VII- NECESSITE D'UNE CONCERTATION NATIONALE
88
Toutes les personnes interrogées ont reconnu
l'existence du déséquilibre social dans la société
guinéenne. Hormis quelques uns, la majorité admet la
nécessité de la création d'une commission
vérité, justice et réconciliation chargée de
conduire les assises nationales pendant lesquelles les différents du
peuple seront résolus. Mais ils sont convaincus que la réussite
du travail de cette commission dépendra largement de plusieurs facteurs
qu'ils estiment indispensables à l'unité des guinéens.
7.1.Les conditions indispensables pour l'unité
nationale
Les facteurs pouvant conduire à l'identité
nationale guinéenne sont variés selon qu'il s'agit des
enquêtés de l'opposition ou des enquêtés de la
mouvance présidentielle.
7.1.1. Les exigences de l'opposition
Les conditions évoquées par cette catégorie
d'enquêtés sont entre autres :
- Une justice équitable pour tous les citoyens:
se sentant marginalisé et victime d'un système politique
qui maîtrise l'appareil judicaire pour ses intérêts, ces
enquêtés réclament plus de justice entre les
différentes composantes de la nation ;
- Jugement et condamnation des coupables
d'évènements politiques : pour eux, les coupables des
évènements politiques doivent être arrêtés,
jugés et condamnés. Ce n'est qu'après cela que la
commission de réconciliation peut être envisagée. Cette
position s'explique par la l'état de la douleur que ces
évènements ont causés dans le coeur des citoyens membres
de l'opposition ;
- Le patriotisme : pour ces
enquêtés, en Guinée, l'ethnocentrisme prime sur le
patriotisme. Ils considèrent que le pays ne peut pas avancer dans de
telles conditions. Ils accusent les cadres de jouer à la carte ethnique
au lieu de favoriser l'intérêt national. Pour eux, tous ceux qui
disent aimer la Guinée ne doivent pas favoriser une ethnie par rapport
à une autre mais doivent oeuvrer pour la construction de la nation
guinéenne, c'est-à-dire, mettre l'intérêt de la
patrie au dessus de tout ;
- Libération des prisonniers politiques :
Pour les enquêtés, les prisonniers politiques sont
principalement des personnes qui ont été arrêtées
pendant des manifestations de l'opposition et qui sont détenues dans les
prisons. Certains ont été jugés et condamnés
à des peines de prison ferme et d'autres à des peines de prison
par sursit. Sont aussi
89
designer comme prisonniers politiques, les personnes civiles
ou militaires qu'ils considèrent être innocentes et qui ont
été victimes des vagues d'arrestations qui ont suivi la tentative
d'assassinat contre la personne du président de la république.
Certains ont été jugés et d'autres sont détenus
sans jugements. La majorité des condamnés sont du groupe
socioculturel peul. Pour ces enquêtés, cela ne favorise en aucun
cas la réconciliation nationale tant souhaité par les
guinéens. Ils estiment donc que la libération de ces prisonniers
serait un véritable signe de la volonté du pouvoir à
réconcilier les fils et filles du pays ;
- Prendre soin des enfants des victimes des
évènements politiques : Il s'agit selon les
enquêtés, d'apporter un soutien aux personnes ayant perdu leurs
parents suite à des évènements politiques. Certains sont
morts en laissant derrière eux des enfants mineurs qui ne peuvent
satisfaire aucun de leur propre besoin. Les familles qui les approche ne
s'occupe pas d'eux convenablement qu'ils sont souvent tenus obligés
d'aller à la mendicité. Si l'Etat n'apporte pas son soutien
à ceux-ci, ils finiront par rester des enfants de la rue alors qu'ils
pouvaient bien être utiles à la nation. En les assurant le
logement, la nourriture, l'éducation et autres besoins financiers,
l'Etat aura sauvé ces enfants de toute tentative d'exercice de
métiers illégaux comme le trafic de stupéfiants pouvant
compromettre la quiétude sociale ;
- L'équilibre ethnique dans la gestion
administrative :Pour ces interviewés, il y a un
déséquilibre ethnique dans la gestion administrative car, les
postes stratégiques sont confiés aux membres du groupe
socioculturel du président élu. Toutes les personnes
soupçonnées ou connues d'être fideles à l'opposition
(surtout les peuls), sont marginalisées à cause de leur
appartenance socioculturelle. Pour eux, le président élu doit
refonder son gouvernement en intégrant toutes les composantes
socioculturelles du pays afin d'obtenir un gouvernement représentatifs
de tous les guinéens. Cet équilibre doit être maintenu dans
toutes les structures administratives pour permettre à chaque groupe
socioculturel de se sentir chez lui ;
- Répartition égale des ressources :
Pour ces enquêtés, les ressources du pays ne sont pas
destinées à une catégorie de personnes mais à
l'ensemble des citoyens du pays. Il faut donc créer des conditions de
répartition égale de ces ressources afin que tous les
contribuables bénéficient des richesses du pays sans aucune
distinction régionale, socioculturelle et partisane.
90
Ces enquêtés pensent que ce n'est qu'en faisant
preuve de bonne gouvernance que les guinéens et guinéennes feront
confiance à leurs dirigeants et a eux mêmes et par
conséquent, la réconciliation peut porter fruit car, la confiance
en l'autre est un facteur clé de toute réconciliation. La
mouvance de son côté pose des exigences face à l'opposition
qu'elle accuse de tous les maux.
|