DEUXIEME PARTIE :
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UNE CONTRIBUTION PERFECTIBLE
Depuis son repositionnement sur la scène politique
mondiale, l'OIF s'est impliquée véritablement dans la
consolidation et l'affermissement de la démocratie en Afrique en
général et tout particulièrement en Afrique de l'ouest.
Que ce soit en matière de la promotion d'une culture politique
intériorisée, des efforts dans la prévention et de la
résolution des conflits..., elle a été toujours aux
côtés des Etats membres pour leur apporter son soutien, notamment
en expertise, en formation et en moyens financiers. Cependant, malgré
cet effort de l'OIF, on note des insuffisances qui mettent à mal la
pertinence de ses actions faisant dire
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que c'est une contribution laborieuse. Il convient donc
d'examiner les difficultés auxquelles elle est confrontée
(Chapitre I) afin d'apporter des perspectives dans le sens du renforcement de
ses actions (Chapitre II).
CHAPITRE I : LES LIMITES DES ACTIONS DE L'OIF
L'OIF mène des actions extrêmement variées
eu égard à ses nombreux domaines d'intervention.
Le bilan de l'investissement de l'OIF semble présenter un actif
impressionnant mais aussi un passif palpable. Ses actions manquent de
pertinence et d'efficacité en raison des difficultés auxquelles
elle est confrontée. Ces limites peuvent être liées d'une
part à l'organisation elle-même (Section I) et aux actions des
Etats membres d'autre part (Section II).
Section I : Les difficultés intrinsèques
à l'OIF
De nombreux obstacles internes ne permettent pas à
l'OIF de mener à bien les objectifs qui sont les siens notamment l'aide
à l'instauration de la démocratie et de l'Etat de droit. Ces
difficultés font de l'OIF une organisation affaiblie (Paragraphe I) avec
comme conséquence le manque de pertinence et d'efficacité
relative de ses actions (Paragraphe II).
Paragraphe I : Une organisation affaiblie
90 Voir notamment le rapport de l'Observatoire,
Délégation à la paix, à la démocratie et aux
Droits de l'homme (DDHDP), OIF, 2006.
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Au départ essentiellement consacrée à la
culture, l'OIF s'est assignée au fil des années bien d'autres
missions qu'elle ne parvient pas toujours à remplir comme cela convient.
Le manque d'efficacité de ses actions trouverait son origine dans la
multiplicité des objectifs à atteindre (A) et dans l'insuffisance
des ressources financières à sa disposition
(B).
A- La multiplicité des objectifs à
atteindre
La raison de la création de l'OIF est originellement
liée au souci de regrouper l'ensemble des Etats ayant en partage la
langue française. L'OIF a aujourd'hui bien d'autres missions. Elles
ressortent nettement des déclarations adoptées par les sommets et
les conférences, et des rapports du Secrétaire
Général : la langue française et l'éducation, la
culture démocratique des droits de l'homme, le renforcement de
l'influence de la Francophonie dans les relations internationales, la
diversité culturelle, le renforcement de la concertation et de la
solidarité Nord-Sud. L'OIF est donc présente sur tous les fronts.
Elle embrasse tous les domaines d'activités sans pour autant
véritablement arriver à les réaliser avec efficience.
L'OIF s'occupe de politique, d'économie et de culture sans en avoir
toujours les moyens; ce qui fait dire qu'il y a un éparpillement dans
les objectifs à atteindre.
Le 2e rapport de l'Observatoire des pratiques de la
démocratie conduit par la Délégation à la Paix,
à la Démocratie et aux Droits de l'homme (DDHDP) met en
lumière concernant, les objectifs fixés, des insuffisances, des
lacunes, voire des échecs.90 Ce rapport souligne à
titre d'exemple les effets pervers de la « consolidation »
forcée de la démocratie et de l'état de droit dans nombre
d'Etats du Sud. En effet, il y a eu un risque de « surinvestissement
institutionnel » pour des Etats incapables de dégager les moyens
humains et matériels nécessaires pour donner consistance aux
dispositifs conformes aux standards internationaux. On note aussi une
prolifération d'institutions notamment juridictionnelles et para
juridictionnelles toujours plus spécifiques et sophistiquées ; de
même on observe des difficultés à «
intérioriser » l'Etat de droit et à faire fonctionner des
institutions surdimensionnées et inadaptées d'où il faut
craindre les dangers du « mimétisme institutionnel ».
Quelque fois, on note une certaine dichotomie entre les
objectifs affichés et les capacités concrètes de
l'organisation en matière de consolidation de la démocratie, des
droits de
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l'homme et de l'Etat de droit. C'est ce qui explique justement
le fait que les initiatives de l'organisation manquent d'efficacité et
restent peu connues en dehors de ses propres instances. Le préambule du
cadre stratégique de 2004 défini à Ouagadougou
reconnaît d'ailleurs implicitement la faiblesse des capacités de
l'organisation raison pour laquelle il souligne la nécessité
d'avoir des « objectifs resserrés et en nombre restreint ».
Cette situation, non des plus envieuses, a amené les
Chefs d'Etat et de gouvernement à repenser les objectifs de l'OIF.
Ainsi, la nécessité de réagir contre
l'éparpillement des initiatives et de recentrer le champ d'action de
l'OIF est énoncée publiquement lors du Sommet de Beyrouth en
octobre 2002. Cependant, le manque de pertinence et le recadrage
nécessaire des objectifs de l'OIF ne peuvent à eux seuls
expliquer l'absence de vitalité de cette organisation tant de nombreuses
insuffisances ou nombreux échecs trouvent leurs causes dans
l'insuffisance de ressources financières.
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