales qui ont acquis force exécutoire peuvent faire
l'objet d'un recours pour excès de pouvoir ou violation de la loi. Ce
recours est introduit devant la Cour Suprême et jugé dans les
délais, formes et conditions des pourvois en cassation en matière
civile. Les procédures de conciliation sont gratuites ».
Le caractère juridictionnel est également
reconnu à certaines décisions qui émanent de la Haute
Autorité de l'Audiovisuel et de la Communication, institution
indépendante, qui a pour mission de garantir et d'assurer la
liberté et la protection de la presse, ainsi que de tous les moyens de
communication de masse72(*). La décision prise, lorsqu'elle siège
en conseil de discipline en matière de presse et de communication ne
peut que faire l'objet de recours en cassation devant la Chambre Administrative
de la Cour Suprême. Ainsi, le législateur confère à
cette décision le caractère juridictionnel. Pour l'attaquer, il
n'est donc pas besoin d'exercer le recours administratif préalable. Car
ces décisions ne sont pas à proprement parler des actes
administratifs.
C'est également le cas des certaines décisions
prises par les ordres professionnels, (ordre des médecins, ordre des
chirurgiens-dentistes, ordre des avocats, ordre des pharmaciens, etc.), le
Conseil supérieur de la Magistrature.
Traditionnellement, lorsque la Cour Suprême statue sur
le pourvoi qui lui est déféré, soit elle rend
l'arrêt d'annulation, et la décision des juges de fond acquiert
force de chose jugée ; soit elle casse, et renvoie l'affaire devant une
autre juridiction de même degré et même attribution que
celle qui a rendu la décision, ou alors devant la même
juridiction, mais autrement composée. La Cour Suprême n'est pas un
troisième degré de juridiction.
En sera-t-il de même des décisions de ces
organismes, dans le cas où interviendrait la cassation ? Il nous semble
que non, car si la cassation intervient, alors la décision prise par
l'organisme en question est annulée.
L'article 32 al.1er de l'Ordonnance N° 21/PR
du 26 avril 1966 précité parle d'appel contre ces
décisions. Si la chambre administrative est donc saisie, dans ce cas
elle rend soit un arrêt infirmatif, soit un arrêt confirmatif. Les
décisions de ces organismes sont donc regardées comme
décisions de premier degré.
Par contre, la loi N° 98-004 portant Code du Travail en
République du Bénin, ainsi que celle relative à la HAAC,
parlent de pourvoi contre lesdites décisions. Dans la mesure où
l'Ordonnance N° 21/PR du 26 avril 1966 est une loi générale,
et antérieure à celles relatives au Code de Travail ainsi
qu'à la HAAC qui sont des lois spécifiques et nouvelles, c'est
donc le pourvoi qui sera formé contre leurs décisions.
Toutefois, la Cour Commune de Justice et d'Arbitrage,
juridiction communautaire des Etats membre de l'OHADA73(*) (Organisation pour
l'Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires), et juridiction suprême
de chacun des ces Etats, est dotée de pouvoir singulier. En effet
lorsque la Cour Commune de Justice et d'Arbitrage casse un « jugement
74(*)» qui lui
est déféré, elle ne renvoie pas l'affaire devant une autre
juridiction, mais l'évoque.75(*) Si la CCJA casse un « jugement »,
elle est amenée donc à faire le travail des juges de fond,
c'est-à-dire statuer aussi bien en faits qu'en droit.
Le juge camerounais a appliqué cette règle, en
visant l'art.12 de la loi n° 74-18 du 5 décembre 1974 relative au
contrôle des ordonnateurs et gérants des crédits publics et
des entreprises d'Etat. Le jugement n° 27/CS-CA/ 77-78 du 5
décembre 1978 a visé cet article qui dispose que « les
décisions du conseil de discipline budgétaire et comptable ne
sont pas susceptibles de recours gracieux ; quelles peuvent faire l'objet d'un
recours en annulation devant la juridiction administrative
»76(*). Dans tous les cas, le requérant
n'est pas astreint à des délais, mais en dehors de ces
exceptions, le recours administratif obéit à des délais.
Ceux-ci varient selon qu'il s'agit d'un acte réglementaire ou d'une
décision individuelle.
Section II : LE REGIME DES DELAIS DU RECOURS
ADMINISTRATIF PREALABLE
Le législateur a fixé à deux mois le
délai pour exercer le recours administratif préalable. Ce
délai commence à courir en principe à partir de la
publication ou de la notification de la décision attaquée. Le
problème se pose cependant aux règles de computation de ces
délais (§1), car de cette computation dépend la fixation de
la date à laquelle les délais commencent à courir
(§2).
§1-L'INSTABILITE JURISPRUDENTIELLE DE LA
COMPUTATION
DES DELAIS DU RECOURS ADMINISTRATIF
La computation des délais du recours administratif
consiste à déterminer le jour à partir duquel commence
à courir le délai et le jour auquel il expire.
La période de deux mois prévus par le
législateur ne renseigne pas exactement sur la manière de faire
les décomptes. Par deux mois, on peut entendre 60 jours, sans se
préoccuper du nombre de jours que compte le mois, ou, au contraire,
tenir compte de cette donnée du calendrier. Les délais vont alors
varier selon que les mois comptent 28, 29, 30 ou 31 jours.
La jurisprudence actuelle que nous avons explorée (de
1994 à 2000) ne renseigne pas sur l'évolution de la question.
Le juge béninois décompte le délai de
recours administratif de quantième à quantième, sans tenir
compte du nombre de jours dans le mois.
Quel sera donc le délai d'expiration d'un acte si la
publication est intervenue le 31 décembre ? Le mois de
février n'a que 28 ou 29 jours. Est-ce la fin du mois de février
qu'il faudra considérer pour la computation ou alors le premier mars ?
Aucune décision de justice ne nous permet de répondre à
ces questions
Mais il reste à savoir si le juge inclut le dies a
quo, c'est-à-dire le jour de la réalisation de
l'événement ou de la publication de l'acte, et le dies ad
quem, le jour de l'expiration du délai prévu.
A-Le délai de recours administratif est un
délai franc
L'affaire LALEYE Antoine contre l'Etat béninois
jugé le 16 mai 1997, offre l'occasion au juge administratif de
déterminer la nature desdits délais. Les faits sont les suivants
: Conseiller au Ministère des Affaires Etrangères, M. LALEYE est
révoqué de la Fonction publique par décret n° 87-397
du 26 novembre 1987, décret notifié au requérant par
lettre n°0024/MAEC/CAB/SP-C du 07 janvier 1988.
Monsieur LALEYE Antoine introduit son recours gracieux le 06
mai 1988. Mais dans son mémoire ampliatif, le requérant, par
l'organe de son conseil, conclut qu'il a aussitôt introduit une
requête auprès du Chef de l'Etat afin de voir rapporter la
décision de révocation et obtenir le réexamen de son
dossier.
Dans la recherche de la manifestation de la
vérité, le juge conclut que:« Contrairement aux
allégations du requérant, la demande de réexamen de son
dossier a été expressément rejetée par le chef de
l'Etat par lettre n° 1612/PR/CAB/D du directeur de cabinet du
Président de la République; que cette lettre fait
référence à la lettre du 06 mai 1988.
Qu'il apparaît ainsi que le recours du
requérant date du 06 mai et non du 12 janvier 1988;
Que les délais impartis au requérant pour
introduire légalement son recours gracieux ayant expiré depuis le
07 mars 1988, il y a forclusion »77(*).
De cette jurisprudence LALEYE, on peut donc conclure que ni le
dies a quo ni le dies ad quem ne sont comptabilisés.
On parle alors de délai franc. L'avantage du délai franc, c'est
que si le jour de l'expiration tombe un samedi, un dimanche, un jour
férié ou chômé, la formalité peut encore
être accomplie le premier jour ouvrable suivant, sans que le
requérant soit forclos.
Si la publicité d'un acte administratif intervient par
exemple le 11 août 2003, le requérant peut, sans risque
d'être forclos, exercer son recours administratif préalable le 13
octobre 2003 ; le 11 octobre 2003 étant un samedi.
La jurisprudence est-elle pourtant fixée ? Rien n'est
moins sûr. Car un an plus tard, le juge a opéré un
revirement.
B- Le délai de recours administratif est un
délai non franc
L'arrêt N° 54/CA du 17 octobre 1999 l'illustre fort
bien. Pour rejeter la requête de M. YOROU MATAYI Jean, le juge conclut
« qu'il est avéré que de tous les actes administratifs,
l'acte attaqué est et demeure le décret n° 86-174 du 05 mai
1986 le nommant au grade de capitaine, qu'ainsi le recours gracieux aurait
dû intervenir le 05 juillet 1986 au plus tard au lieu du 21/12/1990 comme
ce fut le cas ».78(*)
L'acte attaqué est daté du 05 mai 1986, le juge
dit que le recours gracieux aurait dû intervenir au plus tard le 05
juillet 1986. Le juge a donc pris en compte aussi bien le jour de la
publication/notification de l'acte attaqué (dies a quo) que le
jour de l'expiration du délai de deux mois (dies ad quem) pour
calculer le délai du recours administratif préalable. On est donc
amené dans ce cas à dire que le délai du recours
administratif est un délai non franc. Cette jurisprudence est grave de
conséquence. Car lorsque le délai est non franc, et que le
dies ad quem tombe soit un samedi, un dimanche, un jour
férié ou chômé, il est impératif d'exercer
son recours administratif avant cette date à peine de forclusion.
Mais la question des délais se complique au regard des
modalités d'envoi de la requête
§2-LA DETERMINATION DE LA DATE A RETENIR ET
SES EFFETS SUR LES DELAIS
Si en principe aucun problème ne se pose lorsque la
demande est déposée directement dans les services de
l'autorité administrative, il faudra déterminer quelle date
retenir lorsque la demande est envoyée par la poste.
Lorsque le requérant adresse son recours administratif
par voie postale, doit-on considérer la date de dépôt dudit
recours à la poste, ou plutôt celui du jour où il parvient
à son destinataire ? Cette question a donné lieu à un
grand débat doctrinal en droit civil, où deux théories
étaient en présence : d'une part la théorie de
l'émission, qui était favorable à l'expéditeur, et
d'autre part, la théorie de la réception favorable au
destinataire.
Longtemps considérée comme une question de fait,
et qui dépendait donc de l'interprétation souveraine des juges du
fond, la Cour de Cassation française a, dans un arrêt de principe,
consacré la théorie de l'émission.79(*)
La convention de Vienne du 11 avril 1980 sur la vente
internationale de marchandises retient quant à elle la théorie de
la réception.82(*)
Cette même théorie est également consacrée par
l'acte uniforme de l'organisation pour l'harmonisation en Afrique du droit des
affaires (OHADA) en matière de vente de marchandises82(*).
De ces deux théories, laquelle est appliquée
dans le contentieux administratif au Bénin? Il semble que ce soit la
théorie de la réception.
A-La consécration de la théorie de la
réception
L'arrêt N° 79/CA du 04 octobre 1999 l'illustre
parfaitement. Les faits de l'espèce concernent le procès verbal
de non-conciliation n°03366/MTEAS/DC/DT/IDTMO/ALT/DTC de l'inspecteur du
travail et de la main d'oeuvre de l'Atlantique, que l'Auto-Ecole Moderne, par
l'organe de son conseil, défère devant le juge de l'excès
de pouvoir par requête du 17 juillet 1996. Le juge décide ainsi :
« Considérant que bien que les conditions de forme et de
délai énumérées par l'article sus-indiqué
paraissent remplies dans le présent dossier, y compris la condition du
recours administratif préalable obligatoire, ce qui devrait en principe
conduire à la recevabilité de la requérante, il faut
cependant souligner que la preuve que le recours hiérarchique du 02 mai
1996 a bien été reçu par le Directeur du travail, ne
figure nulle part audit dossier ;
Que si la photocopie non authentifiée d'un extrait
du courrier Départ du conseil de la requérante, annexée
à sa correspondance n°BCA/PK/212/99 du 26 février 1999, peut
être prise en compte par la Cour comme un élément de preuve
que le recours hiérarchique du 02 mai 1996 a été
envoyé audit Directeur, elle n'indique pas en revanche pas que ce
dernier l'a reçu ; »82(*). Pour le juge ici, la date à
considérer est celle où le Directeur avait reçu la
requête. C'est la consécration de la théorie de la
réception.
C'est cette même théorie qu'a adopté le
juge camerounais dans son arrêt de l'Assemblée
Plénière du 8 novembre 1973. Un concours est lancé le 16
septembre 1969 avec clôture le 30 septembre. Monsieur YOUMBI André
envoie par la poste son dossier de candidature qui parvient après la
date de clôture.
Dans son arrêt CS-AP N°1-A du 8 novembre 1973, la
réponse de la Cour est sans équivoque : « Un pli remis
à la poste ne devient la propriété du destinataire
qu'à la date de réception du pli par ce dernier et non à
celle de son expédition ».83(*)
Cette théorie est défavorable au
requérant lorsqu'on sait la lenteur des services postaux ainsi que les
multiples grèves des travailleurs du secteur public qui agitent les
Etats africains. Un requérant situé dans l'arrière pays,
peut expédier son recours administratif le lendemain de la publication
d'un acte administratif, mais celui-ci peut parvenir à son destinataire
après l'expiration des délais de deux mois. Ainsi subira-t-il les
conséquences d'un mauvais fonctionnement des services postaux.
Les délais du recours administratif, avons-nous dit,
commencent à courir le lendemain de la notification de la
décision s'il s'agit d'un acte individuel. Mais si cet acte concerne les
tiers, c'est à partir du lendemain de la publication ou de l'affichage
dudit acte. Cela vaut aussi pour les actes réglementaires et les actes
collectifs.
Toutefois, l'exception d'illégalité peut
être excipée à tout moment en ce qui concerne les actes
réglementaires. L'exception d'illégalité qui les affecte
est perpétuelle. Ainsi par exemple, le Conseil d'Etat français a
déclaré illégal le 8 février 2000, un décret
du 27 décembre 1985 qui instituait un régime
d'insaisissabilité des sommes déposées par
l'administrateur ou le liquidateur judiciaire à la caisse des
dépôts de consignations.84(*)
Le juge béninois apporte une exception
supplémentaire lorsque la décision attaquée viole les
droits fondamentaux de la personne humaine.
B-Les exceptions jurisprudentielles
Plusieurs exceptions sont apportées par les juges
(français) pour accepter les recours qui auraient dû parvenir en
temps utile. En ce qui concerne le Bénin, nous n'avons pas trouvé
une décision rejetée pour une arrivée tardive du fait de
l'acheminement tardif.
L'ADD, arrêt (Avant Dire Droit ) rendu le 18/02/1999
mérite d'être rapporté. Les faits relatifs à cette
affaire concernent le décret de révocation de la fonction
publique de Monsieur BABADJIDE Alphonse en 1983. Pour lutter contre les
détournements et autres actes de prévarication dans la fonction
publique, le Président de la République a pris une Ordonnance en
février 1982. L'article 2 de ladite ordonnance exclut le
bénéfice des garanties disciplinaires offertes par les statuts
des agents mis en cause.
C'est ce décret que M. BABADJIDE défère
devant le juge administratif par sa requête du 27 juin 1984. Il faut tout
de même préciser que, contrairement à tous les arrêts
de la chambre administrative de la Cour Suprême, le juge qui, avant de
statuer au fond, se prononce toujours sur la recevabilité, cet
arrêt est particulier en ce qu'il n'adopte pas ce schéma
classique. « Considérant que dans son mémoire ampliatif
du 5 juillet 1985 au paragraphe 18, le requérant relevait
déjà en plus de son moyen unique tiré de la violation de
la loi, qu'il est révoqué de la Fonction Publique
« sans défense de droit
commun » ;
Que dans ses premières conclusions du 14 octobre
1996 le Procureur Général près la Cour Suprême s'est
fait tort de cela pour soulever le non-respect du droit de la défense,
principe général du droit, en ce que l'intéressé ne
s'est pas vu communiquer son dossier, ni n'a été traduit devant
le Conseil de Discipline comme le prévoyaient les statuts le
régissant ;
Qu'il est constant au vu des pièces du dossier que
le requérant a été sanctionné sur le fondement de
l'Ordonnance n° 80-6 du 11 février 1980, édictant les
dispositions en vue de la répression disciplinaire des
détournements et de certaines infractions commises par les Agents de
l'Etat et les employés des Collectivités Locales ;
Que ladite Ordonnance en son article 2 exclut de ses
dispositions, le bénéfice des garanties disciplinaires offertes
par les statuts des agents mis en cause ;
Que parmi ces garanties disciplinaires exclues par ledit
texte, figurent justement les obligations de communication de dossier et de
traduction de l'Agent incriminé devant le conseil de discipline
;
Considérant que dès lors,
l'intéressé n'a pas bénéficié desdites
garanties dans la procédure diligentée contre lui et qui a abouti
à sa révocation de la Fonction Publique par décret n°
83- 462 du 28 Décembre 1983 ;
Considérant qu'il est constant aujourd'hui plus
qu'hier que les droits fondamentaux de la personne humaine sont
imprescriptibles et inaliénables ;
Que parmi ces droits, figurent en première ligne
les droits de la défense, parmi lesquels le droit de communication du
dossier à l'Agent de l'Etat et de traduction de celui-ci devant le
conseil de discipline ;
Considérant que même dans la lutte contre les
détournements et les actes de prévarication, l'Etat doit toujours
écouter l'autre partie et lui permettre de bénéficier de
toutes ses garanties, même disciplinaires ;
Que leur exclusion est d'autant plus grave qu'elle n'a pas
permis au requérant, en présence d'un défenseur ou de
témoins de son choix, de présenter des observations
écrites ou verbales, tous éléments d'explication qui en
tout cas, auraient pu mieux édifier l'Administration ;
Qu'il convient donc, avant tout jugement en la forme et au
fond de cette affaire, de permettre à l'Administration de lever cette
omission en communiquant son dossier à BABADJIDE Alphonse et en lui
offrant de se défendre devant le conseil de discipline »85(*).
La première conséquence de cette jurisprudence
est sans doute l'introduction des notions de droits imprescriptibles et
inaliénables. Cela suppose, que même après
l'expiration du délai de recours, les décisions qui violent les
droits fondamentaux de la personne humaine sont toujours attaquables devant le
juge de l'excès de pouvoir.
La deuxième conséquence est tirée de
l'échec fait à l'Ordonnance n°80-6 du 11 février
1980, en ce que celle-ci viole les points a) et b) de l'article 14 al.3 du
pacte international relatif aux droits civils et politiques, qui disposent que
: « Toute personne accusé d'une infraction pénale a
droit, en pleine égalité, au moins aux garanties suivantes
:
A être informé, dans le plus court
délai, dans une langue qu'elle comprend et de façon
détaillée, de la nature des motifs de l'accusation portée
contre lui,
A disposer du temps et des facilités à la
préparation de sa défense et à communiquer avec le conseil
de son choix»86(*).
Lorsque le requérant a exercé son recours
préalable dans les délais, il dispose d'un délai de deux
mois pour saisir le juge, sauf en cas de l'examen de sa demande par
l'autorité saisie. Hors cette hypothèse, les délais dans
la procédure contentieuse commencent à courir.
CONCLUSION DE LA PREMIERE PARTIE
Le recours administratif préalable a pour objectif de
permettre une réconciliation entre le requérant potentiel et
l'administration, sur une décision litigieuse ou son silence. Sa bonne
utilisation est susceptible de réduire l'encombrement du prétoire
par des procès « inutiles ».
Sa procédure lui imprime de nombreux effets pervers et
le rend finalement défavorable aux intérêts des
justiciables d'une part, et à l'Etat de droit d'autre part. La solution
ne résiderait-elle pas dans un respect de l'esprit de dialogue
"intra-administratif", objet du recours administratif et dans une
visibilité de sa procédure elle-même ? Il y a
là un champ en friche à la merci du juge administratif.
DEUXIEME PARTIE :
LES DELAIS DANS LA PROCEDURE CONTENTIEUSE
Tout justiciable qui conteste la régularité d'un
acte administratif peut saisir le juge d'un recours pour excès de
pouvoir. La procédure est ouverte une fois satisfaite l'exercice du
recours administratif préalable.
Comme pour les recours administratifs, le recours contentieux
est soumis à des exigences de délai. Certains
précèdent la saisine du juge (chapitre 1) d'autres se rapportent
à l'instruction (chapitre 2).
Chapitre I
LES DELAIS D'INTRODUCTION DE L'INSTANCE
La saisine du juge déclenche l'instance contentieuse,
qui va aboutir au prononcé du jugement. Le juge ne peut se saisir
d'office en matière du contentieux de l'excès de pouvoir. Le
législateur a envisagé deux modes de saisine du juge : il y a
d'une part la requête introductive d'instance et d'autre part la forme de
pourvoi en cassation.
Ce deuxième mode qui est particulier, se fait par
déclaration au greffe de la Chambre Administrative de la Cour
Suprême, contre les décisions rendues en premier ressort par les
organismes administratifs à caractère juridictionnel.
La saisine de la Chambre par voie de requête est le mode
de droit commun de saisine du juge de l'excès de pouvoir. Cette action
doit être exercée dans les délais bien
déterminés (section 1), et dont l'inobservation entraîne en
principe la forclusion (section 2).
Section I : LE DELAI DE SAISINE DU JUGE
Le législateur a fixé à deux (02) mois
les délais d'exercice de l'action, en ce qui concerne l'introduction du
recours par voie de requête, Ce délai est porté à
cinq (05) mois, lorsque le juge est saisi par déclaration au greffe. Le
délai de pourvoi au Bénin, en matière civile et
commerciale étant de cinq mois.
La détermination du point de départ desdits
délais (§1) varie selon plusieurs hypothèses. Les moyens de
saisine du juge peuvent également avoir un impact sur ces délais
(§2).
§1- LA COMPUTATION DES DELAIS DE SAISINE DU
JUGE
Le délai de saisine du juge de l'excès de
pouvoir est respectivement de deux et de cinq mois soit par requête, ou
dans les hypothèses de pourvoi en cassation. Le point de départ
des délais de saisine du juge est la date à partir de laquelle le
requérant doit introduire son recours contentieux.
A côté des hypothèses fixées par le
législateur lui-même (A), il y a aussi un cas d'origine
jurisprudentielle (B).
A) Les hypothèses législatives
Elles sont au nombre de deux. La première
hypothèse est celle du silence gardé par l'autorité
administrative à l'expiration des délais du recours
hiérarchique ou gracieux. Dans ce cas, c'est au jour de l'expiration de
ces délais que commence à courir le délai de deux mois
pour saisir le juge. Dans cette hypothèse, le délai de saisine du
juge est donc un délai non franc. Sont comptés dans les
délais aussi bien le dies a quo que le dies ad quem.
Quelques arrêts de la jurisprudence béninoise
l'illustrent fort bien.
Admis à la retraite par décret n° 91-56 du
29 mars 1991, et notifié par bordereau d'envoi du 20 juin 1991, le
Lieutenant des Forces Armées béninoises Augustin HOUETO a saisi
le juge pour solliciter l'annulation dudit décret. Statuant sur la
recevabilité, le juge détermine le point de départ du
délai contentieux en ces termes : «Considérant qu'en
l'espèce le décret n° 91-56 du 29 mars 1991 portant
admission à la retraite du Lieutenant des Forces Armées
béninoises Augustin HOUETO a été notifié à
ce dernier par bordereau d'envoi illisible /4-C-GA/GEND-NAT du 20 juin 1991,
que le requérant a saisi le Président de la République,
Chef de l'Etat, Chef Suprême des Armées d'un recours gracieux en
date du 11 juillet 1991, qu'il disposait donc d'un délai de deux mois,
jusqu'au 11 septembre 1991 pour saisir la cour de son recours
contentieux... »87(*).
Dans cette espèce, le recours du requérant date
du 08 juillet 1991. Or c'est à partir du 11 septembre que le silence de
l'administration arrivait à expiration, et c'est à partir de
cette date que le requérant pouvait introduire son recours contentieux.
Il faut toutefois noter que le juge aurait dû dire (...), qu'il disposait
donc d'un délai de deux mois,"à partir du" 11 septembre 1991
pour saisir la Cour de son recours contentieux.
Cette jurisprudence est confirmée en 1997 dans
l'arrêt N° 3/CA du 24 avril 1997, où la Cour affirme
«... qu'il ressort des pièces du dossier que le
requérant a saisi le Préfet de l'Atlantique d'un recours gracieux
en date du 30 janvier 1982, aux fins de voir rapporter la décision de
mutation du permis d'Habiter afférent au VON 189-226/SE au nom de
SODOGANDJI Clémentine ; Que ledit requérant ne devait
introduire son recours contentieux que le 30 mars 1982 au plus
tôt »88(*).
La deuxième hypothèse est celle où
l'autorité administrative notifie sa décision explicite de rejet
dans les deux mois qui suivent la requête. Dans ce cas, le délai
de recours contentieux commence à courir à partir de la
notification de décision de rejet explicite. S'agit-il des
délais francs ou non francs ?
Dans un arrêt rendu en 1999, le juge prend position pour
les délais non francs. Les faits de l'espèce concernent
l'abrogation d'une convention de vente par le Préfet de l'Atacora.
Après avoir exercé son recours gracieux le 03 mars 1995, monsieur
ADEBO BOUARINE Dine sollicite l'annulation de cette décision
d'abrogation par le juge. Le juge estime que « dans le cas
d'espèce, la décision querellée date du 13 février
1995 ; que le requérant a formulé son premier recours
gracieux le 03 mars 1995, lequel a été adressé au
Préfet du département de l'Atacora la même date, que la
réponse du Préfet du département de l'Atacora du 17 avril
1995, adressée à monsieur RAFIKOU ALABI, conseil du
requérant, Avocat à la Cour d'Appel de Cotonou est un rejet
implicite du recours gracieux, que le requérant doit avoir saisi la Cour
Suprême au plus tard le 17 juin 1995 »89(*).
La réponse du Préfet est intervenue le 17 avril
1995, donc dans les deux mois après l'exercice du recours administratif.
Le juge inclut aussi bien le dies a quo que le dies ad quem
pour déterminer les deux mois de recours contentieux.
Lorsqu'il s'agit de la décision émanant d'un
organe administratif à caractère juridictionnel comme le Conseil
d'Arbitrage, la HAAC, les conseils des Ordres nationaux, etc., c'est à
partir du jour du prononcé de la sentence que commence à courir
le délai contentieux.
La dernière hypothèse prévue par le
législateur concerne la possibilité de solliciter l'assistance
judiciaire (article 47 de l'Ordonnance 21/PR). L'assistance judiciaire est un
bénéfice accordé aux personnes qui sont pratiquement dans
l'impossibilité d'exercer leurs droits en justice, en raison de
l'insuffisance de leurs ressources.90(*)
Notons d'abord que le requérant n'est pas obligé
de constituer avocat en matière de recours pour excès de pouvoir,
pourtant obligatoire devant la Cour Suprême. En effet, cette dispense du
ministère d'avocat est prévue par l'article 42 de l'Ordonnance
n°21/PR
La conséquence de la demande de l'assistance judiciaire
est la prorogation des délais de recours contentieux. Lorsqu'elle est
accordée, « le recours peut être introduit à toute
époque »91(*). Par contre, si elle est refusée, le
requérant doit introduire le recours contentieux à partir de la
notification de cette décision de refus.
B) L'hypothèse jurisprudentielle
Elle concerne la saisine d'un juge incompétent. Il ne
doit pas s'agir d'une décision d'irrecevabilité. En raison de la
centralisation de la Chambre Administrative et de la multiplicité des
juridictions sur le territoire national, il est fréquent que le
requérant se trompe dans la saisine du juge compétent.
Cette saisine peut être faite soit après
l'exercice du recours administratif préalable ou même sans
l'exercice dudit recours. Il faudra que cette juridiction soit saisie dans le
délai de deux mois comme nous l'avons vu plus haut.
Mais dans le cas où interviendrait un
désistement devant la juridiction incompétemment saisie, le
délai de deux mois commence à courir à partir de la
signification du jugement donnant acte de désistement92(*).
On doit observer toutefois qu'une erreur sur une erreur ne
vaut. En d'autres termes, un deuxième recours effectué devant une
juridiction incompétente est insusceptible de conserver le
délai93(*).
Une fois déterminé le point de départ des
délais, reste maintenant à savoir quel est le régime
juridique des moyens du recours contentieux.
§2) LES MOYENS DE SAISINE DU JUGE
L'article 68 de l'ordonnance n°21/PR dispose
que : « La Chambre administrative est saisie par la
requête introductive d'instance signée du demandeur ou de son
Avocat...».
Le juge peut être saisi par des moyens classiques de
communication. Mais il est aussi possible d'user de nouveaux moyens de
communication. L'usage de chacun de ces moyens n'est pas sans
conséquence sur la validité du recours.
A ) Les moyens classiques de saisine du juge
Il existe deux moyens classiques de saisine du juge :
l'exploit d'huissier d'une part et la requête d'autre part.
En ce qui concerne la requête, celle-ci peut directement
être déposée au greffe du tribunal, ou être
acheminée par la poste. Les requérants résidant à
Cotonou peuvent déposer directement leur requête au greffe de la
Cour. Celle-ci est encore recevable lorsqu'elle est déposée
même le jour de l'expiration du délai, dans le cas du délai
non franc, ou le lendemain de l'expiration (mieux le jour suivant
ouvré), dans le cas du délai franc.
Mais, lorsque la requête est transmise par voie postale,
qu'elle date faut-il considérer ? Est-ce le jour de l'expédition
de la requête ou le jour où celle-ci parvient au greffe ?
Contrairement à la pratique civiliste en vertu de
laquelle le cachet de la poste fait foi, c'est-à-dire la
consécration de la théorie de l'émission, c'est
plutôt la théorie de la réception qui est consacrée
en droit public. Comme il a été jugé dans l'arrêt
YOUMBI précité, « un pli remis à la poste ne
devient la propriété du destinataire qu'à la date de
réception du pli par ce dernier et non à celle de son
expédition ».
B) Les nouveaux moyens de communication
Ces dernières années ont vu des progrès
considérables dans plusieurs domaines de la science. Il y a d'abord le
fac-similé (fax), qui comporte des avantages certains :
rapidité, preuve de l'envoi et de la réception. Les
progrès réalisés dans le domaine informatique ont
révolutionné le monde. Plus spécifiquement, l'Internet
assure de nos jours, une rapidité de transmission de l'information
à travers le monde à la vitesse de la lumière.
Pendant les élections municipales de 2003, la Cour
Suprême avait informatisé ses services et il était
possible, par courrier électronique, de la saisir directement du
contentieux relatif à ces élections.94(*) Mais il faut, après,
faire parvenir sa requête contentieuse ; la cour étant
déjà saisie par courrier électronique, l'arrivée
tardive de la requête ne devait pas être sanctionnée de
forclusion.
Section II: LA SANCTION DE LA NON-OBSERVATION DU
DELAI DU RECOURS CONTENTIEUX
Deux hypothèses peuvent être envisagées
quant à la requête formulée par le requérant. Soit
que le requérant saisisse le juge avant le délai prévu, et
la requête est prématurée, soit que celui-ci saisisse le
juge après l'expiration du délai, le recours est alors tardif.
§1-L'INEGAL TRAITEMENT DU JUGE FACE
AUX RECOURS PREMATURES
Le juge administratif béninois se montre en
général souple pour accueillir les recours précoces. Les
arguments varient de la peur présumée du requérant au
caractère exceptionnel du dossier, en passant par le silence de
l'administration pendant toute la durée de l'instruction.
A- L'acceptation sélective des recours
précoces
Dans un arrêt rendu en 1994, le juge fonde sa
décision sur la peur présumée du requérant pour
recevoir sa requête qui menaçait, selon lui forclusion.
Les faits de l'espèce sont relatifs à
l'arrêté de reclassement du Ministre des Finances des
nommés TOUKOUROU Toafiqui Mamadou, BIDOUZO Barnabé, ROKO
Jean-Marie Octave pour compter du premier janvier 1980 à la
catégorie des inspecteurs de finances.
C'est cet arrêté que lesdits requérants
défèrent devant le juge administratif le 09 février 1983
pour solliciter son annulation.
Statuant sur la recevabilité, le juge estime que
« les requérants ont introduit leurs recours devant la
juridiction de Céans par lettre du 09 février 1983 alors que le
recours gracieux était du 13 décembre 1982; qu'ils auraient
dû attendre en principe le 14 février 1983 pour saisir la cour,
mais que l'on considère que le 13 février 1983 était un
dimanche, on peut comprendre que lesdits requérants aient eu peur
d'être frappé de forclusion en fin de semaine; que pour ces
raisons, il y a lieu de décider souverainement que le recours des
requérants est recevable en la forme »95(*). D'après la
conclusion dégagée dans le cas du silence gardé, le
délai pour saisir le juge est un délai non franc. Or le recours
gracieux des requérants date du 13 décembre 1982, le silence de
l'administration devrait donc arriver à expiration le 13
décembre1982. C'est donc à partir de ce 13 décembre que
les requérants pouvaient introduire leur requête contentieuse
devant le juge. La forclusion s'analyse à l'expiration du délai
de recours et non au premier jour du départ des délais. Mais on
peut comprendre que lesdits requérants, comme le constate le juge aient
eu peur d'être frappés de forclusion
En dehors de ce cas où le juge a invoqué la peur
supposée du requérant, les autres cas l'ont été sur
le caractère exceptionnel et/ou du silence gardé par
l'administration pendant toute la durée de l'instruction; il s'agit des
arrêts ZONOU Daniel contre le Préfet de l'Atlantique jugé
en 1997, HOUEDANOU contre Préfet de l'Atlantique jugé en 1999 et
de l'arrêt DADO A. CODJO contre Etat béninois jugé en 1999.
Tous ces arrêts présentent un fond commun. Ils ont tous trait
à un problème domanial et juge conclut, plus
généralement que « bien que le recours du
requérant datant du (...) soit précoce, de le déclarer
à titre exceptionnel recevable.»
B-Le refus de recevabilité non justifié
dans certains cas
L'argument tiré du silence gardé par
l'administration pendant la durée n'a pas été
appliqué lorsque le juge statuait sur la recevabilité de la
requête de HOUETO Auguste contre l'Etat béninois en 1994. Admis
à la retraite par le décret N° 91-56 du 29 mars 1991
notifié le 20 juin 1991, le requérant saisit le Président
de la République d'un recours gracieux le 11 juillet 1991 et la Chambre
Administrative le 08 juillet 1991.
Statuant sur la recevabilité, le juge administratif
conclut ainsi : « Considérant (...) que le
requérant a saisi le Président de la République d'un
recours gracieux le 11 juillet 1991, qu'il disposait d'un délai de deux
(02) mois, jusqu'au 11 septembre 1991 pour saisir la Cour de son recours
contentieux en annulation dudit décret ; que considérant
cependant la requête non datée du requérant a
été enregistrée au secrétariat de la
Chambre Administrative de la Cour Suprême le 08 juillet 1991
(...), que donc son recours contentieux introduit bien avant l'expiration de
deux mois conformément à l'article 68 de l'ordonnance 21/PR du 26
avril 1966 (...) est irrecevable »96(*).
On peut se demander si le juge ne pouvait non plus constater
que pendant toute la durée de l'instruction, l'administration n'a pas
répondu et que donc ce silence constitue en l'espèce une
décision implicite de rejet.
Quid, en dehors de cette hypothèse, lorsque le
juge est saisi après l'expiration du délai ?
§2-LA SANCTION DE L'EXPIRATION DU DELAI DE
RECOURS CONTENTIEUX
Devant les juridictions, les règles relatives aux
délais présentent un caractère d'ordre public. Ainsi, le
juge peut soulever d'office la fin de non-recevoir tirée de l'expiration
du délai de recours contentieux. Les plaideurs peuvent la soulever
à toute hauteur de la procédure au cas où le juge ne le
ferait pas.
Quelques arrêts de la Chambre Administrative du
Bénin vont dans le même sens puisque le juge a conclu à la
forclusion des requérants. C'est par exemple le cas de l'arrêt de
ADJOU Moumouni Aboubakar c/Ministre de la Fonction Publique et de la
Réforme Administrative et Etat béninois, du 16 novembre 2000,
où le juge conclut que le requérant a accusé trente (30)
jours de retard pour saisir la Cour.97(*)
A-La forclusion tirée de l'expiration du
délai
Le juge béninois est formel si la requête est
introduite à l'expiration du contentieux. IL rejette la requête
introduite à l'expiration du délai. Il soulève ipso
facto la fin de non recevoir tirée de l'expiration des
délais contentieux.
Dans l'arrêt FALADE Mathias contre Etat béninois
du 04 octobre 1999, le juge a tout simplement constaté que « le
recours gracieux du requérant date du 25 novembre1974 et que son recours
contentieux a été introduit le 29 octobre 1991, soit plus de
seize (16) ans de retard ;
Considérant que le retard dans la procédure
de saisine de la Cour en contentieux est une cause de forclusion
»98(*).
L'arrêt AHOKPE H. Toussaint et consorts contre Ministre
de la Fonction Publique et de la Réforme Administrative99(*) est allé dans le
même sens. Mais l'expiration du délai de recours
entraîne-t-elle toujours la forclusion ? Il semble que non.
B- L'exception jurisprudentielle
A la question de savoir si l'expiration du délai de
recours entraîne toujours la forclusion, le juge béninois semble
répondre par la négative. Ce cas excepté peut s'analyser
comme une mauvaise foi de l'administration, qui se complaît dans les
promesses non tenues. Les faits de l'espèce concernent l'ordre de
recette n° 973 du Ministre des Finances refusant le remboursement des
cotisations aux auxiliaires de l'administration. C'est cet ordre que Monsieur
Stéphane François DJOSSINOU AHOUANDJINOU, greffier à la
retraite, défère devant le juge. Le juge fait un certain nombre
de constats en ce sens: «-l'acte attaqué est établi le
04 octobre 1991
-aucune preuve ne permet de fixer la date de notification
dudit acte
-après des recherches, AHOUANDJINOU F. D.
Stéphane reçoit la lettre du Directeur Général de
l'Office Béninois de Sécurité Sociale en date du 19 mai
1994 qui l'informe de ce que «le remboursement des cotisations aux
auxiliaires de l'Administration est hypothétique», il lui conseille
de se rapprocher de la Direction de la solde et de la dette
viagère ;
Qu'après beaucoup de promesses non tenues au niveau
de cette Direction, le requérant s'est résolu à adresser,
le 11 février 1997, au ministre des finances, un recours gracieux
tendant à la révision du taux de validation des services
auxiliaires;
Que face au silence de cette autorité pendant plus
de deux mois, AHOUANDJINOU F. D. Stéphane a saisi la Cour Suprême
aux fins d'annulation pour excès de pouvoir, de l'ordre de recette
incriminé;
Considérant, bien que le délai pour saisir
la cour soit largement dépassé, qu'il est de bon droit que le
recours du requérant soit déclaré recevable, car il est
difficile d'aller au contentieux alors que l'autorité chargée de
régler amiablement le problème qui lui est soumis, se
complaît dans des promesses qui malheureusement ne sont pas tenues
».100(*)
Une fois que la requête est adressée au juge, le
déroulement de la procédure dépend plus du
conseillé-rapporteur que des parties.
Chapitre II
LE DEROULEMENT DE LA PROCEDURE ET LES PROBLEMES DE
LA JURIDICTION ADMINISTRATIVE
L'action en justice n'est pas une obligation101(*) mais une faculté
laissée aux justiciables. Elle dépend donc de la volonté
soit du ministère public représentant de la société
entière et qui, en matière pénale102(*) a l'opportunité des
poursuites et est partie principale, soit du requérant lui-même,
demandeur à l'action.
En ce qui concerne le contentieux de l'excès de
pouvoir, en principe, le droit d'action n'appartient qu'à celui ou ceux
dont l'acte administratif lèse les droits. La saisine du juge
déclenche l'instance dont la chronologie (section 1) est très
marquée par le caractère inquisitoire avec des problèmes
inhérents au fonctionnement de la juridiction administrative au
Bénin (section 2).
Section I : LA CHRONOLOGIE DE L'INSTRUCTION
Lorsque la requête est enregistrée au greffe de
la Cour Suprême, celle-ci se voit attribuer un numéro
d'identification avant d'être classée dans une chemise.103(*) Le Greffier en chef,
conformément à l'article 50 de l'ordonnance N° 21/PR du 26
avril 1966 adresse le dossier immédiatement au président de la
Cour Suprême, qui saisit à son tour la chambre concernée,
dans le cas d'espèce, il s'agit de la chambre administrative.
Le Président de ladite chambre désigne un
conseiller-rapporteur qui procède à toute l'instruction de
l'affaire. Dans l'hypothèse où surviennent les incidents de
procédure (§1) la chambre statue et une fois l'affaire en
état elle doit être jugée (§2).
§1) LES INCIDENTS RELATIFS A LA PROCEDURE
CONTENTIEUSE
DU RECOURS POUR EXCES DE POUVOIR
Les incidents du procès sont les questions
soulevées au cours d'une instance déjà ouverte et qui ont
pour effet soit de suspendre ou d'arrêter la marche de celle-ci
(incidents proprement dits) soit de modifier la physionomie de la demande
(demande incidente).
Dans la mesure où le contentieux de l'excès de
pouvoir consiste à contester l'irrégularité d'un acte
administratif, la demande incidente est inopérante. Seules les autres
incidents peuvent être soulevés devant le juge administratif.
Nous n'évoquerons pas la récusation ici qui
consiste à écarter de la procédure un juge pour
partialité, pour la simple raison que cette procédure
nécessite obligatoirement le ministère d'avocat.104(*)
Avant d'invoquer les incidents proprement dits (B), il est
important de nous pencher sur l'action du conseiller-rapporteur (A) dans le
contentieux de l'excès de pouvoir au Bénin.
A-L'action du conseiller-rapporteur
Dans le contentieux de l'excès de pouvoir au
Bénin, le conseiller-rapporteur est un magistrat de siège de la
chambre administrative de la Cour suprême. Il occupe une place
maîtresse dans l'instruction et le caractère
inquisitorial105(*) fait
de lui la pierre angulaire de la procédure administrative
contentieuse.
Si la chambre est saisie simplement d'une requête, le
conseiller-rapporteur, par l'intermédiaire du greffier en chef
procède à la réunion de tous les éléments
nécessaires afin de constituer le dossier de l'instance. Parmi ces
pièces se trouvent les frais de l'instance, et les mémoires.
Dans le contentieux de l'excès de pouvoir au
Bénin, le requérant est astreint106(*), sous peine
d'irrecevabilité, de consigner au greffe de la Cour Suprême un
montant fixé à cinq mille (5000) francs CFA par le
législateur. Cette somme doit parvenir à la Cour dans un
délai de quinze jours de la mise en demeure qui sera faite au
requérant par notification administrative ou lettre
recommandée.
Ces frais peuvent cependant constituer une barrière
censitaire pour les populations africaines démunies. Dans le cas de la
France où la loi les fixe à 100FF107(*) soit 10.000francs CFA, le
Professeur René CHAPUS les qualifie d'un faux-pas législatif dont
il souhaite la correction. En effet, selon lui, « on ne saurait
accepter (en matière de justice, notamment) la dissuasion par l'argent
et que la juridiction administrative (et elle seule, d'ailleurs) devienne, et
de quelle anachronique façon, une juridiction à péage
»108(*).
A côté de cette taxe, il est encore
demandé au requérant à la chambre administrative de la
Cour Suprême du Bénin une somme de 1000 francs CFA.109(*) Une fois cette
formalité accomplie, le conseiller-rapporteur fixe un délai pour
la production du mémoire ampliatif.
Par mémoire ampliatif, il faut entendre le document
écrit émanant du requérant ou de son conseil, et contenant
de manière développée ses prétentions qui seraient
sommairement exposées dans la requête introductive d'instance.
Aux termes de l'article 51 al.4 de l'Ordonnance N° 21/PR
du 26 avril 1966, le conseiller-rapporteur assigne aux parties en cause un
délai pour produire leurs mémoires. Ce délai ne peut
être inférieur à un mois sauf en cas d'urgence reconnu par
ordonnance du Président de la Cour Suprême, sur requête de
la partie qui sollicite la réduction du délai.
Généralement, ce délai est de deux mois et si à
l'expiration de celui-ci, le requérant n'a pas produit ledit
mémoire, un délai plus court lui est encore accordé qui
est en principe d'un mois.
Mais le conseiller-rapporteur a une appréciation
souveraine pour proroger ces délais lorsque les documents du
requérant se trouvent à l'étranger.110(*) Lorsque à
l'expiration de cette mise en demeure, le mémoire n'est pas produit, le
conseiller-rapporteur conclut au désistement du requérant.
Mais si le requérant produit son mémoire, le
conseiller-rapporteur reprend le scénario, à l'exception des
délais d'acquittement des frais, pour requérir le mémoire
en réplique de l'administration. Si à l'expiration du
deuxième délai, c'est-à-dire le délai de mise en
demeure, l'administration ne produit pas le mémoire en réplique,
le conseiller-rapporteur conclut qu'elle a acquiescé. Il procède
de cette manière à la confrontation et à la recherche de
la vérité. Il respecte le principe du contradictoire.
Si théoriquement la charge de la preuve incombe au
demandeur, c'est-à-dire au requérant, le conseiller-rapporteur
dispose d'un arsenal de mesures lui permettant de participer directement
à la recherche de la preuve. Entre le conseiller-rapporteur et une
partie, il peut s'écouler près de trois mois pour la production
du mémoire et autres documents.
S'il faut encore répondre aux arguments
développés par l'autre partie, avec la même
procédure, environ un an peut s'écouler pour que le
conseiller-rapporteur rassemble tous les éléments essentiels.
C'est cela l'une des conséquences des formes, qui évite à
ce qu'on ait une justice expéditive.
S'il ne survient pas d'incident de procédure, le
conseiller-rapporteur met le dossier en état et le transmet au parquet
général.
B-Les incidents de procédure de l'excès
de pouvoir
Contrairement à la procédure civile, la
survivance des incidents en matière de recours pour excès de
pouvoir, est à la fois réduite et essentiellement d'origine
jurisprudentielle.
En dehors de la récusation sus-évoquée,
on peut avoir l'intervention, qui implique que de nouveaux participants, tiers
par rapport à l'instance, se joignent à elle.111(*) Il y a l'intervention
volontaire qui consiste en la saisine par voie de requête de la chambre
administrative par un tiers qui a intérêt. L'intervention
forcée se fait par assignation du tiers par l'une des parties au
procès, le demandeur, ou le défendeur.
Un autre incident concerne le renvoi pour suspicion
légitime. Il s'agit, selon le professeur DEBBASCH, de la
récusation collective de tous les membres d'un tribunal.112(*) Le Conseil d'Etat
(français), par un arrêt du 3 mai 1957 (Nemegyei), estime que
« tout justiciable est recevable à demander à la
juridiction immédiatement supérieure qu'une affaire, dont est
saisie la juridiction compétente, soit renvoyée devant une autre
juridiction du même ordre, parce que, pour des causes dont il appartient
à l'intéressé de justifier, le tribunal compétent
est suspect de partialité ».113(*)
Le renvoi pour suspicion vise donc à écarter du
jugement d'une affaire non seulement un juge déterminé, mais la
juridiction entière compétente.
Sur la base de cette jurisprudence, il n'est pas possible au
Bénin de soulever la question de renvoi étant donné que la
chambre administrative de la Cour Suprême est juge de premier et dernier
ressort en matière de recours pour excès de pouvoir114(*). Une fois qu'il a
été statué sur les incidents par le tribunal, le jugement
peut intervenir.
§2-LES DELAIS DE JUGEMENT
L'efficacité d'une juridiction peut être
appréciée par la durée de l'instruction. Plus longue est
l'instruction, plus grande est l'angoisse du justiciable.
En la matière, la durée de l'instance
administrative contentieuse au Bénin inspire quelques
appréhensions.
A-La durée du jugement
Si nous présentons les décisions rendues par la
chambre administrative de la Cour Suprême du Bénin depuis 1994
à 2000, on peut dresser le tableau ci-après. Au-delà de
cinq ans nous regroupons toutes les décisions rendues puisque les
délais varient de cinq ans à vingt-cinq (25) ans.
Il faut préciser que les sursis à
exécution ne sont pas comptabilisés dans le cadre de ce travail.
Tout simplement parce que le juge n'a pas statué sur l'acte même
que conteste le requérant.
Tableau 1 : Tableau récapitulatif de
la durée des décisions rendues par la chambre administrative de
la Cour Suprême du Bénin en matière de recours pour
excès de pouvoir de 1994 à 2000.
Année de la décision
|
Durée de la procédure devant la chambre
administrative
en matière de recours pour excès de pouvoir
|
1 an
|
1an -2 ans
|
2 ans -5 ans
|
5 ans
|
1994
|
1
|
0
|
3
|
6
|
1995
|
0
|
0
|
5
|
3
|
1996
|
0
|
0
|
0
|
0
|
1997
|
3
|
0
|
4
|
14
|
1998
|
1
|
2
|
3
|
5
|
1999
|
5
|
10
|
19
|
22
|
2000
|
5
|
11
|
15
|
32
|
De ce tableau il ressort que dix (10) décisions ont
été rendues en 1994, huit (8) en 1995, aucune (0) en 1996, vingt
et un (21) en 1997, onze (11) en 1998, cinquante et six (56) en 1999 et
soixante trois (63) en 2000. Au total, en sept années, la chambre a
rendu cent soixante neuf (169 ) décisions, soit en moyenne vingt-deux
(22) décisions par an.
Quinze (15) décisions sont intervenues dans un
délai de moins d'un an, vingt trois (23) décisions entre un an et
2 ans, quarante neuf (49) entre deux ans à cinq ans, et quatre-vingts
deux (82) décisions au-delà de cinq ans.
B-Une lenteur insupportable des décisions de la
Chambre Administrative de la Cour Suprême du Bénin
L'arrêt ZITTY Sylvain Victor est
révélateur de la lenteur de la Chambre administrative du
Bénin. C'est en 1972 que la Cour a été saisie mais la
décision n'est intervenue qu'en 1997, soit vingt cinq (25) ans plus
tard.
La lenteur de la justice constitue à la fois une vertu
et un vice115(*). Dans
le premier cas, si on estime que la prudence doit caractériser le juge
dans son jugement, on comprend que celui-ci veuille prendre du temps pour
rendre une décision juridiquement cohérente. Car « la
justice ne peut se fixer pour objectif primordial d'être rapide
»116(*) au
risque de constituer finalement une justice expéditive.
Mais dans le cas où les affaires mettraient trop long
devant la justice, la prudence se transforme en un vice, et cela devient
particulièrement préjudiciable pour les justiciables.
En ce qui concerne le contentieux de l'annulation où le
requérant demande simplement l'annulation d'une décision
illégale, lorsque la décision doit intervenir dans un
délai dépassant une année117(*), cela soulève des
problèmes.
Si nous partons donc de l'hypothèse émise par
monsieur VIGUIER Jacques, selon laquelle il y a problème lorsque la
décision intervient dans un délai dépassant une
année, on aura donc quinze (15) décisions normales soit environ
9% et 91% représente les décisions anormales. Il se pose donc un
problème soit de l'organisation, soit du fonctionnement de la chambre
administrative du Bénin.
Devant le Conseil constitutionnel en août 1958 (en
France), monsieur Michel DEBRE affirmait que : « la magistrature
administrative n'existe pas ; il y a seulement des fonctionnaires
administratifs qui occupent des fonctions de juge »118(*). Les décisions
tardives renforcent cette suspicion de la juridiction administrative comme
instrument du pouvoir exécutif. Et les citoyens seront fondés
à suspecter la juridiction administrative de complicité avec le
pouvoir car avant qu'intervienne la décision, il est possible que
l'irréparable se soit produit. Certes le requérant peut user des
mesures d'urgence119(*)
mais, si tout le monde doit faire usage des mesures d'urgence, on n'aura rien
résolu surtout que le juge apprécie souverainement la
recevabilité des requêtes en la matière.
Section II : UNE JUSTICE EN PANNE DE FONCTIONNEMENT
La justice est lente, lenteur souvent justifiée par la
prudence qui exige un examen minutieux de l'affaire. Mais cette lenteur
préoccupe de plus en plus le législateur qui fixe des
délais à la juridiction pour rendre la décision. Ainsi par
exemple, en vertu de l'article 120 de la constitution béninoise, la Cour
Constitutionnelle doit statuer dans un délai de 15 jours après
qu'elle ait été saisie d'une plainte en violation des droits de
la personne humaine et des libertés publiques.
Généralement, les décisions de cette haute juridiction
doivent intervenir dans un délai bien déterminé par le
constituant. Ce type d'exigence n'existe pas dans le contentieux administratif
au Bénin. Des causes réelles expliquent la lenteur de la
juridiction administrative du Bénin ( §1), lenteur
préjudiciable pour les droits du justiciable (§2).
§1-LES CAUSES DE LA LENTEUR DE LA JURIDICTION
ADMINISTRATIVE AU BENIN
La Cour Suprême du Bénin est la plus haute
juridiction de l'Etat en matière administrative, judiciaire et de
comptes. Toutefois, depuis le premier janvier 1999, la Cour Commune de Justice
et d'Arbitrage (CCJA) partage avec la Cour Suprême, la compétence
en matière de cassation, dans le domaine du droit des affaires tel que
prévu par l'acte uniforme de l'OHADA. Les problèmes relatifs
à la chambre administrative sont d'une part liés à
l'insuffisance des juges de ladite chambre (A) et, d'autre part ceux qui
portent sur son encombrement (B).
A-Les problèmes inhérents à
l'insuffisance des juges de la Chambre administrative
Le contentieux de l'excès de pouvoir au Bénin
relève de la compétence exclusive de la chambre administrative de
la Cour Suprême, qui couvre toute l'étendue du territoire
national. Dans le contentieux administratif en général et de
l'excès de pouvoir en particulier, le conseiller-rapporteur occupe une
place primordiale dans la conduite de l'instruction. En vertu de l'article 134
de la constitution béninoise, les présidents de chambre et les
conseillers sont nommés parmi les magistrats et les juristes de haut
niveau, ayant quinze ans au moins d'expérience professionnelle.
Par application de cette disposition, pour se retrouver
à la Cour Suprême, il faut avoir quinze ans au moins
d'expérience professionnelle. Pour le cas des magistrats, ils doivent
faire une ascension depuis le tribunal de première instance
jusqu'à la Cour Suprême en passant par la cour d'appel. Or,
pendant plusieurs années, avec les programmes d'ajustement structurel,
il y a eu un gel du recrutement des agents dans la fonction publique. Les
magistrats n'ont pas été épargnés comme le montre
une analyse de JAE : « Le recrutement des magistrats- qui n'en
continuent pas moins d'être formés, chaque année, aux frais
de l'Etat- a cessé depuis une quinzaine d'années, sous le poids
des contraintes imposées par les programmes d'ajustement structurel
»120(*).
Jusqu'en 2000, chacune des chambres comptait environ deux (2)
magistrats en dehors du président desdites chambres. Mais depuis 2000,
elle en compte chacune environ cinq (5). La Cour ne rend que quelques dizaines
de décisions chaque mois121(*), soit cent vingt (120) décisions par an.
L'augmentation du nombre de magistrat à la Chambre administrative peut
expliquer l'augmentation des décisions rendues par ladite chambre en
l'an 2000, au point où ces arrêts sont contenus dans un recueil
à part entière.
L'insuffisance des juges ne justifie pas à elle seule
la lenteur de la juridiction administrative, il y a aussi l'encombrement de
ladite chambre.
B-L'encombrement du prétoire
Unique juridiction en matière de recours pour
excès de pouvoir, la chambre administrative est également
compétente pour le plein contentieux, ainsi que le contentieux des
élections locales. Le recours pour excès de pouvoir a pour objet
d'assurer le respect de la légalité et, à ce titre il est
assez utilisé par les administrés. En France par exemple,
« le "stock" d'affaires en attente devant le Conseil d'Etat
était en 1953 et en 1986, juste avant les deux réformes
importantes du vingtième siècle, de 24.000, pour un taux annuel
de traitement, respectivement, de moins de 5.000 et de moins de 8.000
»122(*). Les
requêtes enregistrées par les tribunaux administratifs (France)
sont passées de 69.853 en 1990 à 126.410 en 2000.123(*)
Selon les statistiques du dernier recensement, le Bénin
compte environ 6.446 000 d'habitants124(*). A ce nombre si on ajoute les ONG, les autres
personnes morales, etc., par an, la chambre administrative est susceptible de
compter plusieurs milliers de recours en annulation pour excès de
pouvoir. Si nous prenons les cinq juges que compte la chambre administrative,
le rapport entre le nombre de la population et le juge est de 1.289.200. Ce
ratio dit toute l'insuffisance du personnel dont souffre la
justice.
Une étude faite par le Professeur Théodore HOLO
entre 1962 et 1984 montre que la Chambre administrative de la Cour
Suprême a rendu 333 arrêts ; en moyenne 15 arrêts par
an.125(*) Même si
nous considérons le nombre d'affaires pendantes devant la Chambre
administrative de la Cour Suprême du Bénin qui tourne autour de
cent (100), ce nombre va considérablement croître d'ici quelques
années. Avec la loi n ° 97-028 du 15 janvier 1999 portant
organisation de l'Administration Territoriale au Bénin, on
dénombre soixante-dix sept communes sur l'étendue du territoire
national. Les actes faisant griefs desdites autorités viendront
s'ajouter aux affaires en cours, auxquelles il faut ajouter le contentieux de
légalité qui naîtront entre les maires et les
préfets, autorités de tutelle.
On assiste à un accroissement réel et virtuel du
nombre d'affaires pendant que le personnel juridictionnel demande à
être étoffé.
§2-LES CONSEQUENCES DE LA LENTEUR DE LA
JURIDICTION EN
MATIERE DE RECOURS POUR EXCES DE POUVOIR
Le contentieux de l'excès de pouvoir est un
procès singulier, et ce en raison de son objet, qui consiste à
extirper un acte administratif illégal de la sphère juridique.
Lorsque se prolonge l'instruction et que la décision intervient
plusieurs années après la décision administrative,
inéluctablement, on assiste au maintien d'actes illégaux dans la
sphère juridique. Car, le recours pour excès de pouvoir ne
suspend pas l'application de l'acte attaqué. Cela n'est pas pour
crédibiliser la justice dans la cité. A côté de la
« consommation » de l'illégalité (A), il y a
la perte de confiance des administrés (B).
A-La « consommation » de
l'illégalité
Par consommation de l'illégalité, nous entendons
la production d'effets d'une décision administrative illégale,
avant son annulation par le juge.
Lorsque le requérant défère devant le
juge administratif un acte illégal, à moins d'user de la
procédure de sursis à exécution, qui, si elle est
acceptée, suspend l'exécution de la décision
attaquée, il doit exécuter d'office ladite décision.
Devant une décision administrative révoquant un
agent public, l'acte illégal aura produit tous ses effets. L'Etat de
droit voudrait que soit saisi le juge afin d'apprécier la
légalité de ladite décision. Mais si la décision du
juge doit intervenir cinq ans après l'édiction de l'acte, et que
le juge conclut même à l'illégalité, celle-ci a
déjà été consommée.
Pour des raisons politiques, les autorités
administratives, connaissant bien comment fonctionne la juridiction
administrative, prennent souvent des mesures illégales dont elles savent
qu'elles produiront leurs effets avant l'intervention de la décision du
juge.
Pour le cas d'une interdiction illégale d'une
réunion publique, le commissaire du gouvernement MICHEL n'a pas
manqué de constater que les décisions d'annulation du juge
« perdent une grande partie de leur valeur, lorsqu'elles interviennent
plusieurs années après la mesure d'interdiction : la situation
peut avoir profondément évolué entre temps et le
préjudice politique et moral subi par les organisateurs de la
réunion n'est guère atténuée par l'annulation ou
par l'octroi d'une indemnité ».126(*)
Une décision prononçant l'exclusion des
étudiants de l'université pour cinq ans par exemple, produira ses
effets, lorsque la décision du juge constatant
l'illégalité d'une telle mesure intervient six ans plus tard. Et
lorsque l'accès à l'université est subordonné
à un âge limité, la réparation d'un tel
préjudice est difficile.
On peut donc comprendre les raisons pour lesquelles le
législateur français est intervenu par la loi du 02 mars 1982
relative aux droits et libertés des communes, des départements et
des régions pour fixer des délais aux juges. En effet, «
le président du tribunal administratif ou son
délégué, peut dans les 48 heures de sa saisine par le
préfet, ordonner le sursis à exécution de l'acte d'une
autorité locale qui est de nature à compromettre l'exercice d'une
liberté publique ou individuelle ».127(*)
La Cour européenne des droits de l'homme veille
à la rapidité de la justice qui est un droit de l'homme. Elle a
condamné, en 1989, pour la première fois, l'Etat français
à indemniser un requérant ayant attendu plus de sept ans pour que
son recours soit définitivement tranché par le juge
administratif128(*).
Avait été méconnu l'article 6-1 de la Convention
européenne de sauvegarde des droits de l'homme, selon lequel «
toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue
équitablement ... et dans les délais raisonnables....
»
B-La perte de confiance des justiciables
Le général Mathieu KEREKOU, Président de
la République du Bénin, laissant exprimer sa colère,
affirmait le 06 mai 2000 que : « La justice est pourrie, et que les
juges favorisent l'impunité dans le pays ».129(*) Lorsque ce diagnostic
vient du premier magistrat, on peut se demander ce que peuvent penser les
citoyens ordinaires. La corruption est une gangrène qui mine les Etats
africains aujourd'hui. Lorsque ce fléau gagne les milieux judiciaires,
les conséquences sont graves ; il y a d'une part la perte de
crédibilité de la justice et d'autre part le sentiment de
vengeance qui habite les citoyens sans moyens130(*). Dans un Etat moderne le rôle de la justice
est d'assurer le respect de l'Etat de droit, gage d'un développement
socio-économique harmonieux.
Dans une étude portant sur la période de 1962
à 1980, le Professeur Théodore HOLO a montré, que sur 325
recours en annulation introduits devant la chambre administrative de la Cour
suprême du Bénin, 63 ont abouti à des arrêts donnant
acte aux requérants de leur désistement. Et il conclut que «
le virus du compromis avec l'administration n'épargne pas les
fonctionnaires et sur 98 recours qu'ils ont introduits entre 1970 et 1984, 27
ont fait l'objet d'une décision de désistement, soit de non-lieu
».131(*)
Mais n'est-t-il pas plus pragmatique pour un requérant
dont les droits sont violés d'entamer les négociations pour
trouver un compromis que de déclencher une instance
contentieuse dont la décision n'interviendra que plusieurs années
plus tard ?
Il semble que le « virus du compromis »
dont parle le Professeur HOLO soit justifié par la durée
anormalement longue des procès en recours pour excès de
pouvoir.
La construction de l'Etat de droit est perpétuelle et
le rôle de la justice et surtout du juge de la légalité est
primordial dans la protection des libertés. Son entrave par quelque
moyen que ce soit constitue un handicap à la construction de l'Etat de
droit.
Si la lenteur est telle qu'elle constitue un inhibiteur pour
les justiciables, les citoyens chercheront des moyens autres que juridiques
pour trouver des solutions à leurs problèmes. On aboutira
à légitimer cette interrogation de A. M. FLAMME :
« Une justice lente est-elle encore " La Justice " »
?132(*)
CONCLUSION DE LA DEUXIEME PARTIE
Les délais législatifs de recours pour
excès de pouvoir au Bénin coexistent désormais avec
d'autres délais admis par le juge administratif. Cela plonge le
justiciable dans un désarroi, ne sachant pas toujours à quoi s'en
tenir.
Par ailleurs, une fois la requête introduite, la
durée du jugement atteint parfois des proportions énormes,
à la limite inquiétantes. Cela peut avoir le don de priver
d'effets réels la décision juridictionnelle, quelle que juste
qu'elle soit. Cette lenteur peut faire que certaines décisions
d'annulations du juge n'aient qu'une portée purement doctrinale,
l'illégalité ayant peut-être déjà
été consommée. Ne peut-on pas y voir l'une des causes de
la désaffection des justiciables et par suite leurs défiances
juridictionnelles ?
CONCLUSION GENERALE
L'analyse de la durée des arrêts prononcés
par la Chambre administrative de la Cour Suprême du Bénin
révèle qu'environ 9% des décisions ont été
rendues en-deçà d'un an, 14% entre un et deux ans, 29% entre deux
et cinq ans, et 48% au-delà de cinq ans.
Le recours pour excès de pouvoir, de part son objet,
participe à la réalisation de l'Etat de droit. Il est
qualifié, à juste titre, par Gaston GEZE d'arme la plus efficace,
la plus économique et la plus pratique pour la défense des
libertés133(*).
Afin qu'il produise son plein effet, certaines conditions
doivent être remplies. A ce titre, on notera d'abord la clarification
procédurale, dans le sens d'une plus grande accessibilité de tous
à la justice, et ensuite la célérité dans le
traitement de la requête par le juge administratif.
Ces conditions remplies permettraient sans doute de
réduire de nombreux cas d'irrecevabilité qui empêchent
l'examen des requêtes au fond. Situation de nature à abandonner le
justiciable lésé dans ses droits à son triste sort. Une
telle réforme ne peut que contribuer à renforcer chez le citoyen,
le sentiment de sécurité juridique, essence de l'Etat de droit.
De plus, une amélioration de la procédure du recours pour
excès de pouvoir, notamment par une clarification des délais est
susceptible de contribuer grandement à la réalisation de cet Etat
de droit.
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IV- COURS POLYCOPIES, MEMOIRES ET
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V- PERIODIQUES
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Loi N° 98-004 portant Code du Travail en
République du
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l'administration territoriale de la République du Bénin et Loi
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République du Bénin, in Mission de Décentralisation,
Recueil des lois sur la décentralisation, Cotonou, Mission de
décentralisation, 2002.
TABLE DES MATIERES
DEDICACES...................................................................
ii
REMERCIEMENTS.........................................................
iii
SIGLES ET ABREVIATIONS
.......................................... v
SOMMAIRE...................................................................
vii
INTRODUCTION GENERALE
..............................................1
PREMIERE PARTIE : LES DELAIS DANS
LA PROCEDURE PRE-CONTENTIEUSE
.............................. 14
CHAPITRE I : LE PREALABLE AUX RECOURS:
L'EXISTENCE D'UNE DECISION ADMINISTRATIVE................
16
SECTION I : LES DECISIONS
ADMINISTRATIVES
AUTONOMES
17
§1-LES CRITERES DE L'ACTE
ADMINISTRATIF
UNILATERAL..............................................................
17
A-Les autorités auteurs de
l'acte............................................ 18
B-La portée de l'acte administratif
unilatéral.......................... 20
§2-L'EXIGENCE DE LA PUBLICITE DES ACTES
ADMINISTRATIFS
...................................................... 21
A-La distinction entre les actes soumis à
notification et
ceux soumis à
publicité.......................................................
21
a) Les éléments de définition
................................................ 22
b) Les conséquences attachées à
chacune de ces formalités............ 22
B-Un assouplissement à l'exigence de la
publicité :
la théorie de la connaissance
acquise....................................... 24
SECTION II : LES DECISIONS ADMINISTRATIVES
PROVOQUEES
............................................................... 26
§ 1-LA NECESSITE DE PROVOQUER LA DECISION
............ 26
A-L'auteur de la demande
.................................................. 27
B-La formulation de la demande
.......................................... 28
§2-L'ATTITUDE DE L'ADMINISTRATION FACE A
LA REQUETE DU REQUERANT
....................................... 28
A-La réponse de l'administration
........................................ 28
B-Le silence de l'administration
............................................ 29
CHAPITRE II : LE RECOURS ADMINISTRATIF
PREALABLE ET LA VARIETE DES DELAIS
DE RECOURS
ADMINISTRATIF......................................... 30
SECTION I : LES PROBLEMES LIES AU
RECOURS
ADMINISTRATIF PREALABLE ET SA NATURE
JURIDIQUE............... 31
§1-L'IDENTIFICATION DES AUTORITES
HABILITEES A RECEVOIR LE RECOURS
ADMINISTRATIF......................................................
31
A-Les difficultés liées à la
détermination
du supérieur
hiérarchique.......................................................
31
B-L'indifférence du juge béninois quant
à l'erreur dans la
saisine de l'autorité administrative
compétente......................... 32
§2-LA NATURE DU RECOURS
ADMINISTRATIF
PREALABLE........................................... 34
A-Le caractère d'ordre public attaché
au
recours administratif
préalable............................................. 35
B-Les exceptions au caractère d'ordre public
attaché au recours administratif
préalable................................ 35
SECTION II : LE REGIME DES DELAIS DU RECOURS
ADMINISTRATIF PREALABLE...............................................
39
§1-L'INSTABILITE JURISPRUDENTIELLE DE LA
COMPUTATION DES DELAIS DU RECOURS
ADMINISTRATIF............................................................
39
A-Le délai de recours administratif est un
délai franc................. 40
B-Le délai de recours administratif est un
délai non franc........... 41
§2-LA DETERMINATION DE LA DATE A
RETENIR ET SES EFFETS SUR LES
DELAIS......................... 41
A-La consécration de la théorie de
l'émission............................. 42
B-Les exceptions
jurisprudentielles....................................... 44
CONCLUSION DE LA PREMIERE
PARTIE........................... 47
DEUXIEME PARTIE : LES DELAIS DANS LA PROCEDURE
CONTENTIEUSE
.................................................................
48
CHAPITRE I : LES DELAIS D'INTRODUCTION
DE
L'INSTANCE.............................................................
50
SECTION I : LE DELAI DE SAISINE DU JUGE
ADMINISTRATIF........................................... 50
§1-LA COMPUTATION DES DELAIS
DE SAISINE DU
JUGE...................................................... 50
A-les hypothèses
législatives.................................................
51
B-L'hypothèse
jurisprudentielle........................................... 53
§2-LES MOYENS DE SAISINE
DU
JUGE........................................................................
54
A-Les moyens classiques de saisine du
juge.................... 54
B-Les nouveaux moyens de
communication..................... 55
SECTION II : LA SANCTION DE LA NON-OBSERVATION
DU DELAI DU RECOURS CONTENTIEUX
........................... 55
§1-L'INEGAL TRAITEMENT DU JUGE FACE
AUX RECOURS
PREMATURES........................................... 55
A-L'acceptation sélective des recours
précoces........................... 56
B-Le refus de recevabilité non justifié
dans certains cas.............. 57
§2-LA SANCTION DE L'EXPIRATION
DU
DELAI.......................................................................
57
A-La forclusion tirée de l'expiration du
délai........................... 58
B-L'exception
jurisprudentielle............................................ 59
CHAPITRE II : LE DEROULEMENT DE LA
PROCEDURE ET LES PROBLEMES DE LA JURIDICTION ADMINISTRATIVE .........
60
SECTION I : LA CHRONOLOGIE DE L'INSTRUCTION
.......... 60
§1-LES INCIDENTS RELATIFS A LA
PROCEDURE CONTENTIEUSE DU RECOURS
POUR EXCES DE
POUVOIR.............................................. 61
A-L'action du
juge-rapporteur............................................. 61
B-Les incidents de procédure de l'excès de
pouvoir.................... 63
§2-LES DELAIS DE
JUGEMENT......................................... 64
A-La durée du
jugement..................................................... 65
B-Une lenteur insupportable des décision de la
Chambre
Administrative de la Cour Suprême du
Bénin.......................... 66
SECTION II : UNE JUSTICE EN PANNE
DE
FONCTIONNEMENT....................................................
67
§1-LES CAUSES DE LA LENTEUR DE LA
JURIDICTION
ADMINISTRATIVE AU
BENIN.......................................... 67
A-Les problèmes inhérents à
l'insuffisance des juges.................. 68
B-L'encombrement du
prétoire............................................ 69
§2-LES CONSEQUENCES DE LA LENTEUR
DE LA
JURIDICTION.......................................................
70
A-La consommation de
l'illégalité.........................................
70
B-La perte de confiance des
justiciables................................. 72
CONCLUSION DE LA DEUXIEME PARTIE
............................ 74
CONCLUSION GENERALE
.................................................. 75
BIBLIOGRAPHIE................................................................
76
I-OUVRAGES
GENERAUX.................................................. 77
II- OUVRAGES
SPECIALISES............................................... 78
III-CODES, DICTIONNAIRES ET
RECEUILS............................ 78
IV- COURS POLYCOPIES, MEMOIRES ET SEMINAIRES............
79
V-
PERIODIQUES..................................................................
80
VI-
LEGISLATION................................................................
80
TABLE DES
MATIERES.................................................................
81
* 1 H. MENDRAS,
Eléments de sociologie, Armand Colin, Paris, 2002, p. 34.
* 2 La limitation de la
puissance de l'Etat était nécessaire pour garantir les droits et
libertés des citoyens. Car la confusion de tous les pouvoirs au sein
d'un seul et même organe de l'Etat était particulièrement
dangereux.
* 3 G. JEZE, cité par
A.- M. FLAMME, Droit administratif, Bruylant, Bruxelles, 1989, p.
613.
* 4 O. DUHAMEL, et Y. MENY,
Dictionnaire constitutionnel, PUF, Paris, 1992, p. 418.
* 5 Journal officiel de la
République du Dahomey, 1er juin 1966
* 6 G. DUPUIS, M.-J. GUEDON,
P. CHRETIEN, Droit administratif, 8e éd. Armand
Colin, Paris, 2002, p. 32.
* 7 TC, 8 Févr. 1873,
Blanco, GAJA, 12e éd. Dalloz, Paris, 1999, p. 2.
* 8 J.-L. MESTRE cité
par G. DUPUIS, M.-J. GUEDON, P. CHRETIEN, Droit administratif, op. cit. P.
52.
* 9 E. LAFERRIERE,
cité par G. DUPUIS, M.-J. GUEDON, P. CHRETIEN, Droit
administratif, Idem
* 10 CE, 13 déc.
1889, Cadot, GAJA, op. cit. P. 36.
* 11 Voir D. SOSSA,
Cours d'introduction à l'étude du droit, FASJEP/ UNB,
Cotonou, Inédit, 2000-2001, p. 27.
* 12 T. HOLO,
Contribution à l'étude de la chambre administrative : cas de
la chambre administrative de la cour populaire centrale du
Bénin,, in G. CONAC, et J. B. GAUDUSSON de (sous
la direction de), Les Cours Suprêmes en Afrique III « La
jurisprudence administrative », Economica, Paris, 1988, p. 14.
* 13 Il faut cependant noter
que les crimes du droit international les plus graves
énumérés par la Convention de New York du 26/11/1968,
entrée en vigueur le 11 novembre 1970, sont imprescriptibles, et ne sont
donc pas soumis aux délais. Il s'agit des crimes de guerre et des crimes
contre l'humanité.
* 14 G. DUPUIS, M.-J.
GUEDON, P. CHRETIEN, Droit administratif, op. cit. P. 572.
* 15 Arrêt N°
24/CA, SOCOBE-ICB-CCB c/ Ministre des Finances, Cour Suprême, Recueil
des arrêts de la Cour Suprême du Bénin, Cotonou, Cour
suprême, 1997, p. 173.
* 16 R. CHAPUS, Droit
administratif général, 15e éd. T. 1,
Montchrestien, Paris, 2001, P. 787.
* 17 Comme nous le verrons
dans la première partie de notre travail, la requête introductive
d'instance devant le juge administratif (au Bénin, comme au Cameroun)
est en principe subordonnée à l'exercice du recours
administratif préalable, qui est un moyen d'ordre public, et dont
l'inobservation par le requérant entraîne ipso facto le
rejet pour irrecevabilité.
* 18 R. CHAPUS, Droit
administratif général, 9e éd. T. 1,
Montchrestien, Paris, 1995, p. 6.
* 19 G. CORNU,
Vocabulaire juridique, 1e éd. PUF, Paris, 1987.
* 20 J.-L.
SERVAN-SCHREIBER, L'art du temps, Fayard, Paris, 1984, p. 19.
* 21 G. PAMBOU TCHIVOUNDA,
Les grandes décisions de la jurisprudence administrative du Gabon,
A. Pedone, Paris, 1994, p. 244.
* 22 La constitution
béninoise fait obligation à l'Assemblée Nationale de voter
la loi de finances au plus tard le 31 décembre. Le constituant a
prévu deux hypothèses : Soit que l'Assemblée
Nationale n'a pas pu voter la loi à temps, parce qu'elle a
été saisie du projet de budget en retard ; dans cette
hypothèse, le Président de la République demande à
l' Assemblée Nationale l'autorisation d'exécuter les recettes et
les dépenses de l'Etat par douzièmes provisoires. Soit c'est
parce que l' Assemblée Nationale n'a pas pu se prononcer au 31
décembre alors même qu'elle a été saisie dans les
délais. C'est dans cette hypothèse donc que le Président
de la République est habilité par la constitution pour mettre le
budget en exécution par voie d'ordonnance. C'est cette seconde
hypothèse que nous illustrons par les délais
impératifs.
* 23 En ce qui concerne
l'alinéa 6 de l'article57, il s'agit d'une habilitation exceptionnelle
à la Cour Constitutionnelle de déclarer une loi exécutoire
lorsque à la suite de la seconde délibération, le
Président de la République refuse la promulgation d'une loi
déclarée conforme à la constitution.
* 24 G. DUPUIS, M.-J. GUEDON,
P. CHRETIEN, op. cit. P. 440.
* 25 Idem
* 26 On peut penser que
l'inamovibilité conférée aux juges pendant la durée
de leur mandat peut être un gage d'impartialité. Mais le
renouvellement du mandat des juges, peut souvent amener ceux-ci à rendre
des décisions, sans toutefois heurter les intérêts de ceux
qui peuvent influencer le renouvellement de leur mandat.
* 27 JAE, n° 171 de
septembre 1993, p. 118.
* 28 G. DUPUIS, op. cit. P. 32.
* 29 F. JACOB, A.TISSERAND,
G. VENANDET, G. WIEDERKEHR, X. HENRI, Code civil, 101e
éd. Dalloz, Paris, 2002
* 30 Art. 1er du
Code Civil Suisse cité par S. CHATILLON, Droit des affaires
internationales, 2e éd. Vuibert, Paris, 2000, p. 59.
* 31 R. CHAPUS, Droit
administratif général, T. 1, 15e éd.
Montchrestien, Paris, 2001, p. 93.
* 32 Arrêt
N°68/CA-CS du 07/10/1999, Institut de Formation en Organisation et Gestion
Sociale ( INFOGES ) et Ecole « LOYALA » c/ MENRS, Cour Suprême,
Recueils des arrêts de la Cour Suprême du Bénin,
Cour Suprême, Cotonou, 1999, p. 483.
* 33 R. G. NLEP,
L'administration publique camerounaise « contribution à
l'étude des systèmes africains d'administration publique »,
LGDJ, Paris, 1986, p. 260.
* 34 C.DEBBASCH, Droit
administratif, 6e éd. Economica, Paris, 2002, p. 245.
* 35 Cette immunité
de juridiction est prévue par la Convention de Vienne sur les relations
diplomatiques du 18 avril 1961, la convention de Vienne de 1963 sur les
relations consulaires et la convention de Vienne de 1975 sur les organisations
internationales.
* 36 O. GAYE, M. S. DIOUF,
Le Conseil d'Etat & la pratique du recours en annulation, Dakar,
2001, p. 44.
* 37 Article 117 al. 2 de la
constitution béninoise
* 38J.-C. FORTIER
cité par G. DUPUIS, op. cit. P. 582.
* 39 R. G. NLEP, op. cit. P.
305.
* 40C. NACH
MBACK, Démocratisation et
décentralisation « Genèse et dynamiques comparés des
processus de décentralisation en Afrique subsaharienne »,
Karthala-PDM, Paris, 2003, pp. 32 et 33.
* 41 Article 153 de la loi
N° 97-029 du 15 janvier 1999 portant organisation des communes en
République du Bénin.
* 42 CE, 31 juillet,
Monpeurt, GAJA, op. cit.
* 43 J.-M. AUBY, et R. DRAGO,
cité par G. PAMPOU TCHIVOUNDA, op. cit. P. 284.
* 44 Arrêt N° 68/CA
du 07/10/1999, INFOGES et Ecole « LOYALA » c/ MENRS, op. cit. P.
482.
* 45 Arrêt N°
8/CA du 21 juin 1994, ZOKPE Albert c/ Etat béninois, Cour Suprême,
Recueil des arrêts de la Cour Suprême du Bénin,
Cour Suprême, Cotonou, 1994, p. 98.
* 46 Arrêt N°
97-07/ CA du 15 mai 1998, Collectif des Enseignants de l'ENA c/ MENRS, Cour
Suprême, Recueil des arrêts de la Cour Suprême du
Bénin, Cour Suprême, Cotonou, 1998, p. 223.
* 47 C. DEBBASCH, J.-C.
RICCI, Contentieux administratif, 6e éd. Dalloz,
Paris, 1994, p. 290.
* 48 Arrêt N°
5/CA du 16 janvier 1998, JOHNSON Léonard Désiré c/ MFPTRA,
Cour Suprême, Recueil des arrêts de la Cour Suprême du
Bénin, Cour Suprême, Cotonou, 1998, p.123.
* 49 Arrêt N° 55
du 19-08-1999, ZODOGANHOU Thomas c/ Ministre de la Défense Nationale,
Cour Suprême, Recueil des arrêts de la Cour Suprême du
Bénin, Cour Suprême, Cotonou, 1999, p. 410
* 50 Voir J.-C. KAMDEM,
Cours du contentieux administratif, T. 1, Inédit,
Université de Yaoundé, 1988-1989, p. 102.
* 51 CE, 12 avril 1972,
cité par G. VEDEL, P. DELVOLVE, Droit administratif, T. 2,
12e éd. PUF, Paris, 1992, p. 160.
* 52 Arrêt N°
77/CA du 04 octobre 1999, MONTCHO Marcel c/ Etat béninois, Cour
Suprême, Recueil des arrêts de la Cour Suprême du
Bénin, Cour Suprême, Cotonou, 1999, P. 331.
* 53 Arrêt ZODOGANHOU
Thomas c/ Ministre de la Défense Nationale du 12/08/1999, Cour
Suprême, Recueil des arrêts de la Cour Suprême du
Bénin, Cour Suprême, Cotonou, 1999, pp. 410 et 411.
* 54 Article 86 al. 2 de la
Constitution de la République du Bénin du 11 décembre 1990
* 55 C. DEBOUY, Les
moyens d'ordre public dans la procédure administrative
contentieuse, PUF, Paris, 1980, p. 546.
* 56 G. DUPUIS, op. cit. P.
579.
* 57 Art. 1er al.6
de la constitution béninoise
* 58 R . CHAPUS, op. cit. P.
450.
* 59 Arrêt n°
31/CA du 15 juin 2000, OGOUBIYI Donatien c/Préfet de l'Atlantique et
BATOSSI Léonard (intervenant), Cour Suprême, Recueil des
arrêts de la Cour Suprême du Bénin, Cour Suprême,
2000, p. 127.
* 60 Arrêt
N°57/CA du 19 août 1999, Cour Suprême, Recueil
des arrêts de la Cour Suprême du Bénin, Cour
Suprême, 1999, p. 414.
* 61 Arrêt N°
24/CA du 24 octobre 1997, SOCOBE-ICC-CCB c/ Ministre des Finances, Cour
Suprême, Recueil des arrêts de la Cour Suprême du
Bénin, Cour Suprême, 1997, p.174.
* 62J.- C. KAMDEM, op. cit.
P. 114.
* 63 Arrêt
N°97-07 / CA du 15 mai 1998, Collectif des Enseignants de l'ENA c/
MENRS, Cour Suprême, Recueil des arrêts de la Cour
Suprême du Bénin, Cour Suprême, 1998, p.221
* 64 CE, 3 nov. 1922,
Dame Cachet, GAJA, op. cit. pp. 235 et s.
* 65 Arrêt N°
83-2/CA du 4 août 1994, TOUKOUROU TAOFIQUI MAMADOU- BIDOUZO BARNABE- ROKO
JEAN-MARIE OCTAVE c/ Ministre du Travail et des Affaires Sociales, Cour
Suprême, Recueil des arrêts de la Cour Suprême du
Bénin, Cour Suprême, 1994, p. 125.
* 66 R. DEGNI-SEGUI,
Droit administratif général, 2e éd.
Abidjan, 1996, p. 431.
* 67 Article 141 de la loi
N° 97-029 du 15 janvier 1999 portant Organisation des communes en
République du Bénin, Recueil des lois sur la
décentralisation, Mission de décentralisation, Cotonou,
Mars 2002, p. 2.
* 68 G. DUPUIS, op. cit. P.
601.
* 69 Arrêt
N°7/CA du 21 juin 1994, HOUNSOU J. Abel c/ Ministre du Travail et des
Affaires Sociales, Recueil des arrêts de la Cour Suprême,
Cour Suprême, 1994, p. 104.
* 70 Arrêts N° CA
du 18 juillet 1997, Arrêt N°4/CA du 24 avril 1997, Cour
Suprême, Recueil des arrêts de la Cour Suprême du
Bénin, Cour Suprême, 1997, pp. 87 et 101.
* 71 Arrêt N°
61/CA du 19 août 1999, Robert BONOU c/ Président du Conseil
Economique et Social, Cour Suprême, Recueil des arrêts de la
Cour Suprême du Bénin, Cour Suprême, 1999, p. 313.
* 72 Article 142 de la
constitution béninoise
* 73 Bénin, Burkina
Faso, Cameroun, Centrafrique, Comores, Congo, Côte d'Ivoire, Gabon,
Guinée Bissau, Guinée Conakry, Guinée Equatoriale, Mali,
Niger, Sénégal, Tchad, Togo.
* 74 Le terme jugement
employé ici comprend les arrêts des cours d'appel et les jugements
des juridictions d'instance qui ne peuvent que faire l'objet de pourvoi
* 75 Article 14 al.5 du
traité du 17 octobre 1993 relatif à l'organisation pour
l'harmonisation en Afrique du droit des affaires
* 76 R. G. NLEP, op. cit. P.
276.
* 77 Arrêt N°8/CA
du 16 mai 1997, LALEYE Antoine c/ Etat béninois, Cour
Suprême, Recueil des arrêts de la Cour Suprême du
Bénin, Cour Suprême, 1998, pp. 118-119.
* 78 Arrêt N°
64/CA du 17 octobre 1999, YOROU MATAYI Jean c/ Ministre de la défense
nationale, Cour Suprême, Recueil des arrêts de la Cour
Suprême du Bénin, Cour Suprême, 1999, p. 402.
* 79 CAPITANT Henri, Les
grands arrêts de la jurisprudence civile, 10e éd.
1994, Par TERRE François et LEQUETTE Yves, Dalloz, Paris, p. 341.
80 GAJC, ibid.
81 Article 213 al. 1 du 17 avril 1993 relatif au
droit commercial général
* 82 Arrêt N°
79/CA du 04/11/1999, Auto-Ecole Moderne c/ Ministre de la fonction publique et
de la réforme administrative, Cour Suprême, Recueil des
arrêts de la Cour Suprême du Bénin, Cour Suprême,
1999, p.406.
* 83 J.-C. KAMDEM, op. cit.
P. 104.
* 84 (D. 2000 p.136, obs.
Lienhard) cité par J. BONNARD, Droit des entreprises en
difficultés, Hachette, Paris, 2000, p. 96.
* 85 ADD du 18/02/1999,
BABADJIDE Alphonse c/ Etat béninois, Cour Suprême, Recueil des
arrêts de la Cour Suprême du Bénin, 1999, pp.178-176 et
177
* 86 O. SCHUTTER de, F.
TULKEN, S. VAN DROOGHENBROECK, Code de droit international des droits de
l'homme, Bruylant, Bruxelles, 2000.
* 87 Arrêt N°
91-28/CA du 04 août 1994, HOUETO Augustin c/ Etat béninois,
Cour Suprême, Recueil des arrêts de la Cour Suprême
du Bénin, Cour Suprême, 1994, p. 108.
* 88 Arrêt N°
3/CA du 24 avril 1997, ZONOU Daniel c/ Préfet de l'Atlantique, Cour
Suprême, Recueil des arrêts de la Cour Suprême du
Bénin, Cour Suprême, 1997, p. 95.
* 89 Arrêt N°
57/CA du 19 août 1999, ADEBO BOUARINE Dine c/ Préfet de l'Atacora,
Cour Suprême, Recueil des arrêts de la Cour Suprême du
Bénin, Cour Suprême, 1999, p. 414.
* 90 O. GAYE, M. S. DIOUF,
op. cit. P. 67.
* 91 C. DEBBASCH, Droit
administratif, 6e éd. Economica, op. cit. P. 735.
* 92 C. GABOLDE,
Procédure des tribunaux administratifs et des cours administratifs
d'appel, 6e éd. Dalloz, Paris, 1991, p. 131.
* 93 C. DEBBASCH,
Institutions et droit administratifs, « l'action et le contrôle
de l'administration », 4e éd. PUF, Paris, 1998, p.
573.
* 94 Cette information nous
a été donnée lors de notre rencontre avec les
autorités de la Cour Suprême et plus particulièrement
celles de la chambre administrative.
* 95 Arrêt N°
83-2/CA du 04 août 1994, op. cit. pp.118 et 119.
* 96 Arrêt N°
91-28/CA du 04 août 1994, HOUETO Auguste c/ Etat béninois, Cour
Suprême, Recueil des arrêts de la Cour Suprême du
Bénin, Cour Suprême, 1994, p. 108.
* 97 Arrêt ADJOU
Moumouni Aboubakar c/ MFPRA, Cour Suprême, Recueil des arrêts
de la Cour Suprême du Bénin, T. 2, Cour Suprême, 2000,
p. 323.
* 98 Arrêt N°
72/CA du 04 octobre 1999, FALADE Mathias c/ Etat béninois, Cour
Suprême, Recueil des arrêts de la Cour Suprême du
Bénin, Cour Suprême, 1999, p. 459.
* 99 Arrêt N°
2/CA du 11 avril 1997, AHOKPE H. Toussaint et consorts c/ Ministre de la
Fonction Publique et de la Réforme Administrative, Cour Suprême,
Recueil des arrêts de la Cour Suprême du Bénin,
Cour Suprême, 1997, p. 92.
* 100 Arrêt N°
25/CA du 24 octobre 1997, Stéphane François DJOSSINOU
AHOUANDJINOU c/ Etat béninois, Cour Suprême, Recueil des
arrêts de la Cour Suprême du Bénin, Cour
Suprême, 1997, p. 180.
* 101 Il faut toutefois
noter que le législateur OHADA fait obligation au débiteur
(commerçants personnes physiques, personnes morales commerçantes
et à toutes les personnes morales de droit public, ainsi qu'à
toutes les entreprises publiques ayant la forme d'une personne morale de droit
privé) d'adresser par requête une lettre d'ouverture de la
procédure collective de redressement judiciaire et de liquidation des
biens dans les 30 jours qui suivent la cessation des paiements. L'assignation
du débiteur en redressement judiciaire par un créancier ne le
dispense pas de son obligation de déclarer la cessation des paiements.
Le manquement à cette obligation peut être sanctionné par
la faillite personnelle ou par l'infraction de banqueroute simple.
* 102 Sauf en
matière de délit de diffamation et du délit
d'adultère, bien qu'étant des infractions pénales, le
ministère public ne peut pas déclencher l'action publique. Le
retrait de la plainte éteint ipso facto l'action publique. Ce
qui n'est pas le cas lorsque par exemple, à la suite de l'infraction de
vol, la victime retire la plainte, l'action publique n'est pas éteinte.
* 103 Cette chemise sera
divisée en deux parties : l'une doit contenir toutes les
pièces du requérant (requête, la décision
attaquée, les enveloppes d'envoie, mémoires), l'autre partie est
réservée aux mémoires de la partie défenderesse
qui est la personne morale auteur de l'acte attaqué. Nous avons obtenu
cette présentation à la Cour Suprême.
* 104 C. DEBBASCH,
Droit administratif, op. cit. p.727.
* 105 La procédure
est dite inquisitoire lorsque le juge exerce un rôle
prépondérant dans la conduite de l'instance et la recherche des
preuves. Elle s'oppose à la procédure dite accusatoire, où
le rôle principal dans le déclenchement et de la conduite de
l'instance, dans la recherche des preuves, est réservé aux
parties.
* 106 Sont néanmoins
dispensés de ces frais les personnes morales de droit public, les
justiciables admis au bénéfice de l'assistance judiciaire, les
condamnée à une peine d'emprisonnement en matière
correctionnelle ou de simple police ainsi que les condamnés à une
peine criminelle.
* 107 Avec la
création de l'Euro (€), monnaie unique de certains pays de l'Union
Européenne, cette somme est évaluée à 15 €.
* 108 R. CHAPUS, Droit
administratif général, T. 1, 15e éd.
Montchrestien, Paris, 2001, P. 794.
* 109 C'est au cours de
notre entretien avec les autorités de la chambre administrative que ce
montant nous a été révélé.
* 110 Cette
précision nous a été donnée au cours de notre
entretien avec les autorités de la chambre administrative de la Cour
Suprême.
* 111 J. VIGUIER, Le
contentieux administratif, Dalloz, Paris, 1997, p. 120.
* 112 C. DEBBASCH, op. cit.
p.728.
* 113 Ibid.
* 114 L'exemple est fourni
par l'Arrêt SIDICK Joachim c/ Ordre national des pharmaciens du
Bénin, Cour Suprême, Recueil des arrêts de la Cour
Suprême du Bénin, T. 2, Cour Suprême, 2000, p. 273.
* 115 J.VIGUIER, op. cit.
P. 20.
* 116 J. VINCENT, G.
MONTAGNIER, A. VARINARD, cité par R. SOCKENG, Les institutions
judiciaires au Cameroun, 2e éd. Groupe
Saint-François, Douala, 1998, P. 160.
* 117 J. VIGUIER, op. cit.
P. 20.
* 118 Idem
* 119 Il s'agit ici en fait
du sursis à exécution, qui, lorsqu'il est admis, empêche en
principe l'administration à exécuter la décision
administrative jusqu'à ce que le juge tranche l'affaire au fond,
c'est-à-dire vérifier si l'acte est légal.
* 120 JAE, N° 311 du 19
juin au 2 juillet 2000, p. 56.
* 121 Ibidem
* 122 J. VIGUIER, op. cit.
P. 21.
* 123 G. DUPUIS, M.-J.
GUEDON, P. CHRETIEN, op. cit. P. 56.
* 124 S. CORDELLIER, B.
DIDIOT, L'état du monde : annuaire économique et
géopolitique mondial, 22e éd. La
Découverte, Paris, 2002
* 125 T. HOLO,
Contribution à l'étude de la chambre administrative : cas de
la chambre administrative de la cour populaire centrale du
Bénin, in G. CONAC, et J. B. GAUDUSSON de (sous
la direction de), Les Cours Suprêmes en Afrique III « La
jurisprudence administrative », op. cit. P. 17.
* 126 CE, 19 mars 1933,
Benjamin, GAJA, op. cit. P. 302.
* 127 CE, op. cit.
* 128 G. DUPUIS, M.-J. GUEDON,
P. CHRETIEN, op. cit. P. 57.
* 129 JAE, op. cit. P.
56.
* 130 V. Y. ADIGBLI,
L'accès à la justice en droit béninois,
Mémoire de DEA, Chaire UNESCO des droits de la personne et de la
démocratie, UNB, 1998-1999, p. 30.
* 131 Théodore HOLO
cité par A. LOKOSSOU, in Le contentieux administratif et l'Etat de
droit, Actes du séminaire d'échange et de perfectionnement,
organisé par l'Agence de la francophonie, Marrakech, 4-14
novembre 1996, p. 217.
* 132 A.-M. FLAMME, op. cit.
P. 613.
* 133 G. JEZE, cité par
A.-M. FLAMME, Droit administratif, Bruylant, Bruxelles, 1989, p.
613.