B) les insuffisances législatives au Burkina
Faso
Le Burkina et le Mali présentent les mêmes
insuffisances. Le cadre normatif des deux Etats présente des faiblesses
qui empêchent la régulation adéquate des enjeux
environnementaux liés à l'orpaillage.
? Les mesures de protection au Burkina Faso
On note ces mesures tant au niveau du code de l'environnement
que du code minier. La loi n° 031-2003/AN du 08 mai 2003 portant Code
minier au Burkina organise une certaine protection des espaces et des paysages.
D'abord, la superficie accordée pour une autorisation d'exploitation ne
doit pas excéder cent (100) hectares70. Ce qui a l'avantage
de limiter les dégâts sur l'environnement dans une zone
donnée. A la différence du code minier malien, le code
burkinabé organise expressément la protection des terres
agricoles et des cultures. ce code interdit expressément à
l'exploitant traditionnel de faire des travaux sur les terrains de culture et
de toucher aux irrigations sauf consentement des exploitant des dites terres
sous peine de réparation des éventuels dommages71.
Il y a cependant une similitude avec le code malien. C'est la
prescription d'un rayon de cent (100) mètres des dispositifs religieux,
domestiques et culturels dans lequel tous travaux de prospection, de recherche
et d'exploitation est interdit sans le consentement des propriétaires ou
possesseurs7273. La protection des espaces et
69 Voir article 40 et suivant du DECRET
N°01-404/P-RM DU 17 SEPTMEBRE 2001 déterminant les conditions et
modalités d'exercice des droits conférés par les titres
d'exploitation des ressources forestières
70 Article 48 de la loi n° 031-2003/AN du 08 mai
2003 portant Code minier au Burkina
71 Article 49 de la loi n° 031-2003/AN du 08 mai
2003 portant Code minier au Burkina 72Article 63 de la loi n°
031-2003/AN du 08 mai 2003 portant Code minier au Burkina 73Article
25 : DECRET N° 2007-853/PRES/PM/MCE/MECV/MATD du 26 décembre 2007
portant dispositions réglementaires environnementales
particulières pour l'exercice de l'activité minière au
Burkina Faso
42
des paysages est faite par le biais de zones de
protection et d'interdiction. Ces zones sont, contrairement à
la règlementation malienne qui parle de « couloir
d'orpaillage », des zones de dimensions diverses établies
pour la protection et la préservation des sites
archéologiques, des travaux d'ouvrages ou de service public ainsi que
pour la sécurité nationale et l'intérêt
général.
Dans le cadre de la protection des espèces, le code
Burkina stipule que l'utilisation des ressources en eau, et de la flore
s'effectue à l'intérieur des périmètres
d'exploitation conformément aux lois et règlements en vigueur.
Avant tous travaux, l'exploitant artisanal tout comme
les industriels est tenu d'élaborer un règlement
relatif à la santé et à la
sécurité. Ils sont par ailleurs tenus de respecter les
règles relatives à la santé publique et à la
sécurité des biens74. Une autre différence avec
la législation malienne est l'exigence de la notice ou de
l'étude d'impact sur l'environnement et l'ouverture d'un compte
fiduciaire pour servir à la constitution d'un
fonds pour couvrir les couts de mise en oeuvre des programmes
de préservation et de réhabilitation de l'environnement.
Il en est de même de l'obligation de déclarer
à l'administration tous travaux de sondage, ouvrage
souterrain et de fouilles dont la profondeur dépasse vingt (20)
mètres. Dans le cas où le bénéficiaire de
l'autorisation administrative exercerait son activité de
façon traditionnelle au sens du Code minier, le dossier de
demande d'autorisation, n'inclut pas d'étude ou de notice d'impact
environnemental. Cependant, le bénéficiaire est tenu d'y
adjoindre un engagement à respecter les obligations
environnementales découlant des textes en vigueur75.
L'autorisation d'exploitation artisanale traditionnelle est alors
attribuée après consultation des autorités
administratives compétentes et des communes urbaines ou rurales
concernées. Toutes ces obligations sont applicables au titulaire du
permis d'exploitation artisanale semi-mécanisée
et de l'autorisation d'exploitation traditionnelle.
Par ailleurs, le Burkina Faso se distingue du Mali par
l'existence d'un code de l'environnement. En effet, ce code de l'environnement
énonce les principes généraux de l'environnement parmi
lesquels les principes de prévention, de précaution, de
pollueur-payeur et de préleveur payeur et du même coup
laissent une grande place
74 Article 73 et suivant de la loi n° 031-2003/AN
du 08 mai 2003 portant Code minier au Burkina
75 DECRET N° 2007-853/PRES/PM/MCE/MECV/MATD du
26 décembre 2007 portant dispositions réglementaires
environnementales particulières pour l'exercice de l'activité
minière au Burkina Faso
43
aux collectivités dans la protection et la gestion de
l'environnement76 . L'orpaillage peut être
considéré comme pris en compte par l'article 37 qui stipule que
« Toute exploitation industrielle, minière, agricole ou
artisanale et en général, le fonctionnement de tout
établissement se fait de sorte à éviter les atteintes
nuisibles ou incommodantes à l'environnement.» Mais en
dépit de toutes ces précautions, il y a e des insuffisances dans
ces mesures de protection de l'environnement
? Les insuffisances des mesures de protection.
Tout comme au Mali, avant l'exploitation de l'or, il n'y a
aucune exigence d'évaluation environnementale préalable comme
conditions d'attribution de l'autorisation d'exploitation
considérée comme une simple autorisation administrative. Il est
tout simplement demandé au futur exploitant de tenir un engagement
à respecter les obligations environnementales découlant des
textes en vigueur. On relève les mêmes insuffisances qu'au Mali
notamment le choix laissé aux exploitants et propriétaires de
décider ensemble du sort des édifices, monuments et autres biens
situés dans un rayon de cent mètres. Il en est de même des
principes de précaution et de prévention qui sont
également inappliqués à l'orpaillage.
La technique des établissements classés,
prescrite par la loi N°006-2013/AN du 02 avril 2013 portant code de
l'environnement au Burkina Faso semble placer l'orpaillage parmi les
activités non dangereuses en raison de l'absence d'évaluation
préalable des impacts environnementaux. Les espèces
situées à l'intérieur des périmètres
d'exploitation sont laissées à la merci des orpailleurs. Pourtant
l'Arrêté no 2004 -019/MECV du 17 Juillet 2004 portant
détermination de la liste des espèces forestières
bénéficiant de mesures de protection particulière
détermine les espèces protégées sur toute
l'étendue du territoire national. Elles ne peuvent être abattues,
arrachées, mutilées ou incinérées qu'après
autorisation des services compétents chargés des forêts
sauf dérogations particulières qui peuvent être
accordées77. Pourtant sur le terrain, de nombreuses
espèces protégées telles que le Karité, le
cailcédrat et le néré sont abusivement abattues.
76 Article 9 et 12 de loi N°006-2013/AN du 02
avril 2013 portant code de l'environnement au Burkina Faso
77 Article 2 et 3 de l'Arrêté no 2004
-019/MECV portant détermination de la liste des espèces
forestières bénéficiant de mesures de protection
particulière
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En somme, les lacunes de la règlementation des enjeux
environnementaux liés à l'orpaillage présentent presque
les mêmes caractéristiques dans les deux pays. Il y a d'abord les
difficultés liées à l'application des textes existant en
la matière. Ces textes sont méconnus et mal
interprétés par les acteurs de l'orpaillage en raison de
l'ambiguïté et de l'absence de précision dans leur contenu,
des décrets et arrêtés d'application n'étant pas
adoptés pour expliciter ce contenu. On constate surtout dans la plupart
des cas l'absence de règlementations spécifiques sur les enjeux
les plus criards des enjeux environnementaux de l'orpaillage. Ensuite, les
exploitants artisanaux ne s'approprient pas les textes et ne l'appliquent pas.
Dans les deux Etats, il n'y a pas de contrôle de la conformité des
techniques et méthodes d'exploitation lié aux textes en vigueur.
Enfin, bien que les deux pays aient signé et ratifié plusieurs
conventions internationales avec l'obligation de prendre les mesures
appropriées pour la protection de l'environnement et
l'amélioration de la qualité de vie78 il n'y a pas de
conventions spécifiques au niveau international sur les mines. Ce qui
pose des problèmes de considération de ces textes au niveau
institutionnel.
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