Approche socio-anthropologique des institutions d'intégration des personnes à¢gées : le cas de l'êbeb chez les Odjukru (côte d?ivoire)( Télécharger le fichier original )par Fato Patrice KACOU Université Félix Houphouet Boigny de Cocody-Abidjan - Thèse Unique de Doctorat en Sociologie 2013 |
4.2.6.4- Distinction des milacmeAprès les nênici, nous avons la dernière catégorie de personnes âgées, celle des milacme qui a pour signification: la cendre. C'est le quatrième ordre d'êbebu à la retraite. Les individus de cette catégorie sociale de personnes âgées ont à l'entrée un âge qui varie entre 92 et 100 ans. Ils sont à leur tour sollicités à titre consultatif par les nênici. La cendre est le résidu de toute combustion. Cette catégorie sociale de personnes âgées se présente comme la catégorie des individus qui ont pu subsister, qui ont pu traverser toutes les étapes et toutes les épreuves de la vie. Ce sont eux qui restent de la société, ce sont des monuments. Nous rappelons qu'aucun de nos enquêtés n'a encore atteint ce summum. La cendre, loin de traduire une insignifiance, traduit un exploit, un modèle de vie et de longévité dont les autres membres de la société doivent pouvoir s'inspirer. Les quatre distinctions post-êbebu que nous venons de décrire, sont des organes consultatifs auxquels peuvent recourir les êbebu au pouvoir. Elles indiquent que quel que soit l'âge, l'individu est utile à la société. Certes, les fonctions physiologiques décroissent. Cependant, du point de vue métaphysique, le vieillard a une grande âme. Et cette grandeur spirituelle, il la doit à ses distances avec les plaisirs charnels. L'ordre des consultations se fait des êbebu aux lêlessel, des lêlessel aux lakpikine, des lakpikine aux nênici, et des nênici aux milacme et jamais en sens contraire. Voilà un prototype de société qui instaure une culture du vieillissement loin des approches pathologiques de la vieillesse. Aussi cette description montre-t-elle l'utilité de la personne âgée et son intégration en pays Odjukru. Dans certaines sociétés lorsque la personne âgée au pouvoir manifeste des signes physiques de faiblesse, elle est mise à mort. C'est le cas chez les Shilluk du Soudan180(*) où le roi est mis à mort dès les premiers signes de dégradation physique. La vieillesse et la longévité restent fondamentalement dans la conscience collective Odjukru des faits sociaux revêtus d'une signification noble. Ce que la culture enseigne à ses membres, à travers le processus de socialisation, c'est de se conformer à l'éthos pour s'attirer la grâce d'une vie épanouie à tous les stades de la vie notamment à l'âge adulte et au grand âge. Nous posons ainsi la question des facteurs déterminants de la longévité. * 180Philippe Laburthe-Tolra, Jean-Pierre Warnier, op. cit., p.131. |
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