PARAGRAPHE II : Un personnel souvent
peu qualifie
Au cours de la décennie écoulée, les
Etats africains ont fait de grands efforts pour assurer la charge capitale de
promouvoir la paix et de défendre la sécurité du
continent. Ils sont conscients des graves dangers qui menacent leur
sécurité et de la réticence du conseil de
sécurité des Nations Unies à se retrouver impliqué
dans des conflits d'une rare violence. Des organisations africaines comme
l'organisation de l'Unité Africaine (O.U.A), la Communauté
Economique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (C.E.D.E.A.O) et la
Communauté de Développement de l'Afrique Australe (S.A.D.C)
s'efforcent d'acquérir davantage d'autonomie pour ce qui est de faire
face aux conflits armés et aux urgences humanitaires complexes
auxquelles elles se retrouvent confrontées. Toutefois, il convient de
relever que, malgré cette volonté affirmée de ces
organisations régionales et sous-régionale, les échecs
sont le plus souvent de mise.
Dans le cadre de ce paragraphe, il sera plus question du
personnel que fait usage les organisations africaines telles que l'UA, la
C.E.D.E.A.O, la Société Civile ou autres personnes intervenant
dans la zone Ouest-africaine de conflits. Depuis sa création en 1990, la
C.E.D.E.A.O est intervenue militairement dans trois conflits
sous-régionaux par le biais de son organe de défense dont
l'E.C.O.M.O.G. Il s'agit d'abord du Libéria, puis en Sierra Léone
et, tout récemment, en Guinée-Bissau. Elle entend
également se déployer au Nord du Mali pour faire face aux
combattants d'an sardine. Ces actions sous-régionale ont parfois ou
même toujours été limitées du fait de la
qualité des personnes employées sur le terrain.
Il est à préciser que les armées de la
C.E.D.E.A.O ont le plus souvent une formation qui ne répond pas
forcément aux normes internationales de défenses. Cette «
analphabétisme » professionnelle des armées de la
C.E.D.E.A.O ou de l'UA est dans une large mesure source d'inefficacité
et d'échecs des initiatives de paix entreprises dans la zone Ouest du
continent africain. Chacune de ses interventions a presque
présenté des aspects troublants et a eu d'inquiétantes
incidences. L'E.C.O.M.O.G a exacerbé la guerre civile au Libéria
et son intervention dans ce pays a contribué au déclenchement de
la guerre civile en Sierra Léone.
Les faiblesses de la force en Sierra Léone ont aussi
entrainé la prolongation du conflit. Il s'en suit que les
difficultés qui font échoué l'organisation
sous-régionale dans ses actions sur le terrain sont en grande en rapport
avec les moyens humains employés.
Dans les armées de l'E.C.O.M.O.G, rares sont les pays
qui envoient un personnel de « haute gamme », c'est-à-dire un
personnel militaire dont les expertises professionnelles sont de mises. Les
conflits d'une telle atrocité tels qu'on les observe dans la zone
Ouest-africaine, nécessitent dans leurs solutions, un personnel
militaire qualifié, détenteur de connaissances ou de formation
suffisante pour assurer les services nécessaires. Ces services sont
relatifs parfois à l'organisation technique, à la communication,
aux services médicaux ou au contrôle des mouvements sur le
terrain.
Il faut aussi souligner que l'organisation de la C.E.D.E.A.O
n'emploie pas seulement un personnel militaire. Dans ses initiatives de paix,
l'organisation emploie aussi un personnel civil. En général ce
personnel civil est souvent victime de son manque de
professionnalisme34. Suite à la vague de
libéralisation des régimes politiques de la fin du siècle
dernier, nombre de peuples africains, bénéficiant
désormais d'une plus grande marge de manoeuvre en termes de
libertés publiques, et de plus d'assurances en matière de droits
humains, ont vu leurs conditions changer. Après avoir été
les « masses militantes » de « grands partis
nationaux », ils se son transformés en citoyens agissants
d'espaces publics nouveaux.
Comme justement, depuis une dizaine d'années,
l'essentiel des théâtres de violence sur le continent africain
relève beaucoup plus de ces « situations spécifiques
» que de cas d'école, il est très difficile de leur
trouver des solutions à la fois efficaces et viables. Face à ce
déficit de capacité, les instances compétentes semblent
avoir compris que les accords de paix établis uniquement entre chefs
rebelles et chefs de gouvernements ne pouvaient aboutir que très
difficilement à une paix durable. Et, de plus en plus, on s'oriente vers
des modes participatifs de gestion des crises, dont la
spécificité est d'intégrer dans les processus de paix,
ceux que les signataires de l'Accord de Lusaka, sur le conflit en
République Démocratique du Congo, appellent « les forces
vives de la nation »35.
La présente étude est une analyse du rôle
des sociétés civiles africaines dans la gestion des crises
violentes en Afrique de l'Ouest, une sous-région qui illustre bien les
nouveaux rapports de tension et de collaboration existant entre l'Etat et la
société civile dans les domaines de la gestion de conflits
ouvertement ou potentiellement violents36.
34 Document des Nations Unies A/50/711 et
S/1995/911, Amélioration de la capacité de prévention des
conflits et du maintien de la paix en Afrique : Rapport du Secrétaire
général, 1er novembre 1995
35 Cf. l'Accord de désengagement et
de redéploiement des forces en République Démocratique du
Congo, signé le 10 juillet 1999 à Lusaka (Zambie), entre le
gouvernement et des groupes rebelles congolais.
En Afrique de l'Ouest, comme partout ailleurs, les contours de
la société civile au sein de la communauté politique
globale demeurent imprécis. Cette imprécision
génère souvent bien des confusions à l'origine de conflits
parfois encore plus compliqués que ceux-là mêmes que
société civile et Etat ont l'ambition de résoudre en
partenariat. Dans le souci de mieux circonscrire la division du travail de paix
entre la société civile et les autres acteurs et institutions de
l'Etat, des efforts sont faits localement afin d'élaborer une
définition endogène de la société civile, qui
tienne compte de l'environnement et de la nature des crises à
gérer.
Toutefois, au-delà de cette manifestation
d'intérêt, sont évoquées les implications d'ordre
éthique et politique, pas toujours évidentes et pas
nécessairement vertueuses, de l'émergence de la
société civile au coeur de la problématique de la
résolution des conflits en Afrique de l'Ouest. Ceci parfois fait nourrir
des stigmates autour de ces organes de la société civile qui font
le plus souvent échouer leurs missions de paix et de
sécurité dans la partie Ouest-africaine et même dans
d'autres zones du continent. On assiste aussi en Afrique en
général, et en Afrique de l'Ouest en particulier, à un
handicap financier et matériel des organisations africaines dont nous
ferons état ci-dessous.
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