1 Introduction
J'ai découvert, dans le cadre de mon stage de
dernière année au sein d'une Unité Intersectorielle de
Soins Intensifs (UISI), les mesures de contention pratiquées en
psychiatrie adulte. Cette unité accueille le débordement des
patients venant déstructurer la relation, à un moment de
l'expression de leur maladie, dite aiguë. J'ai tenté de
réfléchir à ces mesures de derniers recours, leur apport
et leurs indications avant de voir quelle place pourrait avoir le soin
psychomoteur auprès de ces patients en crise.
Historiquement, les notions de contrainte, d'isolement et de
privation de liberté des malades mentaux ont, dans un premier temps,
servi à isoler le malade de la société. Elles ont
évolué au fil des siècles vers des mesures moins
fréquentes et à visée thérapeutique. La notion de
contrainte est étroitement liée à la capacité de la
société de contenir la folie. En effet, le débordement des
patients garde en lui une part subjective, il dépend de
l'interprétation de chacun et sa prise en charge est conditionnée
par la capacité de l'institution à le tolérer ou non.
C'est sans doute dans cet espace d»interprétation que nous pouvons
transformer la violence en intensité et ainsi contenir tout en redonnant
du mouvement. L'unité de soins intensifs a pour particularité de
disposer de plusieurs formes de contention. Premièrement, la contention
symbolique, définie par la loi et les règles de l'unité.
Ensuite, la contention environnementale, correspondant aux moyens
architecturaux mis en place pour restreindre les déplacements du
patient, on peut citer l'unité fermée, mais aussi les chambres
d'isolement. En outre, les contentions chimiques sont amenées par les
traitement pharmacologique prescrits au patient. Et enfin, la contention
mécanique vise, elle, à contraindre les mouvements du patient.
Ces mesures dites de derniers recours sont encore aujourd'hui une source de
questionnements et de réflexions importante pour tous les acteurs du
domaine médical, paramédical, et plus encore, une grande
préoccupation de la société.
Ma réflexion autour de ces différentes
contentions se construit autour de plusieurs questionnements. Tout d'abord :
quelles fonctions thérapeutiques ont chacune des contentions pour
répondre aux débordements des patients ? Mais également,
et surtout, quelle est la place de la psychomotricité en réponse
à ces débordements ?
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Après l'analyse des pratiques actuelles, nous
réfléchirons à la possibilité de diminuer
l'intensité de l'agitation des patients grâce au soins
psychomoteur, pour raccourcir le temps de contention, pour qu'il soit
non-traumatique et plus utile.
J'ai tenté d'y répondre en observant au
quotidien l'effet de ces mesures sur les patients, le regard qu'ils portent sur
ce moment une fois terminé et en participant aux réflexions
cliniques avec les soignants. La pluridisciplinarité de l'équipe
m'a permis de percevoir dans toutes les situations la multiplicité des
visions et des opinions qui en découlent.
Pour ouvrir ma discussion, je me suis penchée sur les
différentes places du psychomotricien dans chaque forme de contention.
J'ai tenté de réfléchir aux intérêts des
concepts psychomoteurs auprès des patients recevant un traitement
psychotrope, ceux en chambre d'isolement et enfin ceux sous contentions
mécaniques. Je me suis demandé quelle était l'importance
de la réflexion autour du corps et des items psychomoteurs avec
l'équipe. Durant les temps informels, les réflexions
d'équipes, comment la psychomotricité peut-elle aider à
penser le corps de ces patients en souffrance, et le faire exister ?
Nous cherchons à sortir de la sidération que
provoque l'intensité dans laquelle ces patients se trouvent. Pour cela
il faut penser leurs souffrances pour répondre plus humainement, en
donnant un accompagnant adapté aux différentes mesures de
contention et dans le but `arriver à s'approcher, tout en respectant la
sécurité de chacun, redonner une dynamique de mouvement.
Ce sont les patients que j'ai rencontrés, luttant
contre leur souffrance, se faisant déborder, parfois violemment, par des
angoisses qu'ils ne peuvent ni contenir ni se représenter, qui m'ont
amenée à penser et réfléchir ces mesures dites de
dernier recours.
Problématique: Quelle place peut avoir
le soin psychomoteur auprès du patient en soins intensifs en psychiatrie
adulte ?
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