«Une entreprise peut avoir des représentations
commerciales à l'étranger, mais elle ne sera vraiment
multinationale que si elle produit tout ou partie de ses produits à
l'extérieur de son territoire national... la logique de la production,
insiste MUCCHIELLI, domine. » (1998, p. 18). Certes, notre effort
aura consisté à établir le parallélisme dans la
stratégie d'internationalisation entre les clubs de football et les
entreprises multinationales. La notion équivoque de production n'est
pas de nature à faciliter la comparaison.
Néanmoins, nous pensons que le recrutement des jeunes
joueurs, comme objectif visé par le Paris Saint-Germain, se rapproche
d'une activité de production, dont elle serait, mutatis mutandis,
l'élixir correspondant. Car, en définitive, ce qui compte ici est
plus la finalité du recrutement que le recrutement lui-même. Par
ce procédé, Paris espérait améliorer son
succès- ce qui se traduit par l'expression « prépare le
futur » que rapporte le PSG News-, ses résultats en
différentes compétitions et bien sûr, ses finances.
Mais, le choix d'Afrique n'est pas un pur hasard.
Si « les joueurs aux faibles rémunérations en
provenance d'Afrique » (Késenne S., 2000, p. 97) sont,
à cause de leur talent, bien appréciés et
recherchés par les clubs européens, combien à plus forte
raison coûteraient-ils sur place en Afrique, pour que les clubs ne
veuillent en faire la plaque tournante de leur économie
d'échelle ! UDRY (1998) répond que « ces jeunes
joueurs s'achètent pour un rien ». Et MUCCHIELLI (1998, p.
135) appelle cette stratégie « la recherche du moindre
coût », pour laquelle une firme peut aussi se
multinationaliser.
La stratégie et la logique de production, à la
base de l'activité du PSG au Burkina Faso, sont détaillées
par NYS J. F (1999, 30): « Le vaste exode des sportifs des pays en
développement concerne actuellement plus de 700 joueurs
brésiliens, et les clubs affinent leurs stratégies de recrutement
en organisant de véritables réseaux. A cet égard, citons
le projet du PSG d'ouvrir un centre de formation au Burkina Faso. Ce centre
verrait passer à peu près 6.000 jeunes joueurs de 14 ans, issus
de tous les pays limitrophes du Burkina Faso. Seuls les meilleurs
émergeraient et se rendraient à Tunis ; ils seraient
entraînés au centre de formation de l'Espérance de Tunis et
iraient ensuite à Genève, où le PSG a signé une
convention avec Le Servette. Enfin, les deux ou trois joueurs susceptibles
d'évoluer dans l'équipe première du PSG se retrouveraient
à Paris ». Interrogé bien avant sur ce projet
d'investissement, Le Roy Claude (1997), alors directeur sportif du club, reprit
que «nous avons découvert un peuple extraordinaire, beaucoup de
jeunes joueurs venus de tout le continent africain et un attaquant
particulièrement doué ».
Il faut ajouter que le club français avait
conçu de réaliser plusieurs accords de coopération avec
des clubs de football des pays aussi bien développés qu'en
développement. Tel est le cas de l'accord de partenariat qu'il
envisageait signer avec l'Espérance de Tunis «afin
d'échanger des cadres techniques et de repérer les meilleurs
joueurs africains ou même asiatiques » (PSG News du 05 janvier
1998) qui défraient de plus en plus la chronique du sport tunisien, en
phase de professionnalisme( http/www.ftf.org.tn/non_amateurs.htm).
En fait, la stratégie du PSG se voudrait
planétaire ou globale. C'est ainsi qu'en sus de l'accord de
coopération avec le club suisse de Le Servette, le club français
avait dans sa poche le projet de conquérir le Brésil, où
Ray, son ancien sociétaire, lui servirait d'agent commissionné,
mais également la Chine (PSG News du 05 janvier 1998). Tous ces accords
à but sportif se recoupent avec les stratégies que les
entreprises multinationales concoctent et mettent en oeuvre en vue de
s'internationaliser. En effet, comme le reconnaît MARTINEZ (1996, p. 71)
« dans ce processus complexe, mais de plus en plus évident, la
mondialisation de l'économie internationale a engendré toutes les
autres : celle de la technologie, des moyens de communication, de la
culture » et pourquoi pas celle des sports !
Schématiquement, on peut considérer Paris
Saint-Germain comme l'équipe- firme liée à des
unités de production et de formation situées un peu partout dans
le monde, soit par des accords de coopération (alliance
stratégique, cas de l'accord avec Espérance de Tunis,
conçu dans le seul but de s'échanger des cadres techniques et de
repérer des meilleurs joueurs africains et asiatiques), soit par une
sorte de greenfield investment, c'est-à-dire, la création
à l'étranger d'une unité de production
possédée à 100 % par la maison mère (cas du centre
Planete Champions International, P. C I).
Mais des informations récentes en notre possession
renseignent que Paris Saint-Germain aurait vendu le centre de formation Planete
Champions International à des privés Burkinabés et
étrangers. Malgré cela, Planete, qui ne se déclare pas
moins association à vocation humanitaire, dans ce sens avoué
qu'il encadre les enfants désoeuvrés, mais talentueux, continue
à jouer la même fonction, celle de former les jeunes joueurs venus
d'un peu partout d'Afrique.
Il prend des contacts avec des managers des clubs prestigieux
d'Europe et leur propose en vente les meilleurs sportifs. Les transfuges de
Planete Champions sont nombreux, chaque saison, à fouler le sol parisien
ou d'autres villes de France et du reste de l'Europe, pour faire des tests,
lesquels très souvent s'avèrent concluants. Les indemnités
de vente sont plantureuses et ne rentrent pas toutes dans les poches des
familles des joueurs concernés. Donc, le rôle d'une unité
de production de ce centre est bien maintenu, en dépit du fait qu'il ne
dépend plus du Paris Saint-Germain, son initiateur et créateur.
Certains clubs de France, par exemple ne s'interdisent plus de conjuguer leur
effort de recrutement de nouveaux joueurs avec Planete Champions. Tel est le
cas de Saint-Etienne.
Paris-Saint-Germain
PCI
Espérance deTunis
Servette
L'expérience tentée par Paris Saint-Germain
pourra être suivie. Mais celle d'Ajax d'Amsterdam paraît en
être une variante, aux caractéristiques nettes d'un investissement
étranger direct. C'est ce que nous allons démontrer.