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Assurance de responsabilité des aéronefs immatricules en république démocratique du Congo.


par Patient Ibrahim SUMAILI
Université de Kisangani - Licence 2018
  

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SECTION 2e : Motifs de la violation de ce principe légal avancés par les compagnies aériennes

Si les compagnies aériennes ne souscrivent pas à une assurance de responsabilité pour leurs aéronefs auprès d'une société congolaise d'assurances c'est parce que l'assureur congolais n'est pas en mesure d'indemniser les victimes en cas de sinistre et d'une condamnation de réparation de la compagnie assurée à la hauteur du dommage subi35(*).

Les facteurs objectifs qui nous semblent incontournables et qui constituent à notre avis de véritables entraves à la souscription à une assurance de responsabilité civile auprès d'un assureur congolais :

Ø Le manque de pragmatisme de l'ARCA qui est une autorité de supervision et de contrôle, le manque d'information, la non-compréhension du mécanisme de l'assurance et l'absence d'une culture de la prévention, la faiblesse du pouvoir d'achat, et le fait qu'une société de droit et organisée ne soit pas encore totalement aboutie ;

Ø Une régulation efficace implique que s'établisse une relation de confiance entre une autorité régulatrice compétente et tous les autres secteurs concernés. Ce qui veut dire que ceux-ci doivent être écoutés et que leurs demandes et attentes soient prises en compte lors de l'établissement des règles de fonctionnement. C'est une condition incontournable si l'on veut arriver à une régulation efficace.

Ø Non garantie de la protection des assurés : l'objectif fondamental de la régulation est de garantir la protection des assurés. Il faut savoir que la supervision et le contrôle contribuent à instaurer un certain climat de confiance et de crédibilité. On ne peut pas parler de mise en place d'un système d'assurance viable et crédible si les consommateurs n'ont pas confiance. S'ils n'ont pas confiance dans le système mis en place, ils ne souscriront pas de contrat, le secteur ne se développera pas et tout le monde y perdra.

Si l'on prend comme exemple le contrôle de la solvabilité des entreprises d'assurances, les assurés ne sont pas en mesure de savoir si celles-ci seront solvables pendant toute la durée du contrat et si elles pourront faire face à leurs engagements36(*).

Il faut donc que l'organisme de contrôle et de supervision vérifie de manière permanente la solvabilité des entreprises afin qu'elles soient en mesure d'honorer leurs engagements. Lorsque l'assureur doit remplir ses obligations vis-à-vis des assurés, bénéficiaires et adhérents et qu'il n'est pas en mesure de le faire pour quelques raisons que ce soit, ceux-ci peuvent se retrouver dans une situation catastrophique. Supposons qu'un souscripteur dont l'aéronef assuré a subi un crash et que l'assureur a été déclaré en faillite ! On peut dire que ce sinistré se retrouve dans une situation précaire et court le risque d'être complètement ruiné. Il faut donc éviter d'arriver à ce genre de situation. C'est la raison pour laquelle la situation financière des entreprises d'assurances doit être vérifiée et surveillée en permanence par l'Autorité Administrative Indépendante qui renforcera la confiance des consommateurs.

Ø Veiller à la solidité financière des entreprises d'assurances vise à garantir la sécurité juridique et financière des sociétés d'assurance, de veiller à renforcer leurs assises financières afin qu'elles puissent participer activement au développement du secteur et d'autre part afin qu'elles soient en mesure d'honorer leurs engagements à l'égard des assurés et bénéficiaires. Cela leur permettra aussi de disposer de beaucoup plus de moyens pour diversifier l'offre de produits, améliorer leurs canaux de distribution, renforcer leur politique de formation et de communication.

Ø Le manque d'information, la non-compréhension du mécanisme de l'assurance et l'absence d'une culture de la prévention Une grande partie des compagnies aériennes aurait pu souscrire un contrat d'assurance en RDC si elle était mieux informée sur la problématique de l'assurance, si elle avait confiance à l'assureur congolais. En effet, la plupart des compagnies ont une connaissance limitée des avantages et des bienfaits de souscrire auprès d'un assureur congolais. Même dans les compagnies où les actionnaires sont des nationaux, on peut rencontrer beaucoup qui sont incapables de comprendre convenablement en quoi consiste réellement la souscription auprès d'un assureur congolais37(*). On peut raisonnablement soutenir que si les compagnies sont informées et si elles sont conscientes des risques encourus, elles réduiraient certaines dépenses, dans les loisirs par exemple, pour souscrire une couverture d'assurance chez un national. L'un des principaux défis à relever afin d'augmenter le nombre d'assureur sera de réussir à sensibiliser les compagnies pour leur faire comprendre l'intérêt qu'elles ont à retirer en étant assurés. La méfiance est quelque chose d'instinctif chez les compagnies ; sans explication convaincante, elles ne peuvent pas comprendre le fait qu'elles paient une cotisation et ne reçoivent en retour que quelque chose de virtuel, d'immatériel, en un mot, la promesse de l'assureur. Il faut donc prendre le temps qu'il faut pour les convaincre de l'intérêt de l'assurance et leur expliquer méthodiquement le mécanisme afin qu'elles puissent avoir une autre perception. Dans les pays où une grande partie de la population a conscience que l'assurance est un véritable moyen de prévention, cela n'est pas dû au hasard. Il y a une éducation du citoyen à l'assurance à tous les niveaux de la société depuis l'école secondaire jusqu'à l'université en passant par les actions des associations de défense des consommateurs jusqu'aux compagnies d'assurances elles-mêmes dont leur rôle en matière de prévention (prévention en matière d'accidents automobiles, en matière de santé, en matière d'incendie...) n'est plus à démontrer.

Ø La faiblesse des pouvoirs d'achats des compagnies locales : L'un des facteurs qui empêche l'activité d'assurance de se développer dans les pays pauvres est que les compagnies aériennes locales en grande majorité disposent de faibles revenus et n'ont donc pas de moyens financiers disponibles pour avoir une couverture d'assurance38(*). Dans la plupart des pays en développement, la demande d'assurance est souvent très faible et se limite à la couverture des entreprises industrielles et commerciales. La grande majorité de la population ne consomme le plus souvent que les assurances obligatoires notamment l'assurance responsabilité civile automobile. Les experts en assurance aiment souligner que l'assurance est un luxe pour les pays pauvres39(*).

Nous pensons que la question est mal posée. Il est vrai que si l'on prend en considération une population où une grande partie des gens n'arrivent pas à satisfaire leurs besoins les plus élémentaires, on comprend que la majorité d'entre eux ne pourra pas consommer de l'assurance ; cependant, si l'on considère que l'assurance est globalement un mécanisme qui permet aux gens de garder leur dignité et de ne pas être à la charge de la collectivité ou de l'aide internationale, il faudra penser à augmenter l'offre de micro-assurance qui tient compte justement du fait que l'assuré possède des moyens limités. Par ailleurs, les pouvoirs publics doivent être conscients des besoins d'investissement du pays et que l'activité d'assurance est aujourd'hui une des conditions du développement. Ils doivent montrer leur intérêt pour ce secteur et mettre en place des politiques publiques adaptées40(*). Nous pensons par ailleurs que des actions doivent être entreprises en synergie avec les assureurs afin d'élargir l'offre de micro-assurance ce qui permettra aux personnes les plus défavorisées d'avoir accès à l'assurance.

Ø L'assurance tributaire d'une société de droit et organisée : l'exercice de l'activité d'assurance requiert une société de droit, organisée tant au niveau économique et financier mais aussi au niveau juridique. Chaque institution doit pouvoir jouer son rôle sans contrainte. L'Etat, par l'intermédiaire de l'ARCA, par exemple, doit mettre en place une réglementation moderne, au delà du code des assurances, dans un cadre législatif cohérent exclusivement pour le secteur aérien qui tient compte de la réalité du pays et qui doit être actualisée constamment. C'est une exigence incontournable. Cette réglementation doit être appliquée par les entreprises d'assurances et les compagnies aériennes et il faut que cette Autorité montre sa volonté de la faire respecter. En effet, en cas de non-respect de celle-ci, les sanctions prévues doivent être appliquées, mais de manière impartiale41(*). D'un autre côté, les compagnies suspectées de non-respect de la réglementation, doivent pouvoir se défendre. Et au bout de la chaine, les juges doivent pouvoir rendre leurs décisions en toute indépendance et sans pression d'aucune sorte. S'il en était autrement, on s'éloignerait d'une société de droit, organisée, qui seule peut permettre à l'assurance de croître ; en outre, on accroîtrait la méfiance des gens vis-à-vis des assureurs congolais. Si les compagnies aériennes se rendent compte qu'il n'y a pas de règles de jeu définies, que c'est la loi de la jungle qui prime, qu'il n'y a pas de structure définie pour contrôler l'activité des entreprises d'assurances, qu'il y a une législation, mais qu'elle n'est pas appliquée ou que ce sont celles-ci qui s'auto-réglementent et s'autocontrôlent, elles n'auront pas confiance et n'adhèreront pas à l'idée d'assurance. Tout l'enjeu du développement de l'assurance, c'est de bâtir la confiance et de la maintenir42(*). Par ailleurs, soulignons qu'en dehors du fait que l'assurance rencontre de sérieuses difficultés à se développer de manière harmonieuse dans les sociétés où près des ¾ de la population active sont sans travail et sans ressources d'aucune sorte, il faut noter que son développement est aussi très étroitement lié à la santé économique du pays43(*). Il est généralement admis que la croissance économique accroît les besoins d'assurance et le marché de l'assurance peut être stimulé par l'enrichissement des ménages. Enfin, il est aussi utile de rappeler que le développement de l'assurance dans une société requiert aussi un climat politique et social apaisé, un environnement économique stable. En effet, les émeutes, les grèves à répétition, les manifestations, les troubles sociaux et politiques à n'en plus finir, de même qu'une inflation galopante persistante dans la société constituent de véritables ennemis de l'assurance, car ce sont des facteurs importants qui empêchent les assureurs de maîtriser la sinistralité.

* 35 https://www.radiookapi.net; interview de StravrosPapaionou le 12/07/2011. Le patron de Hewa Bora affirme que son entreprise était assurée par la SONAS jusqu'au crash de Goma (Nord-Kivu) en 2008. Il accuse la société d'assurances de ne pas avoir joué son rôle d'assureur après cet accident, en n'indemnisant pas les victimes à la hauteur du sinistre subi

* 36François Couilbault, assurances de personnes, 2015, Ed. Argus de l'assurance.

* 37Agnès Pimbert, l'essentiel du droit des assurances, 2014-2015, Lextenso Ed. 9

* 38 Idem

* 39Manuel international de l'assurance, Ecole Nationale d'assurance de Paris, Economica 2015

* 40Manuel international de l'assurance, Ecole Nationale d'assurance de Paris, Economica 2016

* 41 Idem

* 42Manuel international de l'assurance, Ecole Nationale d'assurance de Paris, Economica 2015

* 43Manuel international de l'assurance, Ecole Nationale d'assurance de Paris, Economica 2016

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