Nécessité de la rétention et de l'exécution de la peine de mort en droit positif congolais.( Télécharger le fichier original )par Chrispin BOTULU MAKITANO Université de Kisangani - Licence 2014 |
Section III. ROLE ET PROCEDURE D'EXECUTION DE LA PEINE DE MORT§1. Rôle de la Peine de MortLa vie en société est comprise comme un contrat représenté par une entente entre deux parties. Si l'une des parties ne remplit pas ses obligations, elle est vue comme nulle ou sans effet ; la partie déviante est sortie du contrat par sa propre volonté et, par conséquent, les deux parties restent maintenant libres comme un oiseau.48(*) Lorsqu'on transpose cette représentation au droit criminel, les individus en tant que parties au contrat s'entendent sur le fait que le législateur ordinaire va définir certains comportements comme des crimes. Les parties n'indiquent pas dans le contrat que la liberté et la sûreté d'un coupable éventuel doivent être constituées comme principes directeurs et d'évaluation pour choisir et déterminer les sanctions : les autorités restent alors libres de traiter les sanctions à partir d'autres finalités, fondements ou critères. Elles peuvent sélectionner des finalités qui sont extérieures aux droits des transgresseurs sans tenir compte en même temps de leurs droits. Il faut infliger le mal pour causer le bien ou rendre justice. Pour Aristote, le libre arbitre est le propre de l'homme, le citoyen est responsable de ses actes. S'il y a eu crime, le juge doit définir la peine permettant d'annuler le crime en le compensant. C'est ainsi que les indemnités pécuniaires sont apparues pour les criminels les plus récalcitrants et dont la réhabilitation est jugée possible. La peine de mort est nécessaire, cette philosophie vise d'une part à protéger la société et d'autre part à la compenser en vue d'annuler les conséquences du crime commis. Et en plus de protéger la société, cette peine devait permettre de satisfaire la victime, ainsi que les cas des peines exemplaires, de dissuader les criminels. Cette peine (de mort) est considérée comme une défense légitime de la société et que réalisant l'élimination physique du délinquant, elle paraît efficace. La peine a donc pour importance qu'elle est curative, corrective, protectrice, voire réparatrice. Même si la peine tend à prévenir un mal plus grand, c'est-à-dire produire un bien, elle n'est pas moins un mal car toute peine en elle-même est nécessairement odieuse, et punir c'est infliger un mal à un individu, avec intention directe par rapport à ce mal.49(*) §2. Procédure d'exécution de la Peine de MortL'exécution de la peine de mort est régie par l'arrêté du Gouverneur Général du 09 Avril 1898, modifié par une ordonnance du 24 Janvier 1948. L'exécution de la peine de mort se fait par la pendaison pour les civils et par les armes pour les militaires.50(*) Le condamné à mort est exécuté suivant le mode déterminé par le Président de la République.51(*) La peine de mort s'exécute sur réquisition du ministère public. Il est rationnellement admis de surseoir à l'exécution de la peine de mort jusqu'à ce qu'il ait été statué sur l'éventuel recours en grâce. Dans ce cas, elle ne sera pas exécutée avant le rejet du recours. Elle est exécutée, une fois le recours en grâce rejeté, dans la localité déterminée par l'officier du ministère public, mais à l'endroit choisi par l'autorité administrative.52(*) L'exécution de la peine de mort n'a pas lieu publiquement, sauf dans le cas où il serait décidé autrement par le gouverneur de la province. Toutefois, l'autorité administrative invite à y assister les autorités coutumières du lieu de l'exécution et, s'il échet, celles du lieu où l'infraction a été commise. Il est dûment interdit d'exécuter la peine de mort contre une femme enceinte, il n'y sera procédé ainsi qu'après sa délivrance.53(*) L'officier du ministère public doit être présent sur le lieu de l'exécution. Il doit adresser une réquisition à l'exécution après lecture du dispositif du jugement de condamnation et après vérification du contexte exécutoire de la sentence et de la régularité de la procédure.54(*) Pratiquement, l'exécution a lieu dans l'enceinte d'une prison, à moins que, pour des raisons d'exemplarité et d'intimidation, le gouverneur décide qu'elle aura lieu publiquement. L'usage veut que l'officier de ministère public soit revêtu de la robe et ceint de l'écharpe aux couleurs nationales. Il doit par-là dresser un PV de supplice.55(*) Un ministre de culte assiste à l'exécution,56(*) et par usage, un médecin constate le décès. Il est interdit de procéder, au moyen d'appareils photographiques, à la prise de vue d'une exécution de la peine de mort.57(*) Pour éviter des exécutions hâtives, des instructions du parquet exigent aux officiers du ministère public d'interjeter appel chaque fois qu'il s'agit des condamnations à mort, et de surseoir à l'exécution en attendant qu'il soit statué sur le recours en grâce qu'ils sont toujours tenus d'introduire auprès du Président de la République.58(*) Donc, la question de l'abolition de la peine de mort n'est pas toujours résolue en RDC, en dépit de ce fameux moratoire qui suspend son exécution, surtout que les interventions et les recommandations en faveur de cette abolition n'y aboutissent à aucun effet. D'ailleurs, on remarque que la plupart des infractions pour lesquelles la peine de mort s'applique, que ce soit en droit pénal commun ou en droit pénal militaire, ont des conséquences directes avec des vies humaines dont on prétend protéger et qui font l'objet d'une protection plus particulière grâce au caractère sacré que consacrent les textes juridiques du pays. A cet effet, la peine de mort sert d'un outil très efficace pour assurer cette protection. * 48 HUGUES, D., Les droits de l'homme, bouclier ou épée de droit pénal ?, éd. Bruylant, Bruxelles, 2007, p. 383. * 49 BENTHAM, J., Traité de législation civile et pénale, éd. Dumont, Bruxelles, 1892, p. 20. * 50 Article 1er de l'Arrêté du Gouverneur Général du 09 Avril 1898. * 51 Article 6 du Décret du 30 Janvier 1940 portant Code Pénal Congolais. * 52 Article 2 de l'Ordonnance du 24 Janvier 1948. * 53 Article 3 de l'Arrêté du Gouverneur Général du 09 Avril 1898 et article 2 de l'Ordonnance du 24 Janvier 1948. * 54 LUZOLO BAMBI LESSA, Cours de Procédure Pénale, UNIKIS, FD, G2, 2010-2011. * 55 LUZOLO BAMBI LESSA, op. cit. * 56 Article 4 de l'Arrêté du Gouverneur Général du 09 Avril 1898 ; * 57 LUZOLO BAMBI LESSA, op. cit. * 58 ESIKA, cité par NYABIRUNGU Mwene SONGA, op. cit., p. 365. |
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