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Thèse unique de doctorat criminologie.


par Jean Noel PacàƒÂ´me KANA
Université Félix Houphouet Boigny d'Abidjan - Doctorat en Criminologie 2019
  

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1.4. Autochtone

Ce terme qui se compose de « autos : soi-même » et « khtôn : la terre » peut être perçu selon deux approches anthropologique et sociologique.

Dans la dimension anthropologique, les auteurs mettent l'emphase sur la morphologie du groupe autochtone, non perçue comme un isolât mais dans sa structure compacte nourrie à la sève de l'unité et la complémentarité des membres qui le composent.

Est donc considéré comme autochtone, le « groupe, communauté d'une région ou un pays donné et dont tout indique qu'il (elle) n'est pas venu(e) d'ailleurs » UNESCO

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(2002). Autrement, les autochtones seraient des groupes sociaux fortement soudés, dont les membres éprouvent un sentiment d'unité et de solidarité. Ces liens unifieraient les membres du groupe, c'est-à-dire des individus qui ont vécu et qui vivent ensemble depuis une durée relativement longue dans une région donnée.

Dans cette même perspective, Barth (1969) a développé la notion de groupe ethnique dominant. Il a considéré les groupes ethniques dominants non comme des groupes isolés, mais comme des formes d'organisation sociale résultant de l'interaction du groupe et de son environnement.

Pour lui, se prétendre autochtone nécessite, mobiliser dans une certaine structure, des ressources (langue, territoire, religion, mémoire, histoire) et rendre « saillants » et certains traits culturels ; ce qui permettrait de s'identifier au groupe ethnique.

Outre cet auteur, Lespinay (2016) affirme que les autochtones sont des peuples distincts des autres par leurs patrimoines particuliers, leur langue, leurs habitudes culturelles et leurs croyances spirituelles. Ainsi, il nomme autochtone, « le membre d'une population installée sur un territoire donné avant tous les autres, qui a établi des relations particulières, anciennes et toujours actuelles avec ce territoire et son environnement, et qui a des coutumes et une culture qui lui sont propres ». En d'autres termes, il s'agit d'un acteur social qui se caractérise par un pouvoir dominant et qui prend ses origines dans l'histoire d'une localité spécifique.

Cette conception anthropologique a certes le mérite de nous renseigner sur la texture du concept d'autochtonie en ce sens qu'il renferme une structure compacte alimentée à la sève de la complémentarité, des liens historiques et l'unité. Toutefois, cette dimension semble rejeter le caractère relationnel que les autochtones établissent avec la terre ; ce qui, selon Giddens (1990) « intensifie les relations sociales ».

Cette approche nouvelle dite sociologique prend à la fois en compte la dimension anthropologique, c'est-à-dire le groupe dans son ensemble avant de mettre l'accent d'une part sur le caractère relationnel des situations dans lesquelles les groupes se trouvent en interaction et d'autre part sur la relation que ces groupes entretiennent avec la terre.

Ainsi, Morin (2006) entend par « peuples autochtones », des peuples ayant des liens spécifiques avec la terre. Elle affirme de ce fait que « par communautés, populations et nations autochtones, il faut entendre celles qui, liées par une continuité historique avec les sociétés antérieures à l'invasion et avec les sociétés précoloniales qui se

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sont développées sur leurs territoires, se jugent distinctes des autres éléments des sociétés qui dominent à présent sur leurs territoires ou font parties de ces territoires. Ce sont aujourd'hui des éléments non dominants de la société qui sont déterminées à conserver, développer et transmettre aux générations futures le territoires de leurs ancêtres et leur identité ethnique qui constituent la base de la continuité de leur existence en tant que peuple, conformément à leurs propres modèles culturels, à leurs institutions sociales et à leurs systèmes juridiques ».

Dans cette optique, bien qu'évoquant l'évolution et la continuité historiques des autochtones, Martinez (1987) insiste sur le fait que les autochtones sont caractérisés par la transmission générationnelle des valeurs et des biens. Il affirme que les autochtones sont « des peuples et nations qui présentent une continuité historique avec les sociétés précédent la conquête et la colonisation de leurs territoires, qui se considèrent comme distincts des autres secteurs de la société dominant aujourd'hui ces territoires ou qui en sont partie. Ils constituent aujourd'hui, des secteurs non dominants de la société et sont déterminés à préserver, développer et transmettre aux générations futures leurs territoires ancestraux et leur identité ethnique, sur la base de leur existence continue en tant que peuple, en accord avec leurs propres systèmes culturels, leurs systèmes légaux et leurs institutions sociales ».

Avec Renahy (2010), ce concept s'appréhende en termes de relations symboliques locales. Il affirme qu' « elle est l'ensemble des ressources que procure l'appartenance à des réseaux de relations localisées. Il s'agit de nommer les ressources symboliques en ce sens qu'elles ne tiennent ni d'un capital économique, ni d'un capital culturel mais d'une notoriété acquise et entretenue sur un espace singulier ».

Bourdieu (1980), bien que mettant l'accent sur le fondement relationnel de ce concept, va plus loin pour montrer la nécessité d'être reconnu par les siens comme appartenant au groupe. Ce concept transcende donc le cadre de relations localisées pour déboucher sur une appartenance mutuellement reconnue par les autres membres du groupe. Ainsi, il affirme que le concept suppose « l'ensemble des ressources actuelles ou potentialités qui sont liées à la possession d'un réseau durable de relations plus ou moins institutionnalisées d'interconnaissance ou d'inter-reconnaissance ou en d'autres termes, à l'appartenance à un groupe, comme l'ensemble des agents qui ne sont pas seulement dotés de propriétés communes

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(susceptibles d'être perçues par l'observateur, par les autres ou par eux-mêmes) mais sont unis par des liaisons permanentes et utiles.

Dans ce travail, nous souhaiterions appréhender ce concept dans une dimension à l'aboutage des approches anthropologique et sociologique ; celle-ci prendrait en compte à la fois la structure compacte du groupe fortement soudé, les relations historiques entre les individus eux-mêmes et la terre et la reconnaissance des uns par les autres membres, comme appartenant au groupe.

Nous proposerons donc la définition suivante : un peuple ou un groupe est dit autochtone si sa présence dans un lieu déterminé est avérée depuis une période relativement longue, si ce peuple présente une continuité historique et s'il y a une inter-reconnaissante ou une reconnaissance mutuelle des membres comme appartenant au groupe.

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