II. DEROULEMENT DES CONFLITS FONCIERS A SINFRA
Pour A. (29 ans, un planteur de Kayéta), « les
conflits fonciers sont récurrents, meurtriers dans les localités
de Sinfra et minent les rapports entre les communautés villageoises avec
des conséquences parfois dramatiques ». Ces conflits
basés sur les ressources naturelles seraient en augmentation croissante
aussi bien en fréquence qu'en intensité.
Ainsi, même s'ils sont causés par avidité
ou injustice, ces litiges observés dans les zones spécifiques de
Sinfra causent selon B. (32 ans, cultivateur à Koumoudji), « de
sérieux bouleversements sociaux, mettent en suspens ou détruisent
les opportunités de revenus, créent l'insécurité
alimentaire, nuisent à l'environnement et fréquemment causent des
pertes humaines et matérielles ». Les ménages
villageois caractérisés par une paupérisation
généralisée, supportent la charge la plus lourde de ces
litiges du fait que leurs besoins journaliers et leurs moyens de subsistance
seraient directement en rapport avec leur droit de propriété.
Dans ce contexte, évoquer le déroulement de ces
litiges fonciers à Sinfra, reviendrait selon nous, à aborder
succinctement la typologie des conflits fonciers (1), les acteurs de ces
litiges fonciers (2), les moyens utilisés (3) et les lieux (4).
1. Typologie des conflits fonciers à Sinfra
1.1. Conflits intrafamiliaux
Les verbatim obtenus sur le terrain d'étude,
révèlent que ce type de conflit survient
généralement dans la communauté autochtone. Ces conflits
dits intrafamiliaux sont plus fréquents au sein de l'institution
familiale où héritiers légitimes, oncles, cousins
s'entrechoquent, se heurtent pour s'approprier des portions importantes des
terres familiales après le décès du père
donateur.
Des divergences qui, au départ se manifestent par des
murmures, des querelles, se métamorphosent assez rapidement en violences
physiques avec par moment et par endroit la formation des groupes
isolés, un clanisme au sein de la famille et des risques de
positionnement juvénile dans théâtre foncier familial, avec
une remise en question du droit d'ainesse et tous les privilèges
liés.
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puisque les individus en conflit sont des parents proches,
habitent la même maison et donc, sont régulièrement en
contact. ». Mais au-delà, ce type de conflit
révèle une absence ou une désorganisation du cadre
d'expression familial. Les différends intrafamiliaux observés
à Sinfra transcenderaient donc le cadre inégalitaire,
revendicatif pour traduire un manque d'espaces lignagers d'échanges, de
gestion de conflits intrafamiliaux. Une telle conception semble être
partagée par certains enquêtés de Progouri tels que G. (34
ans, électricien) pour qui « les réunions hebdomadaires,
mensuelles que l'on faisait avant au sein de la grande famille, ont
été délaissées parce que les membres disent ne pas
avoir le temps ».
D'autres y voient une focalisation sans mesure des fonts
pionniers sur la recherche du gain quotidien et personnel, mettant ainsi au
second plan l'intérêt de la lignée (Propos recueillis
auprès d'un élu gouro, 49 ans, entretiens de Juillet 2015).
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