2.2.2.4.La perception et la
fonction du travail des enfants dans les sociétés africaines
Selon Rodgers et standing, (1981 cité par Lachaud,
2003 : 3), les « normesculturelles » revêtent et jouent
un rôle importantdans les sociétés africaines.
Ainsi, le travail des enfants y est moulé dans des
réalités sociales et culturelles complexes. Le travail des
enfants est perçu dans les sociétés traditionnelles
africaines comme une forme de socialisation et d'éducation de l'enfant.
Il le prépare à sa vie de future adulte (Tingbé-Azalou,
sd : 4 ; Lachaud,op.cit ; Diallo, 2008 : 2). Cette
perception du travail des enfants peut être assimilée à
celle du moyen-âge dans les sociétés occidentales où
les enfants participaient à divers activités agricoles, ou du
ménage lorsque leurs capacités physiques le leur permettent
(Alexandre et Lett, 1998 ; Manier, 1999 cités par Bahri et
Gendreau, 2002 : 497).
« L'héritage culturel des Africains est
constitué d'une société à tendance
gérontocratique où les aînés et les cadets ont des
fonctions bien différentes.... Dans ce processus, les enfants doivent
travailler sur les terres des aînés ou des parents, pour le compte
de ceux-ci. En contrepartie, ils auront différentes formes d'assurance :
l'obtention de femmes à épouser, de logement et de terres
à cultiver pour leur propre compte, etc » (Koulibaly,
1997 cité par Diallo, 2008 : 3). De fait, l'organisation sociale
des exploitations familiales en milieu rural favorise très tôt
l'entrée des enfants sur le marché du travail (Lachaud,
2003 : 3-4).
Cependant, cet aspect traditionnel du travail des enfants est
de plus en plus galvaudé. En effet, loin d'être une forme de
socialisation et d'éducation, le travail des enfants assure dans le
contexte africain actuel une fonction purement économique et
monétaire, allant jusqu'à l'exploitation des enfants (Bahri et
Gendreau, op.cit.).
Le phénomène
« vidomégon » au Bénin en est une
illustration parfaite. Il consiste à déplacer l'enfant de chez
ses parents biologiques et à le placer chez l'un de ses parents proches
ou éloignés dans le cercle familial élargi. Jadis, la
pratique de « vidomégon » était une forme de
socialisation, d'éducation et de protection de l'enfant. Elle
était également une forme de resserrement des liens sociaux
entre les membres de la grande famille. Mais depuis plusieurs décennies,
plusieurs facteurs sociaux et économiques (économie du
marché ; avènement des familles nucléaires...)
entraîne une marchandisation et l'exploitation économique pure et
simple de l'enfant placé. Ce dernier est de plus en plus victime de
formes de violences et de maltraitances de tout genre, de la traite et soumis
illégalement et précocement au travail (Hounyoton, 2009).
Le phénomène des enfants talibés est une
autre forme de détournement de l'éducation et de la socialisation
des enfants au Sénégal. Destiné à faire
acquérir à l'enfant le sens de l'humilité et celui de la
vie religieuse, l'éducation religieuse des enfants s'est
transformée en activité lucrative où les enfants sont
envoyés mendier dans les rues pendant plus de 10heures par jour
(Barboza, 2006 : 5-6).
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