III - INTERET DE L'ETUDE
L'intérêt de notre étude se décline
en trois modalités: académique, scientifique et professionnel.
Au plan académique, l'étude
vise la satisfaction des exigences universitaires pour l'obtention d'un Master
en relations internationales, option sécurité internationale : la
soutenance publique d'un mémoire sur un thème donné. En
effet, parallèlement à nos études à l'Ecole
Internationale des Forces de Sécurité de Yaoundé
(EIFORCES), nous nous sommes inscrits à l'Institut des Relations
Internationales du Cameroun (IRIC). Cette étude est donc le couronnement
de notre séjour dans cette institution.
Au plan scientifique, l'étude est une
contribution à la réflexion sur la police communautaire au
Cameroun. Nous avons en effet été frappés, pendant nos
recherches, par le contraste entre l'abondance internationale de la
documentation sur la question et sa rareté au plan national. C'est le
lieu pour nous d'émettre le voeu que notre modeste travail aiguise la
curiosité des chercheurs pour l'approfondissement de l'analyse de ce
thème sécuritaire dans notre pays en vue de son
opérationnalisation poussée.
Au plan professionnel, notre étude est
une invite des autorités de la Sûreté Nationale à
donner une égale importance à la police communautaire autant que
celle qui est actuellement accordée à la police d'ordre. Cette
préoccupation nous hante depuis notre séjour au Darfour, entre le
07 novembre 2006 et le 11 mai 2009, dans le cadre des opérations de
maintien de la paix dans cette région du Soudan. En effet, membre
successif de la Mission de l'Union Africaine au Soudan (AMIS) et de la Mission
des Nations Unies et de l'Union Africaine au Darfour, nous avons
été fascinés par la mise en oeuvre de l'approche
communautaire avec sa coproduction de la sécurité, l'immersion
dans la société... Lentement, le rêve de voir cette
approche suffisamment internalisée dans notre pays s'est
développé et s'est cristallisé. Cette étude est
donc une tribune supplémentaire pour nous, pour une plaidoirie en vue
d'une plus grande intégration de l'approche communautaire dans les
activités de la Sûreté Nationale.
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IV - LA REVUE DE LA LITTERATURE
Elle est thématique par souci, autant que possible,
d'exhaustivité des idées sur la question au contraire de
l'approche par auteur qui nous semble limitative. Au terme de nos lectures,
nous sommes parvenus au constat selon lequel les préoccupations des
auteurs sur la police communautaire - en dépit des variances
liées, entre autres, à la géographie physique et humaine -
se recoupaient. Ces préoccupations, de manière
schématique, tournent autour de la description de l'environnement
sécuritaire qui précède l'adoption de l'approche de police
communautaire, les origines de ce modèle et ses principes, ses
stratégies et modes d'action, ses formes et ses acteurs, les obstacles
à son implantation et ses limites.
IV-1-Description de l'environnement sécuritaire
pré-police communautaire
C'est un environnement marqué par la
désuétude du modèle sécuritaire en vigueur,
généralement la police d'ordre. Il lui est reproché, entre
autres, de privilégier la sécurité des institutions du
pays et de ceux qui les incarnent au détriment de celle des populations
; de se borner à appliquer aveuglement les lois et règlements ;
de faire exclusivement une formulation institutionnelle de la politique
sécuritaire ; de ne pas à rendre compte de son
efficacité... Cette attitude de la police d'ordre la rend très
répressive, l'éloigne de la société qu'elle est
censée servir, engendre une augmentation de la criminalité et
développe le sentiment d'insécurité. Les auteurs que nous
avons lus s'accordent sur cette description.
Décrivant l'environnement pré-police
communautaire en France, Caroline Ober déclare : « Toutefois,
malgré les efforts entrepris par les autorités publiques, le taux
de croissance de l'offre publique de sécurité ne réussit
guère à rattraper celui, bien supérieur, de la demande.
D'une part, on observa une augmentation quantitative et qualitative de la
délinquance urbaine et acquisitive. D'autre part, de nouveaux
comportements répréhensibles, les incivilités, apparurent
au fil des années. Des dégradations en tout genre, des agressions
verbales, des menaces ou même des violences légères
pourrissaient le quotidien d'autrui. Ces « mini infractions »
n'étant, jusqu'alors réprimées, elles créaient un
sentiment d'impunité chez l'auteur et une exaspération de la part
de ceux qui en étaient victimes. Aussi, la nécessité de
s'adapter à un nouveau paysage de l'insécurité s'imposait,
le but étant d'apporter une réponse préventive et durable,
plutôt qu'une réponse à postériori et ponctuelle.
»1.
1 Ober, 2002, p.
8.
10
Dans la même optique, la monographie du ministère
américain de la Justice affirme que «Policing strategies that
worked in the past are not always effective today. The desired goal, an
enhanced sense of safety, security, and well-being, has not been achieved.
Practitioners agree that there is a pressing need for innovation to curb the
crises in many communities. Both the level and nature of crime in this country
and the changing character of American communities are causing police to seek
more effective methods. Many urban communities are experiencing serious
problems with illegal drugs, gang violence, murders, muggings, and burglaries.
Suburban and rural communities have not escaped unscathed. They are also noting
increases in crime and disorder. »1.
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