CHAPITRE I : DEFINITION DES CONCEPTS
ET REVUE DE LA LITTERATURE
Il est incontournable dans un travail qui se veut
scientifique, de procéder à une clarification des mots et
concepts majeurs pour faciliter leur compréhension. Ainsi, dans ce
chapitre, il sera essentiellement question d'une part de définir
certains mots clés et concepts dont la compréhension peut
prêter à équivoque (I), et d'autre part de faire une revue
de ce qui a déjà été dit sur le thème que
nous nous sommes donnés d'étudier (II).
I. DEFINITION DES
CONCEPTS
Afin de lever toute ambiguïté qui pourrait naitre
du fait du caractère polysémique des mots ou de l'entendement que
l'on pourrait avoir d'un concept qui, en philosophie est défini comme
étant : « une représentation mentale
abstraite et générale... ». C'est donc ainsi que
nous nous attèlerons à rendre plus explicites et manipulables,
les termes qui nous semblent d'une importance indéniable, et qui
gravitent autour de notre thème.
I.1
Participation
Le concept de participation naît du
désir de satisfaire les besoins des populations en milieu communal, face
aux nombreux échecs des projets initiés par le haut. En effet le
constat a été fait que, les nombreuses stratégies de
développement mises sur pied au cours des deux premières
décennies post indépendance présentent des limites et
courent presque toutes vers l'échec. Ceci en grande partie à
cause de leur centralisation, et de la prise des décisions du pouvoir
central alors que selon Muller (1992 : 38), le seul
moyen de réussir une politique c'est d'en confier la réalisation
à ceux qui ont intérêt qu'elle réussisse.
Selon les usuels de la langue française, la
participation s'appréhende comme l'action de prendre part à
quelque chose, son résultat. La participation a de ce fait un sens
passif et un sens actif. Pour Maiga cité par
Bessan (2011), le sens passif renvoie au fait que la
population prend part, sans prendre de décision et au sens actif, elle
s'engage en prenant des responsabilités. La participation se rapporte au
fait d'être intéressé. C'est à ce titre que
Boukhari (1994 : 42), énonce que Le principe
fondamental de la participation : c'est le partage de savoir et de pouvoir.
Dans le même registre Yoda (2004 : 85) cite
Boukhari en disant que (...) la participation, c'est
penser et faire avec et non pour, c'est la responsabilisation, la concertation
et la négociation.
La participation se révèle un
phénomène influencée par un ensemble de facteurs
déterminants tels que : les facteurs socio-économiques,
anthropologiques et institutionnels. Par facteurs socio-économiques, il
est question des facteurs liés à l'éducation, au statut,
aux attitudes et comportements.
La participation se détermine tant par des facteurs
aussi bien endogènes qu'exogènes d'après
Lane cité par Ndouta (2013 :41). Les
facteurs endogènes mettent en relief les variables individuels et
collectifs propres à une population et favorisant sa participation. Les
variables individuelles sont au nombre de trois : la volonté de
s'impliquer, la condition économique et le niveau d'éducation des
individus. En d'autres termes un individu qui manque de détermination,
limité dans ses moyens matériels et n'ayant pas le niveau
d'instruction souhaité, ne pourra pas participer à un projet quel
qu'il soit. Les facteurs collectifs quant à eux concernent la culture
organisationnelle. La participation exige une certaine organisation. Dans ce
sens, l'absence de charpente capable de coaliser les desseins collectifs
explique que certaines populations ne s'impliquent pas dans la
résolution des problèmes de la communauté ou du groupe.
Pour Sills cité par Ndouta
(2013 : 46), les facteurs exogènes sont des variables externes
qui échappent au contrôle des individus, mais qui sont
déterminants dans le choix et la décision de participer. Il
s'agit de l'environnement politique et de la stratégie de mobilisation
adoptés par les acteurs d'un projet.
Les différents facteurs ainsi recensés
expliquent tous, d'une façon ou d'une autre la participation des
populations aux projets de développement. Dans ce sens, la participation
est à la fois un droit et un devoir exercés par un citoyen dans
un contexte de démocratie. Il s'agit ici de participation citoyenne.
La participation connait cependant différentes formes
relatives à la motivation qui amène l'individu à prendre
part à une activité pour Meister (1970). Les
différentes formes de participation sont :
- la participation de fait qui conduit
l'individu à participer instinctivement parce qu'il appartient à
un système familial, religieux ou traditionnel qui l'incite à
prendre part par l'intermédiaire des relations affectives qui le lient
au système. C'est une forme de participation involontaire et
caractéristique des sociétés fortement traditionnelles
;
- la participation provoquée est
induite et stimulée de l'extérieur par des organismes ou des
institutions. Elle peut déclencher l'implication des populations dans le
processus de développement engagé à leur compte ;
- la participation volontaire est une
initiative des membres du groupe, sans intervention extérieure. Elle
émanerait d'une hypothétique conversion des
sociétés traditionnelles en sociétés modernes ;
- la participation spontanée est une
forme intermédiaire entre la participation de fait et la participation
volontaire ;
- la participation imposée peut
émaner soit du groupe lui-même, soit de l'influence
extérieure ; dans le but de susciter à travers une prise de
conscience une forme d'organisation au sein du groupe.
Tableau 1: Participation selon Albert
Meister
Type de Participation
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Origine et création
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Intérêts, activités, fonctions
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Participation de fait
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Origine dans la vie traditionnelle: groupe familial,
religieux, métiers...
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Conservation du patrimoine
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Participation spontanée
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Création par les participants, elle reste fluide, sans
organisation formelle : groupes de voisinage, amateurs
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Satisfaction des besoins vitaux
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Participation imposée
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Création par des animateurs extérieurs,
mobilisation de la main d'oeuvre pour des travaux collectifs
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Groupement indispensable pour le fonctionnement du programme
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Participation provoquée
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Groupe provoqué et suscité dans le cadre de
projet ou programme : coopérative...
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Adoption d'un comportement collectif et normes promues par
l'institution intervenante
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Participation volontaire
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Création du groupe suite à une prise de
conscience, initiative propre au groupe
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Satisfaction des besoins, défense
d'intérêts communs, promotion sociale
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Source : NDO (2015 : 16)
Toutefois cette catégorisation de Meister
n'empêche pas à d'autres auteurs d'apporter un éclairage
différent. C'est le cas de Goussaut cité par
Mekoulou (2012 :31), qui a démontré qu'on
dénombre trois types de participation, en fonction de l'engagement d'un
individu ; à savoir :
- la participation formelle où
l'individu est motivé par la peur d'être sanctionné ;
- la participation par effet d'imitation
à travers laquelle l'individu est entrainé dans un courant
d'habitude ;
- la participation responsable par laquelle
l'individu s'engage de façon consciente et volontaire.
Par ailleurs, Schawrz toujours cité
par Mekoulou (2012 :31), estime à son tour qu'il existe plutôt
cinq niveaux de participation : la participation par
contribution, la participation par
intégration, la participation par insertion,
la participation par engagement et la participation
par la prise en charge.
Pour cette étude, ces différentes thèses
sont complémentaires du fait que la contribution et la mobilisation des
populations à un processus de développement local passe par leur
participation, qu'elle soit formelle ou par insertion. Toutefois pour un
développement qui se veut durable et local, en rapport avec la
décentralisation, la participation voulue ici est la participation par
engagement ou la participation responsable. Spécifiquement, la
participation doit ici recouvrir deux acceptions : collecter l'information
et obtenir l'adhésion de la population en échange d'une certaine
influence dans la prise de décisions.
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