Isolationnisme et la géoéconomie des états-Unis d'Amérique sous Donald Trump. Enjeux et perspectives.par Raphael Mbumba Muamba Université de Lubumbashi(UNILU) /RDC - Licence en Relations Internationales 2018 |
§3. L'évolution des idéesgéoéconomiquesLe XXIième siècle n'a pas seulement accouché d'un Empire, il a par ailleurs affirmé l'émergence d'un nouveau bipolarisme. Du moins, c'est la thèse défendue par Washington depuis les évènements de septembre 2001. Cette opposition entre idéologies n'est plus celle des idéaux démocratiques face à l'expansionnisme communiste. Pour les néo-conservateurs américains, il s'agit d'un affrontement autrement plus noble, tant la lutte contre les fondamentalismes relevant d'une croisade. Durement éprouvés dans leurs chairs et dans leurs certitudes affectives en 2001, les Américains ont signifié au monde qu'ils soutenaient la politique de Georges Bush.Le nouvel ordre voit potentiellement s'affronter la première puissance économique et technologique de la planète face à des Etats parmi les plus pauvres du globe, coupables d'encourager le développement du terrorisme international. Les analyses géoéconomiques se sont singulièrement développées au cours de la décennie écoulée. Si historiquement, les premiers travaux du genre peuvent être attribués à T. Renner48(*), l'approche contemporaine retient les publications d'Edward Luttwak49(*)comme point de départ d'une réflexion relative aux nouveaux objets de conflictualité entre les Etats. Interpréter et commenter les stratégies discursives du Center for Security Policy dans une perspective géoéconomique, nécessite de revisiter les questionnements fondamentaux et le champ d'investigation de la discipline. Dépassant l'approche exploratoire américaine, « l'Ecole française » rassemblée autour de Pascal Lorot pose l'effectivité d'une réalité internationale où les interactions entre espace, puissance et économie apparaissent comme les déterminants de la compétition. L'un des grands intérêts de l'analyse géoéconomique est de ressusciter une réalité volontairement ignoré par les auteurs néolibéraux : la recherche de puissance. Yannick Mireur50(*) rappelle que « l'économie politique analyse l'articulation et l'interaction entre le système économique et l'architecture politico-institutionnelle d'un pays pour la création de richesse nationale et son utilisation, tandis que la géoéconomie se préoccupe davantage de l'interface internationale et de son caractère concurrentiel, par rapport au critère de puissance ». Pour Susan Strange51(*), trois interactions caractérisent la nouvelle grammaire des relations (et rivalités) internationales : les rapports entre nations, les rapports entre les Etats et les firmes multinationales, et ceux entre les Entrepriseselles-mêmes. Ce qui nous intéresse présentement relève de la deuxième catégorie.La libéralisation des marchés couplée à l'avènement de l'Organisation Mondiale duCommerce, la généralisation de doctrine de sécurité économique dont le volet offensif induitla mobilisation des administrations au profit des conquêtes commerciales, concourent à penserle monde, c'est penser la puissance, c'est matérialiser en acte ses représentations et c'est lesfaire partager. Après avoir scruté l'isolationnisme et la géoéconomie comme concepts de base de notre analyse, nous abordons dans la suite des notions connexes. Il s'agit de la géostratégie, géopolitique et le protectionnisme. * 48Georges; T.-R., Human geography in the air age, New York, Macmillan 1942, pp.1-3. * 49Luttwak, E., « From geopolitics to geo-economics : logics of conflicts, grammar of commerce », The National Interest, summer 1990; puis son ouvrage majeur The endangered american dream, Simon & Schuster, 1993, cités par Didier Lucas et Nicolas Dignoire, géoéconomie et stratégie des Etats-Unis : pourquoi Washington tente de déstabiliser des entreprises françaises, in think-think, op.cit, pp.1-8.XIè siècle n'a pas seulement accouché d'un Empire, il a par ailleurs affirmé l'émergence, * 50Mireur, Y., « Quelle place pour la nation à l'ère de la géoéconomie? », in Géoéconomie, Paris, n°22, p.43. * 51 Strange, S., « State, Firmls and diplomacy», in International Affairs, 68, n°1, 1992, pp.1-3. |
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