La géopolitique congolaise de l'eau. Mythe ou réalité?par Faustin KYALA WAKABILA Université de Kolwezi - Licence 2019 |
Section 4. Le défi de l'eau en AfriqueDans cette section nous analyserons deux paragraphes suivants dont la première porte sur la situation de l'Afrique en matière d'eau et le second se base sur le plan du G8 pour l'Afrique. 76 §1.La situation de l'Afrique en matière d'eauLes ressources en eaux, superficielles ou souterraines du continent africain présentent trois caractéristiques essentielles :
En ce qui concerne l'approvisionnement en eau et les conditions sanitaires des populations africaines, les services de distribution d'eau potable s'avèrent généralement peu développés et peu performants. Quant à l'assainissement, collectif ou individuel, il n'existe et ne fonctionne que rarement entrainant morbidité et mortalité. La concentration urbaine en cours accroît les besoins d'infrastructures dans les secteurs non seulement de l'alimentation en eau, mais aussi, et surtout de l'assainissement.49 Elle entraine également un accroissement des risques d'épidémies de maladies hydriques (choléra, typhoïdes, dysenteries, etc) ainsi qu'une sensibilité et une vulnérabilité plus grandes vis-à-vis des inondations, tout comme la déforestation qui aggrave aussi l'érosion des sols. Faute d'avoir sur place les compétences et l'expertise nécessaires dans les domaines aussi bien des techniques que des sciences sociales et humaines, les ouvrages 49 Anonyme, Le défi de l'eau en Afrique, https:/ www.wikipedia.org, consulté le 18/mars/2019 à 23h32 77 hydrauliques généralement très couteux, réalisés dans les pays africains n'ont pas toujours une conception appropriée à leurs contextes économique, social et environnemental, ni une exploitation et une maintenance satisfaisantes. En effet, ces pays ne disposent pas d'infrastructures suffisantes pour assurer la formation initiale ou continue, et le perfectionnement professionnel nécessaire dans le secteur de l'eau. Les cadres supérieurs sont souvent formés à l'étranger et ne reviennent pas toujours au pays. En revanche, les cadres moyens, techniques ou gestionnaires qui constituent l'ossature principale des organisations publiques ou privées (agent de maitrise et autre.) ne peuvent être formés qu'en Afrique, sur place ou dans un pays voisin. Enfin, la sécurité alimentaire du continent n'est pas assurée trente des cinquante pays comptant plus de 20% de (mal nourris) et dix-huit des vingt-trois pays en comptant plus de 34% sont situés en Afrique. L'agriculture vivrière représente le moyen essentiel de subsistance dans les campagnes et conditionne le maintien du peuplement rural, avec une production locale soumise à la concurrence des marchés mondiaux 1. Le droit à l'eau dans le contexte institutionnel de l'Afrique Alors que les occidentaux, généralement très individualistes, ont tendance à privilégier une appropriation privative du patrimoine naturel et des ressources naturelles dont le territoire de l'eau, les populations africaines, en dépit de leur extraordinaire diversité répartie entre l'Afrique du nord, l'Afrique de l'ouest, l'Afrique centrale, l'Afrique de l'est et l'Afrique australe, possèdent tous un sens particulièrement vif de la solidarité d'abord au sein de la famille, souvent très large, puis au niveau du village, de la tribu et de la communauté ethnique, d'où, chez elles, une conception plus communautaire de la notion de droit, de propriété ou plus souvent de droit d'usage du sol et des eaux, selon leur droit coutumier traditionnel. La charte des nations-unies de 1945, la déclaration universelle des droits de l'homme de 1948 et les pactes internationaux subséquents de 1966 ont constitué un ensemble idéologique et normatif. La conférence de Téhéran en 1968, à l'occasion du 20è anniversaire de la déclaration universelle, puis la seconde conférence mondiale sur les droits de l'homme organisée à vienne en 1993 ont réaffirmé solennellement le principe de l'universalité des droits de la personne humaine. Cette question ne va pas de soi. En effet dans les rapports 78 nord-sud, entre pays riches et pauvres. Les valeurs idéologiques, les cultures, les conceptions de la démocratie sont variées, selon que l'on se trouve en Europe, en Afrique, en Amérique ou en Asie. Les états africains ont fait valoir aux pays industrialisés que les droits de l'homme ne sauraient être conçus in abstracto, qu'ils étaient le produit d'un contexte historique et d'un environnement, culturel et spirituel spécifique. Alors que la conception occidentale est centrée sur l'individualisme libéral et sur la primauté de la personne sur le groupe, les valeurs traditionnelles africaines mettent l'accent sur le primat de la collectivité sur l'individu, des devoirs sur les droits de la solidarité sur l'égocentrisme. La charte africaine des droits de l'homme et des peuples, adoptée par l'organisation de l'unité africaine (OUA) à Nairobi en 1981, est particulièrement importante dans la mesure où elle fait référence, dans son préambule aux « valeurs de la civilisation africaine » et proclame à l'article 24 que « tous les peuples ont droit à un environnement satisfaisant et global, propice à leur développement »50. Le droit à l'environnement ainsi reconnu n'est pas individuel, mais collectif en ce qu'il appartient aux peuples. Il y a cependant lieu de noter que ce droit est, pour la première fois, intégré dans un traité dont les auteurs sont des pays en voie de développement pour lesquels il est particulièrement difficile à court terme de concilier la protection de l'environnement et le développement. Eclairés à la lumière du droit à l'environnement, d'autre articles de cette charte africaine sont essentiels - L'article 9 qui prévoit que toute personne a droit à l'information, - L'article 13 qui mentionne le droit des citoyens de participer librement à la direction des affaires publiques de leurs pays, - L'article 16 qui indique toute personne au droit de jouir du meilleur état de santé physique et mentale qu'elle soit capable d'atteindre. Les mesures de sauvegarde de la charte sont assurées par la commission africaine des droits de l'homme et des peuples, et peuvent être appliquées à leur égard. 2. Cadre régional très mobilisé sur le secteur de l'eau Aujourd'hui, l'Afrique se compose d'une cinquantaine de pays indépendants dont les frontières « géométriques » ignorent, les plus souvent, les géographies physiques et 50 Charte Africaine des droits de l'homme et des peuples, 1981, art24 Expérience unique, le nouveau partenariat pour le développement africain (NEPAD) qui associe les pays africains à ceux de l'OCDE, propose des voies nouvelles pour 79 humaines, tous sont regroupés au sein de l'union africaine qui a succédé à l'organisation de l'unité africaine et reste basée à Addis-Abeba, capitale de l'Ethiopie. Parallèlement, les moyens de la banque africaine de développement dont le siège a été transféré d'Abidjan à Tunis (avec la facilité africaine de l'eau) et le rôle de la commission économique pour l'Afrique des nations-unies (avec le forum de l'ONU sur l'eau en Afrique) sont en cours de renforcement, avec le soutien de la communauté internationale, notamment du fond monétaire international (FMI), de la banque mondiale(BM) et de l'union européenne, grâce à l'appui remarqué de la France et du Royaume-Uni dans le cadre du nouveau partenariat pour le développement de l'Afrique (NEPAD). On a heureusement pu constater ces derniers années, un repositionnement spectaculaire des priorités liées à l'eau , les préoccupations et les objectifs des acteurs africains. C'est ainsi que : - La vision africaine de l'eau pour le XXIè siècle dans le cadre de la vision mondiale de l'eau, élaborée par le conseil mondial de l'eau, a été présentée et débattue lors du forum mondial de l'eau, organisé à la Haye en mars 2000 ; - En septembre 2001, sous l'égide de la banque africaine de développement (BAD) a été crée le haut comité africain de pilotage pour l'eau (AWTF : African Water Task Force) qui a adopté une position commune, en décembre 2001, à Bonn, lors d'une conférence internationale sur les eaux douces ; - La mobilisation s'est progressivement étendue à toute l'Afrique par la voie de conférences thématiques entre opérateurs, décideurs et scientifiques (notamment à Accra en avril 2002) ; - En avril 2002, 43 ministres africains chargés de l'eau, réunis à Haye puis à Johannesburg en septembre 2002, ont créé un conseil permanent (AMCOW : African Ministerial Concil for Water) pour assurer, sous l'égide de la nouvelle union africaine, la direction politique, imprimer les orientations et conduire les actions en faveur de la bonne gestion de l'eau sur le continent : c'est la première mobilisation, à pareille échelle et de niveau aussi élevé existant actuellement dans le monde en matière d'eau. 3. Le programme du nouveau partenariat pour le développement de l'Afrique 80 sortir l'Afrique des cercles vicieux de la pauvreté et des conflits. L'AMCOW et l'AWTF ont obtenu l'inscription de l'eau dans le programme du NEPAD qui propose ainsi quatre lignes d'action :
Il s'agit d'une plate-forme de coopération bailleurs/bénéficiaires améliorant les synergies et dégagement des solutions de partage des risques pour attirer des financements supplémentaires. |
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