Dans le milieu professionnel, les émotions doivent
être gérées par les travailleurs et dans les
établissements de santé, les professionnels ont un travail
émotionnel qui est encore mal reconnu malgré son importance pour
la qualité des soins et pour leur santé. De ce fait, ils
bénéficient de formations dans lesquelles ils apprennent des
techniques afin de maitriser leurs émotions : on y retrouve de la
relaxation par exemple.
Ce travail émotionnel est primordial lors des soins.
Il y a trois stratégies collectives de travail
émotionnel qui sont mises en place par les soignants :
- Premièrement, il y a « valorisé, donner
du sens » : C'est-à-dire les contraintes et les difficultés
rencontrées sont valorisées et ne deviennent plus si
pénible.
- Ensuite, la deuxième stratégie est «
agir ensemble », elle correspond à l'entraide de l'équipe
afin de résoudre les difficultés.
- Enfin, la 3ème stratégie est «
se positionner, contester ».
Il est donc important de partager ses émotions afin
d'y faire face, au sein d'un groupe de parole, et de construire un sens
acceptable aux difficultés.
Afin de se protéger en tant que soignant, il est donc
essentiel de savoir mettre des limites à ses émotions. Ainsi
Martine SCHACHTEL, ancienne infirmière, a dit «
l'infirmière doit savoir discrètement retenir ses
émotions, ne pas laisser paraître la peur, l'angoisse, le
dégoût, la pitié 26».
25 « L'intelligence émotionnelle, un outil de soins
», Margot Phaneuf
26 Martine Schachtel, « J'ai voulu être
infirmière ». page 213
22
Lors de l'annonce d'un diagnostic, le soignant est donc le
premier à être confronté à cette mauvaise nouvelle.
Celui-ci se sent donc coupable de devoir annoncer cette mauvaise nouvelle au
patient. Dans ces situations, le soignant se projette donc sur sa propre vie et
donc va angoisser sur sa propre mort en tant qu'être humain, cela est
donc un phénomène naturel. Il sera donc important de faire preuve
de capacité d'adaptation afin de se préparer à ce qui
pourrait arriver. Il faut s'adapter à chaque patient, à chaque
pathologie, à chaque histoire de vie ...
Dans le livre, « le travail émotionnel des
soignants à l'hôpital », Catherine Mercadier,
infirmière et sociologue évoque que « la maîtrise
des émotions est une obligation implicite, intériorisée
par le soignant au cours de sa sociabilisation professionnelle.
27» La gestion des émotions du soignant a besoin d'un
véritable travail émotionnel afin que le soignant puisse
être professionnel dans sa relation avec le patient et ainsi être
neutre.
Afin de travailler auprès des patients, il est
important de développer des capacités émotionnelles. Tout
d'abord, il faut s'intéresser à la gestion de nos propres
émotions, ce qui veut dire la connaissance de soi et la gestion de
soi.
Ainsi, nous pouvons définir la connaissance de soi
comme un « savoir » que la personne a appris sur elle durant ses
diverses expériences de la vie donc celle-ci va permettre à la
personne d'adapter ses réactions.
Lors de soins difficiles, comme ici, l'annonce d'un
diagnostic de cancer, le soignant aura des difficultés pour avancer s'il
n'a pas de connaissance sur lui-même. En effet, selon ASPAR J.,
pédiatre, la connaissance de soi est donc importante afin de
gérer des situations difficiles. L'infirmier doit être capable de
connaître ses propres limites. Le fait de se connaitre est un processus
qui sera acquis tout au long de notre vie. L'individu va apprendre à
connaître ses propres réactions lorsqu'il aura vécu une
situation, cependant, il sera plus facile pour lui de gérer les
situations non prévues.
Le soignant parait plus « compétent » dans
l'anticipation de ses réactions lorsqu'il se connait. Selon FRENOT
Jean-Yves, dans son livre « la process communication au service de la
relation soignant-soigné », il déclare « la
connaissance de soi nous
27 Catherine Mercadier, « le travail émotionnel des
soignants à l'hôpital ».
23
permet de situer nos forces et nos limites, et ainsi
d'identifier le moment subtil où nos comportements s'altèrent
sous l'emprise du stress 28».
De plus, au quotidien, il existe différents moyens de
gérer nos émotions. Les moyens les plus répandus avec plus
de 50% sont :
- Parler à quelqu'un
- Combattre les pensées négatives
Ensuite, il y a d'autres moyens comme écouter de la
musique, rester seul, se reposer, faire du sport...
Au fil de l'expérience vécue, le soignant
régulera ses émotions soit de façon contrôlée
donc consciente ou automatique c'est-à-dire inconsciente. La plupart des
épisodes de régulation se déroulent inconsciemment,
c'est-à-dire grâce à la mise en place de mécanismes
de défenses.
e- Les mécanismes de défense
Selon Henri CHABROL, professeur en psychopathologie, des
mécanismes de défenses sont « des opérations
mentales involontaires et inconscientes qui contribuent à
atténuer les tensions internes et externes 29».
De plus, selon Anna FREUD, ce sont « des
procédés inconscients employés principalement par le Moi
dans différentes organisations psychiques30 ».
Dans son livre « face à la maladie grave »,
Martine RUSZNIEWSKI dit que le fait de comprendre les mécanismes de
défenses mis en place par les soignants est important pour «
l'amélioration de la relation avec les patients, et pour une
meilleure prise en charge thérapeutique, car identifier ses
défenses, c'est aussi se révéler plus apte à
reconnaitre celle du patient 31».
Les mécanismes sont des moyens de se protéger
contre une émotion.
Il est important de savoir que le soignant utilise des
mécanismes de défenses pour se protéger d'un
événement pouvant lui procurer une angoisse, un malaise ou bien
une souffrance. L'infirmier(e) est amené à mettre en place ces
mécanismes inconscients afin de faire face à ses émotions.
La mise en place de ces processus
28 Frenot Jean-Yves, « La process communication au service
de la relation soignant - soigné », page 7
29 Henri Chabrol, « Recherches en soins infirmiers »,
les mécanismes de défense.
30 Anna Freud,
www.universalis.fr
31 Martine Ruszniewski, « face à la maladie grave
»
inconscients change le comportement du soignant et donc cela
peut impacter la relation soignant - soigné.
Ainsi, les mécanismes de défenses les plus
utilisés par les soignants seront :
· La banalisation : le soignant ne va se concentrer que
sur une seule partie du malade par exemple, il va traiter la maladie avant de
traiter le patient.
· Le mensonge : le soignant ne dira pas la
vérité au patient, par exemple le soignant va plutôt
employer le mot « polype » que « cancer ». Il s'agit d'un
mécanisme de « l'urgence ».
· L'esquive : le soignant va répondre au patient
mais parlera d'un sujet différent. Il va s'éloigner du sujet.
· La fausse réassurance : par exemple, le
soignant va dire au patient que la chimiothérapie va très bien se
passer qu'il ne faut pas s'inquiéter alors que le patient sera en phase
terminale.
· L'agressivité : le soignant va se sentir «
agressé » par la souffrance du patient. Ce mécanisme de
défense peut être dû à une culpabilité de la
part du soignant. Il mettra en place cette attitude afin de s'éloigner
du patient et cela mettra donc en difficulté la relation avec le
patient.
· L'évitement : le soignant va tout faire pour
éviter le patient. Ce mécanisme de défense peut amener
à créer une rupture de la relation avec le patient.
· La dérision : le soignant va dire au patient
qu'il y a une exagération de sa souffrance.
· L'identification projective : le soignant ne mettra
pas de distance avec le patient. Il va plutôt s'identifier à
travers le patient.
· 24
La fuite en avant : le soignant va tout fuir.
·
25
Les stratégies de coping : il y aura les
stratégies centrées sur le problème mais également
celles centrées sur l'émotion.