D. PORTRAITS D'HABITANTS DU PECH35
1. Suzanne DEPAS
Âgée de 69 ans, Mme Depas est la mère de 5
enfants, la grand-mère de 20 petits enfants et 20 arrière petits
enfants. Elle vit à Saint Jean du Falga avec son mari. Dans les
années soixante, âgée d'une vingtaine d'années, elle
fut l'une des dernières habitantes du Pech pendant environ un an et demi
; avec son mari, son fils de deux ans et sa fille, née durant cette
période sur le Pech. Malgré les conditions de logement
rudimentaires et les difficultés, l'amour qui l'unissait à son
mari36 et la tranquillité des lieux lui ont fait garder de
très bons souvenirs de cette période et de ce lieu qu'elle
appelle « son petit paradis ».
C'est une cabane au sol de terre battue, sans eau ni
électricité, située en contrebas de la maison à la
citerne sur le chemin des asperges. Son mari remontait chaque soir de l'eau de
la source située à la préfecture. Pour laver le linge et
faire la vaisselle, l'eau de la citerne de la maison du dessus suffisait. Le
bois, ramassé aux alentours et transporté sur le dos, en fagot,
alimentait la petite cheminée de l'habitation. Pour améliorer
l'isolation du toit, ils avaient acheté des chevrons, mis de la paille
et du lino par-dessus. La table c'était quatre pieds d'acacia et une
planche, les chaises des bidons de mazout recouverts de coussins. Un sommier de
quatre planches avec de gros rochers pour les pieds faisait office de lit.
« Pour faire joli », Suzanne avait mis des petits rideaux sur le tour
du sommier. Les services sociaux ont voulu les loger en HLM, mais ils
préféraient être là, tranquilles. Finalement, pour
les enfants, ils ont fini par déménager, mais dans une maison.
Au départ, son mari rentrait tout juste de la guerre
d'Algérie, ils n'avaient donc aucun revenu. Pour compléter leur
alimentation, Suzanne cueillaient des poireaux sauvages, des
35 Cette partie comprend des redites par rapport
aux développements précédents, cela est du au choix de
faire une restitution sous forme de portraits.
36 Décédé par la suite, en
1976
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amandes, des asperges, des champignons, etc. Ils avaient aussi
des lapins et quelques poules que le renard venait régulièrement
chaparder.
Originaire du Nord de la France, Suzanne est arrivée en
Ariège pour rejoindre sa tante, qui vivait en Ariège. C'est ici
qu'elle a rencontré son mari également originaire du Nord. Au
départ, ils étaient peu appréciés, on les appelait
les étrangers. Ils ont ensuite sympathisé avec Monsieur et Madame
Baronna, originaires d'Espagne, qui habitaient plus haut, ils passaient parfois
la journée du samedi ou du dimanche avec eux. Les deux hommes
bricolaient ensemble. Suzanne les recevait aussi chez elle, ils
s'arrêtaient boire le café quand ils allaient à Foix car
c'était sur leur chemin.
Sa belle-mère vivait au bas du Saint Sauveur dans une
cabane du même type, lorsque l'une d'elles avait un problème, elle
mettait un drap blanc dans un buisson pour prévenir. Ses jeunes
belles-soeurs venaient régulièrement lui rendre visite et
l'accompagnaient dans ses cueillettes sur le Pech.
Suzanne dit avoir passé là ses meilleures
années en Ariège. Ce qui lui plaisait c'était la vue sur
la ville en dessous, le calme et la tranquillité surtout qui convenait
bien à la liberté d'esprit qu'elle revendique.
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