Partie IV - Une reconnaissance peu valorisée des
ESHN ?
Le fait d'être un athlète de haut niveau, voire
« d'élite », on peut le supposer peut conférer un
certain prestige et une notoriété, ce qui peut renforcer
l'admiration de leurs pairs. Nous reviendrons donc sur leurs rôles
d'étudiante t d'athlète et la manière dont ils jonglent
avec ces deux identités.
Ainsi, nous pouvons nous demander si les étudiants qui
sont également des athlètes perçus comme des
étudiants « d'élite » ? Sont-ils respectés par
leurs pairs en général en raison de leur dévouement, leur
discipline et leur habileté dans leur discipline sportive ? Sont-ils
souvent perçus comme des figures inspirantes, en particulier s'ils ont
atteint un degré élevé de succès dans leur
discipline sportive ? Comment les étudiants sportifs de haut niveau sont
perçus dans le milieu scolaire ? La reconnaissance des étudiants
sportifs de haut niveau dans le cercle familial est-elle importante ? Comment
les étudiants sportifs de haut niveau sont reconnus dans les
médias ?
1. A l'université, des étudiants sportifs
de haut niveau peu valorisés ...
La position des étudiants athlètes
d'élite en matière de reconnaissance sociale est assez complexe.
Ils peuvent être sujets à certains stéréotypes
négatifs associés aux sportifs ou être bien vu par
l'ensemble de la communauté étudiante. Cependant, cette
reconnaissance peut avoir ses revers. Le succès sportif peut occulter
d'autres facettes de leur identité et engendrer une pression pour
maintenir leur performance à un niveau élevé. Les
attitudes des professeurs peuvent également varier. Certains peuvent
admirer le dévouement de ces étudiants et faire preuve de
flexibilité pour les aider à gérer leurs
responsabilités académiques et sportives. D'autres peuvent
être plus stricts en ce qui concerne les règles académiques
et ne pas faire de concessions pour les activités sportives.
« Le manque de compréhension des fois le
manque de réponses aussi parce que des fois, tu demandes, tu dis que tu
es pas là, je demande des cours, les documents, c'est sûr que des
fois, c'est compliqué de suivre un cours quand tu as quoi tout court
donc pour réviser c'est compliqué » (Alphonse/ M/ 21
ans/ M1 STAPS/ Football)
Alphonse rencontre des obstacles, indiquant un manque de
flexibilité et de compréhension de la part du système
éducatif. En se référant aux travaux du sociologue Dubet
(2002), qui a exploré comment les systèmes éducatifs
s'adaptent aux besoins individuels des étudiants, on peut analyser le
témoignage d'Alphonse. Dubet démontre que l'école, avec
ses propres normes
82
et règles, peut souvent se déconnecter des
réalités personnelles des étudiants. En d'autres termes,
la reconnaissance sociale ne se limite pas à un aspect individuel, mais
est également influencée par des facteurs sociaux plus larges.
Les étudiants qui pratiquent un sport de haut niveau jouent un
rôle significatif dans la dynamique et l'identité d'une
institution éducative. Cependant, ils peuvent également faire
face à des défis uniques en raison de la pression
académique et sportive qui leur est imposée. La reconnaissance
dont ils bénéficient de la part de leurs pairs et de leurs
enseignants peut varier en fonction de différents éléments
tels que la culture de l'établissement, les performances de
l'athlète et la visibilité du sport en question.
« Mais moi, ils ont toujours été
compréhensifs de temps en temps, il y en a plusieurs qui me demande le
résultat où j'en suis comment ça se passe quand je suis
amené à être absente, c'est très, très rare
que j'ai des remarques négatives c'est plutôt des bons courages
pour les compétitions. » (Laurie/ F/ 21 ans/ IAE School of
Management 2ème année /Saut en hauteur)
« Par exemple, le prof d'anglais là cette
année, il me pose des questions, il s'intéresse à mes
performances, c'est toujours sympa ça. » (Alphonse/ M/ 21 ans/
M1 STAPS/ Football)
L'encouragement et la compréhension que reçoit
Laurie de ses professeurs lorsqu'elle doit s'absenter pour des
compétitions sportives favorisent probablement son implication envers le
sport. De la même manière, Alphonse met en évidence
l'intérêt porté par un de ses enseignants à ses
performances sportives. Ces témoignages reflètent les
résultats de l'étude menée par Holt et al. (2008), qui met
en avant le soutien des camarades et des adultes pour le développement
positif des sportifs. Quant à Alphonse, l'intérêt que porte
son professeur d'anglais à ses performances sportives peut lui apporter
un sentiment d'appartenance et de soutien dans son rôle d'athlète.
Cela renforce également l'idée que ses activités sportives
sont valorisées et reconnues par d'autres, ce qui l'incite à
persévérer. Le soutien et les retours positifs d'autrui peuvent
intensifier l'engagement envers certaines activités et rôles. Par
ailleurs, les ESHN peuvent souvent bénéficier d'une
reconnaissance de la part de leurs camarades de classe. Un étudiant qui
excelle dans son sport peut être reconnu par l'obtention de prix ou de
médailles, ou par sa performance.
« Je crois dans la semaine et du coup quand j'arrive
avec mes 8-9 entraînements quand on pose des questions, on me regarde
avec des grands yeux en me disant, mais elle est folle. »
(Clémentine/ F/ 19 ans/ L1 STAPS/ Natation)
83
« Ils me disent aussi comment tu fais pour faire
ça ? » (Abdel/ M/ 19 ans/ L1 STAPS/ Handball)
« Ils t'encouragent enfin, tu leur dis quand tu as
des compètes, tu leur dis ouais, j'ai une compète tel jour et
sont derrière toi, elles vont te pousser, ouais c'est sympa. »
(Nadège/ F/ 21 ans/ M1 Histoire/ Aviron)
Ces désignations peuvent influencer leur estime
personnelle, leur conduite et leurs attentes. Dans les situations de
Clémentine et Abdel, l'étonnement et l'interrogation
suscités par leur dévouement sportif peuvent engendrer un
sentiment d'être mis à part ou marginalisé. La
théorie de l'étiquetage propose que les individus soient
impactés par les catégorisations et les perceptions sociales qui
leur sont assignées par autrui (Becker, 1963). Cependant, Nadège
vit une situation distincte où l'étiquetage est plutôt
positif, se manifestant par la motivation et le soutien qu'elle reçoit
de ses enseignants. Il convient de souligner que les expériences
individuelles peuvent diverger et que l'effet de l'étiquetage est
déterminé par les circonstances spécifiques et les
réactions des personnes impliquées (Becker, 1963). Le fait de
jongler entre les études et les exigences rigoureuses de l'entrainement
sportif nécessite une grande organisation et un engagement, ce qui peut
inspirer le respect. Cependant, il est important de noter que le charisme, est
fragile et dépend fortement de la reconnaissance continue du public. Si
un étudiant sportif de haut niveau ne maintient pas son niveau de
performance ou si ses actions contredisent l'image qu'il a construite, il
pourrait perdre cette aura de charisme.
« Il faisait pas de rotation [ne fait de
remplacement] donc et quand j'ai commencé c'était lui le
coach il faisait pas toujours f...] Lundi on a fait la même chose et
mardi aussi, au bout d'un mois et on évolue pas trop. f...] mes
camarades de classes savent que je suis sportif haut niveau et tous
après sans plus quoi, il y a plus à dire là-dessus. »
(Danilo/ M/ 24 ans/ L3 STAPS/ Basket)
Danilo, un joueur de basket universitaire, note que son
entraîneur ne fait pas de rotation dans l'équipe, suggérant
une approche d'entraînement traditionnelle et rigide. Cela pourrait
influencer le perfectionnement des aptitudes des joueurs et l'atmosphère
de l'équipe. Des chercheurs comme Jones et al. (2004) ont examiné
le rôle crucial des méthodes d'entraînement et des
dynamiques d'équipe sur la performance et l'esprit d'une équipe
sportive. Mais aussi, cela reflète la théorie de la reproduction
sociale, qui souligne comment les pratiques existantes sont
perpétuées même si elles ne sont pas optimales (Bourdieu
& Passeron, 1970). Pierre Bourdieu et Jean-Claude Passeron partent du
principe que les inégalités sociales sont reproduites d'une
84
génération à l'autre à travers les
institutions sociales, comme l'école ou le sport (Bourdieu &
Passeron, 1970). Il parle aussi de la monotonie des séances
d'entraînement. C'est un autre exemple de reproduction sociale où
les méthodes établies résistent au changement et à
l'innovation. Finalement, Danilo évoque la réaction
indifférente de ses collègues d'étude face à son
statut d'athlète d'élite. Même avec cette distinction, il
ne constate pas de grand intérêt ou de conversations
particulières à ce sujet. Ceci pourrait démontrer comment
la reproduction sociale peut normaliser certaines disparités ou statuts
sociaux. Par ailleurs, pour les étudiants sportifs de haut niveau,
s'engager dans des études académiques peut leur offrir un moyen
de libérer et d'exprimer leurs pensées et émotions de
manière différente. Se plonger dans l'univers des études
leur fournit un équilibre précieux, en leur permettant de
détourner leur attention du sport, du moins temporairement.
« Comme j'essaye d'être quand je suis avec eux,
j'essaie forcément de d'extérioriser et de pas parler de sport
une personne normale quand je suis avec eux après, je sais que des fois
c'est un peu relou pour eux. » (Noé/ M/ 19 ans/ IUT -
Technique de commercialisation 2ème année/ Aviron)
« Je mange jamais à l'IUT ou enfin ou quoi donc
voilà mais après, ils savent, je communique pas trop
là-dessus donc c'est ça que eux non plus, mais voilà
peut-être que c'est eux ils vont être au courant, ils vont te le
dire, mais c'est pas un sujet principal. » (Paula/ F/ 21 ans/ IUT -
DUT GEA 2ème année/ Marche athlétique)
Le comportement de Noé et Paula varie lorsqu'ils sont
en présence de leurs pairs. Noé évite de parler de sport
pour ne pas gêner ses amis, tandis que Paula est relativement
réservée sur ce sujet. Ces comportements peuvent être
attribués à leur identité sociale et à leur
aspiration à s'intégrer dans leur groupe respectif. Ces deux
étudiants mettent aussi en évidence l'effort pour se conformer
aux normes et attentes du groupe afin de préserver une harmonie sociale
(Tajfel & Turner, 1979).
« Des jaloux, des gens du club à
l'école en fait voilà à l'école. f...] Puis avec
ceux à qui je parlais plus, parce que j'ai pas beaucoup d'attaches, mais
c'était des critiques par rapport au sport. Des remarques comme, ah
c'est celle qui pue le chlore ou encore elle sait faire que des longueurs.
» (Clémentine/ F/ 19 ans/ L1 STAPS/ Natation)
Si Clémentine prend à coeur ces
étiquettes, elle pourrait commencer à se définir en
fonction de ces clichés négatifs, ce qui pourrait nuire à
son estime de soi, sa passion pour la natation, et même modifier son
identité sociale. La théorie de l'étiquetage
suggère que les étiquettes
85
attribuées à Clémentine pourraient
influencer sa propre perception d'elle-même ainsi que son comportement.
Par ailleurs, Clémentine pourrait aussi réagir à ces
étiquettes en intensifiant son engagement envers la natation, en
utilisant ces critiques pour se motiver à s'améliorer et
démontrer le contraire. Cependant, la réponse des individus face
aux étiquettes s'avère être complexe (Becker, 1963). Cette
réponse est déterminée par de nombreux facteurs : comme le
caractère de la personne, son contexte social, et sa capacité
à gérer les stéréotypes et les tensions sociales
(Becker, 1963).
En définitive, pour les professeurs, d'un
côté, certains professeurs sont arrangeants. Ils sont prêts
à ajuster les exigences des devoirs et les dates limites pour tenir
compte des obligations sportives des étudiants. Les étudiants
sportifs de haut niveau peuvent être perçus comme des
élèves talentueux et dynamiques, renforcés lorsqu'ils
maintiennent une communication avec ces derniers. Néanmoins, tous les
professeurs n'adoptent pas cette approche, certains peuvent être stricts
sur le maintien des normes académiques, insistant sur le fait que tous
les étudiants, y compris ceux qui sont aussi des sportifs de haut
niveau, respectent les mêmes critères. Les camarades de classe
peuvent contribuer à soutenir les étudiants athlètes
d'élite avec des encouragements et sont un moyen
d'extériorisation, mais cela n'efface pas la distance sociale qui existe
avec ces derniers. Les étudiants sportifs de haut niveau peuvent
également se sentir isolés si leurs responsabilités
sportives les empêchent de participer à des activités
sociales ou d'étude de groupe. En tant que camarades de classe, les
autres étudiants peuvent être attirés par le charisme des
étudiants sportifs de haut niveau.
2. ... source de fierté dans le cercle
familial
Le concept d'élite pour les étudiants sportifs
de haut niveau représente des athlètes qui se distinguent par
leur performance extraordinaire dans leur discipline sportive. Le sport
d'élite inclue les athlètes qui se distinguent par leur
performance extraordinaire (Fleuriel, 1997). Fleuriel souligne également
la différence entre le sport amateur et professionnel. L'excellence
académique fait partie intégrante de leur statut d'élite,
malgré les défis que cela peut représenter. Il convient de
souligner que le statut d'élite n'est pas seulement une position
reconnue, mais également une vision d'excellence, une série de
buts et d'ambitions qui incitent les étudiants sportifs à
chercher constamment à se surpasser et à dépasser leurs
propres barrières. Pour les athlètes étudiants
d'élite, leur position peut être perçue comme une
manifestation de charisme. Leur talent sportif, leur résolution, leur
discipline et leurs performances peuvent les différencier de leurs
pairs, leur conférant du respect et de l'admiration, voire un certain
niveau d'influence. En outre, leur capacité à jongler entre leurs
responsabilités académiques et leur carrière sportive
86
pourrait être vue comme une autre démonstration
de leur grandeur. De nombreuses familles éprouvent un sentiment profond
de satisfaction et de reconnaissance lorsque leur enfant se distingue dans un
domaine, y compris le sport. La réalisation de performances sportives de
haut niveau est souvent le fruit de longues années d'effort intense, de
passion et de sacrifices considérables. Lorsqu'un sportif parvient
à un tel sommet de succès, c'est un moment d'extrême
gratification pour sa famille. Les familles ont tendance à être
émerveillées par la force de caractère, le sens de
l'engagement et la capacité de rebondir dont leur enfant fait preuve en
poursuivant une carrière sportive intense tout en poursuivant ses
études. De plus, elles peuvent se sentir appelées à
soutenir leur enfant de diverses manières, par exemple en participant
aux événements sportifs, en contribuant financièrement ou
en offrant un soutien émotionnel et un encouragement constant.
« Comment ils me perçoivent, bah, je suis un
peu le chouchou, mais tu sais en rigolant quoi. Mes grands-parents à
chaque fois, ils font attention à moi et tout ça, ouais, à
peu près entre guillemets même s'ils sont contents pour moi, ils
veulent que je réussisse. » (Abdel/ M/ 19 ans/ L1 STAPS/
Handball)
« Après pour lui, mon père est fier, il
faut que je sois meilleur etc. mais il est fier, il sait à quel point
c'est compliqué de déjà d'arriver au niveau-là, ma
mère, je sais pas trop si elle se rend compte, elle s'en rend compte
quand elle voit des articles dans le journal des trucs comme ça ou sur
Facebook. Mais mon frère, je pense qu'il est fier de moi, même si
on se le dit pas, c'est le grand frère aussi, c'est pour ça que
c'est dans l'ensemble, ils sont fiers de moi et voilà après se
rendre compte, ils savent. » (Alphonse/ M/ 21 ans/ M1 STAPS/
Football)
Abdel ressent une pression bienveillante pour réussir
de sa famille qui le valorise en tant qu'athlète, ce qui peut influencer
son auto-perception et ses ambitions sportives. Alphonse est poussé par
la fierté de son père et le respect tacite de son frère.
Sa mère, qui comprend moins bien ses défis, découvre ses
succès par les médias, une forme de socialisation indirecte. Jay
Coakley (2001), souligne l'importance du sport en tant que facteur central dans
l'élaboration de l'identité des jeunes. Les récits
partagés par Abdel et Alphonse indiquent clairement que leur engagement
sportif est un élément fondamental de leur identité
personnelle, et que celui-ci a une grande importance au sein de leurs familles.
Réciproquement, leurs accomplissements et attitudes peuvent avoir un
impact sur les standards et principes de leurs familles et de leur
communauté plus étendue.
87
« Bon pour mes parents, je reste moi, clairement et
pour ma soeur pareil de toute façon, je pense que si je
commençais à prendre des ailes, je pense que mes parents me
redescendront très vite. Au niveau de l'entourage plus extérieur
pour mon papi, je suis une légende, je pense que ça me fait
plaisir parce que à l'inverse de mon père, mon papi est
très expressif sur ce qu'il pense et je pense que ça me fait du
bien aussi d'avoir quelqu'un qui me suit autant. » (Mandy/ F/ 20/ L3
STAPS/ Football)
Dans le cas de Mandy, les réactions diversifiées
de sa famille face à son statut d'athlète sont remarquables. Ses
parents et sa soeur, en la considérant d'abord comme "Mandy" et non
comme une sportive d'élite. D'après Messner (2009), le sport est
un espace où se construisent et se négocient les relations de
genre et les rôles au sein de la famille. L'admiration de son
grand-père peut stimuler la motivation de Mandy et renforcer son
sentiment d'accomplissement. Mandy est perçue comme une «
légende », son statut d'« élite » est donc mis en
avant. Cela pourrait signifier qu'il la considère comme une
réussite exemplaire, quelqu'un d'exceptionnel qui réussit
là où d'autres pourraient échouer. Le cas de Mandy
démontre clairement comment les rôles sociaux peuvent fluctuer
selon le contexte et les relations interpersonnelles. La famille joue un
rôle crucial dans le soutien des athlètes étudiants
d'élite. En retour, la famille peut bénéficier d'une
certaine reconnaissance et d'une augmentation de l'estime de soi grâce
aux accomplissements de l'athlète étudiant.
Dans certaines familles, le soutien est toujours
présent, mais une certaine indifférence peut se dégager.
Certains membres familiales peuvent se retrouver dans une posture
d'indifférence ou dans le non compréhension de l'investissement
de l'athlète dans le domaine du sport.
« Ça a pas changer grand-chose dans le sens
où oui, je fais du sport, mais avant tout, je reste leur fille ou leur
soeur ou leur petite fille même si le sport prend beaucoup de place dans
ma vie aussi dans là leur parce qu'en plus ils me soutiennent à
fond, quand c'est en France, ils viennent quasiment à toutes les
compétitions. » (Paula/ F/ 21 ans/ IUT - DUT GEA
2ème année/ Marche athlétique)
« Ça change rien que je réussisse ou
pas ça change rien en fait, c'est ils sont pas vraiment plus fiers si je
réussis pas, ils sont contents pour moi, mais enfin oui si j'ai
réussi c'est mieux. » (Odilon/ M/ 19 ans/ IDMC - L3 MIASHS
option MIAGE/ Escrime)
Paula considère que son statut familial en tant que
fille, soeur et petite-fille demeure inaltéré malgré son
implication intense dans le sport. Le soutien solide de sa famille lors des
compétitions en France indique que, bien que son rôle en tant
qu'athlète d'élite soit significatif,
88
sa place au sein de la famille reste centrale. La
théorie du rôle social décrit comment les individus
modifient et ajustent leur comportement en fonction des normes et attentes
sociales liées à leur statut au sein d'un groupe ou d'une
communauté (Merton, 1957). Cela témoigne aussi du fait que sa
famille a réussi à intégrer sa carrière sportive
à son identité sociale préexistante, sans perturber sa
place au sein de la famille. De son côté, Odilon indique que son
succès ou son échec dans le domaine sportif n'altère pas
la façon dont sa famille le perçoit. Cette déclaration
concorde avec l'étude menée par Coakley (2001), qui met l'accent
sur l'importance pour les familles d'accepter l'échec sportif comme un
élément constitutif du développement de l'athlète.
Il semble que sa famille le soutienne et soit fière de lui,
indépendamment du résultat de ses compétitions.
« C'est une famille classique il n'y a pas de relation
particulière parce que je suis sportif de niveau ou pas. Je pense pas
comme si j'étais la star de la famille, je suis rarement à la
maison en fait quand tu quand j'y suis, c'est plus heureux en profite, on passe
du temps ensemble plutôt que juste on parle du sport. » (Henri/
M/ 22 ans/ Faculté des sciences - L2 Maths/ Tir à l'arc)
La famille de cet étudiant n'a pas changé sa
vision depuis qu'il est ESHN. Il est loin d'être considéré
comme une star au sein de sa famille. Son identité familiale est
distincte de son identité d'athlète car leur vision est
sensiblement la même. En d'autres termes, son rôle familial demeure
stable malgré son implication dans le sport de haut niveau.
Finalement, dans certaines familles, les étudiants
sportifs de haut niveau sont perçus comme des individus qui suscitent la
fascination. Leurs succès sportifs sont une source de fierté et
de prestige pour leurs proches. Les étudiants sportifs de haut niveau
peuvent représenter une réussite exemplaire, montrant à
quel point le travail et la détermination peuvent conduire au
succès, ainsi, ils sont vus comme des « élites ».
Cependant, la perception de la famille peut être plus complexe et varier
selon les individus. D'autres membres de la famille, en revanche, peuvent
ressentir des sentiments d'indifférence, dans l'incompréhension
de leur passion. En effet, la réussite dans le sport de haut niveau peut
également conduire à une reconnaissance sociale plus large pour
l'étudiant et sa famille. Cela peut avoir des implications positives,
mais aussi négatives.
3. La médiatisation de leur pratique : entre
critiques et éloges
Les médias jouent un rôle clé dans la
reconnaissance et la mise en valeur des athlètes d'élite. Cela
englobe non seulement la médiatisation de leurs performances sportives,
mais aussi la
89
formation de leur image publique. Les médias peuvent
promouvoir un sportif, mettre en avant ses succès, mais aussi, dans
certains cas, soumettre sa vie privée à un examen minutieux et
une pression excessive. La reconnaissance et les encouragements reçus
sur ces plateformes peuvent avoir un impact significatif sur leur motivation et
leur confiance en soi. En s'appuyant sur l'approche interactionniste, nous
pouvons revenir sur l'idée que leur identité, leur statut social
et leur reconnaissance sont formés et discutés par le biais des
interactions sociales. Pour ESHN, les plateformes de réseaux sociaux
sont souvent un lieu où ils communiquent avec leur entourage. Ils
utilisent ces plateformes pour forger leur image publique et obtenir de la
reconnaissance pour leurs exploits sportifs. Cependant, les athlètes
sont fréquemment confrontés à des tensions entre leurs
identités d'étudiants et d'athlètes, qui peuvent
être en contradiction. L'interactionnisme symbolique nous permet de
comprendre comment ces athlètes concilient ces différentes
identités et comment ils gèrent les attentes et les pressions
liées à chacune. Par exemple, un athlète pourrait utiliser
des symboles ou des signes spécifiques pour signaler son statut
d'athlète d'élite en partageant des vidéos ou des
photos.
« Les victoires, on partage et des trucs comme dans
les vestiaires quand on gagne quoi, ça arrive souvent, oui, c'est vrai.
Alors les critiques cette année, non pas trop parce que c'est une belle
saison, les choix du coach sont bons vraiment et ceux qui viennent aux matchs,
on les connaît au niveau des réseaux, mais ouais, je pense, il y a
beaucoup de positif sur les réseaux sociaux Facebook, par exemple.
» (Alphonse/ M/ 21 ans/ M1 STAPS/ Football)
« Des photos des vidéos et des trucs comme
ça, mais après j'ose pas non plus mettre trop de de trucs, mais
ouais enfin si je mets quand même pas mal de trucs mais, mais pas trop
non plus. f...] Ouais sur Instagram, bah c'est souvent que on encourage et tout
ça quand je poste une photo enfin, j'ai des messages privés du
coup tu c'est ça peut être de la jalousie comme tu disais, mais
ouais, tu reçois que des encouragements. » (Nadège/ F/
21 ans/ M1 Histoire/ Aviron)
Les déclarations d'Alphonse et Nadège
démontrent une expérience généralement positive des
réseaux sociaux, bien qu'ils soient conscients des potentielles
réactions adverses. En effet, selon Rowe et ses collègues (2010),
les réseaux sociaux peuvent servir de plateforme permettant aux
athlètes de partager leurs expériences et d'interagir avec les
internautes. Les témoignages d'Alphonse et Nadège illustrent
l'usage des réseaux sociaux (Facebook et Instagram) pour communiquer
leurs succès, partager des images et des vidéos, et recevoir des
messages d'encouragement. Hutchins et Rowe (2012) mettent en évidence
que les réseaux sociaux
90
peuvent aussi créer de nouvelles dynamiques de pouvoir
entre les sportifs et leurs supporters, en particulier en ce qui concerne les
retours, positifs ou négatifs, que ces derniers peuvent faire.
En outre, les encouragements qu'elle reçoit sur
Instagram mettent également en évidence la théorie de la
reconnaissance sociale.
« Mais plus, on en a plus, on a des attentes des
autres et tout ça donc voilà mais après, c'est sûr
que ça prend une place importante quand même maintenant dans tous
les domaines, mais aussi dans le sport. J'estime être assez
apprécié après, on ne sait trop rien, mais non oui parce
que par exemple j'ai, c'est plus des encouragements. » (Paula/ F/ 21
ans/ IUT - DUT GEA 2ème année/ Marche
athlétique)
Le fait que Paula estime être assez
appréciée peut être considéré comme une
indication qu'elle perçoit un retour positif de la part de son «
miroir social ». Selon la théorie du miroir social de Cooley, notre
perception de nous-mêmes et notre identité sont grandement
influencées par la façon dont nous pensons être
perçus par les autres (Cooley, 1902). Ce concept est également
reflété dans les propos de Paula lorsqu'elle reconnaît que
l'attention et les attentes des autres ont un impact sur sa perception de soi
et son comportement. Elle mentionne spécifiquement que l'augmentation de
sa visibilité sur les réseaux sociaux entraîne des attentes
accrues de la part des autres. De plus, elle souligne l'importance croissante
des réseaux sociaux dans divers domaines, y compris le sport. Les
encouragements qu'elle reçoit viennent probablement renforcer cette
perception positive. A l'inverse, d'autres athlètes utilisent
très peu voire pas du tout, les réseaux sociaux pour interagir
avec les autres dans des disciplines d'une moins grande couverture
médiatique. La reconnaissance et les encouragements reçus sur ces
plateformes peuvent avoir un impact significatif sur leur motivation et leur
confiance en soi.
« Mais jamais, je communique rarement mes
résultats sur les réseaux où je parle rarement de mon
sport sur les réseaux, j'ai pas de page dédiée à
ça non plus j'ai pas de dire ça. Des fois, je poste une photo sur
Instagram en disant telle compétition et du coup en fait par cette
publication, j'ai des potes qui viennent en DM et qui viennent me demander bah
alors comment ça s'est passé tout ça et de là c'est
comme ça qu'on en discute. » (Henri/ M/ 22 ans/ Faculté
des sciences - L2 Maths/ Tir à l'arc)
« Franchement, c'est super compliqué parce que
moi, je déteste les réseaux, j'aime pas me mettre en avant, je
sais pas faire et du coup, j'ai ma page athlète plus mon Insta
franchement mon Insta, il y a j'avais pas j'avais pas Insta avant
91
d'avoir Joma, ça m'intéressait pas vraiment.
» (Lola/ F/ 26 ans/ Master de psycho obtenu/ 400m)
« Je poste rien de ma vie, ça
m'intéresse pas de partager le contenu là, parce que je trouve,
c'est pas, c'est vraiment et du coup, c'est pas forcément
intéressant et surtout ça ne sert à rien ça ne sert
à rien que les autres sachent ça. » (Odilon/ M/ 19 ans/
IDMC - L3 MIASHS option MIAGE/ Escrime)
La théorie de la présentation de soi, Goffman
compare la vie sociale à une pièce de théâtre, nous
jouons différents rôles sociaux et adaptons notre comportement en
fonction de la situation (Goffman, 1956). Sur Instagram, Henri partage parfois
des moments liés à son sport, le tir à l'arc. Il n'a pas
pour but de s'afficher constamment, mais ses publications occasionnelles
créent un espace d'interaction et de discussion avec ses amis autour de
sa passion. Lola exprime son désintérêt pour les
réseaux sociaux et utilise Instagram uniquement par obligation,
probablement en lien avec son statut d'athlète. Ce comportement illustre
comment les attentes sociales et professionnelles peuvent façonner notre
présentation en ligne, malgré nos propres inclinations. Odilon a
choisi de ne pas partager d'éléments de sa vie personnelle en
ligne, jugeant cela inintéressant et inutile pour autrui. Cela met en
lumière une autre stratégie de présentation de soi sur les
réseaux sociaux : l'absence de partage. Odilon semble penser que sa vie
privée ne doit pas être étalée au grand jour. Ces
exemples démontrent une approche différente de la gestion de
l'identité et de la présentation de soi sur les plateformes
numériques. En effet, la reconnaissance via les réseaux sociaux
peut grandement influencer l'expérience d'un athlète
étudiant d'élite. En effet, la reconnaissance varie en fonction
du sport pratiqué. Cette reconnaissance peut comporter des
bénéfices, tels que l'accroissement de la visibilité,
l'augmentation de l'estime de soi et des chances de parrainage. Cependant, elle
peut également engendrer des défis, tels que la pression de
maintenir une image publique irréprochable ou faire face à des
critiques et du harcèlement en ligne. Les médias peuvent
amplifier la pression de performance sur les athlètes étudiants
d'élite. Cela peut également présenter des
côtés négatifs. Les critiques soulignent souvent la
pression accrue que les médias peuvent imposer à ces jeunes
sportifs, en les poussant à toujours réussir et en les observant
constamment. L'image publique, la surveillance incessante, les attentes des
fans, les critiques et le harcèlement peuvent tous affecter le
bien-être mental de ces athlètes
« Après, j'ai eu des critiques sur les
réseaux sociaux après les matchs, quand tu fais un bon match tout
le monde t'aime et inversement. Dans le commentaire du coup en fait ça
peut être tu peux pas, c'est de la lumière à l'ombre, je me
suis déjà fait insulter sur les
92
réseaux et la semaine d'après, j'ai
été le meilleur joueur de ligue 2. » (Abdel/ M/ 19 ans/
L1 STAPS/ Handball)
La perception d'Abdel de lui-même en tant que joueur de
handball est fortement influencée par l'opinion que les autres expriment
sur les réseaux sociaux. Lorsqu'il réalise une performance
exceptionnelle lors d'un match et qu'il reçoit des éloges sur ces
plateformes, il se perçoit et est perçu par les autres comme un
excellent joueur. La réalité sociale est construite
collectivement par les individus à travers les interactions sociales et
la communication (Berger & Luckmann, 1966). Cependant, s'il ne joue pas
bien et fait l'objet de critiques. Sa propre vision se transforme ainsi et il
peut commencer à se considérer comme un joueur moyen ou mauvais.
Il ressort de cette situation qu'Abdel ne vit pas une réalité
fixe. Au contraire, sa réalité est en perpétuelle
évolution, modelée par ses interactions sociales. C'est un
processus ininterrompu où la réalité est constamment
créée, détruite et recréée, selon les
réactions des autres et son auto-évaluation personnelle (Berger
& Luckmann, 1966). En outre, certaines disciplines sportives
bénéficient d'une plus grande couverture médiatique et,
par conséquent, d'une plus grande reconnaissance que d'autres.
« Oui, les matchs sont retransmis sur un site
internet, ça nous permet de voir ce qu'il faut corriger, ce qui est
bien, nos sensations etc. donc ça, c'est utile parce que on regarde
aussi nous ce qu'on a fait sur les matchs précédents des fois, on
revient sur ce qui n'a pas été ou, mais voilà ça
nous sert pour nous. » (Alphonse/ M/ 21 ans/ M1 STAPS/ Football)
« On passe sur la chaîne du Lux et je pense que
c'est toutes les semaines. » (Danilo/ M/ 24 ans/ L3 STAPS/ Basket)
Les témoignages soulignent l'importance pour les
joueurs de revoir leurs matchs précédents et d'analyser leurs
performances. Alphonse met en avant l'importance des retransmissions
numériques de leurs matchs, qui leur offrent l'opportunité
d'analyser leurs performances, d'identifier les aspects à
améliorer et les points forts. Cette pratique s'aligne sur les
recherches de Ray Gamache (2015) qui se penche sur l'utilisation des
médias par les sportifs pour étudier et optimiser leurs
performances. De son côté, Danilo signale que leurs matchs sont
diffusés sur une chaîne de télévision, ce qui peut
être perçu comme un signe de reconnaissance et de
visibilité pour leur équipe. Ce phénomène rejoint
les observations de Rowe (2004) qui étudie comment les médias
peuvent renforcer la visibilité des sportifs et des équipes,
contribuant de la sorte à leur popularité et à leur
renommée publique.
93
En utilisant ces connaissances, les joueurs évaluent
leur propre performance et cherchent à s'améliorer. Par
opposition, d'autres disciplines sportives bénéficient d'une
attention limitée.
« On parle de nous après six mois quand je
fais des quelques résultats dans la région et tout ça ou
même à la télé c'est pas arrivé, tu sais
régional ou départemental qui parle de tes performances si tu
arrives à faire un bon truc et tout hein ouais et après il y a
des gens qui ont encouragé sur les réseaux, il y en a d'autres
qui peuvent critiquer. » (Noé/ M/ 19 ans/ IUT - Technique de
commercialisation 2ème année/ Aviron)
Dans le contexte de Noé, sa présence
médiatique est le résultat de ses réussites en aviron.
Cette visibilité lui offre une reconnaissance de ses efforts et de ses
réussites, ce qui peut être extrêmement valorisant. Fraser
indique que la couverture médiatique peut à la fois servir
à valider et renforcer l'identité, l'importance et la
légitimité d'une personne ou d'un sujet, mais peut
également devenir un canal pour les critiques et l'exclusion (Fraser,
2009). Bien que les performances de Noé dans sa région ou son
département ne soient peut-être pas considérées
comme suffisamment remarquables pour susciter l'intérêt des
médias traditionnels, les réseaux sociaux constituent une
plateforme alternative où il peut attirer l'attention des utilisateurs
et recevoir des encouragements, ainsi que des critiques éventuelles.
Pour conclure, l'exposition médiatique des
étudiants athlètes d'élite sur les réseaux sociaux
présentent deux aspects. D'un côté, cela leur offre des
opportunités sans précédent en matière de
visibilité, de reconnaissance et d'avancement professionnel. De l'autre,
cela les expose à un niveau élevé de pression et de
critiques, souvent exacerbé par l'implacabilité inhérente
aux réseaux sociaux. Par exemple, certains sports plus visibles ou
bénéficiant d'un soutien institutionnel accru peuvent engendrer
une plus grande reconnaissance pour les étudiants qui les pratiquent. Le
maintien de l'équilibre entre les éloges et les critiques sur ces
plateformes numériques peut s'avérer complexe et avoir des
conséquences durables sur la santé mentale et émotionnelle
de ces étudiants athlètes. Enfin, les réseaux sociaux
permettent aux étudiants sportifs de haut niveau de développer
une identité en dehors du sport en partageant des aspects de leur vie
quotidienne, de leurs intérêts et de leurs opinions. Ces
interactions en ligne renforcent leur identité sportive,
élargissent leur réseau social et attirent l'attention des
médias.
94
DISCUSSION
1. Réponses aux hypothèses
La première hypothèse que nous avons
soulevée, consistait à affirmer que ces étudiants sportifs
de haut niveau s'attachent à mettre en avant le manque de temps et la
fatigue dans la conciliation entre le sport et les études. D'une part,
le manque de temps n'a pas été explicitement souligné par
les ESHN, mais ils précisent que chaque moment de la journée est
millimétré, comme nous l'avons bien dit avec l'approche de
l'organisation militaire. En effet, ils ont une tendance à anticiper les
échéances à venir, à optimiser leur temps
efficacement. D'autre part, la fatigue était un élément
qui pouvait revenir dans le discours de nos enquêtés, notamment
dans la description d'une journée type qui allie sport et études.
Nous avons pu constater que le stress est le mot qui revenait plus souvent que
la fatigue. Ce stress était lié généralement
à l'accumulation de deux facteurs qui pouvaient se chevaucher comme les
compétitions et les examens.
La deuxième hypothèse établie s'attachait
aux imprévus ou aléas sportifs probables chez nos
étudiants sportifs comme le surentraînement, les blessures, un
déclassement, un changement de club ou encore un
déménagement : la baisse de motivation pourrait être
observée pendant ces périodes dites d'imprévus. D'un
côté, ces aléas pouvaient engendrer une baisse de
motivation, comme la blessure, le manque de pratique sportive sur une
durée prolongée pouvait impacter psychologiquement nos ESHN
négativement. Mais d'un autre côté, certains de nos
enquêtés ont stipulé que la période de blessure
pouvait donner lieu davantage de temps à consacrer pour leurs
études.
La troisième hypothèse se concentrerait sur le
choix du sport et les études sélectionnées par ces
étudiants sportifs de haut niveau qui dépendent de l'origine
sociale et de l'influence des pairs, les vocations et la construction du projet
de vie des étudiants sont inséparables de ces influences
sociales. Nous avons l'avons vu précédemment, le sport
sélectionné par les étudiants dépend en majeure
partie du milieu social dans lequel l'individu évolue. En outre, les
parents ont un avis à donner sur leur enfant quant à la
conciliation entre le sport et les études, ceux des classes populaires
privilégient le sport alors que ceux des classes aisées ont une
méfiance vis-à-vis du sport.
Enfin, la dernière hypothèse concernait les
étudiants qui privilégient le sport aux études car les
gains potentiels dans le monde professionnel sont importants dans certains
sports. En effet, cette hypothèse est étroitement liée
à la précédente, les individus des classes populaires
seront
95
potentiellement investis davantage dans le sport. En
particulier, les sports rémunérateurs sont investis davantage par
ces individus. Bien sûr, il existe des exceptions, tous les sportifs
issus de milieux populaires ne pratiquent pas tous le football ou le
basketball. En définitive, nous avons remarqué que nos ESHN qui
pratiquent des sports très rémunérateurs, la
volonté était toujours d'allier le sport et les études
dans un certain équilibre, alors que certains ESHN des sports moins
rémunérateurs, certains privilégiaient leurs études
sur le sport.
2. Limites
Au début de notre étude, nous nous sommes
focalisés sur la gestion du temps chez nos ESHN, mais au fur et à
mesure de l'étude, nous avons remarqué que cette approche
était réductrice, et non adapté avec nos résultats
: nos entretiens et nos observations. Nous avons alors choisi de nous focaliser
davantage sur plusieurs approches diverses et variées. De plus, cette
étude a été réalisée sur une durée
qui nous ne permettait pas de pouvoir nous étendre davantage, le temps
était limité, en ce sens, nous aurions pu également faire
passer des questionnaires qui nous auraient davantage aidé pour tenter
de mieux représenter la pratique de nos ESHN à travers des
statistiques.
Autre limite que le temps, nous avons également
l'éloignement géographique, nous avons pris en compte uniquement
les ESHN de l'Université de Lorraine, il aurait été
très compliqué de réaliser des entretiens avec des ESHN
d'autres régions ou départements, sans avoir de contact physique
avec eux. Il aurait été possible d'étudier les
lycéens qui sont en sport-études et qui projettent de devenir des
ESHN dans le but de voir l'émergence de leurs pratiques.
Nous aurions pu aussi nous attacher aux devenirs des ESHN, ou
plutôt les anciens ESHN, ont-ils arrêté le sport au profit
du travail ? Est-ce que leur sport leur permet de vivre de leur passion ?
Arrivent-ils à concilier le sport et le travail ? Nous aurions pu
interroger des entraîneurs, professeurs ou même les parents des
ESHN, ils jouent un rôle primordial dans leur pratique, mais nous avons
choisi de nous focaliser sur les ESHN. Cela aurait demandé une certaine
proximité avec nos enquêtés, et en ce sens, nous avons
voulu interroger des responsables des ESHN pour permettre de comprendre le
fonctionnement global du statut des ESHN, mais cela n'a pas été
possible. Nous nous sommes contentés de regarder sur le site
dédié aux ESHN pour en savoir davantage.
Aussi, pendant les entretiens, un enquêté nous a
témoigné qu'il ne pouvait pas s'exprimer correctement en
français, car il était originaire du Luxembourg. Durant deux
entretiens, nous
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avons été coupés plusieurs fois, car nous
étions positionnés dans des couloirs de campus universitaires
où il y avait trop de bruit.
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