PARAGRAPHE 2: Une coproduction de la
sécurité
Dans la quasi-totalité des pays, un constat se
dégage : « Il est maintenant admis que la police et la justice
ne peuvent plus, à elles seules, arriver à réduire et
à prévenir la criminalité,
1 Ntuda Ebode, 2006, p. 116.
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mais que la sécurité publique en tant que
bien collectif interpelle tous les intervenants sociaux et économiques.
»1.
Ce constat comporte à la fois l'échec de la
police d'ordre voire de la justice qui ont cru que la sécurité
pouvait être leur affaire exclusive et l'espoir qu'apporte l'approche
communautaire en faisant de la sécurité un bien collectif dont la
production nécessite la participation de tous. Autrement dit, la
sécurité devrait être coproduite. Cette coproduction peut
se manifester par au moins trois modalités : la réflexion
collective sur les problèmes de sécurité,
l'exécution commune des mesures adoptées contre
l'insécurité et le partage par tous de la responsabilité
des résultats obtenus.
La réflexion signifie que l'insécurité se
pose dans une communauté donnée dont les acteurs
représentatifs et constitutifs, sous l'encadrement d'un professionnel de
sécurité, peuvent se réunir pour prendre acte des
manifestations, les analyser en tenant compte de leur environnement
sociogéographique et formuler des solutions possibles susceptibles de
résorber durablement le mal. L'approche canadienne de police
communautaire affirme à ce propos que « Cette méthode
d'intervention doit être appliquée par un partenariat
stratégique avec les membres de la communauté pour trouver des
solutions permanentes aux problèmes de sécurité publique
en s'attaquant à leurs causes réelles.»2.
A titre d'illustration, dans une école maternelle
où, à la sortie, on enregistre des égarements d'enfants
qui ne regagnent pas leur domicile ; des inconnus qui viennent
récupérer les bambins qui ne sont pas les leurs pour des
directions insoupçonnées... ; la communauté
éducative, constituée à titre indicatif, des parents
d'élèves, des responsables de l'établissement, des
représentants des force de maintien de l'ordre... n'a qu'à se
réunir et après l'analyse du problème, à proposer
soit l'achat d'un véhicule de ramassage et de dépôt ; soit
une liste de personnes et leurs coordonnées par enfant,
habilitées à chercher les enfants à leur sortie sur
présentation d'une pièce d'identité ; pour voir le
problème s'estomper.
De même, l'exécution collective des mesures de
sécurité prises intègre la définition du rôle
de chaque acteur de la communauté, la circulation de l'information, la
participation aux sessions de formation et de sensibilisation, la mise en
oeuvre des résolutions prises par la majorité...A ce sujet, la
politique canadienne approuve qu' « Ainsi, agir sur le sentiment
de
1 Service de la Prévention de la
Criminalité en coll. Avec le CIPC, 2000, p. 16.
2 Voir supra, p.9.
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sécurité de la communauté interpelle
fortement non seulement les organisations policières, mais
également les gouvernements, les municipalités, les organisations
communautaires et les citoyens, afin que tous ces partenaires contribuent
à la sécurité publique dans le cadre de leurs
activités respectives. »1.
Le dernier point de la coproduction et non des moindres est le
partage par tous de la responsabilité des résultats obtenus. Cela
suppose une détermination préalable des critères de
succès ou d'échec ; une évaluation objective et froide des
résultats auxquels on est parvenus et, si nécessaire, des
réajustements adéquats, la finalité étant, à
défaut d'éradiquer le problème, du moins le
résoudre durablement en s'attaquant à ses causes. Dans tous les
cas, les acteurs partageront ensemble soit la joie de la réussite, soit
l'amertume des limites de la solution retenue et appliquée. C'est la
même attitude qui caractérise ces acteurs pour le cas de la
réduction de la criminalité, un autre avantage de la police
communautaire.
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