Chapitre 4
DÉMATÉRIALISER POUR
AMÉLIORER LA QUALITÉ DU
PROCESSUS D'AUDIT
[...] Et il n'y avait plus qu'à élire les deux
commissaires censeurs, chargés de présenter à
l'assemblée un rapport sur le bilan et de contrôler ainsi les
comptes fournis par les administrateurs fonction délicate autant
qu'inutile, pour laquelle Saccard avait désigné un sieur Rousseau
et un sieur Lavignière, le premier complètement
inféodé au second, celui-ci grand, blond, très poli,
approuvant toujours, dévoré de l'envie d'entrer plus tard dans le
conseil, lorsqu'on serait content de ses services.[...](Zola, 1891)
Comme nous le montre cet extrait de l'argent d'E.
ZOLA, les doutes quant à la pertinence des travaux des commissaires aux
comptes ne date pas de notre époque contemporaine. Dans ce roman qui
pour nombre d'observateurs fait allusion au scandale de Panama au XIX
siècle (ANZola, 2008), c'est non sans humour que l'auteur déclare
que la fonction de commissaire aux comptes, quoi que complexe, est inutile.
Comme nous le rappelle Christine FOURNES DATTIN, les commissaires censeurs
sont devenus des commissaires aux comptes; ce sont aujourd'hui des
professionnels indépendants et compétents (DATTIN and du Tertre,
2010). D'après le Haut Conseil du commissariat aux comptes, le
commissaire aux comptes est un rouage essentiel dans la recherche de
l'amélioration du fonctionnement des marchés (H3C, 2008). Nous
sommes loin de l'image caricaturale décrite par Zola.
Mon stage au cabinet EHMT m'a donné
l'opportunité de rencontrer une discipline qui, il est vrai, reste
complexe, et ce notamment en raison de son caractère
réglementaire. Mais au delà de cet aspect j'ai pu voir des
professionnels respectant une éthique, soucieux de mener à bien
leur mission avec un souci constant de l'amélioration de la
qualité de leur travail.
A l'occasion de mes déplacements sur le terrain je
discutais souvent avec les personnes que je rencontrais. La discussion ne
portait pas obligatoirement sur la comptabilité ou sur l'audit. L'audit
n'est pas seulement un métier du chiffre, c'est aussi un métier
de communication.
- Notre mission est souvent mal comprise, me disait M.
TIAMIOU, nous avons un rôle important à jouer dans l'information
de la clientèle.
Prendre contact, rassurer les personnes, instaurer un climat
de confiance. Tous ces aspects contribuent au bon déroulement de la
mission dans son ensemble.
Lors de l'une de nos visites à la société
d'expertise PwC, c'est ainsi que nous avons pu discuter avec l'un des
comptables du cabinet. Nous nous trouvions au sous-sol du
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bâtiment dans une grande salle d'environ 100
m2. Il y avait quelques postes de travail. Les murs du local
étaient tous équipés d'étagères remplis de
classeurs. C'était les archives du cabinet. Nous étions
entourés de classeurs!
- Nous ne savons plus où mettre nos archives, disait le
comptable, chaque année, nous sommes confrontés à un
problème de place. De plus les clients refusent souvent de reprendre
leurs vieux dossiers lorsque nous leur demandons de les
récupérer. Les archives représentent un coût pour le
cabinet.
- Je suis confronté au même problème,
disait M. TIAMIOU, mais avec moins de place.
J'avais constaté effectivement au cours des
précédentes missions les volumineux classeurs de travail qui
accompagnaient la mission d'audit. Ainsi pour la compagnie des spectacles les
Tulipiers le dossiers de travail pour l'année 2009 était un
épais classeur d'environ 800 pages! La société HERMES le
nombre de classeur était de trois pour le même volume de feuilles.
Il est vrai que l'audit la société HERMES portait sur trois
entités.
D'après la NEP-230, intitulée Documentation de
l'audit des comptes , le commissaire aux comptes constitue pour chaque
entité qu'il contrôle un dossier contenant la documentation de
l'audit des comptes. Cette obligation résulte des dispositions de
l'article R. 823-10 du code de commerce. Le dossier est conservé dans
son intégralité durant la durée légale de
conservation de dix ans.(CNCC, 2010)
Comme nous l'avons vu précédemment 1
le commissaire aux comptes est tenu en cas de contrôle périodique
de mettre ses documents de travail à disposition du contrôleur.
Plus généralement il convient de rappeler que la
mission du commissaire aux comptes est définie par la loi et porte
principalement sur la certification des comptes. Cette certification consiste
en l'émission d'une opinion sur les états financiers
préparés par l'entreprise. Pour mener à bien ses travaux,
le commissaire aux comptes doit appliquer les normes d'exercice professionnel
(NEP). Ces normes retracent la démarche d'audit que le commissaire aux
comptes va retenir pour lui permettre de certifier les comptes.
D'après les cahiers de l'académie
(lacademie.info, 2008) toutes les missions s'accompagnent d'une obligation
générale de conseil et d'information. Le défaut de conseil
est donc constitutif d'une faute pouvant engager la responsabilité des
professionnels et justifiant l'extension des cas de mises en cause. Un
manquement au devoir de conseil résulte généralement d'un
défaut d'information ou de renseignement traduit par une
opportunité non signalée entraînant pour le client une
perte de chance. Dans la majorité des cas, les mises en cause sont la
conséquence d'une absence de mise en garde de la part du professionnel,
notamment dans les cas où un dysfonctionnement est constaté dans
l'entreprise et n'est pas signalé aux dirigeants.
L'Ordre des Experts-Comptables de Paris Ile de France et la
Compagnie des Commissaires aux comptes estiment que les cas de mise en cause du
fait d'une Erreur relative à la certification des comptes
représentent pour les années 2004, 2005 et 2006 respectivement
12%, 8% et 7% des cas et 22%, 10% et 19% du coût total des sinistres. A
noter que le coût moyen du sinistre s'élève dans ces cas
à 120 000 euros environ sur les trois années citées
(lacademie.info, 2008).
Ces quelques chiffres clés renforcent l'idée de
la nécessité pour le commissaire aux comptes de se
prémunir contre tout risque de mise en cause.
Il apparaît que l'aptitude de l'auditeur à
organiser ses documents, à les stocker et à les ressortir en lieu
et temps opportun constitue une compétence clé. S'il devait
faillir en ce domaine ce n'est pas moins que la qualité de ses missions
d'audit qui serait remis en question par les contrôleurs
missionnés par le H3C.
Pendant la réalisation de ses travaux, le CAC doit
mettre en oeuvre les moyens lui permettant de sécuriser ses travaux et
de constituer des éléments de preuve en cas de mise
1. Paragraphe 2.3.3.2
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en cause de sa responsabilité. Il doit mettre en place un
système d'information de qualité. Le terme
système d'information a fait l'objet de multiples définitions
que nous pouvons synthétiser de la façon suivante : Le
système d'information est un système de traitement
informatisé qui permet :
~ l'acquisition d'informations, selon une forme
conventionnelle,
~ le traitement de ces informations,
~ la restitution de données ou de résultats,
sous différentes formes, fiables et objectifs. Il ne convient de
distinguer le système d'information du système informatique qui
désigne les outils employés pour traiter les informations
à un moment donné (lacademie.info, 2008) 2.
La qualité du système d'information est donc un
enjeu important dans le processus d'audit. Comme le souligne le cahier de
l'académie (2008), le système d'information améliore
efficacité, efficience, confidentialité, intégrité,
disponibilité, conformité et fiabilité.
Les objectifs d'un bon système d'information [..] [sont
de] maîtriser l'information, ne pas perdre de temps, savoir ce que l'on a
à faire, produire les informations rapidement et ne pas avoir à
tout retraiter manuellement, communiquer avec ses clients, répondre aux
sollicitations dans des temps courts
...
A l'occasion de mon stage je me suis donc
intéressé plus particulièrement à la question de
l'amélioration du processus d'audit. Amélioration dans le but
d'être efficace et donc de mieux répondre aux attentes de la
clientèle dans le cadre de la mission mais aussi amélioration
dans le but de se conformer davantage aux prescriptions du H3C.
La discussion à laquelle j'avais participé chez
PwC ainsi que les observations et questionnements ultérieur
auprès de M. TIAMIOU, m'ont conduit à formuler la
problématique suivante :
Peut-on améliorer le processus d'audit en
améliorant l'adéquation du système informatique ?
Je commencerai mon exposé par la présentation du
système informatique du cabinet EHMT, nous verrons ainsi quelle
était la configuration matériel, l'organisation, l'objectif du
système.
Dans une deuxième partie je ferai des propositions qui
pourraient contribuer à améliorer le processus d'audit.
4.1 Le système informatique du cabinet EHMT
Le cabinet EHMT est un petit cabinet se situant dans un
immeuble situé au centre de Saint-Denis rue Jean Chatel. Le bureau est
une local d'environ 50 m2 situé au première
étage du bâtiment. Une partie des murs du bureau est
équipé d'armoires à portes coulissantes remplies de
dossiers de travail (classeurs de différentes couleurs).
4.1.1 L'équipement informatique du cabinet
Le cabinet est équipé de 3 ordinateurs de type
PC, d'un routeur qui gère l'accès à internet (il s'agit du
modem ADSL fourni par le fournisseur d'accès), d'une infrastructure
réseau de bonne qualité (les goulottes et le câblage sont
récents), d'un photocopieur
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toshiba studio 230, d'un disque externe USB d'une
capacité de 2 téra-octets, un commutateur, d'un
switch-écran, de deux écrans plats (cf Figure 4.1) ?. Toutes les
prises du cabinet sont ondulées.
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