I.2
Citoyen(ne), citoyenneté
En nous référant au libellé de notre
thème d'étude, ce mot est un adjectif qualificatif. Mais il est
aussi un nom de genre féminin, dont la déclinaison au masculin
est la plus connue : citoyen.
Citoyen est un mot qui vient du latin
civis c'est-à-dire celui qui a droit de cité. L'histoire
nous renseigne que ce mot avait initialement une portée étatique
(la cité-Etat) et désignait toute personne sous l'autorité
et la protection d'un Etat, dont il est ressortissant, et qui jouit des droits
civiques et politiques. Aujourd'hui, cet acronyme a une portée
dynamique, qui ne relève plus du simple découpage
géographique. Ainsi, on est de nos jours citoyen du monde du fait de
partager des normes et valeurs universellement acceptées. De même,
on est citoyen d'une ville parce qu'on y vit, et qu'on participe d'une
manière ou d'une autre, activement ou passivement à la bonne
marche et au développement de celle-ci. C'est donc cette dernière
acception que nous adopterons dans notre démarche à chaque fois
que nous ferons allusion au citoyen. Le concept qui lui est directement
associé est celui de citoyenneté.
D'une manière générale, la
citoyenneté est le fait pour une personne d'être
reconnue comme membre d'une cité (aujourd'hui d'un État)
nourrissant un projet commun pour lequel il prend une part active. Pour
Bouguerra (1999), le mot trouve son étymologie du latin
civitas, signifiant : droit de cité, droit d'un habitant d'un
pays.
Pour Le Pors (1999), la citoyenneté
est le fruit de conflits et de consensus, de valeurs partagées et de
confrontations d'idées d'autant plus intégratrices qu'elles
s'opposent vigoureusement. Elle serait en outre un statut juridique et
simultanément un rôle (Coutu & Bosset, 1999; Sanchez,
2006). Le statut juridique, comme le souligne Vincent
(2001), est conféré par l'État à tout
individu d'un territoire donné est égal aux autres. En tant que
rôle, la citoyenneté se traduit par la possibilité
d'exercer des droits et des devoirs (civique, politique, social et
économique) qui trouvent leurs assises et leur légitimité
dans la recherche du bien commun et dans le souci de l'intérêt
général (Vincent, 2001). Cette double lecture
met donc en relief les logiques de citoyenneté active et
passive.
La citoyenneté rend aussi compte du mode d'appartenance
à une société donnée, mode basé sur
l'intériorisation, puis l'implémentation d'un ensemble de
valeurs, de normes et sur l'exercice de pratiques orientées en fonction
du bien-être et du développement de la personne et de la
société tout entière. Le citoyen serait donc cet individu
autonome, responsable, un membre actif de la communauté politique et de
la société civile.
De tout ce qui précède, il est
d'intérêt de rappeler avec Le Pors (1999),
Schnapper (2000), Boisvert & al. (2000)
et Beck (2000), que le concept de citoyenneté
est généralement associé à l'État-Nation.
De manière plus spécifique, il est loisible de
lire la citoyenneté à l'aune de quatre principaux axes :
politique, civil, culturel ou collectif et socio-économique.
Le domaine politique est relatif aux droits et devoirs de
chaque citoyen au sein d'un système politique. De ce fait, il met en
lumière la participation de tous et de chacun à la gestion de la
chose publique, avec pour principal cadre d'application le droit de vote et le
devoir de contrôle.
Le domaine civil quant à lui fait
référence au modus vivendi à l'aune duquel sont
construits les objectifs poursuivis par l'ensemble de la société.
Y faisant référence, Bogdanor (1991) y voit une
définition des valeurs fondamentales collectives, des limites du pouvoir
décisionnel gouvernemental par rapport au citoyen individuel, ainsi que
des associations et groupes d'intérêt privé. Comme
éléments constitutifs, l'on y retrouve l'accès à
l'information, la liberté d'association, le droit de parole ainsi que
l'égalité aux yeux de la loi.
Le domaine culturel ou collectif qui a trait à la prise
en compte par chaque société de sa diversité culturelle
croissante au travers de la construction et de l'exaltation d'un patrimoine
culturel commun. Cette démarche constructive ne s'accommode pas du rejet
des identités culturelles des minorités. La relation Etat-culture
se fonde sur la reconnaissance de la dimension anthropologique des droits
humains ainsi que le respect de la dignité de tous les citoyens par
l'entité gouvernante. Tout ce qui précède induit donc une
égalité de tous aux yeux de la loi ainsi qu'un droit à la
protection contre toute forme de discrimination relative aux appartenances ou
convictions respectives.
Le domaine socio-économique qui traite des relations
entre acteurs appartenant au même cadre de vie ainsi qu'aux
éléments normatifs relatifs à la participation à la
sphère politique. Comme éléments de cette composante
citoyenne, l'on retrouve un ensemble de droits liés au travail, à
la sécurité sociale, à l'aspect sécuritaire du
cadre de vie, au bien-être économique ou du moins à des
moyens basiques de subsistance.
Fort de ce qui précède, Veldhuis
(1997) affirme que ces domaines ont des conséquences sur le
processus de citoyenneté. En effet, le citoyen moderne est donc d'abord
le sujet de droits et de devoirs : droits de l'homme ; droits civils ; droits
politiques ; droits sociaux. Les devoirs sont accomplis par les citoyens pour
le bien de la collectivité (impôts, service militaire, etc.) et
définis par les lois des pays dans lesquels ils vivent. La
citoyenneté implique donc aussi la définition d'une commune
appartenant à une communauté politique (à ne pas confondre
avec la nationalité).
Bien plus, la citoyenneté ne génère qu'un
lien social fondé sur le politique et non sur une ou des appartenances
singulières des individus. C'est, en particulier,
l'égalité de droits et de devoirs, associée à la
citoyenneté qui fonde le lien social dans la société
démocratique moderne.
Cependant, si la citoyenneté suppose un ensemble de
qualités morales considérées comme indispensables au
rôle de citoyen, chaque citoyen exerce à sa façon la
citoyenneté telle qu'elle est établie par les lois et
intégrée dans l'ensemble des moeurs de la société
à laquelle il appartient. C'est dire qu'aujourd'hui, de nombreux
citoyens expriment leur méfiance par rapport aux politiques, par des
engagements et des socialisations sous d'autres modes, s'exprimant par des
actions de solidarité ou de sensibilisation à diverses causes
autres que celles supposées communes.
Dans le cadre de notre travail, le concept de
citoyenneté aura pour signification, le processus
intégrant d'une part la prise de conscience par chaque individu
appartenant à une entité de son rôle dans la dynamique de
construction collective, ainsi que la durable et harmonieuse insertion de ce
dernier dans la chaine dédiée à ladite construction.
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